FONDATION

TE L A VILLE DFIENR1CIiEMONT

Au ni iiien iù s uvi.it le vu siècle. la terre siju- veraine le Boishelle. appartenait à la maison de Nevers, ijont le titulaire était alors Charles de Gonzague, espèce dextravagan t, tourmenté par lesprit daventures, et luit des prodigues les plus renommés dans un temps si ter tue. en notal.ulit.es de ce genre. Un exemple à lappui ultiia député par Henri TV vers le pape Léon XI, nou- vellement assis sur la chaire de saint Pierre, pour le fé- liciter ï loccasion de soit il déploya dans cette mission un faste inouï, se faisant suivre dune iiombreuse troupe équipée ili, ses frais, et dont les che- vaux étaient ferrés dargent, tandis que le sien propre avait été garni de fers dor.

(1) Ce travail esi emprunté à une histoire inédite de la principauté souveraine de j3(,isl,(lle.Ijenrichemont, dont lauteur prépuC en ce moment les éléments de publication.

DUIL U me nt

I Iil II Il 0000005562381 I4)NDATION DE LA V1L1i ) 11EN11ïLii I•:M0NT

A pareil commerce on ne seiiricliit guère, (t. Charles de Uollzague. qui léprouvai, ses iJépcns, fut obligé rie Lltliv moillulie avec -is- truies.

11 V VL j t cii ( 1i1 iii(iit oit Iiciue, un li eu MLI iii (Ï- tual. lxacte contre-partie du P récédent. simple cadet de lionne maison, il avait su faire une merveilleuse for- tune en attachant sa vie de lionne heure à celle du roi, de iiianièue à poursuivre avec liii les éLtpes successives de sa prospérité croisante. (irce à des services continus K réels et à une fidélité qui ne se démentit guère ja- mais, il avait pu, en même temps quil travaillait au bien de sa patrie et de son maure, satisfaire sa vanité et 5O]1 ambition, qui saccrurent singuiièrerncnt lin t etli ut 411 mémo eiiijis0 1 11f , le soiii Soit bien-être.

Cet homme cétait Maximilien de Béthune, marquis de Rosny, qui allait devenir et est resté célèbre comme duc de uHy. et Lige tie la seconde famille le ce nom.

Le marquis de Rosny pmtteiilait se rattacher A la grande famille des Béthune, issus des comtes de Flan- dre. es ennemis lui conlestaient cette origine et ne voulaient voir en lui que le (lesceIIiantdun parvenu naguère sorti «i cosse, sous le nom primitif de Bélun, et cette opmion a trouvé créance chez quelques-uns le nos meilleurs historiens. Ou sait comment, sans fortune et grâce, à lamitié du Béarnais, auquel il avait été atta- clié de J)bnnc heure, et (but il fut pendant de longues en même temps que le coreligionnaire, le fidèle servant, il parvint à la plus liante situation quil cAL jamais pu rêver. Au moment où nons en sommes arri- FONDATION DE LA VILLE DlIENRICIIEMONT vés, en 1603. la faveur royale avait fait de itu Ftin des grands peisoiltiages de lFtat et le pulls iiflue t. t la cour (1).

Sou ciactère aidant, ullv en avait conen une in- croyable vaiiih[, la vanilé du parvenu. Cependant, si glorieux quil Pt être, cétait aussi, et avant tout, Ufl homme 1 n s j tif; et en faisant les affaires [le son maître il navait l itégligé le faire les siennes, et. ses nom- 1Jt(LL lit 1Cs. t la. Piliinirt desquels se rattachaient, des charges grassement productives, saccompagnaient en- core dautres avantages non moins solides, je veux par- ler des grands biens quil étalait fastueusement au soleil. Avec le temps, il avait. fait [le son pauvre petit patri- moine une des plus riches maisons de . En ces

(I) Ce ne fut cependant quau mois de février de lannée suivante (1 6O6quil retut le complément de cotte faveur par le titre de duc et pair. Voici alors quelle était au complet la liste, un peu ion- guette des qualités dont il se plut alors à décorer len-1ile de ses actes seigneuriaux et rogner « Maximilien de Béthune, chevalier; due de Sully pair de Franco prince souverain de Boishelie ; niai- (JUÎS de Rosny; comte de Dourdan; sire dOrval, Montrond et Suint- Amand baron tllpinetiiI, liruéres, Villebon, la Chapelle-dAngil- ion. Novion, ltaiirv et ilonhin conseiller du roi en tous ses con- seils ; capitaine-lieutenant de deux cents hommes darmes dordon- nance du roi sous le titre de la Reine; grand-maître et capitaine général dc lartillerie; granit voyer (le France; surintendant des finances, fortifications et leitimnemits dit gouverneur et lieute- nant général polir Sa Majesté en Poitou, Clmhelleraudois et Loudu- lois; gouverneur de Mantes et. de Jargeau; entin, capitaine du château de la Bastille (le Pari» —i Iél;is rien nest jamais complet en ce monde, Uli tille manquait à la krieiIu ; Sullv, (l ui ne voulut jamais abdiquer iherésie, ne 1)111 être dueuro (les ordres (lu roi. Cette mauvaise langue de Tallemant (les prétend laux quil y suppléait, au moins chez lui, cmi sentourant le cou dune grosse chaîne, rappelant le collier de la Toison-dOr, et à laquelle pendait un grand médaillon à leffigie, dHenri IV. o 6 FONDATION 1)E LA VILLE DHENRICFtE,IOT

derniers temps surtout, mie suite dacquisitions, f;d tes certainement en vue dun but létermjné 1 avait réuni en ses mains la plus forte partie de lantique héritage des euly, primitifs seigneurs de Boishelle. Lérection en duclié-paiiie de la terre de Sully, faite son profit en 16U6, iie fut que laboutissement dun plan quil dut Caresser clii Imioment peut-être où laffermissement de la fortune de son maîtreaurait désormais la sienne.

Évidemment. il soiieait à faire renaître pour son compte lantique splendeur des Seuly. Quel avenir à ce moment nentrevoyait-il pas? Seul il eût lu le dire, mais, commue maint grand ambitieux que lhistoire si- gnale, ne rêvait-il i° 1)1115 pquun duché? Pour y arriver il in pouvaitmieux faire que claciuérir la principauté, jusqualors obscure, de J3oisbelle. Son fLiieseiait en- suite duser des JriViléges singuliers el, séculairemeiit reconnus de ce petit royaume. en les afflumissant en- core parla protection il! luiri l\ (t l 1endanI niCm ait si 1)055111.

Nous Savuis à quel poilu, les 11uire lu dite de Noyers étaient embarrassées et clans quels besoins dargent il se trouvait. sullv avait (lé commencé dexécuter son projet, en lui venant vit le par lacquisition de ses l couines lu Bouibomniaj s:cétait bien 1)1115 que dache- ter B dsIalle. Si cette principauté etait beaucoup pour 5uuiiy. et comme enclave ChUe es terres de la Chapelle et des Ai-,. et commue immstiumnent. ltVoral)IC à ses l)ItIels de grandeur Lu nue. dont ojje pouvait devenir le pivot, elle ne joitiva i t guère 1)résthIteI ce caractère pour U0II - zague, qui ny voyait sans doute en somme qu une sou- verainet sans valeur réelle et sans revenu effectif. FONDATION DE IA viLti: DIIE nlCl[FMONT

Rosny neut donc pas gialtr[peine à amener le duc au but de ses désirs, CI L il y eut entente parful(les e deux parts [mur que la propriété cliangeàt de maître.

Par contrat du 31 août I 603. ecu M Guillari mL Bontemps, notaires au t 3iitelet le Paris , le prince Charles de (junzaue et le (3èves. duc de Niverinds et fletiielois, prince de Mautmue, etc., vendait à Maxiini- lien de Béthune, marquis de lny, n la terre et sei- gneurie ou souveaieto de Boislielle , consistant en bourg et villages, terres labourables, lirez, bois, étangs, cens et rentes, vassaux et arrière-vassaux, et en toute justice et autres appartenances et dépendances géné- ralement quelconques de ladite terre , seigneurie ou souveraineté de Boishelle , assise piês du pays de Beiy... etc. (1). u Ladite vente faite moyennant la somme de 42,000 livres tournois (2).

Ji indste sur cc quil me semble y avoir mie caractéristique dans cette désignation venant dc Sully, qui u cIt dicter la formule du contrat, lorsque lon rapproche cc détail des projets davenir prétés it lacquéreur. 2) Il y a lieu dobserver que ce chiffre est en désaccord dc 16,000 livres avec le témoignage de Sulh lui-méfie. On lit dans les Royales fEcononmies dEs&l (U part., eh. LI) n Pins, par eontract avec M. de Nevers, vous acheptastes les lerres de Montioret, t leu- richemont et la Chapelle lu somme de 210,000 livres, as( avoir ?dontrond, luOOumI liv.; la Chapelle, 56,1k,11) liv.; et I curicliemont, i,.(JO liv.; cy : 21 tON N) Ii tes. » Saily ajoute (1ull pava la terre du Châtelet oiivxi liv., celle (le Culant 88.001) liv., et celle de liaugy 12O,oHJ livres. Est-eu. au fit, dc cet écart dans les chiffres ci-dessus mentionnes qual.mii1mait la inn1iOn suivante qui e lit à la col. U17 de 1 latent am/e (les L€tees de \ eeeïs, par lalbi de Mérulle « liéces pour le duc de Nevers avec le duc mie Sully, u &nUC de la le:ioa doutçc-iaoitid du jmISte prix de la souveraineté de Boisbellu et des terres de Saint-Amand-Montrond, la Chapelle et autres, yen- 8 FONDATION DE LA VILLE DitERIr11EMONT

Avec les plans dambition que nous supposons au nouveau maure de Boisbelle, appuyé, Comme il létait, par le roi, on conçoit quil nen laissa pas chômer les privilèges; et son premier soin fut den assurer la con- (lrrnatioii par lettres royaux ; cétait, pour ainsi dire, se mettre en possession de Boishelic, en faisant acte de seigneur. Mais un soin Plus grave ne levait pas tarder t le préoccuper, en prouvant, que le nouveau souverain, (lui prenait soit titre au sérieux, contrairement à ce quavaient fait ses P rédécesseurs, songeait i entourer sa principauté dune sollicitude toute particulière, parce suivant toute apparence . elle devait tenir une inonde place fins sa vie.

Nous arrivons im tti t qui aSsiiie titie place jj part il SUIIY parmi toits les seigneurs de 11ishelle, t celui par lequel il y a laissé trace indélébile dh son passage, à la fondation dune capitale dans sa souveraineté,

Un beau jour de lannée 1 6U), une activité inaccou- tumée vint semparer des solitudes de Boisbelle : après nombre dallées et venues diiteoninis dans le bourg. on vit sur le plateau qui le dominait faire des soudages et l)la11tt1 des piquets, Connue si un camp allait sy éta- blit. Un surcroît (le l opUlatin de près lun millier dou- vriers do toute sorte vint sinstaller autour du bourg (le Boisbelle et sur maint autre poii L (le la principauté. llientt les ]iùclierons se répandirent dans les futaies du dues au due 1c Sullv? » - ( ) IL poinTait induire de cette note que lu réclamation 1111 (lIC dc Nevvrs aurait eu pour résultat le versement postérieurement luit par Sullv dune soulte coiuplérnciitaire du prix réclamé. FONDATION DE LA VILLE DHENRICHEMONT 9 voisinage, et la hache se mit à al)attrc avec furie les clnbie.s et les cliàtaigniers séculaires, tant et si bien que ce qui étidt bois devint brande. En rnme temps,

Bâtir mie ville dembléee et sur terrain neuf, surtout au beau milieu dun vieux pays comme la France, nest pas une conception qui vienne à lesprit de tout le inumide, ni qui se rencontre tous les jours: il faut pi:mr cela, outre lheure propice, ui homme Spécialement doué et posé, et chez cet homme une idée. Lhomme, nous le connaissons; mais quelle put être Fidée à la- quelle il obéissait en simprovisant ainsi fondateur de ville?

Sans doute lactivité de S ully aimait à senplover en bâtisses qui flattaient ses goCits eu le délassant de ses lourds travaux dadministrateur et dhomme dftat. Bàtir fut une de ses passions et il donna libre carrière . cet engouement, lorsque sa retraite de la cour le laissa plus maître dordonner lemploi de ses loisirs. 011 conte que, durant les longues années quil vécut encore, il construisit entièrement les chàteaux (le Rosny et de Montrond, quil termina celui de Villebon, qui nétait que commencé, aurtnenta et embellit, ceux de hi. Cha- pelle-rlAngillon et de Montigny, dota les Aix dun hôtel-dieu, en méme temps dans plusieurs de ces lcalités, il établissait (les jardins magnifiques, dont il 10 FONDATION DE LA VILLE DJIENRICJIEMO!

avait, la passion, non moins que celle des beaux édifices. Mais lamour de la imoonnerie, si 11h11 quon le suppose poussé. lIC justifie pasà lui seul lidée dédifier une ville (91f ière lun coup. Il a dci y avoir chez celui qui en a C()llcU cl o essayé deu réaliser le plan cette secrète IeIl sée dont nous parlions plus I tant. et quil est de notre inléllèt de. rechercher. Nous devons nous demander ce que rêvait, ce quespérait Sully quand il jetait les fondements de sa ville neuve.

