A- Une Présentation Faussée De L'intérêt De L'éolien
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Société pour la Protection des Paysages et de l’Esthétique de la France (SPPEF) Enquête publique pour le projet éolien de Brignac Noyal-Pontivy le 16 décembre 2018 Monsieur le commissaire enquêteur Au nom de Sites et Monuments (Société pour la protection des paysages et de l’esthétique de la France), association nationale reconnue d’utilité publique et agréée pour la protection de l’environnement, dont je suis déléguée pour le Morbihan, je vous prie de trouver, ci-dessous, nos observations concernant le projet éolien de Brignac. « Les aérogénérateurs industriels polluants (AIP), dits «éoliennes», sont la première menace qui pèse aujourd'hui sur les paysages français. Ces machines gigantesques sont désastreuses, non seulement parce qu'elles envahissent l'horizon, mais encore parce que cet objet unique, partout et en tout lieu, banalise les paysages français dont la diversité fonde la richesse. La France, avec ses sites exceptionnels, est ainsi menacée d'être uniformément recouverte d'un objet industriel de couleur blanche au design primaire. À ce rythme, dans dix ou quinze ans, notre pays aura changé de visage » déclarait Alexandre Gady, président de Sites et Monuments, au journal Le Figaro, le 06-08-2018. Nous verrons plus loin que les paysages, les habitants et la biodiversité des communes rurales paupérisées du nord et nord-est du département du Morbihan en paient le prix lourd et nous nous interrogerons sur les raisons de cette situation. A Brignac, le projet qui nous est présenté n’aurait jamais dû franchir le cap de l’instruction en raison de la saturation de cette zone du département, de l’opposition des élus et de la population et d’un dossier obsolète, erroné et incomplet. Ainsi, nous lisons à propos du Scot (schéma de cohérence territoriale) du pays de Ploërmel : « Débuté en septembre 2013, celui-ci devrait être arrêté en 2015 pour une mise en application en 2016. » Or le Scot a été arrêté en décembre 2017 et sera applicable en janvier 2019. Globalement, au-delà des données générales et de la méthodologie qui constituent une partie importante du document, il faut feuilleter un grand nombre de pages avant de trouver les informations de terrain. Nous notons aussi que l’avis de l’autorité environnementale n’a pas pu être donné en raison du passage en force du porteur de projet après un premier refus du préfet. Or il s’agit d’un projet d’éoliennes d’une hauteur encore inégalée en Bretagne : 180 m en bout de pales ! La distance de 500 m minimum des habitations n’a plus de sens avec des machines d’une telle hauteur. Concernant le dossier soumis à l’enquête, nous notons : A- Une présentation faussée de l’intérêt de l’éolien. Sur l’ « augmentation des émissions de gaz à effet de serre responsable du réchauffement climatique » - p 18/442. On observera sur le site electricityMap live (capture d’écran ci-dessous) que le 3 décembre par exemple, la France avait une intensité carbone très faible. Car le CO2 n’est pas le problème de l’électricité en France. Sur la « Dépendance énergétique vis-à-vis des pays producteurs » (p 18/442,) on observera dans le bilan électrique 2017 de RTE (réseau de transport d’électricité) ci-dessous que le solde des échanges est largement positif pour la France. Il n’y a donc pas de dépendance énergétique de la France. Sur le contexte régional (p 23/442), il n’est pas judicieux de se contenter de documents montrant la puissance installée. Il convient d’observer les productions. Ainsi, le bilan RTE montre que le facteur de charge a été de 19,9 % en Bretagne en année glissante (de septembre 2017 à septembre 2018) ce qui contredit le fait que la Bretagne soit une région au fort potentiel éolien. Il se trouve même qu’en 2017, année glissante, elle avait le facteur de charge le plus faible en France. On notera enfin que la production éolienne en Bretagne n’a représenté que 7,6 % de la consommation régionale (taux de couverture). L’intérêt de la production d’électricité éolienne est en réalité faible, compte tenu de son caractère intermittent et aléatoire qui oblige à compenser les périodes sans vent par l’appel à d’autres sources d’énergie. Enfin, sur le coût de l’éolien, il convient de se rapporter au rapport de la Cour des Comptes. Il y a cinq ans déjà, un rapport consacré aux « politiques publiques de soutien aux énergies renouvelables », jugeait sévèrement les pratiques gouvernementales en la matière. Les magistrats allaient jusqu'à mettre en garde contre des « risques budgétaires » dans les années à venir. Cinq ans après, le constat est le même. Dans un rapport publié le 18 avril 2018, ils fustigent une politique qui reste incohérente, inefficace et extrêmement coûteuse. B - Des communes