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Published Version Article Des directions (encore) nouvelles pour la géographie moderne RACINE, Jean-Bernard, RAFFESTIN, Claude Reference RACINE, Jean-Bernard, RAFFESTIN, Claude. Des directions (encore) nouvelles pour la géographie moderne. Annales de géographie, 1978, vol. 87, no. 480, p. 182-194 Available at: http://archive-ouverte.unige.ch/unige:4305 Disclaimer: layout of this document may differ from the published version. 1 / 1 Notes Des directions (encore) nouvelles pour la géographie moderne Jean-Bernard Racine et Claude Raffestin Pourquoi ce titre pour une série de comptes rendus ? Tout simplement pour montrer qu'au moment où on la croyait révolue, ses idées étant tom- bées dans le domaine commun (en pays anglo-saxons du moins), la révo- lution quantitative et théorique se découvre de nouveaux projets, en même temps que de nouvelles racines, dans une sorte de stratégie tous azimuts. Une fois éclaté le carcan de la géographie classique, le champ est libre. La couverture d'un récent ouvrage édité par Richard Chorley1 est, à cet égard, fort explicite : issues d'un tronc relativement étroit, une série de flèches, de largeur croissante, fusent dans toutes les directions pour cou- vrir un « champ », de plus en plus vaste. Dans les pays où le nouveau mode de penser et de travailler ne s'est pas encore totalement imposé, cer- tains géographes intéressés tentent de suivre le mouvement ou du moins d'en rendre compte à leurs pairs et à leurs étudiants. Telle est l'ambition par exemple de l'ouvrage de nos collègues italiens Vagaggini et Dematteis qui tente une gageure : définir et résumer, en six chapitres, la situation actuelle des méthodes modernes mobilisées par la géographie. La tâche n'était pas facile, même s'il ne s'agit que d'un bilan. L'ouvrage de Chor- ley nous offre l'occasion d'une confrontation directe avec la pensée origi- nale de quelques-uns des principaux initiateurs de la « révolution quantita- tive ». Mais il est quant à lui directement prospectif, présentant la « nou- velle géographie de l'avenir ». Déjà deux « nouvelles géographies » ? Poser la question nous oblige, avant d'entreprendre à notre tour l'étude 1. Chorley Richard (edited by), Directions in Geography, London, Methuen, 1973, University Paperbacks, 330 pages. 2. Vagaggini — Dematteis, 1 metodi analitici della geografia. La Nuova ltalia, Firenze, 1976, 148 pages, tabl., fig. NOTES 183 critique de ces deux ouvrages et plus particulièrement du premier, à quel- ques remarques d'ensemble sur le caractère plus ou moins « révolution- naire » de la new geography. Sept révolutions en une génération : la géographie, nouvelle Amérique latine ? Quelque vingt années ont passé depuis ces années cinquante, dans le cours desquelles quelques chercheurs d'abord isolés, puis vite regroupés, se sont mis sans le savoir à orienter leur réflexion dans des directions à peu près parallèles, en pays Scandinaves, en Amérique du Nord, en Angle- terre, en cherchant à appliquer les méthodes de la statistique et de la pro- grammation linéaire aux problèmes géographiques. Pour imposer l'innova- tion dans un milieu marqué par des habitudes déjà séculaires, le combat fut rude, quoique relativement rapide. En même temps que l'innovation, les innovateurs eux-mêmes prenaient le pouvoir, d'une telle manière qu'aujourd'hui c'est tout à la fois en termes de generation gap et en ter- mes de lutte des classes que certains interprètent le « conflit », alors que longtemps les motivations avancées ne croyaient exprimer qu'une « exi- gence intellectuelle authentique », pour la « scientificité », la pureté épisté- mologique, l'utilité pratique. Le célèbre ouvrage d'Abler, Adams et Gould 3 est à cet égard d'une touchante limpidité. Les révolutionnaires au pouvoir, la new geography solidement engagée dans le cours de sa seconde décennie de pratique, le temps n'était-il pas venu d'écrire qu'il n'y avait plus de francs-tireurs de ce côté-là de la bar- ricade ? Or voilà que déjà le « front » se déplace et que la critique des ouvrages récemment offerts sur le marché ne peut plus avoir le même sens, ne peut plus s'inscrire dans la même perspective. La lutte pour la scientificité de notre discipline a pris un nouveau visage et se poursuit de part et d'autre d'une autre coupure, d'ordre idéologique cette fois, comme en témoignent aux Etats-Unis les « nouveaux » travaux d'hommes comme David Harvey ou William Bunge, et plus systématiquement aujourd'hui, la revue Antipode dont notre Hérodote sera peut-être, au moins partielle- ment, le pendant francophone. Mais est-ce vraiment tout ? Avons-nous identifié la véritable coupure, le lieu d'où divergent aujourd'hui les pro- blématiques ? Suffit-il de dire que l'on est passé du dilemme « quantitatif- qualitatif » au dilemme « néopositivisme-matérialisme dialectique », s'exprimant lui-même dans celui qui oppose la « raison instrumentale » à la « raison critique », la « pensée libérale » à la pensée marxiste ou « marxienne », pour traduire les oppositions qui se font jour ? Nous avons failli y croire. En fait les contradictions sont plus complexes encore, parce que plus riches. Tellement riches que dans son interprétation « sociologique » du 4 débat sur la quantification dans la géographie britannique, Peter Taylor 3. R. Abler. J. Adams, P. Gould, Spatial Organisation, The Geographer's View of the World, Prentice Hall, Englewood Cliffs, 1971, 585 pages. 