La rubrique DES PATRIMOINES de

Conservation Départementale du Patrimoine NUMÉRO DOUZE ■ DÉCEMBRE 2003 ÉDITORIAL ÉDITORIAL La rubrique

’année 2003 a été l’occasion pour l’Assemblée départementale d’impulser une nou- Lvelle dynamique patrimoniale au service d’une politique culturelle qu’elle a voulu plus ouverte et plus attentive à chaque territoire savoyard. Le patrimoine est aujourd’hui au cœur

Prieuré du col du Mont-Cenis, des enjeux du développement durable et de tout projet de société. Le patrimoine participe construit en 1968 par l’Atelier au rayonnement culturel de la Savoie. J’ai vivement souhaité que des actions de valorisa- d’Architecture en Montagne tion soient engagées pour une sensibilisation au patrimoine dans sa riche diversité – entre remplaçant l’ancien prieuré- hospice noyé sous les eaux du lac et montagne – et pour une diffusion des savoirs qui lui sont liés auprès de tous les publics. barrage. L’édifice se distingue La valorisation du château des ducs de Savoie est ainsi un objectif majeur du Département par la pureté de sa forme. qui a décidé de redonner son plein rayonnement à ce Monument historique remarquable La et d’élargir son ouverture au public en accord avec la Préfecture de la Savoie. Les premières rubrique Estivales du château ont concrétisé l’été dernier cette volonté. Le château est appelé à deve- des Patrimoines de Savoie nir, dans les prochaines années, un espace majeur de l’action patrimoniale, de l’offre tou- Numéro douze ristique et culturelle, au cœur des pays de Savoie. J’ai tenu à confier à M. Jean-Olivier Viout Conseil général la présidence du Conseil de valorisation patrimoniale du château des ducs de Savoie ins- de la Savoie Conservation tallé le 6 novembre dernier qui permettra l’élaboration d’un ambitieux projet concerté avec départementale l’État et les différents partenaires usagers du château. du Patrimoine Hôtel du département Le Département vient d’adhérer à la Fondation du patrimoine pour renforcer son action BP 1802 73018 Chambéry cédex patrimoniale et son soutien envers le patrimoine de proximité non protégé au titre des Téléphone (00-33-4) 04 79 60 49 36 Monuments historiques, qu’il soit public ou privé, par un système de défiscalisation de 50 Télécopie à 100% des travaux de restauration. (00-33-4) 04 79 60 49 01 E-mail Deux autres actions seront développées en synergie au cours de l’année 2004 et financées [email protected] à parité par le Département et la Région Rhône-Alpes dans le cadre d’une troisième Conven- Directeur de la Publication tion patrimoniale : Jean-Pierre COUREN Rédacteur en chef • Les Itinéraires remarquables de Savoie seront mis en chantier sur tout le territoire. Une Philippe RAFFAELLI signalétique d’interprétation facilitera la découverte et l’appropriation du patrimoine par le Secrétariat plus large public grâce à une charte graphique départementale. Un agrément sera propo- Caroline LANFANT sé aux propriétaires candidats aux « itinéraires » pour la mise en valeur et la promotion du Crédit photographique Philippe Raffaelli (couverture) patrimoine qu’il soit public ou privé. Jean-François Laurenceau Hervé Foichat • Le réseau des musées permettra de garantir au public qualité d’accueil, pertinence du dis- CDP (pages 3 et 4) cours muséographique et pédagogique, grâce à un conseil des musées. Le Département Jean-Claude Giroud Musée Savoisien (page 4) soutiendra particulièrement les actions de communication des musées par un partenariat CAUE de la Savoie (page 5) CAUE de la Hte-Savoie (page 6) conventionné. A l’heure actuelle, 22 musées savoyards répondent aux critères de qualité : Françoise Vitali intérêt scientifique, politique de communication, qualité de l’accueil. DRAC RHÔNE-ALPES, CAUE de la Savoie (page 7) Enfin, l’année 2004 verra le lancement de la première tranche de réhabilitation de la grange Maryse Avrillon et Franck Delorme (plan page 7) batelière de l’abbaye de Hautecombe. Ce sera la première pierre d’un projet de grand site CDAOA de la Haute-Savoie (pages 8 et 9) patrimonial et culturel dans le respect de la vocation spirituelle de l’abbaye ; le Départe- Jean-François Laurenceau ment apportera tout son soutien, au côté de l’Etat, à la Communauté du chemin neuf pro- CDP (page 10) Pascal Lemaître, priétaire. photothèque Facim (pages 11 et 12) Autant dire que la Direction Culture et Patrimoine s’est mobilisée avec enthousiasme et Yves Mercier, photothèque Facim (page 12) implication sous la direction de Philippe Veyrinas dans ces actions aux enjeux clairs pour J.-P. Mirabel et Martine Canal le Département de la Savoie : sauvegarde, valorisation et ouverture au public. La Conser- (page 13) Gilles Garofolin, service vation départementale du patrimoine est plus que jamais à votre disposition pour accom- Communication de la Ville de Chambéry et Inspection pagner les collectivités territoriales et les porteurs de projet, c’est un devoir, c’est aussi une académique de la Savoie passion. (page 14) Thierry Argant (page 15) Jean-François Laurenceau, CDP Le Président du Conseil général de la Savoie (pages 16 et 17) Gilbert Pion (page 17) Jérôme Daviet et Conservation départementale Cédrick Valet (pages 18, 19, 20 et 21) du Patrimoine de la Savoie Direction ont collaboré à ce numéro Françoise BALLET Jean-Luc BOURGES, Animateur du Jean-Claude Giroud Photothèque Musée Savoisien Jean-Pierre COUREN Patrimoine, Ville d’art et d’histoire d’, 04 79 37 86 86 Jérôme DAVIET, chargé de (page 22) conservateur en chef du patrimoine mission à la CDP (04 79 60 49 28) Hervé DUBOIS, Architecte, CAUE de la Savoie, 04 79 96 74 16 Chantal FERNEX DE MONGEX, Conservateur du Patrimoine, Musées de Chambéry, 04 Réalisation Françoise BALLET, conservateur du patrimoine 79 33 44 48 Véronique FRANDON, Animatrice du Patrimoine, Ville d’art et d’histoire de Editions COMP’ACT Philippe RAFFAELLI, conservateur du patrimoine Chambéry, 04 79 70 15 94 Geneviève GUENIN, Architecte, CAUE de la Haute-Savoie, 04 50 Dépôt légal Jean-François LAURENCEAU, 88 21 10 Jérôme MOTTINI, chargé de mission, GIP Le Grand Lac, 04 79 25 36 42 Vinciane 4ème trimestre 2003 assistant qualifié de conservation NEEL Pierre-Yves ODIN, Animateur du Patrimoine, Pays d’art et d’histoire de Tirage 1800 exemplaires Vinciane NEEL, Tarentaise, FACIM, 04 79 60 59 03 Sandrine PHILIFERT, chargée de mission à la CDP ISSN 1288-1635 assistante de conservation (04 79 60 49 28) Gilbert PION, préhistorien, UMR 65-65, CNRS Besançon, ADRAS, Françoise CANIZAR, rédacteur [email protected] Philippe RAFFAELLI Christian SORREL, Professeur d’Histoire Nicole DUPUIS, adjointe administrative contemporaine, Université de Savoie Angélique TAVERNIER, Architecte Cédrik VALET, Caroline LANFANT, secrétaire chargé de mission à la CDP (04 79 60 49 28) Hélène VIALLET, Conservateur départemen- Hervé FOICHAT, chargé de l’informatisation tal des Antiquités et Objets d’Art de la Haute-Savoie, 04 50 66 84 20 Jean-Olivier VIOUT, des collections départementales et des de l’Académie de Savoie, Président du Conseil de valorisation patrimoniale du château des nouvelles technologies ducs de Savoie, 04 79 60 49 36

2 Une destinée ambitieuse MONUMENTS pour le château des Ducs de Savoie Ouvrir largement au public les parties historiques du château des Ducs de Savoie tout en pérennisant sa fonction de siège de la Préfecture & ÉDIFICES et du Conseil général de la Savoie constitue désormais l’un des grands chantiers que vient d’ouvrir l’Assemblée départementale. L’ambition est à la mesure de la complexité du projet.

de sa culture et de la diversité patrimoniale qui est la sienne, dans une démarche dénuée de tout passéisme déploratoire. A ce « noyau dur » du grand chantier de la valorisa- tion patrimoniale du château des ducs de Savoie, s’ajouteront d’autres opérations à conduire – autre enjeu majeur – non point successivement mais concomitamment. Essai de reconstitution Devra être inscrit, en priorité, le règlement du du château au XVI e siècle, problème récurent posé par le stationnement maquette de François de Lannoy de Bissy, 1928. automobile dans la cour d’honneur dont l’état actuel, indigne de l’enceinte de ce Monument his- torique, ne saurait perdurer. L’extension des capa- cités de parking pour la desserte du château appa- raît comme l’incontournable solution à définir avec les partenaires concernés, au premier desquels la Ville de Chambéry. ue vient chercher le visiteur qui Restera le traitement des jardins avec la reconsti- Q gravit la rampe d’accès au château tution du grand parterre, orgueil du château au ducal de Chambéry sinon, le plus souvent, la ren- XVII° siècle, à l’issue d’une démarche de concer- contre avec le lieu majeur de la mémoire de la tation. Savoie, celui où ont été scellées maintes pages Devra enfin être engagée une réflexion sur la des- de son destin ? Lequel n’a pas alors déploré la tination des locaux enterrés dits de l’0rangerie banale affectation administrative des ses parties ainsi que sur la faisabilité d’un dégagement de les plus anciennes et émis le vœu de leur voir volumes dans les profondeurs du jardin, propres donner une autre fonction ? L’idée n’est pas nou- à offrir de nouvelles capacités d’accueil du public velle et avait été caressée, dès les années trente, ou de services. par le sénateur Antoine Borrel. Elle a fait son Donner vie à ces visions prospectives dont la chemin et retrouve les feux de l’actualité. concrétisation exigera pour certaines, plusieurs La conjonction d’une ouverture d’esprit, d’une années, devra s’accompagner, à court terme, de louable sensibilité culturelle et d’un sens élevé réalisations ponctuelles destinées à donner des de l’intérêt de la Savoie viennent, en effet, de La Tour mi-ronde signes tangibles de l’ouverture du grand chantier conduire M. le Préfet et M. le Président du Conseil et l’aile du Conseil de valorisation patrimoniale du château. général aujourd’hui. général à ouvrir conjointement ce dossier. Car le Département, avec l’accord et le soutien de l’État, se doit de prendre en compte l’amélioration indis- pensable des services administratifs tout en proposant une nouvelle affectation des parties historiques du château. Il convient donc de tracer le périmètre de cette « désaffectation » et de réaliser les compensations en surfaces qui s’imposent afin de reloger les services administratifs à proximité du château. Restera à définir la destination à donner aux espaces qui seront ouverts aux visiteurs. L’objectif peut d’ores et déjà être décliné : offrir un lieu d’appréhension du passé et du destin si peu ordinaire de la Savoie, des traits, des tradi- tions et sensibilités qui, de l’avant-pays à ses hautes vallées, en passant par sa capitale histo- rique, sont consubstantielles à sa spécificité. Faire de la visite au château le passage obligé à qui- conque veut découvrir la Savoie dans le tréfonds

3 MONUMENTS

Animer l’enceinte du château en dynamisant son attractivité touristique, culturelle et festive, y orga- & ÉDIFICES niser des manifestations d’ampleur – à l’exemple des Premières Estivales –, intensifier la valorisa- tion des ses atouts déjà existants (la Sainte Chapelle et son orgue, le Grand Carillon, etc.) doivent, dès 2004, mobiliser imaginations et volontés de faire. La diversité, l’ampleur et la technicité des actions imposaient la création d’une structure de conflu- ence des compétences et énergies propres à porter le projet, le crédibiliser, en favoriser l’ap- propriation par tous les savoyards. Au terme d’une démarche avalisée par M. le Façade baroque de la Sainte-Chapelle, Préfet, le Conseil général a installé à cette fin, le par le comte Amedeo di Castellamonte, architecte 6 novembre dernier, un Conseil de Valorisa- de Madame Royale, Christine de , tion Patrimoniale du Château des Ducs de duchesse de Savoie, milieu du XVII e siècle. Savoie au sein duquel sont appelés à réfléchir et proposer, autour de chacun des dossiers évoqués, voire d’autres, des représentants du Conseil géné- ral, des techniciens et responsables administra- tifs de l’Etat et du Département mais encore la ville de Chambéry dont le soutien est indispen- sable. A leurs côtés, occuperont toute leur place, l’Uni- versité de Savoie, l’Académie de Savoie et les associations directement concernées par le projet, sans omettre quelques personnalités faisant auto- rité. Puisse l’enthousiaste adhésion des partenaires déjà mobilisés permettre aux fruits de tenir la pro- Détail du Theatrum Sabaudiæ, gravure de Coenvaert Decker, dessin de Giovanni Tomaso Borgonio, 1674, messe des fleurs dans cette entreprise d’enver- éditions de 1682 à 1726. gure, en faisant rapidement succéder au temps des projets celui de leurs réalisations. Jean-Olivier Viout

La Tour des Archives et la Porterie, entrée des frères de Maistre.

