REPPOBLIKAN’I MADAGASIKARA

Tanindrazana -Fahafahana-Fandrosoana

UNIVERSITE DE TOLIARA ..………………..

FACULTE DE DROIT , DE L’ECONOMIE, DE GESTION ET DE LA SOCIOLOGIE. ………………… DEPARTEMENT DROIT MEMOIRE DE FIN D’ETUDES DU SECOND CYCLE EN VUE DE L’OBTENTION D’UN DIPLOME DE MAITRISE EN DROIT. OPTION : CARRIERE JUDICIAIRE ET SCIENCES CRIMINELLES

THEME

««« L’INVIOLABILITE PARLEMENTAIRE OU DE LA PROTECTION DES PARLEMENTAIRES EN MATIERE REPRESSIVE »»»

Présenté par TSITOHERY Patrick Georges Jury : Président : Monsieur AN DRIAMITSIRIONY Mamy , Maître de Conférence à l’Université de Fianarantsoa ; Encadreur : Madame NARAZANA Eudoxie , Enseignant d’E nseignement Supérieur à l’Université de Fianarantsoa ; Assesseur critique : Madame AHOLY Line Sara , Enseignant d’ Enseignement Supérieur à l’Université de Fianarantsoa.

29 Mai 2012

Année Universitaire : 2007 - 2008

INTRODUCTION.

En vue de permettre l’instauration de la démocratie dans un Etat donné, la reconnaissance des libertés de chaque citoyen est exigée. Il en est ainsi de la liberté de parole, de la liberté d’association, etc. Et à ce titre, le représentant du peuple (ou le parlementaire) qui qu’il a lui même élu se doit d’être doté de toutes ses libertés. Cette notion des parlementaires est une institution inconnue par nos aïeux qui vécurent avant l’annexion de par l’empire colonial français. En effet, les parlementaires sont constitués par des personnes élues spécialement par un peuple, pour le représenter au sein du Parlement. Cette représentation s’effectue dans le domaine de la politique. Et dans l’exercice de cette fonction, les parlementaires peuvent se heurter ou heurter les positions des membres du gouvernement. Et cette position peut constituer des causes ou des prétextes de poursuites judiciaires à leur égard. Donc, afin de protéger ces parlementaires, ils doivent être pourvus de privilège qui est l’inviolabilité parlementaire. On appelle inviolabilité parlementaire, le « privilège qu’ont les parlementaires d’échapper aux poursuites intentées pour des actes étrangers à l’exercice de leur mandat : poursuites pénales pour crime et délits… »1 Ce privilège reconnu presque par tous les Etats démocratiques, sont à différencier de la notion voisine, qui est l’immunité parlementaire. L’immunité parlementaire consiste en des prérogatives qui mettent les parlementaires à l’abri des poursuites judiciaires, en vue d’assurer le libre exercice de leur mandat 2. En fait, l’immunité parlementaire recouvre deux notions telles que l’irresponsabilité et l’inviolabilité parlementaires 3. D’un côté, l’irresponsabilité met le parlementaire à l’abri de toute poursuite civile ou pénale pour les opinions ou votes émis dans l’exercice de ses fonctions. Elle a pour but d’assurer la liberté d’expression et de décision du parlementaire 4. _ Celle-ci protège les parlementaires aussi bien contre les poursuites civiles que contre les poursuites pénales.

1 Voir Lexique des termes juridiques, 14 ème édition, Dalloz, 2003, p 331 2 Cf. Lexique des termes juridiques, op. cit., p 307 3 Aux termes de l’article 8 de la loi organique n° 93-004 du 21 janvier 1994, les députés bénéficient, conformément à l’article 69 (article 70 aujourd’hui) de la Constitution de 1992, révisée en 1998, des garanties qui portent le nom d’immunités parlementaires et qui sont de deux ordres : l’irresponsabilité parlementaire et l’inviolabilité parlementaire. 4 Aux termes de l’article 70, alinéa premier de la Constitution du 18 septembre 1992 De l’autre côté, l’inviolabilité parlementaire protège le parlementaire contre d’éventuelles manœuvres du pouvoir ou de ses adversaires. Contrairement à l’irresponsabilité, elle présente des caractères spécifiques. Son domaine est écarté de tout rattachement à l’exercice du mandat, puisque les autres sont déjà couverts par l’irresponsabilité ; elle ne joue qu’à l’égard des poursuites pénales pour crime ou délit ; elle exclut de ce fait les poursuites pour contraventions ou les poursuites civiles ; celles qui portent atteinte à l’honorabilité. En fin de compte, on peut dire aussi que les deux notions se rapprochent. Car chacune d’elles vise à protéger les parlementaires, quelque soit la raison. Ce thème présente des intérêts sur le plan théorique et pratique. D’abord, l’étude de l’inviolabilité parlementaire permet de mesurer la portée de la notion d’inviolabilité parlementaire. En effet, certes les Constitutions successives ont essayé d’apporter une délimitation de ce privilège. Mais à l’analyse, des divergences d’opinion peuvent apparaître. Ensuite sur le plan pratique, l’étude de ce thème permet de connaître l’application de ce système par les régimes successifs. Etant une règle constitutionnelle, son respect par les Gouvernants permet non seulement de mesurer l’application de l’Etat de droit, mais aussi de la démocratie. Comment alors, à travers ce demi-siècle d’indépendance, l’inviolabilité parlementaire malgache a-t-elle évolué et quelle réaction les pouvoirs successifs à Madagascar ont-ils eu face à l’application de ce régime dérogatoire issu d’un pouvoir constitutionnel ? Ainsi pour analyser ce devoir, nous allons l’étudier successivement : La première partie traitera le régime dérogatoire de l’immunitaire parlementaire ; La deuxième partie consacrera la mise en œuvre du régime dérogatoire par les Républiques successives et le régime dérogatoire qui existe dans d’autres pays.

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CHAPITRE PRELIMINAIRE : NOTIONS GENERALES SUR LES PARLEMENTAIRES.

Les parlementaires sont des personnes qui pendant leur mandat, représentent les peuples, qui les a élus. Par conséquent, ils vont être ceux qui vont parler au nom de ces peuples, en défendant leurs intérêts. Et dans leur intervention, les parlementaires peuvent se heurter aux intérêts des gouvernants en place. Et vu ces intérêts qui peuvent être contradictoires, l’existence d’un régime dérogatoire, les mettant à l’abri de toute persécution de la part des représentants de l’Etat, est nécessaire. D’où, des interdictions d’agir, ainsi que l’exigence des autorisations préalables. La connaissance de ces exigences nécessite d’ailleurs l’étude sommaire de l’histoire des parlementaires malgaches. L’histoire des parlementaires malgaches, comme la plupart des pays africains, n’a pris naissance que lors de la construction de la Communauté française de 1958. Ainsi, est-il nécessaire de se placer dans deux époques, pour bien distinguer les parlementaires malgaches de l’ancien empire colonial français, avec ceux de la République Malgache.

A – LES PARLEMENTAIRES MALGACHES AVANT LA CHUTE DE LA IV ème REPUBLIQUE FRANCAISE.

L’histoire des parlementaires malagasy commence avec la fin du régime socialiste français de la quatrième République. Néanmoins, sous l’empire colonial, les Malagasy avaient déjà leurs représentants au sein du Parlement de l’empire français. C’est grâce, au programme du « Conseil national de la Résistance », qui demandait d’accorder aux originaires des pays d’Outre-mer (T.O.M), les droits politiques des citoyens français, que le Gouvernement provisoire français, a octroyé 2 sièges sur 4 aux Malagasy lors des élections pour la première Constituante du 21 octobre 1945 5. Ces deux représentants dont RAVOAHANGY et RASETA (Joseph) étaient déjà appelés « les députés malgaches 6 ». Ils ont été déjà connus candidats aux comités de soutien pour l’indépendance « intégrale et immédiate contre celle prévue par la Charte de San Francisco. 7

5 Voir Alain Spacensky, Madagascar, 50 ans de vie politique (de Ralaimongo à Tsiranana), Préface de M. Hubert Descamps. Nouvelles éditions latines, Paris vi ème 1970, p 40 6 Omaly sy anio n°11, Janv. – Juin 1980, p 16 7 Idem, p13. 3

Avec la nouvelle Institution de l’Union Française, qui est née officiellement avec la Constitution de la 4 ème République, du 27 octobre 1946 8 (article 60), Madagascar est devenu parmi les Territoires d’Outre-mer (T.O.M), avec ses représentants « les députés malgaches » au sein de l’Union Française composée, par moitié, de membres représentant la France métropolitaine et par moitié 9, de membres représentant les départements (DOM) et les territoires d’outre-mer ( TOM) et les Etats associés. 10 Ainsi, Madagascar n’avait- il que 5 députés lors des élections législatives du 10 novembre 1946, dont 3 Malagasy 11 , à savoir RASETA (côte Ouest), RAVOAHANGY () et RABEMANANJARA 12 (côte Est), et 2 Européens à l’Assemblée nationale 13 ». Même si les députés malgaches ne constituaient pas encore à cette époque une Assemblée Nationale de l’Ile, la présence de certains d’entre eux constituait déjà une menace pour l’Autorité de l’Union. D’où l’apparition des premières arrestations des députés membres du parti M.D.R.M (Mouvement Démocratique pour la Rénovation de Madagascar) au début du mois d’Avril 1947 14 , pendant l’insurrection. Puis, après l’adoption de la loi-cadre du 13 juin 1956, les territoires d’Outre-mer dont Madagascar se dotaient d’une plus grande autonomie administrative 15 . Cette loi leur permet non seulement de participer aux élections, grâce au suffrage universel et de siéger dans des Assemblées au pouvoir délibérant mais encore d’occuper des postes de responsabilité dans l’Administration 16 . Selon les décrets d’application de la Loi-cadre pris en Février et Mars 1957 17 , la Loi cadre du 23 Juin 1956 ou la Loi Defferre donne un nouveau statut des T.O.M. En effet, chaque Territoire d’Outre-mer est doté de « l’Assemblée Territoriale élue au suffrage universel ». Et cette élection s’accentue par la provincialisation de Madagascar, avec ses six

8 Omaly sy anio op. cit., 2 ème paragraphe, 1 ère phrase, p 14 9 Cf. article 66 de la Constitution de la République française du 27 octobre 1946 10 Par exemple le Viêt-Nam, omaly sy anio, op. cit., note de bas de page (31), p14 11 11 Voir Alain Spacensky, Madagascar, 50 ans de vie politique, op.cit. p 54

12 Omaly sy anio, op. cit., note de bas de page (42) p16 13 Cours de droit constitutionnel dispensé par Rabemila. 14 Omaly sy anio, op. cit, p16 15 Idem, p30 16 Voir GRIMAL (H) : La décolonisation, Paris, Armand Colin, 1965, p.348 17 Omaly sy anio (Hier et aujourd’hui), Op. Cit. p31 4 provinces 18 ayant chacune d’elles « d’une Assemblée provinciale » et qui à leur tour, élisaient l’Assemblée représentative.

B – LA SITUATION DES PARLEMENTAIRES MALAGASY APRES LA CHUTE DE LA IV ème REPUBLIQUE FRANCAISE.

La chute de la 4 ème République Française et le retour au pouvoir du Général De Gaule, entraîne un changement de régime sur la politique, (5 ème République Française) au sein du gouvernement français. En effet, il résulte de l’élaboration d’une nouvelle Constitution, celle du 4 octobre 1958, fondant la 5 ème République. Cette Constitution propose aux T.O.M une innovation de l’Union Française sous la forme d’une communauté franco-africaine.19 Après que les Malgaches aient voté à 77% 20 des suffrages le référendum du 28 septembre 1958 et acceptant le statut d’Etat autonome, en proclamant la République (14 octobre 1958), le Congrès des Assemblées provinciales en préparant provisoirement la République adopte la Loi Constitutionnelle n°1 du 14 octobre 1958, et se transforme en Assemblée Nationale à la fois législative et constituante. C’est à partir de cette date que l’histoire de parlementaires malagasy commença réellement avec la proclamation de la République malgache et la déclaration par le Haut commissaire, de la caducité de la Loi d’annexion du 6 avril 1896. Puis, deux jours après, 16 octobre 1958, Norbert ZAFIMAHOVA est devenu Président de l’Assemblée Nationale constituante et les premières élections législatives se déroulaient le 4 septembre 1960, avec la domination du parti présidentiel « le Parti Social Démocrate ou P.S.D ». Pendant la première République, le Parlement malagasy était bicaméral, composée de l’Assemblée Nationale et du Sénat. L’Assemblée Nationale comprend 107députés élus pour cinq 5 ans ; le Sénat comprend 54 Sénateurs désignés pour six 6 ans, dont 36 élus au suffrage indirect à raison de 6 par province, 18 Sénateurs désignés par le gouvernement pour représenter les forces économique, sociale et culturelle. Ce Parlement était basé sur le principe inégalitaire, puisque le Sénat avait moins de pouvoir que l’Assemblée Nationale, notamment l’institution de la 3 ème lecture par l’Assemblée Nationale de Lois en cas de désaccord entre elle et celui de son homologue. La première législature de l’Assemblée Nationale (1959-1960) était dirigée par son Président

18 Avant cinq, le nombre des provinces de Madagascar est, à partir de ce moment là devenu six par la création de la province de Diégo Suarez. 19 Il s’agit du référendum du 28 Septembre 1958 qui a pour objet l’adoption du projet de Constitution mais qui revêtait une signification particulière pour les T.0.M. Approuver ou non le projet : c’est accepter ou refuser la communauté prévue par la nouvelle Constitution française et le rejet signifie l’indépendance immédiate). 20 Idem 5

Jules RAVONY ; puis la deuxième et la troisième législature étaient présidées par Alfred NANY. Cet organe du pouvoir législatif avait continué à exister, jusqu’à sa disparition avec la remise du plein pouvoir par le Président de la République , au Général RAMANANTSOA Gabriel, le 18 Mai 1972. Après sa dissolution, celui-ci était remplacé par le Conseil National Populaire du Développement (C.N.P.D), une institution nouvellement créée et dirigée par son Président le Pasteur FETY Michel. Ce n’était pas un organe législatif au sens strict du terme ; c’était simplement un organe purement consultatif élu en 1973, qui est chargé de donner son avis sur le projet qui lui était soumis par le gouvernement. C’était aussi un organe chargé pour assurer la communication de dialogues entre le peuple et le gouvernement. C’est pourquoi, à cette époque le Gouvernement s’érigeait à la fois en pouvoir législatif et exécutif. L’Ordonnance du 13 Juin 1975 avait encore maintenu cette Institution, pendant le directoire militaire, de la période de la transition. Le nouveau Parlement de la 2 ème République (République Démocratique Malagasy ou R.D.M) diffère de celui du précédent. Puisque c’est un parlement monocaméral, formé uniquement par la seule Chambre basse, appelée « l’Assemblée Nationale Populaire » qui fut élue le 20 Juin 1977. Cette nouvelle Assemblée était dominée par le parti majoritaire : le parti présidentiel « l’A.RE.MA ou le parti de l’Avant-garde de Révolution Malgache ». Etant donné que, sur 137 députés élus au suffrage universel direct, 110 députés au moins sont issus du parti A.RE.MA 21 . C’était un législatif rationalisé marqué par la forte concentration de pouvoir de l’exécutif dans le domaine réglementaire. Elue pour un mandat de cinq ans au suffrage universel direct, cette Assemblée, selon la Constitution de l’époque, était un organe d’Etat, délégataire suprême du pouvoir législatif. Sa présidence était dirigée par Lucien Xavier Michel ANDRIANARAHINJAKA restant toujours au siège jusqu’à la chute du régime en 1991. L’effondrement du régime socialiste est marqué par l’entrée de Madagascar dans une crise politique, en Mai 1991 et qui finit par la signature de la Convention du 31octobre 1991 pour la sortie de la crise. Cette Convention avait créé au sein des Institutions de la H.A.E. (Haute Autorité de l’Etat), à la place du pouvoir législatif un Comité de Redressement Economique et Social (C.R.E.S. 22 ), qui était dirigé par deux coprésidents, à savoir le Pasteur ANDRIAMANJATO Richard et le Président national du parti M.F.M en la personne de MANANDAFY RAKOTONIRINA, qui n’était qu’un organe purement consultatif. Puisque

21 http://fr.wikipedia.org/wiki/Assemblée-nationale(Madagascar) 22 La CRES était composé par 130 membres représentants issus des divers groupes (socioculturel, économique etc.) 6 qu’il était consulté sur Ordonnance portant Loi de finance et élaboration de tout plan de développement général ou sectoriel. Quant à la troisième République, la première législature était remarquée par l’existence d’une pléthore des partis politiques. Car, la majorité y était difficile à trouver ; et la majorité de tendance dépend de la situation politique existante. C’est pourquoi, on parlait à l’époque de la « majorité à géométrie variable ». Cette première législature était dirigée par le Pasteur Richard ANDRIAMANJATO MAHITSISON et elle a duré cinq ans (1993-1998). Pour la deuxième législature, l’élection des 150 députés s’est déroulée le 17 mai 1998, avec un mandat de cinq ans, et d’une présidence dirigée en tête par son Président le Professeur Ange ANDRIANARISOA. Mais, cette Assemblée n’a pas terminé son mandat du fait de l’événement populaire de 2002 ; et une nouvelle présidence a été formée par Monsieur Auguste PARAINA qui a conservé son poste jusqu’au mois d’octobre 2002. Après la deuxième législature, l’élection législative du 15 décembre 2002 donna naissance à une nouvelle Assemblée nationale, troisième législature composée des 160 députés, avec une présidence, dont en tête de laquelle, se place son Président en la personne de Monsieur LAHINIRIKO Jean, qui est destitué par ses pairs en juin 2006 et remplacé par son homologue MAHAFARITSY Samuel RAZAKANIRINA qui menait le reste de la vie de sa Chambre jusqu’à sa dissolution par le Président de la République , en août 2007. Enfin, la dernière Assemblée nationale est élue le 23 septembre 2007, avec ses 117 députés, et un nouveau président maître Jacques SYLLA. Et cette dernière Assemblée, à son tour ne termine pas son mandat, du fait de la crise, qui a débuté en mars 2009 23 .

Si telle est l’histoire des parlementaires malgaches, il s’avère intéressant de connaître comment s’applique la protection des députés tout au long de leur mandat. En effet, puis que depuis les périples de l’histoire de l’Assemblée, la liberté effective que bénéficiaient ces parlementaires dans l’exercice de leur fonction, doit être mise en relief. Ce qui implique que si l’inviolabilité parlementaire a été instituée celle-ci a pour objectif de leur permettre de s’exprimer en défendant les intérêts de la population qui les a élus.

23 Lors de la déclaration officielle du Président de la Transition, en la personne d’ qui mena la marche vers la quatrième République Malagasy, Une nouvelle élection législative et constituante provisoire sera prévue le 20 mars 2010 7

Aussi, cette inviolabilité va s’analyser en un régime dérogatoire constituant un véritable rempart pour d’éventuelle artillerie des tenants du pouvoir, qui voudraient leur, sinon « fermer » la bouche ou du moins leur limiter la parole.

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PREMIERE PARTIE : UN REGIME DEROGATOIRE.