Le ministre dIlenr j IV. ne loublions pas, était cloué dune incommensurable vanité arrivé pénibletiiemit et de peu à une grande position, on peut le supposer dé- voré du secret désir datteindre encore plus haut, aussi haut que possible, dégaler dans une certaine mesure ces grands seigneurs, les Mercoeur, les Bouillon, quil avait vu, non sans une secrète envie, étaler une morgue quasi royale dans des gouvernements presque iiidépen- Jants, et en affectant des allures qui rappelaient les puissants barons feudataires de lancienne France. Na- vait-il pas eu, pour son compte, la chance dacquérir à beaux deniers une Souveraineté? Ce nétait guère plus (luIiml t il i, il est vrai pourquoi nen ferait-il pas une réalité? Je ne prétends i° sans doute avancer quil ait nourri des pensées de rébellion. Il savait bien que tant que son maître vivrait la méfiance de ce dernier ne lui permettrait pas des manifestations pouvant faire le moindre échec à léclat de la couronne. Un jour, le prenant à part, le Béarnais ne lui avait-il l ias insinué ceci en manière davertissement : (( Ne vous attendez point que je vous baille de grandes villes et. fortes places, par le moyeu desquelles et de votre grand crédit FONDATION DE LA VILLE DlIENRIC1IEM0L n et capacité. vousjoignant ou aux huguenots ou à dan- tres factions, VOUS puissiez VOUS passer de inoy, voire troubler le repos de mou esprit et la paix de mon royaume quand 1)01! vous sembleroil C V(UX doue, en VOUS faisant des biens et des honneurs qui ne seront pas petits (je le vous promots ainsi et vous en donne ma foy et ma parole), ils soient n&uitmoinS tels quils dépendent toujours de ma bienveillance, et L1u1icelle venant à manquer ils lie puissent quelque esprit vous porter à me nuire, et inoy donner mauvais exemple aux miens (1)?.... o

Cest Sully lui-même qui nOUS a conservé ce souvenir dans ses Mémoires, et, en cette circonstance, il nest guère suspect. Pourquoi cette sortie tlu roi contre son fidèle ministre ? Avait-il doic cru \OiV se trahir chez lui le germe dambitieuses visées?

Quoi quil cii soit, le caractère de Sully et même sou intérêt lIC nous permettent guère de lui attribuer des vues contraires à la prospérité de celui quil avait ton- jours servi. Cependant le roi devait mourir UIi jour; il avait la Conscience de sa fin prochaine. Son serviteur, plus jeune que lui de quelques années, pouvait bien es- pérer de lui survivre. Il prévoyait que, le cas échéant, il ne resterait sans doute pas aux affaires. Personne ne laimait à la cour : le nouveau roi, sous linfluence de la reine mère et des courtisans, ne manquerait pas de le remplacer par quelque ministre plus jeune et plus sym- pathique. Donc il était prudent de se préparer davance

(1) OEcowmies royales, (1 part., chap. xi. 12 FONDATION DE LA VILLFJ DIrENRICJIEIONT

unee retraite en la faisant aussi hello que possible. Cest alors quo devait, intervenir un rêve davenir où lorgueil outré de. (t.te i tturo amie de la piaffe et de lapparat se donnait libre carrière.

Quelle l )erspect ive pour cet amoureux de LrlOIiOJe Dans cette grande province du l3crrv où, depuis les temps Carlovingiens, nulle grande famille ne setait éle- vée en face de la Couronne, il avait à lui un royaume tout créé, avec ses immunités, ses priviléges, sa consti- tution politique; il ne sagissait plus que de faire vivre, Pour ainsi dire, celte ombre dempire; cétait à quoi il allait semployer. Et, tout dabord, il sy co]lstrujcajt une capitale toute neuve, en terrain libre, par consé- quent lion à lui, et, comme il disait en reproduisant une vieille formule du pasé, « près du pays (Je llerrv.» Là, il trônerait sur des sujets que. nouveau Rornulus, il apPellerait de partout, avec ses gardes, ses officiers. son conseil Souverain et tout lattirail (10 pompe (IuLt il ai- mait à sentourer chez lui, et quil augmenterait à celte occasion.

Songeait-il en outre, comme on la dit, à en faire un des boulevards, la capi laie peut-être du vrote s tantisine eu France? Ça été le senhiment dune partie au moins de ses contemporains, et ses ennemis se sont fait une arme contre lui de cette occupation.

On fit circuler, on adressa même au roi, qui sen amusa, un pasquil ou pamphlet assez piquant sous b titre de PRIVILIGES, LIBEIITEZ ET FRANChISES DE LA VILLE CAPITALE DE Boisum.: LE.E. - « l)ieu, disait-on, sera servy en ladite ville à la fantaisie du prince dicelle, FONDATION DE LA VILLE DIIENRICHEM0xT 11 nonnb4ant. le concile de Trente, auquel quant t présent sera dcrogé. - La foy et les Cérénim jes de la primitive Eglise seront bamiies COmme surannées, ne servant quà tenir le p(t1pie ci humeur et u]Jéissance, vices contraires à la réthrination du temps qui court.....- Tous juifs, musulmans, anabaptistes, martinisi es (1) zinIiens, puritains, calvinistes, et autres gens dee heu y seront admis avec la liberté de conscience, tant nécessaire pour maintenir au moiide lindévotion et lirréligion.... - Tous mariages se feront à ladite ville à discrétion, même se pourront consommer par procureurs sans procura- tion... - Lhistoire fantasque du président de Thon, corrigée par Casauhon, y sera autorisée, et si autrement est dit à Rimne, sera appelé comme «ahu ...- Le bon- homme Des(lom.oafJemeaf (2, fondateur de ladite ville, sera à perpétuité honore en icelle... - Ladite ville ser- vira de passage aux paquets qui seront portez de Genève à la Rochelle pour la tranquillité de la Iraiice... et pour mémoire éternelle de lheureue édification de la- (lite ville, Sera gravée sur le fronton dicelle cette. hono- rable inscription

Par laudace dun Isossois Poussé dun insolent mérite, Lette ville a été construite Du siulg le plus pu des Franois (3). »

(1)Dlseiples do Martin Luther. (2) 11 faut par ce mot entendre soit, comme ledit M. de Raynal, les indeziuntés réglées par Sully au profit de ceux qui avaient souf- fert do la guerre civile, et non sans quil lui en rest1t entre les mains quelque part à titre de commission, soit les « Pots (le Vin » dont parle Tallemant des lléaux, et que. suivant la mode (lu temps, il aurait pereus eomznc gratifications, lors des traités passés par lui avec les fermiers de la taille et des autres impôts. (3) De Raynal, Histoire de Berry, X, 4. F0NDA10N DE LA VILLE DIIENIUCHEMONT

Mais mi paruphiet est plus souvent une oeuvre le haine quuti monument de justice. Lattachement, de u1ly pour la re1iiun dans laquelle il était, né, et à la- quelle, sil faut len croire, il aurait été jusquà sacrifier pouri ni et ses enfants lavenir le pins brillant quil pût concevoir cet attachement ne dépassa jamais les bornes dune sage et prudente politique, à ce poiti t que ses co- religioiniaiies les plus ardents laccusaienl de I i&leur, P1(iS(h11( de trahison.

Cela rend déjà douteux le J)iojet quil aurait pu con- CeV4)ir de songer à se faire jamais le chef dune armée proteslante en lutte avec le Il 10 fInit P perdre (le vue dailleurs quil construisait (111 vivan t et avec lagrément dllenri 1V. Or, nous avons exposé comment A nétait pas dans les intentions de celui-ci, qui avait tant eu à son lfrir de lesprit réfractaire de laristocratie. (le donner à aucun de ses membres, celui-là fût-il son meilleur ami, des moyensdagir CoflIr( liii.

Avec un esprit que le lutes épreuves du J)assé avion t rendu si soupçoniieux, nième envers ceux dont il devait se croire le plus sûr, le roi naurait pu voir dun bon oeil mie entreprise qui, dans un temps quelconque, eût été de nature à compromettre cette paix à lintérieur si chè- rerneiit acquise et ipil considérait comme le plus grand hiienfai t de son règne or, il semble quune forteresse de huguenots (le plus et au contre du royaume neût Pas été de nature à le rassurer en ce sens.

Et lail leurs, si telle eût été lintention dede ully, à quoi bon se forger les embarras inouïs damie ville à créer FONDATION DE Li VILLE DIIENRICHIMONT de toutes 1èces, dans la situation la plus ini.rate du moll(le. loin (le matériaux (14 SOh(lO construction, dont la P1iVatiOIl 110 pouvait que ralentir lachèvement que le fondateur devait avoir à coeur de lifiter le plus 1oSsihle, et, de plus, dans une telle assiette que sa salubrité était plus garantie que sa sécurité, les travaux de défense quon aurait pu songer à y établir nétant aidés ni par la proximité dun grand cours deau, ni par lescarpe- ment (les terrains ? Est-cc quil ne p ssé.dait pas dans le même pays des villes tout établies, dans une situation bien plus avantageuse pour la défense. avec forteresse centrale, et quil eût suffi (le compléter pour atteindre, le but quoit lui pt ? la (liapeIle-dAngillofl, par exemple, neût-elle pas cent fuis mieux fait laffaire (1) ?

Que SulIv vit clans Ilenrichemont un asile pour bon nombre de ses coreligionnaires, rien de plus accepta- ble; quil ait cru devoir, en raison du temps où il vivait, garnir sa ville de défenses, no fût-ce que pour parer à un coup de main, dans iiiie circonstance donnée, rien encore là que (le très-naturel mais ce quee sou maitre naurait pas souffert, et ce que lui-même, je pmse, ne (lut guère avoir en vue, cest que cette ville dasile fût une place-forte, une place le guerre. En effet, malgré ses tendances féodales. Sully était royaliste, il avait lui- même trop souflèrt de lanarchie pour ne pas la haïr et

(1) Le séjour de la Chapelle était un de ceux que Sull y affection- nait surtout. Après celui (le Viliebon où il rèsidaO six moi s, de lannée, cétait le château (Ut la chapelle quil visitait le plus vo- lontiers. Ii était là à trois licites seulement (lIICnriCilemoIIt et, pourtant., chose remarquable, ou ne voit pas, (l ue, à si courte dis- tance, il ait jamais poussé jusqua cette tlernire localité aucun souvenir du moins ne uous en est parvenu. 16 FONDATION nr LA VILLE DIIENRICIÎEMONT Songer jamais à pratiquer la rébellion. Ilenriclteinoiit, centre de révolte calviniste contre le trône, lui eût, je nen (bute pas, semblé un crime, une folie.

Malgré les préjugés du temps, lexpérience lui avait appris que cenest jamais pour le progrès et laméliora- tion de la société que cern ballent ceux tluisengagent sous la bannière religieuse, et que la civilisation na rien à gagner aux querelles soutenuesdomatiqws les- armes à la main, II avait assisté à la naissance du jé- suitisme, effro yable machine de guerre que lÏglise aux abois lançait contre la reven lication toujours plus pres- Saille de lesprit humain; il eu ivail suivi la marche avec inquiétude, et il en .\ ail, souffert pour son compte I mais faire battre lluEiielIots et, jesiiitee et pour cela se créer un camp à Boishelle, cétait u te idée telle que sa prudence et sa sagesse len rendaient inca- pable; tel est du moins notre avis.

Dune, lotit en tenant de la tendance naturelle tjni devait porter Sully à heu accueillir ses coreligion- naires dans son nouveau domaine, et à leur y assurer nu refuge au beso in, ne serait-ce pas mieux recon- naître le caractère de lhomme que de croire kt un projet, dicté par (les Mentions paciliques plut(,)[. (IUC ilesLiné à rappeler des temps de troubles, qui devaient être pour Sully un sujet daversion ? Ne pourrait-ou pas (mime en prenant le huguenot comme un des éléments corisli-

1) le journal de LEstoile, sous la date de mai I(I 1, publie quà cette /poquo courut une caricature représentant Siilly en (iisgrftce pIt à se nover et cherchant à se sauver à laide de vessies que les jesuites essavajeflm. de crever. Le crayon complétait ainsi la satire dont nous avons cité des Çranients. FONDATION DE LA VILLE DIIENRICHEIoNT 17 tiitifs du plan que le ministre dIlenri IV comptait peut- élue réaliser avec cet aide, de ce quon pourrait appeler son et im A .cadia ego), lie pourrait-ou admettre quil tendait à traduire en fait, et dans la mesure que le temps et la situLtiwi coinpartaient, lidéal dun roitelet semi- agricole, dun souverain du labourage ?

Sully iitait pas seulement, quon sen souvienne, un ministre de la guerre, cétait aussi un économiste et un grand partisan des améliorations rurales. Soit fameux adage « Pàturage et Ia]xurae sont les deux mamelles de. IEtat » en font foi au besoin.Dans certaine IIICSULO, il létait également de lin lut rie, pourvu que cc lie fût jus de lindustrie de luxe pourquoi nadmettrait-ou pas quil clirclta surtout à créer un centre agricole et industriel? La cuiitrée (le Boishelle est comme un éperon de la Hdogue aviuiçaiit dans les plaines calcaires clii I11 ; pourquoi ny aurait-il pas eu là, au clet)utdu XVIIC siècle, et dans la lutine lue lépoque semblait au- li user, comme un premierpremier essai damélioration de la Sologne?