4 Les murs sardes ARCHITECTURE en pierre sèche

oici quelques lignes rédigées par le mar- Lors de la reprise de ces murs, de nombreuses quis de Lannoy de Bissy en 1930 dans son questions se posent quant au choix des pierres Détail de calpinage, HistoireV des Routes de Savoie : (provenance, taille, couleur), à leur mise en route du col du Chat. …«La route du Mont du Chat, dont les travaux œuvre (calpinage, boutisse, calage, épaisseur des commencèrent en 1825, fut construite par les ingé- vides, etc…), au type de finition du couronne- nieurs Mélano et Neyraddi, dont les noms doi- ment, à la protection à prévoir pour ce couron- nement pour en limiter l’entretien, etc. Mur de soutènement en vent être retenus comme ceux des auteurs d’un pierre sèche, des plus beaux tracés que l’on trouve en Savoie. A cet effet, le Conseil général a décidé de s’ad- route du col du Chat. Ces ingénieurs profitèrent de l’occasion pour rele- joindre les compétences d’un expert reconnu au ver sur un plan tous les passages encore visibles plan national. de la voie romaine et ils firent déposer dans l’égli- Cette assistance à maîtrise d’ouvrage s’exerce dès se du Bourget et au musée de Chambéry des la phase d’écriture du CCTP et se poursuit sur la médailles et inscriptions diverses retrouvées à phase chantier : en effet, les entreprises semblent cette époque. »… hésiter à former leur personnel à ces techniques Dans le cadre du projet Grand Lac, la route dépar- de restauration des murs en pierres sèches, ne tementale 914 a été notée comme remarquable, sachant à l’avance si leur offre sera retenue. tout autant pour la qualité de son tracé, que pour La présence d’un expert pendant le chantier, per- ses belvédères et ses différents murs : un patri- mettra d’assurer la formation des maçons de l’en- moine routier de grande qualité aussi bien sur le treprise adjudicataire. plan technique que paysager. Le contenu de l’étude propose : Grâce à des expertises et décisions politiques • une typologie des constructions, volontaristes, il a été décidé de garder à cette voie • la reconnaissance des matériaux, ses caractéristiques patrimoniale, rurale et tou- • le constat de l’état existant des ouvrages, ristique, de sinuosité et de largeur, avec ses flancs • la réalisation d’un cahier de clauses techniques de montagnes abrupts et boisés, ses « fenêtres et d’un bordereau de prix, paysagères » : pas de sur-largeur pour les cars, pas • une assistance pour les phases de consultation de « recalibrage » souvent synonyme d’atteinte à des entreprises et chantier. La route la qualité du lieu, ni de bandes cyclables. Toutes ces informations permettront de définir départementale Les objectifs de requalification portent unique- un projet de guide d’intervention comprenant les 914 et 914 A ment sur la valorisation des deux belvédères (le clauses techniques d’entretien, de construction et belvédère de la maison cantonnière et le virage de restauration des murs et parapets. du col du Chat : dit de Rosse-cul) et la sauvegarde des différentes Jérôme Mottini le passage typologies présentes de murs amonts en pierres sèches et parapets avals en maçonnerie de pierre, reliant le lac ainsi que l’homogénéisation des ouvrages de sou- du Bourget et tènement et aménagements de sécurité. l’avant-pays Trois phases de restauration des parapets ont déjà été lancées successivement en 2001, 2002 et la savoyard entre troisième tranche sur 2003. la montagne La première tranche de travaux qui s’est dérou- du Chat et la lée en 2001-2002 a été conduite par la Direction des Routes Départementales. Le cahier des montagne de charges a été élaboré en collaboration avec le Ser- la Charvaz, vice Départemental de l’Architecture et du Patri- communes du moine. Les travaux ont consisté en la restauration des murs de soutènement routier aval : 400 mètres Bourget-du- de mur ont été restaurés et 60 mètres de mur sont Lac, , de la construction neuve. Se pose aujourd’hui la problématique des murs la Chapelle du en pierres sèches… Mont-du-Chat, Ceux-ci sont en effet variés de part leur fonction Saint-Jean-de- (talus amonts et avals surmontés de parapets), leur hauteur, leur masse, leur calpinage, leur cali- Chevelu. brage de pierre, leurs teintes, etc… qui deman- dent à être étudier dans le détail pour permettre de mieux comprendre certaines de leurs patho- logies et pouvoir ajuster au mieux les interven- tions et garder à ces constructions, en plus de leur Route du Col du Chat, rôle fonctionnel, toutes leurs valeurs patrimoniales belvédère de la Maison Cantonnière, et paysagères. Bourdeau.

5 ARCHITECTURE Églises du XXe siècle en Savoie & Haute-Savoie

es édifices religieux qu’ils soient romans, gothiques ou baroques, suscitent depuis Llongtemps la curiosité d’un public nombreux. La Les CAUE 1 de passion des vieilles pierres et la dimension par- Savoie et de ticulière de ces monuments qui montrent ou exal- tent le sens du sacré peuvent expliquer aisément Haute-Savoie cet engouement. viennent de Les églises du XX e siècle sont, elles, beaucoup publier un moins connues du grand public. En France, ce patrimoine religieux contemporain est surtout dépliant sur les perçu à travers les œuvres majeures de Le Cor- églises du XX e busier (Chapelle Notre-Dame du Haut à Ron- siècle qui illustre champ, Haute-Saône – Couvent Sainte-Marie de de manière la Tourette, Rhône). Dans les Alpes du Nord, l’église Notre-Dame de Toute Grâce du Plateau remarquable la d’Assy, conçue par Maurice Novarina et décorée richesse et la par des artistes de renom est l’œuvre de référen- diversité des ce la plus souvent citée. édifices religieux Le changement de siècle et de millénaire a été l’occasion pour les CAUE de Savoie et Haute- construits depuis Savoie de s’interroger sur la production architec- 100 ans. turale du XXe siècle et d’envisager une publica- tion commune et réactualisée d’une carte des églises du XX e siècle. (Un document sur ce thème, aujourd’hui épuisé avait déjà été élaboré Église Sainte-Bernadette à Annecy, construite en 1992 par le CAUE de Haute-Savoie, dans le en 1964-65 par les architectes Maurice Novarina cadre d’itinéraires d’architectures contempo- et Claude Fay. Bâtiment résolument moderne en béton brut flanqué d’un clocher cylindrique échancré raines). sur le ciel. Une nouvelle carte des « Églises du XXe siècle » en Savoie et Haute-Savoie a donc vu le jour lors des Journées Européennes du Patrimoine en sep- tembre 2003. Elle présente 48 édifices remar- Un siècle de transformation quables dont 24 illustrés et commentés. et de développement Les choix ont été faits en fonction des différents Le XXe siècle a été une période de forte transfor- e courants qui ont marqué l’architecture du XX mation des secteurs urbains et de la montagne siècle parmi les quelques 70 édifices religieux qui du fait de l’accroissement sans précédent de la ont été construits ou réaménagés dans cette pério- population et du développement des activités de en Savoie et en Haute-Savoie. industrielles et touristiques. De nouvelles parois- ses sont fondées et les comités paroissiaux, en lien avec les directives de l’Association Diocé- saine et les conseils de la Commission Diocésai- ne d’Art Sacré œuvrent à la création de nouveaux lieux de culte. Dès les années 1950, l’église se tourne davanta- ge vers l’assemblée, en puisant son inspiration dans les célébrations des premières communau- tés autrefois réunies dans des locaux domes- tiques. La chapelle Notre-Dame de l’Assomption, à 1850, illustre bien ce retour à l’idée primitive. Le concile Vatican II (1962-1965) charge l’archi- tecture et l’art sacré d’exprimer la nature com- munautaire de l’Église. Progressivement s’opère une redéfinition du mot église (du grec « eccle- sia » qui signifie « assemblée »). Poussée à l’extrê- me, cette nouvelle définition pose la question : la présence chrétienne a-t-elle encore besoin de Prieuré du col du Mont-Cenis, construit en 1968 par l’Atelier d’Architecture locaux spécifiques ? En 1970, le « centre cultuel » en Montagne remplaçant l’ancien prieuré-hospice noyé sous les eaux du barrage. de Chambéry-le-Haut se trouve au carrefour de L’édifice se distingue par la pureté de sa forme.

6 Les infuences multiples ARCHITECTURE et de grandes périodes La création d’une église est une démarche pluri- disciplinaire qui prend en compte des enjeux pas- toraux, liturgiques, culturels, sociologiques mais aussi juridiques et financiers. Elle soulève des débats à tous les niveaux, posant à l’église catho- lique la question de la forme de sa présence dans le monde.

Les pastiches ou la monumentalité Église Notre-Dame de la Paix à Étrembières, La tendance au pastiche ou à la monumentalité construite en 1967 par Église Saint-Louis de Novel à Annecy, domine l’architecture religieuse jusque dans les l’architecte Maurice construite en 1962 par l’architecte Novarina. Illustration du Michel Saint Maurice dans le cadre années 1920 et survit encore dans les années renouveau de la liturgie de la Zone d’Urbanisation Prioritaire 1950. Le néo-régionalisme inspire des formes à la suite du Concile du quartier de Novel. propres à chaque région comme la chapelle Vatican II, l’édifice est construit sur un plan Notre-Dame-de-Toute-Prudence au col de l’Ise- rectangulaire. Une baie ces recherches, notamment sur la présence de ran, 1939. vitrée éclaire le volume l’Église dans les grands ensembles. en un tour complet. Une grande diversité de programmes régit les L’architecture et la modernité constructions des églises de cette période. On La conception des nouvelles églises a été forte- note : ment influencée par les courants architecturaux • les églises paroissiales : Saint Louis de Novel à du XXe siècle. Les thèmes de l’architecture moder- Annecy 1961, Saint-Jean-Bosco dans le nouveau ne, sur la beauté de la forme et son harmonie quartier du Biollay à Chambéry 1957, avec la fonction, sur la lumière et les matériaux nouveaux, béton brut, verre, métal, auxquels s’ajoutent, montagne oblige, le bois et la pierre, ont été largement mis en œuvre. La nécessité de marquer le caractère sacré du lieu et l’élan spirituel a conduit à la création d’archi- tectures fortes servies par l’apport d’œuvres artis- tiques majeures comme au Plateau d’Assy où l’église Notre-dame de Toute Grâce nous offre une grande richesse d’interventions plastiques (vitraux, mobilier, fresques, tapisseries).

La fin du siècle et le retour à la visibilité L’église reprend conscience du message et du La Carte des églises témoignage que peut servir un bâtiment identi- du XX e siècle contient fiable dans le paysage : la visibilité n’est plus aussi des commentaires Plan de l’église Saint-Jean Bosco à Chambéry, généraux, présentant construite dans la nouvelle cité du Biollay en 1957 par perçue comme une séquelle du triomphalisme. les grandes étapes de l’architecte Pierre Jomain. le plan circulaire favorise Des clochers sont ajoutés à des églises qui en le rassemblement de l’assemblée des chrétiens au sens l’évolution de des célébrations des premières communautés. étaient dépourvues. l’architecture religieuse La réhabilitation du système paroissial qui est en au XXe siècle. Ils sont le cours depuis l’an 2000 conduit à un regroupement travail de plusieurs en « ensembles paroissiaux » plus vastes. Cette évo- personnes spécialisées • la construction de chapelles liées aux stations lution conduit à faire vivre différemment les lieux dans l’architecture de sport d’hiver : chapelle de Flaine 1970, cha- de culte existants autour d’une église-centre. religieuse. Citons pelle œcuménique d’Aime-La Plagne 1965, notamment la • les lieux de culte associés aux grands bâtiments Hervé Dubois, Geneviève Guenin contribution de Mathilde PANQUET qui de climatisme comme celui du sanatorium de a rédigé en 1998 à Guébriant au Plateau d’Assy ou aux chapelles l’Université de Savoie, d’hôpitaux comme à l’hôpital de Thonon-les- sous la direction de Bains, Christian SORREL un • les églises emblématiques d’une profession de mémoire intitulé foi parmi lesquelles celles d’ Alby-sur-Chéran et « Églises et chapelles Notre-Dame de Toute Grâce au Plateau d’Assy, construites au XXe • emblématiques des cols : Prieu- siècle en Savoie », de ré-Hospice du col du Mont-Cenis 1968, Chapel- Philippe QUINQUET, le Notre-Dame-de-Toute-Prudence du col de l’Ise- qui est à la fois architecte et ran 1939, responsable de la • les églises de la reconstruction d’après-guerre Commission Diocésaine en Maurienne : églises de Saint-André, de d’Art Sacré de la Savoie, et de Fourneaux. de Christian REGAT, président de l’Académie Salésienne en Haute- Chapelle Notre-Dame de Toute Prudence au Savoie et de la col de l’Iseran. Chapelle emblématique du col le plus haut d’Europe. Architecture d’inspiration commission diocésaine néo-régionale, en pierres, bois et lauzes, réalisée d’Art Sacré de Haute- par Maurice Novarina en 1939. Savoie.

