a) Il a été tiré de cet ouvrage 30 exemplaires hors commerce H.C. numérotés de 1 à 30 destinés à l'auteur et à l'éditeur et 1 500 exemplaires de l'édition originale dont 500 numérotés de 1 à 500 le à travers les âges

Paul le Stintzi SUNDGAU à travers ]es âges @ 1975 by Société ALSATIA S. A. Tous droits de reproduction et de traduction réservés pour tous pays, y compris l'U.R.S.S. A la mémoire de mon ami le Docteur Camille Dreyfuss A Monsieur Jacques André A mes amis

Préface

E me souviens de. ces soirées d'hiver quand, les devoirs faits, les leçons apprises, je cherchais, dans la ferme familiale où les livres étaient rares, de quoi apaiser ma fringale de lecture. Heureusement qu'il y ^^^^^^apaise)avait le « Nouveau Calendrier d' » et, dans cet almanach, les histoires de Paul Stintzi ! Ces « récits historiques », palpitants à souhait, je les lisais, je les relisais jusqu'à les savoir par coeur : c'était là ma première initiation au passé de mon pays natal. Parfois aussi, mon grand frère me parlait de ces causeries que le professeur Stintzi venait faire, soit à , soit à Dannemarie, et qui attiraient toujours les jeunes gens des villages voisins. Depuis ces temps lointains, que de travaux, que d'articles publiés par P. Stintzi, qué de conférences prononcées jusque dans les coins les plus reculés du Sundgau ! L'ouvrage qui paraît aujourd'hui peut être considéré comme la synthèse de toute cette in- lassable activité. C'est le travail d'un historien, d'un chercheur à qui les archives semblent avoir livré tous leurs secrets. C'est en même temps le témoi- gnage d'un homme passionnément attaché au Sund- gau, à ses paysages, à ses hommes, à son passé. Les pages les plus émouvantes sont certainement celles où il évoque, avec une discrétion voulue, les souf- frances des paysans sundgauviens. Ils n'ont pas fait l'histoire, ces paysans, mais ils en ont subi, parfois durement, les contrecoups. Certes, on ne verra plus les Bâlois ou les Bourguignons venir incendier leurs villages, les affrontements entre nations européennes qui si souvent les ont ravagés, sont, pour tout être sensé, proprement impensables. Mais les tensions, si elles ne sont plus à l'échelle de notre petit pays, n'ont pas disparu du monde. Et s'il est une leçon qui se dégage de l'histoire du Sundgau comme de la « grande » histoire, c'est que jamais les guerres — querelles entre seigneuries, conflits entre nations, guerres mondiales - n'ont fait le bonheur des hom- mes, le bonheur des humbles. Pâques 1975.

G. ZINK Professeur à l'Université de Paris-Sorbonne Le Sundgau

'ORIGINE du nom « Sundgau » remonte à l'aube du Moyen Age quand "Yf5" ° : l'Alsace formait le « pagus alsaciensis » qui, occupé par les Alamans, soumis à la domination franque depuis la fin du Ve siècle était, avec l'Elsgau et le Sornegau, situés plus au sud, dans l'actuel Jura suisse, L--� un duché. Celui-ci devait protéger l'Austrasie contre les Burgondes. Le duché d'Alsace administré par des Eticonides fut partagé vers 750 en deux comtés, le Nordgau et le Sudgau, cités dans le Traité de Mersen (870). Le Nordgau s'étendait au nord de l'Eckenbach ou Landgraben, limite tracée entre les Vosges et le Rhin au sud de la ville actuelle de Sélestat. Elle corres- pondait à celle des départements actuels du Bas-Rhin et du Haut-Rhin. Au sud de cette limite était situé le Sudgau ou Sundgau (donc le Haut-Rhin actuel), appelé landgraviat du Sundgau ou de la Haute-Alsace, à partir du XIIe siècle. Le Sundgau géologique et géographique est plus limité; c'est le pays des collines entre les Vosges méridionales au nord, et la chaîne septentrionale du Jura au sud, la Porte de Bourgogne à l'ouest et le Rhin à l'est. De nos jours, la population désigne sous le nom de Sundgau uniquement le pays vallonné entre le cours inférieur de la Doller au nord et la vallée de la