Note aux lecteurs :

Les pages que l’on trouvera ci après ont été rédigées par Marcel Prodel , et devaient faire partie d’un ensemble inachevé concernant ses souvenirs personnels , ceux rapportés par ses parents et grands parents concernant le village de Troche.

Nous avons décidés de remettre en forme cet ensemble afin de le structurer par thèmes, car il était visible que Marcel Prodel avait rédigé ces feuillets comme des notes, préalables à une re-lecture et à un classement qu’il n’a pas eu malheureusement l’opportunité de réaliser.

C’est donc un document, bien que fidèle au travail d’écriture de Marcel Prodel, néanmoins remanié dans sa structure qui est présenté ici.

Nous avons également jugé comme nécessaire d’ajouter quelques notes en bas de page, quand les faits relatés par l’auteur peuvent ne pas être compris par la plus jeune génération.

Le lecteur trouvera en outre dans les pages suivantes un plan de situation du bourg de Troche permettant de localiser dans le récit de Marcel Prodel les habitations des principaux personnages, commerces ou artisans cités Souvenirs de Troche au début du XXième siècle 2

Souvenirs de Troche au début du XXième siècle 3

Souvenirs de Troche au début du XXième siècle 4

Sommaire Page

Les commerces 3

Le boulanger 3 Les bouchers 4 Les restaurants 5 Les épiceries 6 • Le magasin Ballat 6 • Le magasin Roche-Chassagne 6 • Le magasin Chatenet 6 • Le magasin Doussaud 7 • Le magasin Gorse 7 • Le magasin Demarty 8

Les artisans 9

Menuisiers, charpentiers, couvreurs 9 Maçon peintre plâtrier 10 Forgerons 10 Meuniers 11 Sabotiers cordonniers 11 Modiste, couturière, tailleur 13

Une petite industrie à Troche 14

La vie du village 16

La paroisse 19

L’électricité 22

La ligne 5000V de à Pompadour 22 La ligne 40000V du Saillant à Limoges 22

Le télégraphe, le téléphone, la poste 23

Les transports 24

Les routes 24 Le chemin de fer 24 L’automobile 25

INDEX des noms cités 26

Souvenirs de Troche au début du XXième siècle 2

Souvenirs de Troche au début du XXième siècle 3

Les commerces

Le boulanger :

Une boulangerie, café, restaurant, appartenait aux époux Prodel. On pétrissait, à l'époque, le pain à la main, cuit sur levain, dans un four chauffé uniquement aux fagots de bois. Les grosses tourtes de pain blanc et les grandes couronnes de 5 kg, trouvaient leur clientèle dans les villages dont les habitants, loin de payer comptant, venait s'acquitter de leur dette une ou deux fois par an, à une époque où les règles en bois, modestes prédécesseurs les mémoires d'ordinateurs, permettaient de suivre les livraisons grâce aux "coches" marquées au moment de l'achat sur l'un et l'autre des exemplaires détenus par le boulanger et son client. Le rapprochement des deux règles au moment du règlement permettait de vérifier la coïncidence des "coches" et par conséquent, d'éviter la fraude de l'une ou l'autre des parties. La fabrication du pain était très diversifiée et comportait également la "petite couronne" et la "mêlée", pain long torsadé de 2 kg, sans compter le "pain long" de 1 kg, la petite couronne "grignée", cuite dans un moule en tôle et les "petits pains" ou "michons" qui faisaient le bonheur des enfants pour deux sous ! Tous ces produits ou presque jusqu'au "pain fantaisie", était soumis à la règle stricte de la pesée avec un appoint obligatoire, et exigée par la loi en cas d'insuffisance de poids réglementaire et la tolérance sur les poids des "pains fantaisies", fixée par décret préfectoral ainsi d'ailleurs que le prix du pain, étaient étroitement surveillés tant par la clientèle, informée par affichage dans le magasin, que par les services préfectoraux, donc parfaitement respectés, sous peine d'amende voire même dans les cas extrêmes de fermeture du magasin. Une à deux fois par semaine, le pain de seigle était mis en vente sous la forme de tourtes de 5 ou 2 kg. En 1922, le grand père Prodel investit une partie de ses économies, pour acquérir un pétrin mécanique de marque "Bertrand Lafont "actionnée par un petit moteur mono cylindrique à essence de Marque "Bernard" puisqu'à l'époque, Troche, toujours à l'arrière-garde du progrès, n'était pas encore desservi en énergie électrique. Plus tard, le four à bois, fut aussi modernisé et, reconstruit avec de nouveaux systèmes de tirage, nécessitant l'exécution d'une impressionnante cheminée en tôle maintenue par des haubans, le four restant toujours chauffé au bois. Quant à l'eau, elle était fournie par un puits, entièrement maçonné, creusé devant la boulangerie est équipé d'une magnifique pompe à balancier, puits jamais tari, ce qui n'était pas toujours le cas du puits communal, creusé sur la place publique, à l'ombre de son marronnier plusieurs fois centenaire, arbre de Sully disait la légende. Pour revenir au grand-père Prodel, après sa journée commencée au pétrin entre trois et quatre heures du matin, été comme hiver, avec pause pour le repas de midi et une courte sieste d'une petite heure, le boulanger prenait sa carriole à deux roues, tirée par un brave petite âne, le « poulou » (plus tard après bien des efforts ce fut la voiture à quatre roues tirée par une brave jument blanche la « bichette ») et, accompagnée de son chien fidèle, il allait faire sa tournée dans les villages, et porter jusqu'à Comborn (malgré les loups qu'il rencontra une fois ou deux fois du côté de Vigeois) et deux fois par semaine quelques 12 ou 15 « mêlées » ou « couronnes » de 2 kg ! Qui dit mieux aujourd'hui où la journée mécanisée ne commence plus à quatre heures du matin et où la confortable camionnette remplace avantageusement le char à bancs découvert à tout vent et son petit âne ? Puis l'ouverture du préventorium de Glandier, devenu propriété de la Ville de Paris, ouvert dans les années 1920 ou 1921 fut un débouché supplémentaire pour notre boulanger qui se heurta pourtant à la concurrence d’un boulanger de Vigeois (Demarty), voire même, sur place, à celle d'un boulanger de Pompadour (Renaudie) qui ouvrit un dépôt de pain chez un artisan tenant boutique sur la place de l'église.

Les bouchers :

Au cours des années 1930, Emile Sermadiras et son épouse Thérèse, née Spioussas, tinrent aussi une boucherie dans le sous-sol de leur immeuble. La famille Spioussas était retraitée venant de Bourg-la-Reine en banlieue parisienne, et le père Spioussas, toujours très matinal, réveillait un peu le Souvenirs de Troche au début du XXième siècle 4 bourg, par son sifflet particulier encourageant les trois ou quatre vaches de la ferme à s’abreuver au « bac » en bois près du puits de la place de l'église ; le parisien retraité respirait enfin l'air de la campagne, bien relayé par la suite dans cet exercice par son gendre Émile Sermadiras, cependant pur produit de la ferme de la « Mégie » près de la petite Loyre, berceau de sa famille. Avant eux, les dimanches, à la sortie des deux messes, deux bouchers de Pompadour, Seizelard et Lasplanchas, venaient avec leurs carrioles à cheval, stationnées au pied de la croix de fer, sous le grand tilleul, en face du café- tabac, épicerie, journaux Chatenet, offrir leurs produits: veau, boeuf et mouton ainsi que de bas morceaux parmi lesquels le foie de veau, offert « en prime » (qui le croirait aujourd'hui) à tout acheteur d'un bon « bouillis » (dire aujourd'hui pot-au-feu) ou des « tripes ». Les temps ont changé et ils ne faisaient recette que pour le Mardi Gras où les paysans, quoique bien pourvus en « cochonnailles », mettaient un point d'honneur à acheter de la « viande du boucher » pour fêter carnaval et tout particulièrement les « mollas », c'est-à- dire les « poumons de veau » et le « coeur de veau », mets oubliés et cependant délicieux si bien préparés.

Le repas de Carnaval, dessin de Roger ¨Prodel vers 1925

Puis vint la boucherie Lescure, installée dans l'ancienne maison de Madame Fraysse, devenue propriété d’Hyllaire Sermadiras qui la vendit, ou plus exactement son épouse, après sa tragique noyade dans l’étang de la Ressége de son mari. La boucherie Lescure eut la réputation de sa charcuterie, saucisses, boudins, pâtés, rillettes. Cette réputation méritée dépassait largement le bourg de Troche.

