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SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) UNIVERSITÉ CLAUDE BERNARD-LYON 1

U.F.R D’ODONTOLOGIE

Année 2021 THÈSE N°2021 LYO 1D 015

T H È S E

POUR LE DIPLÔME D’ÉTAT DE DOCTEUR EN CHIRURGIE DENTAIRE

Présentée et soutenue publiquement le : 11/03/2021

par

SIMO Candice

Née le 23 juin 1995 à Villeurbanne (69)

______

Titre de la Thèse

Place de et gingivalis dans la maladie parodontale : état

des connaissances actuelles et décryptage d’une proposition de traitement antiparasitaire

______

JURY

Madame Kerstin GRITSCH Présidente

Monsieur Olivier ROBIN Assesseur

Monsieur Arnaud LAFON Assesseur

Madame Doriane CHACUN Assesseure

SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) UNIVERSITÉ CLAUDE BERNARD-LYON 1

U.F.R D’ODONTOLOGIE

Année 2021 THÈSE N°2021 LYO 1D 015

T H È S E

POUR LE DIPLÔME D’ÉTAT DE DOCTEUR EN CHIRURGIE DENTAIRE

Présentée et soutenue publiquement le : 11/03/2021

par

SIMO Candice

Née le 23 juin 1995 à Villeurbanne (69)

______

Titre de la Thèse

Place de Trichomonas tenax et Entamoeba gingivalis dans la maladie parodontale : état

des connaissances actuelles et décryptage d’une proposition de traitement antiparasitaire

______

JURY

Madame Kerstin GRITSCH Présidente

Monsieur Olivier ROBIN Assesseur

Monsieur Arnaud LAFON Assesseur

Madame Doriane CHACUN Assesseure

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SECTION 87 : SCIENCES BIOLOGIQUES FONDAMENTALES ET CLINIQUES Maître de Conférences Mme Florence CARROUEL

SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) Table des matières

Introduction ...... 7

Partie 1 : Protozoaires oraux et techniques d’identification ...... 8

1. Présentation de deux parasites oraux suspectés d’être impliqués dans la maladie parodontale 10

Trichomonas tenax ...... 10

Entamoeba gingivalis ...... 11

2. Techniques d’identification parasitaire...... 14

Techniques de prélèvements ...... 14

Identification microscopique...... 14

Identification par PCR ...... 16

Le principe de la PCR conventionnelle simplifié :...... 16

Le principe de la PCR en temps réel simplifié :...... 22

Partie 2 : Hypothèses d’une implication parasitaire dans la maladie parodontale ...... 27

1. Définitions, applications et limites de la pathogénicité en microbiologie ...... 27

Définitions...... 27

Utilisations des postulats...... 29

Les limites de la méthode...... 31

2. Liens entre la maladie parodontale et T. tenax...... 32

Prévalence orale de Trichomonas tenax...... 32

Induction d’une réponse immunitaire et reproductibilité sur le modèle animal ...... 32

Impact des traitements parodontaux sur T. tenax ...... 33

Facteurs de virulence et conclusion sur la pathogénicité ...... 34

3. Liens entre la parodontite et E. gingivalis ...... 35

Prévalence orale d’Entamoeba gingivalis, études in vitro et modèle animal...... 35

Impact des traitements parodontaux sur E. gingivalis ...... 36

Hypothèse sur les facteurs de virulence et pistes d’étude ...... 38

Partie 3 : Présentation d’un protocole de traitement antiparasitaire ...... 40

1. Antibiotiques...... 40

Antibiothérapie systémique...... 40

SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) Le métronidazole...... 41

La tétracycline et la doxycycline...... 41

Antibiothérapie locale...... 42

Le tétrarince : ...... 42

Les pâtes MA, MC et MK2 :...... 43

Recommandations françaises et résistance bactérienne...... 45

2. Phase d’assainissement parodontal du protocole ...... 48

Antiseptiques inspirés de Keyes : eau oxygénée et poudre de Torrens ...... 48

Élimination mécanique de la plaque dentaire...... 50

Soins au fauteuil par le praticien ...... 52

3. Aspects psycho-sociaux et succès du traitement...... 56

La durée et le coût du traitement ...... 56

Adhésion de patient ...... 57

Résultats immédiats et à long terme ...... 57

Conclusion...... 59

Bibliographie...... 60

SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) Table des illustrations

Figure 1 : Les modes trophiques : classification des organismes en fonction des sources de nutrition.. 8 Figure 2 : Une classification phylogénétique d’organismes eucaryotes (3) ...... 9 Figure 3 : Trichomonas Tenax (vue au microscope optique à gauche et schéma à droite) (9)...... 10 Figure 4 : Entamoeba gingivalis (Trophozoïte) (12) ...... 11 Figure 5 : Entamoeba gingivalis au microscope optique (13)...... 12 Figure 6 : Arbre phylogénétique modifié (14)...... 13 Figure 7 : Tableau tiré du protocole Bonner-Dunoyé (22)...... 15 Figure 8 : Eléments nécessaires à la PCR (23)...... 16 Figure 9 : Dénaturation (23)...... 16 Figure 10 : Hybridation (23)...... 16 Figure 11 : Amplification (23)...... 17 Figure 12 : Fin du 1er cycle (23) ...... 17 Figure 13 : Fin du 2ème cycle (23) ...... 17 Figure 14 : Fin du 3ème cycle (23) ...... 18 Figure 15 : Première électrophorèse (16) ...... 18 Figure 16 : Deuxième électrophorèse (16) ...... 19 Figure 17 : Troisième électrophorèse (16) ...... 19 Figure 18 : Electrophorèse (18) ...... 20 Figure 19: Diagramme de Vienn (13) ...... 21 Figure 20 : Diagramme chronologique de l’utilisation des échantillons (13) ...... 22 Figure 21 : Fluorochromes (24)...... 23 Figure 22 : Sondes hydrolysables (24)...... 23 Figure 23 : Sondes HybProbes (24) ...... 24 Figure 24 : Balises moléculaires (24)...... 24 Figure 25 : Amorces scorpion (24) ...... 25 Figure 26 : Modélisation de la PCR en temps réel (24) ...... 25 Figure 27 : Amorces et leur utilisation selon les études (20) ...... 26 Figure 28 : Robert Koch (27) ...... 28 Figure 29 : Bacille de Koch au microscope (27) ...... 29 Figure 30 : SARS-Associated Coronavirus (33) ...... 30 Figure 31 : Présentation graphique de l’étude (37)...... 33 Figure 32 : Trichomonas tenax en train de rompre la membrane d’une cellule (41) ...... 34 Figure 33 : Résultats de l’étude (40)...... 37 Figure 34 : Trogocytose de (44) ...... 38 Figure 35 : Gain d’attache selon la prescription antibiotique (51) ...... 42

SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) Figure 36 : Candida albicans (53)...... 43 Figure 37 : Excipient Biobase® (54) ...... 44 Figure 38 : Schémas d’administration préconisés chez l’adulte (45)...... 46 Figure 39 : Recommandation d’antibiothérapie curative dans le traitement des maladies parodontales (45)...... 46 Figure 40 : Nombre de prescriptions d’antibiotiques (60) ...... 47 Figure 41 : Évolution sur 10 ans de la résistance aux antibiotiques chez E. coli (humain) (60) ...... 47 Figure 42 : Schémas d’administration d’antibiothérapie prophylactique (45) ...... 48 Figure 43 : Recommandation de prescription antibioprophylactique en parodontologie (45) ...... 48 Figure 44 : Représentations en 2D et 3D des molécules de bicarbonate de soude (à gauche) et de peroxyde d’hydrogène (à droite) (63) ...... 49 Figure 45 : Brosse à dent recommandée par Bass, une vue du haut et une vue de près de ses brins (68) ...... 51 Figure 46 : Comparaison des indices de plaque et de saignement avec le fil dentaire (DF) ou la brossette interdentaire (IDB) sur 6 à 12 semaines (72) ...... 52 Figure 47 : Détecteur de tartre...... 53 Figure 48 : Différentes méthodes de traitement et polissage de l’émail (76) ...... 54 Figure 49 : Évaluation du ratio efficacité du détartrage/dommage sur l’émail selon la méthode (76) .55 Figure 50 : Représentation de la quantité de substance perdue cumulée selon la durée du traitement (77) ...... 55 Figure 51 : Etats de surface amélaire après 40s de traitement par différents agents de polissage (77). 55 Figure 52 : Temps passé au fauteuil cumulé selon le type de traitement (78)...... 56 Figure 53 : Résultats de la fermeture des poches parodontales avec le protocole antiparasitaire (17) . 58

SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) Table des abréviations

× E. gingivalis = Entamoeba gingivalis

× T. tenax = Trichomonas tenax

× NTE/STE-buffer = NaCl-Tris-EDTA buffer (anglais) = Sodium-Tris-EDTA buffer

(anglais) = Tampon STE (français) = Chlorure de sodium-Tris-EDTA (français)

× PCR = Polymerase Chain Reaction (anglais) = ACP (français)

× ACP = Amplification en chaîne par polymérase

× ADN = Acide désoxyribonucléique

× VIH = Virus de l'immunodéficience humaine

× SIDA = Syndrome d’immunodéficience acquise

× SRAS = Syndrome respiratoire aigu sévère

× SARS-Cov-1 = Coronavirus du syndrome respiratoire aigu sévère

×IL-1β = Interleukine 1 (isoforme β)

× IL-10 = Interleukine 10

× IL-8 = Interleukine 8

× TNFα = Tumor necrosis factor alpha (anglais) = Facteur de nécrose tumorale α (français)

× BMR = Bactéries multi-résistantes

× AFSSAPS = Agence française de sécurité sanitaire et des produits de santé.

× ANSM = Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé

× UFSBD = Union française pour la santé bucco-dentaire

SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) Introduction

La cavité orale présente une très grande diversité de micro-organismes, plus de 1200 espèces y auraient été identifiées (1). Les espèces présentes et leurs proportions varient d’un individu à l’autre, selon son hygiène, son sexe, son âge ou son état de santé. Parmi toutes ces bactéries, virus, levures, et protozoaires, se trouvent des pathogènes qui pourraient être impliqués dans l’étiologie multifactorielle de la maladie parodontale. En effet, un déséquilibre dans les interactions entre les micro-organismes oraux à l’origine d’une dysbiose peut entrainer une réponse immunitaire non contrôlée de l’hôte, elle-même à l’origine d’une inflammation entrainant alors la destruction des tissus parodontaux (2). L’implication des bactéries des complexes orange et rouge dans l’étiopathogénie de la maladie parodontale a été reconnue (1). Cependant, l’origine bactérienne exclusive ne convainc pas certains membres de la communauté scientifique et d’autres micro-organismes intéressent les chercheurs en odontologie, notamment deux protozoaires : Entamoeba gingivalis et Trichomonas tenax. Pour prouver l’implication de ces parasites dans l’étiopathogénie de la maladie parodontale il convient dans un premier temps de les connaître et de les identifier correctement parmi la flore buccale. Les techniques utilisées sont l’identification au microscope et les techniques de PCR (Polymerase Chain Reaction). Leurs avantages et inconvénients de ces méthodes nécessitent un développement afin d’estimer la cohérence de leur utilisation dans les recherches sur la maladie parodontale. Dans un second temps, l’analyse des résultats d’études confrontant les deux protozoaires aux « postulats de Koch », en tenant compte des capacités technologiques disponibles et du rationnel scientifique que la notion de dysbiose a réactualisé, met en avant les mécanismes de pathogénicité de E. gingivalis et T. tenax. Enfin, une proposition de traitement parodontal, le « protocole Bonner-Dunoyé » de 2015, se base sur la certitude d’une implication de ces deux parasites dans la pathogénèse de la maladie parodontale sera éprouvée. Le décryptage point par point avec une confrontation de ce traitement aux connaissances scientifiques actuelles, peut avoir un intérêt pour déterminer sa pertinence dans le traitement parodontal en 2021.

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SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) Partie 1 : Protozoaires oraux et techniques d’identification

Dans un premier temps, il convient de définir quelques termes pour éviter les confusions. Les protozoaires sont des organismes généralement unicellulaires appartenant au règne animal qui ont pour particularité de ne survivre qu’en milieu humide (eau, sols humides, liquides organiques…) en se nourrissant principalement par phagocytose. Ils sont chimio hétérotrophes, tout comme les animaux, c’est-à-dire qu’ils s’alimentent grâce à des substances organiques retrouvées dans leur environnement qu’ils ne peuvent pas synthétiser. Par oppositions aux végétaux chlorophylliens qui sont photoautotrophes, qui tirent leurs éléments nutritifs du dioxyde de carbone inorganique et de l’énergie lumineuse, et à certaines bactéries autotrophes.

Figure 1 : Les modes trophiques : classification des organismes en fonction des sources de nutrition

Les classifications récentes répartissent les organismes amiboïdes dans plusieurs taxons ; c’est- à-dire qu’ils sont regroupés en groupes biologiques selon des critères communs précis. Les amibes font partie des protozoaires réparties en cinq taxons ; - , dont Entamoeba histolytica et Entamoeba gingivalis font partie -Rhizaria - Heterokonta - Excavata, dont Trichomonas tenax et Trichomonas vaginalis font partie - Opisthokonta

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SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) Figure 2 : Une classification phylogénétique d’organismes eucaryotes (3)

D’après le dictionnaire Larousse, un parasite est un organisme qui se nourrit strictement aux dépens d'un hôte d'une espèce différente, de façon permanente ou pendant une phase de son cycle vital (4). Cette notion est à bien distinguer de la symbiose, qui est une association mutuellement bénéfique entre deux organismes, voire indispensable à leur survie. On s’intéresse ici à Trichomonas tenax et Entamoeba gingivalis. Ces deux protozoaires se nourrissent de microorganismes de leur milieu, notamment des cellules polymorphonucléaires. Ils sont considérés comme « parasites » dans la cavité orale (5). Dans la suite du document, on nommera ces 2 espèces indistinctement par les termes : parasite, amibe, et protozoaire. Ainsi que par leur abréviation respective : T. tenax et E. gingivalis.