Lucelle au sud, les collines limitant la vallée de la Largue à l'ouest et celles s'inclinant vers la plaine étroite du Rhin à l'est. Pour la population, le Sundgau est limité au pays des collines. Tel que nous le comprendrons dans cette étude, le Sundgau est le Sundgau historique. Limité au nord par la entre Thann et , au sud par le Jura alsacien, il s'étend à l'ouest sur une grande partie de la Porte de Bourgogne, l'actuel Territoire de Belfort, et à l'est jusqu'au Rhin. Il corres- pond donc au Sundgau qui fut sous la domination des comtes de et des Habsbourg pendant plusieurs siècles. Mais on ne parlera pas dans cette étude de l'histoire de , dont le passé fut différent de celui du Sundgau. Cette région est composée de trois régions naturelles : le Jura alsacien, les collines sundgauviennes et la plaine. Le Jura alsacien est formé de deux chaînes parallèles, l'une, du Glaserberg au Blauen, culmine au sommet du Neuneich (811 m) et au Raemel (836 m), séparée par le col du Blochmont; l'autre, plus au nord et moins élevée, le chaînon entre Levoncourt et , le Kastelberg, le Rossberg et le Bürger- wald. Le Jura alsacien, pittoresque par ses rochers érodés et ses cavernes, riche en alpages et en belles forêts, donne naissance à l'Ill et à la Largue; au sud du Glaserberg, la Lucelle forme la frontière franco-suisse ; le Leimental est traversé par le Birsig. La Lucelle se dirige vers la Birse (Laufen), tandis que le Birsig se jette dans le Rhin à Bâle. Le pays des collines qui s'étend entre le Jura et la plaine, entre la voie ferrée Bâle-Mulhouse et la Largue et qui se prolonge dans des collines et des plateaux jusqu'à la Doller est la région sundgauvienne par excellence. De nombreux ruisseaux, parmi lesquels, outre l'Ill et la Largue, il convient de citer le Thal- bach, le Traubach et le Soultzbach, traversent cette contrée haute de 300 à 534 m (Bettlach). C'est la région des villages, de l'agriculture, de l'élevage, des forêts, des étangs. La plaine, dont nous parlerons dans les pages qui vont suivre, forme la partie méridionale de la grande plaine du Rhin. Elle est assez étroite près de St-Louis, s'élargit plus au nord jusqu'au pied des Vosges, et est occupée par- tiellement par la Hardt et la forêt de -, les deux centres industriels Saint-Louis et Mulhouse ainsi que la région minière. Le Sundgau préhistorique

ES collines secondaires du Sundgau, recouvertes partiellement de lehm et de dilluvium alpin, ont été à l'abri des nombreuses inondations du Rhin. Fertiles et riches en sources, elles ont attiré très tôt les hommes. Dès l'âge de la pierre taillée (le Paléolithique) et dès l'âge de la JLà pierre polie (le Néolithique), le Sundgau fut peuplé. Il doit réserver aux archéologues encore bien des surprises. En effet, en se basant sur des fouilles récentes, certaines cavernes de la région étaient habitées par l'homme il y a plus de 10 000 ans. La station d' est jusqu'à présent sans doute la seule grotte en Alsace qui ait fourni la preuve d'une habitation humaine préhistorique. Elle a été explorée par le Dr Thiessing, de Porrentruy, en 1876, et réexplorée avant 1939 par André Glory qui classa toutes les pièces découvertes et actuellement conservées dans des musées de notre province. Il s'agit d'outils en silex, d'ins- truments en os et en pierre, d'un vase en céramique et de restes de la faune (lièvre blanc, renne, cheval sauvage, loup, renard, chèvre). Cette peuplade sédentaire connaissait donc les animaux domestiques, dont l'élevage avait été favorisé par la proximité de la Largue et d'un vallon verdoyant. Des objets appartenant au Paléolithique ont été trouvés autour de la grotte d'Oberlarg qui renfermait aussi des restes du Néolithique. Des objets du Paléolithique furent trouvés à , et à ; des restes de la faune de la même époque furent reconnus avant 1914 par le Dr Herings