Le Clergé Et Le Culte Catholique En Bretagne Pendant La Révolution
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LE CLERGÉ ET LE CULTE CATHOLIQUE EN BRETAGNE PENDANT LA RÉVOLUTION DISTRICT DE DOL DOCUMENTS INÉDITS RECUEILLIS, MIS EN ORDRE ET PUBLIÉS PAR P. DELARUE Membre de la Société Historique et Archéologique de l'arrondissement de Saint-Malo. PREMIÈRE PARTIE Cantons d'Antrain, de Bazouges - la - PérouBe et de Seni RENNES J. PLIHON ET L. HOMMAY, LIBRAIRES 5, rue Motte-Fablet LE CLERGÉ & LE CULTE CATHOLIQUE EN BRETAGNE PENDANT LA RÉVOLUTION DISTRICT DE DOL Hennés. — Imp. Eugène PROST, rue Leperdit. PRÉFACE En 1789, les prêtres de nos campagnes, qui parta geaient les souffrances et les humiliations du paysan, n'avaient pas hésité à seconder le tiers-état dans ses efforts pour le renversement d'un édifice social entière ment vermoulu et déjà bien ébranlé; aussi furent-ils à peu près unanimes à applaudir aux premières réformes décrétées par l'Assemblée nationale. Mais, lorsque la Nation eut mis la main sur les biens de l'Eglise (29 novembre 1789 —17 mars 1790), ce beau zèle se refroidit singulièrement. Ils devinrent indécis, inquiets, et finalement se rangèrent du côté de leur ancien évêque quand, après la promulgation de la constitution civile du clergé (24 août 1790), M*r de Hercé se fut pro noncé formellement contre toute innovation du pouvoir civil à leur égard (25 janvier 1791). Dans certaines paroisses cependant, quelques-uns persistèrent à donner leur approbation aux lois nouvelles et à s'y soumettre. On les désigna sous les noms de conformistes, asser mentés ou constitutionnels. Les gens hostiles à la révo lution les appelaient avec mépris des jureurs et des intrus. Cette volte-face de la grande majorité du bas clergé pro duisit chez les autorités locales, issues du nouvel état de choses, un cruel embarras. Disposées à la tolérance, mais ennemies du scandale qui les aurait compromises, elles furent obligées, en présence de l'agitation croissante, suite naturelle de l'existence simultanée des deux clergés, de réclamer l'éloignement des recteurs et curés qui avaient refusé de prêter le serment rescrit par la Constitution. Le 16 juin 1791, le département arrêta que les ecclé siastiques fonctionnaires publics remplacés, seraient tenus de se retirer à trois lieues du lieu où ils exerçaient leurs fonctions. Cette mesure n'ayant point arrêté les troubles, il prend un nouvel arrêté le 15 avril 1792, par lequel il demande le serment d'allégeance aux prêtres réfractaires et ordonne que ceux qui ne le prêteront pas seront tenus de se rendre dans la huitaine au chef-lieu du département pour y rester sous la surveillance des autorités constituées. Très peu se conformèrent à cet arrêté, en ce qui concerne le serment, et ceux qui le firent ne tardèrent pas à faire le serment pur et simple. De ce moment commencent l'exode et la persécution des insermentés réfractaires à toute soumission; les uns, immédiatement passent en Angleterre, d'autres restent cachés dans des maisons amies, la plupart enfin quittent leur paroisse, se rendent à Rennes, puis, dirigés sur Saint-Malo, sont embarqués pour Jersey quand, après la chute du trône, un décret eut ordonné leur déportation (26 août 1792). Les vieillards et les infirmes, restés enfermés à La Trinité, furent dirigés sur le Mont Saint- Michel en octobre 1793. Pour un grand nombre, l'exil dura peu; en effet, soit que ces ecclésiastiques aient été renvoyés comme curés d'office par leur ancien évéque dans des paroisses pour vues de curés assermentés, ou rappelés comme auxiliaires par les promoteurs du soulèvement royaliste, ou encore simplement par les nécessités de l'existence, toujours est-il qu'ils revinrent en grand nombre dans leur pays d'origine et y exercèrent à nouveau, mais clandestine ment, des fonctions qui leur étaient interdites. De plus, un grand vicaire de Mgr de Hercé,.également caché dans le district, était chargé de correspondre avec eux et de pourvoir au soin du culte. La résistance aux lois devint alors plus générale et plus opiniâtre et les autorités municipales et de district s'exaspérant, usèrent avec emportement de tous les moyens en leur pouvoir pour combattre l'influence des prêtres insoumis. Quant aux prêtres assermentés, leur soumission aux lois de la République ne les exempta pas de la persécu tion. En butte, d'un côté aux outrages et aux violences des populations, de l'autre aux vexations de toutes sortes, ils furent traités comme de simples réfractaires lorsqu'ils refusèrent de rendre leurs lettres de prêtrise et de renoncer au célibat. Lorsqu'un régime de tolérance finit par prévaloir (21 février, 9 mars et juin 1795), les troubles et le bri gandage cessèrent-ils pour.cela? Non. Il s'était accumulé trop de haine entre les partisans et les adversaires du clergé réfractaire, et les défenseurs de la cause royale avaient trop d'intérêt à les faire durer, pour que l'apai sement