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SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) 1. Présentation de deux parasites oraux suspectés d’être impliqués dans la maladie parodontale Trichomonas tenax Tout d’abord, la place de T. tenax dans l’arbre phylogénétique est : Domaine : Eucaryotes Sous-domaine : Bikonta Règne : Excavata Embranchement : Metamonada Sous-embranchement : Trichozoa Super-classe : Parabasalia Classe : Trichomonadea Ordre : Trichomonadida Famille : Trichomonadidae Genre : Trichomonas Trichomonas tenax est un protozoaire anaérobie aérotolérant, c’est-à-dire qu’il supporte un milieu avec de l’oxygène sans pour autant en dépendre. On le retrouve en très grande majorité dans la cavité orale, parfois dans les poumons. Duboucher, Mogenet M, et Périé G. ont rapporté en 1995 un cas d’une tumeur de la glande submandibulaire dont la biopsie contenait des amibes T. tenax (6). Ce cas isolé n’apporte qu’un niveau de preuve très faible. Dans l’article de Mallat et al. de 2004, on retrouve T. tenax dans des cas d’infections bronchopulmonaires. Il semblerait donc que, sans être le seul micro- organisme responsable, T. tenax participe à la co-infection par des trichomonas. L’amibe habituellement orale se retrouve dans le tractus pulmonaire par aspiration de l’oropharynx (7). Dans leur étude de 2010 sur la prévalence de T. tenax chez les patients atteints de maladie parodontale et chez les patients sains, Ghabanchi et al. précisent que la transmission de T. tenax entre individus peut se faire directement par la salive, les baisers et les projections de gouttelettes mais aussi indirectement par l’utilisation de la même vaisselle contaminée (8). Son anatomie est typique des Trichomonas : une forme en amande, un axostyle, un flagelle formant une membrane ondulante le rendant motile et quatre flagelles antérieurs en « touffe ».

Figure 3 : Trichomonas Tenax (vue au microscope optique à gauche et schéma à droite) (9) 10

SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) Entamoeba gingivalis La place d’Entamoeba gingivalis dans l’arbre phylogénétique est : Domaine : Eucaryotes Sous-domaine : Unikonta Embranchement : Amoebozoa Sous-embranchement : Sarcodina Super-classe : Rhizopoda Classe : Lobosa Ordre : Amoebida Famille : Genre : Entamoeba Entamoeba gingivalis a été la première amibe orale détectée chez l’Homme. On la retrouve dans la cavité orale des humains et animaux domestiques (10). En 1914, Barret fait une description détaillée de cette Entamoeba gingivalis qu’il retrouve dans les cas de pyorrhée, qui sont une appellation pour les cas d’écoulement purulent parodontal, qu’on attribuerait de nos jours à la parodontite. La quantité d’amibe serait de plus en plus élevée qu’on approche du fond de la poche parodontale (11). Tout comme T. tenax, E. gingivalis supporte une anaérobiose facultative (et non pas stricte), c’est-à-dire que son métabolisme supporte un milieu avec ou sans oxygène (5). L’Entamoeba gingivalis est un parasite muni de pseudopodes, sous forme d’excroissances cytoplasmiques, nécessaires à sa motilité. Ces pseudopodes servent également à l’alimentation de E. gingivalis via un procédé de phagocytose : les extensions forment des « bras » qui entourent puis saisissent une bactérie, un leucocyte ou une cellule épithéliale morte pour l’ingérer. Une fois dans le cytoplasme l’élément est digéré. Cette amibe n’a généralement qu’un petit noyau, un ectoplasme transparent et un endoplasme granuleux contenant des éléments phagocytés. Sa taille moyenne est de 10 à 20 μm, et n’atteint que très rarement les 50 μm de diamètre.

Figure 4 : Entamoeba gingivalis (Trophozoïte) (12)

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SIMO (CC BY-NC-ND 2.0)

Figure 5 : Entamoeba gingivalis au microscope optique (13)

Entamoeba gingivalis possède plusieurs sous-types (ST), ST1 est le premier à avoir été décrit. En 2018, Garcia et al. ont trouvé un deuxième sous-type ST2, aussi appelé « kamaktli variant ». La différence entre ces sous-types se fait au niveau de la région ITS1-18S-ITS2 ARNr (acide ribonucléique ribosomique) avec un polymorphisme nucléotidique. Les études phylogénétiques et l’analyse moléculaire confirment que ST2 est un organisme distinct de ST1 (14). Ils proposent un tableau phylogénétique pour tenter de placer ce nouveau sous-type. On décrira plus loin les techniques d’observation des différents sous-types par PCR.

12

SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) Figure 6 : Arbre phylogénétique modifié (14)

13

SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) 2. Techniques d’identification parasitaire Techniques de prélèvements Les protocoles des études sur Entamoeba gingivalis s’accordent tous plus ou moins sur la localisation et l’outil de prélèvement : biofilm intra-sulculaire et sonde/curette stérile. Cependant entre 1989 et 2019, les critères, le nombre de prélèvement par patient, et les substrats de conservation ont changés selon la méthode d’observation des amibes qui suivra. Les outils de prélèvement sont globalement identiques. Ils sont soit rigides avec une curette ou sonde stériles (8,13–17) soit absorbants de type pointe papier, écouvillon ou brosse stériles (8,14,18– 20). Le moyen de conservation des échantillons dépend de l’utilisation future des prélèvements, pour une identification au microscope ou par PCR. Une solution saline, avec plus ou moins de colorant pour les échantillons montés sur lame dans le but d’identifier les amibes au microscope à contraste de phase (19,21). Ou encore une conservation dans la salive du patient et un montage immédiat sur lame pour éviter les déformations lors de l’identification microscopique (13,17). Une solution tampon, une congélation, plus ou moins une ébullition, et une centrifugation pour les échantillons utilisés dans les identifications par PCR (13,14,16,20).

Identification microscopique Dans les premières études sur la présence de parasites au niveau parodontal, l’identification est faite au microscope à contraste de phase. Le substrat pour le montage de la lame est différent selon les techniques d’identification : - L’utilisation de la salive du sujet est très fréquente (13,15,17,22). D’après Bonner et al. 2013 ce substrat est « obligatoire, pour éviter la déformation des protozoaires » (17). - L’autre substrat de montage utilisé fréquemment est la solution saline classique à laquelle est ajouté un élément colorant pour créer plus de contraste au microscope : la safranine (10) et le Giemsa (colorant spécifique des chromosomes) après un séchage de l’échantillon (8). L’identification des parasites sur la lame est validée par des critères spécifiques à chaque protocole d’étude : - Pour Linke et al. en 1989, il faut rechercher des parasites au stade trophozoïte. C’est le stade d’alimentation active par phagocytose. Le stade opposé est celui du kyste, où le protozoaire est végétatif et infectieux. Si un organisme ne présente pas les caractéristiques de « l’activité trophozoïte » il n’est pas comptabilisé. Il faut donc compter les protozoaires sur chaque échantillon, notamment ceux qui ont phagocyté des globules rouges ou des leucocytes, le tout grâce à un microscope de grossissement 40 x. (15) ; tout comme Rachmawati et al. 2007, qui effectuent un comptage des amibes par échantillon (21) ou Luszczak et al. en 2016 qui valident la présence de l’amibe au microscope x400 par l’observation de la morphologie et du mouvement caractéristique du pseudopode (19).

14

SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) - D’autres protocoles ne cherchent pas à compter les amibes, mais simplement à valider la présence de parasites dans l’échantillon étudié (8). - Dans les études de Bonner et al. en 2013 et 2014, la méthode d’identification contient plus de critères validant l’identité de l’amibe : E. gingivalis est considérée comme présente si l’on voit au microscope : x Un seul pseudopode visible à la fois, très reconnaissable lors de la phagocytose x Des vacuoles intracellulaires foncées x Un noyau contenant un caryosome (masse sphérique de chromatine dense) et de la chromatine périphérique (13,17) En cas de doute sur l’organisme observé, la cellule n’est pas comptabilisée comme une amibe. Certaines limites de l’identification par microscope sont connues de l’équipe menant cette étude. En effet, après un diagnostic clinique positif de parodontite, l’observateur serait plus enclin à conclure qu’une cellule ressemblant à une amibe en est une. Bonner et al. admettent donc que les observateurs sont soumis à un biais qui les amènerait par exemple de confondre une cellule neutrophile avec E. gingivalis et ainsi gonfler le nombre d’amibes comptées. Il est aussi supposé que la variabilité génétique parmi les E. gingivalis pourrait perturber le diagnostic microscopique. Dans le protocole Bonner-Dunoyé, le praticien utilise le tableau suivant :

Figure 7 : Tableau tiré du protocole Bonner-Dunoyé (22)

Dans ce protocole, un praticien équipé d’un microscope au cabinet doit donc être capable de différencier des bactéries (bacilles, vibros et spirochètes), des amibes (E. gingivalis, T. tenax ou autres), des champignons (candida) et des cellules immunitaires (globules blancs). Les risques d’erreurs d’identifications sont accrus avec le nombre d’éléments différents à connaître pour un praticien de ville, qui n’est pas correctement formé à l’identification des micro-organismes (22). L’utilisation de microscopes dotés d’une caméra permet aux praticiens qui réalisent l’examen des prélèvements salivaire d’observer la mobilité des organismes présents sur la lame.

L’identification visuelle des protozoaires est perfectible en raison des fortes ressemblances entre les micro-organismes, et du manque de reproductibilité des résultats car elle est dépendante d’observateurs faillibles. Les chercheurs ont alors tenté de développer une méthode plus fiable pour s’assurer de la présence ou non d’amibe dans un échantillon.

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SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) Identification par PCR La technique repose sur plusieurs connaissances, la structure en double brin de l’ADN et entre autres le pouvoir de polymérisation de certains organismes (par exemple la Taq polymérase).

Le principe de la PCR conventionnelle simplifié : Pour réaliser une PCR schématique il faut : une amorce 5’, une amorce 3’, de l‘ADN double brin, des Taq polymérase et une solution tampon contenant les nucléotides nécessaires à la polymérisation (Figure 8).

Figure 8 : Eléments nécessaires à la PCR (23)

Dans un premier temps il faut dénaturer l’ADN, c’est-à-dire séparer le double brin (Figure 9). Pour cela on chauffe à 95°C.

Figure 9 : Dénaturation (23)

Ensuite, la température est modifiée pour permettre aux amorces 5’ et 3’ de s’hybrider à leurs séquences complémentaires sur les brins simples d’ADN (Figure 10).

Figure 10 : Hybridation (23)

16

SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) A 72°C les Taq polymérases vont utiliser les nucléotides présents dans la solution pour polymériser l’ADN à partir des amorces, créant ainsi des brins tronqués (Figure 11). C’est la fin du 1er cycle (Figure 12).

Figure 11 : Amplification (23)

Figure 12 : Fin du 1er cycle (23)

A la fin du 2ème cycle (Figure 13), on obtient plusieurs types de brins mais pas encore de fragments double brins de la région que l’on veut amplifier.

Figure 13 : Fin du 2ème cycle (23)

C’est à la fin du 3ème cycle que l’on obtient les fragments recherchés : de l’ADN double brin limité par les séquences d’amorces 5’ et 3’ (Figure 14).

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SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) Figure 14 : Fin du 3ème cycle (23)

Les cycles suivants ont pour but de rendre ces fragments majoritaires dans la solution par une amplification exponentielle. La détection de ces fragments choisis se fait par électrophorèse sur gel d’agarose. La migration des molécules sur le gel dépend de leur poids moléculaire. Donc si on connait le poids présumé des fragments (car le nombre de nucléotides est défini) en utilisant comme échelle un marqueur de poids moléculaire, on doit pouvoir prévoir l’emplacement des fragments sur le gel. Une bande d’ADN sur le gel à l’emplacement prévu peut alors confirmer que l’espèce d’amibe recherchée est présente dans l’échantillon par exemple. Dans l’étude de Kikuta et al. de 1996, les techniques de PCR conventionnelle sur un petit nombre d’échantillons, avec les amorces EGO-1 et EGO-2 , a donné les résultats suivants : Les lignes 1 et 2 de l’électrophorèse sur gel d’agarose (Figure 15) révèlent respectivement la présence d’Entamoeba gingivalis ATCC 30927 (Ligne 1) et Entamoeba gingivalis ATCC 30928 (Ligne 2). Les autres lignes correspondent à plusieurs formes d’Entamoeba gingivalis, Trichomonas tenax, différentes espèces de Candida. La ligne 13 est le contrôle négatif et m le marqueur de poids moléculaire.

Figure 15 : Première électrophorèse (16) 18

SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) Une deuxième électrophorèse (Figure 16) nous montre que seule E. gingivalis ATCC 30927 est présente dans l’échantillon ; par opposition aux autres bactéries recherchées (Prevotella melaninogenica, ochracea, , etc…).

Figure 16 : Deuxième électrophorèse (16)

En plus d’avoir réussi à détecter E. gingivalis par PCR, les auteurs ont cherché à quantifier les amibes présentes dans leurs échantillons. Sur cette troisième électrophorèse (Figure 17), les lignes 1 et 13 sont des contrôles positifs. Les lignes 2 à 4 créent une « échelle » pour essayer de quantifier les amibes. En effet, 3000 E. gingivalis sont déposées sur la ligne 2, 300 sur la ligne 3, 30 sur la ligne 4 et 3 sur la ligne 5. Les lignes 6 à 10 sont des échantillons de plaque mélangés au même nombre d’amibes que 2, 3, 4 et 5. Les échantillons de plaque étudiés sont déposés en 11 et 12. Les deux présentent une marque à 1,4kb, donc on en déduit qu’il y a des Entamoeba gingivalis dans ces échantillons. On peut même présumer qu’il y aurait plus de 30 amibes dans l’échantillon 11, contrairement à l’échantillon de la ligne 12, d’après l’intensité de la migration sur le gel d’agarose et les « échelles » établies par les lignes précédentes. Mais cette technique de comptage manque de précision (16).