Et même laccueil fut par le fondateur aux calvinistes dans ce centre neût-il jss eu celte signification, da Iiiomiieiit pie lidée de lutte et de guerre cii Ot éloignée? Quon noublie pas que, à lheure oit cela se passait, les réformés représentaient ail fond (la question de culte mise de clé). dans les villes, la bourgeoisie industrielle et travailleuse, et dans les campagnes cet, idéal dadmi- iiistratioiu agricole progressive (jU j semble avoir été si bien clatis les idées de Sullv.

En somme, jaimerais assez à voir dans ce wystéieux 18 FONDATION DE LA VILLE DIIENRIC1IEMONT

projet un de ces rêves quee lhomme souvent caresse toute sa vie, avec lespoir plus ou moins fondé de lac- complir un jour, - ce quil lui est rarement accordé de faire, - quelque chose dans le genre de ce que lhistoire littéraire de la Perse raconte de lauteur du s/m/i Vaine/i, travaillant jlisqulà son extrême vieillesse à doter son pays du poime (jul fai t sa gloire, avec lambition secrète de consacrer le. produit de ce travail à une entreprise de fertilisai ion, et niuuranL au moment daccomplir loeuvre quil avait Si longtemps caressée clans sa J)CIISéC.

Que Sully eût associé Ilenri IV à cette idée, rien de surprenant en cela : le Béarnais était homme à le com- prendre en cette circonstance comme en tant dautres. Il se pourrait même à la rigueur que le choix de lan- cienne terre de Boilielle neût pas été indifférent au roi, comme lui rappelant une tradition de famille (1). Mais on comprend aussi lue ce fut une pensée entre eux deux seuls et à laquelle ne furent intéressés aucun des grands personnage.s du temps, cc qui neût pas manqué davoir lieu sil se fût agi là dun projet tout politique.

(1 Jeanue dAlbret., mère du roi, reconnaissait pour trisaïeul Jean dAlbret, ce frère dArmand Armanjeli qui, au xv siècle, (Ions lu partage de la succession paternelle. liôdta de la terre de Boisbelle. Il y avait donc là pour le maître du Sully un souvenir qui le touchait personnellement. Il naurait dépendu 011e dun léger changement dans lordre dhérédité pour 1 1110 cette terre fût plutôt à Jean quà Armanjeu dAlbret, auquel cas elle ne fût peut-être jamais sortie de la maison, en sort e qui li!iii,i de lléarn leût apportée parmi ses propres en montant sur le trône. Dans cc cas- 15. Boisbelle neût été réuni à la couronne (IUC près dc deux siècles plus tard quil le fui, et liumichemout neût. Lrès-jaobalileincnt pas été fondé. ,1l quoi tiennent les destinées dun pays FONDATION DE LA VILLE I)HENRICHEMONT 19

Dans toute cette question il ne faut pas perdre de vue de quel alnalgame élait fouiné lesprit de Sully. Si égaré quon le 5111)1)05e par s on rêve, ce serait se tromper que de yoir vii lui un dormeur éveillé et surtout un no- vateur. On ne doit pas oublier quen somme le passé (pourvu quil ftt mêlé de quelque chimère de làge dor féodal) avait toutes ses l)11é1er1cs. Ln esprit fin la justeunciil couuparé à tatou lauicieu liolir la tournure des idées, et unôtue dii caractère (

Voilà lliounune, et cet homme, il se comprend mieux quand on le place dans son milieu. Les vicissitudes (le la société perunetteui t il, certaiues dates dapprécier plus Sj)éCialCInelit quà (lautres les faits et les idées (les temps écoulés. li se trouve quauj ntrlhui lune des préoccu- pation tic léconomie sucide se rencontre avec ce (lui

Iusait le souci de Sully. je \I ux parler du dépeuplement des campagnes au 1141lit des villes. « Sully , a dit un de ses ptflévriste.s. reLIrdtil (ollilliC un des principes du gouvernement économique de veiller à la diminution de

l) Cest dans un passage de S;uute-leuve que je veux transcrire ici, parce quil nie semble compléter naturellement le point de vue Sous le, luel jessaie de faire envisager mon héros. « Il est bien pour flous, dit le célèbre cru iquc, le rcprése.nl eut de la liante noblesse militaire (t rurale, niémiageant. et ad u iuil rani admirablement ses terres, b3li-ant et forlitiant ses cluiteaux, les embellissant, se promenant sar des terrasses ou daus dc longues allées de grands arbres, le long dun canal, les jours oà il ne se promène pas (le préférence dans les grandes halles pleines de canons qui étaient entre lArsenal et la lIaAtille ; et, le soir numne, quand il est aux leu ips et dans la I tanquitlilé. aimant à rentrer dans un chUeau Il ujuéde ix tourelles. coinuic létait la Bastille encore, ou Colutiic lait Son chiteau (le \ilhbon,e t à dormir derrière les fossés et Is ponts-levis. » (Voir leude consacrée u sully par Sitinle-licuve. (LuiS SCS Vuuluil(s ece8eries 1i

M 20 FONDATION DE LA VILLE DIIENRTCIIEMONT ces grandes masses (des villes) (1). » Elles lui parais- saient soutirer le meilleur des forces vives dii pays quelles épuisaient. a préoccupation était donc den- courager, eu vue (laméliorer lagriculture, 1( uple- meut des bourgs et des villages, quil préférait aux grandes villes. Dans ce but, il aurait voulu voir aussi la noblesse exploiter elle-même ses terres, sattacher aux travaux du sol et faire prospérer la richesse foncière du pays, qui y eût gagné non-seulement au point de vue de la production et de lai sance, mais aussi au point de vue de lit intérieure. Il faut avouer que cest là, cii tout cas, une politique autrement grande que la politi- que à la Louis XIV.

Qu y aurait-il détoiinant till e, lhomme en qui domi- naient ces idées eût essayé de préelier dexemple en - chant ï réaliser chez lui ce quil préconisait chez les autres? Sully vieillissait; il avait énormément agi et travaillé; il était à lâge où lon songe à se préparer sa retraite. Mais la retraite pour les hommes de cette trempe cest le travail sous une nouvelle forme, appro- Triée a un autre âge. llenrichemont, claiis sa iemisée, devait être loeuvre des derniers jours, et, si lon ré- duit son rêve à (les proportions raisonnables,i me sy voyait-il pas en songe et longtemps encore, sinon jus- quà la fin, Couvert par la protection de soitro yal ami, roi lui-même daims sa petite souveraiuieté, tranchant, taillant, légiférant, btissan Lse inant et plantant, doit- nant à cette aristocratie lui! uleute, travailleuse, gro- sière et néfaste de son temps, contre les mauvaises

(t) Voir 1h(oae de Slly, par Thomas, dans lédition de 1768, p. î3, FONDATION DE LA VILLE DHENRICHEMONT 21 intentions de laquelle il avait toujours lutté, lexemple souverain de ce que devait étre un seigneur en ses terres?

Loin de pouvoir poursuivre cet idéal, il lui fallut plus tard se dérober à ses ennemis parvenus ;t la faveur mais, eu 1608, on ne prévoyait pas leffroyable cata- strophe qui, à moins de deux ans de là, devait anéantir tant despérances ; et voilà sans doute pourquoi la fou- dation dHcniiclieinont fut décidée (1).

en Toutefois, et niénie restant dans cet ordre didées, il semble que le côLé chimérique de lentreprise sasso- cierait mal avec ce que lon contiait de lesprit positif du fondateur. Loin de voir en Sully un esprit à vastes conceptions, porté aux lirûjets hasardeux, ou est plus généralement tenté de chercher en lui lhomme essen- tiellement pratique, cil classant parmi ces iiilelli- gences dordre uii peu ,secondaire, utiles, précieuses inème par la nature de leurs facultés aux coeurs hardis

i, Il nest pout-ètre pas inutile de faire remarquer (l ue eIdVG (10 celte fondation est du mnie temps que limportant édit du mois de janvier 1lio, rendu au nom dIlenmi IV, muais sans doute sous linspiration de SuIly,pour le dcssùeliciiienl. des marais du royaume. Pour procurer à celte grande opération toutes les facilites dexéeu- Lion, en même temps que pour cil tous les résultats, le légis- lateur offrait aux entrepreneurs les plus grands avantages parti- culiers, et en outre setbrçait de faire des terrains envahis sur les eaux autant de nouveaux centres de population, en sengageant a y batir des villages et promettant dy accorder à ceux quil y appe- lait des concessions de foires, des exelimptions dimpôts et des pri- vilèges. - e semble-t-il pas [ac dans ces mesures on retrouve corunie uu couiplémnent ou un germe de la pensée qui donna nais- sauce à kienrichemont? FONDATION DE LA VILLE 1iHENRICIIEMOXT

(t cntreprenaiits, qui se les attachent et se déchargent voloiitiers sur eux du souci et hi iracws des opérations de détail. Bons comptables cos Mécènes mettent de lordre dans la maison le leur maître comme Tans les affaires de lÏ1at, dont ils apurent les comptes Ions ad- miuistrateur, ils organisent et surveillent les services domestiques, comme ceux du ro yaume. Quant aux pro- jets lointains, aux plans plus ou moins réalisables, sils Y P0111 0111 part cest plutôt à titre de freins que de p ro l uls eurs . imleuce est leur fort, et linitiative aveuutumeuse liC liguire pas en première ligue dans le rôle quils ont à jouer, Pour ceux mi ne voudraient voir que ce côté de lhomme. uiilv tue I lO se la guère au pretiiier a]jord comme uni iuis(ulr l Ufflopies : qui sait pourtant ce (1110 pelit 011 CO euir lui osprit (li ii Sort des gonds ? Lumnhit joli (t la vanité. but autre motif mis à part, ex- pliquent l)iII (l[5 eliÔes. ()ui Peltt (tre (loué de tout le bon sous possible et p01101 la 1 lickpe de lexpérience au complet , mais. 1 1111 1 1 JIl a lkesé sa \rjp àaider un 110111mo Tans la réaliatin dun réve qui Iirsl riun mois que laspiration au 1IôIle te Franco, on petit bien aussi avoir son rêve. sinon sa àjlie.

Et Imis cette fuilur desprit était-elle (IOIIC si Men clans la na tuute de utiv (juil iii tant haï ]il chimère ? Qui don (le lui 011 te soit maître Ciiiriut. dans (les proportions quon saccoude à eoiisidier. lu moins quant t lepoque, COiflflw Vraittieuit ulopijuies, le fameux plan des Etats- Unis 110ro l le, u juil linS a si comjlaisauurneuuIretracé laits ses Méiuuoir Nest-ce pas à lui quo géuièrtleuitnt on attrib(w I eté tout fantastique de ce plan ?Après tout, danscel J conception. le foiiuiatetui dlleui rie, lie munt 1rODAT1ON b LA VILLE DJIENBICIIEMONT .23 séloignait-il donc si fort des idées de son temps ? Ne ly auraient-elles pas pIutt porté? La mode, il tant bien le dire, était un peu de co côté, et lanibit kuse pré.kmfi i de Sully ne fût pas alors un fait en tièriuent isolé. On peut y retrouver un coin de cet esprit laventure qui posséda une grande partie des contemporaiiis de ce siècle agité. Sully trouvait donc à sautoriser en qiIelqiic sorte sur des analogies vivantes; et, pour nen citer quui OU deux exemples, je rappellerai que, presque coudurrem- ment à la fondation dIlenriclnnnont, Cicu-les de onza- gue, lancien seigneur de l3oisbelle, élevait sur les bords de la Mense, en sa qualité de duc du [ietliélois, la place qui, de son nom, fut nommée C/avledille, et que, quel -(,ticsaunées auparavant, Du Fay, petit-fils du chancelier de LIIipital, ayant été noinmné lieutenauit du roi à Quille- boeuf, avec ordre de le fortifier, pendant que le roi assié- geait Roueii, avait entouré le bourg de défenses en terre et lui avait, donné orgueilleusemneul le nom de Ville- Heuiou IIeiniq?aicil7e, ce. qui fut cause (lune disgrâce quil })1it tellement à coeur quil CII mourut, dit-ou. Le nom et la eli4ise nont-ils pu servir de modèles à Sully, ui était, lui, à couvert dune pareille dé- faveur?

1)autre part, que co soit lesprit de parti, la chimère du progrès ou lexcès dorgueil qui ont suggéré au fou- dateur dI leiiricheinoiit cette idée de CollstrLlilC une ville toutduuepièce, il faut rec.omniaitre que ce fait, signale que. le monde est entré dans une ère nouvelle. Les teiidanees de la société et du gouveriicmnent sont à la centralisation et à la bâtisse, commue aux temps de la l(onie impériale. Jamais un prince ni un seigneur du moyen âge ne se 23 FONDATION DE LA VILLE DHENRICiIEMONT fussent avisés de cela. Si la ttntaisie les prenait de gâ- cher le mortier OU deiiiassei les pierres, cétait POUF édifier un cliteau ou une église, et, tout au Plus , un bourg, à titre dannexe; mais faire une ville pour elle- même, cela rentrait dans un ordre de conceptions qui t.rancliaieid sur celles du inuiide féodal et prouvaient que Sully nétait rias seulemen t. lhomme des bastilles et des châteaux-forts.

