56. Les Tertres Funéraires Néolithiques De La Région Carnacoise
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Carnac, Erdeven, Plouharnel, Locmariaquer, La Trinité-sur-Mer, St-Philibert (Morbihan) Avril-Septembre 1995 Prospection thématique Les tertres funéraires néolithiques de la région carnacoise par Christine Boujot et Serge Cassen 1995 Service Régional de l'Archéologie, Rennes UMR 153 du CNRS, Laboratoire de Préhistoire Armoricaine, Nantes Autorisation de prospection n° 1995/08 Remerciements Les deux campagnes de prospections,réalisées en avril et septembre 1995, se sont déroulées dans des conditions tout à fait satisfaisantes grâce en particulier aux contributions de différentes personnalités que nous tenons ici à remercier : M.M. Vaginay et Kayser, du Service Régional de l'Archéologie (SRA) à Rennes, qui ont appuyé favorablement ce projet, comprenant l'intérêt d'établir un bilan sanitaire des tertres de la région carnacoise ; M. Rollando, Maire d'Erdeven, qui nous a toujours accueilli avec chaleur et qui a mis à notre disposition un gîte dans l'enceinte du château de Kéravéon ; M. L'Helgouac'h, Directeur du Laboratoire de Préhistoire Armoricaine (CNRS/université de Nantes), qui a bien voulu nous laisser à disposition du matériel de topographie et d'enregistrement déposé au laboratoire de Préhistoire ; M. Vellet (Sagemor - Vannes) qui a donné son accord pour que le véhicule de service de l'ancien chantier de Locmariaquer nous soit prêté durant tout le temps nécessaire à cette nouvelle intervention, assurant ainsi le transport des prospecteurs dans les meilleures conditions de sécurité ; M. Bailloud qui nous a fait connaître plusieurs documents souvent inédits de F. Gaillard et Z. Le Rouzic pour le plus grand bénéfice de nos investigations ; M. Cloarec qui a bien voulu consacrer un peu de son temps libre pour nous accompagner sur le terrain ; L. Pirault (AFAN), en mission sur Carnac, qui nous a très amicalement aidé dans le levé topographique du tertre de St-Colomban ; G. Le Louarn a tout fait pour que l'accès aux alignements de Carnac nous soit facilité ; R. Le Mené, maire de Crac'h, H. Bogaert, maire de Locmariaquer, et les personnels communaux des mairies de Carnac, Plouharnel, La Trinité-sur-Mer nous ont toujours aidé dans nos recherches cadastrales ; Enfin, nous ne saurions terminer cette page de remerciements sans citer les chercheurs et étudiants bénévoles expérimentés qui ont bien voulu participer à tous les travaux de prospections et d'enregistrement, parfois dans de difficiles conditions atmosphériques... : B. de Biasi (université de Paris I), N. Fouquet (université de Nantes), M. Lafféach (université de Rennes II), E. Mens (université de Paris I), C. Molinas (université de Paris I). 2 Le choix du sujet. Les objectifs retenus Faisant suite à des opérations de remembrement, la destruction partielle en 1992 du tertre de Lannec er Gadouer en Erdeven - gisement inventorié dès 1865 - mettait en lumière une famille de monuments néolithiques souvent négligée par la recherche archéologique et, plus souvent encore, totalement inconnue aussi bien du grand public que des principaux responsables des collectivités territoriales. La richesse régionale en monuments véritablement « mégalithiques », la diversité et la densité des différents types de « dolmens » ont bien entendu rejetté à l'arrière-plan ces masses de terre à peine visibles dans le paysage actuel. Bien d'autres raisons pourraient aussi être invoquées... Mais le plus important, en l'occurrence, est de reconnaître non seulement l'intérêt de ces constructions anciennes pour la compréhension générale du phénomène de la monumentalité funéraire au Néolithique et des processus de la néolithisation, mais également de mettre en évidence leur grande fragilité, leur vulnérabilité dans une zone du littoral de plus en plus urbanisée, aux prises avec une pression touristique de plus en plus marquée. Le grand handicap commun à ces types de monuments ne contenant pas de tombes à couloir en position primaire est bien sûr - et mis à part les rares tumulus gigantesques - leur relative invisibilité dans le paysage ; des prospecteurs peu entraînés peuvent ne pas les remarquer, et leur implantation actuelle en milieux boisés, un milieu offrant protection à l'échelle des derniers siècles écoulés, les éloignent des terrains d'enquêtes habituels. Par ailleurs, plusieurs tertres aux reliefs évidents pour un observateur parcourant au XIXème siècle les landes entretenues du Morbihan sont de nos jours totalement enfouis sous la végétation inextricable des pinèdes et des landiers, et sortent en définitive des mémoires, celles des agriculteurs ne faisant hélas pas exception... Mais la raison essentielle ayant en réalité entravé leur analyse tient à la difficulté que l'on rencontre dès qu'il s'agit de « lire » les structures internes sur lesquelles se sont historiquement fondées les différentes typologies construites autour des tombes à couloir et autres allées couvertes. Alors que les cairns de ces derniers tombeaux servaient à moindre frais de carrière, et que les « squelettes » apparaissaient progressivement, puis de façon brutale une