Figure 17 : Troisième électrophorèse (16) 19

SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) Trim et al. ont également utilisé cette méthode et les amorces EGO-1 et EGO-2 en 2011 pour déterminer la présence d’E. gingivalis dans des échantillons issus de patients atteints de maladie parodontale et pour comparer les résultats avec des échantillons de patients sains. Les chercheurs ont admis dans l’étude 26 patients à qui une parodontite avait déjà été diagnostiquée (sans plus de précision) mais non traitée. Ils prélèvent leurs échantillons dans 3 types de sites : les sites « sains » dans les poches parodontales ≤3mm, ceux « modérés » dans les poches >4mm, et ceux atteints de parodontite sévère ≥7mm. Sur l’électrophorèse (Figure 18), la ligne 1 est le marqueur de poids moléculaire, la 2 est un contrôle négatif, la 3 un contrôle positif. L’échantillon placé sur la ligne 4 provient d’un patient infecté par des E. gingivalis alors que les patients des lignes 5 à 8 ont un résultat négatif. Sur les 26 patients atteints de maladie parodontale testés, seuls 7 ont eu un résultat positif à E. gingivalis par PCR conventionnelle, soit 27%. Et aucun des patients sains n’a été testé positif aux amibes recherchées.

Figure 18 : Electrophorèse (18)

Cependant, la PCR conventionnelle présente des limites. C’est pourquoi les auteurs ont également réutilisé les échantillons pour des tests PCR en temps réel, pour ses capacités quantitatives, sa plus grande précision, et pour ses risques de contamination réduits. On décrira leurs résultats plus loin (18). Bonner et al. en 2014 ont tenté de comparer les résultats de l’identification de E. gingivalis par PCR conventionnelle avec l’identification microscopique. Les patients ayant fournis les échantillons ont été examinés cliniquement pour détecter ceux atteints par une parodontite. Les auteurs de l’étude créent alors un raccourci entre la présence d’E. gingivalis et la maladie parodontale, ainsi l’identification par PCR ou microscope de l’amibe devient l’identification de la maladie parodontale par abus de langage. Les amorces utilisées pour la PCR ont un nouveau design et ils se sont servis de sondes Taqman. Les résultats comparant les trois méthodes d’identification sont présentés sur un diagramme de Vienn (Figure 19).

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SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) Figure 19: Diagramme de Vienn (13)

Il faut interpréter les résultats de la manière suivante : toutes les méthodes ont exclu 20 échantillons (où Entamoeba gingivalis serait absente). Toutes les méthodes ont inclus 50 échantillons (où Entamoeba gingivalis est présente). L’identification clinique inclue 72 échantillons : - 50 échantillons, communs dans toutes les techniques, - 2 échantillons qu’elle est la seule technique à inclure, - 8 échantillons communs à la technique de PCR, - 12 derniers échantillons communs avec la technique par microscope. L’identification au microscope inclue 65 échantillons : - 50 échantillons, communs dans toutes les techniques, - 2 échantillons qu’elle est la seule technique à inclure, - 12 échantillons communs à l’identification clinique, - 1 dernier échantillon, commun à la technique par PCR. L’identification par PCR inclue 69 échantillons : - 50 échantillons, communs dans toutes les techniques, - 10 échantillons qu’elle est la seule technique à inclure, - 8 échantillons communs à l’identification clinique, - 1 dernier échantillon, commun à la technique par microscope. On constate que les résultats ne se recoupent que partiellement.

Au-delà des différences de sensibilité et de spécificité des méthodes, la divergence des résultats s’explique par la diversité des éléments identifiés : la PCR recherche des amplicons, le microscope permet de détecter la morphologie d’une cellule, et les paramètres d’identification clinique sont encore plus variés.

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SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) L’étude cherchait également à comprendre les résultats négatifs lors de l’utilisation de la PCR. Parmi les 50 échantillons négatifs au diagnostic par PCR, 14 d’entre eux contiendraient des inhibiteurs à la PCR, comme des sels, des produits chimiques, des inhibiteurs enzymatiques, ou des molécules délétères pour les amorces (Figure 20). L’équipe de l’étude a ensuite cherché dans les 36 échantillons restants des preuves de dégradation de l’ADN pour expliquer le résultat négatif de la PCR mais sans succès (13).

Figure 20 : Diagramme chronologique de l’utilisation des échantillons (13)

Le principe de la PCR en temps réel simplifié : Le but de la PCR en temps réel est d’aller plus loin que la simple détermination de la présence ou non d’amplicons (c’est-à-dire les produits de l’amplification par PCR) accumulés en fin de cycle. En effet, cette méthode permet d’obtenir les courbes d’amplification pendant les cycles d’amplifications. En principe, lors d’une PCR conventionnelle on pourrait déduire le nombre d’amplicons présents à chaque moment du cycle, cependant les réactions manquent de fiabilité. On ne peut donc pas s’appuyer sur cette méthode pour obtenir des données quantitatives.

On peut distinguer 5 méthodes utilisées en PCR en temps réel : x L’utilisation d’agents fluorescents (fluorochromes) activés quand l’ADN double brin-cible est répliqué, rend visibles et quantifiables les amplifications du fragment recherché. La fluorescence continue après la fin de l’amplification.

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SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) Figure 21 : Fluorochromes (24) x La technologie « Hydrolyse de sondes » repose sur la capacité de la Taq polymérase à hydrolyser les sondes présentes sur le brin qu’elle est en train d’amplifier. Il suffit donc d’ajouter des sondes TaqMan composées d’un fluorochrome émetteur en 5’, d’une séquence nucléotidique choisie et d’un fluorochrome suppresseur en 3’. Lors de la dénaturation, les sondes TaqMan et les amorces vont s’hybrider au brin d’ADN. La Taq polymérase va alors amplifier l’ADN et hydrolyser la sonde TaqMan quand elle arrivera à son niveau. La séparation du fluorochrome émetteur du suppresseur va déclencher un rayonnement fluorescent mesurable. La fluorescence est détectable dès l’hydrolyse de la sonde.

Figure 22 : Sondes hydrolysables (24) x Ce principe fonctionne également avec deux sondes, on l’appelle alors « HybProbes ». Il faut une première sonde dotée d’un fluorochrome donneur en 3’et une deuxième, linéaire et aussi complémentaire à l’ADN cible, dotée d’un fluorochrome émetteur en 5’. Dans ce cas-là, la fluorescence n’est visible que lorsque les sondes sont hybridées à l’ADN cible.

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SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) Figure 23 : Sondes HybProbes (24) x Les « balises moléculaires » sont des sondes en forme d’épingle à cheveux composées : d’un fluorochrome émetteur en 5’, d’une séquence nucléotidique complémentaire à l’ADN cible, et d’un fluorochrome suppresseur en 3’. Pour lui donner sa forme d’épingle, il faut que les zones 5’ et 3’ soient complémentaires, formant ainsi un tronc. Seule une hybridation parfaite avec une séquence de l’ADN peut forcer la balise à changer de conformation, en séparant le tronc en deux bras. Cette séparation des fluorochromes émetteurs et suppresseurs entraine une fluorescence, qui est visible jusqu’au détachement de la balise du brin d’ADN amplifié par la Taq polymérase. La balise retrouve alors sa forme d’épingle et la fluorescence cesse.

Figure 24 : Balises moléculaires (24) x Les amorces scorpions, ou « self-fluorescing amplicon » sont une variante des balises moléculaires vues précédemment. L’amorce classique et une balise moléculaire en épingle sont liées par un bloqueur. La balise est composée : d’un fluorochrome émetteur en 5’, d’un tronc, d’une séquence nucléotidique complémentaire avec l’amplicon, et d’un fluorochrome suppresseur en 3’. Après une première amplification de l’ADN, on obtient un brin d’ADN doté d’une balise en 5’. Lors d’une nouvelle dénaturation de l’ADN, la balise changera de conformation pour aller s’hybrider parfaitement avec une séquence de son propre brin d’ADN.

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SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) Ainsi les fluorochromes émetteurs et suppresseurs seront séparés, ce qui entraine une fluorescence quantifiable.

Figure 25 : Amorces scorpion (24)

La modélisation informatique de l’intensité de la fluorescence en fonction du nombre de cycles donne ce type de courbe (Figure 26) :

Figure 26 : Modélisation de la PCR en temps réel (24)

Le cycle seuil (Ct) représente le nombre de cycles requis où le signal d’émission de fluorescence est statistiquement et significativement plus élevé que la ligne de base. La courbe de fluorescence est proportionnelle au nombre d’amplicons présents dans l’échantillon en temps réel (Figure 26). La méthode de PCR en temps réel avec des fluorochromes (SYBR Green) a servi à Trim et al. en 2011, et elle a donné de meilleurs résultats que la PCR conventionnelle. En effet, sur les mêmes échantillons la PCR en temps réel a détecté des amibes chez plus de patients atteints de maladie parodontale (diagnostiquée avant l’étude) que la PCR conventionnelle, 18 contre 7 (soit 69% contre 26%) et aucun patient sain n’a été testé positif (18).

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SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) En 2019, Zaffino et al. ont développé un nouveau test PCR en temps réel capable de différencier les sous-types connus d’Entamoeba gingivalis. Pour cela ils avaient besoin de nouvelles amorces. Ils ont donc créé EG1F, sensible au sous-type ST1 et EG2R, sensible au ST2-kamaktli (Figure 27). Le kit utilisé est le QuantiTect Probe PCR kit (Qiagen, France) (20).

Figure 27 : Amorces et leur utilisation selon les études (20)

On a pu voir deux types de méthodes d’identification des protozoaires étudiés : l’identification morphologique par le microscope et l’identification génétique par la PCR. Chaque méthode présente ses avantages, tout comme ses inconvénients, qui peuvent être complémentaires.

L’aspect quantitatif peut être apporté par la PCR (conventionnelle avec une échelle de poids moléculaire, ou plus par PCR en temps réel pour plus de précision), alors qu’il est difficile à voir avec l’identification microscopique. De plus, la précision des amorces en PCR peut permettre de mettre en avant des variants des amibes étudiées. À l’inverse, l’avantage du montage sur lame (avec un substrat neutre, si possible de la salive) est qu’il conserve les microorganismes vivants, donc on peut observer la motilité des organismes, ce qui est impossible après les traitements des échantillons pour la PCR. On peut conclure que, même si aucune de ces méthodes n’est exempte de défaut, les résultats complémentaires issus de ces techniques serviront à étudier l’impact des protozoaires dans la maladie parodontale.

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SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) Partie 2 : Hypothèses d’une implication parasitaire dans la maladie parodontale

La parodontite est une maladie multifactorielle donc l’étiologie bactérienne est connue et bien documentée. Les espèces du complexe rouge sont particulièrement pointées pour leur potentiel parodontopathogène : Aggregatibacter actinomycetemcomitans, Tannerellaforsythia, et Porphyromonas gingivalis par exemple (10). On sait que la présence de tartre, les traumatismes occlusaux, les restaurations iatrogènes etc…sont des facteurs aggravants. Une implication génétique est également avancée pour expliquer la prédisposition de certains individus. Cependant, il reste des aspects encore difficiles à expliquer (le basculement d’une gingivite vers une parodontite, la sévérité de la parodontite, les parodontites localisées…). Les chercheurs se sont alors penchés sur d’autres micro-organismes présents dans le biofilm notamment des protozoaires oraux connus tels que E. gingivalis et T. tenax, pour savoir s’ils ont eux aussi un rôle dans la pathogénèse de la maladie parodontale.

1. Définitions, applications et limites de la pathogénicité en microbiologie Définitions Tout d’abord, il convient de bien différencier les termes de virulence et pathogénicité. Les définitions exactes de ces appellations varient selon le domaine d’étude. Thomas et Elkinson en 2004 ont cherché un consensus dans la littérature disponible. Pour le domaine médical, ils concluent que la virulence correspond à la sévérité de la maladie causée par le pathogène ; c’est-à-dire que la virulence est la mesure la pathogénicité d’un organisme (25). Pour affirmer la pathogénicité d’un organisme, les microbiologistes se réfèrent souvent à des « postulats », qui décriraient les caractéristiques nécessaires pour affirmer l’implication d’un unique micro-organisme dans une maladie. Le pathogène suspecté devrait alors répondre à un ensemble de critères, appliqués méthodiquement, pour prouver un lien de causalité avec la maladie. Nommés plus tard « postulats de Koch » d’après le physicien allemand Robert Koch, l’utilisation de ces principes a été initiée par Friederich Löffler en 1884. Dans son article, Löffler décrit des principes auxquels les microbes étudiés doivent répondre pour être jugés responsables de la pathologie, ici la diphtérie.

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SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) Ces trois critères sont : x Une présence importante du pathogène suspecté dans les tissus affectés x Le pathogène suspecté doit pouvoir être isolé et cultivé en « cultures pures » x La pathologie doit pouvoir être reproduite à partir de ces cultures pures (26)

Robert Koch peut être considéré comme l’un des pères-fondateurs de la bactériologie dans les années 1870-1880. Ses travaux sur la tuberculose lui ont valu un prix Nobel de médecine en 1905. Il a notamment travaillé sur les méthodes d’expérimentation scientifique (cultures pures, colorations histologiques…), plus que sur la méthodologie en elle-même. Koch n’a jamais rédigé de « postulats » en tant que tels.

Figure 28 : Robert Koch (27)

Grâce à une lecture approfondie de ses travaux, Christoph Gradmann a réussi dans son article A spirit of scientific rigour: Koch's postulates in twentieth-century medicine de 2014 à dégager quatre grands principes, sous-entendus par Koch : x « Pour comprendre une maladie il convient d’en décrire les causes » x « Ces causes devraient être indispensables. Actuellement, on suppose qu’elles suffisent à expliquer la pathogénèse » x « L’utilisation de modèles expérimentaux, par exemple le modèle animal, pour recréer la pathologie humaine est une piste intéressante et est réalisable » x « Avec l’identification du pathogène causal, on peut avoir un contrôle sur la maladie. La phrase ‘trouver la cause, trouver le remède’ résume la mission de la biomédecine moderne » (26). Cependant, l’interprétation des postulats de Koch est dépendante de l’auteur, du domaine d’étude et de l’époque. Le fond est similaire, mais l’énoncé des principes diffèrent. Par exemple, pour Hall et Lemoine en 1991, un micro-organisme qui répond aux postulats de Koch doit : x Être identifié chez chaque malade x Pouvoir être isolé après avoir été mis en culture pure x Causer la maladie, après isolation et culture, si on l’introduit chez un individu vulnérable, et pouvoir être à nouveau isolé (28). Ces interprétations du travail de Koch supposent donc qu’un pathogène, s’il répond aux conditions définies par ces « postulats », serait la seule cause de la pathologie étudiée. 28

SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) Utilisations des postulats L’une des premières démonstrations utilisant ces postulats date de 1887, avec l’article L’étiologie de la tuberculose de Koch (29). Selon lui, prouver l’association de la tuberculose avec le bacille n’est pas suffisant pour confirmer le lien de causalité. Le succès de l’inoculation du bacille, préalablement isolé et mis en culture, sur un modèle animal est indispensable à Koch pour valider ses hypothèses (30).