En is"suimié. pour Se rendre bien compte Ile la dispo- sil.iiii oii était la Iiaiice au moment où celte entreprise se ftusait, noublions pas le double courant d(Ui animait les esprits ii cette époque, courant à la fois paciliiue et organisateur. (.ett e soif de repos et de jouissances, qui se manifeste I uj ours à la suite des grandes crises, Lisait alors revenir les lettres aux rêves de lâge dor (laits les m ycutions poétnities de l_4 .s/,ee, taudis quun génie phis essentiellement pratique encourageait le IflêIflC sentiment dans une direction favorable aux travaux de 1aricuIture et des arts, et donnait à la France le beau ]ivre dOlivier de serres. eu coiieiirrence avec les oeuvres de nos artistes du Louvre.

Deux tendances pareilles se imianifestaient, aussi paral- lèlement dans le sens organisateur, et Cela non-seule- ment en Fiance, mais en Angleterre et en Italie, car un sourd besoin damélioration se faisait partout sentir. Cris le domaine de la théorie plus on moins fantastique, Thomas _\Ioru avait déjà repris lessai de république de Platou en ip p à le moine Canipanella allait I ietttii li- miter pour aboutir en dernière anal y se à la conception sateittimie de lauteur du Télémaque. Ou pourrait com- prendre à la iigueur llenricliemoiit comme une sorte de FONDATION DE LÀ VILLE DHENIUC}TEMONT

Salente anticipée et avortée, et lon doit admettre que Ileuri TV, qui était au niveau de tous les besoins de son temps, nétait pas indifférent à celui-là.

II ne faut donc p tromper, si lidée de la fondation difenricliernont germa primitivement dans la tète de ully, ce fut en réalité une coneeptioii du temps, dont la réalisation na été possible que parce quelle flattait quelque penchant de celui qui alors régnait en France. Ainsi sexpliquerait, tout autre motif excepté dailleurs, que le protecteur, sinon linstigateur de loeuvre une fois tombé, loeuvre elle-même ait échoué, et que la construc- tion déjà avancée se soit trouvée suspendue pour nêtre plus reprise par la suite.

Mais sil peut y avoir incertitude sur les motifs qui dictèrent à Sully lentreprise de cette fondation, il ny a aucun doute sur les conditions dans lesquells elle se fit. « Le décembre I GOS, dit 1. de Raymial. au bourg de Boisbelle, en présence de lraiiois Le Maresclial sieur de Corliet, trésorier général des finances, que nous avons vu jouer un assez grand rôle à pendant

la Ligue. et de Pierre veiard, secrétaire de la clnrnbie du roi, il conclut un marché pour la construction de la nouvelle ville avec Hugues tosmer, entrepreneur du canal de Briare ; Jonas Robelin, maitre maçon de Paris; René Besnard et René Villette, marchands de Tours. Jai cette convention revêtue de la signature de Sully sous les veux, et certes il existe en Europe. blini lieu de villes ou (Te bourgades qui puissent ainsi montrer leurs titres dorigine (1). »

(1) Histoire (1?( Bsy. liv. X, chap 26 FONDATION DE LA VILLE DIIENRiCHEMONT

Depuis le jour où ces lignes furent écrites, ce titre est ciitré dans nos (iépdfs publics, où il naura plus à re- douter le sr caduc ties propriétés particulières, et il nuit s 1 jenflis de le repioluir dans liutériié le sa teneur l j

Le viit-liuitieme jour de décembre mil six cens. et lin ici, par (levant Sailluel ristoflc, notaire en la 4ouverai- flel (le Boisbelle, furent personhiellemeut establis Ilugues Cosnyer, entrepreneur du canal de Briare, demeurant à Paris, rue des Barres. parois Sainct.-Gervais, et Jouas Robelin, maistre masson. demeurai it audiet Paris , rue Chappon, paroisse Sainct-Nieolas-ie-Chani 1 . polir mix (t pour nue unoictyé, ( 1 , 1111v part: et Relit, Be-iiard, René VilcLL, uiiarchans, detneurans eu la ville (le Tours, pa-

(I) Le marché pour la construction dIlenriehemont a déjà été imprimé deux fois à notre connaissance : la première fois, en 1859, dans le nuniro 2. page I, de ta Revue ceatrete des arts eîi proeiizce, 1)111 il ha hou épliét t11C I LiI na eoinplé t te trois livraisons. Cette reproduction, enta liée de quelq ues erreursde transcription, était due aux SOInS de M. de Girardot. La seconde, qui tiate dc 1863. se trouve i la suite de lIlistûi,t, du ;o,L/auaie de lJoisfelle. dAyuié Cé- cyl elle u éle faite daprès titie copie horriblement fa [ive et si- guée A- hauariou, sous-inspecteur tics forêts. {1e dernier tenait la ittiitiiie du sieur Josepli de Vaihly, dlItnricltemont, entre les mains duquel (les circonstances inconnues lavaient amenée. Le copiste en question obtint sans doute de garder.iginal. car, vers 1$40, il était en la possession dun autre Pan ou, juge de paix à Itenri- chemont, qui le communiquait à M. dc Ha-nal, pour quil sen ai- dât dans la confection du son histoire, En I8tl, ce contrat fut enfin aux rrtIiiv(s titi (awr. où il eut partie dune liasse consa- crée à Boisbe1le-lIenri] Leu lui i, sous la cote I. ct récemment oriutée dun petit nombre de lticecs, paves de la4to-da-ft qui, en 1793. consuma les archives de la principauté. Cette connaissance, toujours rare, de lodsséc dun titre hi s torique, est une particula- rité à ajouter à celles qui distinguent celui-ci. FONDATION DE LA VILLE IÙIENRT(,ItEM I )NT 27 roisse Saiucte-Croix ; Georgos Boisnyer, marchant., de- meurait a Oiléans paroisse Saiuct-Pierie-la-Chaiitelle, et Glaude Allaite, marchant, (letneluant a Àiuboisc es- tans tous (le 1(r5(1iLen celle (L Souveruneté dc belle, aussi pour cuix et. POUP laultre iuoictyé. daultre part, et chascuu des susuoiiuiiez pour leur (I. inoietvé lesquels chaseun «cuix seul et vont le tout, sans division de parties ne de biens et lun pour laullre, ont l)l OflLY et se sont par ces présenter obligez vers Monseigneur le duc de Sullv, pair. grand vo yer, grand maist.re et cap- pitaine général (le lartillerye et canaux de France, tant pqqr luy que puni ceuix quil luy plaira itoiniflel. présent, stipullant et acceptant, de faiie bien et,. deuerneut les ouvrages et besongues cy-aprôs déclarées en la ville diIENRYG!IEMflNT, en cette dicte Souveraineté de Bois- belle, quentend taire mondiet seigneur duc de SulI,v

« premièvement, la clo.lure de ladicte ville. (P li ttula (le cliaseiut costé deux cens cinquante-six loisrs de long (le mijiaille. de telle haulteur, profondeur et espoisseur quil luy plaira, qui seront faicts de bons cailloux et chaux et sable, fors que les portaux et enc.oigl)eUreS, cano- nvères et talluz (lu desSOul)S des ponts -levis seront laids de pierre (le taille, dont sera. l(a.Y( à raison de dix-sept H,,,, tournois la toise cube, laiit plein que \uide et en cas que moud jet Seigneur vueille quo les paleinens soient (le brique, cii sera payé dix . huict livres pour chacune toise cube - Pics, laire les fo5sez tout autour de lad. ville, de telle profondeur et largeur quil plaira à moud. Seigneur, et porter toute la terre derrière icelles murailles pour faire ung rempart en forme de levée, et encore faire porter toute la terre, dont sera payé à raison de trente sols tournois pour chascune toise cube (le terre à oster, k la charge aussi que les susdicts entrepreneurs employeront les terres quils feront tirer des foudetnens 28 FONDATION DE LA VILLE DIIENRICHEMONT cl caves des maisons et antres endroiets à lapplanisse- ment de la ville, laquelle ils réunyront; en sorte que lon y pourra donner après toutes les pentes nécessaires pour lesgont de canes.— Pies, liire clans lad. closture une Eglize, itng Temple, ung Collège, seize corps de logis, une listel1erie et une halle, dont les murs, pends et pi- gnons auront trois pieds (lespoisseur par le fondement jusques au rez (les terres et le surplus deux pieds jusques à leur haul leur, le tout fairE de cailloux à chaux et sable, fors le dessoubs des poulties, qui seront tous (le grandes briques et du nouvea il du sieur Cosnver, les pa- remens desd. murs (Jili seront du costé (le dehors cm- belliz de grands pillastres de brique, comme aussi les poiles, fenestres et entablemns garnis de briques suy- vont le plan qui (, il baillé, et les coings et portaux de-,(I. Eglise, Temple. Collège ct corps de logis seront de pierre de taille, et les huisserves, croisées, lucarnes dcsd. logis, vitres desd.glise, Temple et Collège seront de briques garniz de crocJctt.es de pierrede taille pour por- Ici les fermetures, à rai-son de six livres chascune toise carrée sans retour. Et où mond. Seigneur vouidroit (JUC les murs desd. Esglize, Temple et Collège eussent PlUS despcsseur que ceulx cy-dessus, sera payé à la mmc raison, - Pins, faire les voultes des caves et cavaulx lesd. logis à six livres eliascuiie toise carrée ; et I)OUI les terres et vuidauges quil conviendra osier desd. caves seront payées à raison de trente sols chascune toise cube litée et ostéc. —Pins, faire les murs de refan, cheinynées, carrelage, murs ne closture à paremelis de brique comme dessus pour le mesme prix de six livres chascune toise carrée. Et pour le regard (les cloisons se toizeront deux toizes pour une, en fournissant par les entrepreneurs snsd. tant de bois que de toute aultre matière; et oultre, iront toutes les aul Ires murailles de closture ttaut Pour basse court et boutique que descurye et aultres logis, FONDATION DE LA VILLE 1)HENRICIIEIONT 29

revenant à deux pieds par en bas et dix-huiet poulces par en hanit, les fenestres et poiles garnies dun bord de brique seulement , comme aussi les enlablernens des murailles, à raison le tout de quatre livres dix sols la toise.— Plus, faire toutes les charpenteries desd. Eglize, logis, granges, escuryes-, halle, ponts-levis, au prix de cent cinquante livres le cent employé, à toiser suivsnt la coustunie de Paris. - Plus, faire toutes les couver- tures dardoise rousse-noire quil conviendra sur les bas- timens cy-dessus, à sept livres la toise carrée. - Plus, faire toutes les couvertures de Luille quil conviendra èsd. logis, collège, halle, esc.urves et granges, pour le prix de quatre livres la toise cariée. Faire toutes les ferrures des cheminées, corbeaux quil conviendra èsd. logis pour lier et porter lesd. cheminées et sablières, pour le prix de deux sols six deniers la livre. - Plus, faire tous les pavez quil conviendra dans lad, ville et advenues (Ficelle et cours dcsd. logis, de pavé callol de cinq à six poulces de haulteur, à raison de quarentc sols la toise carrée. Et où mond. Seigneur ou aultre quil lui playra vouldroient laire bastir plus grande quantité de logis que ceulx cy- dessus, led. entrepreneurs seront tenuz faire lesd. basti- mens à la raison desd. logis cv-dessus, et neantmoings ne sera pinys à aucune personne (le bastir ou faire bastir en lad. ville et faulxhouigs quau préallahie lesd. logis cy-dessus ne soient parachevés. Pour faire lesquels ouvrages cy-dessus, lesd. entrepreneurs fourniront de tons matériaux et (devront) rendre la place nette.— Plus, feront les fouis, halles et logis des briquetiers dans len- clos de lad, ville, sil plaist il Seigneur; pour les- quels leur a esté donné et payé par le sieur dEscures la somme de trois mil livres en espèces de pièces de seize sols, dont ils se tiennent contens. Et oultre a esté payé pal advance pal lcd. dEscures, ausd. Besnard, Villette, lioisnier et Mlaire, pour ayder à achepter les matériaux, 30 FONDATION DE LA VILLE DITENRICIIEMONT la somme de dix mille livres tournois, dont paieilleineut ils se tiennent contetis, et rendront lad. hesongiie bien faicte et parfaicte ded;tn s le jour et feste (Le Toussainet mil six CCUS unZe. Et leur sera pave le prix desd. ou rages en travaillant fin (le hesougne lin de payement, et après 1)OflflC visitation cL toizage «icelle, le tout soubs le boit et vo1wit dudict Seigneur, et a ce tenir et effectuer, etc. Obligcaii s eulx. leurs biens meubles et im meubles et advenir, inermes paremlirisonnenient et détention de leurs personhies, savuir est lesd. Cosnyer et flohelin solidairement pour la inoictié, et lesd. B es uard. \riIl (41e Boisnver et Allaire aussi solidairement Coifliite dessus pour laid Ire rnoicfté : rcnOnçans aux béiiéflces (le division, ordre (h draL (le discussion et fidéjiission. Prome(.tans, etc. Faiet au hoiiir de I;olic Le Souveiaiiich" (le Boishelle, au logis dhonorable hoiiunc M° François Boju, reeepveur (leS lailles et aides dit pats (le Berry; pr(sens nobles hounnes Franeovs Leiiiaresciial, conseiller dir ro y et tré- sorier général des finances ; sieur (le Gorbel,demeurant en la ville (le Bourges, et M Pierre Everard, secrétaire de la chalnl)re (lu Bo y , tLemeuraii au ch;tstel (le Bang-y. tes- moings. Suivent les signatures de : MXIMI LIEN 11E BhTIh( L, L1I.1iEse1IAI,, COSNIEII. J. 1IOIIEI.IN, AI.1AIRE 3 VILLEIT L, R. BESNARD, BOES1Eu1, P. EvEu.-iw cl CiusTolLE, 110- taire.