Si en général, la loi est instituée, sans discrimination pour tous, certaines personnalités, peuvent cependant se soustraire, à cette égalité de traitement, en raison de leur titre que la loi même leur a fait bénéficier. C’est le cas des parlementaires qui pour être protégés du libre exercice de leur mandat, bénéficie d’un régime dérogatoire. Le régime dérogatoire consiste à imposer aux organes principaux de la Justice et à ses organes auxiliaires (agents de la police) des interdictions sur leurs actes de procédure pénale, au profit des parlementaires (Chapitre I), dont en franchir requiert la réunion d’une certaine condition ou des formalités (chapitre II).

CHAPITRE I : DES INTERDICTIONS Ces interdictions consistent en un domaine bien déterminé dont au-delà duquel, la protection des parlementaires sera écartée.

SECTION 1 : LE DOMAINE DES INTERDICTIONS

Ce domaine comprend deux séries d’actes, à savoir les actes de la Justice d’une part et les actes infractionnels d’autre part.

§ 1 : QUANT AUX ACTES DE LA JUSTICE.

Il y a beaucoup d’actes que les autorités judiciaires entreprennent et décident, dans le domaine du ressort de leur compétence. Mais, la Constitution n’interdit que les actes d’arrestations et de la poursuite 24 .

A – L’ARRESTATION.

L’arrestation peut se définir comme suit : « un fait d’appréhender une personne, en ayant recours à la force si besoin est, en vue de sa comparution devant une autorité judiciaire ou administrative, ou à des fins d’incarcération 25 ». Sur le plan de procédure, l’arrestation résulte de la production et de l’exécution du quatrième mandat (mandat d’arrêt) délivré par juge d’instruction ou un magistrat du parquet 26 . En effet, le mandat d’arrêt est l’ordre donné à la force publique de rechercher un inculpé ou un prévenu et de le conduire à la maison d’arrêt indiqué sur le mandat pour y être

24 Cf. article 69 alinéas 2 et 3 de la Constitution de du 18 septembre révisée en 1998. 25 Lexique des termes juridiques ,14 ème édition Dalloz, 2003 26 Cf. article 100 alinéa 4 du CPPM ; 9 reçu et détenu. Il est de ce fait, l’un des moyens entre les mains de la Justice pour s’emparer d’une personne du fait de ses actes. Cependant, muni ou non d’un mandat d’arrêt, la Constitution de la République prohibe l’arrestation en l’encontre de parlementaire en dehors de toutes les possibilités ou voies légales qu’elle prévoit. Mais, l’effectivité de cette protection parlementaire est fonction de politique de pouvoir en place. C’est ainsi que, pendant la première République, l’interdiction d’arrestation a gagné du terrain ; pendant la durée des sessions que hors session, les parlementaires jouissent d’une pleine protection sous réserve des dispositions limitatives définies par la Constitution à l’époque. Puis, durant la deuxième République, à part de l’irresponsabilité politique 27 , les parlementaires ne bénéficient d’aucune protection contre l’arrestation. Enfin, pendant la troisième République, deux étapes seront retenues : - La première rappelle les régimes où se sont succédés l’un après l’autre les anciens Présidents de la république : le Professeur ZAFY Albert et l’Amiral ; si bien que pendant ce temps, l’Etat a fait de marche arrière à propos de l’inviolabilité parlementaire. En ce sens que la Constitution initiale de l’époque ne fait que reprendre certains articles des dispositions constitutionnelles de la première République 28 (article 20 al 2 et 3 de la Constitution de la première république). Par contre, dans sa troisième version, la Constitution de la troisième République a changé de cap, puisque seule l’arrestation pendant la durée des sessions est interdite. L’interdiction d’arrestation garantit donc les parlementaires d’une certaine artillerie de la part des tenants du pouvoir. Surtout, à l’ encontre d’un député de l’opposition qui serait trop critique à l’encontre des gouvernants et pouvant ainsi les mettre dans une position assez agréable. Aussi, vouloir « neutraliser » le parlementaire par le biais d’une arrestation qui s’avérait ainsi délicat grâce à cette protection qui est l’interdiction d’arrestation. Mais à celle- ci, s’ajoute une autre garantie qui est l’interdiction de poursuite.

27 Article 66 de la Constitution de la République Démocratique Malagasy du 31 décembre 1975 28 Voir article 20 alinéa 2 et 3 de la Constitution de la première République 10

B – LA POURSUITE.

On entend par poursuite « l’ensemble des actes accomplis par le Ministère Public, certaines administrations ou la victime d’une infraction, dans le but de saisir les juridictions répressives compétentes et d’aboutir à la condamnation du coupable 29 ». Dans le droit parlementaire malagasy, l’interdiction des poursuites est édictée uniquement pendant la durée des sessions ; mais, à cela, de distinction peut être retenue, puisque les dispositions constitutionnelles prévoyant l’interdiction de poursuite pendant la durée des sessions sont abrogées par la Constitution, troisième révision de la troisième République 30 Mais il faut quand même retenir l’intérêt historique que présentait cette interdiction. En effet, cette interdiction mettant à mal la prérogative du Ministère Public (M. P) d’exercer l’action publique à l’encontre d’un parlementaire convaincu d’une commission d’un acte infractionnel. Comme le Ministère Public agit sous l’égide du Ministère de la Justice, soit d’un politicien, la poursuite effectuée par celui-ci peut être bien motivé par l’intérêt de neutraliser le parlementaire trop critique. Ce qui justifie cette interdiction afin de ne pas entraver la mission assignée aux parlementaires. D’où, l’abrogation de cette protection par la Constitution révisée, pouvant être interprétée comme marquant une volonté de resserrer l’étau autour des parlementaires, afin d’étouffer des débats démocratiques.

§ 2 : QUANT AUX ACTES INFRACTIONNELS.

En droit pénal, un acte, peu importe sa nature, révèle toujours la nature de la participation de son auteur. Toujours est-il qu’en matière d’inviolabilité parlementaire, l’étendue du domaine des interdictions dépend aussi de la nature de l’acte et de la nature de la participation du parlementaire concerné.

I – LA NATURE DE L’ACTE.

En droit parlementaire malagasy, la qualification de la nature de l’acte est nécessaire pour savoir si l’inviolabilité est retenue ou écartée. Mais, la qualification de cet acte n’est pas de son domaine. En fait, elle fait partie du droit pénal général, en ce que la Loi pénale classifie la nature de l’infraction en fonction de la peine. De ce fait, l’article premier alinéa 1,

29 Lexique des termes juridiques, 14 ème édition Dalloz, 2003 30 Constitution du 4 avril 2007 11

2 et 3 du Code pénal en fournit la solution : une infraction quelle qu’elle soit, doit être, soit une contravention, soit un délit, et soit un crime 31 . Parmi ces trois catégories de l’infraction, les interdictions ne concernent que les infractions de nature criminelle ou de nature correctionnelle. Mais, cette distinction de la nature de l’acte ne peut être évoquée que pendant la durée des sessions ; si bien que hors session, quelque soit la nature de l’infraction, l’interdiction d’arrestation reste indifférente. En plus de la nature de l’acte, l’étude de la nature de la participation du parlementaire délinquant figure aussi parmi les critères de la levée d’office ou non de l’inviolabilité.

II – LA NATURE DE LA PARTICIPATION.

En matière pénale, la nature de la participation du délinquant ne peut être déterminée que suivant le cheminement de l’infraction. En effet, il se peut qu’une infraction « ne peut être imputée qu’à un seul individu » ; c’est celui-ci qui doit être considéré comme délinquant et comme seul délinquant 32 ». Dans le cas contraire, la commission de cette infraction fait appel au concours de deux ou plusieurs personnes. Parfois, celles-ci participent sur le pied d’égalité dans la réalisation de l’infraction ; parfois, elles ont chacune leur part propre dans la commission de l’acte. Cependant, la détermination du titre de la participation de chacune d’elles pose du problème, dès lors qu’elles ne jouent pas le même rôle. Face à cette situation, le droit pénal met en relief quatre types d’emplois, à savoir l’auteur, le coauteur (participants principaux), le complice et le receleur (participants secondaires ou accessoires). En droit pénal, l’utilité de la classification des responsables pénaux (auteur, coauteur, complice et receleur) repose sur le souci de bien attribuer à tout un chacun sa responsabilité du fait de ses actes. Par contre, le droit parlementaire ne se sert de cette classification que pour asseoir la base légale de la levée d’office de son inviolabilité. Ces critères qualitatifs de la levée d’office de l’immunité parlementaire sont au nombre de trois, notamment l’auteur, le coauteur et le complice.

A- L’AUTEUR OU LE COAUTEUR DE L’INFRACTION.

Avant la loi constitutionnelle du 4 avril 2007, pour poursuivre un parlementaire, il n’est pas nécessaire de savoir la nature de sa participation. Car, quelque soit son agissement, son immunité parlementaire ne peut être levée en dehors de l’autorisation de la part de ses

31 Article premier du Code pénal. – L’infraction que les lois punissent de peines de police est une contravention. L’infraction que les lois punissent de peines correctionnelles est un délit. L’infraction que les punissent d’une peine afflictive ou infamante est un crime. 32 Cours de droit pénal général dispensé par madame NARAZANA Eudoxie professeur en droit à l’Université de Fianarantsoa 12 pairs (Bureau permanent de la Chambre ou la Chambre elle-même) que si celui-ci est surpris en flagrant délit dans l’intervalle des sessions d’une part, et si sa condamnation étant devenue définitive ou s’il fait l’objet d’une poursuite autorisée d’autre part.

Par contre, depuis la révision de la Constitution du 4 avril 2007, la nouvelle position politique du pouvoir en place vient de resserrer l’étau sur les parlementaires, en précisant la nature de la participation de ceux-ci dans la situation de flagrance.

A part de l’action et de la coaction, la complicité fait aussi partie du critère de la levée d’office de l’immunité parlementaire.

B - LE COMPLICE DE L’INFRACTION.

Est complice celui qui par aide ou assistance, facilite la préparation ou la consommation d’une infraction sans en réaliser lui-même les éléments constitutifs, ou encore provoque à une infraction ou donne des instructions pour la commettre 33 . En d’autres termes, certaines infractions en raison de leur mode d’exécution ne peuvent être commises que par le concours de deux ou plusieurs personnes. Mais, il arrive que certaines d’entre elles, au lieu d’agir principalement à une infraction, n’y contribuent que d’une manière accessoire ; leurs actes se limitent à aider le ou les auteurs principaux ; c’est le cas de l’homme qui prête un fusil à un assassin, de celui qui fait le guet dans la rue pendant que d’autres commettent un cambriolage. Et la répression de ces actes dépend du sort de l’action principale : ils ne seront réprimés que parce qu’ils sont l’accessoire d’autres actes qui, eux aussi constituent des infractions. Et ces personnes qui les commettent sont des malfaiteurs par accessoire. Mais comme toute infraction à la loi pénale, l’acte de complicité pour être réprimé exige aussi la réunion des éléments nécessaires à sa constitution.

1 - LES ELEMENTS CONSTITUTIFS DE LA COMPLICITE.

En tant qu’infraction pénale, trois éléments doivent être réunis pour constituer la complicité, à savoir l’élément légal, l’élément matériel et l’élément moral.

a - L’ELEMENT LEGAL (article 59 du CPM)

La légalité de la complicité suppose l’existence d’une infraction principale qualifiée crime ou délit.

33 Voir lexique des termes juridiques 16 ème édition, Dalloz 13

En effet, la complicité est une forme accessoire de la criminalité et elle ne peut exister que si elle s’appuie sur une infraction principale qualifiée crime ou délit (emprunt de la criminalité). Ce qui exclut la complicité en matière de contravention, sauf exception (exemple : complicité de bruit et de tapage nocturne) 34 .

b - L’ELEMENT MATERIEL.

De cet élément, la loi établit la matérialité des actes de complice. De ce fait, il résulte de l’art.60 CPM qui prévoit trois types de complicité. Ils se distinguent selon l’agissement qui les matérialise, à savoir la complicité par instigation, la complicité par fourniture des moyens et la complicité par aide et assistance. • Complicité par instigation. Aux termes de l’art.60 alinéa premier du CPM, l’instigation se matérialise, soit par provocation, soit par fourniture d’instruction.  Complicité par instigation par provocation. L’instigation par provocation, peut se définir comme l’action de celui qui pousse l’auteur à commettre une infraction ; et selon le législateur, les moyens utilisés par le complice doivent figurer parmi les « dons, promesses, menace, abus d’autorité ou de pouvoir, machination ou artifice coupable » (art.60 al.1 du CP). Cette complicité par instigation par provocation, n’est punissable qu’en réunissant trois conditions, à savoir :  D’abord, la provocation doit être accompagnée par l’un des adminicules ou des circonstances prévus à l’art.60 alinéa1 du CP : « dons 35 , promesses 36 , menaces, abus d’autorité ou de pouvoir 37 , machinations ou artifices coupables ». Si une seule des ces circonstances suffit, la combinaison de plusieurs est concevable. Tel est le cas de l’amant incite sa maîtresse à se faire avorter en lui promettant de l’argent, si elle y consent et en la manquant de l’abandonner dans le cas contraire 38 . Dans le cas contraire, si aucune circonstance n’est réalisée, il n’y a pas provocation. Et l’affaire ne peut donner lieu

34 Art. 473-13 ème du CP 35 Crim. 19 février 1963, JCP, 1963, IV, 42 : il s’agit d’une remise de subsides avant l’exécution de l’infraction. 36 Trib. Grasse 23 septembre 1964, JCP, 1965, II, 13974, note Rieg, propriétaire d’un restaurant promettant de remettre 35 francs à une femme si elle acceptait de jouer au ping-pong en « monokini ». 37 Crim., 10 janvier 1973, B.C., n°14 et R.S.C., 1974, 580 38 Crim., 25 février 1942, DA, 1942, 91 14 qu’à un comparse. Par exemple, celui qui se borne à donner un simple conseil, même pressant 39 .  Ensuite, elle doit être directe et suggérer l’idée de l’infraction de façon non équivoque à une personne déterminée. En d’autres termes, elle doit suggérer sans hésitation possible l’idée de l’infraction.  Enfin, elle doit être suivie d’effet : le délit suggéré doit avoir été commis ou tout au moins tenté sinon impunité : si aucune circonstance n’est réalisée, il n’y a pas de provocation 40 .  Complicité par instigation par fourniture d’instruction.

Quant à cette deuxième forme de la complicité par instigation, le complice par instruction s’adresse à l’intelligence, en lui procurant des renseignements nécessaires à la réalisation de l’infraction. Sont instructions de ce fait, les renseignements de nature à permettre ou à faciliter l’exécution de l’infraction (exemple, le fait de donner l’adresse d’une avorteuse 41 , le fait de donner les détails sur le mode de vie et les habitudes de la future victime. C’est donc à l’intelligence de l’auteur que s’adresse le complice par instigation par fourniture d’instructions, en lui procurant des renseignements de l’infraction. Mais, ces instructions pour être réprimées doivent être précises car des simples renseignements trop vagues ne sont pas répréhensibles. Ainsi, il n’a été réprimé que le conseil donné par un individu à un tiers de mettre en jeu la victime en disant « elle n’est bonne qu’à fusiller »42 . De même, il a été aussi jugé que le fait de fournir l’adresse d’une avorteuse ou de donner des détails sur le mode de vie de la future victime constituait des instructions 43 . Au contraire, il a été admis qu’un simple conseil donné par l’amant à sa maîtresse pour se procurer l’avortement au moyen « d’injections » sans plus de précisions, n’était pas répréhensible 44 . • Complicité par fourniture des moyens. Dans ce deuxième cas de complicité, est complice celui qui fournit « des armes, des instruments ou tout autre moyen qui aura servi à l’action sachant qu’ils devaient y servir »

39 Crim., 24 décembre 1942, JCP, 1944, II, 2651 40 Crim., 24 décembre 1942, J.C.P., 1944, II, 2651 41 Crim., 21 juillet1943, S, 1943, I, 115, 42 Crim., 28 octobre 19 janvier 1965, J.C.P., 1966, II, 14524 et R.S.C., 1966, 399, Obs. légal 43 Crim., 21 juillet 1943, S, 1943, I, 115 44 Crim., 24 décembre 1942, S, 1944, I, 7 15

(art.60 al.2 du CP). Par exemple, la fourniture des fausses clés 45 , des certificats 46 , de médicaments pour avortement, fourniture d’appartement pour un tapage nocturne, fournir une Chambre pour un avortement, fournir une voiture pour faciliter l’accomplissement d’un vol etc. 47 Il importe que l’auteur principal n’ait pas utilisé les moyens fournis par le complice. Dans cette circonstance, la jurisprudence décide que, suivant la destination des moyens, au service de l’action principale, l’offre d’un instrument, même non utilisé, constitue une fourniture des moyens 48 .

• Complicité par aide ou assistance.

Enfin, le dernier cas de complicité concerne la complicité par aide ou assistance. Elle est punissable sous deux conditions :

 D’une part, l’aide ou assistance doit être positive. De ceci, se pose le problème de complicité par abstention. Mais, la solution retenue est qu’une simple attitude passive ne constitue pas une aide ou assistance : « la complicité par aide ou assistance ne s’induire d’une simple abstention et doit résulter de fait positif ». 49 Par exemple, accompagner un auteur qui s’est trouvé sur le lieu de l’infraction, tenir une échelle, tendre les instruments …). Mais, la jurisprudence (JCP) admet la répression de l’abstention lorsqu’elle constitue aide psychologique et une véritable adhésion morale à l’infraction (exemple : l’amant d’une femme qui assiste celle-ci pendant l’avortement.  D’autre part, l’aide ou assistance doit être antérieure ou concomitante à l’acte. De cette condition, deux hypothèses doivent être étudiées. La première concerne l’extension de la notion de la coactivité criminelle (ou l’assimilation du complice au coauteur) tandis que la seconde se rapporte à l’assimilation du coauteur au complice.

A ces deux éléments constitutifs de la complicité, s’ajoute l’élément moral.

c- L’ELEMENT MORAL.

Pour que l’acte de complicité soit punissable, il faut que le complice ait agi en connaissance de cause. La notion de l’acte de complicité est inséparable de la mauvaise foi. L’art.60 du CP souligne :

45 Crim., 13 juin 1811, S, chr, 1809-1811, I, 360 46 Crim., 6 juin 1924, DH, 1924, 561 47 Decoq, Droit Pénal Général, Edition Masson et Cie 48 Crim., 17 mai 1962, D, 1962, 473 et R. S. C., 1964, p134, Obs., 49 Criminel 27octobre 1971 BN°284 16

-une fourniture d’instruction « pour la commettre » ; -une fourniture des moyens « sachant qu’ils devaient y servir » ; - « ceux qui auront avec connaissance aidé ou assisté l’auteur ». C’est une obligation pour le juge de constater cette mauvaise foi. Si bien que de problème se pose lorsque l’auteur dépasse l’intention du complice. Quid de la situation de l’auteur et celui de son complice en matière répression. 2 - LA REPRESSION. Quant à la répression, le principe d’emprunt de pénalité est la règle selon laquelle le complice encourt la même peine que l’auteur principale : « les complices d’un crime ou d’un délit seront punis de la même peine que les auteurs mêmes de ce crime ou de ce délit »50 . Il s’agit d’une solidarité de l’auteur et du complice : « cousus dans un même sac 51 qui s’explique par le danger de la participation criminelle 52

3 – L’INTERET DE LA QUALIFICATION.

