Ouvrages de l'auteur

Le Fantassin de 1976. 1re édition. Ministère de la Défense. 1988. 2e édition. Service historique de l'armée de terre et Branding Iron Productions. Résistance en Haute-Saône 1990. Dominique Guéniot à Langres.

En couverture : Portrait de Jean V de Nettancourt-Vaubécourt, reproduit avec l'aimable autorisation du Comte et de la Comtesse Dreux de Nettancourt-Vaubécourt. On notera que le titre «Héros de Javarin (ou Raab, aujourd'hui Györ) d'Albe Royale et de Belgrade, appartient, en fait, à son fils Jean VI, lequel commandait le régiment lorrain de Vaubécourt dans la campagne contre les Turcs. En 1610, Jean VI sera le premier mestre de camp du régiment intégré dans l'armée française. Cartographie : La cartographie est de l'auteur. Illustrations: Sauf celles mentionnées spécialement, les illustrations sont tirées des collections de l'auteur et de M. Leschevin d'Ére.

⑥ Éditions D. Guéniot, 1992 I.S.B.N. : 2.87825.042.7 Général Pierre BERTIN

Histoire du 21e R.I.

Créé Vaubécourt, devenu Guyenne puis 21 régiment d'infanterie, aujourd'hui 21 régiment de camp

Dominique Guéniot éditeur "En Histoire, l'étude est stérile; c'est le rêve qui la féconde"

Commandant Henry Lachouque Remerciements

L'association Vaubécourt-Guyenne 21 exprime toute sa gratitude à l'auteur. L'hommage qu'il rend à ceux qui, au cours des siècles, ont porté l'écusson 21, devient sous sa plume un message destiné aux nouvelles générations afin qu'elles y puisent courage et s'inspi- rent des plus belles vertus humaines qui sans discontinuer, ont animé les anciens. Elle remercie les organismes, personnalités et tous ceux qui, à titre divers, ont contribué à l'élaboration du présent ouvrage:

