Verdun 1916 Des Mêmes Auteurs
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VERDUN 1916 DES MÊMES AUTEURS Antoine Prost Jean Zay. Le ministre assassiné (1904‑1944), avec Pascal Ory, Paris, Tallandier/Canopé, 2015 Si nous vivions en 1913, Paris, Radio France/Grasset, 2014 Du changement dans l’école. Les réformes de l’éducation de 1936 à nos jours, Paris, Seuil, 2013 Regards historiques sur l’éducation en France, Paris, Belin, 2007 Autour du Front populaire. Aspects du mouvement social au XXe siècle, Paris, Seuil, 2006 La Grande Guerre expliquée à mon petit‑ fils, Paris, Seuil, 2005 Penser la Grande Guerre : un essai d’historiographie, avec Jay Winter, Paris, Seuil, 2004 Histoire générale de l’enseignement et de l’éducation en France, t. IV, L’école et la famille dans une société en mutation (depuis 1930), Paris, Perrin, « Tempus », 2004 La Résistance, une histoire sociale, Paris, Éditions de l’Atelier, 1997 Douze leçons sur l’histoire, Paris, Seuil, « Points histoire », 1996 Gerd Krumeich Le feu aux poudres. Qui a déclenché la guerre en 1914 ?, Paris, Belin, 2014 Deutschland im Ersten Weltkrieg, avec Gerhard Hirschfeld, Frankurt, Fischer, 2014 Jeanne d’Arc en vérité, Paris, Tallandier, 2012 La Grande Guerre. Une histoire franco‑ allemande, avec Jean- Jacques Becker, Paris, Tallandier, 2008 ; « Texto », 2012 Cicatrices. La Grande Guerre aujourd’hui, avec Stéphane Audoin-Rouzeau, Paris, Tallandier, 2008 Jeanne d’Arc à travers l’histoire, Paris, Albin Michel, 1993 Aufrüstung und Innenpolitik in Frankreich vor dem Ersten Weltkrieg, Wiesbaden, Steiner, 1980 ANTOINE PROST et GERD KRUMEICH VERDUN 1916 Une histoire franco‑allemande de la bataille TALLANDIER Cartes : © Légendes Cartographie / Éditions Tallandier, 2015 © Éditions Tallandier, 2015 2 rue Rotrou – 75006 paris www.tallandier.com À la mémoire de deux grands historiens de la bataille de Verdun, Gérard Canini et German Werth. Introduction générale La bataille de Verdun est bien connue et son histoire a été maintes fois écrite. Paul Jankowski vient notamment de la reprendre avec une documentation d’archives tant françaises qu’allemandes sans précédent. Alors, pourquoi ce livre ? À cette question, deux réponses. D’abord, le moment est venu de sortir des approches nationales. Nous adoptons un point de vue résolument franco-allemand, et nous nous adressons à la fois aux lecteurs français et allemands. Une édition en allemand paraît d’ailleurs en même temps que la présente édition en fran- çais. Il nous semble digne d’intérêt de comprendre comment cette bataille fut importante, bien que de façon différente, pour les deux pays, même si, pour des raisons qu’on verra, les sources allemandes sont moins riches que les sources françaises. Cette volonté obligeait à tenir compte des particularités culturelles et mémorielles de chacun et c’est pourquoi nous avons écrit ce livre ensemble. Ce n’est pas un duo où des solistes se répondent, mais une composition commune, à quatre mains. En second lieu, nous cherchons à expliquer plus qu’à décrire. Le récit de la bataille n’est plus à faire ; tous les faits sont connus et chacun sait le calvaire vécu par les soldats dans les trous d’obus, la boue, la soif, l’angoisse et la mort. Pourtant, bien des questions continuent de se poser, et nous sommes partis de celles- ci pour construire ce livre. Les réponses, on le verra, ne sont pas simples, mais c’est en les posant que les historiens peuvent donner à la bataille de Verdun la profondeur historique qui en fait l’importance. 9 VERDUN 1916 * * * Résumée en quelques phrases et quelques dates, l’histoire de cette bataille semble simple. Le 21 février 1916, après une pré- paration d’artillerie massive, les Allemands attaquent les lignes françaises au nord de Verdun, sur la rive droite de la Meuse ; ils progressent de 8 km et occupent le fort de Douaumont le 25. La défense française se réorganise alors sous le commande- ment du général Pétain ; des renforts lui permettent de colmater provisoirement les brèches. Les 6-7 mars, les Allemands attaquent en tenailles, d’une part sur la rive gauche de la Meuse, d’autre part à l’est de Douaumont, en direction du fort de Vaux. Les combats font alors rage pendant un peu plus d’un mois. Le 11 avril, le front français, qui a reculé, s’établit sur une ligne d’une vingtaine de kilomètres, d’Avocourt (à l’ouest) jusqu’à Damloup (à l’est), en passant par la cote 3041 (conservée) et le Mort- Homme (perdu) sur la rive gauche, le village de Fleury et le fort de Vaux sur la rive droite. La IIe armée, qui tient le front de Verdun, est alors forte de 24 divisions d’infanterie (DI). À sa tête, Pétain, qui prend le commandement du Groupe d’armées du Centre (GAC) le 1er mai, est remplacé par Nivelle, jugé plus agressif. Pendant le mois qui suit, attaques et contre- attaques se succèdent des deux côtés, sans grand changement. Les 7-8 mai, à l’ouest, les Allemands tentent de prendre la cote 304, et les Français, le fort