rurales pauvres victimes des implantations Sur la coïncidence entre le niveau des revenus moyens par foyers dans les communes et les implantations d’éoliennes. Voir ci-dessous les données du ministère de l’économie et des finances : https://www.data.gouv.fr/fr/reuses/impots-et-revenus-sept-ans-devolution-dans-les-1270-communes-bretonnes/ Brignac est une commune rurale qui figure parmi les communes bretonnes aux plus faibles revenus. Il en est de même des communes voisines : Ménéac, La Trinité-Porhoët, Mohon et Lanouée. Or, on observe que c’est précisément dans ces communes que se font les implantations d’éoliennes : 10 à Ménéac, 14 à Mohon, 4 à Lanouée. Exception faite de La Trinité Pohoët qui a refusé un projet sur sa commune. On observe la même coïncidence plus au sud notamment à Pleugriffet (11), Buléon (8), Crughel (6). Un aperçu de l’implantation très inégale des éoliennes dans le Morbihan ne fera que confirmer cette observation. Le Télégramme - source DREAL Bretagne - septembre 2016 Et, l’objection du potentiel éolien sera vite écartée au vu de la carte suivante figurant page 14 de la charte éolienne du Morbihan (document de cadrage de 2005, seule référence valable depuis l’annulation du SRE) : Sur l’information du public sur un site internet dédié dans une commune victime de l’exclusion numérique p 26/442. Cette information, vouée d’avance à l’échec, n’a été qu’un simulacre. L’exclusion numérique a fait l’objet d’un article détaillé dans le journal Ouest-France du 13 décembre 2018 : « l’exclusion numérique, un nouveau fléau social ». L’article se base sur l’étude de Pascal Plantard, professeur à Rennes 2, spécialisé dans la fracture numérique. Nous lisons que « 13 millions de personnes ont du mal à accéder à internet ou à maitriser les outils numériques », que « l’exclusion numérique recoupe en partie la précarité » et que seulement 30% des non-diplômés y ont recours. Le Télégramme du 16 décembre 2018 titre aussi «Numérique. Des naufragés à secourir ». L’article rappelle que le CSA a étudié cette thématique en juin. Nous lisons : « il en ressort qu’il y a une vraie disparité entre les villes et la ruralité. Les communes rurales étant les plus touchées par ces problèmes. Il en ressort aussi que les connexions des urbains sont plus importantes que celles des ruraux (93 % au lieu de 86 %) et que la fibre y est bien plus étendue (35 % du maillage au lieu de 17 % en régions). » Les documents ci-dessus montrent bien que les communes rurales pauvres sont les cibles des porteurs de projet et de l’Etat. L’information y est moins développée, la population peu habituée à contester les décisions de l’Etat et les associations morbihannaises souvent basées près de Vannes et de Lorient sont peu présentes en zone rurale. Enfin, l’argent manque pour les recours. Par ailleurs, nous avons observé : Une utilisation abusive d’un document périmé. Le dossier se réfère au schéma régional éolien annulé par la justice (p 24/442). Le SRE a été annulé le 23 octobre 2015 par le tribunal administratif de Rennes. La mention de cette annulation entre guillemets ne dédouane pas l’auteur de l’étude d’impact de son intention de tromper le public par une carte abusivement permissive dont l’usage est aujourd’hui illégal. Des références à des documents inexistants. Le dossier se réfère à une carte du gisement éolien p 25/442. Contrairement à ce qui est indiqué en légende de la carte page 25, cette carte du gisement éolien à 80 m de hauteur ne figure pas dans le SRE Bretagne. Une localisation fausse du site éolien sur le schéma départemental des éoliennes du Morbihan. L’auteur de l’étude d’impact fait figurer le site éolien au nord de la commune : au bourg de Brignac. Or il se trouve au sud dans un « secteur potentiellement très peu favorable ou interdit à l’implantation d’éoliennes ». C- Les landes de Jugevent : une richesse écologique à préserver Les zones boisées, zones humides et les cours d’eau que l’on observe sur le site d’implantation ne laissent aucun doute sur l’impact qu’aurait la construction des éoliennes. Sur cette carte apparaît l’indice de richesse en patrimoine naturel remarquable concernant la flore, les sites à chiroptères, les oiseaux nicheurs, les sites géologiques. L’auteur de l’étude d’impact n’a pas tiré les conclusions qui s’imposaient au regard du SRCE Schéma régional de cohérence écologique) : la zone d’implantation est un réservoir de biodiversité à préserver. Le site figure aussi comme corridor vert dans le SCOT du pays de Ploërmel applicable en janvier 2019, sous la légende « maintien et restauration des continuités écologiques. » On comprend bien que le bétonnage, l’empierrement du site et des chemins ainsi que le mouvement des pales – fatal à l’avifaune et aux chiroptères - sont incompatibles avec cet objectif.