Le colonel Alain Favier, chef de corps du 21' régiment de camp à Canjuers, qui a pris l'initiative de cette réalisation, Le Service Historique de l'armée de terre à Vincennes, Le commissaire-colonel de Lassalle, le colonel Jacques De- fline, Monsieur Jean-Marcel Humbert, conservateurs et le co- lonel Paul Willing, ancien conservateur au musée de l'Armée. Le colonel Pierre Caries, conservateur au musée de l'Infante- rie à Montpellier, Monsieur Raoul Brunon, conservateur au musée de l'Empéri, à Salon-de-Provence, Les conseillers généraux de la Haute-Marne et de la Meuse, Les Archives départementales de la Haute-Marne et de la Meuse, Le général de corps d'armée (C.R.) Norbert Molinier, prési- dent national de l'Epaulette, Le commandant Bernard Sevestre, président de la Sabretache, Le marquis de Nettancourt-Vaubécourt et sa famille, Le colonel René Werner, lieutenant au 21 pendant les com- bats de 1940, président de l'amicale des anciens des 21 et 221 régiments d'infanterie et tous les anciens qui, par leur té- moignage, ont contribué à la rédaction du présent ouvrage, en particulier pour la campagne de 1940, Le lieutenant Louis Delbor, commandant la 7 puis la 5 com- pagnie et ses amis François Mangold et Paul Riegel, l'adjudant Gaildraud, commandant les trains auto, le jeune patriote Lu- cien Blaizot qui s'est mis volontairement au service du 21' sur la Loire, Campagne d'Algérie : Le général de corps d'armée (C.R.) Robert Louisot, ancien chef de corps du 21 et les colonels G. Lelong et C. Mougenot, Ont également collaboré : Le général (C.R.) Léon George, de la famille du général Pierre Jacquot, l'aspirant Pierre-Jean Bailleux, érudit langrois et ancien de la 5 compagnie. Les membres d'honneur de V.G. 21 : Mme Chantal de Tourtier-Bonazzi, conservateur en chef aux Archives nationales, historienne des combats du 21 sur la Somme en 1940 dont enfant, elle fut témoin, le docteur Fran- çois Hourtoulle, historien spécialiste du maréchal Davout, Monsieur Pierre Charrié, vexillologue. Les membres de V.G. 21 : Monsieur Philippe Delorme, historien des emblèmes du 21 Me Pierre Jacquot, historien du 1 Empire, Mme Florence Les- chevin d'Ere, le docteur Christopher Perko, fondateur du groupe britannique, et à présent international de reconstitu- tion historique, " Le 21 de ligne", le professeur Oleg Sokolov, historien de l'université de Saint-Petersbourg, M. André Guil- mard, le Dr. et Mme C. Tissot. Pour la période du 1 Empire : Les descendants de deux chefs de corps en 1805-1809 et 1812-1813, respectivement: le baron Pierre Decouz, le capi- taine Roger Teullé, un chef de bataillon en 1805-1806 : le co- lonel Tanguy de Vaugrigneuse, les descendants d'officiers et sous- officiers : le commissaire-colonel Jean Rouffet, Monsieur Charles Guilmard, et pour d'autres périodes : M. Jean-Yves Lajus, M. Armand Clément-Grancourt. Les amis du 21 : Le général Jean Prautois, des troupes de marine, M. Henri Pasquier, président de l'amicale des anciens du 60 R.I., M. Léo Lamarre, président de l'amicale haut-mamaise des an- ciens du 109 R.I., régiment frère, le colonel André Maquet, combattant de la Somme avec le 60 R.I., MM. Alain Pigeard, historien et Jean-Paul Pizelle, les capitaines G. Dumoulin des troupes de marine et Jean-Louis Escoda, ancien du 21 régi- ment de camp, uniformologues et M. R. Nourisson. Nos amis belges : Monsieur Raoul Baudoux, le lieutenant-colonel Bikar, Me Phi- lippe de Callataÿ, président du comité Waterloo, M. Hadelin Donnet, M. Georges Englebert, historien, Mme M. de Ghoÿ; M. Jacobs, conservateur en chef du musée royal de l'armée belge, le colonel J. Jacquet. ainsi que tous ceux qui ont apporté leur contribution à une meilleure connaissance de l'histoire du 21 Nous tenons à remercier particulièrement l'association Patri- moine 52 et M. André Mourot qui a assuré la mise en page du présent ouvrage ainsi que l'éditeur, M. Dominique Guéniot.

Adolphe Leschevin d'Ere Président de Vaubécourt-Guyenne-21 Descendant du lieutenant Doignon, au 21 de 1805 à 1814. Préface

L'histoire du 21 de ligne par le général Bertin vient à son heure, le régiment ayant célébré ses 400 ans d'existence en 1990.

Quatre siècles de bravoure et de discipline méritent bien qu'on s'y attarde.

Avec talent, l'auteur qui a servi dans les rangs du 21 a su concilier la rigueur et la précision de l'his- toire avec l'esprit de corps du régiment. Grâce à lui, nous voyons revivre devant nos yeux des pans entiers de notre passé national.

Levé à l'origine pour la défense de nos "marches de l'Est" au service des ducs de Lorraine, le régiment passe au service d'Henri IV sous l'impulsion de Jean V de Nettancourt-Vaubécourt. Il entre alors dans l'his- toire de France. Il participe aux guerres de religion, s'en va combattre "le Grand Turc" et les Sarrasins aux confins de la Hongrie avant de connaître le siège de La Rochelle, les batailles du Roi-Soleil, l'épopée napo- léonienne, Waterloo, la conquête de l'Algérie, l'expé- dition de Crimée, l'holocauste de 14-18, le désastre de 39-40 où il tient bon jusqu'à la fin.

A la lecture de son palmarès, on constate que le ré- giment n'a jamais eu à rougir de son action, dans la victoire comme dans la défaite. C'est dans l'adversité que le courage et la discipline font montre de leur valeur.

Un tel régiment ne saurait disparaître. Aussi, reste- t-il toujours en activité en tant que 21 de camp à Can- juers où il maintient et enseigne les traditions de bra- voure et de générosité qui, de tout temps, ont caracté- risé la marque de ses anciens.

Cette longue fresque a été magistralement évoquée par le général Bertin qui a droit à notre admiration et à notre reconnaissance. Je me permets d'y ajouter également les remerciements de ma famille pour la- quelle cet ouvrage constituera un souvenir précieux.