7 ANTIQUITÉS La restauration de l’église Saint-François de Sales à Annecy

& OBJETS D’ART

Pratiquement achevée, la restauration totale de l’église du que la mère Claudine-Amédée Favier put mettre en chantier la restauration de l’édifice, et en par- premier monastère de l’Ordre de la Visitation a été l’un des ticulier la réalisation d’un nouveau décor inté- chantiers les plus importants de ces dernières années en rieur par les frères Galliari, peintres piémontais. Haute-Savoie. Les fêtes de la canonisation de sainte Jeanne de Chantal (septembre 1768) furent grandioses et marquèrent l’apogée de l’édifice : vingt-cinq ans plus tard, il allait être entièrement saccagé et dépouillé de toutes ses richesses. Après le départ et édifice emblématique du vieil Anne- des religieuses, l’église devint d’abord une caser- cy, dont la célèbre façade s’élève près ne. En 1795, elle fut vendue à l’industriel gene- Cdu canal, et qui inspire tout au long de l’année vois Samuel Fazy, qui y établit une fabrique de des milliers de photographes amateurs, se trou- toiles d’indienne. vait dans un état de dégradation préoccupant. La Après la Restauration de 1815, alors que la plu- ville d’Annecy, soucieuse de remettre en état cet part des églises retrouvaient leur vocation, celle édifice au destin si singulier, s’est lancée dans une de la Visitation continua à servir d’atelier et d’ha- opération de grande ampleur, concernant à la fois bitation. Des logements furent aménagés dans la le bâtiment, inscrit au titre des Monuments his- nef, sur trois étages, et des masures vinrent se toriques en 1952, et les objets mobiliers d’intérêt greffer le long du mur méridional. patrimonial (tableaux, retables). Pendant la plus grande partie du XIX e siècle, l’église demeura dans cette situation, qui finit par Quelques jalons d’histoire émouvoir un groupe de catholiques fervents. Sous A l’origine de cette église se trouvait la chapelle l’impulsion du chanoine de Quincy, vicaire géné- du premier monastère de l’Ordre de la Visitation, ral, ils constituèrent en 1888 une société civile Retable fondé à Annecy en 1610 par François de Sales, anonyme qui entreprit le rachat des multiples pro- de Saint Joseph. évêque de Genève-Annecy, et Jeanne de Chan- priétés qui avaient constitué jadis la Sainte Source. tal. Dès 1614, la construction d’une chapelle et Elle parvint à racheter l’église, à la débarrasser d’un couvent était entreprise, confiée à deux des constructions intérieures et extérieures, à la maçons originaires de la Valsesia. restaurer, et à reconstituer un nouveau mobilier, C’est là que reposèrent les corps des deux fon- tous les éléments d’origine ayant été pillés ou dateurs de l’Ordre : saint François de détruits. La mort du chanoine de Quincy, en 1899, Sales y fut inhumé en 1623, et sainte mit un terme à la renaissance de l’église. L’œuvre Jeanne de Chantal en 1641. Devenue dont il était le principal animateur, tomba dans centre de pèlerinage, la chapelle s’avé- l’indifférence. L’église fut affectée en 1923 à la ra insuffisante pour contenir les communauté italienne d’Annecy, dont la Mission foules qui s’y pressaient. Aussi, catholique assure encore aujourd’hui le service dès 1644, la mère de Blonay fit pastoral. agrandir la chapelle par des entrepre- neurs mâconnais. Consacrée en 1652, Le chantier de restauration l’église, dénommée « la Saint Source », Confiée à M. Richard Goulois, architecte du Patri- connut une notoriété extraordinaire. moine, la restauration de l’église est aujourd’hui Les cérémonies de béatification, puis entièrement achevée. En ce qui concerne les de canonisation de saint François de décors, des sondages ont révélé la disparition Sales (1662 et 1666), occasions de totale des peintures murales exécutées en 1765- fastes baroques, amplifièrent et consa- 1768, qui ornaient murs et voûtes, sans doute très crèrent le culte populaire qui s’était endommagées au cours du XIX e siècle et détruites instauré spontanément et qui perdu- par les travaux du chanoine de Quincy. Le décor ra jusqu’à la Révolution. L’église s’en- présent au début du chantier, très dégradé, richit des dons des fidèles et reçut un remontait à la fin du XIX e siècle, et avait été modi- important mobilier et une décora- fié au moment de l’affectation de l’édifice à la tion luxueuse. communauté italienne. Le parti retenu par l’ar- Peu de jours après la fête de la béa- chitecte fut de réaliser un décor s’inspirant du tification de sainte Jeanne de Chan- descriptif très détaillé des peintures de l’église, tal (30 avril-2 mai 1752), un incendie rédigé par la mère Favier en 1767, qui n’est évi- détruisit la charpente du clocher et demment pas figuratif, mais qui souligne et met celle de l’église, ainsi qu’une une en valeur l’architecture simple mais harmonieu- partie du monastère. L’église fut se de l’édifice : tons crème, ocre, terre de Sienne, recouverte, mais ce n’est qu’en 1765 rappels de faux-marbres verts.

8 Les travaux ont permis de faire ressortir certains classé et inscrit au titre des Monuments histo- ANTIQUITÉS éléments rappelant qu’il s’agit d’une chapelle riques, ainsi qu’ un portrait de saint François de conventuelle : dans le chœur, un large enfeu Sales qui se trouve au-dessus du caveau où reposa autrefois muni d’une grille donnait sur le chœur son corps jusqu’en 1793. des religieuses qui comportait une autre ouver- La restauration des tableaux avait été engagée ture, dont la grille a été conservée, percée juste plusieurs années avant le chantier général de au-dessus du caveau de sainte Jeannne de Chan- l’église. tal. Enfin, des fenêtres à barreaux au dessus du Les cinq retables latéraux sont eux aussi de pro- chœur, permettaient aux Visitandines de suivre venance extérieure : très différents, ils ont tous les offices depuis l’infirmerie à l’étage supérieur. été assemblés dans les dernières années du XIX e L’éclairage direct de la nef illumine tout le vais- siècle avec des pièces diverses, et en partie seau ; l’éclairage électrique, entièrement repen- repeints pour donner une harmonie d’ensemble. sé, met en valeur les trois lustres de cristal qui Les soubassements ont été réalisés par Giannina, ornaient autrefois la cathédrale et avaient été dans le même style que celui du retable du maître- déposés. autel. La restauration du mobilier était également un Malheureusement, ces retables ont fait l’objet de chantier d’envergure, supervisé par la Conserva- déprédations au cours des dernières décennies : tion des Antiquités et Objets d’Art. La particulari- têtes d’angelots arrachés, statuettes volées. En jan- té de ce mobilier réside dans le fait qu’aucun élé- vier 1998, le retable du Rosaire, classé Monument ment, à l’exception de la statue en bois doré de historique, était mutilé par l’arrachement des sainte Jeanne de Chantal, n’appartenait à l’église quinze médaillons sculptés de la vie de la Vierge ; Saint-François avant la Révolution. quant à la statue centrale, elle échappait de jus- Le retable du maître-autel, haut de 8 mètres, et tesse au vol. inspiré de celui de 1660, fut réalisé de 1889 à 1896 La restauration des retables latéraux posait donc par le sculpteur Joseph Giannina, originaire de la de nombreux problèmes techniques et esthé- Valsesia, qui avait repris l’atelier annécien des tiques, en particulier à cause des surpeints et des frères Gilardi. lacunes parfois importantes. Cette œuvre de bonne facture, inscrite à l’Inven- À la date de parution de cet article, les trois taire supplémentaire des Monuments historiques, retables des Saints Innocents, de Sainte Luce et présente une forme pyramidale en quatre de Saint Joseph ont été restaurés et remis en niveaux. Le soin apporté dans l’exécution des place, par les soins de l’entreprise italienne décors en faux-marbres de différentes couleurs, Restauro (Gorizia). Le retable de saint-Joseph est est à souligner. le plus intéressant du fait de sa cohérence et de Dans les deux niches latérales du deuxième la richesse de son décor (à l’exception de la toile niveau, on remarque deux statues d’évêques qui centrale mièvre, placée à la fin du XIX e siècle). pourraient être datées du XVII e siècle, mais dont Un cartouche le date de 1695. la polychromie fut entièrement reprise par Gian- Les deux autres retables, celui de Saint-Charles nina. Le tableau central n’existe plus et a été rem- Borromée et celui du Rosaire, ont été confiés sous La Visitation, détail du placé par un grand Christ en croix fixé sur le mur maîtrise d’œuvre de la Drac à l’atelier de restau- Theatrum Sabaudiæ, du fond, se détachant sur le paysage du Golgo- ration Haddad. La restauration du premier est ter- dessin de G.-T. Borgonio, tha ; ce décor exécuté par le peintre J. Stellio en minée ; il sera reposé en décembre. De compo- gravure anonyme, 1674, 1932, donne un accent particulier au grand sition très étudiée, il comprend un antependium éditions de 1682 à 1726. retable. Les statues des niveaux supérieurs, de sur toile, daté de 1737, représentant l’archevêque facture académique, ne présentent pas de carac- de Milan en médaillon dans un décor de tère intéressant. feuillages. L’état sanitaire du retable du maître-autel était La restauration du retable du Rosaire est prévue satisfaisant ; la conception avisée de la structure en 2004. avait permis une bonne ventilation par l’arrière. Le coût global du chantier de restauration Quelques décollements et fissures étaient à déplo- s’est élevé à 1,14 millions d’euros ; cette rer. Il était cependant très empoussiéré et encras- opération a bénéficié de subventions sé ; des interventions maladroites (à la bombe de de l’État et du département. peinture dorée ou à la bronzine !) avaient endom- Longtemps délaissée après une pre- magé le tabernacle et les reliefs des soubasse- mière renaissance il y a un peu plus ments. D’une façon générale, la restauration de de cent ans, l’église Saint-François de ce retable ne présentait pas de difficulté technique Sales, à défaut de retrouver un éclat à particulière. jamais disparu dans les tourmentes Pour se procurer le reste du mobilier, retables révolutionnaires, a du moins retrouvé latéraux et tableaux, le chanoine de Quincy avait un nouveau visage, et rappelle au visi- dû faire appel à la générosité des donateurs. teur qu’elle fut le berceau d’un ordre La provenance de ces éléments est dans la plu- religieux qui devait connaître une part des cas, inconnue : en effet, si les Archives extension mondiale. départementales conservent des liasses de lettres Hélène Viallet écrites par l’infatigable vicaire général pour sol- liciter des aides, les réponses ne sont pas parve- nues jusqu’à nous. Nous ne disposons que d’in- dices. Retable des Parmi les cinq tableaux, les plus intéressants sont : Saints Innocents. Jésus servi par les anges (XVII e siècle) ; Sainte Barbe (1652) provenant du Valais, respectivement