Cette idée de précision du titre de la participation a un intérêt pratique. En effet, si les anciens dirigeants politiques n’ont pas apporté de précision en matière de flagrance. Les nouveaux dirigeants de la dernière législature de la troisième République, quant à eux, le sont. Cela a pour cause de resserrer l’étau. Car si le parlementaire n’est pas rattrapé par l’acte de participation principale, il le sera pour le complice.

C – LA PARTICIPATION DU PARLEMENTAIRE.

Au vu de ces règles qui viennent d’être évoquées de manière détaillée, un parlementaire pour être inquiété par la Justice doit avoir participé à un acte infractionnel selon l’une des modalités décrites ou l’un des rôles exposés.

Ainsi, il peut être convaincu d’avoir commis un délit ou un crime. Ce qui rentrerait dans les exigences de la loi. Ou bien il a participé à l’acte infractionnel de manière directe ou bien indirecte, etc. En d’autres termes, il peut être auteur, coauteur ou complice ou bien receleur.

Ces activités infractionnelles démontrant une moralité peu digne d’un représentant du peuple amènent la loi à permettre la mise en cause du parlementaire. L’élu représentant du peuple se doit en effet être une personne digne de par son comportement, sa moralité. D’où

50 51 Jean Carbonier, du sens de la répression applicable aux complices selon l’article 59 du CPF, JCP, 1952, I, 1034 52 Cours de droit pénal général dispensé par Madame Narazana Eudoxie 17 les interdictions d’arrestation ou de poursuite pourraient être levées dans le cas contraire. Ce qui le mettait au même titre que tout autre justiciable.

En d’autre terme, les interdictions ont des limites.

SECTION II : LIMITES DES INTERDICTIONS.

Ces limites des interdictions comprennent deux séries des faits : l’un tenant à la nature de la procédure de la commission de l’acte incriminé et l’autre relève des décisions issues de deux autorités différentes (pouvoir législatif et la Justice). Ces faits sont d’une part la flagrance et d’autre part les poursuites autorisées et la condamnation définitive.

§ 1 : LA FLAGRANCE.

En droit de procédure pénale malgache, la notion de la flagrance comprend trois catégories telles que la flagrance proprement dite (art.133, début du deuxième alinéa CPPM) et la flagrance par assimilation (art.133 deuxième alinéa du CPPM) ; enfin, la flagrance par réputation (art.178-2° du CPPM). Mais, les définitions de celles-ci fait recours à l’art.206 du CPP. A – NOTION.

1°- LA FLAGRANCE PROPREMENT DITE.

Selon l’art.206, premier al, première phrase du CPPM « Est qualifié crime ou délit flagrant le crime ou le délit qui se commet actuellement, ou qui vient de se commettre ».

2°- LA FLAGRANCE ASSIMILEE.

Aux termes des dispositions de l’art.206, deuxième alinéa du CPPM « Est assimilé au crime ou délit flagrant tout crime ou délit qui, même en l’absence des circonstances prévues à l’alinéa précédent, a été commis dans une maison dont le chef requiert la police judiciaire de le constater ».

3°- LA FLAGRANCE REPUTEE.

D’après l’art.206, premier alinéa, deuxième phrase du CPPM « Il y aussi crime ou délit flagrant lorsque, dans un temps très voisin de l’action, la personne soupçonnée est poursuivie par la clameur publique, ou est trouvée en possession d’objets, ou présente des traces ou indices laissant penser qu’elle a participé au crime ou au délit qui vient de se commettre ».

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Cependant, cette procédure de flagrance n’est pas la seule à faire limiter de l’inviolabilité parlementaire A celle-ci, s’ajoutent les poursuites autorisées et la condamnation définitive. B – JUSTIFICATION. La flagrance met donc le parlementaire dans une situation bien précaire, puisqu’elle lui enlève toute carapace de protection 53 . Cette limite de protection peut se justifier aisément. En effet, un député pris en flagrant délit est une personne qui visiblement s’est déshonorée aux yeux du public qu’il est censé représenté. Aucune erreur judiciaire n’est à craindre, aucun arrière pensé politique n’est prescrite. Le parlementaire s’est prouvé par lui-même qu’il est un délinquant, indigne. Ce démérite lui enlève le tout bénéfice de protection. On peut donc dire que la situation de flagrance est une arme fatale entre les mains des Gouvernants qui veulent « faire tomber » un parlementaire « indésirable ». En cas de difficulté, la flagrance pourra être « provoquée », voire « créée ».

§ 2 : LES POURSUITES AUTORISEES ET LA CONDAMNATION DEFINITIVE.

Dans le cadre des limites à l’immunité parlementaire, figurent les poursuites autorisées et la condamnation définitive. Mais contrairement à la procédure de flagrance, la procédure engagée se trouve dans une phase pré-judiciaire et judiciaire.

A – LES POURSUITES AUTORISEES.

1- LE PROCESSUS.

On entend par poursuites autorisées, les poursuites opérées contre la personne d’un parlementaire dont le déclenchement a été déjà approuvé au préalable par le bureau permanent de la Chambre dont il fait partie. A part de la Constitution de 1975, lorsque toutes les anciennes Constitutions de la République malgaches ont institué les concepts des poursuites autorisées pour faire limiter aux parlementaires leur privilège d’inviolabilité ; le cas n’est plus le même actuel, puisque la Constitution, troisième version de la troisième République a abrogé les dispositions de l’article qui prévoit la matière. En effet, selon l’art.69, troisième alinéa de la Constitution de 1998 « Aucun député ne peut, hors session, être arrêté qu’avec l’autorisation du bureau de l’Assemblée, sauf le cas de flagrant délit, de poursuites autorisées ou condamnation définitive ». Tandis que pour la

53 Cas du député d’Ikalamavony et du Maintirano en 19 nouvelle Constitution, l’inviolabilité parlementaire ne se prévaut que pendant la durée des sessions et avec la seule limite que si l’un de ces derniers a été surpris comme auteur, coauteur ou complice d’un crime ou d’un délit au moment des faits. Ainsi, selon l’art.70 al.2 de la Constitution, troisième révision de la troisième République « Aucun député ne peut, pendant la durée des sessions, être arrêté, en matière criminelle ou correctionnelle, qu’avec l’autorisation de l’Assemblée, sauf s’il a été surpris comme auteur, coauteur ou complice d’un crime ou d’un délit au moment des faits. »

2- LA REALITE. Cette autorisation de poursuite est une arme entre les mains des membres du bureau permanent pour mettre en cause l’un de ses pairs. Mais à l’évidence, ces membres du bureau peuvent s’avérer comme des « épouvantails » qui n’effectuaient pas vraiment les protections des parlementaires. L’histoire de Madagascar n’a pas en effet, connu des autorisations de poursuite de la part de cette institution. Il s’avère en effet peu probable que le pas de l’autorisation soit frauduleux. Car entre eux, ils se ménagent. En plus des poursuites autorisées, la condamnation définitive peut aussi faire lever d’office au parlementaire son inviolabilité.

B – LA CONDAMNATION DEFINITIVE.

Une condamnation est devenue définitive lorsqu’elle n’est plus susceptible d’aucune voie de recours 54 . En conséquence, cette décision aux fins d’une condamnation prend la force de chose jugée, dès lors qu’elle n’est plus être attaquée par d’aucune voie de recours. « Res judicata proveritate habetur ». C’est-à-dire, ce qui a été jugé est tenu comme exprimer la vérité. Au cours de l’évolution de l’histoire, le droit parlementaire malgache a retenu la condamnation définitive comme l’un des moyens légaux entre les mains de la Justice pour se débarrasser du parlementaire accusé ou inculpé. Selon l’art.20 al.3 de la Constitution de la première République « Aucun député ne peut, hors session, être arrêté qu’avec l’autorisation du bureau de l’Assemblée, sauf le cas de flagrant délit, des poursuites autorisées ou

54 Il existe deux types de voies de recours : les voies de recours ordinaire telles que l’opposition et l’appel ; les voies de recours extraordinaires telles que le pourvoi en cassation et le pourvoi en révision. 20 condamnation définitive. »55 La condamnation définitive qui prouve la culpabilité du parlementaire lui enlève toute protection du fait de sa fonction. Mais, avec la dernière révision de la Constitution du 4 avril 2007, la condamnation définitive n’est plus nécessaire pour provoquer une atteinte à l’intégrité de la personne de parlementaire. Car en dehors des sessions, les parlementaires ne bénéficient plus de l’immunité parlementaire. Cependant, en dehors des limites précitées, la Constitution exige l’accomplissement de certaine formalité, pour pouvoir arrêter ou poursuivre un parlementaire malagasy.

55 Voir aussi l’art 69 al.3 de la Constitution deuxième version de la troisième République. 21

CHAPITRE II : DES EXIGENCES.

Ces exigences concernent les autorisations préalables pour l’obtention desquelles une procédure est requise.

SECTION 1 : LES AUTORISATIONS PREALABLES.

Les autorisations préalables sont des actes par lesquels, les membres du Parlement (bureau permanent ou la Chambre) accordent au Ministère Public qui en a fait la demande, l’autorisation d’arrestation ou de poursuite d’un parlementaire. Cette autorisation préalable qui constitue l’une des limites aux principes de la liberté d’action du Ministère Public forme un solide garanti de la protection du parlementaire. En effet, un parlementaire convaincu d’un acte infractionnel ne sera pas poursuivi ou arrêté qu’en cas d’autorisation donnée par ses pairs. Cette autorisation, pour éviter une pression trop nuisible aux fonctions du parlementaire doit obéir à des conditions relatives aux autorités compétentes qu’aux facteurs temps.

§ 1 : LES AUTORITES COMPETENTES.

En matière d’autorisations préalables, la compétence relève de deux autorités différentes et chacune d’elles a sa propre attribution en la matière, suivant qu’il s’agisse d’une période d’intersession ou pendant la session.

A – L’ASSEMBLEE.

L’Assemblée est l’une de deux Chambres (la Chambre basse) qui forment le Parlement ou le pouvoir législatif ; ses membres s’appellent « les députés ». Celle-ci s’érige en pouvoir d’autorité compétente lorsque pendant la durée des sessions, l’ouverture d’une poursuite ou l’exécution d’une arrestation qui fait impliquer l’un des membres de la Chambre, nécessite une autorisation préalable. Depuis l’adoption de la Constitution de la première République, sauf pendant la deuxième République, cette Assemblée continue toujours à garder sa propre attribution en matière d’autorisation préalable, en ce qu’elle n’agit que si la requête en la matière lui est présentée pendant la durée des sessions. Mais, de modification a été apportée par la Constitution du 4 avril 2007. Auparavant, l’autorisation préalable auprès de l’Assemblée a été instituée pour approuver ou non l’exercice de poursuite ou d’arrestation en l’encontre d’un parlementaire ; tandis que actuellement, celle-ci ne concerne que l’arrestation seulement.

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Ainsi, selon l’art.69 al.2 de la Constitution de 1998 « Aucun député ne peut, pendant la durée des sessions, être poursuivi, ou arrêté en matière criminelle ou correctionnelle, qu’avec l’autorisation de l’Assemblée, sauf le cas de flagrant délit ».Par contre, l’art.70 al.2 de la Constitution du 4 avril 2007 prévoit : « Aucun député ne peut pendant la durée des sessions, être arrêté, en matière criminelle ou correctionnelle, qu’avec l’autorisation de l’Assemblée, sauf s’il a été surpris comme auteur, coauteur ou complice d’un crime ou d’un délit au moment des faits ». L’Assemblée qui se trouve compétente dans ces hypothèses particulières cède la place au bureau de l’Assemblée lorsque l’infraction a été commise à une certaine époque.

B – LE BUREAU DE L’ASSEMBLEE.

1- DEFINITION.

Le bureau de l’Assemblée est un organe directeur des travaux d’une Assemblée parlementaire. Il comprend : le Président, des vice-présidents (qui suppléent le président), des secrétaires (chargés de contrôler les votes et les procès-verbaux des séances), des questeurs (chargés des problèmes d’administration intérieure)56 . Ces membres du bureau de l’Assemblée sont élus en son sein par chaque Assemblée et qui a tous les pouvoirs pour présider à ses délibérations et pour organiser et diriger tous services dans les conditions déterminées par le règlement adopté par l’Assemblée57 .

2- FORMATION.

En ce qui concerne la formation du bureau permanent de l’Assemblée nationale, l’article 20 de la loi n° 93-004 portant organisation et fonctionnement de l’Assemblée nationale en détermine la composition dont elle renvoie au règlement intérieur la tâche d’en fixer le nombre. En effet, aux termes de cet article, le bureau permanent est composé : -d’un président ; -des vice-présidents ; -des questeurs.

56 Cf. Lexique des termes juridiques, op.cit. p81-82 57 Olivier Duhamel-Yves Mény Dictionnaire constitutionnel Puf Presses universitaires de France édition mars 1992, p.97).

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Mais dans son application, le nombre des membres de ce bureau varie suivant l’arrêté portant règlement intérieur de l’Assemblée nationale. Pour l’Assemblée nationale de la dernière législature de la troisième République, l’arrêté n°111-AN/P du 16 novembre 2007, a son article 12 fixe la composition des membres du bureau permanent comme suit : -un président ; -trois vice-présidents ; -deux questeurs ; -et un rapporteur général. Ces personnes occupent leurs fonctions au sein de ce bureau par le système d’élection « au système d’élection à un scrutin secret uninominal à deux tours : le premier tour à la majorité absolue, le second tour à la majorité simple, entre les deux candidats ayant obtenu le plus grand nombre des voix au premier tour, au cours d’une session spéciale se tenant le deuxième mardi qui suit la proclamation des résultats de leur élection 58 ». Le scrutin a lieu séparément pour chacune de ces fonctions. Pour le poste du président, les candidatures sont déposées auprès du bureau d’âge, une heure au moins avant l’heure fixée pour le scrutin 59 et à l’issu du second tour. En cas d’égalité de voix, le plus âgé est élu 60 . Ces membres du bureau permanent sont élus pour la durée du mandat, avec une possibilité de destitution éventuelle de leurs fonctions respectives pour motif grave par un vote des deux tiers des députés 61 , dont les vacances individuelles sont prévues suivant la même procédure 62 . La proclamation de l’élection du président de l’Assemblée nationale est assurée par le président d’âge, tandis que celle des autres membres du bureau est confiée au président de l’Assemblée. Une fois élus, ces membres du bureau permanent partagent avec l’Assemblée nationale le pouvoir d’étudier les demandes éventuelles d’autorisation préalable de levée de l’immunité parlementaire, suivant que le député concerné se trouve en session ou en dehors des sessions 63 . Cependant, il arrive du moment que ce bureau permanent est dépourvu du même pouvoir au profit de l’Assemblée. On peut situer cet événement dans deux époques différentes : la première époque rappelle l’époque de la deuxième République, durant laquelle

58 Cf. article 13 de l’arrêté n°111- AN/P du 16 novembre 2007 portant règlement intérieur de l’Assemblée nationale. 59 Cf. article 13 op.cit.alinéa 3 60 Cf. article 13 op.cit.alinéa 4 61 Cf. article 13 op.cit. alinéa 5 62 Cf. article 13 op.cit. alinéa 6 63 Cf. article 69 alinéas 2 et 3 de la Constitution de 1998 24 l’Assemblée nationale populaire ne bénéficie d’aucune inviolabilité à part de l’irresponsabilité 64 ; la deuxième époque se déroule durant la dernière étape de la troisième République. Cette déclinaison de compétence du bureau permanent de l’Assemblée au profit de l’Assemblée est due depuis son apparition, à une abrogation des dispositions de la Constitution la première République en matière d’inviolabilité 65 par la Constitution de la deuxième République et d’autre part de la Constitution de la troisième République (Constitution initiale et ses deux premières révisions) par la Constitution révisée du 4 avril 2007.. Puisque la Constitution à son article 70 alinéa 2 n’institue comme soumise à une autorisation de l’Assemblée, en dehors de l’acte surpris comme de coaction ou de complicité, d’un crime ou d’un délit que l’arrestation en matière criminelle ou correctionnelle. Pour mieux garantir la protection du parlementaire, l’intervention de ces entités est requise afin qu’il y ait poursuite. Et de plus, les facteurs temps doivent s’ajouter aux premières exigences.

§2- LES FACTEURS TEMPS.

La possibilité et la manière de mettre en cause un parlementaire sont différentes selon que celle-ci se place pendant la session ou en dehors. Cette distinction se justifie par le statut de parlementaire, de représentant du peuple.

A- LES PERIODES JURIDIQUES.

Les périodes juridiques sont formées successivement des sessions et des hors sessions.

1- PENDANT LES SESSIONS

Communes aux deux Chambres, les sessions désignent la période pendant laquelle, le Parlement se réunit pour délibérer. La Constitution prévoit deux types de sessions, à savoir les sessions ordinaires et les sessions extraordinaires66 . En session ordinaire, l’Assemblée se réunit deux fois par an et dont chacune d’elles est fixée à soixante jours par an. La première session commence le premier mardi de mai ;

64 Cf. article 66 de la Constitution de 1975 65 Selon l’article 20 alinéa 3 de la Constitution de la première République, aucun député ne peut, en dehors de session, en matière criminelle ou correctionnelle ne peut faire l’objet d’arrestation qu’avec l’autorisation du bureau permanent de l’Assemblée sauf le cas de flagrant délit ou de crime flagrant, de condamnation définitive ou de poursuite autorisée 66 Cf. articles 72 et 73 de la Constitution de 2007 25 tandis que la seconde est consacrée principalement à l’adoption de la loi de finance, le troisième mardi d’octobre 67 . En dehors de la procédure de réunion ordinaire, l’Assemblée nationale se réunit en session extraordinaire, à la convocation du Président de la République, sur un ordre du jour déterminé, par décret pris en Conseil de Ministres soit à l’initiative du Président de la République, soit à la demande de la majorité absolue des membres composant l’Assemblée nationale 68 . La durée de cette session ne peut excéder douze jours, avec la possibilité d’un éventuel décret de clôture, lorsque l’Assemblée nationale a épuisé l’ordre du jour lequel elle a été convoquée. Toutefois, le Président de la République peut seul prendre l’initiative de convoquer une nouvelle session extraordinaire avant l’expiration d’un délai d’un mois qui suit la clôture 69 . Mais à part de ces deux types des sessions (sessions ordinaires et sessions extraordinaires), une session spéciale fait réunir la nouvelle Assemblée nationale, le deuxième mardi qui suit la proclamation des résultats de son élection, pour procéder à la constitution de son bureau 70 . Pendant la session, les parlementaires ne peuvent faire l’objet de poursuite ni d’arrestation 71 ou d’arrestation seulement 72 , qu’avec l’autorisation de l’Assemblée, en matière criminelle ou correctionnelle, sauf le cas de flagrant délit 73 ou sauf si le parlementaire mis en cause a été surpris comme auteur, coauteur ou complice d’un crime ou d’un délit au moment des faits 74 . Cependant, après la session, les parlementaires passent leur vie en dehors des sessions. Il n’est plus possible alors, dans ce cas que l’Assemblée veille à la protection de ses membres. Quel statut juridique les parlementaires doivent-ils avoir alors pendant les intersessions ?

2- HORS SESSION

Inversement, la situation des parlementaires pendant les intersessions diffère de celle pendant les sessions.