4. Taylor Peter J., « An interpretation of the quantification debate in British geo- graphy », Transactions, Institute of British Geographers Vol. 1, N° 2, 1976, pp. 129-142. 184 ANNALES DE GÉOGRAPHIE n'a pas compté moins de sept révolutions dans le cours de cette dernière génération. Révolution quantitative, disait lan Burton en 1963 ; révolution méthodologique, précisait Peter Gould en 1969 ; révolution conceptuelle, ajoutait T. Davies en 1972 ; révolution statistique et révolution des « modèles » insistait, en 1974, A.G. Wilson, le plus ardu de tous les « nou- veaux géographes ». Or depuis, on a encore connu la révolution behavio- rale, telle qu'illustrée par les travaux d'un E. Hurst par exemple ; et bien entendu la révolution « radicale », dont nous pouvons suivre les fulgu- rants progrès dans la revue Antipode. La question se pose : où nous con- duit donc cette fameuse « rupture épistémologique » que l'on avait cru discerner dans le mouvement ayant donné naissance à la new geography ? Sept révolutions en moins d'une génération ! S'il est un nouveau continent- géographie, ses caractéristiques, ses fantasmes aussi, n'appartien-nent pas à la seule civilisation de l'Amérique du Nord ou du « monde » anglo-saxon. Comme le remarque gentiment P. Taylor dans son surpre-nant essai (op. cit.) il est aussi devenu « l'Amérique latine de la commu-nauté scientifique ». D'autant qu'une série de travaux nous annoncent déjà, parallèlement à la radicalisation de notre discipline, son « axiomati-sation ». Ce qui n'empêche pas Peter Gould5, face aux fulgurants progrès de la mathématique en géographie, — qu'il ne faut pas confondre avec les analyses statistiques, même multivariées, qui sont aujourd'hui tombées dans le domaine commun et que l'on tend à considérer comme triviales — de se demander si elles représentent bien, plutôt que « l'apparition d'un nouvel outil », une véritable « révolution théorique ». Quand on sait que, d'après cet auteur, les géographes qui assument cet essor en ayant une formation mathématique tant soit peu solide sont moins d'une douzaine, on comprendra que ce n'est pas le vieux débat qui revient. Il se situe sur un tout autre plan. La méthode analytique de la géographie Dans leur petit ouvrage, / metodi analitici della geografia, Vagaggini et Dematteis tentent d'être à la hauteur de l'ambition de leur titre. En 148 pages, c'était difficile. Le premier chapitre est consacré à un pano- rama historique de la géographie, qui s'achève avec la crise de la géogra- phie traditionnelle. Selon les auteurs, celle-ci proviendrait de son incapa- cité à fournir des moyens capables de transformer et planifier l'organisa- tion humaine du territoire. C'est déjà là une affirmation un peu rapide. C'est surtout trouver à la crise de la géographie des causes externes alors qu'en fait les causes internes sont à l'évidence très nombreuses. Dans le deuxième chapitre, les auteurs abordent les modelli nomativi sous lesquels ils rangent les modèles de Van Thünen et de Christaller, ainsi que ceux de la théorie des jeux qu'ils expliquent à partir d'exemples agricoles. Les troisième et quatrième chapitres nous permettent de décou- vrir l'approche empirico-analytique, à travers la théorie des graphes, celle 5. Cf. p. 3. Gould Peter « Les mathématiques en géographie : révolution théorique ou apparition d'un nouvel outil ? », Revue internationale des sciences sociales, Vol. XXVII, no 2, 1975, pp. 318-347. NOTES 185 des systèmes et l'analyse fonctionnelle en composantes principales. Le cin- quième chapitre, enfin, est réservé à l'analyse de la perception et de la décision, les auteurs passant en revue la méthode désormais classique de Lynch et le modèle de Downs. Dans l'ensemble donc, il s'agit d'une cou- verture assez complète des thèmes favoris de la nouvelle géographie, d'une bonne introduction divulgative pouvant fournir au débutant des points de repère dont l'utilité est indéniable. On aurait tort de reprocher aux auteurs d'avoir seulement effleuré les sujets qu'ils traitent : leur intention nous semble à l'évidence se situer au niveau du dévoilement. Plus original est alors le sixième chapitre qui se présente comme un essai synthétique sur la théorie de l'espace géographique dans lequel est expliqué le passage de l'espace absolu à l'espace relatif, passage ayant per- mis, selon les auteurs, la révolution quantitative des années 50-60. Ils reprennent ainsi, en la poursuivant dans ses conséquences épistémologi- ques, une distinction fondamentale de R.
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