Figure 29 : Bacille de Koch au microscope (27)

Le cas de l’application des postulats de Koch au VIH est notable. Duesberg, persuadé de l’absence de corrélation entre de VIH et le SIDA, a tenté sans succès d’utiliser les postulats pour prouver sa théorie. Mais S. O’Brien et J. Goedert en 1996 relèvent le même défi, et prouvent que le VIH valide bien les postulats de Koch et est donc la cause du SIDA. Selon eux, le VIH répond au postulat d’association épidémiologique. Ils notent que le VIH et ses anticorps associés sont retrouvés chez 95% des patients atteints du SIDA ; des anticorps dans 90% des dons de sang par des donneurs VIH+ ; environ 25% de nourrissons issus de mères VIH+ qui naissent VIH+ et développent le SIDA (alors que les 75% VIH- ne développent pas le SIDA). Le VIH rempli également le postulat d’isolation. En effet, depuis sa découverte, le VIH a été maintes fois isolé et mis en culture (sur des macrophages, des lymphocytes T, des lignées de cellules dites « immortelles » utilisées en culture in vitro). Le génome du virus a été cloné, une centaine de séquences (complètes ou partielles) ont été présentées et sont conservées dans des banques de données. Et l’amplification par PCR permet de repérer le virus dans la majorité des cas. Le postulat de transmission est le plus délicat à prouver. Une fois isolé et mis en culture, il n’est pas envisageable éthiquement d’inoculer le virus sur un patient sain. Le modèle humain ne peut donc pas être validé expérimentalement. Cependant, plusieurs cas de contaminations humaines et animales, décrits dans l’article, amènent les chercheurs à valider empiriquement le dernier postulat de Koch (31). La démonstration ayant fonctionné pour le VIH et le SIDA, lors de la découverte de l’étiologie du SRAS le pathogène a été confronté, avec succès, aux postulats de Koch dans l’article de Osterhaus et al. 2004 The aetiology of SARS: Koch's postulates fulfilled (32).

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SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) Les postulats utilisés sont une version, modifiée par Rivers en 1937 pour s’adapter aux cas de pathogènes viraux, constituée de six critères : x Isoler du virus chez l’hôte malade x Mettre en culture avec des cellules de l’hôte x Prouver la filtrabilité x Recréer une réaction pathologique comparable à la maladie x Isoler à nouveau le virus x Détecter une réponse immunitaire spécifique au virus Le virus SARS-CoV-1 (à différentier du CoV-2 apparu en 2019) a validé les six postulats, les auteurs ont donc conclu qu’il est la cause du SRAS de 2003. Des pistes de traitements à partir d’anticorps anti-SARS-CoV-1 ont donné des résultats prometteurs (32).

Figure 30 : SARS-Associated Coronavirus (33)

Dans les exemples vus jusqu’ici, l’étiologie des pathologies étudiées pouvait être « facilement » identifiée grâce à un seul pathogène causal. Or les recherches sur la maladie parodontale mettent en avant un mécanisme de « dysbiose » au sein de la flore parodontale, qui cause une réponse immunitaire non contrôlée de l’hôte, elle-même à l’origine d’une inflammation entrainant alors la destruction des tissus parodontaux (2). L’idée du pathogène unique est donc dépassée dans le cas de la maladie parodontale. Il faut alors revoir l’échelle d’étude, afin de prendre en compte les relations intermicrobiennes complexes, par exemple avec des échanges moléculaires et de matériel génétique entre les organismes. Pour s’adapter aux technologies et problématiques contemporaines, Hall et Lemoine proposent en 1991 leur version « restructurée » des postulats initiaux qui s’adapte aux pathologies moléculaires : x Identification des phénomènes moléculaires et cellulaires communs au processus pathologique x Caractérisation de la chronologie et la localisation de ces phénomènes x Preuve que lorsqu’on réalise les modifications moléculaires étudiées dans un modèle approprié, on obtient des altérations phénotypiques caractéristiques de la maladie x Démonstration de l’annulation du processus pathologique après rectification moléculaire dans ce modèle (28)

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SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) Dans leur article Assessment of the role of Trichomonas tenax in the etiopathogenesis of human periodontitis: A systematic review de 2019 (34) Bisson et al. utilisent eux aussi une version, revisitée par Socransky en 1992, des postulats de Koch qu’ils appliquent à T. tenax : x “Association” = présence accrue de micro-organismes au niveau des lésions parodontales x “Elimination” = éradication du micro-organisme suspecté si la thérapie fonctionne x “Host response” = induction d’une réponse immunitaire de l’hôte par le micro-organisme x “Virulence factors” = production enzymatique, par le micro-organisme, destructrice pour les tissus parodontaux x “Animal studies” = induction de lésions par le micro-organisme sur le modèle animal (34).

Les limites de la méthode Koch lui-même reconnaissait les limites de son modèle et concevait l’existence d’exceptions. Ces postulats ont évolué avec les avancées scientifiques pour rester pertinents. Les principales difficultés expérimentales étaient d’obtenir une croissance in vitro de l’agent infectieux et une nouvelle contagion sur les cobayes vertébrés. Certaines études n’ont jamais pu aboutir, faute de validation de ces postulats (35). Hall et al. indiquent en 1991 que dans certains cas il est tout simplement impossible de remplir l’ensemble des critères. Cependant, certaines limites ont pu être dépassées grâce à l’avancée majeure des techniques de mise en culture, les systèmes de recombinaison tissulaire et les animaux transgéniques (28). Depuis leur article, d’autres techniques prometteuses commencent à être utilisées, telles que la biologie intégrative qui permettrait de prédire les interactions pathogènes-hôtes grâce à l’étude du réseau moléculaire (35). Si la mise en culture des micro-organismes suspectés d’initier ou de participer au processus pathologique (détectés grâce à la biologie moléculaire) est impossible, alors la mise en œuvre des postulats de Koch revisités est limitée. C’est pourquoi Bisson et al. préconisent dans leur article de 2019 d’adapter les critères aux nouvelles technologies. La détection de séquences d’ADN devrait alors remplacer la mise en culture pour les micro-organismes incultivables (34). Bien qu’ils apportent une rigueur et un cadre méthodologique confortable, les postulats de Koch, initiaux comme revisités, ne suffisent pas à prouver l’implication de tous les pathogènes étudiés. Pour conclure, obtenir un consensus semble peu probable au regard de la complexité des interactions hôte- pathogènes, des nombreux facteurs associés à la pathologie, les cas de porteur-sain, etc. (35). Ces critères peuvent tout de même servir de trame pour guider l’expérimentation. Les recherches sur l’étiologie de la maladie parodontale s’appuient dessus comprendre la potentielle pathogénicité de certains micro-organismes. Le but étant de comprendre les interactions entre bactéries, protozoaires et cellules immunitaires et à quel degré et temporalité elles interviennent dans la dysbiose responsable des réponses immunitaire et inflammatoire non contrôlées à l’origine de la destruction tissulaire.

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SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) 2. Liens entre la maladie parodontale et T. tenax L’étiologie et les mécanismes de la maladie parodontale continuent d’être étudiés aujourd’hui, bien qu’un consensus commence à se dégager des recherches : le microbiote peut entrer en dysbiose après une altération des conditions environnementales, et causer une réponse immunitaire et inflammatoire de l’hôte, qui entraîne la destruction tissulaire (36). Un certain nombre d’études cherchent à montrer l’implication de Trichomonas tenax dans cette pathologie. En 2019 est sortie une revue systématique qui synthétise les résultats de ces études. Les critères d’inclusions, très stricts, ont permis de faire baisser le nombre d’articles étudiés de plus de 150 à seulement 25 études conservées. Les méthodes et résultats ont été analysés par les auteurs. Ils ont tenté de confronter le protozoaire étudié aux postulats de Koch (revisités) et ont également comparé le protozoaire à des micro-organismes connus pour leur pathogénicité sur le parodonte (34).

Prévalence orale de Trichomonas tenax Pour remplir le postulat « d’association », T. tenax doit être significativement plus souvent retrouvé sur les sites malades : les poches parodontales chez les patients atteints de parodontite. La littérature scientifique actuelle ne permet pas de confirmer la présence du micro-organisme étudié chez les patients atteints de parodontite. On retrouve trois études cas-témoin, Benabdelkader et al. 2019, Ferrara et al. 1986, Feki et al. 1981 (34), qui parviennent aux mêmes résultats : une prévalence supérieure des protozoaires étudiés chez les patients atteints de parodontite (30 à 42% des malades) que chez ceux atteints de gingivite (0 à 32% des patients). Parmi les patients du groupe contrôle (sains), 7 à 28% présentent des protozoaires T. tenax (34). Cependant, la taille des échantillons utilisés est trop faible pour que les résultats soient statistiquement significatifs, le protocole d’identification de T. tenax n’est pas identique (PCR ou microscope), et la méthode de prélèvement des échantillons n’est pas standardisée. Le protozoaire ne peut donc pas valider le postulat d’association pour l’instant car les études à disposition n’ont pas de niveau de preuve satisfaisant. En effet, si l’on hiérarchise les types d’études par leur niveau de preuve on aurait : tout d’abord les méta-analyses et revues systématiques, puis les essais contrôlés randomisés, ensuite les études d’observation (cas-contrôle, cohorte, cas-témoin) et enfin les études sur modèles animaux et in vitro.

Induction d’une réponse immunitaire et reproductibilité sur le modèle animal Il convient d’abord de rappeler qu’une bactérie dite « commensale » peut tout à fait induire une réponse immunitaire, qu’elle soit innée ou acquise. Ainsi, dans le cas de la réponse immunitaire acquise, la détection d’anticorps anti-T. tenax par Kott et Ader en 1961 et par Ioli et al. en 1987 ne prouve pas la pathogénicité du protozoaire. 32

SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) Dans leur étude de 2016, Govro et al. recherchent des signes inflammatoires suite à la contamination in vitro de lignées cellulaires par T. tenax. Pour cela, ils détectent la production de cytokines, telles que TNFα, IL-1β ou IL-10, par les macrophages dans différents contextes avec une technique ELISA. Les résultats sont : aucune production de cytokines pro-inflammatoires immédiatement après une contamination avec des protozoaires vivants ou lysés, mais une production d’IL-8 après un contact de 6 heures avec T. tenax lysés (avec un ratio de 1 trichomonas pour 5 macrophages) (Figure 31). Ce ne sont pas des résultats suffisants pour affirmer que T. tenax induit une réponse immunitaire (37).

Figure 31 : Présentation graphique de l’étude (37)

Bisson et al. présument qu’avec une concentration de protozoaires vivants plus importante, les macrophages pourraient produire des cytokines. Ces études in vitro présentent des limites. En effet, les lignées cellulaires et les amibes issues de banques de lignées ne reproduisent pas parfaitement les interactions retrouvées in vivo. On ne peut donc pas conclure que Trichomonas tenax rempli le postulat de « host response » (34). Concernant le postulat de la reproductibilité sur le modèle animal (« animal studies ») : aucun modèle n’a permis à ce jour d’observer T. tenax sur des animaux atteints de parodontite (34). Le postulat ne peut donc pas être validé, faute de modèle approprié. Kellerova et al. en 2017 rapportent que T. tenax a été retrouvé dans la salive de chiens et de chats de République Tchèque (38). Le potentiel de contamination humaine par les animaux domestiques pourrait être un point à investiguer. Ainsi que l’impact des Trichomonas sur la santé orale animale.

Impact des traitements parodontaux sur T. tenax Le postulat « d’élimination » correspond à la disparition, ou au moins à la diminution de la prévalence, du pathogène suspecté du site guéri grâce au traitement. Dans le cas de la parodontite on parle de traitements non-chirurgicaux (34). L’étude de Rashidi Maybodi et al. de 2016 The Effect of Nonsurgical Periodontal Therapy on Trichomonas Tenax and Entamoeba Gingivalis in Patients with présente les

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SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) résultats suivants : trois semaines après le traitement non-chirurgical (détartrage et surfaçage radiculaire), le nombre d’échantillons salivaires infectés par T. tenax a diminué, mais celui d’échantillons de plaque infectés n’a pas baissé significativement (p = 0.913). Le groupe témoin n’a reçu que des conseils d’hygiène (39). Le postulat «d’élimination », ne peut pas s’appliquer avec certitude car actuellement une seule étude de 2019 confirme que T. tenax a significativement diminué au niveau des poches parodontales après un traitement non-chirurgical (Figure 33) (40).

Facteurs de virulence et conclusion sur la pathogénicité Les facteurs de virulence d’un pathogène suspecté sont le plus souvent : x L’adhésion cellulaire x L’invasion tissulaire (par la colonisation d’un tissu) x La cytotoxicité (abîmer ou rompre les membranes cellulaires) x La production enzymatique

L’adhésion cellulaire de T. tenax aux cellules eucaryotes proviendrait d’une protéine imitant la fibronectine présente sur la membrane plasmique et l’axostyle du protozoaire. Elle aurait également un rôle dans la phagocytose des bactéries, d’après Ribaux et al. en 1983 (34). Ribeiro et al. confirment en 2015 la capacité d’adhésion de T. tenax, mais également la cytotoxicité avec des lésions et ruptures de la membrane cellulaire sur des modèles in vitro. Cette capacité de lésion membranaire participerait à l’invasion tissulaire profonde du protozoaire (41).