Marquis de Nettancourt-Vaubécourt Médaille militaire 1939-1945, croix de guerre Président d'honneur de Vaubécourt-Guyenne- 21 Avant propos

a filiation régimentaire des corps d'infanterie dans L l'armée française se définit par rapport à des règles précises.

Avant 1789, la personnalité d'un régiment se carac- térise par le nom qu'il porte et dont se montrent fiers tous les membres de la famille militaire que repré- sente un "Piémont", un "Royal Marine" ou un "Guyenne". La filiation des 102 régiments qui subsis- tent en 1790 est continue et nombre d'entre eux jouis- sent d'une réputation dépassant même les frontières du royaume, tels les Vieux et les Petits Vieux. Leur histoire s'écrit sans peine en remontant jusqu'à leur origine première.

A partir de 1791, une méthode différente s'impose car les noms disparaissent pour laisser place à des nu- méros d'ancienneté. Cette identité chiffrée marque désormais l'individualité du corps et elle devient le point d'attache de tous les souvenirs communs. Le problème se complique néanmoins avec les amal- games qui fusionnent les unités de la monarchie et celles de la levée en masse; d'autant qu'interviendront par le suite, des dissolutions et des réapparitions, nou- velles causes de rupture de tradition. Aussi, en 1839, la Section historique du ministère de la Guerre décide- ra-t-elle que la seule filiation à retenir, quoique artifi- cielle, est celle du numéro depuis la Révolution. Les générations passent, mais le numéro se transmet avec les titres de gloire et les méchants coups du sort en- caissés en commun. C'est en observant les règles ainsi définies qu'ont été rédigées les pages de ce petit livre consacré à un régiment de France dénommé Vaubécourt au départ et qui, après quatre siècles, continue à servir sous le numéro 21. Les dimensions mêmes de l'ouvrage n'ont cependant pas permis de relater son histoire complète et détaillée. Il a fallu en conséquence se limiter à quelques aspects saillants pour chacune des cam- pagnes où il a combattu. De l'ensemble de ces ac- tions, individuelles ou collectives, se dégage une figure morale exceptionnelle à tous égards: celle d'un corps qui demeure fidèle à l'esprit que lui avaient in- culqué ses premiers chefs.

Fig. 1. Le Berceau du régiment I

1589 / 1610 1790

De Vaubécourt à Guyenne régiment de la monarchie

1589 - 1610 Au vieux temps du bon roi Henry

1589. Depuis bientôt trente ans, protestants et ca- tholiques s'entretuent en France, souvent sans autre motivation spirituelle que celle de l'appartenance à un camp et non à l'autre. Dans cette atmosphère de guerre fratricide, Henri III qui, avec l'aide des hugue- nots, luttait contre la Ligue soutenue par l'Espagne, est assassiné le 1er août par un moine fanatique.

Avant d'expirer, il a désigné Henri de Navarre, son "plus proche parent" comme son successeur légal au trône; ce que certains seigneurs catholiques n'admet- tent pas. Ils abandonnent le service tandis que leurs unités se désagrègent. Le nouveau roi continue les opérations malgré tout mais il échoue devant où son armée de siège a fondu du tiers. On comprend dans ces conditions qu'il s'efforce d'étoffer ses maigres contingents.

C'est ainsi qu'en décembre 1589, le maréchal d'Au- mont qui guerroie en Champagne, voit arriver un régi- ment de 3000 hommes levés par Jean V de Nettancourt, baron de Vaubécourt, gentilhomme du Barrois alors aux prises avec les ligueurs locaux et qui, en démêlé avec le duc de Lorraine a opté pour le Béarnais.

Comme tous ceux de l'époque, le régiment com- porte des arquebusiers (ou mousquetaires) et des pi- quiers dans la proportion de deux pour trois. Il a pour colonel nominal Henri de Nettancourt second fils de Jean V et il est classé lorrain. Quoique de fraîche

1. Lequel lui avait usurpé l'abbaye de Beaulieu en Argonne. Fig. 2. Piquier et arquebusier à la fin du XVIe siècle levée, il donne toute satisfaction à ses employeurs. Quant à son fondateur, Jean V de Nettancourt, il est très en cour ayant combattu à Ivry, à Fontaine- Française, à Aumale surtout, où il a reçu une grave blessure en dégageant le roi pressé de près par l'adversaire.