se fit par le seul usage de la liberté. Les campa gnes de notre département n'ont recouvré définitivement leur tranquillité qu'au rétablissement officiel du culte catholique (15 octobre 1801). Dans toutes les parties de la Bretagne, les mêmes sentiments avaient produit les mêmes événements, ce qui arrivait dans l'un des districts de l'IIle-et-Vilaine se reproduisait dans les autres, de sorte que pour connaître cette période d'environ dix années de nos discordes religieuses, il nous a suffi d'étudier l'histoire d'un seul district. Nous ferons remarquer aussi que n'ayant point eu en vue l'étude d'une circonscription politique, mais l'étude des troubles qui s'y sont produits, notre publica tion, limitée aux seules communes qui la composent, ne l'est point à la durée de la circonscription qu'elles for maient. Nous avons fouillé les archives diis mairies, nous avons compulsé celles de notre ancien chef-lieu de dis- trict, tant ce qui s'y trouve à Dol même qu'au chef-lieu du département. Après avoir ainsi recueilli les documents qui ont survécu à ces temps troublés et qui concernent le culte et individuellement chacun de ses ministres, qu'il soit ou ne soit pas sermenté, et aussi les congréga tions, les établissements publics se rattachant aux insti tutions catholiques, les monuments, etc , nous les . avons rapprochés, classés et nous les livrons tels au public sans en distraire un seul, persuadé que nous faisons mieux connaître ainsi l'histoire si mouvementée de cette terrible époque que par un récit dont on eut toujours pu suspecter la sincérité. Si quelques lecteurs timorés venaient à exprimer cette opinion, qu'il serait plus sage de tâcher d'oublier ces fautes et ces crimes plutôt que de les remémorer pour la plus grande confu sion de tous, qu'il me soit permis de leur répondre par les quelques lignes suivantes de M. Alexandre Bertrand, le président d'honneur des Bleus de Bretagne : « Il est des livres d'histoire, dit-il dans la préface de « Réflexions sur l'inquisition au moyen-âge, » qui, outre l'intérêt dramatique des événements qu'ils racontent, sont un utile enseignement pour le temps présent. Des causes analogues produisent de nos jours les mêmes effets que dans le passé. L'étude de ces causes et de ces effets est un fécond sujet de méditations, la vraie école de la raison politique. » Antrain, octobre 1902. PAUL DELARUE. INTRODUCTION Les décrets de l'Assemblée nationale des 11 novembre et 22 décembre 1789, 30 janvier, 15 et 16 février 1790, divisèrent la province de Bretagne en cinq départements, les départements en districts, cantons et communes, con servant à ces dernières les limites des anciennes paroisses qu'elles remplaçaient. Le département de Tlsle-et-Vilaine eut neuf districts, le district de Dol neuf cantons. Voici les noms des com munes formant chacun de ces cantons : Canton de Dol. — Dol, Mont-Dol, Baguer-Pican, l'Ab baye, Carfantain, Epiniac, Baguer-Morvan, Vil- ledé-Bidon, Saint-Léonard, Roz-Landrieux. Canton du Viviers ur-Mer. — Le Vivier, Hirel, Villedé- la-Marine, La Fresnaye, Lillemer. Canton de Rozsur-Couesnon. — Roz, Cherrueix, Saint- Brolade, Saint-Marcan, Saints, Saint-Georges-de- Grehaigne. Canton de Tram, T— Trans, La Boussac, Vieuxviel, Pleine-Fougères, Sougeal, la partie de Gendre en Bretagne. Canton d'Antrain. — Antrain, La Fontenelle, Saint- Ouen-de-la-Rouërie, Tremblay, Chauvigné. Canton de Bazouges-la-Pérouse. — Bazouges, Noyai, Saint-Rémy-du-Plein, Marcillé-Raoul, Rimou. Canton de Sens. — Sens, Feins, Vieuxvy, Gahard, Romazy. Canton de Dingé. — Dingé, Lanrigan, Québriac, Saint- Méloir-des-Bois. Canton de Combourg. — Combourg, La Chapelle-aux- Filsméen, Lourmais, Cuguen, Saint-Léger, Tre- meheuc, Bonnemain. L'administration départementale était confiée à une assemblée élue de 36 membres, lesquels tous les quatre ans choisissaient-quatre d'entre eux pour l'expédition des affaires. Ces quatre administrateurs constituaient le direc toire, les trente-deux autres le conseil du département. Un procureur général syndic près l'administration départementale, également élu pour quatre ans, était spécialement chargé de faire exécuter les résolutions de l'Assemblée. L'administration de district comprenait de même un conseil, un directoire et un procureur syndic. Un décret du 14 frimaire an II (4 décembre 1793) remplaça les procureurs syndics par des agents nationaux nommés par la Convention et dont la mission était de tenir à l'exécution des lois, de dénoncer les négligences et de poursuivre les infractions commises en les appliquant1. Quant aux communes, elles étaient administrées par une municipalité élue, composée d'un maire, d'un conseil et d'un procureur, auxquels s'adjoignaient, dans certaines circonstances assez fréquentes, des notables en nombre double du nombre des conseillers, et élus comme eux. Ces assemblées, présidées par le maire, formaient alors ce que Ton appelait le conseil général de la commune.