Souvenirs de Troche au début du XXième siècle 5

Les restaurants

Le boulanger de Troche, qui, pour augmenter ses ressources devait également assurer la vente de son avoine et graines diverses, tandis que son épouse tenait un restaurant de très bonne réputation dont les hôtes de marque parmi lesquels entre autres le notaire du bourg L'étude de notariat de Troche a été la propriété des familles Goudal puis de Maître Colin1. Ces hôtes et leurs invités appréciaient particulièrement la cuisine soignée, les pâtés de prune, les gigots d'agneau aux pommes de terre boulangère, tous cuits au four du boulanger ! Le restaurant Prodel à droite vers 1930

Toute cette cuisine de campagne et surtout les pâtés de prune faisaient le bonheur d'une nombreuse clientèle qui envahissait le restaurant et même une partie de la grange aménagée pour l'occasion, les jours de la fête votive du 15 août, fête dédiée à Notre-Dame.

Madame Fraysse, grand-mère du célèbre Hyllaire Sermadiras, dit « mille bombes », tenait aussi un restaurant buvette dans la maison occupée par la suite par la boucherie Lescure-Debiard contiguë à la maison au petit magasin de Madame Desjacques magasin de « mode et confection »

De gauche à droite , la maison Chatenet devenue plus tard salle des fêtes, la maison Fraysse devenue boucherie Lescure et le magasin de Mme Desjacques

L’épouse de Monsieur Vincent Dutheil tenait, en face de la forge, un café restaurant, avec son jardin en pointe et sa tonnelle garnie de glycines occupant tout l'espace entre la route principale et le chemin de la « Grillère », avec à son extrémité la croix de la mission plantée en 1898. La magnifique enseigne en tôle peinte « café restaurant Dutheil » fut exécutée par mon oncle Roger Prodel

1 Doyen des notaires de et décoré à ce titre, de la croix de la Légion d'honneur et décédé l'année de ses 100 ans Souvenirs de Troche au début du XXième siècle 6

Les épiceries :

Le magasin Ballat

Madame Ballat, mère de Madame Louis Moury (ancien conseiller municipal de la commune de Troche) et de Madame Antonin Chassagne, tenait boutique au fond du bourg, près du cimetière, dans un vaste magasin fort bien achalandé, auquel on accédait par trois grandes marches en pierre depuis la route, et où la sonnette actionnée par la porte d'entrée à laquelle elle était reliée par un fil de fer, prévenait de l'arrivée d'un client la propriétaire du lieu dans sa cuisine à l'arrière-boutique. Madame Ballat, légèrement handicapé par la perte d'un oeil à la suite d'un coup de corne d'une des vaches de la ferme dont elle était propriétaire en face de son magasin de l'autre côté de la route, était une commerçante affable, sachant donner un bonbon ou un sucre d'orge, ou une réglisse aux jeunes commissionnaires, faisait mentalement ses comptes ne sachant lire, sans jamais aucune erreur, ni de secours d'une quelconque caisse enregistreuse. Son magasin fut transformé par la suite en bureau de poste donnant sur la route pour l'entrée des usagers, avec cuisine dans la partie arrière et chambre au premier étage2.

Le magasin Roche-Chassagne

La famille Roche- Chassagne tenait un magasin d'alimentation générale, quincaillerie, et produits divers (pétrole). Au début du siècle, le magasin Roche était aussi « pharmacie ». Madame Chassagne mère, à sa retraite céda son magasin à son fils Antonin qui épousa une des filles de Madame Ballat épicière dont nous venons de parler. Madame Chassagne mère se retira dans sa maison vendue par la suite à Monsieur Sylvain Reix, juste en face de l'étude de notre notaire Maitre Collin. À son décès, de nombreuses terres cultivées appartenant à Madame Chassagne mère furent revendues et notamment un immense champ bordant les routes de Pompadour et de où furent construits les immeuble Maximin, Bioulou Jean- Pierre, scierie Pradaux, Hivert, Sermadiras- Denis, Boisdevesy !.....

Cette épicerie, quincaillerie, droguerie, Antonin Chassagne, bien achalandée dans un vaste magasin, sera reprise par la suite par Sylvain Reix, puis par Paul Chassagne et son épouse3. Monsieur Sylvain Reix s'installa ensuite dans la maison de Madame Chassagne mère maison qu'il fit transformer en magasin et en habitation.

Au centre ancien magasin Chassagne

Le magasin Chatenet

L'épicerie, tabac, journaux, régie et buvette Chatenet dans un local vétuste aujourd'hui démoli et devenu salle des fêtes4. Le tabac à priser était pesé en grammes et décigrammes dans une petite balance Roberval à plateaux de marbre blanc et plateaux en corne translucide qui faisaient mon admiration tout comme la série des poids de cinq à vingt grammes et quelques décigrammes. Le père Jules Châtelet dit « blédou » à ses dires et à en croire sa signature torréfiait son café devant sa boutique dans un engin à cylindre, chauffé par un foyer en tôle, alimenté avec les débris de bois des vieux emballages.

2 Aujourd’hui propriété des époux Philippe Moury. 3 Ce magasin a été transformé aujourd’hui (2015) en restaurant 4 Il s’agit de l’ancienne salle des fêtes Souvenirs de Troche au début du XXième siècle 7

Le père Chatenet tournait la manivelle du cylindre tout en lisant le journal ; de temps à autre il enlevait le cylindre du foyer, le secouait abondamment, puis ouvrait la trappe pour laisser sortir fumée et enveloppes de grains, le parfum du café grillé se répandait au voisinage, contrebalançant celui pas toujours agréable de la fumée du feu de bois et de vieux cartons du foyer. Après deux ou trois séances de ce genre, le café torréfié était vidé chaud et fumant sur un lit de vieux sacs vides ayant contenu le café vert acheté en sacs, avec le savant mélange de ce cru dont le père Chatenet disait avoir le secret.

Le magasin Chatenet au centre de la photo

Le père Chatenet était le plus fin pêcheur de truites du coin et la petite Loyre, mais surtout les petits ruisseaux de Mesurat et de Lavaud étaient ses terrains privilégiés pour la pêche au grillon, la sauterelle et au ver!

Madame Chatenet avait une nièce vivant à la maison en permanence, Léontine Marty dite « dents de chocolat5 » ce qui l'empêchait pas d'avoir la dent dure dans ses critiques acerbes sur les personnes qui faisaient parfois l'actualité du bourg ; elle s'occupait de broderie à façon et contribuait ainsi à la vie courant de l'épicerie. Mme Chatenet avait également une nièce habitant Limoges mariée à un « tailleur pour hommes » Monsieur Bousselie dont la fille Paulette étudiait le violon en vue d'un professorat, Paulette Bousselie devenue depuis Eve Ruggieri par sa fille, la célèbre présentatrice de musique classique à la télévision. Comme quoi bon sang ne saurait mentir !

Le magasin Doussaud Après les époux Chatenet nous avons l'épicerie, quincaillerie des époux Henri et Léontine Doussaud, établie dans un ancien immeuble rénové près de la forge du père Doussaud dit « Bondi » puis dans un immeuble neuf construit près de la maison neuve également du menuisier Basile Gorse.

à gauche de la photo, le magasin Doussaud vers 1950 près de la forge Doussaud dit « Bondi »

Ces deux maisons neuves furent construites sur le terrain mis en vente après la dissolution de la société anonyme « les bûcherons » créée en 1928 par mon oncle Roger Prodel.

Le magasin Gorse

Prés du magasin Doussaud, celui des « Economats du Centre » à l'enseigne rouge tenue par Madame Francine Gorse, épouse de Basile Gorse, menuisier charpentier Ce magasin était la succursale d'une des grandes chaînes de distribution (déjà) du centre de la France ayant pour vocation l'épicerie la quincaillerie et était fort bien approvisionné en produits pour la campagne, chaises en fer, clous de toutes sortes, fils barbelé, fil à fagots de bois, serrures, engrais pour les champs, bouillie bordelaise et poudre anti-doryphore, et en plus offrant à Troche sa première pompe de distribution d’essence !