9 COLLECTIONS Sainte Anne, la Vierge et l’Enfant une statue aussoyenne de dévotion populaire fin du Moyen Âge DÉPARTEMENTALES

e groupe statuaire trinaire religieuses à la fin du Moyen-âge. Dans a été récemment acquis les vallées savoyardes, la Modernité Sainte Anne, la Vierge Cpar le Conseil général de la confronta et mêla le culte des saints et l’Enfant, triade en bois Savoie ; il vient enrichir les col- liturgiques et des saints patrons à la e polychrome du XVI siècle. dévotion aux saints populaires Collections départementales, lections départementales dans inv. 2003-4-1. la perspective d’une exposition locaux qui perpétuait le recours aux sur le patrimoine religieux rituels ancestraux, en particulier pro- savoyard. phylactiques et agraires. L’œuvre est issue d’une col- La dévotion à sainte Anne est assez lection privée. Elle provient tardive en Occident chrétien ; Anne d’Aussois, très vraisemblable- apparaît, en effet, avec les Apo- ment d’une ancienne chapel- cryphes. Mais son culte ne se répand le Sainte-Anne qui desservait qu’à partir du XIIIe siècle grâce à l’alpage de La Fournache (ou l’ordre des Carmes. Les Speculum • Burlet, J., abbé d’un oratoire d’un alpage des Historiae de Vincent de Beauvais « Le culte de Dieu, de la plans d’Amont et d’Aval (vers 1184-vers 1224) puis la Legen- Vierge et des saints en aujourd’hui sous les eaux des da Aurea de l’hagiographe Jacques Savoie avant la Révolution », Chambéry, barrages). Le vocable est de Voragine (1230-1298) populari- 1916. mentionné lors de la visite sent le cycle d’Anne et Joachim. En pastorale de 1700. Il s’agit 1494, l’humaniste allemand Trithe- • Van Gennep, Arnold. d’une fondation privée. En effet, mius / Tritenheim, abbé du monastère « Culte populaire des les « petites montagnes » d’Aussois étaient en bénédictin de Sponheim publie à Mayence De saints en Savoie », mode d’exploitation familiale. laudibus sanctissiame matris Annae tractatus, Archives d’ethnologie Cette sculpture en ronde-bosse, de style gothique qui est à l’origine de l’essor des confréries de française 3, coll. dirigée tardif, en bois d’arolle (pin cembro), H 77 cm x Sainte-Anne. par Jean Cusenier, L 43 cm x ep. 15 cm, présente un dos évidé non Seuls les thèmes de la Nativité de Marie et de la Paris : G.-P. travaillé et des traces de polychromie verte et Présentation au Temple sont issus des textes apo- Maisonneuve & Larose, 1973. rouge selon la symbolique usuelle des couleurs cryphes. La Triade sainte Anne, la Vierge et l’En- en Empire. Elle était sans doute placée dans une fant est un vieux sujet génératif originaire d’Eu- • Sous la dir. de niche. Sainte Anne assise sur une cathèdre porte rope orientale bien présent dans les vallées Paupert Catherine, sur ses genoux le Livre ouvert et la Vierge qui pré- savoyardes. Par l’attribut du Livre ouvert, il est à « Aux frontières du sente l’Enfant debout sur ses propres genoux. Sa relier au sujet le plus usité dans ces mêmes val- Nouveau Testament, facture est celle d’un atelier régional de la fin du lées, sainte Anne apprenant à lire à la Vierge. motifs apocryphes en XVe ou du début du XVIe siècle. Ainsi, la dévotion à la « bonne-mère » et à la Maurienne et Tarentaise C’est un des fragiles témoignages de la religion « bonne grand-mère » semble bien avoir été une (Savoie) », : chrétienne populaire qui a longtemps constituée particularité de la religion populaire, dans les Editions Alzieu & avec ses rituels prophylactiques le socle de la civi- Alpes occidentales que l’on retrouve encore au Brepols Publishers, e 1998. lisation agro-pastorale alpine. L’art statuaire XIX siècle avec les associations des mères chré- médiéval a malheureusement subi l’iconoclasme tiennes placées sous son patronage. La dévotion des évêques réformateurs dans la première moitié à sainte Anne est particulièrement bien repré- du XVII e siècle puis les déprédations révolution- sentée en Maurienne ; ce qui a fait dire à Arnold naires de 1794 qui rendent d’autant plus signifi- Van Gennep : « ... mes enquêtes de folklore m’ont cative la conservation de ces objets patrimoniaux prouvé un culte populaire local à la fois étendu pour l’histoire des mentalités et des croyances et tenace pour… sainte Anne. La plupart des cha- pelles et des oratoires placés sous son vocable e La fête de sainte Anne, le 26 tuaire l’associe : sainte Anne rentielles. Sa spécialisation sont mentionnés entre le début du XVII siècle et e juillet, est associée à celle de apprenant à lire à la Vierge ; féminine est alors prise en le premier tiers du XVIII siècle, à l’occasion de saint Joachim, son époux sainte Anne, la Vierge et charge par sainte Agathe et visites pastorales. Van Gennep constatait que dans la liturgie (thème des l’Enfant en triade ou encore sainte Marguerite. C’est aussi sainte Anne comptait parmi les saints les plus vieux parents symboliques, sainte Anne et les trois la patronne des métiers de vénérés de Haute-Maurienne avec saint Antoine Ancien Testament). Marie. Son patronage offre couture, des menuisiers et Sainte Anne est représentée une protection aux mères de des ébénistes : sainte Anne ermite, saint Roch et saint Sébastien, enfin Notre- comme la Grammaire du famille, favorise l’éducation est considérée comme le Dame des Neiges. Toutefois, l’importance du cycle des Arts libéraux avec des enfants, la fertilité et les tabernacle vivant de la patrimoine mobilier et immobilier des hautes le Livre comme attribut. accouchements. On sollicite Vierge. Enfin, elle symbolise vallées, qui a pu parvenir jusqu’à nous, ne cor- C’est une matrone revêtue sainte Anne pour obtenir la le trésor caché au sein de la d’un manteau vert ou rouge grâce d’une bonne mort. Terre pour les mineurs. respond pas nécessairement à la ferveur popu- à l’intérieur vert, symbole de Toutefois en montagne, elle laire somme toute soumise aux modes et aux l’espoir du Monde qu’elle a protège surtout contre les circonstances. porté en son sein. L’art sta- avalanches et les laves tor- Philippe Raffaelli 10 Le Pays d’art et d’histoire DOSSIER de Maurienne & Tarentaise

En Savoie, les Villes de Chambéry et d’Albertville-Conflans et le Pays de Maurienne et Tarentaise appartiennent au réseau national des Villes et La Daille, Val d’Isère. Pays d’art et d’histoire. Le ministère de la Culture et de la Communication, direction de l’Architecture et du Patrimoine, attribue l’appellation Villes et Pays d’art et d’histoire aux collectivités locales qui ont la volonté de préserver et d’animer leur architecture et leur patrimoine. Il garantit la compétence de guides-conférenciers cordonnés par des animateurs du patrimoine et la qualité de leurs actions. Des vestiges antiques à l’architecture du XX e siècle, les Villes et Pays mettent en scène le patrimoine dans sa diversité. Aujourd’hui, un réseau de 130 Villes et Pays offre un savoir-faire sur toute la France. Pour en savoir plus… www.vpah.culture.fr

Un lieu ressources, la Facim Des itinéraires ethnologiques Créée dans les années 1970 à Courchevel à l’ini- en Tarentaise et Maurienne tiative du journaliste diplomatique et critique aux stations de sports d’hiver musical Gilles de La Rocque et présidée aujour- La Convention du Pays d’art et d’histoire de d’hui par Hervé Gaymard, la Fondation pour Maurienne et Tarentaise, signée en décembre l’action culturelle internationale en montagne a 1991 entre le ministère de la Culture et la Facim, pour vocation d’initier des rencontres destinées missionnée par le Conseil général de la Savoie, à un large public autour des arts, de la culture, s’inscrivait dans le programme de tourisme culturel, celui des « itinéraires ethnologiques en des patrimoines et des sciences humaines. Tarentaise et Maurienne ». Elle est dotée d’un Centre international d’échan- Ce projet, baptisé Les Chemins du baroque à ges au Jardin alpin, bâti sur un terrain cédé par Logo Alain Roth. l’occasion des Jeux Olympiques d’Albertville en le Conseil général de la Savoie, dans lequel ont 1992, est le reflet d’une nouvelle politique cultu- lieu des colloques et conférences sur des thèmes relle patrimoniale en Savoie. de société. Le Pays d’art et d’histoire a ajouté au fil des années Sur le territoire savoyard, elle est un partenaire de nombreuses cordes à son arc : trois autres actif du département qui lui a confié l’animation programmes, Pierres-fortes de Savoie en 1997, de sites patrimoniaux. Elle mène des études eth- Terres des Alpes en 1999 et Les stations de sports 1. Sur la thématique des nologiques, gère une importante photothèque d’hiver 1 en 2002, valorisent les patrimoines stations, L’Anarchitecte, sur les thématiques qu’elle développe et publie fortifié, rural et touristique, sur l’ensemble du Laurent Chappis, des ouvrages. département. rebelle de l’or blanc, Ed. Guérin, novembre 2002. Ma Montagne… du rêve à la réalité, manuscrit de Laurent Chappis, Ed. Facim, mars 2003. Perspectives pour un nouveau siècle de sports d’hiver, actes Cimes 2002, Ed. Comp’Act, décembre 2003. Les Pionniers de l’or blanc, P. Revil, R. Helle, Ed. Glénat (janvier 2004).

Auditorium de la Facim, Jardin alpin de Courchevel.

11 DOSSIER Ainsi, la Facim mène des actions communes à ces quatre itinéraires historiques : recherche et ana- lyse d’un discours interprétatif, formation de guides-conférenciers et sensibilisation des publics locaux, scolaire et touristique à travers divers supports, visites-conférences, ateliers pédago- giques, spectacles, édition d’ouvrages… Aujourd’hui, la réactualisation de la convention du Pays d’art et d’histoire est envisagée en lien avec le ministère de la Culture et le Conseil géné- ral afin de renforcer les liens avec les collectivi- tés et les associations valorisant leur patrimoine et de conforter les actions de sensibilisation des publics à ces patrimoines.

Un outil pédagogique pour mieux comprendre les stations de sports d’hiver La nouvelle économie montagnarde développée autour de l’or blanc au XXe siècle a marqué for- tement de son empreinte les paysages alpins. Si l’audace dont les pionniers et les collectivités ont fait preuve à l’époque est louée aujourd’hui, il n’en est pas toujours de même en ce qui concer- ne les stations implantées ex-nihilo et leurs infra- structures. Rappeler aujourd’hui la genèse de ce patrimoine 2. Les autres partenaires industriel contemporain qui s’est développé et imaginé un concept d’outil pédagogique destiné du projet sont le Conseil se transforme avec une extrême rapidité, peut aux enseignants pour aborder le thème des sta- général de la Savoie, contribuer à mieux appréhender ce paysage pour tions de sports d’hiver et sensibiliser de façon le ministère de la Culture – le relier aux hommes qui l’ont imaginé, construit ludique les enfants à leur environnement direct Direction Régionale des Affaires Culturelles et habité. ou de vacances. de Rhône-Alpes et le CNDP Avec les professionnels et les experts, l’Inspec- Il servira de support d’explication de ce patri- – Mission arts et culture. tion académique de Savoie 2 et la Fondation ont moine du XX e siècle et d’appropriation par les élèves, et ce en complément à la visite de la sta- tion. Ces différentes animations seront encadrées par les guides-conférenciers et l’équipe ensei- gnante. L’articulation entre l’école primaire (cycle 3 – CE2 à CM2) et le collège (6 e – 5 e) est privilégiée. Une extension aux lycéens est envisagée pour 2005. Les classes des vallées de Maurienne, Tarentaise, Beaufortain et Val d’Arly sont prioritairement ciblées puis les établissements volontaires sur l’ensemble du département ou du territoire national (classes transplantées…). Le prototype est testé dans les classes depuis décembre 2003. Il évoluera en fonction des tests réalisés et sera reproduit en une dizaine d’exemplaires. Ce projet se veut ouvert et évolutif. Destiné à un large public, il permettra une démarche d’ani- mation pédagogique originale entre enseignants, guides-conférenciers et élèves. Pierre-Yves Odin

En haut, centre de vacances. Atelier d’Architecture en Montagne. En bas, immeuble Rochebrune, J.-L. Chanéac, .