dans les grottes des environs de Ferrette. Celles de Cravanches (Belfort) sont égale- ment à citer pour les découvertes préhistoriques qu'on y fit. Beaucoup plus nombreuses sont les découvertes qui datent du Néolithique. A cette époque se rattachent les palafittes repérés près de Hirtzbach, au Land- fürstenweiher, et près d'Oltingue, non loin de l'ancienne église Saint-Martin, où Gutmann a pu prouver l'existence d'un village lacustre dans un pré maréca- geux et sur la hauteur celle d'un camp fortifié. Glory a énuméré à titre indi- catif les camps et enceintes préhistoriques sans se prononcer sur l'enceinte présumée du Haulen près d', et sur le Klingelberg, près de . D'après Gutmann, un refugium préhistorique se trouvait au Glaserberg, dont deux côtés sont fortifiés par des remparts, des fossés, des terrasses, tandis qu'un troisième côté est protégé par une barre rocheuse. On y trouve des fonds de cabane et des tertres. Gutmann voit dans ce refuge ainsi que dans ceux du Kastelberg et d'Oltingue un grand système de défense, tandis que le « camp retranché » de Willer ne remonterait pas à l'époque préhistorique. L'un des endroits les plus intéressants est sans doute le Britzgyberg (389 m), qui domine et la vallée inférieure de l'Ill ainsi que le chemin néolithi- que d'Altkirch vers . R. Schweitzer y découvrit, il y a peu d'années, des poteries grecques importées en Gaule par Marseille. A l'époque hallstat- tienne, le Britzgyberg était une place marchande; des artisans protégés par un rempart de palissades et de pierres sèches y faisaient négoce de leurs produits. Ils s'étaient installés sur le plateau escarpé du Britzgyberg (le nom provient de saint Brice, successeur de saint Martin comme évêque de Tours) s'étendant sur près de 3 ha. Un refuge fortifié par des fossés et des remparts, mais d'origine postérieure, était placé sur la colline. Le camp retranché d'Oltingue, très étendu et fouillé minutieusement par Gutmann, est situé sur un monticule appe- lé « Hinter dem Berg ». Toute la longueur de cet éperon était fortifié par des terrasses et des remparts. On y trouva des restes de huttes et l'on peut pré- sumer l'existence d'un village néolithique au sud de la colline. La montagne avait sans doute servi de refuge en temps de guerre. Des chemins préhistoriques traversaient la région : celui de Mandeure vers le Rhin, croisé par celui de Porrentruy vers et celui du lac de Bienne vers Oberlarg. Des camps retranchés qui datent de la fin de la période néolithique, dominaient les pistes de passage et les régions environnantes; ils servaient, en période d'insécurité, de refuge aux habitants. Une petite station d'agriculture se trouvait à l'époque néolithique sur la colline de l'Illberg (près de Mulhouse) qui, par son sol et son exposition solaire, se prêtait à la culture. Cette colline, qui a abrité des fonds de cabanes néolithiques, a toujours été habitée. Des fouilles de l'époque du bronze, des époques romaine et carolingienne (tombes), en apportent la preuve. Flaxlanden fut un centre néolithique, comme le prouvent les fouilles et les cavernes utilisées par les tribus préhistoriques. D'autres stations peuvent être citées où des haches et des silex se trouvaient en abondance (Willer, , , Franken, Jettingen, Hirtzbach, Ruederbach, Knoeringue, Helfrantz- Croix dite pattée (baroque) : St-Georges près de Rantzwiller. kirch, , Altkirch, , , Bisel, , Hagen- thal et Wahlbach). Des sépultures ont été découvertes près de - il s'agit de sque- lettes néolithiques accroupis - de et Rixheim (nécropole danu- bienne). Des pistes et sentiers néolithiques traversaient le pays; leur souvenir survit dans des chemins nommés Herren-, Heiden-, Alten-, Toten-, Stein-, Viehweg, Hoch- et Altestrasse. C'est le long de ces chemins ou à proximité que furent faites les fouilles néolithiques. Glory cite