5 Les mauvaises langues prétendaient qu’elle cachait la mauvaise qualité de certaines de ses dents avec du papier argenté d’emballage de chocolat … Souvenirs de Troche au début du XXième siècle 8

Le magasin Demarty

Un peu plus loin en allant vers l'école publique sur la gauche, les magasins à l'enseigne bleue « Alimentation du Centre » chaîne concurrente des « Economats du Centre » ouvert par Madame Adèle Demarty vers les années 1928, Madame Demarty épouse de Joseph Demarty, menuisier charpentier, tragiquement disparu dans un accident de montage de charpentes, en même temps que Monsieur Masselu ancien prisonnier de guerre 39 45. Ce magasin avait été aménagé dans un vieil immeuble ayant appartenu aux époux Bourbouloux, dont la femme portait, comme toujours à la campagne, le surnom de « la cloque », allez savoir pourquoi, peut-être allusion à son regard un peu perçant et de mauvais augure. Comme la chouette ou la cloque, allusion à son cri qui verse lugubrement la nuit et à son regard de braise ! Madame Demarty céda ensuite son magasin à Madame Maligne pendant un certain temps. Puis sa fille Georgette, épouse du remarquable mécanicien qu’était Monsieur Costes en fit sa maison d'habitation tandis que son mari aménagea au sous-sol un remarquable atelier de mécanicien ajusteur fraiseur dont la réputation s'étendait jusqu' par exemple où le propriétaire de la parqueterie Monsieur Dessus venait lui confier les pièces les plus délicates de ses machines et aussi de son installation de turbine à eau, installée sur le « Bradascou »et qui alimentait partiellement en énergie et en courant électrique son usine. Souvenirs de Troche au début du XXième siècle 9

Les artisans

Menuisiers, charpentiers, couvreurs

Troche, dans son passé a vu s’établir de nombreux artisans : le père Gorse, père de Basile Gorse le menuisier charpentier, avait installé dans la grange de son immeuble (propriété actuelle6 de Monsieur Jean Devaud qui l’a héritée de son père retraité des chemins de fer venant d'Ivry-sur-Seine dans la région parisienne et ébéniste remarquable à ses heures) un manège à engrenages, mû au bout de son timon par un vieux cheval borgne qui tournait ainsi en rond, à longueur de journée, autour de l'axe central de la machine, pour actionner une scie à ruban pour débiter les bois et à la saison une râpe à pomme dont le produit, plié dans des draps rustiques mais solides, était posé en couches successives entre les planches d'un pressoir à cidre, actionné à la main par un levier relié à l’écrou de la vie centrale de pression, en général par deux hommes surtout en fin de pressage. Un accident tragique endeuilla cette famille dont l'un des enfants, échappant à la surveillance du père Gorse, eu un bras happé par l'engrenage du manège et décéda broyé par la machine, malgré ses cris laissant insensible le malheureux cheval continuant sa ronde et le grand-père sourd et âgé. Ce manège archaïque et unique dans la commune et ses environs fut remplacé vers 1925 par un énorme moteur à essence « Japy » mono cylindrique à deux volants, dont les ratés, répercutés par la cheminée d'échappement au-dessus du toit de son abri, mettaient en émoi comme autant de coups de fusil, le quartier de l'école et l'école elle-même son plus près voisin. Le résidu du pressage des pommes broyées était soigneusement mis en réserve et l'usine de conserves Comby de Pompadour venait le récupérer pour en extraire la pectine, produit solidifiant pour les confitures !

Monsieur Basile Gorse, menuisier, dont l'atelier était aménagé dans les anciens locaux de l'usine des « bûcherons » puis son fils Roger Gorse, ancien prisonnier de guerre, lui succéda, Monsieur Basile Gorse était aussi charpentier, tout comme ses collègues, Joseph Demarty, Marsaleix, ancien prisonnier de guerre et Verdier. Un tragique accident lors d'une « lève » de charpente coûta la vie à Monsieur Marsaleix et de graves blessures à Monsieur Demarty, Basile Gorse et Verdier sortirent indemnes de ce mauvais sort. Monsieur Verdier était aussi couvreur, ardoise ou tuile, et Monsieur Gervais a pris sa suite. Plus rare , un couvreur de chaume, Jean Doulet dit « biseness » extrêmement intelligent habitait dans les bois au-dessus de la petite Loyre dans une sorte de vieille cabane en aval du pont de la Mégie.

Les époux Bourbouloux avaient un fils Antonin menuisier de grande qualité, faiseur de superbes meubles, et qui installa dans les salles de classe de l'école publique tous les soubassements des murs en lames de sapin je crois avec baguette moulurée de couronnement. Son atelier au sous-sol de l'immeuble, comportait un superbe tour à bois, actionnée par une pédale manoeuvrée par l'ouvrier lui- même, faute de moteur de quelque nature que ce soit, et ce tour faisait mon admiration car il en sortait de purs chefs-d'oeuvre de menuiserie et même des toupies en bois, prenant naissance sur ce tour qui chantait à l'unisson d'Antonin à la voix à la fois puissante et juste, pour pousser les chansons à la mode dans les années 1920!

6 Ancienne propriété Devaud Souvenirs de Troche au début du XXième siècle 10

Maçon peintre plâtrier

Les maçons avaient pour nom Auguste Penaud et son frère Jean Penaud, aidés avant la guerre, vers 1929 par Marsaleix, puis par la suite Malavialle qui rebâtit les murs de soutènement de l'école publique et les escaliers d'accès aux cours de récréation dont les marche en grés rose étaient usées par le temps et devenues dangereuses en période de neige ou de verglas ; il acquit et démolit la chapelle de Chaumont, ancienne chapelle ayant fait parti de l'ensemble de la commanderie des templiers de Chaumont.

le « nouveau » mur de soutènement de l’école. Au centre Madame Prodel institutrice Dans le chemin descendant vers la maison Fraysse, s’installèrent le plâtrier peintre Boisdevesy et sa famille, seul artisan de ce métier à Troche, son fils Jacques lui a succédé ainsi que Monsieur Dupuis.

Forgerons

Il y avait aussi des forgerons le vieux père Doussaud dit « Bondi »; Vincent Dutheil dit « Faurillou », installé dans sa forge à gauche de la route principale après le carrefour avec le chemin de la « Grillère », forgeron et maréchal ferrant, oeuvrant avec le « travail » sorte de charpente massive en madriers de bois, permettant d'entraver et de soulever avec un treuil à mains et des solides lanières en corde tressée les bœufs de trait pour leur ferrage, et aussi parfois les chevaux de trait. Les fers étaient confectionnés quasiment sur mesures. Pour l'anecdote, il faut savoir que le vieux père Doussaud, le forgeron inventif installé dans sa forge au carrefour des chemins montant vers l’ancienne école libre et du chemin vers la « Grillère », le père « Bondi » donc, l'homme au tablier de cuir et au bouc célèbre, construisit un jour, un grand bi, étrange engin de bois et de fer comportant une grande roue en droit cerclé de fer (roue de Charrette) pour l'avant et, à l'arrière, une petite roue genre roue de brouette en bois et fer, cadre en bonne ferraille tout comme le guidon orientant la grande roue mue par des pédales en fer directement fixées sur l'axe de roue, avec un semblant de sabot de frein sur la roue avant. L'appareil construit, fit, après quelques essais, sa première sortie avec son inventeur constructeur à la fois, passager et pilote et moteur, sur la route de Troche à Pompadour. L'engin et son passager emportés par la pesanteur dans la descente vers le pont d’« Ecupillac », termina sa course, en faisant un « tout droit » dans le virage de la pêcherie borgne de chez Besse avec point final et de chute dans ladite mare, pour le vélo et son inventeur !

Henri Sermadieras, ancien maire de Troche, dit « le petit Monsieur », forgeron charron, installé dans la grange Dandaleix et à qui succédera plus tard Jean Demarty, lequel fit construire ensuite sa propre maison et son atelier à la « Genette ». Le « petit Monsieur » était à vrai dire un ferronnier d'art et de talent, et mon oncle lui fit exécuter des fers forgés pour défendre les fenêtres de sa maison en construction en 1929 1930 ainsi que des consoles d'auvent et des balustrades de perron de sa maison .Il exécuta sur plans de mon oncle les grilles actuelles du monument aux morts de la place de l'église, pour remplacer les lourdes chaînes en fonte qui avaient cédé sous le poids des gamins s’en servant de balançoire !

« le petit Monsieur qui passe ». Dessin de Roger Prodel vers 1925 Monsieur Sermadieras s'installa par la suite à Mesurat, c’était aussi un ajusteur remarquable et il exécuta des pignons taillés dans la masse, pour soutenir des chaînes de manoeuvre actionnant des récipients qui formaient les éléments principaux d'un appareil inventé conjointement avec brevet à Souvenirs de Troche au début du XXième siècle 11 l'appui par mon oncle. Monsieur Sermadieras installa sur le moteur essence de son atelier une bonne vieille dynamo pour l'éclairage avec une batterie d'accus de sa maison et de son atelier en attendant la lumière du syndicat d’Orgnac en 1930. La séance une fois par mois du ferrage des roues de charrette devant l'atelier du bourg de Monsieur Sermadieras puis de Jean Demarty était toujours un spectacle extraordinaire pour les gamins. Le feu de bois en cercle, pour chauffer les cerclages en fer, chauffés au rouge, puis appliqués sur les roues à ferrer, par au moins trois et même quatre spécialistes munis de longues pinces pour poser délicatement le fer rouge sur la roue et, dès la manoeuvre accomplie, l'arrosage abondant du fer sur sa roue par des manoeuvres pour obtenir la rétraction du fer sur sa roue. Travail d'artiste. Qui s'en souvient aujourd'hui ?