12 Albertville DOSSIER Une Ville d’Art et d’Histoire à la montagne

epuis le mois de mars 2003, Albertvil- le, grâce à la volonté et à la ténacité Dde ses instances dirigeantes, peut s’enorgueillir d’un nouveau titre accordé par le ministère de la Culture et de la Communication, celui de Ville Le Musée d’histoire d’art et d’histoire. Ce titre consacre non seulement et d’ethnographie de la qualité d’un patrimoine et d’une histoire des Conflans, un site à plus riches mais aussi la volonté de les faire vivre découvrir ou au quotidien par une approche scientifique sans redécouvrir cesse renouvelée. Si la naissance officielle d’Albertville sur les cartes Installé dans la Maison est relativement récente (1836), son histoire, elle, Rouge, le Musée de Conflans présente sur remonte à l’Antiquité. La carte de Peutinger situe Place de l’Europe, Albertville. l’existence du poste fiscal « Ad Publicanos » où trois étages et dans une dizaine de salles des était perçu le quarantième des Gaules à l’entrée collections remarquables ture, École Normale, Hôpital,… L’essor écono- des Grandes Alpes. De ce passé témoigne la villa par leur diversité et leur gallo-romaine de Gilly-sur-Isère dont les décou- mique des aciéries d’ et de , puis qualité. Art sacré, vertes sont exposées au Musée de Conflans. le développement des sports d’hiver ont provo- mobilier savoyard, Au Moyen Âge, le comte de Savoie parvient à qué une extension et une diversification du tissu armes, skis, archéologie, s’imposer et décide même de créer une ville nou- urbain. La formidable aventure des Jeux olym- métiers traditionnels… velle en contre-bas, autour d’un hôpital dirigé par piques d’hiver de 1992 a vu l’arrivée de l’archi- autant de thématiques les Chevaliers de Saint-Jean-de-Jérusalem, l’Hô- tecture contemporaine avec la rénovation du déclinées, qui pital-sous-Conflans. A l’abri derrière ses murailles, centre ville autour de la Place de l’Europe et du permettent à tout un Conflans se développe et prospère grâce à ses Centre culturel du Dôme, mais aussi la construc- chacun de satisfaire son centre d’intérêt, sa marchés hebdomadaires et ses trois foires tion de la Halle Olympique et de l’Anneau de curiosité. De nouveaux e vitesse. annuelles. Au XIV siècle, le paysage conflarin parcours mettront s’enrichit de deux fières maisons patriciennes en Ce bref survol du passé d’Albertville permet de prochainement en valeur brique rouge : la Maison Rouge construite par comprendre la richesse des différents patrimoines les artefacts, permettant Pierre Voisin, secrétaire du Comte Vert et le Châ- que le nouveau service en charge du label « Ville de tenir un véritable teau Rouge édifié par André de Belletruche, tré- d’art et d’histoire » valorisera : une offre culturel- discours auprès des sorier général de la Savoie. le de très grande qualité sera développée et devra visiteurs. Beaucoup Aux XVI e et XVII e siècles, hors des murs sont édi- s’adapter aux attentes et aux comportements d’autres innovations sont fiés le Château Manuel de Locatel et le Clos des socio-culturels des publics pour lesquels elle a programmées dans le Capucins. Leur installation, contemporaine de été pensée et conçue. Dans cet esprit, plusieurs cadre d’un projet scientifique et culturel celle des Bernardines, s’inscrit dans l’élan reli- catégories de publics ont été ciblées : les enfants dont va se doter le durant le temps scolaire et hors temps scolaire, gieux de la Contre Réforme. Musée, avec comme Si la plupart des façades de la rue principale et les touristes étrangers, les familles, les aînés. En mots d’ordre : qualité, de la Grande Place datent probablement de concertation avec l’équipe des guides-conféren- dynamisme et ouverture. l’époque moderne, l’église consacrée à Saint Grat ciers, seront définies des approches différenciées Le but premier est en et à l’Assomption de la Vierge représente de façon afin de faire des visites guidées des moments forts effet de faire du Musée éclatante cette période, tout comme les deux fon- et uniques. de Conflans un lieu de taines en pierre taillée. L’offre culturelle sera chaque année étoffée de vie où tous les publics A la fin du XVIII e siècle, Conflans se fige, il reste nouveautés. Trois circuits seront ainsi proposés seront au centre de toute aujourd’hui un patrimoine architectural et urbain à compter du printemps 2004 tandis que durant démarche… exceptionnel, que la Société des Amis du Vieux l’été, une grande chasse aux trésors aura lieu deux Conflans n’aura cesse de promouvoir dès 1930. fois par semaine pour les enfants et les familles. L’endiguement de l’Arly puis de l’Isère afin de De même, seront organisés, durant toute l’année, protéger les Salines Royales puis la Fonderie des temps forts autour de manifestations théma- Royale de plomb argentifère, ainsi que la cons- tiques : ainsi à l’automne 2004 sera organisé à truction de routes dans la Plaine conduisent au Conflans « le Bal des châtaignes ». développement de l’Hôpital-sous-Conflans qui, L’ensemble des acteurs culturels albertvillois, à en 1786, obtient par patentes royales la création savoir la Médiathèque, le Dôme Théâtre, l’Ecole d’un marché hebdomadaire et de trois foires de Musique, la Société des Amis du Vieux annuelles. En 1820, l’Hôpital-sous-Conflans compte Conflans,… mais aussi les représentants du sec- plus d’habitants (1700) que Conflans (1500). En teur touristique seront associés à cette démarche 1835-36, le Roi Charles-Albert décide la réunion de valorisation du patrimoine, dans le respect des de l’Hôpital et de Conflans : Albert-Ville est née. spécificités et des missions de chacun. On ne sau- Après l’Annexion de la Savoie à la France, la cité rait oublier dans cette démarche les structures La Maison Rouge devient sous-préfecture. L’architecte Eugène départementale, régionale et nationale qui sont édifiée vers 1397, très souvent de précieux relais et des soutiens Dénarié réalise l’Hôtel de Ville et le Palais de jus- musée de Conflans. tice. Son style sera repris pour les autres édifices importants. Tél. 04 79 37 86 86. qui ponctuent le cœur de la Ville : Sous-Préfec- Jean-Luc Bourges

13 DOSSIER Chambéry Ville d’art et d’histoire : patrimoine et nouveaux territoires urbains

n 1985, Chambéry et le ministère de la Culture décident d’unir leurs efforts pour Haute-Savoie, Evaloriser le patrimoine chambérien, notamment la vallée d’Abondance par des visites guidées de qualité, et signent une est labellisée « Pays d’art et d’histoire » convention Ville d’art et d’histoire. Celle-ci vient Canton montagnard de soutenir et reconnaître l’important travail déjà six communes, la Vallée réalisé par une équipe de guides-conférenciers d’Abondance a obtenu et l’Association des Amis du Vieux Chambéry. le label « Pays d’art et Depuis le programme de visites guidées s’est enri- d’histoire », décerné par chi, des activités pour les jeunes et les scolaires le ministère de la ont été conçues, des circuits touristiques ont été Culture, en juin 2003. mis en place, des expositions ont été réalisées, Le projet culturel etc. La convention Ville d’art et d’histoire a ainsi repose sur l’animation évolué tant du côté de la Direction du Patrimoi- et la protection du patrimoine naturel et ne et de l’Architecture (ministère de la Culture) architectural de la que de la Ville de Chambéry. Cette année, un vallée, développé bilan positif de leurs dix-huit années de parte- autour des thèmes des nariat a été dressé, et une nouvelle convention pratiques agropas- sera signée pour poursuivre cette politique cul- torales, religieuses, turelle de valorisation du patrimoine et de sensi- architecturales et bilisation des habitants. Convention qui s’est paysagères, contribuant orientée vers de nouveaux objectifs tels que la à l’identité du territoire. création d’un Centre d’interprétation de l’archi- Renseignements auprès tecture et du patrimoine (Maison du patrimoine) de V. Grimbert, syndicat intercommunal de la et un travail sur l’urbanisme et l’architecture vallée d’Abondance contemporains. Ce dernier vise à renforcer les 04 50 73 57 31. liens entre le centre ancien et les quartiers péri- phériques, à mieux faire comprendre l’évolution urbaine de la ville de ses origines jusqu’à nos jours. Pour cela, en 2000, des recherches menées Pour toute information par l’animateur du patrimoine ont permis de concernant la Convention mettre en place des visites guidées du quartier tué en classe un travail sur l’histoire et l’évolution Ville d’art et d’histoire de des Hauts de Chambéry, et dans la foulée de réa- Chambéry, contacter de leur quartier. Aujourd’hui, le bilan est très posi- liser une mallette pédagogique, d’ailleurs remar- Michèle Santelli, adjointe tif. La population locale porte un autre regard sur quée par le ministère de l’Education Nationale. au Maire chargée du son habitat, son architecture et son environne- Grâce à cet outil et à une collaboration fructueuse Patrimoine et du Tourisme, ment. Certains de ces projets scolaires ont abouti avec l’Inspection académique de la Savoie, la plu- Hôtel de Ville, BP 1605, à une exposition à l’Espace Jeunes des Hauts de 73001 Chambéry cedex. part des élèves des Hauts de Chambéry ont effec- Chambéry au printemps dernier. D’autres sont en cours et se poursuivront dans les années à venir. De plus, l’animateur du patrimoine a col- laboré en 2003 avec la mairie de quartier du Biol- lay pour s’associer aux manifestations organisées dans le cadre du Cinquantenaire du quartier. Outre des actions menées avec les enseignants de l’école, des visites guidées proposées pour les Journées européennes du patrimoine, une bro- chure étudiant l’histoire urbanistique et archi- tecturale du quartier a été réalisée à l’attention de la population chambérienne, lui permettant ainsi de mieux comprendre ce patrimoine des années 1950. Ainsi, la mise en valeur de nou- veaux territoires urbains et la sensibilisation des habitants à une meilleure connaissance de leur ville sont des travaux de fond que la convention Ville d’art et d’histoire de Chambéry a décidé de porter de manière qualitative. Véronique Frandon

Photographies prises à l’occasion de l’exposition des travaux d’élèves des Hauts de Chambéry (Espace Jeunes)