entre autres la voie de la Largue (Moos - ), celle de l'Ill (Durlinsdorf - - Illfurth - Brunstatt), ainsi que les pistes transversales de Porrentruy vers le Rhin, de Bourogne par Altkirch vers , vers la région d'Istein et de Kirchen (en pays badois). Les trouvailles de l'époque néolithique dans le Sundgau sont nombreuses et variées. Elles prouvent que la population sédentaire se consacrait à l'agricul- ture et que toute la région des collines était très peuplée. L'apparition du cuivre caractérise la fin de la période néolithique. Les objets de cuivre pur sont peu nombreux dans le Sundgau; on en cite à Oberlarg, à et au Britzgyberg. Cette période fut une courte phase de transition entre l'âge de la pierre polie et l'âge du bronze (2500 à 900 av. J.-C.). Le Sundgau, essentiellement riche en instruments néolithiques, est dépourvu d'ob- jets en bronze : quelques haches à et à Kappelen, Kembs et Willer, peu de bracelets (Largitzen), des dépôts de haches à Habsheim et à , des sépultures à inhumation à Riedisheim et des sépultures à inciné- ration à Rixheim (contenant des bracelets). Les tertres n'apparaissent qu'au début du premier âge du fer, l'époque de Hallstatt1 (VIIIe au Ve siècles avant J.-C.), où l'emploi du bronze allait de pair avec celui du fer. Des trouvailles de l'époque « La Tène » 2 - époque où prédomine le fer - ont été faites près de et de Flaxlanden; des fouilles de l'époque du Hallstat sont signalées à Jettingen, , Rixheim, Habsheim, , . A l'époque Hallstatt (750-500 av. J.-C.) appartenait, outre le Britzgyberg, aussi le camp retranché du Kastelberg, près de Koestlach (650 m), découvert par Gutmann en 1904. On y repéra des remparts, un observatoire, des tertres avec des squelettes et des restes d'objets de l'époque de Hallstatt, pendant laquelle par exemple Sausheim fut une véritable nécropole. On y a découvert des bracelets et des fibules en bronze. Des sépultures isolées de l'âge du fer sont citées par exemple à Flaxlanden, et à Riedisheim. Des tertres (tumuli) sont signalés dans la région de la Hardt et près de Blotzheim. Une occupation préhistorique et romaine a été prouvée près de Habsheim, grâce à des fouilles faites par J. J. Wolff. La civilisation du fer fut introduite en Alsace par de nouvelles peuplades : les Celtes qui ont envahi une grande partie de l'Europe, vers l'an 600 avant J.-C. Venus de la région danubienne, les Celtes, dont la civilisation devait prédomi- ner pendant des siècles en Europe, ont travaillé le fer, le bronze, l'argent et l'or; l'art celtique a été influencé par celui des Grecs et des Etrusques. Ils ont envahi l'Italie - mais furent finalement repoussés par les Romains - puis la péninsule balkanique, l'Espagne et l'Angleterre. On ne les trouve pas unique- ment en , mais aussi en Allemagne du sud et de l'ouest. Ils se sont con- sacrés à l'agriculture, à l'élevage et au commerce; ils établirent de nombreux chemins, dits chemins celtiques, qui furent utilisés plus tard par les Romains. Cambete et Larga étaient d'origine celtique. Dans les légendes sundgauviennes revit souvent le souvenir de la religion celtique : des prêtresses revêtues d'habits blancs sont devenues les fées de la tradition populaire. Les Celtes, divisés entre eux en Gaule, furent soumis par les légions romaines disciplinées et organisées qui y trouvèrent une civilisation développée. Au IIIe siècle avant J.-C. le royaume des « Arvernes » s'étendait de l'Océan jusqu'au Rhin et au sud de l'Alsace. Les Séquanes établis du Rhône à l'Aar, du Jura aux Vosges, donc en Haute-Alsace, étaient sous leur domination. La partie méridionale du Sundgau et le Jura alsacien étaient habités par les Rauraques, 1 Ainsi appelé d'après Hallstatt en Autriche. 2 Le nom rappelle le village La Tène au Lac de Neuchâtel. Charles le Téméraire, duc de Bourgogne