Monsieur Henri Doussaud ancien maire de Troche, forgeron de son métier fut un des premiers à offrir aux paysans les toutes premières charrues modernes, les « brabants » comme on disait sous la forme des charrues « bi socs » réversibles de Marque « Kirpy » tirées encore par des boeufs en général.

Meuniers

Il y avait aussi un meunier au moulin de la Mégie dont la meule était autrefois actionnée par une roue mûe par une petite chute alimentée par un canal d'amenée dérivant l’eau de la petite Loyre sur quelques centaines de mètres et aboutissant à la roue à l'arrière du bâtiment. Les derniers meuniers furent les époux Conjat. La crue de 1910 était restée célèbre et le niveau autrefois tracé sur la façade, s'inscrivait au premier étage du bâtiment. Il est probable que le malheureux pont de la Mégie sur la route CD 7 dû souffrir à l'époque par un tel afflux d'eau, ce pont fut d'ailleurs élargi et consolidé par les services des ponts et chaussées en la personne de leur ingénieur Monsieur Soullier à Vigeois au cours des années 1925-1930.

Sabotiers cordonniers

Troche avait aussi ses sabotiers : le père Vaysseix, dit « Cros de Gris » avec son atelier dans le sous- sol de sa maison, face à l'immeuble Pignolet. Le père Vaysseix confectionnait à la maison entièrement les grosses galoches en bois de noyer qui étaient le lot commun des paysans et des enfants venant à l'école. Il avait pour commis Maximin qui s'installa par la suite à son compte dans la maison qu'il fit construire en 1930 au carrefour des routes de Pompadour et de Lubersac. Ce dernier y exerça d'autres activités, fabrication de cidre, salle de bal, restaurant auberge et toujours des sabots et des « couades » qui ont été la célébrité de Troche. Magnifique godet en bois à la queue percée et qui, en équilibre sur le seau également en bois cerclé, servait de fontaine pour se laver les mains ! Les seaux en bois cerclés étaient aussi de fabrication artisanale de ses sabotiers ! La maison Maximin vers 1930

Le père Doussaud dit « Couturou » confectionnait plutôt des galoches en cuir sur le dessus et semelles de bois dans son atelier installé à l'emplacement actuel de l'épicerie Lacroix-Denis7. Il déménagea ensuite pour s'installer dans une vieille maison, sur le petit chemin de l'école libre, appartenant à la famille Gervais et son atelier était en face de la maison, dans une petite construction qui servait probablement d’étable autrefois. Sa maison d'habitation était occupée auparavant par les époux Barougier, ancien doyen de la commune et dont l’un des fils fut vers le milieu du siècle un membre éminent je crois de la faculté de médecine de Bordeaux.

7 Aujourd’hui (2015) fermé Souvenirs de Troche au début du XXième siècle 12

Monsieur Jean Pagnon, cordonnier de profession et savetier, confectionnait des chaussures et notamment de robustes chaussures de marche à tige montante et semelle cloutée. Achetant les tiges il réalisait entièrement à la main le reste de la chaussure avec coutures nouées au « ligneul » qu'il préparait lui-même à partir de fils de chanvre enduit de poix .Les semelles pour les chaussures neuves comme pour les ressemelages étaient découpées à la main, dans de grandes feuilles du cuir de première qualité (dit « croupon ») de diverses épaisseurs.

Son épouse tenait un magasin de chaussures de marques et accessoires comme pantoufles diverses, sabots en semelle bois et dessus cuir. Monsieur Pagnon avait initialement son atelier au rez-de-chaussée de l'immeuble Léon Pradeaux (ancien maire), lequel immeuble fût amputé de plusieurs mètres pour l'élargissement de la route principale. Ci-dessus à gauche de la photo l’immeuble Léon Pradeaux vers 1925

L'échoppe de Monsieur Pagnon était à l'angle du bâtiment, au rez-de-chaussée, face à la place de l'église et au puits communal et au vieux marronnier .L'habitation était au premier étage de cette maison à balcon, la seule que j'ai connue dans le bourg, auquel on accédait par un escalier. Sous l'escalier un petit logement d'une ou deux pièces était habité par une bonne vieille femme l’Anne Monthezin qui se mettait sur son « trente et un » les jours de fête votive du 15 août, pour un emploi d'extra comme serveuse au café restaurant de mon grand-père. Cette vieille maison, du côté opposé à la place, était habitée au premier étage par Madame Charron et ses enfants où l’on y accédait par un escalier en pierre. Sous l'immeuble une immense cave voûtée que mon grand-père mettait à profit pour tenir aux frais les bières et autres limonades des jours de fête de 15 août, fournitures faites par la maison Joubert limonadier à Vigeois ou Sadornac à Pompadour. Plus tard Monsieur Pagnon acheta à l'autre extrémité du bourg, une vieille maison ayant appartenu à la doyenne de la commune, Anaïs Cousty, il installa son atelier dans un local abritant un ancien four à pain, et aménagea le reste de la maison en habitation, avec côté opposé au petit chemin donnant directement sur la maison Fraysse et se prolongeant vers les « Coutilles » et l’étang de la Ressége.

Monsieur Pierre Paradinas faisait de la réparation de chaussures, initialement dans une maison située derrière l'église tandis que son épouse veuve de guerre de Monsieur Debiard, tenait salon de coiffure et barbier. Plus tard Monsieur Paradinas fit construire une maison face à la place de l'église et acheta pour la démolir une grange, sur l'emplacement de la maison à construire, appartenant à Mme Chassagne mère, grange dans laquelle mon grand-père abrita longtemps les réserves de fagots pour le chauffage du four de la boulangerie.

Modiste, couturière, tailleur Souvenirs de Troche au début du XXième siècle 13

Troche a eu également ses modistes qui tenaient leur magasin sur la place de l'église et de l'immeuble Pradeaux, Mademoiselle Hortense Tamain, puis Mademoiselle Paret avec enseigne de leur magasin « Modes » en noir et blanc confectionnée par mon oncle Roger Prodel. Troche avait aussi ses couturières : les demoiselles Lespinas, habitant dans un petit appartement situé derrière et appartenant à la maison Lardet qui a façade sur la place de l'église ; l'appartement des demoiselles Lespinas dont les fenêtres donnaient sur le petit chemin descendant vers la maison Fraysse,

Madame Desjacques, tenait un magasin de « mode et confection » contiguë à la boucherie Lescure- Debiard. Pour la petite histoire, sachez que Madame Desjacques (dont la tombe est la première à droite à l'entrée du vieux cimetière) était la tante de Monsieur Dutheil (de ) que j'ai bien connu, et qui pendant vingt ans conduisit chaque jour de Brive à Limoges et retour sur sa puissante locomotive à vapeur les trains express Paris Toulouse et il me fit partager (ami d'enfance du grand- père Prodel) sa vie de vrai cheminot passionné autant par son beau métier que par la connaissance exacte au kilomètre près de sa ligne entre Limoges et Brive !

Monsieur Boutot était tailleur pour hommes de son métier et habitait la petite maison jouxtant la maison Vaysseix, avec sa soeur Adèle Boutot, institutrice libre tandis que son autre soeur Henriette servait comme bonne à tout faire de l'abbé Lamoure à son presbytère. Crespin Boutot avait un âne et une carriole logée dans une grange en face de sa maison de l'autre côté de la route, grange qui fut démolie pour construire l'atelier hangar de Léonce Doussaud. Dans la maison Boutot logea autrefois Madame Penaud, veuve d'Auguste Penaud ancien maçon et nièce d'Henri Penaud mort sur un bateau de guerre pendant la guerre 39 45. Madame Penaud déménagea ensuite à la Genette dans l'ancienne maison de sa mère Marie Defrance ; Madame Penaud servit également l'abbé Soubrenie, autre curé de Troche. Souvenirs de Troche au début du XXième siècle 14

Une petite industrie à Troche

Troche eu pendant quelques années sa petite industrie représentée par la société anonyme les « bûcherons » créé en 1925 par mon oncle et huit autres associés, mon oncle Roger Prodel, blessé du poumon en 1915, brillant ingénieur des Arts et Métiers de Cluny, élève de l'école primaire de Troche (son directeur Monsieur Bayle) puis de l'école professionnelle de Brive, entré au concours des Arts et Métiers en 1912 à 17 ans et sorti avec médaille d'argent cinquième de sa promotion. Roger Prodel et le docteur Marcland, célèbre pneumologue de Limoges (une des cliniques du CHU de Limoges porte son nom) qui soignait mon oncle blessé du poumon de la guerre 14 18. Cet appareil nouveau relativement portable, permettait par un mouvement de montée et descente des deux flacons attelés à la même chaîne, d'insuffler dans les plèvres du poumon malade de l'azote afin de comprimer les plaies ou « cavernes » pour essayer d'en provoquer la cicatrisation.