de Douaumont le 24 mai ; puis les Allemands, sachant que les Alliés préparent ailleurs une grande offensive, lancent une attaque qu’ils espèrent décisive. Dans un premier temps, ils prennent le fort de Vaux le 8 juin, puis le village de Fleury et l’ouvrage de Thiaumont ; dans un second temps, le 23 juin, ils progressent jusqu’aux abords immédiats du fort de Souville. Ils ne sont plus qu’à 4 km de la ville. L’offensive alliée sur la Somme le 1er juillet diminue leur pression mais ils attaquent une dernière 10 INTRODUCTION GÉNÉRALE fois le 11 juillet, sur un front plus étroit. La bataille se termine alors pour les Allemands, avec le remplacement du commandant en chef, Falkenhayn, par Hindenburg et Ludendorff. Pour les Allemands, la bataille de Verdun est terminée. Pour les Français, elle se poursuit jusqu’à la reconquête du terrain perdu. Il y a là comme une seconde bataille de Verdun, française celle-ci, aussi minutieusement préparée que la bataille allemande de février, et aussi efficace. Dans une première phase, le fort de Douaumont est repris le 24 octobre, et le fort de Vaux réoccupé le 4 novembre. Une ultime offensive, lancée le 15 décembre, repousse les Allemands sur un front voisin de ce qu’il était avant la bataille sur la rive droite. Mais les Français ne cherchent pas à reprendre, sur la rive gauche, le Mort-Homme et la cote 304 qui restent aux mains des Allemands. Auréolé de ce succès, Nivelle succède à Joffre au Grand Quartier général (GQG). On retire du front de Verdun des divisions et des bat- teries entières. Fin de partie. Ce bref résumé met en évidence un point capital : les batailles sont des faits historiques socialement construits. Leur délimita- tion dans le temps et dans l’espace résulte de choix que l’on peut interroger. Dans le temps, les deux adversaires ne se sont pas entretués à Verdun seulement en 1916. La ville a joué un rôle charnière dans la bataille de la Marne ; les combats se poursuivent en 1917, notamment pour reprendre 304 et le Mort- Homme, puis c’est en septembre 1918 la grande offensive américaine en direction de l’Argonne. Dans l’espace, les Éparges au sud- est et Vauquois à l’ouest ne sont qu’à une vingtaine de kilomètres de Verdun, et les combats y ont fait rage pendant l’année 1915. Les Éparges faisaient en outre partie de la Région fortifiée de Verdun (RFV) dont le front ne s’arrêtait vers le sud qu’à quelques kilomètres de Saint- Mihiel. Pétain commandait l’ensemble de ce front. Ces choix géographiques et chronologiques font ressortir le contraste entre les significations que Français et Allemands donnent à la bataille. Vue du côté allemand, cette bataille est 11 Nantillois Meuse Consenvoye Gercourt-et-Drillancourt Septsarges Montfaucon-d’Argonne Brabant-sur-Meuse Cuisy Forges-sur-Meuse 21 février Bétthincourthincourt Regnéville-ville- sur-Meuse Malancourt Bois desCô Corbeauxte de l’Oie 265 Cumières Neuville Haucourt Le Mort-Homme 304 295 Chattancourt Marre Avocourt mai Esnes-en-Argonne Marre Montzéville Bois Bourrus Bois bourrus Le Choisel ARGONNE Vigneville Germonville Le Chana Béthelainville Fromeréville-les-Vallons La Chaume Les Sartelles Évolution des lignes de frontDombasle-en-ArgonneTerrain conquis par les allemands Le 21 février 1916 Jouy-en-ArgonneLe 26 février Fronts succesifs, Le 8 juin Brabant-en-Argonneaprès les offensives allemandes Le 14 juillet Le 15 décembre 1916 Nixéville Le champ de bataille Flabas Ville-devant-Chaumont Azannes-et-Soumazannes Gremilly Haumont Bois des CaCauuresres l’Herbebois 21 février C Ô Beaumont Maucourt- Samogneux TE sur-Orne Ornes Louvemont 24 février Mor Bezonvaux te du Talou 16 décembre Cô BoisBois d’Haudromontd’Haudromont Bois Hassoule Vacherauvillcherauvillee te du Poivre DouaumonDouaumontt ô Dieppe C Bois Nawé DouaumontDouaumont Bois d’Hardaumont Thiaumontiaumont Fr 8 juin DE Vaux-devant-Damloup Charny Bras 26 février Vacherauville Damloup Froideterre FleuryFleury Vaux Abaucourt Côte de Batterie de Damloup Froideterre Souville 14 juillet Côte de Belleville Tavannes Saint-Michel Eix Moulainville en- Verdun MEUSE ée Moulainville Blanzée La voie sacr Meuse Belrupt 2 km Châtillon-sous-les-Cô Belrupt Watronville Fort Belleray Route Autres ouvrages du systèmeHaudainville défensif Voies ferrées Village détruit Haudiomont Dugny-sur-Meuse VERDUN 1916 une grande offensive comme il y en eut beaucoup, de part et d’autre : un engagement massif d’hommes et d’artillerie, un grand espoir de succès et celui de déboucher ainsi sur la paix, puis une rapide déception devant un enlisement qui se prolonge. C’est le scénario de l’offensive française de septembre 1915 en Champagne, ou celui de la Somme en 1916. Les Français, en revanche, construisent leur bataille de Verdun de telle sorte qu’elle se termine après la reconquête de Douaumont et de Vaux : elle devient ainsi une métaphore de toute la guerre, d’une guerre qui ne peut se terminer qu’après la reprise du terrain perdu en 1914 mais aussi en 1871.