qui prédominaient également dans le Jura et la Suisse septentrionale. Vesontio (Besançon) était la capitale des Séquanes, Augusta Rauracorum (Augst) celle des Rauraques. Or, les Séquanes s'émancipèrent de la domination arverne, pour tomber sous celle des Eduens. Pour s'en débarrasser, ils firent appel à Arioviste, roi des Suèves, qui entra en Séquanie en 61 avant J.-C. et battit les Eduens à plu- sieurs reprises. D'autres tribus germaniques, suivant l'exemple d'Arioviste, pénétrèrent également en Alsace. Dans cette situation pénible, Séquanes et Eduens sollicitèrent l'intervention de Jules César (58 av. J.-C.). César, gouverneur de la Narbonnaise - qui avait battu les Helvètes à Bibracte (Autun) - profita de cette occasion. pour conquérir la Gaule. Dans «De bello gallico », il retrace l'histoire de cette campagne. Remontant le couloir rhoda- nien et la vallée du Doubs, il passa par Vesontio (Besançon), capitale des Séquanes, puis entra en Haute-Alsace et vainquit Arioviste. Les Germains s'enfuirent et retraversèrent le Rhin après avoir subi de graves pertes. Où eut lieu cette bataille décisive entre César et Arioviste (58 av. J.-C.) qui décida pour plusieurs siècles du sort de l'Alsace, donc également du Sundgau ? Les uns ont cru trouver la « grande plaine » (« planities erat magna ») et le « tumulus » (colline), près de Spechbach-le-Haut, ou près de Guémar, d'autres dans le Territoire de Belfort (Rougemont), dans la région d'Epfig ou à l'ouest de Wittelsheim. Cette dernière hypothèse de J. J. Hatt, est sans doute juste, comme le prouvent d'ailleurs des fouilles récentes. Une nouvelle époque s'ouvrit avec la victoire de César, l'aigle romain domi- nant dorénavant le Sundgau et l'Alsace, point de départ des campagnes dans les pays germaniques. La Gaule soumise par César (52 av. J.-C.), devint l'une des provinces les plus développées du grand Empire romain.

Le Sundgau sous la domination romaine

'AALSACE fut, dès les temps préhistoriques, le trait d'union d'un côté, entre la région des Alpes et du Rhône et la région du Rhin de l'autre. Les Romains utilisaient souvent les chemins celtiques et en firent des routes romaines. Elles étaient situées sur des terrains plus élevés, à L---� l'abri des inondations; assez larges et pavées elles permettaient d'ob- server les alentours. Grâce à elles on pouvait jeter, en un court laps de temps, des légions sur les bords du Rhin; mais elles devinrent également des routes de commerce, le long desquelles s'échelonnaient des stations romaines. Une grande voie romaine remontait de Marseille la vallée du Rhône, passait par Lugdunum (Lyon) et Vesontio (Besançon) pour aboutir à Epomanduodu- rum (Mandeure), sur le Doubs - marché aux chevaux et centre commercial, le plus important de la Séquanie - au point de contact du Jura et de la Porte de Bourgogne. Deux routes partaient d'Epomanduodurum, dont le caractère mili- taire, civil et culturel est révélé par de nombreuses fouilles (Musée de Mont- béliard). L'une de ces routes traversait le Sundgau, pour déboucher sur la route du Rhin à Cambete (Kembs) ; l'autre se dirigeait, par l'Ochsenfeld, vers Mons Brisiacus (Brisach), situé à l'époque romaine sur la rive gauche du Rhin. Augusta Rauracorum (Augst, en amont de Bâle) fut, sur le Rhin et à l'est du Sundgau, un centre stratégique et une ville de commerce dont les théâtres (comme celui de Mandeure), les restes du forum, d'ateliers, de temples et d'un castel évoquent la grandeur romaine. Vers Augst convergeaient les routes des Alpes, en premier lieu la voie d'Aosta (Grand Saint-Bernard), qui traversait la Suisse actuelle et le Oberer Hauenstein avant de rejoindre, à Augst, la voie romaine qui reliait, à son tour, cette ville par le Boetzberg et les cols des Grisons à Milan. Epomanduodurum et Augusta Rauracorum furent donc les deux nœuds routiers qui intéressent le Sundgau