vent pas vivre sans les annonces des fabri- cants. Alors ? Alors, les Russel, Augert, Penz, Orcel, etc., ont peut-être plus ardemment défendu leurs intérêts dans les coulisses que sur les pistes. La Fédération française de Ski, liée à l'industrie de la neige, a encouragé une politique de l'autruche en enfermant son élite dans un « ghetto doré ». JEAN-NOEL AUGERT ISABELLE MIR ACCIDENTÉE L'équipe de ski, a écrit Florence-Cathiard- La relève est-elle assurée ? Bernard, ancienne titurafre, est « un grou- pement social antinaturel »: Le secrétariat SPORTS D'HIVER mauvaise campagne d'Italie. Alors, comme çl'Etat, en accordant au ski la deuxième à Vienne, c'est après Sapporo la valse des subvention de avec un million et entraîneurs : Jean Béranger et Jacques demi de francs '(six cènt mille licenciés Fourno sont remerciés. Jean Vuarnet, l'an- mais seulement quelques centaines de Rien cien champion olympique de descente, et compétiteurs), pense surtout au marché des Georges Joubert, dirigeant sportif universi- sports d'hiver. La France exporte pour 100 taire, technicien réputé, sont appelés. En millions de francs de paires de skis. Le ne sert de juin dernier, les «deux hommes élaborent un pool des fournisseurs de l'équipe de France « vaste plan de réforme du ski de compé- verse à celle-ci une somme que « le Mon- farter... tition -» et préviennent : « Pas de relève, de », en janvier 1972, a estimée à trois mil- pas de résultats sérieux avant deux ans. » lions de francs lourds sans être démenti. Après les descentes Mais, au bord des pistes, on est tombé Schranz avait encore raison : aucune glorieuses des Français, pourquoi de haut : l'organisation nationale du ski, campagne de presse n'a accompagné la des- donnée comme un modèle du genre dans cente des skieurs français. En Autriche, les cette dégringolade ? les milieux sportifs français, avait donc be- journaux se déchaînent à l'occasion de cha- soin d'être complètement revue-? « L'après- que course. Qu'un titulaire de l'équipe ga- Trois victoires en deux mois de killysme », que les observateurs considé- gne une épreuve et l'accord sur le cessez- compétitions presque quotidiennes ; raient comme définitivement assuré » il y le-feu au Viêt-nam n'a pas droit à la la Coupe du Monde, messieurs et a trois ans, s'effrite soudain comme de la « une ». Qu'il rate une porte de slalom dames, virtuellethent perdue cette année vulgaire poudreuse ? Que s'est-il passé ? et tout le pays apprend avec qui il a couché encore ; la Coupe des Nations aussi, pour Certes, Annie Famose, Françoise Macchi, la veille. La neige autrichienne rapporte : la première fois depuis longtemps : le ski Florence Steurer ont abandonné la compé- 1 600 000 paires de skis par an. national traverSe son désert blanc. tition après Sapporo. Alain Penz, converti Le Français, sportif de plage l'été, spor- par Killy, ce champion devenu star, a re- La caisse d'épargne tif en chambre l'hiver, avait pris l'habitude, joint le ski professionnel — ce « Holiday grâce aux skieurs alpins, d'entendre chan- on snow ». Des blessures — les soeurs Laf- En France, le champion est le dernier ter le coq en hiver. Il s'installait en toute forgue, Michèle Jacot, Russel, Augert, puis accusé : avant, il y a le fartage, la piste sérénité devant la télévision et les Killy, Isabelle Mir notamment -- ont décimé mo- mal damée, les conditions atmosphériques, Périllat, Marielle Goitschel, puis les Duvil- mentanément le club France. Mais n'a-t-on l'état de santé — le sportif français a tou- lard, Russel, Augert, Michèle Jacot, Isabelle pas assez ressassé que des éléments' plus jours mal quelque part — et, argument su- Mir, Françoise Macchi le consolaient de jeunes, aussi brillants, sont prêts à faire à prême, le sport à l'école. L'opinion publi- tous ses autres déboires sportifs. Depuis les tout instant leur entrée dans le ski interna- que est saturée de défaites sportives et la jeux Olympiques de Sapporo, en février tional ? Or, après Sapporo, on a gratté les presse du ski réclame des champions. Des 1972, Chantecler s'est enroué. Il y a bien