En 1928 Roger Prodel, construisit lui- même un poste mural de TSF à cinq lampes avec une antenne à quatre fils en croix, soutenu par un poteau de huit à dix mètres, planté près de la grange Reiller au fond du « coudert » et un petit mât prés de la toiture de la maison. On entend pour la première fois après bien des essais et réglages « Radio Paris » parole et musique. Poste à deux batteries d'accumulateurs. Événement dans le village dont quelques amis sont invités à l'écoute avec casques puis haut-parleur à col de cygne! Dans les premiers, notre instituteur de la grande classe Monsieur. Ernest Chambrette. Roger Prodel à gauche devant un de ses premiers postes de TSF vers 1928

Mon oncle intéresse à la technique de la radio Hyllaire Sermadieras et ensemble ils s'associèrent pour créer une société à deux partenaires qui aura pour nom « Radio Pan ». Quelques postes en forme de coffre seront ainsi construits et distribués sans grand profit pour les constructeurs à des amis

Pose de l’antenne TSF, dessin de Roger Prodel 5 janvier 1929

La société anonyme les « bûcherons » donc, acheta à Monsieur Reiller une parcelle de terrain dans le bourg même en bordure du chemin qui conduit à la Grillére et jouxtant au bourg la propriété Souvenirs de Troche au début du XXième siècle 15

Dandaleix, pour construire une scierie mécanique débitant les grumes de chaînes pour confectionner des traverses et longrines de chemin de fer. La scierie était actionnée par une locomobile de forte puissance, immobilisée sur un foyer en briques réfractaires afin de pouvoir utiliser la sciure et les déchets pour la chauffe de la chaudière ; quant à l'eau, malgré la fourniture d'un puits très profond creusé à cet effet au fond du terrain, devenue vite insuffisante, on n’hésita pas à creuser un puits au fond du prés de Vincent Dutheil, en bordure du petit chemin descendant au village de Tugeat et à construire une canalisation qui traversant le chemin de Tugeat, puis la route principale et le chemin de la Grillère, alimentait une pompe mûe par la machine à vapeur elle-même. La locomobile transmettait sa puissance à un arbre de transmission occupant toute la largeur de l'usine, par une large courroie montée sur un des volants de la machine, alimentant outre la scie à ruban principale, des scies circulaires, une scie à ruban de plus petite taille, d'autres machines à bois et une dynamo électrique d'assez forte puissance pour l'éclairage de l'atelier dont la toiture était formée de trois « sheds » en dents de scie dont l'un des pans était vitré, la charpente était en bois de chêne tout naturellement. Les bois débités étaient transportés en bordure de route par des wagonnets montés sur une voie Decauville qui aux jours de repos et de fermeture faisait le bonheur des gamins malgré les interdictions et le contournement de la vigilance des parents. Les grumes de chêne étaient acheminées par un immense fardier attelé à une ou même deux paires de boeufs sous la conduite de Philippe Pécout du village de Tréfouilléras. Ce fardier, la paire de bœufs et leur cornac occupaient une place d'honneur pour confectionner un char fleuri qui une année eut la forme d'une gigantesque couade pour la fête votive patronale du 15 août, fête hélas disparue par la concurrence des courses de Pompadour.

Souvenirs de Troche au début du XXième siècle 16

La vie du village

Les paysans réunis en « assemblées » battaient le grain au fléau dans leurs granges au sol en terre battu avec couverture en chaume ; les gerbes de froment, de seigle ou de sarrasin étaient déliées sur le sol ; les récoltes se faisaient alors aux « moissons » à la faux ou à la faucille et les « javelles » liées en bottes en gerbes par des liens de paille tressés étaient chargées sur des charrettes à ridelles pour être rentrées dans les granges à l'abri du mauvais temps et la dernière gerbe chargée, la gerbe « baude » donnait lieu à une soirée de fête bien méritée et généralement bien arrosée avec chants de circonstance accompagnée à l'accordéon.

Les paysans, après avoir battu le grain comme nous l'avons vu, le passait au « tarrare », tourné à la manivelle, pour séparer le grain de la balle. On portait alors le grain au meunier de la Mégie, dont la minoterie était installée sur un canal d'amenée des eaux de la petite Loyre, Monsieur Conjat fut le dernier meunier que j' y ai connu. La farine obtenue donnait la pâte préparée dans la « maie » et cuite en pain dans le four banalisé pour plusieurs habitations voisines tout comme le puits alimentant en eau potable ces mêmes habitations. Les droits d'utilisation (avec frais d’entretien partagés du four et puits) donnaient des servitudes réciproques avec des droits de passage des uns et des autres. Les fêtes du 15 Août à Troche attirait un monde considérable qui faisait la joie des commerçants, des forains et des manèges qui s'installaient soit sur la place du marronnier soit sur la place du tilleul devant le magasin Chatenet. Quelques « scieurs de long » débitaient encore en forêt des longs bois de charpente en rythmant leur travail, pieds nus pour celui qui avait pris place en haut du chevalet, par des chants de tradition patoise.

Un fête à Troche vers 1920

L'affluence était ce jour là considérable, et les gens des villages voisins, venaient voir et jouer dans les différents « bancs » des « viroulets » où pour quelques sous on pouvait gagner un superbe lot de porcelaine déclassée ou pour les plus chanceux une bouteille de fin mousseux en guise de champagne, avec manèges de chevaux de bois à l'ombre du tilleul devant le café tabac Chatenet, ou encore quelquefois Une procession du 15 août vers 1920 sur la place de l'église . Il y avait surtout les magnifiques défilés de chars fleuris dont la célèbre « couade » fleurie, tirée par une paire de bœufs cornaqués par Philippe Pécout avec dans son godet le célèbre Émile Sermadiras en jaquette et gibus, chantant de sa voix de « stentor » les chants patois à la couade que la foule reprenait en choeur. Hélas, tout cela est bien fini et les courses de Pompadour ont ravi le folklore du 15 août de notre cité. Souvenirs de Troche au début du XXième siècle 17

Les soirées d'été, le père Chatenet montait chercher sur la place de l'église, le receveur des postes, Monsieur Latournerie, pour une partie de dames, face à face, échiquier sur les genoux, partie qui se terminait parfois jusqu'à dix ou onze heures du soir !

La partie de dames entre Mr Chatenet et Mr Latoutnerie, dessin de Roger Prodel daté du 27 juin 1925

Ci contre « La vie au village » d’après un dessin de Roger Prodel vers 1929 : de gauche à droite Hyllaire Sermadiras ,dit « mille bombe » Henri Sermadiras ancien maire dit « le petit monsieur » et probablement André Dandaleix

Le dialogue des trois amis discutant de TSF :

Hyllaire Sermadiras « …j’y comprends queue d’ale !! »

Henri Sermadiras « qu’y a d’ampères dans une volt ? »

André Dandaleix « ça dépend d’ez accus- des pil’s chèches ! »

Dans la maison Reiller également on avait installé des écoles avant la construction de l'école publique en 1881, Jean Gery étant maire et avant la construction, vers 1890, de l'école libre par les pères de Glandier, école libre où se succédèrent Mesdemoiselles Tissier et Sarrut et en dernier Mademoiselle Chassagnard qui a laissé un si bon souvenir dans la population de Troche et parmi ses anciennes élèves, école libre de filles uniquement qui compta jusqu'à 30 élèves ou plus, tandis que l'école publique garçons et filles devaient accueillir après la Grande guerre vers 1917 cent cinquante ou près de deux cents élèves. Ma mère, Mme Prodel, en arrivant à l'école de garçons, cours préparatoire, petite classe, compter à la rentrée de 1917,85 élèves dans sa classe !

Avec quelque nostalgie j'évoquerai notre bon vieux marronnier sur la place de l'église qui a abrité tant Souvenirs de Troche au début du XXième siècle 18 de jeux d'enfants et qui décorait la place toute entière de ses mille fleurs à la saison. Soutenu dans ses branches maîtresses par de fines armatures en fer et étayé du sol par de solides poteaux, il fut un jour déclaré dangereux et aussi gênant alors, on sacrifia un beau jour ce vénérable vieillard dont la plantation était attribuée à Sully. Plus tard, ce fut le tour du magnifique tilleul, planté par le père Jules Chatenet, près de la croix en fer forgé, la croix du « reposoir », sur la place publique, de l'autre côté de la rue principale par rapport à la place d'église, en face du bureau de tabac épicerie Chatenet. Il faisait bon l'été sous ce tilleul en fleurs à venir parler le soir avec des amis. Lui aussi a été sacrifié comme gênant l'expansion du bourg et la croix de fer forgé et son socle en pierre subit le même sort avec déménagement vers l'entrée du cimetière. Souvenirs de Troche au début du XXième siècle 19

La paroisse

La paroisse de Troche a eu la chance de connaître et d’avoir à son service pendant de nombreuses années des prêtres remarquables ; sans remonter trop loin je citerai Monsieur l’abbé Soulier qui a raconté dans ses mémoires tout la reconstruction de la chartreuse de Glandier.