fois la chambre explorée, alors que ces structures internes dénudées permettaient de dresser des plans en relevant des constantes et des variables, les « tertres en terre », peu favorables aux bâtisseurs modernes sinon parfois pour leurs argiles aptes à jointoyer les murs de construction (Er Grah à Locmariaquer), ne laissaient aucune information comparable s'échapper de leur masse. Si quelques « coffres » sont ici ou là apparus, par accident ou par fouille, leur faible envergure, leur aspect si peu spectaculaire les condamnaient à retomber dans l'oubli. Il découle de tout ceci une difficile intégration de ces architectures au cadre chrono-culturel élaboré ces 50 dernières années, et on relèvera parfois des oppositions nettes dans les estimations des chercheurs. Pour en revenir à Lannec er Gadouer, son cas ne semblait malheureusement pas isolé en 1993, date du constat de sa destruction partielle... De fait, aujourd'hui, plutôt que d'intervenir ponctuellement sur ce qui nous apparaît urgent de sauver alors que nous ignorons exactement l'état de conservation d'autres sites peut-être tout aussi menacés, serait-il bon d'établir, dans la mesure du possible, un inventaire/bilan sur le territoire historiquement concerné par ces architectures. Le complexe régional des tertres funéraires Le tertre de Lannec er Gadouer, découvert et inventorié depuis le milieu du XIX° siècle, fait partie d'un groupement de monuments funéraires néolithiques, lui-même intégré à un « semis » de monuments semblables s'étalant entre l'entrée du golfe du Morbihan et la commune d'Erdeven, voire la ria d'Etel, sur une vingtaine de kilomètres de longueur et selon un même axe directionnel SE-NO. La distribution de ces tertres répond probablement à des règles encore mal connues mais qui ne semblent pas être celles des « dolmens » régionaux. De même, l'organisation des structures internes au plan fermé répond vraisemblablement à des modalités de fonctionnement différentes. 3 Parmi la trentaine de monuments inventoriés par les différents chercheurs, plusieurs d'entre eux présentent quelques caractéristiques communes qui permettent d'en différencier rapidement trois grands sous-ensembles (en dehors de toute considération chronologique) : 1- monticule de terre de faible élévation et recouvrant une tombe, ce sont les tertres proprement dit - exemple : Marié ty Eck Carnac ; 2- amas en apparence mélangé de terre et surtout de pierre, au plan et aux dimensions souvent très proches de ceux des tertres, et recouvrant une ou plusieurs tombes ; ce sont des tumulus, au sens strict, bien qu'on ait tendance à les désigner dans la littérature archéologique par le vocable de tertre (ou tertre tumulaire) - exemple : Le Manio 2 à Carnac ; 3- amas différencié de terre et de pierre, aux dimensions exceptionnelles, très supérieures à celles connues pour les monuments précédents, et souvent disproportionnées par rapport au volume des tombes qu'ils recouvrent ; ils sont connus sous l'appellation de tumulus carnacéens - exemple : St -Michel 1 à Camac. Nos prospections se sont bien entendu attachées aux deux premiers groupes de tertres. La région considérée pourra une nouvelle fois apparaître comme privilégiée par l'attention des archéologues mais son énorme potentiel en fait un véritable laboratoire de recherche irremplaçable autant qu'une réserve archéologique exceptionnelle qu'il nous faut à tout prix préserver et transmettre aux générations futures. La méthode mise en oeuvre Trois grandes étapes se sont succédées dans le cadre de cette opération : la recherche bibliographique, l'exploitation des photographies aériennes, la reconnaissance de terrain. 1- En tout premier lieu, il nous a fallu réunir les différents inventaires dressés dans un passé proche ou lointain, ces inventaires s'attachant avant tout aux monuments mégalithiques dans leur acception classique, c'est-à-dire les dolmens et les allées couvertes. Le plus ancien est celui de F. Gaillard établi en 1892 ; à cette époque, les tertres les plus discrets sont encore bien visibles grâce à l'entretien des landes, mais leur localisation laisse à désirer dans un parcellaire cadastral à la numérotation bien entendu inopérante de nos jours. L'inventaire de Z. Le Rouzic (années 1930) apparaît le plus complet et reste inégalé ; ce chercheur aura vu le plus grand nombre de monuments mais la version posthume de son inventaire publiée en 1965 par les soins de M. Jacq les situent à l'aide seule des noms de lieux-dits alors que ses notes précisaient chaque fois la référence au cadastre. Cela dit, nous aurons l'agréable surprise de découvrir de nouveaux tertres à l'occasion de cette prospection, preuve étant faite qu'aucun inventaire ne peut être vraiment exhaustif. G. Bailloud nous a ici laissé toute liberté pour reproduire des clichés de Z. Le Rouzic pris en 1916 et 1926 sur des monuments hélas détruits ou disparus sans que l'on sache avec certitude s'il s'agit d'un emplacement actuellement inaccessible ou la conséquence d'un arasement pur et simple. En 1972, sous l'impulsion de P.-R. Giot, J.Y. Desdoigts reprends l'inventaire Le Rouzic et assigne à chaque monument sa situation cadastrale.