67 Cf. article 72 de la Constitution révisée de 2007 68 Cf. article 73 de la même Constitution 69 Idem 70 Cf. article 75 alinéa premier de la même Constitution 71 Voir Constitution de la première République (article 20 alinéa 2) et Constitution initiale de la troisième République, avec ses deux premières révisions de 1995 et 1998 (article 69 alinéa 2) 72 Cf. Constitution révisée de 2007 en son article 70 alinéa 2 73 Voir note de bas de page ci-dessus (note n°72) 74 Voir note de bas de page ci-dessus (note n°73) 26

En effet, pendant les intersessions, les parlementaires ne peuvent se prévaloir d’aucune protection que contre une arrestation seulement et cette protection sera exclue d’office en cas de flagrant délit, de poursuite autorisée ou de condamnation définitive. Toutefois, en dehors de ces cas limitativement déterminés par la Constitution, l’autorisation du bureau permanent de l’Assemblée constitue la condition sine qua non pour lever l’immunité d’un parlementaire mis en cause 75 . Cependant, il est à noter qu’actuellement la question d’immunité parlementaire en dehors des sessions n’a plus sa raison d’être.

B- JUSTIFICATION

Cette protection en sessions et en dehors des sessions 76 , des parlementaires se justifie d’abord par l’idée liée à la protection d’un mandat parlementaire même. Car durant un mandat, les parlementaires sont censés représenter leurs électeurs qui sont les citoyens et cette représentation suppose le souci d’une continuité des fonctions auprès de l’Etat; ce qui mérite d’une réglementation pour préserver d’une part l’intérêt général des votants et d’autre par pour faire sanctionner l’ordre public. En effet, si un parlementaire a fait l’objet d’une poursuite judiciaire, et cette action lui tourne mal, ce sont les intérêts de la circonscription qui l’a élu qui sont entravés dans cette condition. De même, dans les pays démocratiques, sinon en quête de la démocratie comme Madagascar, surtout depuis l’effondrement du F.N.D.R 77 et de la libération politique 78 , les parlementaires malagasy se sont affiliés dans beaucoup d’affinités politiques 79 . Et il arrive que certains d’entre eux, grâce à leur personnalité reconnue dans la vie politique du pays, et à leur curiosité téméraire pour mettre au courant le peuple, de toutes les injustices faites par les gouvernants sur la conduite du pays, constituent une opposition capitale et sérieuse pour ces derniers. Ils constituent dans ce sens, un obstacle de droit (vote des lois) aux intentions mauvaises de l’exécutif sur la conduite générale du pays.

75 Cf. article 20 alinéa 3 de la Constitution de 1959 et article 69 alinéa 3 de la Constitution initiale de 1992 et ses deux révisions de 1995 et 1998 76 Constitution de la première République et Constitution initiale de la troisième République et ses deux révisions de 1995 et 1998 77 Front Nationale pour la Défense de la Révolution 78 Selon l’article 8 (nouveau) en son alinéa 1de la loi n°89-028 du 29 décembre 1989 portant révision de la Constitution du 31 décembre 1975 de la République Démocratique de Madagascar « Les citoyens jouissant pleinement de leurs droits civiques peuvent se constituer librement, selon les règles démocratiques, en parti ou organisation politique ». 79 Il existe deux cent un partis politiques à Madagascar d’après les sources auprès du ministère de l’intérieur (voir annexe) 27

Toujours es-il que même si le « droit de vote du député est personnel 80 » et que certains d’entre eux paraissant influencer l’opinion de la majorité parlementaire, quelque soit leurs tendances politiques, peuvent concevoir une initiative de déstabilisation du gouvernement en mettant en cause sa responsabilité par le vote de motion de censure 81 . Car « Une telle motion n’est recevable que si elle est signée par la moitié des membres composant l’Assemblée nationale 82 ». En d’autres termes, il faut que le parlementaire à l’initiative duquel la motion sera adoptée soit convaincant. Enfin, une attitude presque pareille pour tous les dirigeants africains, consiste à rester éternellement au pouvoir. Les conceptions démocratiques restent toujours théoriques, alors même qu’ils sont rejetés par l’opinion publique. Si bien que de l’autre côté, certains d’entre les parlementaires semblent la dominer et être prêts à déloger les premiers de leur trône. Qu’en conséquence, les gouvernants en place cherchent par tous les moyens possibles à rester éternellement au pouvoir. D’où selon leurs aspirations. D’où l’origine de l’élimination délibérée. Par quels moyens alors ? Il suffit à l’exécutif de consulter les lois et les dispositions constitutionnelles relatives à l’institution législative. Si ces dernières lui semblent encore menaçantes, il procède à leur modification. En d’autres termes, l’exécutif va procéder à l’amendement, à la révision de la Constitution même, à l’abrogation des dispositions s’il le faut. Cependant, les exigences ne se limitent pas aux autorisations préalables. En effet, il faut comprendre l’institution même de l’autorisation préalable qui s’inscrit dans le cadre de la protection du parlementaire. Aussi, cet obstacle pour le Ministère Public d’exercer librement l’action publique ne pourra être franchi que lorsque une procédure très particulière n’a été accomplie.

SECTION II : LA PROCEDURE REQUISE

Pour obtenir une autorisation de poursuite ou d’arrestation, il faut adresser une demande de mainlevée de l’immunité parlementaire aux autorités législatives. Et cette demande peut avoir des conséquences, tant à l’action publique qu’à l’intéressé.

80 Cf. article 68 alinéa 5 de la Constitution de 2007 81 Cf. article 97 alinéa 1 de la Constitution de 2007 82 Cf. article 97 alinéa 2 de la même Constitution 28

§1- UNE DEMANDE DE MAINLEVEE DE L’IMMUNITE PARLEMENTAIRE.

En la matière, la question est de savoir à qui appartient le pouvoir de formuler cette demande.

A- L’AUTORITE DE POURSUITE, LA DEMANDERESSE.

Avant d’étudier les conséquences que peut produire cette demande, nous allons faire savoir quelle qualité de personnes peut faire la demande.

1- LES PERSONNES HABILITEES A FAIRE LA DEMANDE.

Pour connaître les catégories de personnes habilitées à présenter cette demande de mainlevée de l’immunité parlementaire, il faut recourir à la constitution. Car, selon cette même Constitution, l’esprit du pouvoir constituant est clair. Il institue la possibilité de quiconque à saisir par écrit le bureau permanent de l’Assemblée Nationale (ou du Sénat) pour mettre en cause les carences d’un député (ou d’un Sénat) 83 . Bref, nous pouvons déduire la conclusion suivante : « les dispositions constitutionnelles ne s’opposent pas à ce que la demande de levée de l’immunité soit exercée par le Ministère Public, un autre parlementaire ou un particulier 84 . »

a) LE DEMANDEUR AUTRE QUE LE MINISTERE PUBLIC.

Cette qualité de demandeur regroupe d’un côté des particuliers et de l’autre côté des agents de l’Administration. A l’égard de ces catégories de demandeur, la loi n’institue aucune condition en termes de demande de levée de l’immunité parlementaire. Mais vu la personnalité du parlementaire, aucun particulier jusqu’ici n’a osé accomplir cette demande.

b) LA PROCEDURE DEVANT LE MINISTERE PUBLIC.

En réalité, cette demande de mainlevée de l’ « immunité parlementaire » n’est que le stade final de toutes les procédures de poursuite, mises en mouvement par le Ministère Public. Il en résulte que le Ministère Public ne consulte l’autorisation du pouvoir législatif en vue

83 Selon l’article 70 alinéa 3 de la Constitution du 4 avril 2007 (Voir aussi article 82 de la même Constitution) , « Tout individu peut saisir par écrit, le bureau permanent de l’Assemblée Nationale pour mettre en cause les carences ou agissements d’un député. » 84 Cf. Décision de la Haute Cour Constitutionnelle, n°4-HCC/D3 du 21 février 2001, qui statue sur la saisine du Président de la République, par la lettre n°18-PRM/SGP du premier février 2001, pour contrôle de constitutionnalité de la loi organique n°2000-025 fixant l’organisation et le fonctionnement de l’Assemblée Nationale. 29 d’une poursuite ou d’une arrestation qu’après avoir étudié minutieusement toutes les procédures tendant à réunir tous les trois éléments de l’infraction. Il en résulte aussi, que du fait de la personnalité des parlementaires en tant qu’ « élus » du peuple, la Constitution a prévu une procédure spéciale, avant la prise en charge de l’affaire par le Parquet. C’est ce qu’on appelle une Commission spéciale.

b 1- L’INSTITUTION D’UNE COMMISSION SPECIALE.

Il est à remarquer que cette Commission diffère suivant qu’il s’agit d’une période d’avant la révision constitutionnelle de 2007 d’une part ou d’une période après d’autre part.

• LA PERIODE AVANT LA REVISION CONSTITUTIONNELLE DE 2007

Sous l’esprit des anciennes Constitutions 85 , toute plainte portée contre un parlementaire doit être examinée par une Commission de trois magistrats de la Cour de Cassation désignés par le Premier Président de la dite Cour. Et cette Commission, après information, ordonne soit le classement de la procédure, soit sa transmission au Procureur Général de la Cour de Cassation aux fins de saisine de la juridiction compétence 86 . • LA PERIODE APRES LA REVISION CONSTITUTIONNELLE DE 2007 Contrairement aux dispositions de l’ancienne Constitution, la nouvelle loi constitutionnelle de 2007, confie l’initiative de la procédure, en vue d’un examen d’une plainte contre un parlementaire au Procureur Général de la Cour de Cassation 87 .

b 2- LE MINISTERE PUBLIC.

• Procédure.

Selon l’art.161 du CPPM, le Procureur de la République reçoit les plaintes et les dénonciations et en apprécie la suite à leur donner ; si bien que le principe de poursuite ordonne au Procureur de la République de procéder avec une entière liberté d’appréciation. Il s’ensuit que, dans le ressort de sa compétence, le parquet après s’être informé de l’infraction par diverses sources : tels que la rumeur publique ou la presse, mais surtout par les procès-verbaux dressés par l’officier de police judiciaire, par la plainte de la partie lésée

85 Constitution du 18 septembre 1992 et lois constitutionnelles de 1995 et 1998 86 Cf.article 114.1 de la Constitution du 18 septembre 1992 87 Cf. Article 128 alinéa 2 de la loi constitutionnelle de 2007 30 ou par la dénonciation d’un tiers ou d’une autorité, voire du Ministère de la Justice,88 et exceptionnellement du coupable lui-même, vérifie s’il est bien compétent et que le fait est susceptible de poursuite. En d’autres termes, il doit s’assurer si le fait est qualifiable (fait prévu par un texte non amnistié et non justifié) et punissable (fait non prescrit et commis par une personne responsable) Puis, il doit distinguer les plaintes simples (adressées à un officier de police judiciaire qui la lui transmettra) de celles des plaintes avec constitution de partie civile, lesquelles sont déposées entre les mains du Juge l’instruction. Car, les premières plaintes ne contraignent pas le Ministère Public à agir contrairement aux dernières. Des lors, ce dernier avant de prendre sa décision, doit demander à la police judiciaire de lui faire parvenir des renseignements supplémentaires. 89 Mais, une fois éclairé suffisamment, il pourra apprécier sur la possibilité de la légalité de la poursuite ; il en appréciera également l’opportunité de poursuite. En fin du compte, il se décidera en principe en fonction de la double appréciation, avec une entière liberté, telles que l’appréciation de la légalité de poursuite, et l’appréciation de l’opportunité de poursuite. - APPRECIATION DE LA LEGALITE DE POURSUITE. Cette appréciation doit porter sur deux points, à savoir le problème du bien fondé apparent de l’action publique et le problème de la recevabilité de l’action publique. Dans le premier problème, le Procureur de la République doit s’assurer si les éléments constitutifs d’une infraction déterminée lui paraissent effectivement réunis. Pour ce faire, il doit trouver l’élément légal de l’infraction en vue de donner sa qualification adéquate. De plus, il doit aussi vérifier tous les éléments matériels et psychologiques requis par cette qualification s’ils existent bien en l’espèce. Ensuite, il examinera si aucune cause d’impunité ne se présente (faits justificatifs, causes de non imputabilité) et il déterminera les personnes à poursuivre, en sus de ses titres parmi celles qui paraissent compromises dans cette infraction. Quant au second problème, le Procureur de la République doit également s’assurer qu’aucun obstacle de forme ne s’oppose au déclenchement de la poursuite. De ceci, on entend des conditions de recevabilité qui ne sont pas les mêmes selon la qualification.

88 Selon l’article 152 du Code de procédure pénale, le Ministère de la Justice peut dénoncer au procureur général les infractions à la loi pénale dont il a connaissance, lui enjoindre d’exercer ou de faire exercer des poursuites, ou de saisir la juridiction compétente de telles réquisitions écrites que le Ministère juge opportunes. 89 Voir article 166 du CPPM 31

En effet, la recevabilité suppose la vérification de la compétence de la juridiction d’instruction ou de jugement à saisir (compétence d’attribution et compétence territoriale) en fonction de la qualification retenue ; et la recherche des causes d’extinction possibles de l’action publique telles que la prescription, le décès de certains de participants qui éteint l’action à leur égard seulement, l’amnistie, l’autorité de la chose jugée et l’abrogation de la Loi pénale. De même, l’art.2 alinéa 2 du CPP prévoit la possibilité d’extinction de l’action publique par la transaction ou par paiement d’une amende de composition à condition que la loi le prévoie expressément, en cas de retrait de plainte, lorsque celle-ci est une condition nécessaire à la poursuite. Mais, en plus de l’étude de ces deux problèmes, le procureur examinera également s’il ne s’agit pas d’une de ces infractions pour lesquelles, la poursuite ne peut avoir lieu exceptionnellement que sur plainte de la victime ou dénonciation ou autorisation d’une administration. En effet, dans certains cas, le Procureur de la République ne peut intenter une poursuite qu’il estime souhaitable. Il en est ainsi : Lorsque, la loi subordonne la recevabilité des poursuites à une plainte ou dénonciation préalable. Par exemple, cas d’une atteinte à la vie privée 90 lorsque la victime préfère rester à l’inaction que d’agir ; d’autres dépendent d’une plainte de certaines administrations telles que, les contributions indirectes, Eaux et Forêt et agents des Douanes 91 , etc. Parfois, la poursuite nécessite la solution d’une question préjudicielle à l’action. Il en est ainsi du cas où la poursuite ne peut être intentée tant qu’une juridiction n’a pas rendu sa décision sur un point relatif aux faits délictueux : il s’agit de problème particulier qui ne peut être tranché que par une juridiction déterminée et que l’on appelle question préjudicielle à

90 Aux termes de l’article 336 du CPM, l’adultère de la femme ou l’adultère du mari ne pourra être dénoncé que par le mari ou par la femme. 91 L’article 124 du CPPM érige en officiers de Police judiciaire « les agents et fonctionnaires auxquels la loi attribue certaines fonctions de police judiciaires » -Les agents de contributions indirectes sont réglementés par l’Ordonnance n°60-018 du 21 Septembre 1960 modifiée par la loi 64-018 du 3 Décembre 1964 ; -Les Eaux et Forêts : Ordonnance 60-128 du 3 octobre 1960 ; -Les Douanes : Ordonnance 60-084 du 18 Août 1960 ;et selon l’article 308 -1 du code des Douanes « La poursuite des infractions douanières est subordonnée a la plainte avec constitution de partie civile du chef de service central chargé du contentieux ou des Receveurs des douanes sous peine de nullité de la procédure. A cet égard, tous les actes de constatation établis par des agents d’une administration autre que douanière doivent être transmis à l’administration des douanes pour compétence en ce qui concerne la poursuite ». 32 l’action 92 . On peut citer par exemple, lorsqu’un crime ou un délit a été commis à l’occasion d’une poursuite judiciaire (comme la violation de domicile) et en violation d’une disposition de procédure pénale (relative par exemple à la perquisition), l’action publique ne peut être exercée que si le caractère illégal de la poursuite ou de l’acte a déjà été constaté par une décision définitive de la juridiction répressive. Dans d’autre cas, il se peut que le Procureur de la République ne compte engager la poursuite, dès lors que celle-ci, sera engagée contre son gré. C’est ce qui se produit, lorsque la victime porte son action civile devant la juridiction répressive, déclenchant ainsi automatiquement l’action publique et à défaut de laquelle, la poursuite serait nulle 93 . D’autre obligation contraint le Ministère Public à agir, si bien que ses pouvoirs d’action sont soumis par le principe hiérarchique. Alors que celui-ci est libre en principe de classer sans suite l’affaire. De ce fait, le refus du Procureur de la République peut être levé par un ordre de poursuite émané du procureur général ou du garde de sceaux. 94 Mais même si dans ce cas, le parquet agit contre son gré, il pourrait agir selon l’adage « la plume est serve, la parole est libre ». En d’autres termes, il pourrait interpréter et élargir verbalement ses décisions. De même, lorsque la loi subordonne la recevabilité des poursuites à une autorisation préalable, tel est le cas de l’immunité parlementaire, consacrée par l’art.70 alinéa 2 et 3 de la Constitution actuelle. Ceci implique que l’autorité judiciaire devrait présenter à l’Assemblée pendant la durée des sessions et au bureau de l’Assemblée en dehors de session « une demande de mainlevée » de l’immunité parlementaire. Cependant, une fois que la légalité de la poursuite est appréciée, le Procureur de la République apprécie sur l’opportunité de poursuite.

92 A ne pas confondre les questions préjudicielles à l’action de celles des questions préjudicielles au jugement. Ces dernières ne font pas obstacles au déclenchant immédiat des poursuites, mais seulement au jugement des faits délictueux, la juridiction répressive saisie doit surseoir à statuer jusqu’à ce que le tribunal compétent pour trancher le problème extra pénal soulevé ait rendu sa décision. 93 Crime, 6 janvier et 19 juin 1949, B.C., n°5 et 216

94 Selon l’article 153 du CPPM, « le procureur général a autorité sur tous les autres membres du Ministère Public » ; Aux termes de l’article 152 du CPPM, « Le Ministère de la Justice peut dénoncer au procureur général les infractions à la loi pénale dont il a connaissance, lui enjoindre d’exercer ou de faire exercer des poursuites, ou de saisir la juridiction compétente de telles réquisitions que le Ministère juge opportunes ». 33

- APPRECIATION DE L’OPPORTUNITE DE POURSUITE. Il peut paraître que le Ministère Public ait à se demander s’il va ou non poursuivre l’infraction, une fois qu’il paraît probable que celle-ci est constituée. Néanmoins, si le préjudice social est peu important, si l’objet de l’infraction est insignifiant, si le coupable a été mû par des mobiles particulièrement excusables, etc. De même, il arrive que le Ministère Public estime que la poursuite est inopportune. En tout cas, le Procureur de la République doit agir suivant que la loi lui ordonne de recevoir les plaintes et les dénonciations et d’en donner les suites. Il en résulte que ce pouvoir qui, lui est reconnu, lui autorise de prendre : _ soit une décision de classement sans suite ; _ soit une décision de poursuite. Dans la décision de classement sans suite, le Procureur de la République décidera de classer l’affaire sans suite, s’il pense que les poursuites sont irrecevables. Par exemple, l’extinction de l’action publique 95 ; Il en est de même, s’il estime que l’action publique serait mal fondée, lorsque tous les éléments de l’infraction ne sont pas réunis. Mais lorsque la charge de la preuve parait suffisante. En d’autres termes, lorsque le Procureur de la République estime que toutes les conditions de recevabilité de l’action publique sont réunies, et qu’elles paraissent être bien fondées ou qu’elles semblent opportunes, il va décider d’engager la poursuite. Comme il est de principe que l’action publique est le monopole du Ministère Public 96 . C’est à lui qu’incombe la charge de requérir l’autorisation du pouvoir législatif, en vue de poursuivre ou d’arrêter un parlementaire. Mais comme il est soumis au principe de subordination hiérarchique 97 et que le dossier à traiter touche un membre des parlementaires qui sont des affaires sensibles. En d’autres termes, l’affaire que le Ministère Public va étudier est une affaire qui intéresse les hommes politiques ainsi que l’opinion publique.

j95 Selon l’article 2 du CPP, l’action publique pour l’application de la peine s’éteint par la mort du délinquant, la prescription, l’amnistie, l’abrogation de la loi pénale et la chose jugée. Elle peut en outre s’éteindre par transaction ou par paiement d’une amende de composition lorsque la loi le prévoit expressément ; il en est de même, en cas de retrait de plainte, lorsque celle-ci est une condition nécessaire à la poursuite. 96 Cf. article 172 du CPPM Des exceptions peuvent être apportées à ce principe telles que : - le droit de poursuite directe accordé par la loi à une administration dont les actes sont faits à la requête du Président de la République, cf. article 173 CPPM ; - le droit d’action directe de la partie civile cf. article 174 CPPM 97 Le Ministère Public est un organe collégial et unique placé en tête sous la direction du ministère chargé de la justice. 34

Par conséquent, l’agent du Ministère Public doit formuler « une demande de conduite à tenir » ou « une demande d’instruction » afin d’informer ses supérieurs hiérarchiques.