Figure 32 : Trichomonas tenax en train de rompre la membrane d’une cellule (41)

Cependant, d’autres auteurs comme Alderete et al. en 1984 et 1985 obtiennent des résultats contradictoires. Leurs conclusions vont vers une absence d’adhésion et de cytotoxicité pour T. tenax (42,43). Bisson et al. supposent que cette divergence de résultats provient de la durée du contact cellule- amibe, qui est de moins de 30 minutes, contre plus de deux heures pour Ribeiro et al. (34,41).

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SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) Bien que l’amibe semble présenter des facteurs de virulence pour le parodonte, qu’elle soit significativement plus présente sur les sites malades, la pathogénicité directe de T. tenax ne peut pas encore être établie. Bisson et al. nous rappellent dans leur étude de 2019, qu’une dysbiose du microbiote parodontal implique plus un dérèglement de la synergie entre les micro-organismes causant une réaction immunitaire, qui elle-même cause une destruction des tissus parodontaux mous et durs, plutôt qu’un déséquilibre quantitatif des espèces retrouvées dans les poches (34). Il semble y avoir une implication du protozoaire dans la réaction immunitaire parodontale, cependant l’incapacité à reproduire les interactions complexes entre les micro-organismes in vitro peut être un frein aux recherches sur la pathogénicité de T. tenax.

3. Liens entre la parodontite et E. gingivalis Prévalence orale d’Entamoeba gingivalis, études in vitro et modèle animal Depuis que l’amibe E. histolytica a validé les postulats de Koch en 1875 dans une étude menée par Lösch, des chercheurs qui avaient noté la ressemblance morphologique avec E. gingivalis, tels que Kartulis en 1893 ou Barrett en 1914, tentent d’appliquer ces postulats à cette amibe bien connue dans la cavité orale, pour prouver sa pathogénicité (10). On privilégie les articles où la méthode PCR est utilisée, d’abord pour sa meilleure reproductibilité des résultats car elle évite certains biais de l’identification microscopique, et aussi pour sa spécificité accrue (différenciation des variant ST1/ST2). L’identification d’E. gingivalis par PCR conventionnelle, utilisée pour la première fois par Kikuta et al. en 1996, est beaucoup moins sensible. En effet, seuls 6,25% des 32 échantillons de patients malades étaient positifs (16). Les tests comparatifs entre PCR conventionnelle, observation clinique et identification microscopique de Bonner et al. en 2014 montrent une proportion inversée d’amibes : 80% des sites malades sont contaminés, et 33% des sites sains (13). Les résultats de la PCR en temps réel de Trim et al. confirment ces proportions : 69% des sites atteints et aucun des sites sains (18). Dernièrement, une variante à E. gingivalis ST1 a été mise en lumière par Garcia et al. en 2018 : E. gingivalis ST2-kamaktli (14). Les recherches d’identification de l’amibe par PCR doivent désormais inclure ce nouveau sous-type pour être exhaustives, comme l’on fait Dubar et al. en 2019. Alors qu’ils voulaient établir la prévalence d’E. gingivalis sans traitement parodontal, ils ont trouvé 3% de ST1 et aucun ST2 chez les patients sains. Dans cette étude les patients atteints de parodontites sont prélevés sur des sites sains et des sites malades. ST1 est retrouvé à 10% et ST2 à 3% sur les sites sains, contre 70% et 18% pour les sites atteints (40). Comme le précisent Bonner et al. dans Reassessing the Role of Entamoeba gingivalis in Periodontitis en 2018 (10), aucun modèle animal fiable n’a été trouvé pour réintroduire le pathogène présumé après sa mise en culture in vitro. Il est également impossible actuellement de cultiver

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SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) Entamoeba gingivalis in vitro (10). Sans ces méthodes d’observation contrôlées, il est difficile d’imputer un phénomène immunitaire directement à l’amibe qu’on suspecte.

On peut donc conclure que le protozoaire étudié a une localisation préférentielle dans les poches parodontales, mais qu’en l’absence d’études in vitro ou sur un modèle animal, E. gingivalis ne respecte pas les postulats de Koch.

Impact des traitements parodontaux sur E. gingivalis Bien que la méthode d’identification par microscope soit limitée, Rashidi Maybodi et al. ont obtenu une diminution statistiquement significative du nombre d’échantillons où E. gingivalis est présente, que ce soit dans la salive ou la plaque, après un traitement non-chirurgical, des patients atteints de parodontite (39). Cependant, on ne peut pas s’appuyer sur ces recherches pour valider le postulat car l’identification de l’amibe avant et après le traitement n’est que « qualitative » et les 46 patients de l’étude présentent une parodontite plus ou moins sévère. Après le traitement, il y a moins de sites infectés par E. gingivalis, mais pas de preuve d’une diminution de la quantité d’amibes. Pour obtenir cette donnée, une comptabilisation par PCR aurait été nécessaire. Ainsi on pourrait savoir si le traitement non-chirurgical agit réellement sur le nombre d’amibes, et si Entamoeba gingivalis valide le postulat « d’élimination ». De même, Dubar et al. ont utilisés la méthode PCR, mais ils n’ont pas pu prouver que la fréquence des sous-types ST1 et ST2 d’E gingivalis diminuait significativement dans les échantillons issus des sites malades après le traitement parodontal non-chirurgical (en rouge Figure 33). Alors que des signes de guérison clinique, notamment la diminution de la profondeur des poches, de l’index gingival et du niveau d’attache, sont significativement améliorés sur les sites atteints après le traitement (p<0.001) (en jaune Figure 33) (40). Si un traitement améliorant l’état parodontal n’élimine pas significativement l’amibe étudiée, ici E. gingivalis, on ne peut pas valider le postulat revisité de Koch « d’élimination ».

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SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) Figure 33 : Résultats de l’étude (40)

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SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) Hypothèse sur les facteurs de virulence et pistes d’étude La nature cyclique de la parodontite pourrait être en partie expliquée par la capacité de certains organismes à transporter des bactéries pathogènes de sites malades vers des sites sains, les réinfectant ainsi. Cela existe chez les bactéries par un phénomène de « translocation » bactérienne. Linke et al. supposent que ce système est aussi présent pour E. gingivalis. Ils expliquent que les bactéries pathogènes pourraient adhérer la surface du protozoaire ou s’insérer dans des vacuoles pour leur transport (15). Ce potentiel d’ensemencement du parodonte n’a pas été prouvé. Dubar et al. ont émis à nouveau l’hypothèse que des amibes pourraient servir de réservoir à des bactéries pathogènes, les protégeant du système immunitaire et des antibiotiques, et permettant une nouvelle colonisation bactérienne des poches après un traitement radiculaire. Lors d’une étude in vitro, ils ont vu P. gingivalis et P. intermedia entrer dans un protozoaire, Acanthameoba castellanii, pour s’y répliquer. Cette piste sera poursuivie dans de prochaines études (40). Certains auteurs ont souligné la ressemblance morphologique entre Entamoeba gingivalis et Entamoeba histolytica présente dans le système digestif, et surtout le gros intestin où elle peut causer une amibiase. Cette dernière a validé les postulats de Koch dès 1875 et est donc reconnue comme pathogène (10). Elle présente des facteurs de virulence cytotoxiques : la phagocytose et trogocytose (17). La trogocytose (Figure 34) correspond à l’échange moléculaire temporaire entre deux cellules liées par leur paroi cellulaire.

Figure 34 : Trogocytose de Entamoeba histolytica (44)

Le protozoaire adhère et ingère ainsi la cellule visée (17). Bonner et al. dans leur article de 2013 reprennent Trim et al. et supposent qu’E. gingivalis produit une enzyme protéolytique, dans le but de confirmer la virulence de l’amibe. Les amibes cousines partageraient certains gènes codants pour des cystéines protéases (17,18). Cependant en 2018, aucune certitude sur les mécanismes d’actions d’E. gingivalis n’avaient été mis en avant (10).

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SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) Pour conclure, les recherches sur la pathogénicité d’Entamoeba gingivalis sur le parodonte n’ont pas abouti pour l’instant. Des critères objectifs tels que les postulats de Koch ne sont pas validés.Les auteurs ont émis de nombreuses hypothèses sur le rôle du protozoaire dans l’étiologie de la parodontite mais il faut encore approfondir les connaissances sur ses effets précis pour pouvoir développer des traitements adaptés (20).

Après avoir confronté les postulats de Koch aux deux protozoaires suspectés d’avoir un lien avec la parodontite, il apparaît que : Trichomonas tenax et Entamoeba gingivalis ne remplissent aucun des postulats de Koch dans l’état des connaissances actuelles. Certains paramètres expérimentaux doivent encore être amélioré pour tenter de mettre en avant les relations complexes entre les micro-organismes (modèle animal, test in vivo…). Cependant, des chercheurs sont « convaincus » d’une implication majeure des parasites dans les processus inflammatoires et immunitaires de la parodontite. C’est pourquoi ils ont proposé des pistes de traitements : Keyes, Lyons, et plus récemment le « Protocole de guérison parodontale Bonner-Dunoyé » qui sera décrit dans la partie suivante.

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SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) Partie 3 : Présentation d’un protocole de traitement antiparasitaire

Le « Protocole de guérison parodontale » Bonner-Dunoyé de 2014 est une proposition de traitement de la maladie parodontale « chronique » reposant sur une désinfection de la sphère orale, et plus précisément du parodonte. Ce protocole fait appel à : - Des antimicrobiens puissants (eau oxygénée 10 volume, bicarbonate de soude, sel, formant la pâte de Keyes), - De nombreux antibiotiques locaux et systémiques -L’élimination mécanique des bactéries avec l’utilisation de la méthode de brossage de Bass modifiées, de brossettes interdentaires, du détartrage supra-gingival, et de la lithotritie. L’idée de « guérison parodontale » est particulièrement mise en avant dans cette proposition de traitement. Ce concept va à l’encontre des appellations usuelles de « pathologies chroniques », de « stabilisation sans guérison » et de « maintenance » attribuées à la maladie parodontale dans l’état des connaissances actuelles.

1. Antibiotiques Les différentes amibiases (pulmonaires et du foie) sont traitées par antibiotiques, plus précisément par le métronidazole. Au vu des ressemblances morphologiques entre les amibes intestinales, Entamoeba hystolytica par exemple, et les amibes présentes dans la cavité orale, Bonner et al. supposent qu’un traitement antibiotique fonctionnera sur la parodontite, si l’on suit l’idée d’une implication parasitaire dans son étiologie (10). Les recommandations en parodontologie préconisent l’usage du métronidazole ou de la doxycycline dans certaines situations (Prescription des antibiotiques en pratique bucco-dentaire, AFFSAPS juillet 2011)(45).

Antibiothérapie systémique L’étiologie bactérienne de la parodontite étant reconnue depuis longtemps, les traitements antibiotiques systémiques ont leur utilité dans la prise en charge du patient. Mais c’est pour tenter d’agir sur la composante parasitaire de la maladie parodontale que le protocole Bonner-Dunoyé préconise la prescription de métronidazole par cure de 10 à 14 jours, ou de tétracycline ou doxycycline en cas de contre-indication. Ces antibiotiques sont utilisés lorsque l’observation microscopique des prélèvements salivaires n’est pas concluante et que la flore du patient n’est pas commensale (22).

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SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) Le métronidazole C’est l’effet antiparasitaire du métronidazole qui est recherché, dans le but d’éliminer les amibes qui seraient responsables de la parodontite. Son action contre des amibes hors de la sphère oral ayant été prouvée, comme pour la dysenterie dont la cause amibienne peut être traitée par le métronidazole (46). Son action sur les paramètres cliniques parodontaux les plus fréquemment étudiés a également été prouvée dans de nombreuses études. Faveri et al. en 2014 constatent un effet significatif de l’antibiotique sur le microbiote sous-gingival ciblé par le spectre d’action du métronidazole se traduisant par une amélioration de la profondeur de poche ainsi que du niveau d’attache (47). Dans une méta-analyse, Mombelli et al. ont pu conclure que l’adjonction du métronidazole au débridement mécanique avait un effet positif sur le traitement des parodontites (48). Une étude de Hussian montrerait une diminution de la concentration in vitro de E. gingivalis dans des prélèvements salivaires après l’application directe de métronidazole dilué à différente concentration. Cependant, le niveau de précision de cette étude est limité : seuls 30 échantillons prélevés et un comptage des protozoaires morts au microscope (49). On ne peut donc pas confirmer l’efficacité du métronidazole en utilisation systémique, spécifiquement contre les parasites étudiés, Trichomonas tenax et Entamoeba gingivalis. De plus, la prise de métronidazole peut entraîner des effets secondaires, les plus fréquents sont : des désordres gastro-intestinaux (intolérance, diarrhée…) , un goût métallique, un effet antabuse (en cas de consommation d’alcool) … et des effets plus rares comme : une néphropathie périphérique ou une langue saburrale (48).

