L'essor Du Culte De S. Walhère À Onhaye Fin Du XIP Ou Fin Du XV^ Siècle?
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A. DIERKENS L'essor du culte de S. Walhère à Onhaye fin du XIP ou fin du XV^ siècle? Extrait de la Revue d'Histoire Ecclésiastique Vol. LXXXII (1987), N» 1) LOUVAIN 1987 MÉLANGES L'essor du culte de S. Walhère à Onhaye: fin du XIP ou fin du XV^ siècle? s. Walhère (•) bénéficie, comme saint guérisseur et protecteur du bé• tail (^), d'un important culte qui, de l'église St-Martin d'Onhaye, où l'on conserve ses restes (^), s'est propagé dans toute la Wallonie (*). Les nom- (1) Les études principales consacrées à S. Walhère sont celles de Fr. BAIX, Le nom de S. Walhère, dans Annales de la Société Archéologique de Namur ( = A.S.A.N.), 1913, t. XXXll, p. 263281 ; Ch.G. ROLAND, Élude critique de la vie de S. Walhère, dans La Terre Wallonne, 1926, t. XIV, p. 233266; R.E. JANUS, Onhaye et S. Walhère, DinantOnhaye, 1945; C. HOEX, Recherche iconographique fondée sur le culte populaire de Ste Brigide et des saints Manon et Walhère, Bruxel les, 2 vol, 1972, mémoire de licence en Histoire de l'Art et Archéologie (U.L.B.), inédit, dont est issu C. HOEX, S. Walhère, Culte—Vie—Iconographie, Gem bloux, 1974. On y trouvera citée la bibliographie antérieure ; cfr aussi é. BROU ETTE, Walhero, dans Bibliotheca sanctorum, t. XII, Rome, 1969, col. 13821383. (2) En plus des études citées cidessus (surtout JANUS, Onhaye et HOEX, Wal hère), voir notamment Th.J. DELFORGE, />es saints populaires de Wallonie, Gem bloux, 1977, p. 5961, ou C. HOEX, Médecine populaire et religion: les saints guérisseurs, dans IM médecine populaire en Wallonie. Actes du colloque organisé à l'U.L.B. le 26 octobre 1974, Bruxelles, 1978, p. 5967 et 114. On trouvera des détails sur le culte de Walhère dans O. COLSON, La légende et le culte de S. Walhère à Onhaye, dans Wallonia, 1912, t. XX, p. 316325, ou dans Notice historique sur la vie de S. Walhère, prêtre et martyr, vulgairement dit S. Vohi ou S. Bohi, Dinant, 1867 (6' éd.. Tournai, 1909). (3) Onhaye, prov. Namur, arr. Dinant, centre de comm. fusionnée : au moyen âge, diocèse de Liège, archidiaconè de Hainaut, doyenné de Florennes. La pa roisse primitive et le domaine ancien d'Onhaye (env. 2600 ha.) comprenaient aussi les communes actuelles de Gérin (érigée en paroisse en 1575) et de Weillen (capella en 1685 encore). Références sur ce point dans ROLAND, Walhère, p. 245 246, et dans JANUS, Onhaye, p. 3344. (4) Le catalogue des lieux de culte de Walhère est donné par HOEX, Recherche iconographique, t. I, p. 178222, qui sousestime pourtant l'importance de Tin tigny ; cfr ms. Bruxelles, Bibl. Roy., 114361, T 36 (lettre du curé de Tintigny, 5 avril 1869) et 3738 (brochure de dévotion). L'ESSOR DU CULTE DE S. WALHèRE 29 breux érudits et historiens qui se sont penchés sur le dossier, au demeu• rant fort maigre, de Walhère s'accordent avec la tradition populaire et l'hagiographie pour dater le martyre du saint de l'extrême fin du xii" s. ; ils identifient le saint Walhère honoré à Onhaye avec un Walterus cité dans des documents de 1187 à 1199 et affirment que le culte de Walhère se développa sans interruption depuis la mort du saint, placée le 23 juin 1199 ('). Le seul savant qui, refusant cette identification, étaie ses argu• ments par des éléments historiques sérieux (le chanoine Ch.-G. Roland) situe l'existence de Walhère avant 1161 (^). Le propos de cette brève étude sera de montrer que l'existence réelle de S. Walhère échappe tota• lement à l'historien et que l'essor du culte développé à Onhaye n'est probablement pas antérieur à la fin du xv' s. et doit beaucoup à la ferveur intéressée d'un religieux du milieu du xvi' siècle ('). * * Pour plus de clarté, il semble utile de rappeler d'emblée le contenu du court récit hagiographique qu'en 1603 (*), le jésuite namurois Gilles Monin consacra à Walhère: imprimée en 1707 dans les Ada Sando- rum (*), cette Viia sert, depuis, de canevas à tous les récits hagiographi• ques postérieurs : S. Walhère. né à Bouvignes (•), fut élevé dans la crainte de Dieu et souhaita consacrer sa vie au service divin. Ordonné prêtre et devenu curé d'Onhaye, (1) Par exemple JANUS, Onhaye, p. 49-59 et passim, qui déduit même de la date de 1199 la date de naissance de Walhère (entre 1128 et 1138). Ou encore BAIX, Walhère, p. 264-269 et ID., Doyens du concile de Florennes. Notes histori• ques, dans Anatectes pour servir à l'Histoire Ecclésiastique de la Belgique ( = A.H.E.B.), 1910. t. XXXVI (,3' s.. VI), p. 10.5-123, aux p. 