Quand la guerre prend fin en 1598, à la paix de Vervins, le licenciement de l'armée jette sur le pavé une masse de militaires sans ressources; ce qui ne va pas sans danger pour l'ordre intérieur du royaume et Henri IV autorise les anciens chefs de toute obé- dience à organiser des corps destinés à servir à l'étranger. Le duc de Mercœur, de la maison de Lor- raine, conduit ainsi 4000 à 5000 Français et Lorrains en Hongrie, à la disposition de l'Empereur Rodolphe II, rempart de l'Europe contre la menace ottomane. Le régiment de Vaubécourt entre dans la composition de ce corps expéditionnaire sous les ordres du frère aîné d'Henri, Jean VI de Nettancourt-Haussonville, baron de Vaubécourt, dit "le Héros" qui se taille une solide réputation en 1601, à la prise de Raab.

Revenu en Lorraine en 1606, il se voit sollicité de nouveau par Henri IV mécontent de l'attitude du duc de Bouillon compromis dans la conspiration du maré- chal de Biron. Avec deux autres régiments lorrains, il reprend du service et occupe Sedan possession du duc de Bouillon avant de s'installer à .

A titre français

En 1609, quand le roi commence ses préparatifs en vue d'une action contre la maison d'Autriche, Vaubé- court est aligné sur le tableau d'effectifs des régiments français, passant de 10 à 15 enseignes de 100 hommes chacune Par commission du 24 avril 1610, il est admis au service de la France. Devenu régiment fran- çais, son colonel Jean VI de Nettancourt-Haussonville prend le titre de mestre de camp. En incorporant Vaubécourt vingt jours avant de tomber sous le couteau de Ravaillac, Henri IV laisse à son pays une unité que l'histoire classera parmi les plus efficaces de toutes celles qui auront combattu pour la défense de la Nation.

2. Enseigne: au féminin, emblème militaire, ou la troupe qui marche sous cet emblème; au masculin, l'officier qui portait l'em- blème. Le mot drapeau se substituera progressivement à en- seigne pour la désignation de l'emblème. 21 RÉGIMENT D'INFANTERIE

LA MARCHE DU RÉGIMENT

Au vieux temps du bon roi Henry Nous n'avons jamais reculé Devant un verre bien rempli Ou devant un jupon bien troussé. Nous voulons nous amuser Donnez-nous du bon vin pour le boire Tout le monde voudra nous voir Et les filles devront nous aimer.

Nous n'avons jamais reculé Qu'il s'agisse d'un bon coup à boire Ou simplement d'une victoire Le vingt et un s'est présenté. Encore un fantassin dans le pétrin Encore un fantassin dans le pétrin

Nous fûmes les premiers au Front Les derniers à garder le Rhin Et quand nos enfants serviront Ils viendront tous au vingt et un. La Malmaison et Somme Py, le plateau de Lorette Ont vu luire les baïonnettes Des soldats du glorieux vingt et un.

Le sang de nos morts héroïques N'a pas été versé en vain Si leur mémoire magnifique Revit un jour au vingt et un. Encore un fantassin dans le pétrin Encore un fantassin dans le pétrin.

Reconstituées à partir des souvenirs de plusieurs camarades, les paroles ci-dessus sont proches de la version originale, même s'il a pu exister des variantes d'une compagnie à l'autre. De l'avis unanime des anciens d'avant 1939, le refrain ne mettait pas "le fantassin dans le purin". En Algérie, les popotes chan- taient "Encore un fantassin dans le pétrin, Encore un fantassin dans le bon vin". La Fille du régiment

Opérette de Donizetti (marche principale)

Chacun le sait, chacun le dit, Le régiment par excellence, Le seul à qui l'on fasse crédit Dans tous les cabarets de France, Le régiment, en tous pays L'effroi des amants, des maris, Mais de la beauté suprême, Il est là, il est là, Il est là, morbleu ! Le voilà, le voilà, le voilà, corbleu ! Il est là, ah ! Le beau Vingt-unième !