La tétracycline et la doxycycline Quand le métronidazole ne peut pas être prescrit, en cas d’allergie, allaitement ou alcoolisme, le protocole Bonner-Dunoyé recommande l’administration de tétracycline ou doxycycline per os si le patient ne présente pas de flore commensale après l’observation microscopique d’un prélèvement salivaire. Le spectre d’action des molécules de la famille des tétracyclines comprend : les bactéries strictement anaérobies, certaines bactéries Gram- en bâtonnets, seules certaines bactéries Gram+ (Streptococcus mutans, et S. salivarius par exemple), et quelques virus (Mycoplasma, Chlamydia, Rickettsia et Legionella). (50) Mais l’action antiparasitaire des tétracyclines n’y est pas évoquée. On peut donc conclure que les résultats positifs de ces antibiotiques sur les parodontites, notamment sur les formes agressives, ne provient pas d’une action sur Trichomonas tenax ou Entamoeba gingivalis. Les effets secondaires les plus courant de la tétracycline et ses analogues (doxycycline par exemple), recensés par Weinberg et Bral en 1998 sont : des nausées, vomissements et diarrhées ; une prolifération de Candida ; des réactions photo toxiques ; des problèmes de croissance osseuse ; et des colorations dentaires (la couleur dépend de la concentration) si la tétracycline est administrée entre la deuxième moitié de la grossesse et les 8 ans du patient. Les auteurs ont aussi décrit les interactions suivantes : une baisse d’efficacité des contraceptifs oraux causée par l’altération de la flore intestinale et de la circulation entéro-hépatique ; une diminution de l’effet bactéricide de certains antibiotiques ; 41

SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) une interaction avec la digoxine (utilisée en cardiologie) qui augmente la biodisponibilité de la molécule la rendant toxique ; une perturbation les effets des anticoagulants ; une potentialisation de la toxicité du lithium. Ils donnent enfin les recommandations alimentaires suivantes : la tétracycline doit être consommée 2 heures avant les produits laitiers, antiacides, laxatifs ou compléments alimentaires contenants du magnésium, zinc ou calcium pour être absorbée normalement et la prise doit se faire à distance des repas (1 heure avant ou 2 heures après) (50). Dans leur revue systématique Systemic anti-infective periodontal therapy de 2003 (51), Haffajee et al. ont calculé le gain d’attache moyen selon la prescription antibiotique. Ils ont inclus dans la revue les études traitant de parodontites chroniques comme agressives, ainsi que les parodontites « récurrentes » et les abcès parodontaux. On constate sur la figure 35 que la doxycycline serait le plus efficace des trois antibiotiques systémiques proposées dans le protocole contre la perte d’attache parodontale quel que soit le type de parodontite étudié (51).

Figure 35 : Gain d’attache selon la prescription antibiotique (51)

Antibiothérapie locale Le protocole de Bonner-Dunoyé comprend des traitements antibiotiques locaux. Ces préparations antibiotiques ne sont pas vendues telles quelles en France. Elles requièrent une préparation préalable par le pharmacien ou le patient selon l’antibiotique.

Le tétrarince : Le « tétrarince » est proposé en cas de saignements gingivaux importants, sans infection fongique associée (notamment la candidose), durant la phase d’assainissement parodontal. Ce bain de bouche est composé de tétracycline, un antibiotique à usage local ou systémique. La fabrication est expliquée dans le protocole : « Mettre un sachet de 5 g de poudre de tétracycline dans 100ml d’alcool

42

SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) à 40%. Agiter jusqu’à dissolution de la poudre. Conserver cette solution au réfrigérateur dans un flacon de verre teinté la nuit. Préparer 100ml à la fois pour une question de conservation. Utiliser 5 ml maximum de cette solution en bain de bouche 3 fois par jour ou selon la prescription médicale pour un maximum de trois semaines. » La prescription recommandée par le protocole est : 3 fois 7 jours (3 bouteilles à constituer chaque semaine pour 21 jours au total) 3 fois par jour (22).

L’efficacité de la tétracycline appliquée localement semble avoir été démontrée dans plusieurs études. Dans leur revue de 2016, Nadig et Shah ont réalisé une méta-analyse d’après 10 articles cherchant à prouver l’efficacité de l’utilisation locale d’antibiotique sur une parodontite dite « chronique ». Les résultats confirment qu’une amélioration significative des paramètres de santé parodontale est observé dans les cas de traitement local à base de tétracycline par rapport au placebo. Selon les auteurs, le mode de diffusion local limite les effets indésirables de l’antibiotique par rapport à une administration systémique et permet d’atteindre une concentration d’antibiotique plus importante sur le site ciblé par le traitement (52). Le traitement « tétrarince » proposé dans le protocole comprend des effets indésirables, dont il faut informer le patient, tels que des colorations de la langue et des dents, ainsi qu’un mauvais goût du produit. Il est précisé qu’un racloir à langue doit être prescrit avec le tétrarince. Pour retirer les colorations dentaires dues à l’usage de tétracycline, le praticien devra réaliser un polissage lors de chaque séance mensuelle (22). De plus, la manipulation de molécules antibiotiques puissantes par le patient chez lui peut présenter des risques : sur/sous-dosage, erreurs de dilution, accident domestique en l’absence de contenant présentant les pictogrammes et/ou nom des molécules présentes, péremption des produits…

Les pâtes MA, MC et MK2 : Si le patient ne présente plus de saignement, le protocole prévoit la prescription de crèmes hydrophiles à base d’antibiotique et antifongique. Trois types de préparations pharmaceutiques sont détaillées dans le protocole : x La pâte MA, en première intention. x La pâte MC, en cas de candidose provoquée par le traitement (Figure 36). x La pâte MK2, en cas de candidose initiale (antérieure au début du protocole).

Figure 36 : Candida albicans (53) 43

SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) La composition de ces pâtes est la suivante : Pâte MA : « Tube de 10g de la préparation : Métronidazole 1g, Nystatine 250,000 UI ». Pâte MC : « Tube de 10g de la préparation : Métronidazole 1g, Nystatine 750,000 UI » (22) La nystatine est un antibiotique antifongique réservé à l’usage local en raison de sa toxicité. Pâte MK2 : « Tube de 10g de la préparation : Métronidazole 1g, Kétoconazole 0.2g » (22) Le kétoconazole est un antifongique, il est réservé à l’usage local depuis 2011. Excipients : excipient Biobase® (à base de 70% d’alcool éthylique et de polyéthylène glycol hydrophile et hydrosoluble), de l’huile d’anis, orange ou menthe (améliore la saveur).

Figure 37 : Excipient Biobase® (54)

Les consignes d’utilisation décrites dans le protocole sont : « Appliquer en couche mince sur la gencive 3 fois par jour en dehors des repas lors des pauses pendant un mois. En général répéter deux autres mois. Pour le dentiste, déposer en fin de thérapie dans les poches les plus profondes. » (22). Dans une revue de fin 2019, Tan et al. recoupent les différentes études sur l’efficacité des agents locaux utilisés contre la parodontite en traitement non-chirurgical. Ils dressent un tableau des connaissances actuelles sur les molécules utilisées. Avec l’application de métronidazole, sous sa forme de gel appelée Elyzol® en complément d’un débridement mécanique, certains chercheurs réussissent à mesurer une concentration de 1μg/mL dans les poches parodontales, et d’autres mesurent une réduction de la profondeur de poches de 3,2mm ainsi qu’un gain d’attache de 2,1mm. Ils ne recensent pas d’effets secondaires systémiques. Cependant, ces résultats ne sont pas significativement supérieurs au traitement conventionnel seul (55). Le métronidazole à application topique existe sous forme de gel (Elyzol®) cependant il n’a pas d’AMM en France et ne peut y être commercialisé, tout comme l’Atridox® à base de doxycycline, d’après l’AFSSAPS. L’utilisation d’antibiotiques locaux sous forme de crème est particulièrement à risque d’erreur de dosage. De plus, leur conservation à la maison pendant la durée du traitement parodontal par les patients pourrait provoquer des accidents domestiques, dus à l’absence de contenant homologué pour les préparations médicamenteuses.

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SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) Recommandations françaises et résistance bactérienne L’application du traitement proposé dans le protocole Bonner-Dunoyé par un praticien français peut être délicate. En effet, certaines utilisations des antibiotiques s’éloignent des recommandations de l’ANSM, rédigée en 2011 (45). On s’accorde ici sur un traitement destiné à un patient sans allergie ni risque particulier, atteint d’une parodontite qualifiée de « généralisée » par l’ancienne nomenclature. Le métronidazole seul est prescrit en voie orale pour 10 à 14 jours à raison de 750 à 1500mg par jour en 3 prises lors de la première séance du protocole en cas « d’urgence », autrement dit si la parodontite est agressive. Il n’est mentionné aucun débridement mécanique avant cette prescription. Le métronidazole seul est à nouveau donné aux séances 4, 5, 6, ou 7 si la flore observée ne convient pas. (22). L’ANSM recommande en première intention la combinaison d’amoxicilline (de 1,5 à 2g/jour en 2 ou 3 prises) et de métronidazole (1,5g/jour en 2 ou 3 prises) le tout pour une durée de 7 jours (Tableaux 9 et 12). Se pose donc les problèmes suivants : le sous dosage de métronidazole, la durée de l’antibiothérapie, l’absence d’amoxicilline dans la prescription, et surtout l’absence de débridement préalable du biofilm. Le biofilm confère une protection à ses hôtes contre la réponse immunitaire ou les substances antimicrobiennes tels que les antibiotiques. Les recherches de Larsen et Fien de 1996 sur la concentration en antibiotiques nécessaire pour éliminer une bactérie (Streptococcus sanguis dans l’étude) (56) ont montré que l’amoxicilline devait être dosée 500x plus pour éliminer la bactérie d’un biofilm que pour la culture bactérienne de référence. Lors d’une antibiothérapie, seules les couches supérieures du biofilm seraient atteintes par les molécules prescrites. De plus, des transmissions horizontales entres bactéries dans le biofilm facilitent l’apparition de résistances aux antibiotiques (57). Il faudrait donc précéder l’antibiothérapie systémique d’un débridement mécanique tel que la lithotritie pour déstabiliser un maximum le biofilm. L’utilisation de tétracyclines per os, comme la doxycycline 100mg, pendant 10 jours est aussi proposée dans le protocole lorsque la flore du patient n’est pas commensale. (22) Or l’ANSM ne la recommande qu’en cas de parodontite « agressive localisée » à raison d’une prise de 200 mg par jour pendant 14 jours (Figure 38). On constate un écart de durée de prescription antibiotique entre le protocole et les recommandations françaises. Dans leur revue regroupant les données de très nombreuses études sur l’impact des antibiotiques systémiques sur la parodontite, Haffajee et al. rappellent que les prescriptions antibiotiques se font en conscience du risque de résistance microbienne (51). En effet, l’émergence d’espèces résistantes représente une menace pour la santé du patient et devient un problème majeur de santé publique. Pendant et juste après l’antibiothérapie Feres et al. ont noté une augmentation de la proportion des espèces résistantes aux molécules utilisées. La flore bactérienne mettrait environ 3 mois pour revenir à l’état initial (58).

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SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) Figure 38 : Schémas d’administration préconisés chez l’adulte (45)

Figure 39 : Recommandation d’antibiothérapie curative dans le traitement des maladies parodontales (45)

Les antibiotiques administrés par voie locale sont aussi très présents dans le protocole. Cependant, l’utilisation de ces pâtes ou bains de bouche contenants des antibiotiques, qu’elle soit au fauteuil ou à domicile, sort des recommandations françaises. L’ANSM met en avant le risque de développement de résistance bactérienne, ainsi que les problèmes de sécurité d’utilisation. La réalisation d’un bain de bouche « maison » contenant de la tétracycline peut être délicat pour les patients qui risquent de se tromper dans les dosages. Les erreurs de surdosage peuvent également se produire lors de l’application des pâtes au métronidazole. Ainsi les patients, qui n’auraient pas conscience de la concentration en antibiotique de ces préparations pharmaceutiques, risquent de dépasser la quantité maximale ou d’ingérer du produit. De plus, l’usage au long cours de la tétracycline cause d’autre désagréments, tels que l’apparition de candidose (50). L’application de ces antibiotiques par le praticien au fauteuil n’est pas non plus recommandée dans la pratique française. Malgré le savoir-faire du dentiste, l’ANSM n’approuve pas l’usage local des 46

SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) antibiotiques à visée curative. En effet dans l’argumentaire sur les bonnes pratiques de prescription des antibiotiques en odontologie de 2011, l’AFSSAPS a comparé de nombreuses études sur l’administration locale d’antibiotique contre la parodontite chronique. Le manque de standardisation des critères observés, la faiblesse de niveau de preuves des études concernées, les modestes améliorations constatées mis en balance avec le risque sanitaire que représentent les résistances bactériennes ont amené l’Agence Française de Sécurité Sanitaire (actuellement nommée ANSM) à ne pas recommander l’usage des antibiotiques locaux en odontologie. Pour rappel, d’après l’article de Cassini et al. de 2015 (59), l’Europe compte plus de 670 000 cas d’infection à bactéries résistantes aux antibiotiques (BMR) sur l’année 2015, dont au moins 33 000 décès attribuables (d’après leur modèle analytique). Les chiffres français des infections à BMR de 2015 sont : 125 000 infections pour 5 500 décès attribuables (59). Les études françaises plus récentes montrent une tendance à l’amélioration, grâce notamment à la prise de conscience collective des risques sanitaires liés aux résistances bactériennes après les actions de santé publique pour une diminution de la prescription d’antibiotique et une meilleure observance des bonnes pratiques d’administration.

Figure 40 : Nombre de prescriptions d’antibiotiques (60)

Figure 41 : Évolution sur 10 ans de la résistance aux antibiotiques chez E. coli (humain) (60)

L’antibioprophylaxie avant les actes parodontaux comme le détartrage ou le surfaçage ne sont pas évoqués dans le protocole. Le praticien qui propose ce traitement devra adapter ses prescriptions selon les facteurs de risque du patient. On peut rappeler les recommandations de l’ANSM sur les molécules et posologies dans les tableaux suivants (Figures 42 et 43).

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SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) Figure 42 : Schémas d’administration d’antibiothérapie prophylactique (45)

Figure 43 : Recommandation de prescription antibioprophylactique en parodontologie (45)

2. Phase d’assainissement parodontal du protocole Le protocole Bonner-Dunoyé propose un « régime de maintenance » qui correspond à la phase d’assainissement parodontal. Ces nouvelles techniques d’hygiène comprennent : un brossage avec la méthode de Bass modifiée, le passage de brossettes interdentaires ou de la soie dentaire, l’utilisation d’eau oxygénée à la place du dentifrice et l’application de poudre de Torrens ; le tout deux fois par jour durant toute la durée du traitement. Au cours des séances mensuelles, le praticien réalise : des détartrages supra-gingivaux, des surfaçages ainsi que des polissages selon les besoins du patient et le stade du protocole (22).