107-109. (2) ROLAND, Walhère, p. 261-262. (3) Cette brève étude sur saint Walhère a l'ait l'objet d'une communication à la Société pour le Progrès des Études Philologiques et Hi.storiques (Bruxelles, le 12 novembre 1983); cfr Revue Belge de Philologie et d'Histoire (= R.B.P.H.), 1984, t. LXII, p. 911. (4) Sur Gilles Monin et la Vita de S. Walhère qu'il inséra dans son Historia sanctorum Namurcensium, voir N. J. AIGRET, Histoire de l'église et du chapitre de St-Aubain à Samur, Namur, 1881. p. 469-470, et ROLAND, Walhère, p. 241-243. h'Historia de Monin, inédite, semble avoir disparu aujourd'hui mais un résumé en a été édité par le chanoine Aigret en 1881 (St-Aubain, p. 639-643), sous le titre Sanctorum et sanclarum Namurcensis comitatus epitome, auctore Aegidio Monin. (5) Acta Sanctorum, Junii, t. IV (1707), p. 613-618: édition commencée par Godefroid Henschenius et achevée par Daniel Papebrochius. La Vita est citée ici d'après la troisième édition (éd. Palmé), plus accessible: AA.SS., Junii, t. V (1867), p. 523-5,32, Vita aux p. .523-.524. (6) Vita, éd. /1/l.SS., p. 523: Walherus, Boviniensi antiquo ad Mosam castello Namurcensis comitatus oriundus (...). Bouvignes, arr. Dinant, fut rattachée à la commune de Dinant en 1964. 30 A. DIERKENS il fut peu de temps après nommé doyen du concile de Florennes. Exerçant avec zélé sa charge décanale, Walhère rendit visite au prêtre (') de l'église voisine d'Hastiére (*) et lui reprocha avec force sa mauvaise conduite ('). Un matin, alors que les deux hommes traversaient la Meuse, le prêtre frappa le doyen de sa rame et le tua. Le corps de Walhère fut retrouvé sur la rive gauche de la Meuse, à un endroit où surgit une source. Des habitants de Bouvignes revendiquèrent le corps du saint pour le ramener dans sa ville natale, mais ne purent le dépla• cer. A Onhaye, une pieuse veuve possédait deux génisses blanches qui n'a• vaient jamais été mises sous le joug ; celles-ci purent sans difficulté trans• porter le corps du saint et le conduisirent, Deo solo dudore, à la basilica St- Martin d'Onhaye, que Walhère administrait de son vivant. Il y fut enseveli et y réalisa de nombreux miracles. L'abondance des dons permit d'agrandir l'église (*) (au milieu du chœur, à l'emplacement de la tombe de Walhère, est posée une plaque sculptée de marbre noir) (*). Sous Henri Vil, lors d'un des fréquents conflits qui opposèrent le comte de (1) Vita, éd. AA.SS., p. 523: Hasteriensis ecclesiae presbyterum, nepotem suum quem alii vicarium suum fuisse scribunt. On verra plus loin l'importance que j'accorde à ces termes. (2) Hastière (Hastière-par-delà), prov. Namur, arr. Dinant, comm. actuelle d'Hastiére; situation religieuse au moyen âge : diocèse de Liège, archidiaconé de Famenne, doyenné de Graide. L'église paroissiale St-Pierre (puis St-Nicolas) d'Hastiére était située à côté de l'église abbatiale/priorale Notre-Dame d'Has• tiére; elle fut incorporée à l'abbaye de Waulsort en 1161 (cfr G. DESPY, Les chartes de l'abbaye de Waulsort. Étude diplomatique et édition critique, t. 1: 946- 1199, Bruxelles, 1957, acte n° 34, p. 373-374). Sur la paroisse primitive d'Has• tiére, voir A. DiERKENS, Aux origines des abbayes de Waulsort et d'Hastiére: domaines anciens et paroisses primitives, dans Noies Waulsortoises, éd. A. WAYENS, t. III, Waulsort, 1984, p. 7-31. Sur le culte actuellement voué à Wal• hère dans l'église d'Hastiére (et, en particulier, sur le fameux triptyque peint en 1913 par Auguste Donnay), voir notamment JANUS, Onhaye, p. 91 et 106-109; HoEx, Recherche iconographique, t. I, p. 195 et 225; HOEX, Walhère, p. 27; Br. DESTRéE, Les panneaux décoratifs d'Auguste Donnay pour l'église d'Hastiére, dans Wallonia, 1912, t. XX, p. 303-308; A. PIROTTE, Le triptyque de S. Walhère par Auguste Donnay, Hastière, s.d. (1983). (3) Gilles Monin n'hésite pas à parler d'incoestos mores (Vita, éd. /1.<4.SS., p. 323). (4) Il serait du plus grand intérêt de procéder à un examen archéologique (archéologie monumentale et fouilles) dans cette église, dont l'essentiel n'est pas antérieur à 1860; cfr E. VAN HEURCK, Les drapelets de pèlerinage en Belgique et dans les pays voisins, Anvers, 1922, p. 348-3,53 (à la p. 352). (5) Je parlerai plus loin de ce cénotaphe (pl. I). Un relevé au trait du céno• taphe, dû à Robert Ergo, prêtre de Bouvignes, est publié dans les /lA.SS. (p. 525) et repris, notamment, dans JANUS, Onhaye, p. 64 et HOEX, Walhère, fig. 6. Le cénotaphe a été déplacé et se trouve aujourd'hui, au-dessus du reliquaire de 1675, dans le collatéral sud, contre le mur de façade (pl.