romain. Près d'Augst s'élevait le Castrum Basiliense (Basilea, Bâle). D'après les fouilles récentes faites au Münsterberg à Bâle, près de la cathédrale actuelle, Bâle avait été un oppidum celtique, un endroit fortifié. Une route militaire et commerciale reliait à cette époque Basilea à Petinesca, point stratégique situé à l'extrémité orientale du lac de Bienne. Elle passait par le col de la Platte au Blauen suisse, la vallée de la Birse, les défilés et vallons du Jura, le col de Pierre Pertuis (inscription romaine), pour descendre vers le lac de Bienne et y rejoindre la voie déjà citée : Augusta Rauracorum - Aventicum (Avenches) - le Mons Jovis (Grand Saint-Bernard). Parlons en détail des voies romaines qui traversaient notre région. Celle qui reliait Epomanduodurum à Cambete pourrait être appelée route du Sundgau. En effet, venant de Mandeure, elle passait près de Delle et Courtelevant et près de la chapelle de Notre-Dame du Grunenwald ; on la retrouve près du village d', puis elle traversait la Largue près de , la forêt de Hirtzbach, le village de , l'Ill et se dirigeait vers la forêt de Betten- dorf. Sous le nom de « Rômerstrasse », « Hochstrasse », « Herrenweg », elle passait par , coupait toute la contrée orientale du Sundgau, sortait près de la chapelle de Hochkirch (Sierentz) dans la plaine et, après avoir traversé la forêt de la Hardt, elle rejoignit la grande voie du Rhin à Kembs. L'autre voie d'Epomanduodurum, dans la direction du Rhin, passait par la contrée d'Offemont (fouilles romaines), de Roppe et de Soppe, traversait la Doller - probablement près du Pont d'Aspach - puis prenait la direction de Schweighouse. Des fouilles entreprises en 1866, sur une colline dite « Altschloss », ont donné les preuves de l'existence, à cet endroit, d'une petite construction romaine, chargée en premier lieu de la défense du passage de la Doller. Puis, la voie, connue tantôt sous le nom de « vieux chemin d'Ensis- heim », tantôt sous celui de « vieux chemin de Brisach », se dirigeait, par l'Ochsenfeld, en ligne droite à Wittelsheim, vicus gallo-romain assez important (avec une forge). De Wittelsheim, la voie romaine passait près de (un tronçon y fut découvert en 1868) - carrefour très important à l'époque préhistorique et romaine, - et près de l'actuel Ensisheim (faubourg St-Martin). Sous le nom de « Hoher Weg », on la retrouve à , elle débouchait, sous le nom de « Altbreisacher Strasse », dans la grande voie du Rhin 1. La route du Rhin partait d'Augst et suivait à partir de la ville actuelle de Saint-Louis le premier rideau de la Hardt, plus élevé dit « Hardtlachrain », à 1 Une voie romaine reliait cette route longeant les Vosges par la vallée de St-Amarin et le col de Bussang à la vallée de la Moselle; un tronçon de cette voie existe entre et St-Amarin au « Hauenstein » en face de . 21 Chapelle Saint-Wolfgang (entre Stetten et Kappelen). 22 Les ektachromes des illustrations en couleurs sont de M. Humbert, Belfort ; le portrait de Charles le Téméraire a pu être reproduit grâce à l'autorisation du Museum Calvet à Avignon. Les photographies des planches hors-texte sont de Guillaume - M. Humbert, Belfort - L. Jenn - A. Schwobthaler, Zillisheim et du Journal « L'Alsace ». Les dessins in-texte sont de M. Barth - J. Burtschy - G. Forlen Ch. Gutknecht - L. Jenn - Niederhauser - H. Zuber. Les dessins lithographiques sont de J. Rothmüller. Les clichés de l'abbaye de Lucelle et d'Oelenberg ont été mis gracieusement à notre disposition par l'abbaye d'Oelenberg. La conception et la coordination technique ont été assurées par Ch. Moll. La composition, la photogravure, l'impression typographique et offset ainsi que la reliure ont été exécutées par Alsatia, imprimeur-relieur à Colmar. L'ouvrage a été achevée d'imprimer en juin 1975.

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