fonds de clubs, en vain, excepté peut-être contrats importants lient les revues spécia- lisées aux fournisseurs et la société des eaux encore quelques cocoricos çà et là : Duvil- pour Patricia Emonet, seize -ans, Jacqueline lard a récemment remporté un vague com- Rouvier et Claude Perrot, dix-neuf ans. minérales, qui dispose d'un budget de deux biné et un commentateur de radio s'est per- Pourquoi cette absence de relève ? Pour- millions de francs pour patronner la Coupe du Monde, sait se montrer généreuse. Alors suadé qu' • « il n'y a pas si longtemps, c'était quoi la pyramide, censée s'appuyer sur six l'épreuve la plus importante, avant la des- cent mille licenciés, s'est-elle brusquement à quoi bon crier haro'? cente et le slalom ». Mais le cœur n'y est écroulée ? Jean Vuarnet et Georges Joubert sont plus. plus critiques. Leur plan de réforme fait table rase des anciennes structures. Elargis- « Que le ski français traverse une période - « Des reflets d'argent » de désillusions, d'insuccès, et vous aurez _ sentent de la base par la création de cour- tout le monde sur le dos, sauf la presse. » « L'échec de Sapporo a sa cause princi- ses de promotion, par une aide accrue aux L'ancien champion autrichien , pale dans la subordination du ski français clubs ; renforcement de l'encadrement et qui n'a jamais été un amateur, savait de aux intérêts économiques. La blancheur de modification des iystèmes de classement de quoi il parlait en février 1970. Une série la neige a des reflets d'argent », s'écriait, manière à faire éclater tous les cloisonne- de défaites, avant, pendant et après les en mai dernier, le sénateur communiste ments du ski français ; assainissement des championnats du monde disputés à Val- Schmaus. Tout le problème est là, en effet. pratiques financières par la constitution Gardena (Italie), ouvrait une grave crise En décembre, Jean Vuarnet déclare à la d'une sorte de caisse d'épargne -: le skieur dans le ski autrichien. D'Innsbruck à télévision que les jeunes gens qu'il dirige -ne toucherait son - argent qu'en « fin de car- Vienne, décisions, démissions, plans, contre- « ne seront pas tous des Killy ». Ils veu- rière ». Idées salubres et novatrices. Mais , plans, actions, transactions se succédaient. lent pourtant tous imiter, au moins finan- les fabricants guettent. Aujourd'hui, avec notamment Anne-Marie cièrement, le triple champion olympique. Pour les firmes, seuls les résultats comp- Proell et , avec un nouveau Ils ont l'exemple de Grenoble en 1968, où tent. Deux ans, c'est bien long. Les nou- patron aussi, le triple champion ,olympique, les primes, pour porter 'telle ou telle mar- veaux seront-ils prêts - pour les prochains , le ski autrichien paraît remis que de skis, allaient jusqu'à 30 000 F. Ils championnats du monde à Saint-Moritz en sur, ses planches. savent qu'un titre de champion du monde février 1974? De toute part, en Autriche, en Suisse, en Italie, en Allemagne de . Schranz avait raison : deux ans après- les- ne vaut pas moins de 200 000 F. Ils enten- compétitions de Val-Garden, le ski fran- dent Schranz, que l'on accusait, avant Sap- l'Ouest, de nouveaux noms apparaissent et le retard français, surtout en descente où, çais entre à son tour._dans « une période poro, de 'gagner60 000 dollars par ah, après Killy, Périllat et DuvilIard, est née de désillusions et d'insuccès ». Trois-petites répondre : « C'est faux. Je gagne beaucoup médailles, argent et bronze, ont été rame- plus... » Ils regardent leurs dirigeants, âpres une « génération de la peur », est important. Pourtant, il faut la relève : le chiffre global nées du'Japon, alors qu'en 1968, à Greno- au gain; eux aussi, et les fabricants qui les ble, l'équipe nationale s'était couverte d'or et utilisent comme supports publicitaires. Ils des industries de la neige est évalué, en France, à sept milliards de francs par an. qu'en 1970, avec deux titres mondiaux et ont besoin des journalistes pour les faire

quelques accessits, elle n'avait pas fait une • connaître et les magazines de ski ne peu- MICHEL SATIGNAC Le Nouvel Observateur 59