14 Actualités de l’Archéologie ARCHÉOLOGIE

Alpis Graia Ruralia V Archéologie sans frontière Colloque international sur les usages de au col du Petit-Saint-Bernard, l’eau en milieu rural au Moyen Âge un programme Interreg franco-italien Le cinquième colloque Ruralia était cette année Le col du Petit-Saint-Bernard, point de franchis- organisé à et à Villard-Sallet par l’UMR 5648 sement historique des Alpes parmi les plus impor- Histoire et archéologie des mondes chrétiens et tants, a cette particularité rare de posséder un site musulmans médiévaux, basée à l’Université de archéologique partagé par une ligne frontière. A Lyon II, sous la responsabilité de Jean-Michel côté de vestiges antiques, un vaste cercle de Poisson qui a fouillé, à Villard-Sallet, le site de pierres révèle l’ancienneté de la fréquentation du Montmayeur, château et bourg castral des XII e- col. Traversés par la ligne de démarcation entre XVI e siècles. Du 27 septembre au 1° octobre, les la France et l’Italie qui traduit des compétences chercheurs de 15 pays, de la Pologne au Maroc territoriales propres à chaque pays, ces sites ont se sont réunis pour faire part de leurs recherches jusqu’alors fait l’objet de recherches non coor- sur les différentes utilisations de l’eau au Moyen- données et par conséquence d’aménagements Âge : irrigation, systèmes et machines hydrau- différents. Italiens et français se sont rencontrés liques, bains publiques, moulins, mines… pour proposer un projet ambitieux avec une phase de recherches suivie d’une valorisation du Les Alpes dans l’Antiquité col et de son histoire : investigations et études des 10 e colloque international : implantations vestiges d’un pied à l’autre du col de la préhis- rurales et économie agro-pastorale dans toire jusqu’à la dernière guerre, communication les Alpes de la Préhistoire au Moyen Âge et diffusion des connaissances, mise en valeur Les 12, 13, et 14 septembre s’est tenu en Val d’Aos- des découvertes. te à Cogne, au cœur du Grand Paradis, le 10 e Col- Soutenu par l’Europe, l’État, le Conseil général de loque des archéologues italiens, français et suisses la Savoie, piloté par la Région autonome du Val des Alpes occidentales. Préhistoriens et historiens d’Aoste avec pour partenaire le SIVOM de Haute- se sont retrouvés pendant trois jours pour parta- Tarentaise, le projet a débuté en été 2003 par les ger les résultats de leurs travaux les plus récents recherches de terrain menées par des équipes sur les implantations rurales et l’économie agro- franco-italiennes. pastorale dans les Alpes. Depuis les installations à Collomb, les plus anciennes au Néolithique jusqu’aux amé- de la grotte… Ours des cavernes nagements médiévaux, c’est tout un pan de au musée de l’Ours 9 e Symposium international l’histoire alpine qui a été mis en relief à travers des cavernes à Entremont-le-Vieux l’étude de l’évolution des pratiques agricoles et Michel Philippe (coordinateur), Du 25 au 27 septembre 2003, les spécialistes de pastorales, des gravures rupestres protohisto- Françoise Ballet, Elodie l’ours des cavernes se sont réunis pour leur ren- riques et des inscriptions romaines témoins des Dédiès, Pascale Guégan contre annuelle. Profitant de l’ouverture récente activités humaines et de l’architecture rurale. 2003, Éd. Comp’Act du Musée de l’ours des cavernes pour organiser Françoise Ballet La publication de cette le 9 e Symposium à Entremont-le-Vieux, les orga- brochure s’inscrit dans nisateurs Alain Argant et Michel Philippe, res- le cadre du mécénat ponsable de la fouille de la Balme à Collomb, technologique d’EDF mobilisé pour la Balme peuvent être satisfaits. Une centaine de cher- Deux nouvelles à Collomb. Pour cheurs, venus de 13 pays (France, Italie, Alle- publications pour précéder ou prolonger les musées magne, Tchéquie, Angleterre, Slovénie, Suisse, la visite du musée de Espagne, Autriche, Pays-Bas, Belgique, Algérie l’Ours des cavernes et même USA) : paléontologues, préhistoriens, Les Potiers gallo- d’Entremont-le-Vieux, géologues, palynologues, généticiens… ont alter- romains de Portout le public a maintenant né communications scientifiques et visites de ter- au musée de la possibilité d’acquérir rain pour faire le point des connaissances sur cet Jacques Pernon, 2003, ce petit ouvrage Éd. Comp’Act animal disparu de nos contrées il y a 15 000 ans agréablement présenté Le musée de Chanaz dans lequel, autour de environ, mais dont les restes se retrouvent dans propose désormais quelques grands de nombreuses grottes. une brochure attrayante thèmes : la Balme à avec de nombreuses Collomb, les illustrations, à la fois de 19 espèces animales recherches, l’ours des aide et complément ont été étudiés, cavernes, l’homme et à la visite. Ce fascicule permettant de connaître l’ours, il découvre aussi reprend les thèmes l’environnement des le Granier souterrain, le développés dans le potiers et leur nourriture mécénat d’EDF, les musée mais en les ou encore que l’atelier animaux contemporains enrichissant de textes de potiers étaient peut- de l’ours des cavernes, explicatifs. On y être sous tutelle militaire l’homme préhistorique apprend par exemple comme semble le et l’ours, les derniers que les pollens de 30 suggérer certains objets. ours bruns en Savoie et arbres et plantes, les Au musée des Potiers en Chartreuse. restes de 20 espèces gallo-romains à Chanaz. Au musée de l’Ours végétales de la vigne à Prix 6 e des cavernes à Entremont- l’avoine et les ossements le-Vieux. Prix 5 e

15 ARCHÉOLOGIE Les derniers chasseurs de rennes Paléoenvironnement en Savoie

ans la continuité des recherches anté- rieures, cet article propose quelques élé- Dments de synthèse des résultats essentiels obtenus depuis sept ans en privilégiant les données qui se rapportent aux conditions dans lesquelles les groupes humains vivaient il y a plus de 14 000 ans. Nous savons déjà que la présence humaine est attestée dès cette période grâce aux recherches de la dernière décennie effectuées à La Fru et à « dessus » (commune de Saint-Christophe- la-Grotte) et à celles plus anciennes conduites à Saint-Thibaud-de-Couz et à la grotte des Romains située dans le défilé de Pierre-Châtel proche de . Les groupes humains attribués à la cultu- re magdalénienne qui ont fréquenté ces sites, vivaient au sein d’un environnement froid de type steppique, ouvert et plus ou moins humide selon les périodes, avec une végétation correspondant à un assemblage pollinique composé de gené- Paléoenvironnement, Les recherches sur la préhistoire du vriers, argousiers, saules nains, bouleaux et défilé de Pierre Châtel, armoises, environnement dans lequel évoluaient dessin de P. Hottegem, Paléolithique supérieur dans les le renne, l’élan, le bouquetin, la marmotte ainsi 1976. Coll. Musée de deux Savoie, se sont développées que des oiseaux comme le tétras-lyre, la perdrix l’Homme. d’une façon sensible grâce aux des neiges et le lagopèdes des saules pour les principales espèces chassées par l’homme, travaux d’un programme collectif espèces que l’on retrouve dans les restes culi- de recherche (PCR) qui regroupe des naires des couches archéologiques en particulier chercheurs pluridisciplinaires du à La Fru et aux Romains. Pour affiner les conditions se rapportant au climat CNRS, de l’Université mais aussi de et à la végétation entre 16 000 et 10 000 ans et chercheurs bénévoles, programme financé par plusieurs départements et en particulier d’une façon très soutenue par le Conseil général de la Savoie puisqu’une partie très sensible de ces recherches concerne ce département. Pointes de sagaie en bois de renne, et travail du bois de renne, abri de La Fru.

ceci en dehors des habitats humains, des carot- tages profonds ont été menés dans les lacs de La Thuile et du Chevelu, d’altitudes 884 m et 320 m, par le Laboratoire de Chrono-Ecologie de Besançon, laboratoire impliqué dans l’équipe du PCR. C’est la première fois qu’une telle étude concernant l’environnement des périodes an- ciennes sur des sites naturels non fréquentés par l’homme a été réalisée en Savoie. La détermination des pollens et des restes végé- taux datables reconnus dans les sédiments de ces carottes précise l’évolution de l’environnement depuis 16 000 ans démontrant ainsi que la dégla- ciation de nos vallées était déjà effective à cette Pointes à dos en silex (armatures), abri de La Fru. époque.

16 C’est ainsi que nous possédons maintenant une image plus précise de l’environnement végétal donc climatique, durant plusieurs millénaires. En se rapportant au schéma classique des biozones, d’importantes périodes de réchauffement, de refroidissement ou de faibles péjorations clima- tiques ont été mises en évidence prouvant ainsi que les évolutions climatiques ont toujours existé. En particulier, le grand et brutal réchauffement qui s’est produit sur une grande partie du globe vers 12 800 ans et démontré par les recherches dans les glaces du pôle nord, a bien été perçu dans notre région. En l’espace de quelques décennies seulement, la température a progres- sé de 7 à 8 degrés entraînant une modification Pointes à dos en silex rapide de la végétation qui s’est manifestée par et quartz, abri de La Fru. la disparition des essences steppiques et l’arrivée progressive d’arbres comme le pin puis le noise- tier, l’orme et ceux de la chaînaie-mixte mais Abri de La Fru, chantier de fouilles, Gilbert Pion. entrecoupée au cours du millénaire suivant de phases à couvert végétal plus ouvert synchrones des petites périodes de refroidissement. Bien entendu, cela a entraîné une évolution paral- lèle de la faune. Dans les périodes plus tempé- rées à couvert forestier plus important, apparais- sent le cerf, le chevreuil, le sanglier mais toujours le bouquetin qui perdure dans un milieu plus rocailleux qui est davantage son bitope. C’est ainsi que par la modification profonde de son biotope, le renne disparaît totalement vers 12 000 ans, comme le prouvent les différentes datations radiocarbone réalisées sur des restes de renne de plusieurs niveaux d’occupations à La Fru, à St Thibaud-de-Couz, aux Romains, à Bange et aux Douattes pour les sites savoyards ou très devenues de plus en plus petites puisque c’est la proches de la Savoie à même contexte géogra- vitesse de propulsion acquise par cette technique phique de moyenne montagne. qui a donné l’efficacité de l’arme. Ces différentes La précision des analyses effectuées sur les techniques de chasse ont été bien mises en évi- carottes des deux lacs a permis aussi de mettre dence par l’examen des vestiges issues des en évidence deux refroidissements sensibles dans fouilles. notre région entre 12 et 11 000 ans, le premier Le programme de recherches de ce PCR est achevé, correspondant à la biozone dite du Dryas moyen nous sommes au stade de la publication généra- daté par le radiocarbone sur des restes organiques le prévue en 2004 à la fois dans une revue fran- à 12 190 ans et le deuxième référencé Dryas çaise mais aussi dans une revue anglo-saxonne. Pointe de harpon récent et daté 10 990 ans, périodes chronolo- Puis il est envisagé d’organiser à Chambéry en et aiguille en bois giques tout à fait synchrones des données de la 2005, une table ronde à laquelle seront invités les de renne, palynologie qui montraient ces refroidissements chercheurs français et étrangers directement grotte de Bange. par de nouvelles et parfois assez brutales dimi- concernés par ce type de recherche. nutions du couvert forestier et la récurrence d’es- Gilbert Pion pèces végétales plus adaptées au froid. L’environnement ayant changé à plusieurs reprises, les groupes humains ont dû s’adapter à ces nouvelles conditions de vie en particulier dans leur stratégie de chasse face à un gibier chan- geant, plus rare ou plus abondant selon les périodes climatiques. La façon de chasser le renne, espèce de milieu plus ouvert et se déplaçant en horde étant très différente de celle des espèces plus isolées comme le cerf, le chevreuil et le sanglier, l’hom- me a progressivement remplacé la sagaie armée d’une pointe en bois de renne ou d’un harpon par des armatures de silex placées en bout de la hampe et latéralement en barbelures. Puis l’invention de l’arc a été un événement déci- sif pour la chasse de ce gibier plus isolé. En effet, l’arc ayant remplacé l’arme de jet manuel utilisée principalement par les chasseurs magda- D. R. léniens, les armatures en silex de la flèche sont Reconstitution d’une chasse au renne au Paléolithique supérieur.

17 INVENTAIRE Projet Grand Lac Bilan de l’inventaire du patrimoine bâti

’inventaire du patrimoine bâti, réalisé sur PATRIMOINE BÂTI l’ensemble du territoire du Projet Grand LLac, s’est déroulé d’octobre 2000 à décembre 2003 dans le cadre de la deuxième convention patri- moniale passée entre le département de la Savoie et la région Rhône-Alpes. Un article paru dans le numéro huit de la Rubrique des Patrimoines de Savoie présente la méthode et les objectifs de cet inventaire. Par ailleurs, deux hors-série consacrés aux fours à pain ainsi qu’à la vigne et au vin présentent deux facettes de la richesse patrimoniale du territoire. Après deux ans et demi d’inventaire, nous pour- Agencement d’ouvertures, pierre de taille. rions dresser un bilan du patrimoine étudié, tou- Croquis Hervé Dubois. tefois, la quantité et la variété des éléments inven- toriés sont telles que nous préférons vous pro- Galet et chaux. poser une analyse d’un élément omniprésent sur coles ; des maisons d’habitation mitoyennes font tout le territoire : la FERME. face à des bâtiments agricoles séparés ; on obser- Le mot ferme définit une structure bâtie connue, ve encore des bâtiments agricoles mitoyens et des mais qui ne constitue pas un modèle unique d’ex- habitations séparées. ploitation agricole. Le premier cas de figure, le L’inventaire des fermes et bâtiments agricoles a plus courant, est celui d’une exploitation où habi- permis de repérer de manière précise les maté- tation, étable, fenil, cave, cellier… sont présents riaux de construction employés. sous un même toit. Dans le deuxième cas, l’ex- Présent sur l’ensemble du territoire, le calcaire ploitation comprend une maison d’habitation est le matériau dominant. Il est utilisé comme séparée des bâtiments agricoles. Le troisième cas pierre de taille pour les chaînages d’angle et les est celui de domaines ruraux organisés autour encadrements. Sommairement équarri il consti- Calcaire et chaux. d’une cour. Il se compose d’une maison de maître tue l’élément essentiel des maçonneries. Souvent (généralement reconnaissable à son toit pavillon associé à d’autres matériaux en plaine, il est en et à la régularité de ses ouvertures) et des fermes revanche quasiment exclusif dans les villages pouvant abriter, outre les bêtes et les récoltes, les situés à flanc de montagne. fermiers et ouvriers agricoles. La molasse, abondante dans les collines de l’Al- En-dehors de ces trois types d’organisation, il banais, est également à l’origine de la colline de existe de nombreuses configurations résultant . Quelques pendages affleurent sur les d’une adaptation empirique au morcellement des pentes de l’Epine et les coteaux de Chautagne. propriétés après héritage, à la configuration géo- Facile à tailler et sujette à une forte érosion, elle graphique du terrain ou à l’évolution des pra- n’est généralement utilisée que pour les chaînages tiques agricoles : de petites fermes regroupent les et les encadrements. Sa capacité à restituer la cha- Molasse. fonctions d’habitation à l’étage et les fonctions de leur en fait le matériau privilégié pour les voûtes production au rez-de-chaussée s’alignant sous un de fours et les cheminées. Néanmoins, certains même toit ; de grosses fermes accolées forment bâtiments sont entièrement construits en molas- une alternance d’habitations et d’espaces agri- se comme à La Motte-Servolex, au Bourget-du- Lac, à Tresserve ou à . Le pisé, fortement localisé en Albanais, s’obser- ve exceptionnellement dans les marais en aval Type d’avant-toit de Méry. avec espace de séchage, Chindrieux, Chautagne. Le bois entre dans la réalisation des charpentes, Croquis Hervé Dubois. des huisseries et de quelques encadrements. Il sert également pour les mantelages et bardages des granges et greniers. D’autres matériaux se rencontrent plus ponc- tuellement. Le tuf est présent dans les communes de Motz, Serrières-en-Chautagne et . Le galet roulé se rencontre à La Motte-Servolex et plus rarement en Albanais. Au XX e siècle, la brique, le métal et le ciment ont été employés tant pour des encadrements que pour des sur- élévations. Les fortes pentes de toit visibles sur l’ensemble du territoire attestent d’anciennes couvertures en chaume. Ce matériau n’apparaît plus que de