La première pieiie, (lit M. de I(a nal, cornplétaii lc renseignements pIéce(leInIIlcut fournis par lui (1),

1) Hie(oire du Bei, liv. X. chap. r.. FONDATION DE JA VILLE DIIENRICITEMONT 31 fut. pos& le 13 avril 1609, au logis de M. I )escures. in- tendant des turcies et levées des rivières de Loire. CIer et Allier, et qui semble avoir été e.lmré par Sully de la direction de ces mijioitaitts travaux l ). Ce logis était sur la grande place, à laquelle on donna le noin de. place de Bétliune. Les quatre portes de la ville recuretit les iioins de la reine et des jel1tie princes, porte Marie, porte I)aupllilie. porte-- dOrléans et dAii joli. Oit (lit quau-de.ssu- (10 la principale entrée on avail lee projet

il) Parmi les autres personnages dont le flOu figure en cette circonstance. il faut reinarquci Pierre Èveraril ou Evrard. qui LV est qualifié secrétaire de la chambre du roi Cétait salis doute lingé- nieur de ce nom. Picard de naissance, que Sully sétait attaché, et i laide duquel il essaya de former nuc école dingénieurs fiançais, (lui pût lutter contre les ingénieurs tic I lollande et dItalie. Li lui avait confié loeuvre qui devait être lepiuis accomplie par Vauiluan, celle de la défense de nos frontières par un ensmhle de furtiilca- lions utilitaires. Les rcistres paroissiaux (le Boishelle, à la claie de I li 12, le qualifient, « secrétaire do la chnubre du roy et fusant les affaires de Mgr le due tic Seully, souverain (i l Eruuicliemont et. de Boisbelle. » 1)aut res titres remplacent cette derniere qualité par celle de « capitaine de l3aug,v, lu chapelle et Boisitc]lc. » Pins tard. il est dit « commissaire de lartillerie de Fiance. » Nous lavons vu, à jopos de la question du fiant-salé, au chapitre pièce- dent, intervenant comme facloteai du duc auprés du grenier de Sancerie, et lacte de fondation dI Lunrichemont. nous le montre ré- sidant au château de ]laugy, dans une des principales terres de Suliy , mais celle peut-être quil visitait le moins, et Oit il lui fallait comme surveillant LUI autre lui-même. Pierre lveiaid était-ii pro- testant? Je lignore. mais son tus (si cette qualification luit convient toutefois). Jauq tics Evtard, ne létait pis. puisque nous le retrou- vons reprèseiitant. en 16i0 Sully au liaptèmne de la première cloche du léglise dl leu ri 1 ici non L. Je ne terminerai pas celte note. déjà longue, sans siguateç le nom do « M. Aibre, lung des entrepre- neurs dEnrichemont, s que je relève sur le registre des actes (le baptémeî de la paroisse de Boisbelle pour 1601-1611. 32 FONDATION DE LA VILLE DIIENRICIIEMONT de graver sur une table de marbre la pompeuse inscrip- tion suivaiite

LAN Ji(jO DE LÀ MORT D UN SEUL POUR LE SALUT DE TOUS, LE xx in: RÈGNE PLUS FLEURISSANT DE IIENRY IV Dl: NOM. MONARQUE DES FRANÇOYS, ROY DES BATAILLES, TOUJOURS AUGUSTE ET VICTORIEUX, P1RE ET RESTAURATEUR DE IESIÀT EN FRANCE ET DE TA PAIX AU MONDE, AU TROISIÈME MOIS DE lAN DONT IF. NOM i:si SACRE A SA MIMOIRE. MAXIMILIEN DE Bt::THUNE, DUC DE SULLY, MARQUIS DE Rosx y , SIRE D RVAI., PRINCE SOUVERAIN DE B0ISPET,, lAIR ET GRAND MAISTRE DES ARMEES ETT1IPdSUR DE FRANGE, ÂPRES TRENTE ANNÉES DE SERVICES RENDUS A SON ROY ET A SA PAIRIE EN TOUTES LES PLUS IMPORTANTES OCCURRENCES DE PAIX ET DE GUERRE, (OM1iII DHON- NEUR ET ni: GLOIRE POUR AVOIR SECONDI TES PLUS HAUTES INTENTIONS DE SON GINIIlEUX MAISTRE, FAIT PROSP1RER SES AFFAIRES , JIANNY LA NIC:ESSITI RESTAIIL LORDRE. LA PAIX ET LABONDANCE, JOUR MMOIRR A LA 1 1 OSTEIIITE DE CHOSES SI AUGUSTES, A BASTY LES SOLIDES FONDE!IENS Di.: CESTE VILLE DE I 1ENRIMO1, DONT LA 1e ILICI1I: DOIT ESTRE i:i: p.- NELLE, PUISQUEN SON FRONT RELUIT RI EN SES PORTI - QUES EST FONI)1E LÀ GLOIRE DU MONAIJQU E, LHONNÇ:UR DES RÈGNES, LESPOIR DES FRANÇOYS ET LESIITE DES HOMMES.

Henrichemont f1015 montre SiI1Of 10 seul, au moins un des rares exomplis en Occident dune ville construite daprès un système (lellsenlble 1)eImfl1ttaiIt lemploi dun alignement strictement régulier et luniformité générale (les constructiotis. Pour rencontrer lanalogue, en de- hors des villes modernes de lAmérique du Nord, il fau- FONDATION DE LA VILLE DHENRICIIEMONT 33 drait sans doute remonter jusquà ces types célèbres quoffraient quelques villes légendaires de lantiquité orientale, telles que la Babylone de Sémiramis et, sui- vant, toute apparence, la Thèbes aux cent portes de lÉgypte.

Une ville se compose. matériellement de deux élé- ments distincts et -coni1)lémenta)res lun de lautre : les blimenis, isolés ou groupés, et les intervalles libres qui les séparent, ou rues. Lorsque se construisirent les premières cités, comme ce fut peu à peu et sous le ré- gime dune nécessité qui imposait léconomie de lespace et, par suite, lentassement comme loi de sécurité, il y eut des maisons saccumulant contre des maisons, mais pas de rues proprement dites. Toute ville ou bourgade fut en même temps forteresse et repaire, cest-à-dire, plus ou moins, mm cloaque. Plus tard, la marche de la civilisati ii aidant, il ne sagit plus seulement (le sabri- ter et de se garantir contre [ennemi ou létran ger, k la sûreté de la vie on soccupa de joindre le confort; on voulut de lair pour la poitrine, des lignes pour la vue, alors on ouvrit des rues à t ravers lamas (les habitations.

I es grands despotismes asiatiques en avaient offert des exemples, en quoi ils furent imités par le césarisme romain. La Renaissance, qui se faisait honneur de re- mettre cmi lumière les lois et les habitudes de la société antique, ensevelie sous la lave boueuse du moyen \ge, fit (le celte condiliomi lui les principes de son architec- ture urbaine, et on la vit, simposer dautant plus par la suite que, le pouvoir royal devenait I)1.1s centralisateur et plus fort.. Lorsque Ileuri IV, vainqueur de lanarchie O413ATI0N DE LA VILLE DI1ENRlC11EMOT

des ligueurs, se fut assis solidement sur le trône quil venait de coliquéril, la forme des villes correctement alignées et percées triompha définitivement., et Ilenri- éhemont en fut lexpression la plus saisissante.

Ily a dailleurs une coïncidence fort signiticalive entre le plan de la ville que fondait Sully et celui de la place de France, (lue le roi et lui avaieiit en 1608. comploté de bâtir à Paris. Cette place devait compter soixante- douze toises en carié; être entourée de palais uniformes, et lon devait y accéder par huit rues de six toises de large chacune, et portant les noms dautant de pro- vinces. Cest de lexécution de ce plan que sortit, sous le règne suivant, la place dite place Royale (1).

(J) Voir la note de la page 86, tome V. des Ilémoires de SuVy, édition in-12 de 1767, par labbé de Lécluse, et Poirson, Histoire dIIe.ot IF, tonte III. - Lidéal auquel Sully se chargeait de don- net une réalité était (tans lait. pourrait-on dire, à cette époque, niais il ne.4 peut-être pas inutile tic rapprocher plus spécialement de son projet celui (fun homme de génie. son contemporain et son coreligionnaire et (lui na pas, jimagine, été sans influence sur lexecution que reç ut sa conception. Il sagit dun plan de onstruc- lions developpe dans la (roidcme partie (Je louvrage que Beimtrd Palissy publia en 1563. sous lu titre Recepte Véritable par laquelle tes hommes de la 1"rancc pourront appremha à multiplier et augmenter leurs thréscns. Le projet en question y occupe tout le troisième livre, sous le titre ,Jardiu délecta fjle. Dans la pensée de lauteur, il se serait proposé dériger cette plaisante retraite afin den user « comme dune cité de ]cfugC, pour me retirer, dit-il, ès jours périlleux et mauvais, et ce afin du fuir les iniquilcz cl malices des hommes, pour servir Dieu en pute liberté. » - Comparer éga- lement un autre projet détaillé dans lu livre suivant du même ou- vrage. et où, sous le titre lifte de forteresse, lingénieux et inventif Palissy expose un plan dc ville forte quadrangulaire, dont le type strictement inatlieneitiquc lait involontairement penser eu plus duit Point à notre Henrichernont, FONDATION DE LA VILLE D}IENRICHEMONT 35

La forme adoptée pour Ilenrichernont est donc signa- létique de lépoque où elle se manifesta ; mais ce quil faut noter dans le plan de sa construction. cest lextrême sobriété dce détails en matière de luxe; on reconnaît là un peu la sécheresse calviniste, qui ne sacrifie guère à la fioriture. Aussi, p°" appuyer ce que nous disons ici, il nest peut-èfte pas sans intérêt de mettre en présence de ce grand pro et de bâtisse léloge que font de son au- leur les secrétaires auxquels il donne la parole dans ses Roq/es (Ecollo./ies (lESttt. Cest à lendroit où ses deux panégyristes domestiques entreprennent de chan- ter ses vertus et qualités en détail et, pour ainsi dire, toir articles. Lii mi de ces passages ils lui affirment « que vous mie vous estes jamais 1aisé transporter aux inondanitez et vanitex des grandes et magnifiques structimrs t. la mode, hastimens, parcs, vergers et jardi- images, remplis de toutes choses rares et curieuses, à eslever p y ramides, colomnes, galeries, portiques, lu- carnes, cheminée s . cufaistemens, plomberies, frisures, moulures, graveures. sculptures, statues, testes anti- que, métlales, tableaux et autres ouvrages de grands prix, tout cela doré, diapré, peint et enriclmy à la mode, t desquels la valeur ne consiste quen lopinion des in ins s;ie (I

prendre h. dis la lettre. y iL. (1ni ne uvèlt pas un autiste. Sans doute ici SulIx se calomnie 1111 peu à dessein, et cest bien évidemment une boutade dirigée par lui contre lintroduction des goûts (le lltaIi, chers aux Valois, et que li présence sur le tri de

I; iIé4é.7/reoit Œvo)eo;îtieg royal dE/, I1 Parti, ch. ti. 36 FONDATON DE LA VILLE DJIENRICHEMONT

Marie de Médicis ne pouvait quencourager. Elle nous édifie néanmoins sur un côté de sou caractère. Ainsi cet homme, qui a tant construit et tant encouragé lart en ce sens, quon ne lui parle pas des trop grandes déli- catesses de cet art, de toutes les voluptés luxueuses qui caressent loeil, loreille et la pensée, de ces fleurs poétiques de lesprit dont Florence et Venise avaient enseigné, le culte à la France; son puritanisme ny voulait voir que sentimentalités amollissantes, frivo- lités iiidigiies et superfluilés coûteuses. Larchitecture toute nue lui suffira; il a rêvé la grandeur sans orne- ment.

Ce qui résulte de lt une fois de plus, cest (lue la con- struction dllenrichemont, si la vanité et le goût pour la htissc y eurent leur part, ne furent pas cependant une pure fantaisie dartiste, ce qui nous confirme dans le sentiment déjà émis sur la pensée utilitaire qui a dû présider à la conception de ce projet.