• LE FONDEMENT

Premièrement, la nécessité de l’institution d’une procédure spéciale de poursuite contre un parlementaire a pour fondement, son rattachement aux missions qui lui sont confiées. Des missions, aussi importantes que les Américains appellent un système de « freins et de contrepoids » (check and balances) et que par lesquelles, séparés, distribués, les pouvoirs vont se limiter les uns les autres. En effet, puisqu’en général, la première mission des parlementaires est de représenter le citoyen dans chaque circonscription, ceux-ci sont réputés être le messager de leurs électeurs pour transmettre leur volonté auprès de l’Etat. Dans cette situation, il serait alors préférable, que chacun des parlementaires continue à maintenir ses services jusqu’à la fin de son mandat. Sinon, la suspension des fonctions de celui-ci, quelque soit sa raison, entrave au droit à l’égalité de la circonscription électorale qu’il représente, vis-à-vis de ses homologues. Alors que les parlementaires ne sont mêmes pas des personnes parfaites. Ils pourraient être à l’origine de trouble au sein de la Société où ils se trouvent. C’est pour leur agissement répréhensible qu’ils devraient être appelés devant la barre pour répondre à la responsabilité pénale. C’est sur cette idée d’interaction entre la réaction sociale et la représentation nationale que la loi sur la réglementation de la protection des parlementaires a été instituée par la loi fondamentale d’un pays. De même, il pourrait arriver que toutes les sessions soient perturbées par le pouvoir répressif, s’il n’existe pas de balise légale. Qu’en conséquence, les parlementaires menacés seraient tentés de travailler pour le compte et profit de l’exécutif que de finir dans l’embarras de l’injustice. Et cela implique que sur le plan pratique, la séparation des pouvoirs ne règne plus et cède la place qu’Yves Mény 98 appelle le « régime d’innombrables dictatures du passé et du présent dans le tiers-monde ». Et même si le parlement subsiste en état totalement dépourvu de volonté propre, l’institution de la demande d’autorisation de poursuite ou d’arrestation vient palier ce déséquilibre institutionnel.

B- CONSEQUENCE DE LA DEMANDE.

Cette demande produit, une fois reçue par l’autorité compétente, ses effets non seulement en matière de procédure, mais aussi envers l’intéressé.

98 Système politique français, édition Montchrestien, 1991, p 42-44 35

1- QUANT A L’ACTION PUBLIQUE

La demande de levée de l’immunité parlementaire a un effet suspensif en matière de poursuite 99 . Cet effet suspensif de la demande est lié à la nature même de la demande. En ce sens que l’autorité poursuivante doit surseoir à statuer jusqu’à ce que l’autorité législative (la Chambre ou le bureau de la Chambre selon le cas) ait statué sur la demande. De ce fait, deux cas doivent être retenus : - Dans le premier cas, si la Chambre ou le bureau de la Chambre auxquels le parlementaire appartient lève son immunité, sa poursuite ou son arrestation sera légale et possible dès l’autorisation par ses pairs de la demande. Et la justice pourra exercer ses fonctions en toute liberté, en vue de statuer sur son sort. - Dans le deuxième cas où la demande est refusée par ses pairs, une distinction doit être retenue suivant que le parlementaire est en session ou en dehors des sessions. S’il est en session, ni sa poursuite ni son arrestation ne seront pas possible 100 (situation avant la révision constitutionnelle du 4 avril 2007). Ainsi, la poursuite ne reprendra dans cette hypothèse qu’après la fin de son mandat. En d’autres termes, la réouverture de sa poursuite commencera dès qu’il ne sera plus couvert par son immunité. Car il n’est plus en exercice de son mandat 101 . La suspension de la prescription ne fait qu’arrêter les cours de la prescription. Mais de ce fait, elle a pour résultat de prolonger la durée de la prescription et de permettre de poursuivre le délinquant au-delà du délai fixé par la loi. S’il est par contre en dehors des sessions, la nécessité de la demande de levée de l’immunité se porte uniquement sur l’arrestation 102 , et sa poursuite pourra être menée librement, jusqu’à ce que la justice prononce sa décision. Et son sort dépend uniquement à partir de la décision de justice.

99 Il s’agit là d’une cause jurisprudentielle de suspension et non d’une cause légale. 100 Voir Constitution de la première République du 29 avril 1959 article 20 alinéa 2, Constitution version originale de la troisième République du 18 septembre 1992 et ses deux premières révisions de 1995 et 1998 en leur article 69 alinéa 2; Ce régime de protection parlementaire n’a plus sa raison d’être actuellement. Car depuis cette reforme constitutionnelle de 2007, c’est l’arrestation uniquement qui fait l’objet d’une demande de levée de l’immunité parlementaire en période des sessions et qu’en dehors des sessions, que ce soit la poursuite ou l’arrestation n’ont plus besoin d’être autorisées ; ce qui exclut dans tous les cas la nécessité de la demande : le Ministère Public n’a qu’à attendre la fin des sessions pour exécuter l’arrestation du parlementaire intéressé. 101 Il faut noter que par respect à cette fonction de représentation du peuple, un parlementaire pourra continuer à être appelé « député » même à l’expiration de son mandat. Mais, il est évident qu’il ne bénéficie plus du privilège de l’inviolabilité parlementaire. Il ne s’agit que d’une irresponsabilité parlementaire. 102 Voir note ci-dessus 36

En effet, en cas de relaxe, le parlementaire reprendra son titre de représentant élu du peuple ; par contre en cas de condamnation définitive 103 qu’elle soit sursitaire ou exécutoire, le parlementaire sera condamné et son immunité ne recouvre plus son arrestation et son titre d’élu du peuple sera constaté par la Haute Cour Constitutionnelle. De toute manière, lorsque l’autorité législative a reçu cette demande de mainlevée de l’immunité parlementaire, elle se préparera à en faire un examen avant d’arriver au vote proprement dit.

2- CONSEQUENCE DE LA DEMANDE QUANT A L’INTERESSE.

Pour connaître les conséquences de la demande sur le parlementaire lui-même, il faut se placer dans deux situations : la situation avant le vote et la situation après le vote.

a) AVANT LE VOTE

On entend par vote l’acte par lequel une Chambre parlementaire ou son bureau délibère sur une décision.

Avant le vote, le parlementaire concerné bénéficie encore de l’immunité parlementaire. Il peut continuer à exercer ses activités, qu’il soit en session, ou hors session.

b) APRES LE VOTE

Après le vote, deux choses attendent sur l’avenir du député (ou Sénateur) intéressé : soit la demande est refusée par l’autorité législative compétente à laquelle il appartient et le parlementaire gardera tous ses privilèges d’immunité parlementaire ; et s’il est relâché par l’autorité compétente, sa décision de poursuite court et son immunité sera levée. Il ne pourra plus se faire valoir de son immunité parlementaire et sa déchéance est définitive. Mais, pour connaître le déroulement de l’étude de demande levée de l’immunité parlementaire, il convient de passer sur le processus de la levée de l’immunité.

§2- LE PROCESSUS DE LA LEVEE DE L’IMMUNITE PARLEMENTAIRE.

En ce qui concerne l’étude des demandes éventuelles de levée de l’immunité parlementaire, la procédure est la même pour l’Assemblée que pour le bureau de l’Assemblée. En effet, la levée de l’immunité parlementaire se fait en trois étapes :

103 Cf. article 69 alinéa 3 de la Constitution du 18 septembre 1992 (troisième République) 37

Tout d’abord, la première concerne le dépôt de la demande de levée l’immunité parlementaire devant le bureau permanent de l’Assemblée 104 . Puis se suit l’examen de la demande de levée de l’immunité parlementaire d’un député ou de suspension de poursuite 105 , déjà engagée contre lui par une commission 106 de vingt-six membres 107 , constituée chaque année 108 et nommés selon le système de la représentation proportionnelle basée sur les effectifs des groupes109 . Cette commission, dont seuls les

104 Aux termes de l’article 22 de l’arrêté n° 111- AN/P du 16 novembre 2007 portant règlement intérieur de l’Assemblée nationale, le bureau permanent a le pouvoir de diriger tous ses services dans les conditions déterminées par le présent règlement. 105 Cf. la Constitution de 1959 en son article 20 dernier alinéa 106 A part de l’Assemblée plénière, du bureau permanent, des groupes parlementaires et de la conférence des présidents, les commissions constituent l’une des structures que comprend l’Assemblée nationale (article 18 loi n°93 004).Et il existe plusieurs commissions au sein de l’Assemblée, il y a ce qu’on appelle les commissions générales qui sont chargées de l’examen préalable des projets et propositions des lois (article 21 de la loi n°93 004),dont leur dénomination, leur nombre, leur composition et les modalités d’élection de leurs membres sont fixées par le règlement intérieur (article 91 alinéa 3 de la même loi); puis il y a aussi les commissions spéciales qui sont proposées en priorité par le président de l’Assemblée nationale à l’Assemblée nationale, dans le cas où une commission permanente se déclare incompétente ou en cas de conflit de compétence entre deux ou plusieurs commissions, après un débat où sont seuls entendus le gouvernement ou l’auteur de la proposition et les présidents des commissions intéressées (article 87 alinéa 2 du règlement intérieur de l’Assemblée) ; il y a aussi la commission mixte paritaire (article 22 de la loi n°93 004) qui est réunie dans les conditions prévues à l’article 90 alinéa de la Constitution Voir aussi les modalités du règlement intérieur (article 13 du règlement intérieur du Sénat) : « Lorsque par suite d’un désaccord entre les deux Assemblées, un projet ou une proposition de loi n’a pu être adoptée après deux lectures par chaque Assemblée ou si le gouvernement a déclaré l’urgence, après une seule lecture par chacune d’elle, le Premier ministre a la faculté de provoquer la réunion d’une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussions. Le texte élaboré par la commission mixte peut-être soumis par le gouvernement pour approbation aux deux Assemblées, aucun amendement n’est recevable sauf accord du gouvernement » ; il y a aussi les commissions mixtes qui sont composées des deux ou plusieurs commissions permanentes au sein d’une Chambre dont aucun texte n’a jamais prévu mais qui résultent de la pratique au sein de l’Assemblée nationale malagasy à laquelle le Sénat a aussi adopté ; il y aussi les commissions plénières qu’aucun texte non plus n’a prévu mais résultent aussi de la pratique de l’Assemblée nationale et le Sénat a aussi adopté ; il y a aussi les commissions d’enquête qui sont formées pour recueillir des éléments d’informations sur des faits déterminés et soumettre leurs conclusions à l’Assemblée, tout en excluant les poursuites judiciaires (article 26 de la loi n°93 004, article 95 de la Constitution actuelle, articles 124, 125 du règlement intérieur de l’Assemblée nationale) ; il y a aussi les commissions chargées des pétitions (article 127 alinéa 3 du règlement intérieur) ; les commissions pour les demandes éventuelles de levée de l’immunité parlementaire (article 82 du règlement intérieur et article 28 de la loi n°93 004) et enfin les commissions spécialement élues pour l’examen des propositions de résolution portant mise en accusation devant la Haute Cour de Justice (article 134 à 137 du règlement intérieur de l’Assemblée nationale)

107 Cf. article 82 du règlement intérieur 108 Cf. article 13 de la loi n° 93 004 portantes organisations et fonctionnement de l’Assemblée nationale 109 Cf. article 41 du règlement intérieur 38 membres assistent à ses travaux, doit entendre le député intéressé, lequel peut se faire représenter par un de ses collègues. Enfin, la procédure s’achève par l’ouverture des débats relatifs aux questions d’immunité parlementaire 110 , à laquelle l’Assemblée siège toujours en comité secret auquel seuls peuvent prendre la parole le rapporteur de la commission, le gouvernement, le député intéressé, un orateur pour et un orateur contre 111 . Le nombre des membres de la Commission est fixé par l’art.82, chapitre xv, relative à la discipline des débats et de la procédure de levée de l’immunité parlementaire, de la loi portant règlement intérieur de l’Assemblée nationale 112 . En effet, aux termes de cet article précité « Il est constitué pour les demandes éventuelles de levée de l’immunité parlementaire d’un député, une commission de vingt-six membres nommés selon la procédure prévue à l’article 41. Seuls, les membres de cette commission assistent à ses travaux. La commission doit entendre le Député intéressé, lequel peut se faire représenter par un de ses collègues. Pour les débats relatifs aux questions d'immunité parlementaire, l'Assemblée siège toujours en comité secret. Peuvent seuls prendre la parole, le rapporteur de la commission, le Gouvernement, le Député intéressé ou un membre de l'Assemblée le représentant, un orateur pour et un orateur contre ». Il est à noter que les textes malagasy actuels (Constitution, loi n° 93 004 du 21 janvier 1994 portant organisation et fonctionnement de l’Assemblée nationale encore en vigueur, et le règlement intérieur de l’Assemblée nationale) ne prévoient aucunement si la commission doit produire un rapport ou une proposition de résolution ou bien « un procès-verbal 113 ». Il ne précise non plus si elle doit statuer sur la levée de l’immunité elle-même ou sur la recevabilité de la demande uniquement. C’est après cette commission, que le député concerné connaîtra son sort, s’il sera livré ou non à l’autorité poursuivante, par ses pairs ou par le bureau de la Chambre. L’intéressé est alors encore couvert de son immunité parlementaire jusqu'à la sortie de la décision demandée. Qu’en est-il de la situation du parlementaire après le vote. En conclusion, l’inviolabilité parlementaire s’analyse en un régime dérogatoire Madagascar comme tout autre pays du monde s’est lancé dans le régime de protection des parlementaires. Ce système de protection parlementaire un peu spécifique se base sur l’existence d’un régime dérogatoire. Ce régime dérogatoire est constitué par de multiples

110 Idem 111 Cf. article 82 in fine du règlement intérieur 112 Arrêté n°111 AN/P du 16 novembre 2007 portant règlement intérieur de l’Assemblée nationale. 113 Cf. article 74 alinéa 2 de la même Constitution 39 interdictions à l’arsenal d’agir normalement. En effet, le régime dérogatoire ne peut être écarté qu’en dehors de certains cas limitativement définis, tels que la flagrance, la condamnation définitive, et ainsi que l’accomplissement de certaines formalités, à savoir la présentation d’une demande devant l’autorité législative compétente. Celle-ci a en effet, le dernier mot sur la possibilité ou non de la poursuite. Donc, la protection de parlementaires se résume en des interdictions et des exigences afin que ceux-là puissent bien mener leur fondement et ne pas subir les assauts des tenants de pouvoir peu disposés à voir des opposants embarrassants. En conclusion, l’inviolabilité parlementaire s’analyse en un régime dérogatoire dont le mécanisme se traduit en des interdictions et des exigences. En effet, si pour tout un chacun la commission d’une infraction donne droit à l’autorité répressive d’engager une poursuite en vue d’un procès débouchant à une condamnation, pour un parlementaire se trouvant dans la même situation ; le traitement ne sera pas identique. Afin de constituer un rempart contre d’éventuel abus de la part des tenants du pouvoir ou pour protéger contre d’éventuelles poursuites intempestives à l’encontre d’un parlementaire, la loi interdit l’avènement de ces poursuites ou exige des procédures particulières pour y arriver. Il en est ainsi de l’autorisation préalable. Cette procédure est assez complexe et son issue est incertaine quant à l’acceptation de la part des membres du Parlement, c’est-à-dire la levée de l’inviolabilité parlementaire. Aussi, est-il intéressant de connaître comment cette protection a-t-elle été appliquée à Madagascar. La connaissance de cette protection nous amène à étudier dans la deuxième partie l’application du régime dérogatoire.

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L’APPLICATION DU REGIME DEROGATOIRE. L’application de la protection des parlementaires à Madagascar a connu des étapes diversifiées. En effet, la protection a subi et subit encore les tendances du régime en place et de la personnalité des Gouvernants. De la pleine protection, le régime dérogatoire s’est vu parfois amenuisé la couverture des parlementaires. En tout cas, des incidences pratiques ont nourri ce régime dérogatoire.

CHAPITRE I : LA MISE EN ŒUVRE DU REGIME DEROGATOIRE PAR LES REPUBLIQUES SUCCESSIVES.

Il s’agit d’étudier la mise en œuvre de l’application de ce régime dérogatoire depuis l’indépendance jusqu’à ce jour. Mais pour bien cerner cette étude, il est nécessaire de la repérer dans les sections suivantes, la mise en œuvre elle-même de ce régime (Section I), afin d’en décrypter les réalités que subissent les parlementaires malgaches (Section II).

SECTION 1 : ETUDE DE LA MISE EN ŒUVRE.

Cette étude de la mise en œuvre du régime dérogatoire nous permet, tout en faisant une analyse évolutive de ce régime, de décrire que l’effectivité de la protection des parlementaires est fonction de la politique sinon de l’opinion dominante. En fait, il faut distinguer d’un côté l’existence d’une pleine protection, qui caractérise le régime de la première République et celui de la première étape de la troisième République ; et la réduction de la protection de l’autre côté.

§1 : UNE PLEINE PROTECTION

D’aucuns n’ignorent que la règle de l’inviolabilité parlementaire est destinée à protéger pleinement les élus dans l’exercice de leurs fonctions. Et la pleine protection doit être la règle qui s’applique. Car étant la finalité même de la mesure. Et el en était ainsi à certaines époques de la vie politique à Madagascar. Cette pleine protection s’inscrivait dans un contexte particulier qui mérite d’être mis en relief.