18 INVENTAIRE Exemple de ferme à cour ouverte, Saint-Girod, Albanais. Croquis Angélique Tavernier.

PATRIMOINE BÂTI

L’équipe sur le terrain…

manière exceptionnelle. L’ardoise, les tuiles du logis ou des appartements. Ils peuvent aussi (plates ou écailles) ont souvent été remplacées évoluer en gîtes ruraux, chambres d’hôtes, ate- par des tuiles mécaniques, du fibrociment ou liers d’artistes et d’artisans. Plus rarement, les bâti- de la tôle. ments agricoles sont maintenus en l’état pour être On note sur l’ensemble du territoire une volon- utilisés ponctuellement par un autre exploitant. té de distinguer les parties d’habitation des Lorsque l’exploitation agricole perdure, il est assez espaces agricoles. Les enduits, qu’ils soient à la rare qu’il n’y ait pas de modifications. Quelques chaux ou au ciment à pierre-vue ou couvrant, familles ont ainsi construit une maison neuve sont généralement plus soignés sur les murs de pour n’utiliser les anciens bâtiments que comme l’habitation. Sur certaines fermes, des chaînages espaces de production ou de stockage. A contra- en trompe-l’œil marquent la séparation entre les rio, d’autres propriétaires ont choisi de rester dans espaces d’habitation et de production. Les mai- leur habitation et ont délaissé les anciennes par- sons de maître sont traitées avec un certain sens ties agricoles au profit de bâtiments modernes et esthétique : chaînages en bossage, encadrements plus conformes aux normes sanitaires. Enfin, peints en trompe-l’œil. Des éléments décoratifs aujourd’hui, nombre de jeunes agriculteurs font ou votifs ornent certaines façades : niches conte- le choix de construire une habitation et des bâti- nant une statue de la Vierge ou d’un saint, croix ments agricoles neufs répondant mieux aux impé- apposées sur les portes, palines ouvragées, ratifs de la vie moderne. Façade bandes de rives et antéfixes travaillés… Sandrine Philifert, de ferme vigneronne, Les bâtiments agricoles fonctionnels et adaptés Jérôme Daviet, Cédrik Valet Grésy-sur-Aix. au terrain utilisent parfois la pente pour faciliter Croquis Isabelle Lucot. l’accès aux parties hautes. Disposant de peu de baies, les murs sont percés de petites aérations facilitant le séchage du foin. Sous l’avant-toit ou prenant appui sur les jambes de force et les solives, des espaces de séchage sont aménagés pour le maïs, les noix, les châtaignes ou le tabac. Ces bâtiments sont généralement soignés, de bonne qualité architecturale et réservent parfois de belles surprises : étables à colonnades à Verel- Pragondran et Albens, intérieurs tout en molas- se à Chindrieux. Des évolutions sont perceptibles. Dans bien des cas l’exploitation agricole n’existe plus : les bâti- ments sont parfois abandonnés, ou plus souvent entièrement transformés en habitation et les espaces de production deviennent des extensions

19 INVENTAIRE Le monument aux morts de 1914-1918 de

PATRIMOINE BÂTI

ne pyramide tronquée portant un cru- l’identité des communautés confrontées à la « bru- cifix, un combattant qui tourne son talisation » et à la « totalisation » de la guerre Bien plus que de Uregard vers le Christ… Le monument aux morts moderne et de la mort de masse : le choix des simples témoins de de Mouxy peut étonner le visiteur habitué aux mots et des images, qui peut donner lieu à des l’horreur des conflits du stèles banales ou, plus souvent encore, peu atten- débats, n’est pas indifférent et, contrairement à XX e siècle, les tif aux édifices érigés dans toutes les communes ce que l’on dit encore, la plupart des mémoriaux monuments aux morts de France au lendemain de la Grande Guerre. Il insistent moins sur l’exaltation guerrière que sur sont porteurs de serait pourtant faux de croire que ce monument le coût du combat imposé par l’agresseur alle- messages insistant, est une exception, mais sa singularité même doit mand : la pierre du souvenir évoque la douleur selon les cas, sur la intime des endeuillés et participe au travail de victoire, le sacrifice ou attirer l’attention sur ces lieux de mémoire où se encore plus rarement sont superposées les références à toutes les deuil ; elle est aussi appel à la paix, une paix l’absurdité de la guerre. guerres du XXe siècle. rendue possible – du moins veut-on le croire au De la simple plaque début des années 1920 – par le sacrifice des apposée sur un mur citoyens en armes. (La-Chapelle-du-Mont- Il importe dès lors de redécouvrir ce patrimoine, du-Chat) à l’œuvre de décrypter sans anachronisme le discours des d’artistes renommés (le contemporains et de mettre en évidence les sen- monument de La Motte- sibilités collectives qu’il révèle : c’est l’objet de Servolex, réalisé par le l’enquête qui a été entreprise il y a quelques sculpteur chambérien années avec des étudiants du département d’his- Mars-Valett), les monuments aux morts toire de l’Université de Savoie et qui doit débou- du territoire du projet cher bientôt sur la publication d’un ouvrage de Grand Lac ont été synthèse portant sur les deux départements. recensés dans le cadre Christian Sorrel des inventaires cantonaux.

« A la mémoire de leurs enfants morts pour la patrie, les habitants de Mouxy reconnaissants ».

Le monument de Mouxy, érigé en 1921, ne com- portait, semble-t-il, au départ que la stèle portant un crucifix, empruntée à la statuaire funéraire des cimetières. Le poilu est une adjonction posté- rieure, destinée à rendre plus concret le souve- nir de la guerre par la représentation réaliste du combattant, arme au pied, mais elle ne modifie nullement le sens de l’hommage de la commu- nauté villageoise, qui finance d’ailleurs le monu- ment par souscription (3561 francs pour un coût total de 5851 francs) : il souligne le poids du deuil individuel et collectif, mais proclame aussi le sens de l’épreuve en légitimant le sacrifice pour la patrie (inscription) et en affirmant sa foi dans la Un exemple de monument à la victoire : un poilu résurrection des morts, confiés à la miséricorde idéalisé sur un piédestal portant l’épitaphe « gloria du Christ en croix (iconographie). victoribus / Brison-Saint-Innocent à ses héroïques Chaque monument apparaît ainsi comme un dis- enfants morts pour la France/ ils ont bien mérité cours qui exprime, en dépit parfois de la banali- de la patrie ». sation de la production industrielle en série,

20 Le pisé en Albanais INVENTAIRE Inventaire du bâtiment rural

Banches pour le coffrage PATRIMOINE BÂTI à terre crue, technique du pisé. Croquis Angélique Tavernier. et inventaire a été réalisé sur les huit communes du canton d’Albens, en Cparallèle dans le cadre des inventaires cantonaux des territoires patrimoniaux du projet Grand-Lac. « Le pisé est un procédé En France, on retrouve le pisé essentiellement en par lequel on construit les maisons avec de la Dauphiné et Lyonnais. Plus rare en Savoie, il est terre, sans la soutenir essentiellement présent dans l’Avant-Pays Savo- par aucune pièce de yard, notamment en Val-Guiers. bois, sans mélange de Le pisé est une technique de construction qui paille, ni de bourre. Il consiste à damer de la terre crue à l’intérieur d’un consiste à battre, lit par coffrage. Le mur ne comporte pas d’armature de lit, entre les planches, à bois, contrairement au torchis. La terre, parfois l’épaisseur ordinaire des tamisée, est utilisée sans aucun ajout de paille. murs en moellons, de la Les coffrages utilisés, appelés banches, sont terre préparée à cet constitués de deux planches latérales reliées par effet. » François Ceintures, Cahiers de des clés transversales qui laissent des trous appa- l’école d’architecture rents dans les murs. Ces espaces sont générale- rurale,1790. ment décalés d’une assise sur deux afin d’éviter la formation de fissures verticales. On peut repé- teur déterminant de la présence de pisé dans la région. La molasse est la dernière formation sédi- Vient du mot lyonnais rer leur trace sur un mur nu grâce aux joints de piser, c’est-à-dire broyer mentaire déposée dans la mer alpine du Tertiai- chaux obliques qui la délimitent, ainsi qu’aux (XVI e siècle). strates formées par la hauteur du coffrage. re avant le soulèvement des Alpes. On y obser- Le mur en terre est monté sur un soubassement ve plusieurs niveaux : en pierre, d’une hauteur moyenne de 80 cm, • En profondeur la molasse sableuse ou gréseu- de manière à protéger le mur des remontées d’hu- se, sorte de sable cimenté qui présente une très midité. Les murs, d’environ 60 cm d’épaisseur, forte cohésion des éléments pouvant être débi- sont construits en faisant le tour de la maison, par tée en blocs. hauteurs successives. • En surface, la poudingue de la molasse consti- La terre mise en œuvre ne doit pas être trop tuée d’un mélange de galets et de molasse argi- humide (risque de fissures de retrait), ni trop leuse, formant un béton naturel. C’est cette terre sèche. Elle manquerait de cohésion. Les murs de qui est utilisée pour la construction en pisé. pisé sont souvent protégés des intempéries par Elle doit être idéalement dosée en graviers, sables, un enduit à la chaux, laissant respirer le mur et limon et argile, de façon à former une masse le rendant difficilement décelable par rapport à homogène une fois damée. Elle offre une diver- un mur en maçonnerie de pierre. sité de textures et de couleurs selon le lieu d’ex- Les avantages de la construction en pisé sont traction : du gris clair au rouge en passant par des connus dès 1790, date d’une tentative de relance ocre-jaune plus ou moins intenses. de cette technique par Francois Cointeraux. Son Les qualités écologiques de la terre en font un objectif était d’améliorer la qualité de l’habitat matériau très contemporain en cohérence avec rural et de le protéger du fléau des incendies. La les préoccupations architecturales actuelles. construction en pisé offrait à cette époque de Angélique Tavernier nombreux avantages : rapidité de construction, coût minime, économie de bois, bonne isolation thermique, résistance aux incendies, solidité et durabilité, etc... Une grande majorité des maisons de pisé du canton d’Albens a été construite aux alentours de 1870. Plusieurs hypothèses ont été émises quant à l’émergence de cette technique de construction, qui concorde notamment avec l’arrivée de tra- vailleurs italiens dans la région, mais aucune n’a réellement été vérifiée. Tout porte à penser que l’utilisation de la terre dans une région où la pierre abonde (calcaire et molasse) est due à la facilité de mise en œuvre et surtout à l’économie de ce type de construction. La composition de la terre, la molasse, est un fac- Façade de ferme, pisé, Albens. Croquis Angélique Tavernier.