Le principe qui guida Sully dans le choix de la forme à donner à sa capitale détermina également la nature des matériaux quil y emploirait. En homme pratique, il prit ur les lieux les éléments nièmes de ses construc- tions. La pierre de taille y est en très-faible quantité, niais surtout la brique et le caillou lui servirent à coin- poser les murs. La pierre est rare dans la contrée dc Boisbelle : le sol sy compose dune argile fortement ê m lée de silex roulés ; cii quelques endroits cependant ciii rencontre des carrières dun grès ferrugineux, auquel sa couleur rougeàtre a fut donner le nom depieiie bure. Le lieu du Pré notamment (cet ancien centre de la FONDATION DE LA VILLE DIIENIUcHEMoNr 37

seigneurie) offre une carrière de cette iiature, dont les échantillons sont d une assez belle grosseur (est de la 4 111e furent extraits les blocs quon utilisa pour donner plus de solidité aux angles des maisons et former les montants (les liuisseiies. Lintervalle cii tut itmili soiI en cailloux, dont le sol ab)1111e et dont on use trénérale- ment ciicoic aujourdhui, soit cii Iz)ri u1es, (jiil seivireiit à constituer les pilastres et tes quelques motifs dorne- meiitatioii que le système de construction, autant (jLIC la rareté de la pierre, iie permettait pas de faire en une autre matière.

Lemploi de la brique était lii à sa place ; associé it celui du sable rouge du pays, il donna à la nouvelle cité laspect de ces villex ioi&yes dont la ologiie est parse- mée, et qui provient (le lemploi presque exclusif de ce genre de matériaux.

Oit prit dii reste un peu 1iartolt P0 accélérer la construction des édifices, sans doute bien lente au gré du fondateur. Un acte privé de lannée 16119 nous montre une pauvre feimiine de ht ville lIvoy-le-Pré, IIC pouvant entretenir sa maison, (lui I.I)lnl)ait (le vétusté., en vendre les matériaux c à ceuix (lui ont entre.prins de bastir la ville de Boisbelle (1). o

Ce ne fut pas la seule chose qullenriclie]nont (ITÏ- prulita à Ivoy, qui ne sen est pas relevé.

Quant au Lois, il lie manquait pas, on était en pleine ibrèt. Il existe au 1101(1 i le la ville, et à un kilomètre en-

(1) Arch. du Cher. (Fonds de SaiuiL-Su.Ipiec. Prieuré dlvoy. L. 7 C. 20.) 4 38 FONDATION DE LA VILLE I)IIENDICUEMONT viron de distance, une vaste étendue ile terrain, encore aujourdhui nomine la taille (les Poifeit u.i. bien quelle soit maintenant toute en culture. lti J 6t)I, cétait une belle fUaie, abondant en chênes inagni tiques. J a cou- struclion fut le signal de sa ruine ; les arbres sécul:(ires toln!)èlellt sous la hache puni se COu- vert iv en poutres et lorinci ces charpentes colossales qUun admire elieure dans les greniers de la. ville.

La tailleal ttue. il ne resta plus quune vaste, brande dont le sol rude et maigre appelait la main de lhomme Pour le ilielfrc. en valeur. Mais la population nétait pas CIICOFO assez dense i our e,saver de défricher tous les terrains (pli le demandaient. En attendant cette trans- formation, qui ne devut se produire que de nos jours, le duc les céla moyennant une faible redevance ou les ar- renta aux bal itants pJUF y mener pacager leurs bes- tiaux.

I lenuichernouf présente last cet dun qtiadilatme ré- gulier, dont les c"(f.es l inclinés de • 5 degré sur le méri- dien, mesurent chacun un développeiiieuit ([,environ cinq cents mètres. Le ceuitre cii est occupé par une grande place Ca née, très-exactement Croisée par deux larges voies qui see coupent t aigle droit, et. débouchent sur les fossés extérieurs, en traversant [flaire places externes qui fornuent. autant ]e. q//1Ptie-. Les quatre angles le la gruti.le place son t également ouverts par Iiatrc nitres rues de movvnuie larueur, parti itenient orientées, et qui ahoulissent UIX angles dc lenceinte, après avoir traversé chacune une petite place carrée et cii formant avec les quatre rrandes rues uuiie étoile huit rais. FONDATION DE LA VILLE DFIENRICHEMONT

Telle est la disposition générale de ce plan, tracée avec une régularité toute mathématique. Cette régula- rité se maintint dabord, parce quil fallait la permission de lautorité souveraine pour modifier en quoi que ce fût les anciens corps de logis et pavillons construits sur un plan uniforme. Mais, avec le temps, lobservation de cette règle finit par fléchir et les modifications de tout genre furent prises sans permission ou accordées sans difficulté par les autorités complaisantes. Les désordres qui durent être, même ici, le contre-coup fataldes grands événements politiques, comme la Fronde, ny contri- buèrent sans doute pas peu. Lincurie et lesprit de re- lâchement se mirent dans la police de la souveraineté, et légoïsme particulier eut beau jeu pour détruire peu a peu]ordonnance imposée à lorigine par lesprit (lu fondateur. Je vois, pal exemple, en 1707, un cabaretier, propriétaire dun (lesdes pavillons de la grande iflace, passer marché avec deux charpentiers pour Iàiie abaisser Je plusieurs pieds la charpente de son toit, avec autorisa- tion toutefois (1).

On était dailleurs à lépoque où le système de mutila- Lions prévalait. Huit ans auparavant, cul 699, le bailli dl lenricliemont lui-même, qui était alors le sieur Tho- mas de Boischantel, avait fait abattre, ou du moins abaisser et dénaturer toute une moitié du pavillon situé à lextrémité de la rue Marie et servant de grenier à sel (2). IYautre part, des ordonnances de police de 1770 nous apprennent qualois, et gràce au peu de soin quon

Minutes cia notaire Teillay, dans létude Aubrv, à ilenriehe- nient. 2) Minutes du notaire }3eaufrère. (Ibid.) FONDATION DE LA VILLE DHENIUCIIEMONT avait pris de conserver le plan primitif, les rues offraient en certains endroits le sixième seulement de la largeur quelles auraicuL (lit avoir (six pieds au lieu (le trente). Il est vrai ï cétait plutôt, dans les basses rues, et que ces derniers aligneineiits étaient en grande partie ceux des haies (le jardins qui, à cette époque, les bordaient pour la plupart. Ajoutons que les administrateurs actuels se montrent plus soucieux que leurs prédécesseurs de respecter le plan primitif.

Les travaux ayant été en grande partie suspendus à la mort dHenri IV, les remparts furent seulement dessi- ités et ne sont représentés que par un rossé avec con- tre.scarpe. Cette enceinte môme na peut-ôtre pas été ter- minée, ()il moins elle ii été en partie détruite et les fossés comblés ; celui du midi manque complétenient avec la plus grande partie des deux côtés adjacents. Aux trois autres angles étaient des espèces (le bastions, au- jourdhuidisj arus.

Les fossés Omit gardé (le leau ]usquà présent dans certaines I)urtiOfls. imolauuimnemit aux (ICIIX j)OifltS nommés FA bie,noi (t 10 iiOY aYa. Gm((1x.

Dès le siècle dernier, sinon plus tôt, les fossés, (but 11110 partie avaient été déjà J)IaILté.S darbres, furent, ar- rentés à divers particuliers. Ce fut suit ait le long de la route des Aix que cette aliénation se Iii. Ainsi le curé FI lemnieliemnont se vit concéder la. partie (f111 sappuyait sur coi te môme voie et put la joindre, aux jardins (lit pres1ytcie. Près de là. dès 1722. un cordier obtenait « une place et fossé ou éLoit cy-devamit mie tour dune FONDATION DE LA VILLE DIIENRIGJIEMONT 41 porte de ville, et, une trentaine dannées plus lard, le sieur .JuUien obtenait de combler le fossé derrière sa maison, au quartier des Boutiques, e comme ont fait précédemment ses voisins, o lit le titre (1).

Aujourdhui, ce qui subsiste de ces douves, au nord et à lest de la ville, sert de corderies comme par le Passé.

Dans lintérieur (le la ville, comme nous lavons (lit, deux systèmes (le rues, (le largeurs différentes, se croi- sent à angle droit, en rayonnant autour de la grande place carrée centrale, de manière à relier les angles et le milieu de chacun des côtés de cette place aux angles de lenceinte et au milieu (le chaque rempart, oit devait souvrir irne porte (le ville. Les quatre grandes rues, qui courent, deux du nord-ouest au sud-est et deux du nord-ouest au sud-ouest, rappellent par leurs dénomi- nations les personnes composant la famille royale sous Houri IV. Celle du sud-est a nom ue Daaphine, 011 mémoire du elaupliimi, plus tard Louis XII], qui, à lépo- iiie de la fondation dIlenrichemont, était à . é de huit ails (2). La rue Dauphine aboutit à la route des Aix- dAngillon.

(I) Ilenseignements puisés dans les minutes et titres judiciaires dIlenrichemont. (2) Louis XIII naquit à Fontainehleau le 26 septembre IGOI Cé- tait la consolidation (le la dynastie des Bourbons, aussi la person- balité (lu dauphin a-t-elle joué un Srantl rôle dans les dénomina- tions de la ville dilenric]Lelnout. Outre la rue Dauphine, la place à laquelle cette voie aboutit fut dite ue€,ter D itioiibiiè. et encore au siècle dernier, il y avait un hôtel à lenseigne du Dauphin. Peut- être était-ce lhôtellerie de fondation dont il est question dans le marché de construction de la ville, 42 FONDATION DE LA VILLE DI-IENRICHEMONT

La rue du nord-ouest prit le nom de rue Maiie, pour faire honneur à la reine Marie de Médicis ; elle se ter- mine aujourdhui par la route dIvoy-le-Pré.

Celle du nord-est sappelle rue (le Bol/dy/o!ple; cest où commence la route de . Nous avons vu dans M. de Raynal que le nom primitif de celte rue était rue dOiléa.os, titre du frère puîné clii dauphin (1). Le dé- nombrement de la population dI Ienrichelnollt, en date de 1707, que nous avons eu occasion de mentionner dans lintroduction , inscrit parmi les noms des rues de la ville celui de ((la rue dOrléans dicte Luxembourg . » Quant au nom actuel, il n dû être donné SOUS Louis xiv, dont le dauphin portait le titre de duc de Bourgogne.

Enfin, le nom (le rue dA njow (on dit plus communé- ment au lourdhui rue dJn-leïs) fut affecté à la voie qui aboutit à Achères. Cette désignation fui empruntée au titre qui distinguait le troisième fils dHenri IV et (Io Marie de Médicis (2).

Les rues intermédiaires ou rues daigles, plus étroites que les précédentes, sont désignées par le nom de leur orientation , chacune delles regardant un des quatre points cardinaux; il y a exception toutefois pour lest,

(1) ;lfonsiesr, duc dOrléan$, né à Fontainebleau, le 16 avril mort k Saint-Germain-en-Laye le 17 novembre 1611, sans avoir reçu do prénom. A sa mort, son titre passa au troisième lits dHenri IV. (2)Gaston-Jean-Baptiste, due dAnjou, né le 25 avril 1(;08 k F011- tainebleau. En 1611, k la mort de son frère, il hérita de ce titre et de celui de Mbnsieio. On ne sait que trop quel rôle a joué dans notre histoire ce triste personnage, digne fils de sa mère, et qui mourut à Blets en 16O. FONDATION DE LA VILLE 1)IIENIIICHEMONT où la rue nest encore que projetée, et doit. prlI1(l1e, (1IIaild elle sera exécutée, le 110111 (le rue de H sny.

A distance égaie des remparts et de la place centrale sont les quai ri petites rues traversières, parallèles aux- (lits remparts ainsi ([Caux côtés de la grande place. Elles forment 1111 quadrilatère dont les extrémités iCiicoiuiiiiit les rues danle quelles relient. Elles on t reeu éaIement des noiiis particuliers, dont lancienneté nest j as titi- jours garanhie. Une seule dentre elles porte 1111 flOIfl signalétique, cest celle qui va de la place de lhospice il. la rue Marie ; on la homme la ie (les Cette dénomination . empruntée à lancienne langue universitaire, et qui rappelle le co]lége des )uatre-Na- tions à Paris, indique quà cet endroit devaient sélever les bâtiments du collège dont il est fait mention dans le traité de fondation de la ville.

Oit f)eUt 5i4flaler encore dans cette catégorie la e des Soupiiw, qui iiiiit le quartier (les Boutitues au piai- tier I)auphiu ; cest le sentiment se glissant dan lhis- toire. Mais il est fort 1Jr1JLhle que telle de ces rues a changé le u on ibils le cours des temps : quelle est celle, par exemple et pour nen citer quwie,: . qui les titres du ièc1e dernier nomment la rue du LiO,/-dO, ? Un iiom dauberge évidemment h.

À leur aboutissement aux rues ilangle ces dernières voies rencontrent les petites places carre dont flous avons iauli précédemment et .jui sont : Uu I10I1Cl, la

(I) Une auher,.e de ce nom isLc actucileunt u Bourgogne, mais puttt-êttc a sitiluliOlI actuelle est-elle relativwnent récente. 44 FONDATION DE LA VILLE DIIEN1IIeHEMON[

Place Beii,7id; au levant, la place du Jfcio,t,i e, ou du M;uc]ié aux porcs, désignation qui sexplique delle- même; au eotie1tiit, la place de lIloxpeee, ainsi nomniée depuis la Inudalim assez réceiïte oit cet endroit dun hospice. mais qui auparaxant sappelait, je crois, comme la rue adjacente, place des Qaa(ie-atioas. Quant iL la place du midi, au lieu dit le quartier des Boni iques, ou, comme sexprime un acte de 1692, le quartier tics Petites boutiques, elle est encore à létat de, projet et doit prendre le nom de place Gabiielle.