En particulier il note pour l’année 1879

Le 4 août 1879 « Monseigneur Denéchou, évêque de , après la distribution des prix au petit séminaire de Brive, se rend à Glandier avec ses grands vicaires et son secrétaire général. Déjà il est arrivé une cinquantaine de prêtres pour la cérémonie du lendemain. »

Le 5 août 1879 « consécration solennelle de la grande église de la chartreuse. Je suis désigné avec le curé d’Ussel, le supérieur et le professeur de philosophie du petit séminaire d'Ajain dans la Creuse pour porter les saintes reliques. Il est venu des curieux de tous les pays : les prairies en amont du monastère ressemblent à un champ de foire. La foule est évaluée à cinq ou six mille personnes. La cérémonie ne dure pas moins de cinq heures. Monseigneur réunit à sa table quatre pères chartreux, les grands vicaires, les directeurs du grand séminaire, les architectes Monsieur de Menthon et le juge de paix de Vigeois. Les autres prêtres au nom de cent mangent dans une dans une autre salle. Le prélat repart à six heures du soir après avoir solennellement fermé les portes du monastère. À la gare de Pompadour il faut allonger le train de plusieurs voitures ».

En accord et avec le soutien du maire de l'époque et notaire à Troche Monsieur Goudal, président du « Conseil de Fabrique » à l'église, ils firent creuser le puits de la place des marronniers, magnifique maçonnerie extérieure bien malencontreusement démolie, soi-disant pour danger pour les enfants, édifice surmonté d’une superbe statue de la vierge patronne de la paroisse, l'ensemble inauguré avec grande affluence le 24 septembre 1876. Cette statue en métal peint a été transportée contre le chevet de l'église à l’extérieur ainsi que la plaque d'inauguration.

Place de l’église, le marronnier, le puits dominé par la statue de la Vierge

Pour la construction du fameux puits communal sur la place de Troche le mieux est de s'en remettre au récit principal intéressé, Monsieur l'abbé Soullier8, curé de Troche de 1869 à 1879 et dont voudra bien trouver ce après la transcription sur ce sujet pour les années s’écoulant de 1873 à 1876 26 juin 1873 : « visites du père prieur Timothée (de Glandier) et Apollinaire qui sont venus porter des encouragements au fils du maire de Troche Monsieur Marcel Goudal. Le malheureux jeune homme, à qui j'ai administré le viatique, s'en va de la poitrine. Il était appelé à diriger plus tard la commune et servait de trait d’union entre le maire et le curé, déjà passablement divisés au sujet d’un puits9 à creuser sur la place publique. Mais Dieu a ses desseins.... » 20 mai 1876 : « à la chartreuse de Glandier le père Adelphe m’autorise à prendre dans la carrière du monastère, les pierres de taille nécessaires à la construction d'un puits que j'ai fait creuser sur la place publique de Troche ; mais réflexion faite, je me décide à faire porter des pierres d’. » 4 juillet 1876 : « je descends en voiture à Glandier et j'en rapporte une pierre blanche de Poitiers pour

8 L’abbé Soullier a laissé des notes manuscrites et que j'ai pu me procurer grâce à l'amabilité de l'honorable père dominicain B. Riehermoz, archiviste de la Grande Chartreuse en 1967.

9 Il s’agit de l’ancien puits situé place de l’église, remplacé un temps par une pompe manuelle , puis à nouveau retrouvant sa fonction initiale Souvenirs de Troche au début du XXième siècle 20 y graver l'inscription à placer sur notre puits. » 5 juillet 1876 : « Monsieur Godefroy, architecte en second et remplaçant Monsieur Douillard (les architectes qui dirigent la reconstruction de la chartreuse de Glandier) m’apporte le plan de l'inscription. Je dédie le monument à l'Immaculée Conception. » 24 Août 1876 : « Grande fête à Troche ; Monsieur Godefroy a fait dresser sur le puits une statue en bronze de la Sainte vierge et je fais aujourd'hui la dédicace de ce monument. La fanfare d’Uzerche conduite par Monsieur Dessus, est venue nous prêter ces accords et Monsieur Sardol, le curé du Lonzac, évangélise le peuple. La foule est énorme. Un banquet d'une quarantaine de couverts servis dans les prairies, dans le jardin du presbytère, couronne la fête. »

L’abbé Soullier consignera bien d’autres faits oubliés comme celui-ci :

31 décembre 1870 : « Jour de dimanche, je déroule en pleine église le long nécrologe de l'année. Jamais, peut-être, depuis des siècles, la paroisse de Troche n'aura été si cruellement éprouvée. Le chiffre des décès s'élève à 109 dont 63 grandes personnes sur une population de 1200 âmes. Si l'on ajoute à ce nombre une dizaine de soldats morts sous les drapeaux, il sera clairement établi que nous avons été décimés dans toute la force du terme. La vérole noire a fait une trentaine de victimes. Quelle année funeste pour la paroisse, pour la contrée et pour la France entière ».

Au curé Soulier a succédé l'abbé Bourges qui s'employa avec le concours des pères de Glandier à faire construire l’école libre vers 1890. Dans cette école réservée aux filles deux religieuses y enseignèrent, deux bonnes soeurs, Mademoiselle Teyssier (la grande soeur) et Mademoiselle Sarrut (la petite soeur) toutes les deux enterrées au cimetière proche. Mademoiselle Chassagnard leur a succédé jusqu'à la fermeture de l'école et son départ à la retraite à la maison de retraite de .Puis l'abbé Bourges partit ensuite comme curé doyen de Vigeois et a fini sa carrière comme secrétaire de l'évêché de Tulle.

L'abbé Bourges a été remplacé par l'abbé Joseph Lamoure, homme de grande culture et musicien dans l’âme. Il avait pour sacristain Crespin Boutot dit « Nanet » qui chantait à merveille tous les chants latins de la liturgie, qui sonnait les cloches pour éloigner la foudre et faisait de ce fait chaque année la quête dans les villages pour service rendu à la communauté, malgré le danger réel que cela pouvait représenter.

A l'abbé Lamoure succéda l’abbé Thiallet, ancien vicaire à la cathédrale de Tulle puis l’abbé Grivel, ancien prisonnier puis l’abbé Maurice Soubrenie qui a tant fait pour la « Compagnie de la Couade », ce groupe de jeunes qui a portait bien loin et bien haut les couleurs du folklore de Troche !

Des témoins du passé religieux de la paroisse subsistent encore non sans quelques péripéties. Il en va ainsi pour la « Croix de la Mission », belle oeuvre en bois de charpente avec le Christ en croix, plantée initialement à la fin du siècle dernier au carrefour Dutheil, devant la tonnelle du restaurant, au carrefour entre la route principale et le chemin qui mène au village de la Grillére. Carrefour de la Croix de Mission vers 1920 avec la tonnelle couverte de glycines du restaurant Dutheil

Mon camarade André Commagnac (frére de Madame René Coucaud) m’a donné jadis ce renseignement qu’il tenait de sa mère (à 96 ans doyenne de la commune) La croix fut plantée en 1898, au milieu d’une assistance considérable de chrétiens et de prêtres, Madame Commagnac assistait à la cérémonie avec de nombreuses autres jeunes filles de son âge 16 ans, Madame Commagnac est née en 1882. Cette croix fut déclarée gênante et transportée sur intervention du curé de la paroisse au carrefour de la Genète entre les routes Vigeois et la route de Glandier. Souvenirs de Troche au début du XXième siècle 21