21 EXPOSITIONS Fin des histoires ? Une traversée plurielle de l’art contemporain, collection FRAC Rhône-Alpes

La saison culturelle d’automne-hiver à d’exposition « l’ombre d’eau » de Giuseppe Penone ACTUALITÉS Chambéry se déroule à l’ère de la décou- attend avec impatience le regard du visiteur et le Lverte de la création artistique – 10 lieux durant Lavier avec Ronce II le surprendra au détour trois mois offrent aux visiteurs de multiples d’une salle. facettes de l’art contemporain. Le Musée des Une autre œuvre, démontrant que les fonds de Beaux-Arts en est la colonne vertébrale avec plus la ville sont riches en trésors parfois oubliés du 2 de 600 m consacrés à ces découvertes. Plus de public : comment ne pas s’arrêter un moment 40 artistes parmi les plus connus des années 60 devant la petite façade du Musée des Beaux-Arts, à 1990 sont ainsi présentés au public. côté abbé de Mellarède et des célèbres cafés de Cette exposition s’est voulue didactique, regrou- Chambéry, pour y redécouvrir « le fantôme de pant les grands noms par styles, écoles ou cou- Malévitch » de François de Morellet que les cham- rants. Ainsi les salles du musée nous font par- bériens ignorent trop souvent en passant devant. courir la Figuration narrative (Adami, Arroyo, Ran- Pour le ravissement du public, il ne faut pas cillac) qui émerge en France dès 1964, puis la oublier l’artothèque des musées -située au rez- Figuration libre (Garouste, Blais, Di Rosa) à partir de-chaussée du Musée des Beaux-Arts et en accès des années 1980. libre- où sont présentées en rotation de nom- La visite se prolonge avec un espace entier consa- breuses gravures et lithographies proposées en cré à l’Art minimal (Buren, Toroni…) et Concep- prêt. Ainsi, le public pourra découvrir parfois les tuel avec un détour par les créations de l’Arte mêmes artistes à travers des œuvres différentes Les Allobroges, povera, courants qui voient le jour dans le milieu ou d’autres créateurs appartenant à l’un des cou- Gaulois et Romains des années 60 mais qui se détermine en fonction du Rhône aux Alpes rants ou l’une des préoccupations de la création des perspectives différentes des précédentes pré- contemporaine. Avoir chez soi pendant plusieurs occupations évoquées. L’exposition, conçue semaines un Morellet, un Combas, un Errò, un par le Musée Dans la dernière partie de l’exposition, les années Ben est une opportunité à ne pas manquer. dauphinois en quatre-vingt, il est alors bien difficile de situer les De multiples lieux chambériens vibrent à l’heu- collaboration avec de artistes novateurs dans des courants « sectorisés ». re de la création contemporaine : l’Espace Mal- nombreux archéologues Chacun à une telle individualité, une telle force raux, le théâtre Charles , la Cité des Arts, la et en partenariat avec de création qu’il en devient à lui seul son propre Galerie du Larith, le Cristal, le Lycée Louis les musées alpins, est courant. Il est vrai que des préoccupations com- Armand, le Forum et la bibliothèque Georges actuellement présentée munes peuvent rapprocher les artistes les uns des au Musée savoisien de Brassens. Des conférences, des visites, des ate- autres : le travail sur la mémoire, les recherches liers pédagogiques y sont organisés pour le plus Chambéry. Elle tente de sur les significations de l’architecture comme reflet dévoiler l’origine et large public. Un ouvrage est aussi en vente au d’une pensée politique, les questionnements sur l’histoire des Musée des Beaux-Arts. Allobroges, littérale- le temps et l’individu dans le monde… mais les Chantal Fernex de Mongex ment, ces « gens venus expressions en sont si diverses qu’il est difficile d’ailleurs », installés sur de pouvoir les regrouper. un vaste territoire, de En effet, comment classer un Ben ou un Favier, Jusqu’au 9 février 2004, au Musée des Beaux-Arts, Genève jusqu’à Vienne un Boltanski ou un Luthi ? En outre à partir des place du Palais de Justice à Chambéry. qui deviendra une des années 1980, les supports dits « classiques » de la Tous les jours sauf mardi et jours fériés grandes capitales de création semblent voler en éclats, la photogra- de 10h à 12h et de 14h à 18h. l’empire romain. phie prend une part de plus en plus importante Un grand nombre chez certains, d’autres privilégient les assem- d’objets, souvent blages, les collages, la sculpture ou l’accumula- spectaculaires, ont été pour la première fois tion de divers matériaux ou encore la vidéo, les rassemblé dans cette installations ou même les performances. exposition. L’exposition du Musée des Beaux-Arts propose un cheminement fait de repères tels des clefs d’ac- Jusqu’au 1er mars 2004, cès afin de mieux appréhender, comprendre, au Musée Savoisien connaître et apprécier les œuvres d’art contem- square de Lannoy porain. En revanche ces quinze dernières années de Bissy à Chambéry. ne sont pas directement abordées. Mais vous Tous les jours sauf pouvez aller les découvrir en visitant les autres mardi et jours fériés lieux consacrés à cette manifestation comme à la de 10h à 12h et de 14h à 18h. Cité des Arts avec ses vidéos musicales ou encore le Cristal avec l’installation de Tania Mouraud. Cette manifestation a permis de faire sortir des réserves des collections des Musées de Chambé- ry trois magnifiques œuvres trop peu connues du public. En effet, la « sculpture-pavillon » de Max Bill (1980) se présente dans toute sa majesté au Sculpture-pavillon, Max Bill, 1980, rez-de-chaussée du musée. En accédant à la salle collection Musées de Chambéry.

22 Notes de lecture LIVRES

de rappeler les intentions utilisées avec la carte éditée d’Annecy (04/04-09/04), de ses fondateurs, et parallèlement à ce guide. le Musée d’Art et d’Histoire d’identifier les actions qui Cet ouvrage ravira tous les de Genève (11/04-02/05) et ont transformé la montagne amoureux de la montagne le Musée de Saint-Romain- en parc national. C’est l’un par la richesse de la en-Gal/Vienne(2005). des objectifs de ce livre, qui documentation présentée et L’histoire des Allobroges est retrace minutieusement les par la clarté de son exposé complexe. C’est celle d’un étapes de la genèse et de qu’il s’agisse de patrimoine peuple celte, de sa polychromie initiale de ces l’installation du parc, naturel ou culturel. conquête, puis de son œuvres, parfois effacée, depuis les plus anciens assimilation, parfois permet de se rendre La Sainte-Chapelle du projets, dans les années difficile, par les Romains. compte de la richesse château de Chambéry vingt, jusqu’à l’affaire de la Les différents aspects de la chromatique. Pietà, Christ par Michelle Santelli, Vanoise, au début des vie politique, sociale et en majesté, Christ en croix, in L’Histoire en Savoie- années soixante-dix. religieuse sont ici nombreuses Vierges à e Patrimoine – 12 L’auteur a interviewé de reconstitués : organisation l’Enfant, cohortes de La chapelle fut élevée au nombreux artisans du parc, du territoire, évolution saints… témoignent du e début du XV siècle pour qu’il s’agisse de visionnaires culturelle, religion et formidable élan de foi qui a affirmer la grandeur et le qui l’ont imaginé, des coutumes funéraires. Sans animé cette époque, dont prestige d’Amédée VIII, gestionnaires chargés de sa oublier notre imaginaire l’art gothique est le témoin. comte, puis premier duc de mise en place, ou encore collectif où les Allobroges Savoie. Appelée Sainte- des scientifiques. Le lecteur Forêts, forestiers et sont devenus nos ancêtres Chapelle, dès lors que le trouve ainsi rassemblées bûcherons en Savoie idéalisés ! C’est un Saint-Suaire y fut déposé en une histoire du parc et les depuis 1860 panorama chronologique et 1502, son destin fut d’être mémoires, plurielles, par Pierre Guglielmone, thématique qui nous est ici voué à la dévotion de la vivantes et toujours in l’Histoire en Savoie n°6 proposé enrichis de nom- précieuse relique. Cette agissantes, d’hommes nouvelle série, 2003, 15 e breuses cartes, documents dernière fut perdue en ayant étroitement collaboré « La forêt est, en Savoie, photographiques et 1578 au profit de . à sa construction. Quand, un élément essentiel du reconstitutions figurées. La Sainte-Chapelle est de par qui et pour qui le parc paysage et de la vie rurale. style gothique flamboyant, national de la Vanoise a-t’il Pourtant, la perception à l’exception de la façade été créé ? L’auteur se garde qu’en ont eu les savoyards Voyage d’histoire reconstruite dans le style bien de fournir à ces a varié avec les générations. en pays de Yenne baroque au milieu du questions une réponse Comment son exploitation par Joseph-René Clocher, e XVII siècle. Les vitraux, unique, préférant dégager a-t’elle évolué face aux disponible auprès de témoignage exceptionnel les aventures individuelles mutations de la société et à l’Office du Tourisme de l’art de la Renaissance, et collectives qui ont donné l’emprise croissante d’un de Yenne occupent une place un visage au parc… » état de plus en plus vigilant ISBN 2-9500920-0-4 importante dans la et soucieux de 15 e symbolique architecturale, réglementation ? Cet ouvrage est le fruit de puisqu’ils permettent à la Un jeune chercheur, l’attachement à un pays, lumière divine de pénétrer historien mais aussi fils de Sculpture gothique celui de l’auteur, qu’il nous dans le bâtiment. Ils forestier, s’est lancé avec dans les États de Savoie fait découvrir avec passion, possèdent également une passion sur ce sujet et nous 1200-1500 rassemblant les données valeur pédagogique par fait ainsi mieux connaître ouvrage collectif, éparses existant sur le l’iconographie qu’ils l’histoire récente des forêts éditions Comp’Act, 2003, territoire. Présentation du développent sur le thème des deux départements ISBN 2-87661-294-1 cadre géographique, de la Passion du Christ. savoyards, dans un ouvrage 20 e évocation des périodes Cet ouvrage de petit format à la fois rigoureux et L’exposition Tra Gotico e préhistorique, gallo- se veut à la fois un bref accessible. » Rinascimento, scultura in romaine, médiévale, rappel de l’histoire de la Le guide du Parc Piemonte qui s’est tenue du moderne et contemporaine, Sainte-Chapelle mais national de la Vanoise, 2 juin au 4 novembre 2001 les différentes étapes également un guide fort Paysage, Nature, Culture, à Turin, a été l’inspiratrice historiques du pays de utile pour la visite du par le Parc National de la de l’exposition Sculpture Yenne nous sont ainsi bâtiment. Vanoise, éd. Glénat 2003. gothique dans les États de racontées de façon riche Ce guide, édité par le Parc Savoie. 1200-1500 qui et vivante. National de la Vanoise, est s’est tenu successivement Une mise en page originale destiné à la découverte du au Musée savoisien de et une iconographie milieu protégé qu’est le Chambéry (6 juin-1er abondante rendent ce livre parc. Son territoire y est septembre 2003), puis au de vulgarisation très découpé en quatre zones Musée-Château d’Annecy agréable à lire. afin d’appréhender plus (octobre 2003-janvier 2004). Vinciane Neel clairement la complexité Les Allobroges. Le catalogue de cette des données. Chacun de Gaulois et Romains exposition s’ouvre sur une ces espaces nous est du Rhône aux Alpes présentation générale du présenté sous l’angle du sous la direction de rôle tenu par les comtes de paysage, de la nature et de Jean-Pascal Jospin, Savoie, portiers des Alpes Histoire et mémoires la culture. L’illustration en Infolio éditions, 2002, et princes d’Empire. du parc national de la est abondante et d’une très ISBN 2-88474-102-X, 32 e Une brève histoire du Vanoise. 1921-1971 : grande qualité. Cet ouvrage est le catalogue patrimoine sculpté en la construction Au-delà de cette partie de l’exposition Les Savoie et Haute-Savoie par Isabelle Mauz, édition théorique, l’ouvrage se veut Allobroges. Gaulois et termine cette présentation de la Revue de géographie un guide pratique pour le Romains du Rhône aux générale. Ce ne sont pas alpine, n° hors-série, coll. randonneur qui y apprend Alpes présentée moins de 32 œuvres Ascendances, 2003, 18 e à décrypter un paysage, à successivement par le représentatives de la « En juillet 1963, le premier se repérer par rapport à Musée dauphinois de sculpture gothique qui nous parc national français est une carte… Des fiches de Grenoble (10/02-09/03), sont ensuite présentées de créé, dans le massif de la randonnées amovibles le Musée savoisien de monographie en Vanoise. Quarante ans complètent le discours Chambéry (10/03-02/04), monographie. Sculptées en après, le temps est venu général. Elles peuvent être le Musée–Château bois ou en pierre, la

23 Monuments & édifices p. 3 et 4 Architecture p. 5 à 7 Antiquités et objets d’art p. 8 et 9 Collections départementales p. 10 Dossier : Pays et Villes d’art et d’histoire p. 11 à 14 Archéologie p. 15 à 17 Inventaire du patrimoine bâti p. 18 à 21 Actualités expositions p. 22 Livres p. 23