Celle des deux grandes voies qui traverse liciiriclie- mont (lu iiurd-ouesi au sud-est (rues 1)auphine et Marie) aboutit, à la sortie de la première de ces rues, à un ter- tain libre, de fotine triangulaire, et dit place J)auphine, ou plutôt qîw/ie Iiijihi.t, nom quelle portait déjà au xvu siècle. A lextiémité opposée, cest-à-dire au bout (le la rue Marie, une autre place, dite place ilfaïie, doit faire Symétrie avec la précédente.

Entre la place Bernard et la rue Marie règne un grand mail carré, planté darbres et COflflU sous le IlOfli de .Jeu de Piune (1).

Au sud-est de la place Bernard souvre Iii place de la Mairie, agrandie aux dépens (le la halle, qui fut abattue pour permettre de construire lliôtel-de-yille

(I) En 1762, le bailli dI ientie]iemont, qui était alors le sieur Sou- but, fil renfermer du haies ce terrain et le fIl piauler darbres jusqualors il avait servi au pacage des bêles t laine durant les foires. et sans (bute aussi un peu le reste de lannée. (Journal de Teillay.) FONDATION DE LA VILLE oIIENIuCIIF:MÛNT actuel. (let éditice, qui ahrite à la fois les services de la justice de paix et de lédililé, et qui contient en outre une prison, fut élevé iminéliateineitl apris la démoli- lion de la halle. Avant la Révolution, le l()is (JUC rein- place lliiitel-de-ville actuel, servait déjà de maison de ville, (le palais de justice et ile Prison. La halle sap- puyait sur une des faces de cet édifice. Dans len-tête duninterrogatoire fait le 2; juillet 1 7:;, par Josep]i de orsambleu , sieur du Gué-du-Roi , président de la chambre souveraine dilenriehernont, il est dit que la chambre haute lient à ce momeni ses assises à luit de+; étages de la C,oi-IIfrnehe. e à défaut dauditoire et chambre du conseil , lune et lautre étant démolies depuis quelques jceirs pour eu COulStL1liie (le 11011- velles (1).

Le long du flanc méridional et à lextrémité de la rue l3ourgogne règne la place ou parvis de léglise, pris en grande partie sur lemplacement de léglie piimitive, qui a été démolie cil La nouvelle église engloba en outre lancien cimetière qui, eu 1 , avait été trans- porté hors de ville, sur le côté opposé de la toute de Sancerre et près dit fossé (2).

:i; Archives départementales du Cher. (Fonds judiciaire. Ifesri- che,aoizt. Il. 518) Lauberge de la (çoie-Iilaie/ie était sitUr sur le marché aux boeufs et le long de la rue allant de 1glise ii Bcis- belle. ) l.igraud isseincut de la ville engagea en 182 1 ; [administration à changer lempiacemeiit du ciinetiere. devenu dailleius inutli- sent. il y avait, ù quelque distance, un terrain dun peu pins dun hectare. détendue, appelé le d/ieiap du J?qsoit il fut achel e PwIl. remplir cette destination. Toutefois, par suite de ditticultés admi- nistratives, le transfert du cimeliére ne seffectua quen 183i.

f FONDATION E LA VILLE 1)I1ENIIIc!IFMONI

Lhospice. devant lequel règne la place à laquelle il donne son nom. est un (les pavillons Je la ville, appro- prié à lusage actuel en lannée 1838. La commune acheta dun habitant de Bourges ce pavillon, qui fut abattu, et sur lemplacement duquel séleva lédifice quon voit maintenant.

Au couchant de cette place, Y-; -vis lhospice et (jans lintervalle qui existait entre cet élilice et le fossé du rempart, sétendait jusqu en ces dernières années nu grand espi1ce livré à la culture, et sur les terrains du- quel vient de se fonder un vaste étaldissemeiit religieux placé sous le vocable de iSa iii te-iJfa,t/ie, avec, la préten- tion de renfermer dans son enclos, outre une chapelle, une école, un ouvroir, une salle dasile et quelques au- tres établissements supplémentaires.

Les trois autres aneJes intérieurs (le la. ville offrent encore laspect (1 11 e l:)résen tait namère ccliii dont il vient dêtre question avant la construction (le cet élalilisse- mciii : ils sont occupés par (les jardins ou des cultures.

1 h même cté (111e Sainte-Mar( lie et j)1US à louest, en dehors de la ville, à langle externe fariné par les rein- parts et la route dlvov, se présente itii vaste cours J)lanté qui sen de champ de foire et de place pour les revues et les ftes p lllili(lIies . Sa création date de i(

Si, revenant de cette promenade circulaire dans les différents quartiers de la ville, ]toits itou rabattons sur le centre, nous y retrouvons la grande place dite origi- nairement (le II éthui,e et maintenant dIIeii4 I V, et autour de laquelle pivote lotit ce système de carrefours FONDATION DE LA VILLE DIIENRICHEMONT 47 et dc rues. A langle nord, (in remarque un ancien puits, naguère encore orné de quatre colonne s rondes qui supportaient une toiture surmontée dun latiter- non (1). Cc puits date de lorigiiie de la ville, mais les colonnes et la toiture ne furent ajoutées (tUeli I

La situation anormale (l( Ce puits, i s olé dans un coili de la place, jure avec la régularité un reste de Fensem- hie. Sans doute cee fut le seul point exécuté dun projet générai, dans lequel trois autres objets analogues, au moins quatit t la forme, devaient, on peut le Croire, ocuper symétriquement les trois autres encoigiluies de la place, en concourant à son embellis 4onient.

Peut-être un de ces objets fut-il le pilori, ancienne- ment installé en ce lieu, et lui tomba de vétusté en 1,; II I

7i30, ainsi que nous lapprenons du procès-verbal de la descente faite en cet endroit en 1776, lors lune visite plus générale exécutée pour décider les répandi o ns qui

pourraient être Li fiire aux propriétés domaniales (lit comte dArtois, alors investi de In 1 uiincipauté d!lenri- cheinont (2). Il paraît que. depuis 1 70, le pilori na- vait pas été relevé, ce qui tend à I u101\( 1 soit P (luti- lité 3. Quant au milieu du forum, il a été jusquà nos

(1) Les colonnes et la toiture ont été abattus par louragan qui, au mois de juillet 12, u ravagé mie partie du département. tI)iu na pas cru devoir les relever. ) Archives départementales du Cher. (Fonds judiciaire (Pllenri- cliemont. L. 13. .n37.) (V Quant au gibet, où sexécutaient hs sentences capitales, il était placé, suivant lusage. hors de ville, à un quart de lieue en- viron. à Fangli de reticontre du chemin venant (lu village du Pic avec la route actuelle dAchièrts. A cet endroit. c.est-à-dire ut la base du coteau (lui supporte I knrieheniont, le Plan cadastral de la çoninune, exécuté en 1829, montre sous le n 6u1!i un terrain qui 48 F0ND.TJ0N DE LA VILLE DILENRIC}IEMONT jouis occupé successivement par (les objets de natureet de destinations fort diverses. Dabord ce fut la croix dont Teillay, dans son journal, metilionne léieclion do la inuière suivante. « Les 7 et 8 juin 17 -19 fut fait au milieu de la. grande place de cette ville un petit calvaire, sur lequel fut placé nue croix de [cire cuite, quavoient fait les potiers (le la Borne. Elle fut bénie p M. le curé le soir du mardi 8 (imiit mois. Oit y fut en procession, les bannières, croix, drapeau et quelques habitants sous les armes, tambour et fifre. Lon y chanta le Te Deum. Ce petit calvaire fut fait dun grand qui étoit un peu plus liant dans ladite place, sur lequel étoit autrefois posé Une gTaiide croix de bois, et aux quatre coins du- quel grand calvaire il y avoit anciennement quatre très- gros et t rès-grallds ormes. Un grand vent abattit ladite croix, qui fut rompue et brisée le 13 février •l 781 au matin, o

et accident évita à la lléçolutioii la peine de labattre. Aux jours de la tourmente,, le bctclier qui consuma en auto-la-Lé les titres du passé de Boishelle, puis lautel de la patrie, remplacèrent le calvaire.Un arbre de liberté complétait la décoration. Cest ce quil faut induire (le ce fait quon floréal ait on arrêta plusieurs individus est (léliOnuaé pré de la .Jsfice, et dont partie a été utilisée depuis pour une plantation (le mai nilk1ues épicéas. Des titres (lu coni- mencement du siècle dernier mentionnent, au même lieu, « une place en friche, de la contenance de quinze boisselées Oit (ILVitOH mesure (les ui. ladite place appelée la .Juetéce. joutant.., parle bas le grand chemin tendant du village du Pré tu bourg des Aix, et du côté du midv le chemin qui conduit dllenricheinont au village (les Thebauts, » (Cr. minutes du notaire Chevrier, a. 1723, conser- vées dans létude Aubry. ô IIenric.hemont. FONDATION DE LA VILLE IJIIENRICIIEMONT 49 accusés davoir nuitamment détruit ce végétal qui cho- quait ces messieurs.

.Je ne sais si la Restauration y replanta la croix, les révolutionnaires (le 1830 auraient CU alors la p(iILe (le la faire diparautre.

1848, lui lit. éiiierger (lit fiançais tant ,larbres de liberté, y piaula le Sien pour remplacer celui quavait abattu la iïaetioii de 179;. Cétait un inagnitique Peu- plier, qui végétait diii huais, au l)UUt (le (lUel(IUe temps, le vent ayant souillé dun autre cté, le peuplier tomba.

En 1 8ii , ladministration municipale y fi[ élever une fontaine qui fait lorgueil des habitants, et 1pic le vent a respectée jusquici. -

Cest siii la place iliui IV P- sétait portée IJ1 i llCi j)a je lédificatioii-1einen L lactivité de la construction lors (le la ville: aussi était-elle en grande partie cOilSftUitC li

la 1111111 lu roi. vive pavillons it de briques devaient sélever aux angles (les Irni t rues qui y delxu- client, et le milieu de chacune des huit, grandes farades comprise entre ces pavillons devait être évidé par une large porte coclièie doiniuit accès aux cùurs intérieures. Un reste de ces dispositions primitives saperçoit encore. Aux extrémités (lesdites rues, seize autres pavillons semblables aux premiers devaient garnir également leurs amigles XtéliCUI5 doimnanL S.UV les 1WlitS places— Ces pavilhumis erueut affectés aux grands services pu- hues : ce devaient être les priais de la cité. Un seul nous était parvenu dans lintégrité de son eîmveloppe, FONDATION DE LA VILLE DHENRICIIEMONT cétait celui (lui, situé au bout de la rue Bourgogne, devint plus tard léglise (le aint-Laurent. 11 a été abattu, comme lions lavons dit, pour faire place t lé- glise actuelle. Le seul spécimen Cil ce genre qui sub- siste aujourdhui est la partie extréme (le la rue Marie, ancienne demeure du procureur fiscal, et dont une moitié a été récemment restaurée clans le style primitif. Celui qui lui faisait face, et qui servait pour le grenier à sel, a été démoli au siècle dernier, de môme que celui oit avait été installé llttel de la monnaie, à langle de la rue dAnjou et de la grande place, et qui noffre I)1Us guère de son aspect primitif.

De lionne lieu ce, du reste, la démolition sattaqua à ces giands bètinients dun usage iliCOliuflodO, coûteux par les réparations quils nécessitaient, et dont une partie au surplus navait piolialilemeiit jamais été terminée (1).

Quant aux autres maisons, Sully et ses successeurs avaient adopté le système de larremitemneiit, dailleurs en Usage, comme propre à favoriser la construction des terrains (2).

(1) Dans un traité 1iassà la date du 26 juillet 1711, entre la veuve Gangnon et lienri Lebrun, marchand, voisins lun de lautre, il est dit que la veuve eu question est propriétaire dun immeuble proche la place de la mille et e situé sur la place dc ladite ville, autrefois basly en pavillon, comme les autres corps (le logis estant de l première construction, et par elle rendu de la même manière en pavillon de inéine hauteur. » (Minutes du notaire Cherrier, dans létude _ulr5, n lienriclicinont.) Les jnodilication de ce genre, motivées par des raisons «économie, durent être fréquentes et contribuer à deligurer lapparence première des constructions de la ville. )2) e Maxiliun do Betildule, duc de Sull, pi et immareselial de Frnce, prince souverain dHwjridhen joli t cl Boishelle, sur ce que FONDATION DE LA ViLlE DHEMUC1IEMONT 51

Ne quittons pas le sujet qui nous occupe sans dire un mot du nom donné par Sully à la ville quil venait de mettre au jour.

11\IIIMONT et I IENIII(:IIEM0NT paraissent avoir été les deux coiines de dénomination miii ffreiiineiit adoptes pal Sully. puisque, tau_lis que la dernière figure an niaiclié de instruction de I 6CI8, lantre se lit dans linscription préméditée par le fnduteur pour la décoration de lu, ville, et que nous avuits ru 1)portée plus haut. Cette appellation, qui renouvelait en faveur du roi fleuri ladulation dlp]iestion pour Alexandre, était aussi motivée par lassiette le la nouvelle cité sur le sommet du plateau qui domine lancien bourg de Bois- belle. Et e turne la manie générale dalors, grâce à lédueal.iou cléricale du temps, était du Iliibler toute chose dun nom latin, I lenrimnont ilut tio.tt naturelle- meut se traduite pour les pédants de lépoque pal lIen - iiCimon..s, ou, daprès la mode })Iuls gothique, He.inichi- •nons.