A- SIGNIFICATION

En droit parlementaire, la protection des parlementaires est dite pleine lorsqu’elle agit sans considération du moment : durant leur mandat : une protection pendant la session et hors session. Dans l’histoire des parlementaires malagasy, la pleine protection parlementaire ne

41 peut être signalée que durant toute la première République d’une part et lors de la première étape de la troisième République d’autre part. Pour la première République, la situation est prévue par l’art.20 al.2 et 3 de la Constitution du 29 avril 1959, aux termes duquel : « Aucun député ne peut, pendant la durée des sessions, être poursuivi ou arrêté en matière criminelle ou correctionnelle qu’avec l’autorisation de l’Assemblée, sauf le cas de flagrant délit. Aucun député ne peut, hors session, être arrêté qu’avec l’autorisation du bureau de l’Assemblée dont il fait partie, sauf le cas de flagrant délit, des poursuites autorisées ou de condamnation définitive ». Cependant, après quelques temps de caducité (1975–1991), par l’abrogation de disposition en la matière, par la République Démocratique Malagasy, celle-ci réapparaît lors de la première et deuxième étape de la troisième République. Ainsi, selon les dispositions de l’article 69 al.2 et 3 de Constitution initiale de la dite République 114 , il est proclamée qu’ « Aucun député ne peut, pendant la durée des sessions, être poursuivi ou arrêté, en matière criminelle ou correctionnelle, qu’avec l’autorisation de l’Assemblée, sauf le cas flagrant délit, de poursuites autorisées ou de condamnation définitive. Aucun député ne peut, hors session, être arrêté qu’avec l’autorisation du bureau de l’Assemblée, sauf le cas de flagrant délit, de poursuites autorisées ou de condamnation définitive. » Ainsi, par ces dispositions, le député se trouve entièrement protégé contre d’éventuelle poursuite intempestive de la part des Gouvernants. Il s’agit là d’un grand avantage dont jouissaient les députés, et leur permettant d’agir en toute sérénité, remplissant leur mission de représenter le peuple sans crainte aucune. Il s’agit donc d’une pleine protection. Mais comme toute construction juridique, cette pleine protection n’est pas le fruit du hasard, elle reflète la production des évènements politiques que historiques à Madagascar.

B- CONTEXTE

Les raisons pour lesquelles, les tenants du pouvoir malagasy pendant les périodes précitées, ont opté la voie d’une pleine protection en faveur de parlementaires, sont de deux ordres. Le premier coïncide avec l’accession de Madagascar à l’indépendance, tandis que le second est la conséquence positive de l’éclatement d’un mouvement populaire récent.

114 Ces deux étapes ont débuté depuis l’année 1992 jusqu’ au 4 avril 2007, date de la troisième révision constitutionnelle. 42

1- UNE INDEPENDANCE RECENTE.

L’accession de Madagascar à l’indépendance a apporté d’innovation positive sur la réglementation du statut des premiers parlementaires de la première République. Car, comme notre Ile à l’époque était nouvellement indépendante, l’image de la civilisation métropolitaine était encore très remarquée. Ce vestige du colonialisme français influence les pouvoirs constituants malagasy du 16 octobre 1958. En effet, nous le savons bien, le droit malagasy est un droit fortement emprunté du droit français. Certes, le pays malagasy avait déjà connu une évolution en la matière. Mais ce n’était pas réellement un droit au sens moderne du terme. Car à cette époque, les monuments juridiques existants n’avaient pas encore prévu les structures des institutions d’un Etat moderne 115 Certes le royaume merina, à part la coutume, se servent : du texte de 48 articles de Ranavalona I (1828-1861) ; du code de 50 articles de RADAMA II (1861-1863) ; du code des 68 articles de RASOHERINA, la femme de RADAMA II (1863-1868) ; du code de 101 articles de 1868 et du code des 305 articles ou loi de l’Etat ou ny Lalànan’ny Fanjakana du 29 mars 1881, sous la règne de Ranavalona II (18868-1883); des règlements aux gouverneurs de l’Imerina ainsi que de l’Ordonnance du 9 mars 1896 de Ranavalona III (1883-1897). Mais, ces textes ne constituent pas encore un précédent pour l’adoption de la première Loi fondamentale de la République malagasy, surtout pour la constitutionnalisation du statut des parlementaires. Ces textes dont est le code des 305 articles « sont parfois incomplets, insuffisants : ils sont déjà anciens et ne répondent pas à toutes les exigences de la vie moderne 116 ». Il a fallu attendre une soixantaine d’années (1896-1960), pour que le droit malagasy trouve son véritable essor par l’emprunt du droit français, notamment celui de la Constitution de la cinquième République Française 117 .

115 Le royaume merina, à partir du règne d’ANDRIANAMPOINIMERINA (1787 – 1810) a déjà constitué une sorte de droit civil et répressif en partie de type coutumier et en partie codifié. Puisqu’au début de cette époque, ce royaume merina s’est constitué en conseil des villages (conseils de Fokonolona) qui n’étaient que des juges de contestation peu importante et juges conciliateur ; en vadintany (fonctionnaires institués par ANDRIANAMPOINIMERINA) qui avaient pour mission de recueillir tous les éléments de nature à apporter des éclaircissements sur les affaires qui échappent à la tentative du Fokonolona et d’en essayer eux-mêmes de concilier les parties en cause et les exposer au roi à défaut de leur conciliation 116 Voir Eugène Thébault, Etude malgache, centre de droit privé, Institut des hautes études de Tananarive, code des 305 articles 1960, p13 117 Il s’agit de la Constitution du 4 octobre 1958 43

C’est peut être la raison pour laquelle Eugène Thébault affirme : « A Madagascar, c’est le droit français qui jouera ce rôle, non pas parce que pendant soixante-cinq ans la France a commandé dans ce pays, mais parce que son rayonnement intellectuel l’a marqué profondément… ».Nous pouvons illustrer ce phénomène par la ressemblance entre le régime d’immunité parlementaire français et malgache. Ainsi, selon l’article 26 de la Constitution (version initiale) de la cinquième République française 118 , « Aucun membre du Parlement ne peut être poursuivi, recherché, arrêté, détenu ou jugé à l’occasion des opinions ou votes émis par lui dans l’exercice de ses fonctions. Aucun membre du Parlement ne peut, pendant la durée des sessions, être poursuivi ou arrêté en matière criminelle ou correctionnelle qu’avec l’autorisation de l’Assemblée dont il fait partie, sauf le cas flagrant délit. Aucun membre du Parlement ne peut, hors session, être arrêté qu’avec l’autorisation du bureau de l’Assemblée dont il fait partie, sauf le cas de flagrant délit, de poursuites autorisées ou de condamnation définitive. La détention ou la poursuite d’un membre du Parlement est suspendue si l’Assemblée dont il fait partie le requiert ». Ce qui se rapproche du système adopté par la première République malgache. En effet, l’article 20 de la Constitution du 29 avril 1959 119 dispose « Aucun député ne être poursuivi, recherché, arrêté, détenu ou jugé à l’occasion des opinions ou votes émis par lui dans l’exercice de ses fonctions. Aucun député ne peut, pendant la durée des sessions, être poursuivi ou arrêté, en matière criminelle ou correctionnelle, qu’avec l’autorisation de l’Assemblée dont il fait partie, sauf le cas de flagrant délit. Aucun député ne peut, hors session être arrêté en matière criminelle ou correctionnelle, qu’avec l’autorisation du bureau de l’assemblé, sauf le cas de flagrant délit, des poursuites autorisées ou de condamnation définitive. La détention ou la poursuite d’un député sera suspendue si l’Assemblée la requiert. » C’est en se référant à ce régime d’inviolabilité française que les pouvoirs constituants et législatifs de 1958 malagasy, ont élaboré de statut des premiers futurs parlementaires de la République malagasy. Cette inspiration constitutionnelle malgache, vis-à-vis de la

118 Il s’agit de la Constitution adoptée du 4 octobre 1958 et promulguée le 28 septembre 1958 (Constitution de la cinquième République) 119 Constitution de la première République malgache 44

Constitution française de la cinquième République, se concrétise aussi par la rédaction de l’article 8, titre II de la Constitution du 29 avril 1959 (Constitution de la première République Malagasy) qui dispose : « Le Président de la République est élu par un collège électoral comprenant : les membres de l’Assemblée nationale, etc. ». Comme ce qui ressemble en France, à la rédaction de la Constitution de la Cinquième République Française. Cependant, après une seize années d’éclipse (1975-1991), cette pleine protection parlementaire réapparaît à l’issue de l’adoption de la Constitution initiale de la troisième République ; cette initiative de changement politique est la conséquence logique de l’éclatement du mouvement populaire récent.

2- UN MOUVEMENT POPULAIRE RECENT.

Le déchaînement de la colère populaire contribue également à l’amélioration du statut des futurs parlementaires malagasy de la troisième République. Puisque cette justice populaire est réclamée en novembre 1991, pour contester et dénoncer la médiocrité de l’administration socialiste dans toutes ses formes : le socialisme concerne tous les secteurs « tant dans le domaine politique que dans les secteurs économique et social 120 ». De même, depuis 1975, les activités politiques sur l’ensemble du territoire de la République Démocratique de Madagascar, s’exercent exclusivement à l’intérieur du Front National pour la Défense de la Révolution (F.N.D.R) 121 , organisation créée au lendemain du référendum portant Didier Ratsiraka à la présidence de la République malgache, 122 dont seuls les organisations et partis révolutionnaires précités peuvent former le front, à savoir : - L’UDECMA ; - Le Vonjy ; - L’AKFM ; - Le MONIMA ; - L’AREMA ; - KMTP ; - Iray tsy mivaky ;

120 Voir Patrick Rajoelina, Quarante années de la vie politique de Madagascar, 1947- 1987, l’Harmattan 1988, p58 121 Voir article premier de l’Ordonnance n°76-050 du 29 décembre 1976 portant création du Front Nationale pour la Défense de la Révolution. 122 Selon l’article 3 de l’Ordonnance n° 76-050 du 29 décembre 1976 portant création du Front National pour la défense de la Révolution, les activités politiques sur l’étendue du territoire de la République Démocratique de Madagascar s’exercent exclusivement à l’intérieur du Front. En conséquence, seuls les organisations et partis révolutionnaires figurant sur la liste de l’article 2 ci- dessus sont autorisés à déployer des activités politiques. 45

- KDRS 123 . Mais en définitif, la véritable contestation remonte au temps de la réélection du Président de la République, en l’occurrence de Didier RATSIRAKA. Malgré le décomptage du vote à sa victoire : 62% des suffrages universels, alors que dans certaines villes comme Fianarantsoa, des résultats favorables au candidat d’opposition, comme MANANDAFY RAKOTONIRINA avaient été inversés 124 ». Leur objectif était d’ « amener Ratsiraka à changer la Constitution (abattre le « mur de Jéricho »), à abolir son Front de la Révolution, dans un sens unique d’instaurer un pluralisme politique réel et une véritable séparation des pouvoirs et à transférer le pouvoir à un gouvernement transitoire chargé d’organiser de nouvelles élections. Cette manifestation publique et pacifique a commencé au début du mois de mai 1991, sous la direction des forces vives, dont fut en tête le professeur chirurgien ZAFY Albert. Elle a comme message important, selon les avis des meneurs, le retrait total de la machine socialiste, à l’échange du choix vers la démocratie libérale. Avec l’effondrement de l’U.R.S.S, le libéralisme était conseillé un peu partout dans tous les domaines, à savoir le domaine politique qu’économique etc. Dans le domaine politique, l’une des preuves du choix irréversible vers la démocratie est la reprise des dispositions de l’ancienne Constitution de la première République, en matière d’inviolabilité parlementaire : seulement, l’art. 20 al.2 et 3 de la Constitution du 29 avril 1959 est remplacé par l’art.69 al.2 et 3 de la Constitution initiale de la troisième République. Cependant, malgré cette volonté politique délibérée, menée par certains dirigeants politiques malagasy (durant la première République et lors de la première étape de la troisième République), d’autre s’opposait. Le pire est que ce dernier, au lieu de modifier les dispositions relatives à la protection parlementaire, ne cherchait qu’à les abroger ou du moins à les réduire.

§2 : DE L’ABROGATION A LA REDUCTION DE LA PROTECTION.

Comme la pleine protection, ces deux faits juridiques extincteurs de droit parlementaire ne sont pas chacun d’eux survenus de la même époque. Le premier s’est produit pendant la deuxième République, tandis que le second s’est survenu à partir de la deuxième étape de la troisième République.

123 Cf. Ord n°76-050 op.cit. article 2 124 Voir Politique africaine 52 Madagascar, édition Ambozontany et Karthala, décembre 1993, p 6 46

A- DE L’ABROGATION

Comme l’on a dit là-dessus, l’abrogation de l’inviolabilité parlementaire n’a été connue que durant la deuxième République. L’article 66 de la Constitution de 1975, relatif à l’Assemblée Nationale Populaire ne dispose que de l’irresponsabilité parlementaire, protégeant un parlementaire (monocaméral) contre tout acte de poursuite, de recherche, d’arrestation, de détention ou de jugement en raison des opinions ou votes émis par lui dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions. Cette rupture politique avec l’ancien régime de la première République précédente avait pour cause la montée du communisme. Mais ce choix vers la voie socialiste ne peut être qu’un système protectionniste, en vue de défendre le pouvoir gagné à la hâte, sinon à l’improviste. Car selon une personnalité politique 125 « Personne n’a pressenti être Président de la République à Madagascar ». En effet, élu par ses pairs réunis au sein du Directoire militaire, puis du Conseil Suprême de la Révolution (CSR), Didier RATSIRAKA avait pris le contrôle du pays, à la suite de son programme révolutionnaire. Pour régulariser donc son pouvoir pris à la hâte, il faisait adopter par la population, un référendum plébiscite à triple objet, à savoir : 1. La Constitution de ce qui allait devenir la Deuxième République ; 2. Son élection à la magistrature suprême ; 3. Et une « charte de la révolution socialiste » 126 . Méfié de la prise du pouvoir loin de la voie démocratique, et sachant que les parlementaires constituent la véritable opposition du pays. Le nouvel homme fort de la deuxième République avait abrogé les dispositions des alinéas 2, 3 et 4 de la Constitution de la première République.

B- D’IMPORTANTS AMENAGEMENTS

Depuis l'événement de 1996, auquel le premier Président de la troisième était forcé de démissionner, par suite de son empêchement par l'Assemblée nationale de l'époque 127 , ses successeurs, malgré leur méfiance du pouvoir, en tirent des leçons. Ils ne cherchaient qu’à

125 Un ministre de la communication de transition de 2009, Gilbert RAHARIZATOVO lors de son interview sur le plateau de TV PLUS, la nuit du 20 novembre 2009, avec l’interviw de la journaliste nommée ONITIANA Réaly 126 Voir Histoire de Madagascar 1895 – 2002 RANDRIAMAMONJY Frédéric Antananarivo 2009, p 328 127 Il s’agit d’une décision de la HCC n° 17-HCC/D3 du 4 septembre 1996 proclamant l’empêchement définitif de l’ancien Président de la République ZAFY Albeert. 47 réduire la portée de l'inviolabilité parlementaire, voire en renforcer la mise en cause des parlementaires. Cette réduction de la protection parlementaire se manifeste par l'inexistence d'une protection hors session.

1- INEXISTENCE DE PROTECTION HORS SESSION.

Avant la révision de la Constitution du 04 avril 2007, à l'exception de la Constitution de 1975, toutes les lois fondamentales de la République malagasy, ont prévu la protection parlementaire hors session. Ainsi, aux termes de l'art.20 al.3 de la Constitution du 29 avril 1659: "Aucun député ne peut, hors session, être arrêté qu'avec l'autorisation du bureau de l'Assemblée dont il fait partie, sauf le cas de flagrant délit, de poursuites autorisées ou de condamnation définitive 128 ". Pourtant, désormais, cette protection n’a plus sa raison d’être, car la Constitution révisée de 2007(dernière Constitution de la troisième République), ne prévoit que la protection des parlementaires pendant la durée des sessions et uniquement contre l’arrestation ; ce qui explique la possibilité de poursuite à n’importe quelle période. De toute manière, il convient d’analyser la vraie intention du pouvoir constituant de la Constitution de 2007, au terme de l’article 70 alinéa 2. En effet, si un député ou sénateur a fait l’objet d’une poursuite ou d’un mandat d’arrêt ; la première situation ne pose aucun problème, puisque la dernière Constitution de la troisième République n’y pose aucun obstacle. Cette seconde situation mérite d’une analyse pure et simple. De cette analyse, on peut tirer la conclusion suivante : la Constitution, troisième révision de la troisième République n’octroie aucun avantage aux parlementaires qu’aux termes de l’irresponsabilité. En d’autres termes, si un parlementaire en session est protégé contre son mandat d’arrestation, le pouvoir répressif n’a qu’à attendre la fin de la session, après laquelle l’arrestation est possible, alors que sa poursuite a déjà été engagée avant tout cela. Ce qui explique l’inexistence totale de la protection des parlementaires. En plus de cette absence de protection hors session, la mise en cause des parlementaires commence aussi, dès la première révision de la Constitution de la troisième République, qui se durcit.

128 Voir aussi art.69 al.3 de la Constitution initiale de la troisième République 48

2- RENFORCEMENT DE LA MISE EN CAUSE DE PARLEMENTAIRS.

Cette remise en cause des parlementaires s'est avérée renforcée, depuis ces trois dernières révisions constitutionnelles de la troisième République. En effet, lorsque l'art.69 de la Constitution initiale du 18 septembre 1992 en son dernier alinéa autorise, d'une part tout individu à mettre en cause les carences ou agissements d'un député devant l'Assemblée Nationale, et ordonne au bureau permanent d'y apporter une réponse diligente d'autre part; la situation n'est plus la même actuellement, car depuis la révision Constitutionnelle du 13 octobre 1995, l'art.69 en son dernier alinéa a non seulement retenu l'accessibilité de tout intéressé sur la mise en cause des carences ou agissements d'un député mais aussi et surtout a renforcé cette ouverture de procédure de mise en cause des parlementaires, par l'institution de la procédure de saisine par écrit du bureau permanent de l'Assemblée Nationale. Mais, ce qui est pire est que la Loi impose au bureau permanent saisi d'apporter une solution circonstanciée dans un délai de six mois 129 . D’ailleurs, le renforcement de la mise en cause des parlementaires est très remarqué depuis la révision constitutionnelle du 4 avril 2007. En effet, depuis ce temps les parlementaires ne peuvent plus faire l’objet d’une protection, en dehors des sessions, contre l’arrestation et que pendant la session seule l’arrestation est prohibée et qui nécessite d’une autorisation de la part de l’Assemblée. Cependant, dans la pratique, la plupart de cas, démontrent que ce système de protection parlementaire ne peut être mis en jeu que par l’existence des incidences que la Constitution elle-même prévoit.

SECTION II : LES INCIDENCES PRATIQUES AU REGIME DEROGATOIRE.

Dans cette section, nous allons voir comment dans la pratique se manifeste la répression des parlementaires mis en cause en dehors de toute procédure de levée d’immunité parlementaire.

§1 : LA SITUATION DES PARLEMENTAIRS EN CAS D’INCIDENCE AU REGIME DEROGATOIRE.

Il peut arriver en période exceptionnelle, que la Constitution autorise la répression des parlementaires. C’est la situation de flagrance. Mais comme toute personne, ils peuvent exercer des voies de recours suite à leur condamnation. L’issue de l’exercice de ces voies de

129 Voir aussi art.70 dernier alinéa de Constitution de 2007 49 recours et intéressante, car elle reflète en réalité l’emprise de la politique (exécutif) sur le judiciaire. A- LA SITUATION DE FLAGRANCE En situation de flagrance, les problèmes concernent, non seulement l'arrestation et détention d'un député intéressé, mais aussi d'une question d'ouverture du procès à son encontre tout en excluant la procédure de demande d'autorisation auprès de ses pairs ou du bureau de la Chambre auquel il appartient.