Encore génante à cet endroit pour faire place à d'immenses panneaux de signalisation, elle a été encore une fois déplacée de quelques mètres et ne fait plus face au carrefour. L'essentiel est qu'elle soit conservée comme témoin précieux de la foi de des ancêtres. Bien d'autres croix de chemins, fréquentées au moment des processions ou des fêtes des Saints existaient ou existent encore pour certaines : - une croix aux « Coutilles » sur le chemin appartenant jadis à Madame Célestin Fraysse du bourg, - une croix à « l’Escurat » propriété de Maître Colin notaire et aujourd'hui de Madame Chalvidan, - une croix à « Trefouilleras » (propriété ex Gerodolle je crois) - une croix au carrefour de la route de Glandier et du chemin d’ « Espalion » - une croix au carrefour du chemin de « la croix du loup » et de celui de la « Rebeyrie ». Un ancien de la commune que j'ai bien connu, Monsieur le chanoine Philippe Maumont, ancien supérieur du grand séminaire de Tulle (le chanoine Maumont est né au village de Chaumont sur la commune de Troche) m'a dit que l'on allait procession à cette croix non pas « Croix du loup » comme cela a été déformé mais « Croix de Saint Loup » le jour de la fête de ce saint Limousin, évêque de Limoges du 16 mai 614 jusqu'à sa mort le 22 Mai 632. Elu évêque par Clothaire II petit fils de Clovis, ses reliques sont fêtées le 22 Mai à la date de sa mort. Souvenirs de Troche au début du XXième siècle 22

L’électricité

La ligne 5000V de Vigeois à Pompadour

Le bourg de Troche était traversé depuis 1900 sans aucune concession en éclairage public ni aux particuliers par une ligne triphasée à 5000 V sur poteaux bois, biscornus, venus tout droit des taillis de châtaigniers des environs, avec isolateurs (des" tasses" comme disaient les gamins) en porcelaine blanche. Cette ligne, de la turbine aménagée sur la petite chute de la Vézère, au pont du "Jargassou" à Vigeois, alimentait outre le chef lieu du canton la minoterie "Dubois", fournisseur de la région en farine et notamment du boulanger de Troche, le bourg de Pompadour et ce en suivant la route, tant bien que mal.

De la même façon, la petite chute du "Gour Noir" toujours sur la Vézère, entre Uzerche et Vigeois, alimentait quant à elle la ville d'Uzerche .Il est à noter en outre que les Pères Chartreux de Glandier (et non du Glandier) qui avaient achevé la reconstruction de la chartreuse en 1869, avait aménagé, sur la petite Loyre longeant leur domaine, une petite chute alimentant un turboalternateur suffisant pour leurs besoins en éclairage électrique. Cet aménagement sera remplacé plus tard par un moteur diesel utilisé en groupe de secours et qui sera maintenu en fonctionnement jusque vers 1930, c’est à dire jusqu'au raccordement de ce site devenu préventorium, au réseau du syndicat d'électrification d’Orgnac

La ligne 40000V du Saillant à Limoges

La commune avait, laissé passer l'occasion providentielle de la construction de la première ligne française à très haute tension, ligne triphasée de 40 000 V qui, partant de la centrale électrique toute neuve du Saillant comportant deux turboalternateurs, fonctionnant sous 40 m de chute sur la Vézére, reliait ce point de production historique à la ville de Limoges pour l'alimentation de ses tramways. Celle ligne (première ligne haute tension de France) et devant donc le refus de la municipalité de Troche de la laisser traverser le bourg, moyennant un dédommagement en fourniture gratuite d'énergie électrique, fut déviée, après avoir évité la chartreuse de Glandier en coupant à travers prés, entre la route des "Fombiardes" et la route de Glandier à Troche vers la chaussée de l'étang de "La Ressège" et aboutissait sur un pylône en face approximativement de de l’ancienne école communale et continuait ensuite le long de la route de Lubersac, puis Coussac Bonneval et Limoges avec poste important de coupure et de transformation à Coussac Bonneval La ligne qui suivait les routes (ainsi que parallèlement de l'autre côté de la route une ligne téléphonique de service à deux fils sur poteaux bois) coupant parfois à travers champs et prairies, était construite sur pylônes triangulaires en fer à U ou sur poteaux bois parfaitement droits et cylindriques, maintenus au sol par des socles en béton, avec emmanchement des deux composants préservé par du bitume noir qui se liquéfiait quelque peu à la chaleur de l'été pour le bonheur des gamins. Chaque pylône ou poteau était surmonté d'une grande pique d'au moins 1 m en fer rond relié à la terre par un câble de cuivre sur isolateurs en porcelaine, ce dispositif de paratonnerre protégeant tant bien que mal la ligne des effets de la foudre. De loin en loin sur deux poteaux bois, une herse comportant des interrupteurs à couteaux (trois par herse) manoeuvrés par perche et destinés par leur ouverture à isoler pour localiser les incidents ou pour réparations certains tronçons de la ligne. L''un de ces appareils se trouvait exactement en face de l’ancienne école publique de Troche et il eut un jour sa célébrité en réveillant les instituteurs par une courte explosion suivie d'un éclair de courte durée et au matin, on put constater qu'un malheureux chat avait eu la triste idée de grimper sur la herse et de faire le pont entre deux conducteurs ; il fut foudroyé net et son cadavre calciné, témoin malheureux, était au pied du poteau ! Cette ligne à haute tension du Saillant à Limoges, désaffectée après la guerre de 1939 1945, fut soumise à la démolition pour récupération du cuivre des conducteurs et de la ferraille des pylônes, vers 1960 et quelques-uns de ses socles en béton rescapés servirent parfois de piles de portails ou d'entrée à des fermes. Souvenirs de Troche au début du XXième siècle 23

Le télégraphe, le téléphone, la poste

L’abbé Soullier, note en 1877 sur son journal

30 octobre 1877 : « on plante les poteaux du télégraphe électrique sur la route de Pompadour à Vigeois. »

12 novembre 1877 : « notre télégraphe commence à fonctionner. »

Monsieur Latournerie détenait le guichet du télégraphe, du type Morse à rouleaux de papier. Ce télégraphe nécessitait une ligne sur poteaux bois, à un fil reliant Troche à Pompadour en suivant la route, et installée donc le 12 novembre 1877, en venant de Vigeois.

Initialement cette ligne télégraphique desservait la poste de Troche, installée dans la maison de maître ayant appartenu à la famille Dumény, famille qui comptait celle qui fut Madame Reillier mère. La poste fut un temps installée dans cette maison ainsi que le prouve un poteau bois, planté près du mur de soutien du seuil de la maison que fut la boucherie Lescure, poteau visible sur une aquarelle de 1916 réalisée par mon oncle Roger Prodel. La poste de Troche fut transférée dans un immeuble sur la place de l'église, immeuble appartenant précisément à la famille Reillier. C'est dans cet immeuble qu'officiait Monsieur Latournerie dont il a été question plus haut, ce receveur qui inaugura vers 1928 le téléphone, avec une superbe cabine pour le public, dans la pièce d'attente. Succéderont à Monsieur Latournerie Monsieur Faure et Mademoiselle Marthon devenue plus tard Madame Jean Ségurel !

La cabine de téléphone de Troche. Dessin de Roger Prodel vers 1925

Puis la poste fut transférée par la suite dans un immeuble au fond du bourg, résultant de la transformation de l'ancien magasin de l’épicière Madame Ballat, le bureau de poste donnait directement sur la route par son entrée, la partie arrière du bureau servant de cuisine par le receveur et à l'étage les chambres à coucher. Le dernier receveur fut Monsieur et Madame Pequemajoux puis Monsieur Donnadieu Souvenirs de Troche au début du XXième siècle 24

Les transports

Les routes

La chronique journalière de l'abbé Soullier, curé de Troche de 1869 à 1879, utilisateur de la route faite avec son cheval et sa voiture permet de se faire une idée de l’état des routes à la fin du XIXème siècle

« 8 juin 1869 : le révérend père Timothée arrive de grand matin, monte dans ma voiture et nous partîmes pour Uzerche. Je me rends au service anniversaire que Monsieur Brunet, vice président du tribunal de la Seine, fait célébrer pour le repos de l'âme de son père. Quant au vénérable prieur, il pense pouvoir obtenir, par l'intermédiaire du jeune et brillant magistrat, l'ouverture ou la réparation des routes qui conduisent à Glandier. Impossible en effet, d'entreprendre de longues et dispendieuses constructions sans quelque chemin carrossable. Comment transporter les pierres, les bois, la chaux, les ardoises ? Il n'existe que le chemin vicinal de Vigeois à Pompadour, passant par Glandier, mais ce chemin n'est pas pavé entre le « Repaire » et l’étang de « Goupillac », en sorte que dans les temps pluvieux les roues des voitures s'enfoncent jusqu'aux moyeux. La route venant de Troche'est ouverte que de la « Genette » à l'étang de la « Ressége », se continue ensuite par un misérable sentier qui passe à la « fosse aux loups » et descend presque à pic dans le fond du ravin. Mr Brunet accueille très favorablement la requête du père ». L’étang de « la Ressège », aujourd’hui la Rechèze

5 novembre 1869 : « il me prend fantaisie d'aller déjeuner à Glandier. Le père Timothée me régale d'une omelette et d'un plat de lentilles. Les chemins sont si mauvais que revenant d’Orgnac le 8 novembre avec le jeune marquis de Seilhac, mon élève, j'embourbe ma voiture dans les ornières aux abords du monastère. La route en terre venant de Troche vers Glandier n'est ouverte que de la Genette jusqu'à l'étang de la Ressége, elle ne sera pavée qu'en avril 1874. Vers 1895 la route de Pompadour à Vigeois est dans un piteux état à cause de long de lourds convois nécessités par la construction de la voie de chemin de fer de Limoges à Brive par Uzerche, et cette route est un véritable bourbier devant l'école publique de Troche construite en 1881, Jean Géry étant maire de la commune ».