Nous rencontrons en effet, il fln du xVuIe siècle, la qualité dhabitant du pays exprimée par lépithète de I[ei .frhi,;io,l t(li/ ils. nous avons faiet siavoir aux halittans de nostre dite souveraineté que ceux qui voulroienl construire et bastir dis maisons dans nos Ire ville, il leur scro t arrenté les places (1uj leu r 5cr dent né- cessaires. sur quov ]e sieiu .Jean Fouchier. heuttiant de nostre dite souveraineté, nous auroit prié de lit y tonner une place siie (tans ta flic Icndi,(, de la mande place i lit le Marie... po y hast j r et uneconstruire mai sou, à hi, dia rge de pli e! la! cl jase ung an deux deniers de ceLIS porcins piuillicl s le lois et ventes,.,. etc. Faiet Li Boisbelle, le dix-neufviesn,e septembre nul six cens trente- sept. (Titres particuliers.) FONDATION DE LA VILLE DIIENRICJIEMONT

La fouine française d .Ueii,chemo,,t, forme la plus rapprochée de cette fouine latine, prédomina de bonne heure, au point dètie restée en usage. Seulement CC mèine usage, parmi les habitants de la localité, arnelia la chute de la s y llabe initiale, en sorte que I lenriclicinont devint i(ieIit)t Ru/ie,,/oat dans la langue cotiralite, et il parait (111e cette habitude date des temps voisins rie la fondation, car je lis déjà cette forme sur les plus anciens registres paroissiaux de sou église.

Cette particularité de la suppression de la première Syllabe dun mot, prise par erreur pour un préfixe addi- tionnel , nest pas dailleurs salis exemple dans ces mèiiies coi Liées, et, sans aller plus loin, il me suffira de metitionuier en ce genre. le. 110111 des Binqex, SUl)StitUé dans la langue usuelle parmi les habitants à celui du bourg chef-lieu (le la commune (IAllIJiiigeS (1).

(1) Dans; le Voyage de Frace, imitation par Duverdier et souvent traduction tic lfffuérajre de Sinceras. publiée (Lins la première moitié du xvii siècle. on lit lé passage qui suit au sujet (Pllcnri- (IL(illOIlt « Boilbelle sic) ici est à (leiny-journée de Bourges, cestoit autrefois cii inescha]tl bourg, qui estoit au (lUC (16 Nevers, de qui le duc (le Sufly laxant acquis, il le lit ériger en principauté par le roy lleiiry 1V, et pour la mémoire de ce bie)è/ai appela le lieu Ife)iricfeaont. Il y lit dès lors bastir de fort belles maisons (laits des rues bien disposées et allignées, et à ieniour dune huile place. Cesloit le dessein (lune belle et agréable ville dans un mauvais fonds et peu revenant. Le lieu est appelé aujourdhui- vulgairement Itou qe,uoat. » (Cf. le Voyage de Fra y er dressé pour la coumo(1i/é (les Fr(iaçois et des e.strangeïs. par le sieur 1). V. Pe,is, 1639, 11111 et 168, in-12.) Ce nom (le Rougemont est U noter. );UCe (luit nest quune transformation erronée ou systématique tIc la foritic Ilichenioni, dont il conlirine ainsi, peur Cette époque, Fein- plol habituel. FONDATION DE LA VILLE DIIENRICHEMONT

Toutefois létymologie dHe; iCi-flO?lS, comme expli- cative dHenicheiiiont. était trop naturelle pour satis- faire longtemps les beaux esprits. De longue date fions- sait en Franco cotte vieille école détymologistes de fantaisie qui a fait loi presque jusquà nos jours, et gràce à laquelle nos pouillés, nos chartes, nos chroniques la- tines, ainsi que toutes nomenclatures topographiques ou documents historiques de ce genre, ont été remplies de dénominations saugrenues. Pour les savants, le simple était trop simple, il fallait quils se bistournas- sent lesprit à créer aux imoms de lieux des origines in- croyables, si peu qui,contes pussenthies ttre en réa- lité ces origines. En C0115é1u(]ie(, il fut de han goût parmi les lettrés de supposer que le noni français de la capitale de Boishelle était la tradition de lIen ici in cest-à-dire bienfait ou présent (lu roi Henri. Navons- nous pas vu ce système dinterprétation iniplicitement émis dans la note empruntée ci-dessus à louvrage. de Duverdier? Le siècle dernier ne manqua pas de senti- cher de cette trouvaille « Le fameux Sully. dit le mé- moire de lavocat Bellomeau (p. 13 . entreprit. délever la ville dllenrichemnont sous les auspices dI-lenri IV, doù elle tire SOfl nom IIenici •m nUS. » c était donc désor- mais un fait acquis. Linvention ne tarda pas à faire fortune, et il ny a guère plus dun demi-siècle quune feuille locale imprimait gravement, à leffet dinstruire les contemporains et la postérité sur la vérité €lti 110111 de notre ville, ces mots explicatifs ilions rel niunus lien- eici (1).

1) Jortnd de Bow-yes du novembre 1819. La feuille en question ajoute « Le terrein surlequci reposent ses fondemen fut concédé par Henri Iv à Sully. qui commença en 19M à la taire Mtir daprès K FONDATION DE LA VILLE I(IIENI(ICIIEMO\1

I ;i 10115 enfl ii, pour COIfl1d(1 pu cette énumération par la plus bizarre (t la mou is réussie (le toutes les fo rmes (laq ellat iii qui lui fiireiit doi.iiies. celle de IIei»i- qU 1 ,a0,,( (Heiiieiqi,f I (v) qui l allelle À bien le JIf ii ii-qiiifri//e. ( 1 1 1e 11(l115 aV (11.5 Vii >r(cdemninii t si niai à jjiop eavi ]PIi1 1)iIiLli1eul. (elle pédnlet1ue tentative. qui ne ruiI j lautie, fut due ail julicuiisuIt( .JeaIi :hiu :1,. liii de ces ttyinoIogistes (lU X\1I icie. (10111 lieUs jutriiciis tant(t. et auquel IlOils (ICViOII5 l:Ieja très -ÏflO])d Mine Ilj le mot iréten- IieUseITleilt larhare de b1oxcohe/7t,)( (niirie traduction du fiuirai 13 d Iiel li.

un plan régulier. Les co1is1rtiet jon fnent continuées pendant (10117. p années coflsécUi jvcs. y Voila de i!ignhilr. licigneinents (i Dans s e , Qu(e.v(j,i ,uri? (1 droi/. a popos le Ceticrelation (lllfl PrOCs de sorcière dont il a été foi I mention clans Iinhiouc- (bu lu I)trigi plie di, Fief-Pot

p PIECES JUSTIFICATIVES

ORD0NX.&xei: DE POLICE CONCERNANT LA PLACE DU.Ji .:rj 1)E PAUME ET LES RUES D! IEN 01Cr i:MONT I77O.

Sur ce qui nous a été remontré par le procureur du Souve-. raiti Seigneur que le Jeu (le p1ir1 est une place qui. P1 les soins quon t. pris (le Feni heflir pat• des allées ln rhres feroi t un jour laurétuent de cette ville, quà ce titre il ne pouvoit inaiquer trnj) dal teittioti pour la conserver : que cependant plusieurs particulier,; de cette ville_ peu touchés de lintérêt général lotit ib contribuer à sa conservation, cri oceasiuiinuietit le dépt.rissenien t total en Ittisaril servir cette protuenaile tic pèture journalière à leurs bestiaux lorsquelle iicat destinée par sa nature tjriaux seuls plaisirs des bain- tants : fpic, les chevaux. àue , lièvres, avec lesquels tout le monde étoit confondu, la renduit presque déserte : et que ces anhcniaux, les uns pal leur frottement. Un par leur souille contagieux. avuient déjé hill périr plus nie quatre-vingts arbres, ci quune pareil le (triai. t lié tic tout pi ii S [uc végéter: que limpunité (le ces abus j usirlalors n avoi introclui t. tin Plus criait par luattention des pères et irières à défendre à leurs enfans de saunuser il faire avec leurs couteaux tics incisions qui, en interceptant le cours «le la sève (le t arbre On Oecasiunuoienl irilail t il(lemeInl la mon ; quils ignn(roient sans doute quils étoiciit personnellement responsables (le Pareil délits et que Un les plus sévères y soin aita- citées quil luy avoit eté porté, en outre, ditlelentespL(ifltes sur les entreprise, de certains particuliers qui avoient telle- ment anticipé sur les vue, de cette ville quà peine avoiemit-elles aujuunnllirrv aix pieds nie large. au lieu de trente quelles avuien t tans leur état pii nnitif; (Jile CC rie Soli[ que tes seuls propriétaire, tics Ilénitace atteiratis é ces mê- mes rues qui utit fait ces usurpations que lintérêt publie aant (JUC la décoration dede la ville leur font un devoir de PIÈCES JUSTIFICATIVES déférer au tribunal de la justice que la nécessité dy remé- 41er est dautant plus urgente que les personnes raisonna- bles, à plus forte raison les enfans ne pourroient échapper au (lange!- dune voiture ou (lun cheval épouvanté qui Se trouveroit dans le nième chemin, tant il étoit étroit I qUO les malheurs (lJà arrivés à cette occasion, il y a quelques années, et qui ont manqué darriver une seconde fois il y quelques jours, deviennent un motif i)lus pressant pour prendre les plus sùrs moyens den prévenir dautres pat- la suite ; que, Pou" Parvenir à remédier à ces abus inultipliés il requéroi t quil soit fait défenses à tous particuliers: l de laisser entrer aucune espèce ce bestiaux dans le Jeu de paume, même de les mener paitre autour des bayes qui lenvironnent, sous peine de dix livres damende., enjoindre aux pères et mères de défendre à leurs enfans de faire aucune incision avec cou- teaux sous peine de i0 livres clamende et de prison contre leurs enfans :, ordonner que tous particulier riverains des rues intérieures de cette ville, et qui ont entrepris sur icelles, de rentrer chez eux de façon à laisser lespace de dix-huit pieds pour le passage libre des passans et voitures; ordonner, pour la conservation des liayes nouvellement élaguées dans lesdites rues, quil sera fait défenses de laisser paltre à labandon aucunes chèvres, ou aucunes brebis, capables par leur souffle (le les faire périr, dans lintérieur (le la ville faire défeiises pareillement à tous meiidiaiis de cette ville ou autres de couper aucuns bois avec serpes dans les bayes, même demporter les épines sèches servant à les bucher, sous peine de prison, et ensuite (lêtre conduits au dépôt.

Sui quoy, Nous faisant droit sur le réquisitoire du Souve- rain Seigneur, avons tendu la présente ordonnance pour être exécutée ainsy quil suit

Art. jr - Fains défenses à tout particulier. de quelque nature et condition quil puisse être, (le laisser entrer au- cune bête dans la place (lu Jeu de paume, même de mener paltre autour clos hayes qui lenvironnent aucunes chèvres, PIÈCES JUSTIFICATIVES 57 ânes ou brebis, sous peine de dix livres damende, à compter de cejourdhuy.

Art. 2. - Enjoignons aux pères et mères de faire les plus expresses défenses à leurs enfans de faire aucunes incisions aux arbres avec leurs couteaux, même de donner des se- couses aux nouveaux piaulés en s y suspendant ou autre- ment, sous peine de prison contre lesdits enfants, et de cin- quante livres damende contre les pères et mères.

Art. 3. - Ordonnons à tous propriétaires qui ont anticipé sur les rues intérieures (le cette ville de rentrer chez eux et de laisser un espace de dix-huit pieds au moins pour servir de chemin, sinon, et à faute par eux de ce faire eoiormément à notre présente ordonnance, leur déclarons que nous ferons couper à bois rasé leurs hayes et. leur ferons payer lamende de dix livres pour être employée à icelle (sic) ; leur accordons pour ce faire le temps dun mois à compter de la publication des présentes, après lequel temps passé nous ferons notre visite pour connoltre les délits.

Art. 4e• - Défendons à tous particuliers de laisser paître à labandon dans lintérieur dc la ville et le long des bouche- turcs élaguées le long desdites rues aucuns chevaux, chèvres, brebis ou ânes, sous peine de dix livres damende.

Art. -Faisons défenses à tous inendiaus ou autres de couper avec serpes du bois dans les haves, môme dem- porter les épines sèches qui les bouchent, sous peine dêtre emprisonnés et ensuite conduits au dépôt.

Art. 6e. - Ordonnons à tous les particuliers de cette ville de ramoner les cheminées au premier passage des ramoneurs, sous peine de dix livres damende) et que visite sera faite immédiatement après.

Ordonnons que la présente sera lue, publiée et affichée par P!CES iTISTTFICATIVES

Vous h u i ssier le service du siège. pour être exéctitée meïonsa tonne et teneur.

M et WW par ilous Au&é ):njou. Lieuteiia u f iMémi (:wi- le triiI-iin ]oveIItt)r( nifl-scpt --t(It-()j5Lit(-(JjX_

I).NJut, À1NxI, Cl PINSSON.

(.tchives dii Cher. Foiii.N judic j iie, B.

Bourges. Imprimerie cOmmercje Vent.