1- ARRESTATION ET DETENTION

Ces faits attentatoires à la liberté ont bousculé bon nombre des parlementaires, à savoir le Sénateur Adolphe de Moramanga 130 , l’ancien député de Nosy-Be Alexis MANDAFATRA, le député de Maintirano VONINAHITSY Jean Eugène, le député d’Ikalamavony HERIHAJANAINA Randrianirina et le député indépendant de Mananara Nord ZAKAHELY Boniface. Prenons des cas qui ont le plus défrayé la chronique et retenu l’opinion publique.

a) - Le cas du député VONINAHITSY Jean Eugène ou de la flagrance.

a 1- Les faits

VONINAHITSY Jean Eugène, le député élu de Maintirano a fait quatre fois de suite l’objet d’arrestation et de détention. Ses deux premières arrestations remontent jusqu’ au dernier règne de l’Amiral Didier Ratsiraka, tandis que les autres sont effectuées sous le règne du Président RAVALOMANANA Marc. • Les faits au temps de RATSIRAKA Didier. L’arrestation a été exécutée, selon les autorités de l’époque en réponse de la flagrance de chacun de ces délits qu’il a connus 131 . En effet, VONINAHITSY a été premièrement arrêté, le 23 décembre 2000 pour outrage au chef de l’Etat, diffusion de fausses nouvelles et diffamation à cause de cette déclaration 132 .

130 Ce Sénateur AREMA élu de Moramanga avait été interpellé par la justice suite à sa déclaration des six conteneurs d’armes bloqués à Toamasina qui s’était avérée non fondée aux yeux de la justice. Ce qui lui avait risqué d’être poursuivi pour propagation de fausses nouvelles. Voir MIDI Madagascar, mardi 21 février 2006, n°6858, p. 3 R. O. 131 Si on rappelle les faits, de retour à Madagascar, après sa mission parlementaire en Ukraine, le Sieur VONINAHITSY Jean Eugène, d’après sa déclaration publié le 31 octobre 2000, dans le journal « ny Gazetiko », a revelé lors d’une conférence de presse, le 26 octobre 2000, que le pont flottant que le Président de la République a prétendu avoir acheté aux autorités ukrainiennes, avait été en fait donné à la population malgache 50

. Trois jours plus tard, le même personnage politique, le 26 décembre 2000, a aussi été victime d’une deuxième arrestation accusé d’une émission de neuf chèques sans provision, en juin, juillet et août 2000, que les autorités considéraient également comme des flagrants délits. L’autorité répressive pourrait ainsi se référer à la législation et à la jurisprudence (JCP) française et expliquant en particulier que « la flagrance d’une infraction se trouve fixée, non au moment où elle se commet mais, à l’instant où elle est révélée par un indice apparent »133 . Dans le cas d’espèce, les autorités affirment que la flagrance et l’existence même de cette infraction sont révélées par l’avis de non-paiement pour insuffisance de provision, délivré par la Banque. 134 .  Analyse des faits Cette mise en accusation du député de Maintirano VONINAHITSY Jean Eugène est entachée d’un aspect politique. Car la procédure de flagrance est une procédure spéciale permettant aux autorités répressives d’agir en toute diligence, pour ne pas perdre des preuves manifestes. En d’autres termes, pour respecter les moindres garanties des libertés individuelles, la procédure de flagrance doit être strictement limité dans le temps. En conséquence, le laps de temps écoulé entre la révélation du pont flottant le 26 octobre 2000 et l’arrestation du parlementaire du parti RPSD- nouveau ne reflète aucun aspect de flagrance. Pareil cas pour l’émission de neuf chèques sans provision en juin, juillet et août 2000, qui a poussé l’Etat à le faire arrêter le 26 décembre 2000. • Les faits sous l’époque de Marc RAVALOMANANA. Une autre arrestation a enlisé aussi le député Président du nouveau-RPSD. Il a été arrêté mercredi 14 décembre 2005, à 10h 45, à l’hôtel restaurant le « Pavillon de Jade » à Behoririka. « VONINAHITSY Jean Eugène, d’après le communiqué de presse de la gendarmerie, a été pris en flagrant délit d’extorsion de fonds » ; le texte poursuit qu’une

132 Si on rappelle les faits, de retour à Madagascar, après sa mission parlementaire en Ukraine, le Sieur VONINAHITSY Jean Eugène, d’après sa déclaration publié le 31 octobre 2000, dans le journal « ny Gazetiko », a revelé lors d’une conférence de presse, le 26 octobre 2000, que le pont flottant que le Président de la République a prétendu avoir acheté aux autorités ukrainiennes, avait été en fait donné à la population malgache 133 Cas n°MAG/01- Jean Eugène VONINAHITSY- Madagascar in « Résolution adoptée sans vote par le Conseil interparlemenataire à sa 169 ème session (Ouagadougou, le 14 septemre 2001) 134 Résolution adoptée sans vote par le Conseil interparlementaire à sa 19 ème session (Ouagadougou, le 14 septembre 2001) 51 somme de 2 millions ariary a été prise avec le député VONINAHITSY : c’est la première partie du montant de 100 millions d’ariary qu’il a extorqués. 135  L’analyse des faits. Cette affaire d’extorsion de fonds révèle aussi un caractère politique. Car étant surpris en flagrant délit, la Justice n’a retenu finalement que pour l’accusation de trafic d’influence 136 . De même, si le député a été relaxé au bénéfice du doute sur les chefs d’inculpation, à savoir l’accusation d’extorsion des fonds et les menaces verbales. Il doit être libéré et qu’une demande d’autorisation de poursuite doit être formulée, pour toute nouvelle accusation.

a 2- Essai d’explication. Ces multiples mises en cause de ce parlementaire en particulier peuvent s’expliquer par sa personnalité et par ses affiliations politiques. D’abord, en ce qui concerne la personnalité, d’aucuns n’ignorent qu’il s’agit d’une personnalité très engagée. Etant le benjamin des parlementaires en 1977 137 . Il était déjà élu non pas par le parti majoritaire, car issu de RPSD et n’a jamais hésité à se verser dans un « franc parler » souvent gênant. Ensuite se affiliations politiques ne coïncidaient presque jamais à celles du régime en place. Ces deux aspets (personnalité et affiliation) rAssemblées expliquent qu’il soit la cible privilégiée des pouvoirs. Ce qui explique ces multiples mises en cause. Par ailleurs, ceci montre la faiblesse des parlementaires où le véritable débat démocratique reste absent à cause d’une majorité écrasante du parti présidentiel sur le législatif, et d’une opposition minoritaire, affaiblie. Ses arrestations démontrent donc la volonté de « muscler » des parlementaires qui fragilisés par l’exemplarité de l’arrestation et menés par l’idée de se laisser « guider voire manipuler » sans réaction aucune.

135 MIDI, 15 décembre 2005, n° : 6800, p.2 recueilli par R.C. 136 Idem 137 Il était aussi élu député pendant la deuxième législature (1998- 2002) et la troisième législature (2002- 2007) de la troisième République. 52 b) - Le cas du député d’Ikalamavony HERIHAJAINA Andrianirina ou encore de la flagrance.

b 1- Les faits. Pour le cas du député HERIHAJAINA Randrianirina, d’après la réponse du Ministère de la Justice sur la saisine, faite par le bureau permanent sur les faits reprochés et surtout sur la qualification de procédure engagée pour sa poursuite, il a fait l’objet d’enquête pour association des malfaiteurs et contrefaçon de billets de Banque et escroquerie, par la brigade spéciale de la gendarmerie nationale, suivant procès verbal n°022/BS/ZN du 9 mars 2004, parvenu au Parquet, le 10 mars 2004. Il a été arrêté en flagrant délit, dans sa voiture, avec trois co-auteurs et complices et il a été déféré au parquet le même jour. 138 Mais, tout au long du procès, deux chefs d’inculpation ont finalement pesé sur lui, à savoir le trafic des fausses monnaies et le meurtre 139 , suite à la mort du gendarme. 140 • Analyse des faits. Cette arrestation du député HERIHAJAINA Andrianirina, soulève aussi d’une coloration politique. Car, si c’est toujours la flagrance qui piège les coincent les parlementaires. La décision judiciaire s’écarte de cette qualification. Tel était le cas du dit député d’Ikalamavony, qui avait été libéré sur les chefs d’inculpation, comme l’association des malfaiteurs, le meurtre et assassinat et la contrefaçon de monnaie 141 . En effet, la Cour Criminelle Ordinaire (CCO), n’a-t-elle pas finalement asphyxié le député HERIHAJAINA Randrianirina sur la tentative de contrefaçon de billets étrangers 142 .

b 2 – Essai d’explication. Cette histoire d’arrestation du député d’Ikalamavony HERIHAJAINA était aussi à l’origine d’une rancœur politique du pouvoir de l’époque. Car étant proche d’une autre figure politique très controversée 143 . Ces deux personnages politiques démontrent la faiblesse du pouvoir en place. Car, aucun parti politique ni indépendant ne leur a défié pendant les législatifs dans leur circonscription. En tout cas, le fait que ces deux personnages politiques sont très proches, peut expliquer la vigilance de l’Etat, pour mettre de l’appât su l’un d’entre eux.

138 Recueilli par Miadana Andriamaro, Gdi 13 mars 2004 in « http://www.google.fr/search/nah296.free.fr/arrestation_du_député_herihajaina.htm 139 Suite à la mort du Gendarme prénommé Arthur. (Miadana ANRIAMARO GDI 13 mars 2004) 140 MIDI, samedi 22 octobre 2005, n°6756 p. 3, recueilli par B.A. 141 http://nah.296.free.fr/herihajaina-randrianirina-Gdi241005.htm 142 Idem 143 Il s’agit de PETY Rakotoniaina 53

c) – Le cas du député de Mananara Nord, ZAKAHELY Boniface : de la complexité de l’affaire.

La situation qui a amené à la mise en cause de ce parlementaire s’avère complexe. Car, comme on va le constater, les faits sont mêlés à ceux qui remontent en l’an 2002, à son statut de parlementaire en passant par ceux qui sont connus pendant son mandat.

c 1 - Faits

Quant au député élu de Mananara Nord, ZAKAHELY Boniface, il a fait en premier lieu, l’objet d’une poursuite en l’an 2005. Et cette poursuite dès le début n’avait pas respecté les lois en vigueur à l’époque. Car étant impliqué dans une affaire qui remontait en l’an 2002 144 ; une affaire qui lui faisait peser plus de 11 chefs d’inculpation, à savoir l’atteinte à la sûreté intérieure de l’Etat, l’atteinte à l’ordre public et violation de domicile, etc. 145 Et que tout en sachant être couvert par son immunité parlementaire, le député de Mananara Nord, sur convocation du Parquet s’était déjà présenté à Anosy, au Palais de justice, où on lui a signifié l’existence d’une poursuite judiciaire contre lui, mais il avait refusé d’apposer sa signature 146 . Une deuxième affaire oppose aussi le député de Mananara Nord contre Ibe Sing Iva 147 . Ayant perdu le procès en première instance (Tribunal de première instance de Maroantsetra), le député de Mananara Nord a été condamné par la Cour d’Appel de Toamasina, à 30 mois d’emprisonnement ferme du 7 novembre 07, pour Coups et Blessures Volontaires.

c 2 - Essai d’explication.

Pour ce député de Mananara Nord, d’aucuns n’ignorent la personnalité de cet illustre député indépendant. En effet, si la majorité règne sur le groupe parlementaire TIM d’un côté, des personnalités indépendants émergent et contestent la portée du pouvoir en place sur l’étendue du territoire. Et cela explique déjà une démonstration de contestation de la part des élus. Telles sont les victoires que démontre la force de ce personnage politique de Mananara Nord.

Car étant élu député indépendant du 15 décembre 2002, durant la troisième législature de la troisième République, il fut encore réélu député lors des législatifs du 23 septembre

144 http://razafimahazo.free/Descendants/ReporterMdvv/Arcmdvv051209.htm 145 Idem 146 Idem 147 Il s’agit d’un opérateur politique et économique dans la région de Maroantsetra 54

2007 148 . Et malgré la contestation de cette victoire par le parti TIM, il fut encore réélu lors des élections législatives partielles à Mananara Nord, du mercredi 14 novembre 2007 149 .

De même, lors des élections régionales, il y a la victoire de liste que ZAKAHELY Boniface avait soutenu au détriment du pouvoir en place au soir du 16 mars 2008 150 .

Concernant sa condamnation 151 , la sortie du verdict révèle la politisation du procès. Car, il avait été délibéré au plus vite que possible avant les résultats des élections législatives partielles du 14 novembre 2007.

Par ailleurs, sorti victorieux des élections législatives partielles, le député était allé joindre sa communauté législative. Et en période de session, il fut arrêté à son domicile 152 , six mois après sa condamnation par la Cour d’Appel de Toamasina.

Et est-ce en raison de l’antériorité de l’infraction à l’élection qui pousse les forces de l’ordre à procéder à l’arrestation de l’élu de Mananara Nord ? Car, si son arrestation était encore régie par l’ancienne Constitution, sa condamnation définitive lui mettrait fin à sa carrière politique, mais seulement en dehors de session. Et si par contre, la nouvelle Constitution qui s’applique. La possibilité d’arrêter cet élu de Mananara Nord, pendant la durée des sessions dépend de l’autorisation de l’Assemblée sauf s’il a été surpris comme auteur, coauteur ou complice de l’infraction. Ce qui était contraire au cas présent. Car il n’y avait aucune idée de flagrance en relation de cette affaire.

Ce qui justifie l’existence de caractère politique de cette affaire.

2- PROCES PENAL

Dans l’étude de ce procès pénal, nous analyserons la nature du procès appliquée aux parlementaires avant de voir l’effet de l’issue de ce procès.

148 Il avait remporté 44,68% des voix lors des élections législatives du 23 septembre 2007, contre son concurrent direct, Honoré TAREHY, issu du parti TIM, qui avait recolté 32, 92% des suffrages exprimés. In http://www.lexpressmada.com/index.php?p=display (propos recuellis par Iloniaina Alain Date : 09-11-2007 149 Voir Arrêt n°22-HCC/AR du 21 novembre portent proclamation des resultants officials des élections des députés l’Assemblée Nationale du 14 novembre dans les circonscriptions électorales de Béalanana et de Mananara Nord in HTTP://www.hcc.gov.mg/index.php?option.com 150 http://www.blogg.org/bog.66552-date-2008-03-31-billet . Nirina Randriamalala publié par MTS à 14 : 43 : 55 151 ZAKAHELY Boniface avait été condamné par la Cour d’Appel de Toamasina le mercredi 7 novembre 07 pour l’affaire qui l’oppose avec Ibe Sing Iva 152 à Ambaniala (Itaosy) le dimance 25 mai 2008 55

a) LA NATURE DU PROCES

Dans la plupart de cas, les procès qui mettent en jeu certains membres du parlement malagasy s’achèvent presque par la condamnation. De cette condamnation, il convient d’analyser sa nature, compte tenu de la personnalité de ses justiciables. En principe, en tenant compte de la qualité des parlementaires traités comme des simples citoyens et non comme des représentants du peuple, la règle applicable est celui du régime du droit commun ; mais il est évident que ce genre de procès ne s’éloigne pas du caractère politique : on remarque à celle-ci l’existence d’une condamnation controversée. En effet, la raison de cette condamnation controversée est liée à la position même du parlementaire condamné. Presque ce sont les parlementaires alignés dans le rang d’opposition qui sont poursuivis, arrêtés, jugés et condamnés. Tels étaient les cas des deux députés HERIHAJAINA Andrianirina et de celui de VONINAHITSY Jean Eugène. Car, pour ces deux personnages politiques, les décisions de justice, étaient presque les mêmes. Si d’un côté, le député HERIHAJAINA Andrianirina avait été relaxé sur les chefs d’inculpation qui ont justifié son arrestation, à savoir l’association de malfaiteurs et les faux monnayage, le meurtre et assassinat 153 ; de l’autre côté, le député VONINAHITSY avait également été relaxé au bénéfice du doute pour l’accusation d’extorsions de fonds et les menaces verbales, mais il a écopé de deux ans de prison ferme, assortis de 4 millions ariary des dommages-intérêts et de 2 millions ariary d’amende pour l’accusation de trafic d’influence 154 . Alors que concernant leurs condamnations, le verdict du député VONINAHITSY Jean Eugène n’a pas tenu compte de l’accusation pour flagrant délit d’extorsion de fonds, pour laquelle l’intéressé a été relaxé au bénéfice du doute 155 . Et que pour le du député HERIHAJAINA, les 7 ans de travaux forcés qu’il a obtenus sont relatifs à la tentative de fabrication de fausses devises, ce qui n’était pas le motif premier de son arrestation 156 . Pour le cas du député ZAKAHELY Boniface, la question n’était plus d’une condamnation mais de l’application des dispositions constitutionnelles. En d’autres termes, qui parmi les deux dernières lois constitutionnelles allaient régir son arrestation en période des sessions.

153 http://nah.296.free.fr/herihajaina-andrianirina-Gdi241005.htm 154 Cf. MIDI 15 décembre 2005, op. cit. 155 MIDI, mercredi le 27 décembre 2005, n°6810, recueillis par Nirina R. p 3 156 MIDI Madagascar, lundi le 26 décembre 2005, op. cit. 56

Cependant, comme au procès pénal qu’au procès civil, les lois pénales ouvrent droits aux justiciables à attaquer certaines décisions de justice, telles que les décisions de juridiction d’instruction et celles de juridiction de jugement. En ce qui concerne les décisions de juridiction de jugement, le principe impose que la décision attaquée ait été une décision définitive. Ce qui nous amène à étudier l’issue de la condamnation définitive.

b) DE LA CONDAMNATION DEFINITIVE

Lorsque la condamnation est définitive, la décision ne peut plus être attaquée. Elle est censée refléter la vérité « Res judicata pro veritate habetur ». Aucune voie de recours n’est plus possible, sinon par le biais de la révision et dans les cas limitativement prévus par la loi. Passé un certain délai, octroyé par la loi à la partie non satisfait, la décision est revêtue donc de l’autorité de la chose jugée. Et cette autorité de chose jugée s’impose à tous. Mais auparavant, avant que la décision de justice ne soit revêtue de cette carapace, deux réactions antagonistes réagissent. D’un côté, la partie gagnante demande l’exécution de la décision, surtout à la demande de réparation du préjudice subi. Tandis que de l’autre côté, la partie succombante qui est frustrée par la justice, se réclame insatisfaite. De cette insatisfaction, la loi autorise tous ceux-qui se sentent frustrés, par les voies légales tout en prescrivant un délai, à attaquer la décision rendue, afin de lui substituer une nouvelle présumée meilleure. Et c’est au-delà de cette prescription, si aucune des parties ne réagit que la décision prononcée est revêtue de l’autorité de la chose jugée. On appelle ces voies légales de contestation de la décision de justice les voies de recours, limitativement énumérées par la loi, les voies de recours sont les suivantes.