Le chemin de fer

Là encore la chronique de l’abbé Soullier nous apprend que :

20 décembre 1875 : « aujourd'hui est inaugurée la voie ferrée de Limoges à Brive via Nexon. Le bruit s'était répandu dans les campagnes que les voyageurs seraient transportés gratuitement le premier jour ce qui attire à Pompadour une foule de curieux, mais ils en reviennent le nez long ! »

La ligne de chemin de fer de Limoges à Brive par Uzerche par contre est inaugurée le 4 juin 1892 et la ligne du P.O.C. (Paris Orléans Corréze) d'Uzerche à Tulle et Argentat est inaugurée le 30 juin 1904. Le viaduc d'Uzerche et le tunnel de cette ligne sont construits en 1902 par mon grand-père maternel Désiré Lannoy. Sur la ligne Limoges Brive par Uzerche tamponnement le 30 juin 1908 entre une locomotive qui déraille et un wagon de marchandises.

Souvenirs de Troche au début du XXième siècle 25

Le 15 décembre 1908 catastrophe sur cette ligne du tunnel du « Pouch » entre et . Collision entre une rame marchandises détachée accidentellement d'un train de marchandises sur la voie Brive Limoges et un convoi montant également dans le sens Brive Limoges, la collision se produisant dans le tunnel du « Pouch ». Les conducteurs de la locomotive périssent presque sur le coup, carbonisés, le train ayant pris feu. Les nombreux blessés sont soignés sur place par le docteur Bosredon. catastrophe de Pouch

L’automobile

Monsieur Paradinas fit l'acquisition d'une voiture à « moteur », en l'occurrence une superbe limousine, De Dion Bouton je crois, ayant appartenu au directeur des haras de Pompadour, intérieur capitonné cuir, phares acétylène tout cuivre, avec bouteille « Magondeaux» pour leur alimentation, capote en toile arrimée au pare-brise par des bretelles en cuir, pour mettre à la disposition de clients éventuels en recherche d'un taxi pour se déplacer faute de voitures individuelles bien rares à l'époque. Il s'associa ensuite à Jean Bioulou pour créer la première ligne régulière d'autobus entre Pompadour (la gare) et Brive centre via Glandier, Voutezac, Objat et Brive, ligne exploitée en commun par les deux créateurs, ligne dite B.P. (Bioulou Paradinas) avec un autobus Ford de quelque 15 ou 20 places, qui après quelques mois eut un accident fort heureusement sans gravité pour les passagers au Pont d’Ecupillac en revenant des trains du soir à Pompadour pour rallier Troche. Un deuxième autobus Renault plus confortable et plus spacieux remplaça le Ford initial et Jean construisit ingénieusement un garage de fortune pour l'autobus dans le jardin pratiquement face à l'école publique, de l'autre côté de la route, avec entrée de la voiture directement par la route.

À Troche la première voiture automobile a été achetée neuve (une Renault) en 1925 par Monsieur Reiller, propriétaire, cultivateur dans sa maison de maître du bourg de Troche.

______Souvenirs de Troche au début du XXième siècle 26

INDEX DES NOMS CITES

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Adelphe (Père) 19 Gorse (Francine) 7 Ballat 23 Gorse (le père) 9 Ballat (Madame) 6 Gorse (Roger) 9 Barougier 12 Goudal 6 Bayle 14 Goudal (Marcel) 19 Besse 10 Grivel (Abbé) 20 Bioulou (Jean) 25 Hivert 6 Bioulou (Jean-Pierre) 6 Lacroix-Denis 11 Biseness voir Doulet (Jean) Lamoure (Abbé) 13 ; 20 Blédou voir Châtelet (Jules) Lannoy (Désiré) 24 Boisdevesy 6 ; 10 Lardet 13 Bondi voir Doussaud (« le vieux Lasplanchas 4 père ») Bosredon (Docteur) 25 Latournerie 17 ; 23 Bourbouloux 8 Lescure 4 ; 23 Bourbouloux (Antonin) 9 Lescure-Debiard 5 ; 13 Bourges (Abbé) 20 Lespinas (Demoiselles) 13 Bousselie (Paulette) 7 Malavialle 10 Boutot (Adèle) 13 Marcland (Docteur) 14 Boutot (Crespin) 13 ; 20 Marsaleix 9 ; 10 Boutot (Monsieur) 13 Marthon (Mademoiselle) 23 Brunet 24 Marty (Léontine) 7 Chalvidan 21 Masselu (Monsieur) 8 Chambrette (Ernest) 14 Maumont (Chanoine) 21 Charron (Madame) 12 Maximin 6 ; 11 Chassagnard 17 ; 20 Menthon (architecte) 19 (Mademoiselle) Chassagne (Antonin) 6 Mille Bombes voir Sermadiras (Hyllaire) Chassagne (Madame) 6 ; 12 Monthezin (Anne) 12 Châtelet (Jules) 6 Moury (Louis) 6 Chatenet 4 ; 6 ; 7 ; 16 ; 17 ; 18 Nanet voir Boutot (Crespin) Collin (Maître) 5 ; 6 ; 21 Pagnon (Jean) 12 Commagnac 20 ; 21 Paradinas 25 Conjat 16 Paradinas (Pierre) 12 Costes (Monsieur) 8 Paret (Mademoiselle) 13 Coucaud (René) 20 Pécout (Philippe) 15 ; 16 Cousty (Anaïs) 12 Penaud 13 Couturou voir Doussaud (« le père ») Penaud (Auguste) 10 Cros de Gris voir Vaysseix (« le père ») Penaud (Jean) 10 Dandaleix 10 ; 15 Pequemajoux 23 Dandaleix (André) 17 Pignolet 11 Debiard (Monsieur) 12 Pradaux 6 Defrance (Marie) 13 Pradeaux 13 Demarty (Adèle) 8 Pradeaux (Léon) 12 Demarty (de Vigeois) 3 Prodel (grand père) 3 Demarty (Jean) 10 Prodel (Madame) 18 Demarty (Joseph) 8 ; 9 Prodel (Roger) 5 ; 7 ; 10 ; 13 Denéchou (Monseigneur) 19 Reiller 14 ; 15 ; 17 ; 23 ; 25 Dents de chocolat voir Marty (Léontine) Reix (Sylvain) 6 Desjacques (Madame) 5 ; 13 Renaudie (de Pompadour) 3 Dessus (Monsieur) 8 Roche- Chassagne 6 Devaud (Jean) 9 Ruggieri (Eve) 7 Donnadieu 23 Sardol 20 Douillard (architecte) 20 Sarrut (Mademoiselle) 17 ; 20 Doulet (Jean) 9 Ségurel (Jean) 23 Doussaud (« le père ») 7 ; 11 Seizelard 4 Doussaud (« le vieux 10 Sermadieras (Henri) 10 père ») Doussaud (Henri et 7 Sermadiras (Emile) 4 ; 16 Léontine) Doussaud (Léonce) 13 Sermadiras (Henri) 17 Dumény 23 Sermadiras (Hyllaire) 4 ; 5 ; 14 ; 17 Dupuis 10 Sermadiras (Thérèse) 4 Dutheil 20 Sermadiras- Denis 6 Dutheil (de Voutezac) 5 ; 10 ; 13 Soubrenie (Abbé) 13 ; 20 Dutheil (Vincent) 15 Soullier (Abbé) 19 ; 20 ; 23 ; 24 Faurillou voir Dutheil (Vincent) Spioussas 4 Fraysse 4 ; 10 ; 12 ; 13 ; 21 Tamain (Hortense) 13 Souvenirs de Troche au début du XXième siècle 27

Fraysse (Madame) 5 Teyssier (Mademoiselle) 20 Gerodolle 21 Thiallet (Abbé) 20 Gervais 9 ; 11 Timothée (Père) 19 ; 24 Géry (Jean) 17 ; 24 Tissier (Mademoiselle) 17 Godefroy 20 Vaysseix 13 Gorse (Basile) 7 ; 9 Verdier 9