Antiseptiques inspirés de Keyes : eau oxygénée et poudre de Torrens Dès la première séance du protocole de « guérison parodontale », Bonner et al. recommandent la prescription d’une nouvelle routine d’hygiène :le brossage se fait désormais avec de l’eau oxygénée, suivi d’une application de poudre de Torrens sur le rebord gingival. L’eau oxygénée est à diluer à 1%, c’est-à-dire : « avec de l’eau du robinet : un bouchon d’eau oxygénée 3% pour 2 bouchons d’eau » (22). Cette dilution est indispensable, car des études ont montré le potentiel irritant du peroxyde d’hydrogène 48

SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) pour les muqueuses à partir d’une concentration de 3% (61). La composition de la poudre de Torrens correspond à un « mélange de six doses de bicarbonate de soude avec une dose de sel de table fin », elle peut être préparée par le pharmacien pour avoir un mélange bien homogène. Elle s’applique au doigt mouillé sur l’ensemble des gencives, elle ne doit pas être brossée et le patient crache les excès sans rincer. Le protocole déconseille son utilisation en cas d’inflammation excessive et diffèrent l’introduction du bicarbonate salé de 4 semaines (22). Les capacités bactéricides du bicarbonate de soude et de l’eau oxygénée in vitro sur les pathogènes oraux sont connues depuis longtemps. Brown et al. en 1947 rapportent la toxicité du peroxyde d’hydrogène sur les bactéries Gram+ et Gram-, avec une sensibilité supérieures des Gram positives (62). Les mécanismes d’actions de ces molécules sont différents : la libération d’oxygène du peroxyde est létale pour les organismes anaérobies, tandis que le bicarbonate modifie la pression osmotique intra-cellulaire ce qui provoque une lyse cellulaire. Utilisés ensemble, ils pourraient avoir une action synergique aussi bien qu’une action antagoniste, donc un pouvoir tampon, selon les concentrations. De plus, le bicarbonate neutralise l’effet décalcifiant du peroxyde d’hydrogène utilisé au long cours (61).

Figure 44 : Représentations en 2D et 3D des molécules de bicarbonate de soude (à gauche) et de peroxyde d’hydrogène (à droite) (63)

Dans les années 70-80, Keyes a théorisé une approche des traitements parodontaux sans chirurgie, reprise par de nombreux auteurs comme « la méthode Keyes ». Sa méthode consiste à contrôler « la microflore sub-gingivale » à l’aide d’un microscope et l’absence d’espèces pathogènes dans un prélèvement indique le succès du traitement. Comme traitement non-chirurgical, il préconise le passage du fil dentaire, le brossage avec une pâte de bicarbonate et eau oxygénée, qui sera nommée « pâte de Keyes » par la suite, à laquelle peut être ajouté du sel, et le jet dentaire à base d’eau salée comme rinçage (64). On peut constater que le protocole Bonner-Dunoyé s’inspire énormément des méthodes de Keyes. 49

SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) Cependant, des études plus récentes ont prouvé que l’amélioration la santé parodontale avec la méthode d’hygiène de Keyes provient des effets positifs du détartrage. En effet, Greenwell et al. ont comparé l’utilisation des techniques de Keyes seules face aux traitements parodontaux conventionnels, et ces dernier sont significativement plus efficaces (64). Un des facteurs de cet effet limité de la poudre de Torrens sur le parodonte pourrait être sa méthode d’application. Le mélange de bicarbonate de sodium et de sel appliqué au doigt sur l’ensemble des gencives ne permet pas au produit d’atteindre le fond des poches parodontales (61). Un autre inconvénient de la poudre de Torrens est le risque d’hypersensibilité dentinaire à cause du sel qu’elle contient. Le protocole recommande alors : « le sel de la poudre de Torrens pourrait irriter la racine dénudée à la longue. Enlever au besoin et ne gardez que le bicarbonate de soude servant de tampon. » (22). Enfin, le remplacement du dentifrice traditionnel par le peroxyde d’hydrogène prive le patient d’apport fluoré pendant l’intégralité du traitement. La flore cariogène peut alors se développer et augmenter le risque carieux individuel. Cury et Tenuta ont regroupé dans leur article de 2016 Evidence- based recommendation on toothpaste use les données scientifiques actuelles permettant d’affirmer qu’il est préférable d’utiliser un dentifrice contenant au minimum 1000ppm de fluor pour prévenir l’apparition de caries à tout âge (65).

Élimination mécanique de la plaque dentaire Le patient qui suit le protocole de « guérison parodontale » doit réaliser son brossage dentaire biquotidien avec la méthode de Bass modifiée, en utilisant l’eau oxygénée diluée à 3% pour dentifrice. La méthode de Bass modifiée est la suivante : « Inclinez votre brosse à 45° sur la gencive avec une rangée des brins dirigée dans le sillon gingival. Effectuez une série de petits mouvements horizontaux sans sortir les brins du sillon. Effectuez la vibration pendant 1 seconde et terminez par un mouvement en rouleau des gencives vers la dent. Répétez quatre fois par secteur. Au total, comptez normalement 96 mouvements pour effectuer le brossage de toute la bouche » (22). D’après Poyato-Ferrera et al. de nombreuses études ont prouvé la supériorité de la technique de Bass modifiée par rapport aux techniques horizontales, du rouleau, de Toothpick, de Charter, de Fone ou de Stillman. Ils mettent notamment en avant l’efficacité de cette méthode de brossage sur les faces linguales (66). Dans leur étude de 2019, Ausenda et al. concluent également à une supériorité d’efficacité de la technique de Bass, par rapport aux patients n’ayant pas reçu d’instructions. Ils notent une diminution statistiquement significative des saignements au sondage après 4 semaines (67). Le type de brosse à dent recommandé par le Dr Bass lui-même est : une brosse avec 3 rangées de brins avec 6 touffes chacune, comprenant au minimum 80 brins par touffe, des brins en nylon droits de 7/100e de diamètre et avec les extrémités arrondies (68).

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SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) Figure 45 : Brosse à dent recommandée par Bass, une vue du haut et une vue de près de ses brins (68)

Cependant, on ne peut pas espérer que le peroxyde d’hydrogène atteigne le fond des poches parodontales uniquement avec le brossage. En effet, les brins de la brosse à dent s’enfoncent d’1 mm sous le rebord gingival avec cette technique de brossage, on reste donc à distance du fond de la poche (61). L’effet antiseptique de l’eau oxygénée n’est pas optimal dans le cas de l’application par le brossage des dents avec la méthode décrite plus haut.

Les patients qui suivent le protocole Bonner-Dunoyé ont pour instruction de passer la soie dentaire ou les brossettes interdentaires soigneusement avant chaque brossage (22). En effet, la forme de la brosse à dent ne permet pas à ses brins d’assurer l’élimination de la plaque interdentaire. L’idée de nettoyer les espaces interdentaires avec un instrument filamenteux en complément du brossage avec du dentifrice date de 1819 avec Parmly. Même si les effets bénéfiques du fil contre les caries proximales ont été prouvés (69), les études montrent difficilement son intérêt contre les maladies parodontales (70). L’avantage principal du fil dentaire est qu’il s’adapte à tous les diamètres interdentaires contrairement aux autres outils de nettoyages (cône, brossettes) (71).

Les brossettes s’adressaient à l’origine aux patients présentant des espaces interdentaires importants, de telle sorte que la papille ne remplissait pas l’ensemble de l’espace. Mais depuis que l’offre des diamètres disponibles s’est élargie, tous les patients peuvent trouver une brossettes adaptée à leur espace (71). Une étude canadienne de Imai et al. de 2011 a comparé les techniques d’hygiène proximale, avec les indices plaque et saignement comme critères de santé gingivale chez 30 patients et environ 240 sites interproximaux. Les résultats à la 6ème et 12ème semaine de l’étude montrent que l’indice de plaque est statistiquement réduit avec l’utilisation du fil dentaire comme des brossettes interdentaires. Pour l’indice de saignement, les brossettes sont significativement plus efficaces que le fil dès la 6ème semaine d’étude. Ils recommandent alors l’utilisation quotidienne de bossettes interdentaires, notamment pour les patients ne préférant pas utiliser le fil dentaire (72).

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SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) Figure 46 : Comparaison des indices de plaque et de saignement avec le fil dentaire (DF) ou la brossette interdentaire (IDB) sur 6 à 12 semaines (72)

L’application du peroxyde d’hydrogène dans le protocole Bonner-Dunoyé est prévue lors du brossage dentaire, qui arrive après le nettoyage des faces proximales (22). Or une application avec la brossettes interdentaire permettrait d’atteindre 2,5 mm en infra gingival, contre seulement 1 mm avec la brosse à dents (61). Pour utiliser l’effet antiseptique du peroxyde d’hydrogène au plus profond des poches, il aurait été plus intéressant de changer la chronologie du protocole de maintenance parodontale. Le patient commencerait par un brossage dentaire à l’eau oxygénée puis il continuerait avec le nettoyage interdentaire en trempant ses brossettes dans l’eau oxygénée.

Soins au fauteuil par le praticien Le praticien qui souhaite proposer un traitement parodontal basé sur le protocole de Bonner- Dunoyé doit organiser un suivi mensuel du patient, pendant 8 mois minimum. x Après les prélèvements salivaires et leur étude au microscope (où le praticien implique activement le patient), une révision des instructions d’hygiène et une prescription pour le mois suivant sont prévues. x Àpartir du 3ème mois, le praticien réalise un polissage et dépose une pâte antibiotique dans les poches tous les mois jusqu’à la fin du traitement. x C’est au 4ème mois de traitement que le premier détartrage supra-gingival est réalisé sur l’ensemble de la bouche. x Au 5ème mois, lorsque la flore du patient est redevenue « commensale », une lithotritie est réalisée sur le quadrant le plus atteint par la parodontite alors que le reste de la bouche est détartré en supra-gingival. x Les trois autres lithotrities sont réalisées au 6ème, 7ème et 8ème mois. x Tous les 3 à 6 mois le patient doit être revu pour une séance de « maintenance », le praticien réalise alors un détartrage et un polissage (22). 52

SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) Le détartrage réalisé avec un détartreur sonique ou ultrasonique reste en supra-gingival tant que la flore du patient n’est pas commensale, d’après l’étude microscopiques des espèces présentes dans le prélèvement salivaire réalisé par le praticien. La lithotritie, qui correspond à un « détartrage sous- gingival doux », se fait également avec un instrument sonique ou ultrasonique pour les zones sous- gingivales mais une anesthésie locale est requise par le protocole (22). De plus, le praticien doit impérativement utiliser un détecteur de tartre (Figure 47) et bannir les curettes manuelles.

Figure 47 : Détecteur de tartre

Le détecteur de tartre s’utilise comme une sonde parodontale classique, en balayant doucement la surface radiculaire intra-sulculaire. Un système basé sur la signature optique permet à la machine de détecter le tartre sous-gingival, et un signal sonore prévient le praticien.

D’après les auteurs du protocole, il n’est pas recommandé de « faire saigner inutilement » car cela appelle des micro-organismes hématophages au niveau des poches (22). On peut reprocher au protocole d’inclure au moins une antibiothérapie systémique avant le surfaçage, ainsi que de nombreuses applications d’antibiotiques locaux. En effet, un grand nombre de chercheurs s’accordent à dire qu’une telle prescription doit être combinée avec un débridement mécanique (51,57,58). Et l’AFSAPS écrit en 2011 dans les recommandations de bonnes pratiques pour la prescription d’antibiotiques en odontologie : « Le recours à une antibiothérapie curative se fera toujours en complément du traitement local adéquat (débridement, drainage, chirurgie), en particulier dans le traitement des maladies parodontales et des péri-implantites » et « l’utilisation de l’antibiothérapie curative par voie locale à libération contrôlée, seule, n’a pas d’intérêt démontré pour le traitement des parodontites. L’utilisation des antibiotiques locaux ne pourrait s‘envisager qu’en complément d’un débridement mécanique. ». Les différents modes d’instrumentation sous-gingivale et la fréquence ont été beaucoup étudiés. Les chercheurs ont comparé les surfaçages à instrumentations manuelles contre celles ultra/soniques/piézoélectriques (mécaniques) ainsi que les instrumentations dites « full mouth » où 53

SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) l’ensemble de la bouche est traité en moins de 24h contre celles par quadrants. Des avantages se distinguent dans chacune des méthodes ; tels que le faible recours à l’anesthésie dans l’instrumentation mécanique, le traitement plus court dans la technique « full mouth », ou l’abaissement de la durée de soin au fauteuil dans la méthode par quadrant. Cependant, une revue complète de Suvan et al. de 2020, s’appuyant sur de 18 études, n’a pas pu prouver qu’une technique est statistiquement supérieure aux autres (73). Le praticien réalise un polissage mensuel des dents pour retirer les tâches, causées par les tétracyclines que l’eau oxygénée, non abrasive, ne peut pas retirer. Pour cela, le protocole conseille d’utiliser de la poudre de pierre ponce de laboratoire moyenne ou fine avec de la à 0,12%, appliquées à l’aide d’une cupule en caoutchouc. Ils précisent que ce mélange ne peut pas être préparé à l’avance (22). Concernant le risque d’abrasion de l’émail, Arcuri et al. précisent dans leur article de 1993 que la composition, l’humidité ou le diamètre de brins de la cupule ou brosse utilisée pour le polissage n’influe pas sur l’état de surface. L’abrasion dépend de l’agent de polissage choisi (sa granulométrie, sa forme de grains, sa dureté) et de la technique de polissage (selon la pression et la vitesse appliquées). Ils affirment également que la poudre de pierre ponce avec de l’oxyde d’étain n’a pas d’effet abrasif sur l’émail (74). On se demande alors si la poudre de pierre ponce (pumice en anglais) a une abrasivité suffisante pour le polissage des dents. Sathe et al. en 2019 ont cherché à démontrer les capacités détachantes du polissage avec de la poudre de pierre ponce sur des résines tâchées par l’immersion dans de la chlorhexidine. Les résultats de l’étude mettent en avant la pierre ponce comme l’agent abrasif le plus efficace pour retirer les tâches des résines (75). Fitchel et son équipe ont réalisé des tests de polissage sur des dents de chiens, afin de trouver la séquence de détartrage et polissage avec le meilleur ratio efficacité/dégâts pour l’émail (Figure 48). Ils ont observé l’émail au microscope après les différents traitements et ont scoré l’efficacité du détartrage ainsi que les dégâts sur l’état de surface amélaire.

Figure 48 : Différentes méthodes de traitement et polissage de l’émail (76)

Les résultats sont : quel que soit la méthode de détartrage, le polissage le plus efficace et le moins abrasif pour l’émail doit utiliser un disque tendre (soft) et une pâte à polir de granulométrie fine, telle que la pierre ponce (Figure 49).

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SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) Figure 49 : Évaluation du ratio efficacité du détartrage/dommage sur l’émail selon la méthode (76)

Paic et al. se sont intéressés à l’émail humain pour des expérimentations in vitro sur la micro- abrasion à base d’agents abrasifs contenants de l’acide. La pierre ponce non-acide Pumex leur sert de contrôle. Elle a un pH de 7,1 et les particules sont de 30,7 μm en moyenne. La perte de substance amélaire cumulée en fonction de la durée du traitement est très minime pour la pierre ponce (Figure 50). L’état de surface de l’émail poli par avec Pumex, observé au microscope, se rapproche de celui non traité, tandis que les micro-abrasions à base d’acide modifient la structure de l’émail en surface (Figure 51) (77).

Figure 50 : Représentation de la quantité de substance perdue cumulée selon la durée du traitement (77)

Figure 51 : Etats de surface amélaire après 40s de traitement par différents agents de polissage (77)

Le polissage, dans le cadre du protocole, est également un prétexte idéal pour faire réaliser un nettoyage complet au patient, soie dentaire ainsi que brossage des dents. En effet, le praticien peut utiliser les dépôts de pâte à polir persistants après le rinçage comme « révélateurs » de zones mal nettoyées par le patient. Cette étape d’éducation à l’hygiène n’est pas à négliger dans le processus d’assainissement parodontal (22). 55

SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) 3. Aspects psycho-sociaux et succès du traitement La durée et le coût du traitement Le protocole Bonner-Dunoyé s’étale sur 8moisau minimum, et est composé de 8 séances d’une heure chacune. Ensuite, il y a la maintenance à 3 mois, soit la 9ème séance ; puis la maintenance à 6 mois qui est la 10ème séance (et ainsi de suite deux fois par an). Dans le cas d’un plan de traitement parodontal le coût pour les 10 séances d’une heure est de : 3500 euros de traitement auxquels s’ajoutent 350 euros de maintenances parodontales à 3 et 6 mois, soit 4200 euros pour l’ensemble. Ce tarif comprenant : - Le bilan parodontal (questionnaire, bilan radiographique et photos, sondage en 6 points, les mesures des mobilités, des saignements, des récessions, de l’halitose) - Les 3 prélèvements salivaires par séance avec leur étude au microscope, - Les prescriptions (antibiotiques, antifongiques, antiseptiques) -Tous les instruments d’hygiène nécessaires (fil, brossettes, brosses à dents, racloir à langue) - Les détartrages - La lithotritie de l’intégralité de la bouche - Un bilan de fin de traitement Ces tarifs étaient recommandés par les auteurs en 2015 quand le protocole a été publié (22). Les tarifs réellement pratiqués actuellement par les praticiens qui suivent ce protocole sont inconnus.

Dans leur étude, Miremadi et al. ont estimé le coût d’un traitement parodontal conventionnel chirurgical ou non, sur 12 mois de soins, ainsi que le temps au fauteuil, chez 39 patients. Le prix et le temps nécessaire au fauteuil pour le traitement chirurgical sont significativement plus élevés la première moitié du traitement. Et le coût total du traitement est significativement plus bas pour le traitement non- chirurgical.

Figure 52 : Temps passé au fauteuil cumulé selon le type de traitement (78)

On constate dans cette étude belge de 2014 (Figure 52), que le coût annuel d’un traitement non- chirurgical est compris entre 625 et 850 euros, pour au maximum 610 minutes, soit un peu plus de 10 heures, au fauteuil (78). Ces prix sont très différents de ceux du protocole de traitement parodontal non- chirurgical Bonner-Dunoyé, pour un nombre d’heures au fauteuil assez proche.

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SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) On peut également évoquer le nombre important de brosses à dents prescrites tout au long du protocole de traitement Bonner-Dunoyé : 1 brosse par semaine pendant 8 mois ce qui fait environ 32 brosses à dents pour 8 mois (22). L’UFSBD recommande un changement tous les 3 mois minimum, soit au moins 4 brosses à dents par an. Étant donné l’impact écologique du plastique composant la majorité des brosses du commerce, on peut conclure que le coût écologique de ce protocole est important.

Adhésion de patient L’introduction d’une nouvelle méthode d’hygiène peut avoir deux effets opposés sur le patient. L’attrait de la nouveauté et la pression de « l’évaluation » de la flore avec les prélèvements salivaires pourraient pousser le patient à être très assidu dans son brossage. Dans les études sur la méthode de brossage, les chercheurs ont constaté que les participants ayant reçu des instructions pour réaliser un brossage avec la méthode de Bass étaient plus motivés, donc plus efficaces, notamment sur la face linguale des secteurs postérieurs. Plus le patient reçoit d’instruction, mieux il brosse (66,67). C’est également le cas pour le passage du fil dentaire. L’adhésion du patient à cette technique d’hygiène est dépendante de son habileté à nettoyer (79). Le protocole Bonner-Dunoyé prévoit une éducation et un rappel mensuel strict aux bonnes pratiques d’hygiène. Cependant, il faut pondérer les bons retours des études sur l’assiduité au brossage car ils sont souvent le résultat de l’effet « Hawthome ». On peut le définir comme l’amélioration des habitudes d’un patient qui se sait inclus dans une étude et qui jouit d’une attention particulière. Les participants à une étude sur l’hygiène oral seront par conséquent plus attentifs à leur brossage (66). Il y a également d’autres études qui montrent qu’un changement des habitudes d’hygiène peut aboutir à une baisse d’assiduité. C’est le cas pour les patients utilisant le bicarbonate de soude et le peroxyde d’hydrogène, ils ont un indice de plaque statistiquement supérieur aux sujets qui ont gardé leur méthode d’hygiène habituelle (61). L’utilisation pédagogique des images du microscope pour « quantifier » l’avancéedu traitement, l’attrait de la nouveauté des méthodes d’hygiène, la pression financière avec l’espoir de « guérison », et le suivi extrêmement régulier et personnalisé pourraient suffire à garder le patient assidu sur son traitement. Cependant, le protocole est long, complexe, et très différent des autres traitements parodontaux, il peut alors être difficile pour le patient de rester rigoureux dans le temps.

Résultats immédiats et à long terme Dans leur article Traitement antiparasitaire des maladies parodontales et péri-implantites : suivi multicentrique à 12 mois de 2013, Bonner et al. regroupent les résultats de leur dossiers cliniques et ceux d’une étude rétrospective sur 5 cabinets. Pour commencer, les prélèvements salivaires ont été étudié au microscope pour déterminer la présence d’Entamoeba gingivalis. Tous les patients présentant l’amibe étaient atteints de maladie parodontale, contrairement à ceux dont le parodonte est sain qui ne

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SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) présentaient pas l’amibe (17). On a vu précédemment que la discrimination visuelle des amibes est délicate et que les observations praticiens peuvent être soumises à des biais. Le protocole Bonner- Dunoyé est alors proposé aux patients : brossage à l’eau oxygénée, application de poudre de Torrens et de crèmes antibiotiques, prescription d’antibiothérapie systémique. Quand les praticiens constatent des signes de « guérison » parodontale et une normalisation de la flore ils éliminent le tartre résiduel. Les résultats de ce traitement sur un an sont issus d’un seul critère de santé parodontale : la cicatrisation des poches. Sur les 632 patients traités (Figure 53), en moyenne 95,7 % des poches infectés ont retrouvé une profondeur physiologique de 3 mm ou moins sur 12 mois (17).

Figure 53 : Résultats de la fermeture des poches parodontales avec le protocole antiparasitaire (17)

Cette étude rétrospective, sans cas contrôle, a un niveau de preuve très limité. Elle ne peut pas prouver définitivement l’implication de l’amibe Entamoeba dans la parodontite, ni le succès du traitement antiparasitaire proposé. Il aurait fallu détecter le parasite par PCR pour éviter les erreurs de la détermination microscopique ; quantifier par la technique de PCR en temps réel la présence de E. gingivalis pré, per et post-traitement ; comparer statistiquement les résultats avec un groupe contrôle utilisant les techniques d’hygiènes usuelles ; et enfin évaluer la « guérison » parodontale avec plusieurs critères tels que l’indice de saignement, l’indice de plaque, le gain d’attache, la profondeur de poche etc… Ainsi, dans cette proposition de traitement parodontal beaucoup d’aspects ne s’accordent pas avec les recommandations françaises actuelles et les consensus scientifiques internationaux : antibiotiques locaux, absence de dentifrice fluoré, pas de débridement mécanique avant l’antibiothérapie etc… À tout cela, s’ajoute des risques d’utilisation des produits prescrits, un coût élevé, et un niveau de preuve très limité des résultats du protocole. Les points positifs tels que le suivi extrêmement régulier, l’éducation à l’hygiène interdentaire ou l’aspect pédagogique de présenter les images de sa flore au patient ne semblent pas en 2021 contrebalancer les aspects négatifs mis en avant dans ce travail.

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SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) Conclusion

Ainsi, l’étude de la place de Trichomonas tenax et Entamoeba gingivalis dans la maladie parodontale a débuté par leur identification dans la cavité buccale. Il a fallu les détecter de façon fiable et reproductible dans les échantillons collectés : l’identification au microscope, plus simple, a permis d’observer des micro-organismes vivants, dans le substrat adéquat. Quant à l’identification par PCR, elle a apporté une information quantitative, et surtout une précision supérieure à la technique précédente. Cependant, même si aucune des méthodes décrite ci-dessus n’a été exempte de défaut, les résultats issus de ces techniques apparaissent complémentaires dans l’étude de l’impact de ces protozoaires sur la maladie parodontale. Pour prouver leur implication, les chercheurs les ont alors confrontés aux postulats de Koch et il apparaît que Trichomonas tenax et Entamoeba gingivalis ne remplissent aucun de ces postulats dans l’état des connaissances actuelles. En effet, même si on conviendra que certains paramètres expérimentaux (modèle animal, test in vivo…) pourraient être améliorés pour tenter de mettre en avant les relations complexes entre les micro-organismes, il est pour le moment impossible de conclure à la pathogénicité de ces protozoaires sur le parodonte. Pourtant, des chercheurs convaincus de l’implication d’E. gingivalis et T. tenax dans les processus inflammatoires et immunitaires de la parodontite, proposent des pistes de traitements parodontaux antiparasitaires. Après l’étude approfondie d’une de ces propositions thérapeutiques : le « Protocole de guérison parodontale Bonner-Dunoyé », on en arrive à la conclusion suivante : beaucoup d’aspects de cette proposition diffèrent des recommandations françaises actuelles et des consensus scientifiques internationaux. Les points positifs tels que le suivi extrêmement régulier, l’éducation à l’hygiène interdentaire ou l’effet pédagogique sur les patients ne suffisent pas à contrebalancer l’utilisation intensive d’antibiotiques locaux, l’absence de dentifrice fluoré, ou de débridement mécanique avant traitement par antibiothérapie curative, les risques d’utilisation des produits prescrits et le coût élevé, le tout dans un contexte de niveau de preuve très limité quant aux résultats de ce protocole. En conclusion, en 2021, les moyens disponibles sont encore insuffisants pour saisir l’étendue de la complexité des interactions entre les micro-organismes oraux. Comprendre les raisons de l’entrée d’un microbiote en dysbiose et l’ensemble des acteurs impliqués sera le défi des prochaines recherches sur l’étiologie de la maladie parodontale. Une fois ces phénomènes mieux décrits et appréhendés, de nouvelles pistes de traitements pourront alors être proposées.

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SIMO (CC BY-NC-ND 2.0) N°2021 LYO 1D 015 SIMO CANDICE Place de Trichomonas tenax et Entamoeba gingivalis dans la maladie parodontale : état des connaissances actuelles et décryptage d’une proposition de traitement anti parasitaire Résumé : Alors que l’implication bactérienne dans l’étiologie de la maladie parodontale a été validée par le plus grand nombre, un nouveau paradigme a été proposé. Il suppose qu’une contamination parasitaire du biofilm parodontal causerait une amibiase délétère pour le parodonte. Les parasites mis en cause sont deux amibes : Entamoeba gingivalis et Trichomonas tenax. Leur identification repose aujourd’hui sur la combinaison de techniques microscopique et PCR avec chacune leurs avantages et inconvénients.

Leur présence dans la cavité buccale étant confirmée, des études ont été menées pour montrer leur pathogénicité sur le parodonte et leur implication dans la maladie parodontale. Cependant, l’absence de validation des postulats de Koch revisités ne le permet pas à l’heure actuelle.

Malgré cette absence de validation scientifique et en parallèle des traitements parodontaux conventionnels à haut niveau de preuve, des traitements anti-parasitaires ont été proposés. Le protocole « Bonner-Dunoyé » publié en 2015 en fait partie et promet de « guérir » la parodontite.

Ce protocole prévoit un suivi mensuel des patients avec des instructions répétées aux méthodes d’hygiène, l’étude microscopique de leur flore buccale à la recherche des amibes mises en cause et l’usage entre autres : d’eau oxygénée, de bicarbonate de soude salé et d’antibiotiques locaux et systémiques. L’utilité et la validité scientifique de chaque étape de ce protocole sera décryptée dans ce travail afin d’en déterminer sa pertinence en 2021.

Mots clés : Parodontite, protozoaire, parasite, amibe, pathogène, Entamoeba gingivalis, Trichomonas tenax, traitement non-chirurgical.

Jury : Présidente : Madame Kerstin GRITSCH, Professeure des Universités

Assesseurs : Monsieur Olivier ROBIN, Professeur des Universités

Monsieur Arnaud LAFON, Maître de Conférences

Madame Doriane CHACUN, Assistante Hospitalo-Universitaire

Adresse de l’auteur : Candice SIMO 2a rue Fernand Pelloutier 26100 ROMANS SUR ISERE

SIMO (CC BY-NC-ND 2.0)