B- L’EXERCICE DES VOIES DE RECOURS

L’étude de ces voies de recours nous intéresse. Car, elles sont à la portée de tout intéressé qui se sent lésé par une décision de justice. Et les parlementaires, comme tout autre personne n’ont pas manqué de l’utiliser, mais sans que les issues leur ait été d’une quelconque utilisé. Pour la clarté de la compréhension, il serait intéressant de faire un bref rappel des voies de recours en général. On distingue les voies de recours ordinaires, qui sont ouvertes à tous, sauf texte contraire, les voies de recours extraordinaires, qui ne sont recevables que dans des cas limitativement déterminés.

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1- LES VOIES DE RECOURS ORDINAIRES

Les voies de recours ordinaires sont aussi de deux sortes : on a l’opposition et l’appel. a) - L’opposition L’opposition est une voie de rétractation, en ce qu’elle tend à faire retirer la décision rendue en l’absence de l’une des parties. Cette procédure se justifie par l’idée que nul ne peut être condamnée sans avoir été entendu, si bien que la juridiction aurait rendu une décision autrement que celle que le prévenu avait été présent. La partie défaillante a alors de ce fait droit à être rejugée sinon à assister aux nouveaux débats. En ce qui concerne les effets de l’opposition, ils sont énoncés par l’article 397 du CPPM, lequel stipule : « L’arrêt ou le jugement par défaut est non avenu dans toutes ses dispositions si l’accusé ou le prévenu forme opposition à son exécution ». A la lumière de cet article, l’opposition a deux effets, à savoir l’effet suspensif et l’effet extinctif. En tout cas, même si le parlementaire comme toute personne prévenue a droit à une opposition, on peut conclure que l’opposition sur opposition ne vaut. Seul l’appel reste de ce fait la voie légale possible entre les mains du parlementaire prévenu, accusé ou condamné par défaut.

b)- L’appel.

Si l’opposition tend à faire retirer la décision rendue par défaut, l’appelant désire reformer par la juridiction supérieure la décision qu’il estime mal-jugée par la juridiction de première instance en application de la règle du « double degré de juridiction ». En fin du compte, le juge est considéré comme un ignorant vis-à-vis des réalités et dans l’application de la loi. Comme l’opposition, l’appel produit aussi des effets. Ses effets sont suspensifs et dévolutifs. Contrairement à l’opposition, l’effet dévolutif de l’appel saisit la juridiction supérieure au dessaisissement du tribunal correctionnel ou de simple police qui sont supposés avoir mal- jugé. Cependant, il arrive que la partie succombante après avoir interjeté appel ou fait de l’opposition n’approuve toujours pas une satisfaction. De même, du fait de l’impossibilité d’appel pour certaines décisions de juridictions telles les arrêts de la Cour criminelle. La loi institue les voies de recours extraordinaires.

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2 - LES VOIES DE RECOURS EXTRAORDINAIRES.

Les voies de recours extraordinaires sont le pourvoi en cassation pour les erreurs de droit et le pourvoi en révision pour les erreurs de fait.

a)- Le pourvoi en cassation.

Le pourvoi en cassation est une voie de recours extraordinaire qui invite la cour de cassation à statuer sur la légalité des décisions judiciaires. Il ne peut être exercé que dans des cas déterminés et pour violation de la loi. La cour de cassation ne constitue donc pas un troisième degré de juridiction : elle juge les arrêts qu’elle peut annuler pour erreur de fond ou vice de forme. Contrairement à la cour d’appel, elle ne vise pas le réexamen intégral de l’affaire : elle ne redresse pas les erreurs de fait ; elle ne touche que le droit et la forme. On distingue le pourvoi dans l’intérêt des parties et le pourvoi dans l’intérêt de la loi. • Le pourvoi dans l’intérêt des parties. Pour le pourvoi dans l’intérêt des parties, peuvent constituer parties en cassation, soit le prévenu ou l’accusé, soit le Ministère Public, soit les parties intéressées par l’action civile, sinon le tout ensemble. Lorsque ce pourvoi est déclaré recevable, il produit deux effets tels l’effet suspensif et l’effet dévolutif. Son effet suspensif fait sursis à exécution de la décision attaquée sauf en ce qui concerne les condamnations civiles 157 . Tandis que dans sont effet dévolutif, le ne se porte que sur le plan du droit et de la forme de l’arrêt attaqué. Et c’est ainsi que la Cour Suprême ne statue en fait et en droit qu’après un deuxième pourvoi sur la même affaire.

• Le pourvoi dans l’intérêt de la loi.

En ce concerne le pourvoi dans l’intérêt de la loi, il suppose qu’une décision ait été rendue en violation de la loi, et qu’elle n’a pas été attaquée par le pourvoi en cassation dans l’intérêt des parties dans un délai légal. Et en raison de l’expiration du délai de recours, la décision acquiert l’autorité de la chose jugée. Alors qu’il n’y a pas d’autres moyens possibles pour en demander la réparation.

157 Voir article 62 de la loi n°2004-036 relative aux attributions, au fonctionnement et à la procédure applicable devant la Cour Suprême et les trois Cours la composant. 59

Le procureur général peut alors de sa propre initiative et sans être tenu par le délai quelconque, porter la décision devant la Chambre de cassation qui a rendu, soit un arrêt d’irrecevabilité, soit un arrêt de rejet, soit un arrêt de cassation 158 . Mais le Ministre de la justice peut également donner l’ordre au procureur générale de la cour suprême afin de former un pourvoi pour violation des préceptes généraux de justice et notamment des principes équitables que comporte nécessairement la disposition légale servant de justification objective à la décision incriminée159 .

b) -Le pourvoi en révision.

Le pourvoi en révision est un recours extérieur à l’autorité souveraine de toutes les décisions judiciaires dans lequel le jugement est tombé dans l’erreur, soit sur le fait, soit sur le droit. Le pourvoi en révision porte atteinte à l’autorité de la chose jugée, ce qui pousse le législateur à subordonner sa recevabilité à deux conditions strictes, telles que les conditions de fond et les conditions forme.

• Les conditions de fond.

Ces conditions concernent la nature des décisions susceptibles de pourvoi en révision. Lorsqu’en matière d’appel, le recours n’est possible que contre les décisions rendues par les tribunaux de première instance, le pourvoi en révision est, par contre possible contre les décisions de condamnation rendue en matière criminelle, ou correctionnelle et les décisions d’acquittement ou de relaxe. Il n’est pas possible contre les décisions de condamnation en matière de simple police. La possibilité du pourvoi est déterminée dans les cas suivants tels qu’ils sont prévus par l’article 89 de la loi 2004-036 sur la cour suprême et les trois cours la composant. Ainsi selon l’article précité ci-dessus, la révision pourra être demandée en matière criminelle ou correctionnelle, quelque soit la juridiction qui a statué et la peine qui a été prononcée. • Conditions de forme. En en ce qui concerne ses conditions de forme, il n’est pas limité par d’aucun délai. Car quelque soit le temps écoulé l’erreur, l’erreur judiciaire peut toujours être redressée.

158 Voir cours de procédure pénale dispensé par Mme Narazana Eudoxie. 159 Cf. article 87 de la loi n°2004-036 op.cit. 60

Par contre, la qualité de demandeur en révision est strictement déterminée par la loi. Ainsi, l’article 90 de la loi 2004-036 sur la cour suprême et les trois cours la composant, ne prévoit-il pas deux sortes des cas auxquelles, le droit de demander la révision appartient : D’un côté, dans les trois premiers cas : 1- au Ministre de la justice ; 2- au condamné, ou, en cas d’incapacité, à son représentant légal ; 3- après la mort ou l’l’absence déclarée du condamné, à son conjoint, à ses enfants, à ses parents, à ses légataires universels ou à titre universel, à ceux qui en ont reçu de lui la mission expresse. De l’autre côté, dans le quatrième cas, au Ministre de la justice seul, qui statuera après avoir pris l’avis d’une commission composée de deux Magistrats en service à l’administration centrale et de deux Magistrats de la Cour de Cassation annuellement désignés. La cour suprême sera saisie soit d’office, soit sur la réclamation des parties indiquant un des trois premiers cas soit par le chef de son parquet général en vertu de l’ordre expresse que le Ministre de la justice leur aura donné. Et toute demande en révision émanant des parties doit être adressée au Ministre de la justice.

Une fois le pourvoi en révision est recevable, il produit un double effet tel l’effet suspensif et l’effet dévolutif.

Dans son effet suspensif, si l’arrêt ou le jugement de condamnation n’a pas été exécuté, l’exécution sera suspendue de plein droit 160 . Quant à son effet dévolutif, la saisine de la Cour Suprême ne concerne non seulement de question de droit mais surtout de l’examen des éléments du fond.

Si alors ces voies de recours sont certes faites pour toutes personnes sans discrimination. Il s’avère intéressant de savoir qu’en est-il de l’application de ce droit à l’égard des parlementaires.

3 - LA SITUATION DES PARLEMENTAIRES DURANT L’EXERCICE DES VOIES DE RECOURS.

Durant l’exercice des voies de recours, le parlementaire prévenu ou accusé bénéficie d’une liberté provisoire, mais cette liberté lui constitue-t-elle une véritable issue pour sortir de l’affaire. En d’autres termes, qu’en est-il de la situation du parlementaire après les voies de recours.

160 Cf. article 90 de la loi n°2004-036 op. cit. 61

a – La liberté provisoire.

Quelques soient les décisions attaquées, jugements ou arrêts en matière correctionnelle que criminelle, le parlementaire prévenu ou accusé bénéficie d’une liberté provisoire selon l’effet suspensif des voies de recours. Mais comme le délai des voies de recours est strictement limité 161 . et enfin de trois jours en matière de pourvoi en cassation. Par conséquent, les voies recours finissent par s’épuiser et l’intéressé devient succombant. Ce qui rend la décision de condamnation définitive. D’où la conséquence de la condamnation.

b – Conséquence de la condamnation.

Le sort de la décision de condamnation varie suivant que l’intéressé soit un délinquant primaire ou d’un récidiviste. En d’autres termes, la condamnation sera sursitaire ou non selon la situation du parlementaire condamné.

• Condamnation avec sursis.

En matière criminelle et correctionnelle, et en cas de condamnation soit à l’emprisonnement soit à l’amende, si le condamné n’a pas fait l’objet de condamnation antérieure à l’emprisonnement pour crime ou délit de droit commun, les cours et tribunaux peuvent ordonner, par le même jugement et par décision motivée, qu’il sera sursis à l’exécution de la peine principale 162 . Ce bénéfice de sursis ne s’étend pas au paiement des frais du procès et des dommages- intérêts. Il ne s’étend pas non plus aux peines accessoires et aux incapacités résultant de la condamnation 163 . Mais l’effectivité du sursis dépend totalement de la réalisation de la condition imposée par le sursis. Si pendant le délai de cinq ans à dater du jugement ou de l’arrêt, le condamné n’a encouru aucune poursuite suivie de condamnation à l’emprisonnement ou à une peine plus grave pour crime ou délit de droit commun, la condamnation sera comme non avenue. Si parc contre, l’intéressé a outrepassé les conditions exigées du sursis, la situation sera différente.

161 Ce délai est de dix jours si l’intéressé réside à Madagascar et de vingt jours s’il réside à l’étranger en matière d’opposition (article 399 du CPPM) ; il est de dix jours si les jugements sont rendus au siège de la juridiction, et de vingt jours s’il s’agit d’une audience foraine en matière d’appel (article 466 du CPPM) ; et enfin de trois jours en matière de pourvoi en cassation 162 Cf. article 569 du CPPM 163 Cf. article 571 du CPPM 62

• La peine ferme.

Comme nous l’avons annoncé là-dessus, le non respect du délai du sursis, amène l’exécution de la première peine sans qu’elle puisse se confondre avec la seconde. Si telles sont les situations pendant l’exercice des voies de recours, ces droits n’ont pas bénéficié aux parlementaires. En effet, aucun n’a eu de liberté provisoire, ni de clémence du juge à travers le sursis. Certes, les voies de recours étaient exercées. Mais, celles-ci étaient à l’avance vouées à l’échec. Car « la flagrance » dans laquelle les parlementaires sont censés se trouver, ne « laissait à leur culpabilité » d’après l’intime conviction de leurs juges. §2- LES PROBLEMES D’APPLICATION DU REGIME DEROGATOIRE. Dans la vie quotidienne, l’homme avec ses comportements pathologiques, a du mal à suivre les règles de conduite voire les règles du droit instituées par l’Etat en vue de limiter les agissements de chacun. De cette situation, des interactions affrontent l’homme contre les organes répressifs qui ne sont que les garants du droit. Cela peut être dû à la manière de jouissance du droit de la part de chacun et de l’Etat. Tels sont les problèmes qui perturbent à l’application de la protection parlementaire.

A- LA NATURE DU PROBLEME

Comme on l’a dit là-dessus, l’origine de ces obstacles à la pratique du régime dérogatoire vient des difficultés d’un côté de jouissance des libertés publiques, et de l’autre côté aux parlementaires mêmes.

1 – Les difficultés de jouissance des libertés publiques.

On appelle libertés publiques l’ensemble des droits dont dispose un individu dans une société donnée. Ces droits dont l’Etat reconnaît et garantit supposent qu’un certain nombre d’activité déterminé soit exercé à l’abri de toute pression extérieure. En se conformant aux conceptions de la démocratie libérale, on peut regrouper les libertés publiques en deux types : les libertés individuelles et les libertés collectives. De ces deux types de liberté, on peut en tirer deux sous catégories en raison de leur relation aux activités parlementaires, à savoir la liberté d’opinion et d’expression d’une part et la liberté d’association d’autre part.

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a) La liberté d’opinion et d’expression.

La liberté d’opinion et d’expression est généralement considérée comme une des libertés fondamentales de l’être humain. Elle préconise « la libre communication des pensées et des opinions… 164 ». Elle est prévue par l’article 10 de la Constitution de la République malgache de 2007, aux termes duquel elle garantit à tous l’exercice, sous réserve du respect des libertés et droits d’autrui et par l’impératif de sauvegarder l’ordre public. En définitive, cette liberté d’opinion et d’expression implique « le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit 165 ». En réalité, cette liberté d’opinion et d’expression n’intéresse tant pour son auteur que pour les auditeurs que de révéler et d’entendre dire des choses qui animent l’opinion publique : que ce soit des choses à caractère infructueuse, ou des choses fantastiques. Si bien que l’homme est avide d’information dont la Constitution elle-même proclame en son article 11. Ce genre des libertés ne règne pas du côté des pays de régimes totalitaires ou dictatoriaux, pour ne pas dire ne pas exister. Tandis que de l’autre côté, il devient à notre ère surtout dans les pays démocratiques, l’un des moyens entre les mains de « l’homme loup pour l’homme », comme l’a dit Thomas Hobbes, pour attaquer ou pour balancer son adversaire. Du moins qu’elles soient prouvées. A Madagascar, la réalité démontre que l’effectivité de cette liberté d’opinion et d’expression malgré sa garantie constitutionnelle, dépend du rapport entre l’auteur et ses destinateurs sinon de la cible. Si le rapport se produit entre les particuliers, la justice sera présumée comme rendue à une stricte égalité. Par contre, si ce rapport se règle entre un particulier contre les tenants du pouvoir, la répression sera de lourde conséquence. C’est pour cette raison que c’est rare de trouver à Madagascar entendre un individu attaquer les gouvernants par tels moyens. L’exemple célèbre est illustré par l’affaire de l’ancien vice-président de l’Assemblée nationale de Madagascar et dirigeant du parti nouveau- RPSD en l’an 2000 VONINAHITSY Jean Eugène, par laquelle l’ancien élu de Morafenobe démentit le Président de la République

164 Cf. article 11 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 165 Cf. article 19 de la déclaration universelle des droits de l’homme. 64 de l’époque Didier RATSIRAKA sur l’affaire du pont flottant, dont il avait prétendu avoir acheté au gouvernement ukrainien. Etant politicien élu du peuple, le rôle que confère ses élus ne doit pas être limité aux élaborations et aux votes des lois, mais doit s’étendre aussi tacitement au rapport devant ses élus sur la situation du pays en général. Si on revient à l’affaire, la situation démontre que la liberté d’opinion et d’expression est bafouée, car si la Constitution en garantit sous réserve du respect des droits d’autrui et par l’impératif de sauvegarder l’ordre public, on pourrait suggérer la question suivante : Si l’ordre public semble à l’époque menacé, pourquoi le chef de l’Etat de l’époque n’a-t-il pas montré la facture de l’achat du pont flottant dont il a acheté ? C’est pour cette raison que la Cour a annulé l’accusation pour vice de procédure 166 . Tout cela nous amène à dire que le règne de la liberté d’opinion et d’expression est fonction de la volonté des pouvoirs politiques.

b) La liberté d’association.

Le régime des associations est régi à Madagascar par l’Ordonnance 60-133 du 3octobre 1960, dont l’article premier définit comme suit : « L’association est la convention par laquelle deux ou plusieurs personnes mettent en commun d’une façon permanente leurs connaissances ou leurs activités dans un but autre que de partager des bénéfices ». L’association est considérée comme le pilier de la plupart des libertés. Car selon le proverbe « l’union fait la force », elle pourrait constituer un groupe de pression pour alerter les dirigeants politiques de leur mauvaise habitude. Les associations sont au nombre de trois : − Les associations non déclarées ; − Les associations déclarées ; − Les associations reconnues d’utilités publiques. Pour les associations reconnues d’utilités publiques, elles ont un but d’intérêt général. Ce qui les autorise à exercer des activités d’ordre humanitaire, scientifique, politique, sportif que religieux. C’est dans ce type d’associations que les associations politiques se créent. Ainsi, l’article 14 alinéa 1, 2 et 3 de la Constitution de 2007 prévoit le droit pour toute personne de constituer librement des associations avec d’autres, sous réserve de se conformer à la loi. Ce même droit est aussi reconnu pour la création de partis politiques 167 .

166 MIDI, 30 janvier 200, n°5314, Dominique R. p3 167 Il existe actuellement 201 partis politiques à Madagascar (Voir annexe II, page 126à 139) 65

Mais la création d’une association ne doit pas mettre en en cause l’unité de la Nation ou prôner le totalitarisme ou le ségrégationnisme à caractère ethnique, tribal ou confessionnel. Cependant, la liberté d’association surtout politique n’a pas été reconnue par le régime socialiste de la deuxième République. Puisque pendant ce temps là, seules les organisations et partis révolutionnaires affiliés à l’intérieur du Front sont autorisés à déployer des activités politiques 168 . Ce n’est qu’en décembre 1989 que les citoyens jouissent pleinement de leurs droits civiques et peuvent se constituer librement, selon les règles démocratiques, en parti ou organisation politique 169 .

2- Les difficultés tenant aux parlementaires.

Dans l’accomplissement de leur mandat, les parlementaires peuvent être tentés d’outrepasser la loi en raison de leur ignorance, sinon de leur abus.

a) L’ignorance.

L’ignorance des parlementaires se manifeste sur leurs intentions d’être au dessus de la loi. Alors qu’en principe nul ne peut ignorer la loi. Mais cette ignorance vient quand même du fait que les parlementaires ne sont pas en principe des juristes ou des spécialistes du droit. Ils sont devenus parlementaires, non pas par leur qualité propre, mais parce qu’ils sont uniquement appelés par le peuple par la voie des urnes. De cette situation, les parlementaires risquent de commettre des abus.

b) Les abus. Si dans le premier cas, les parlementaires violent certaines lois à cause de leur ignorance. Mais, l’abus ne peut être qu’un acte délibéré. En effet, les parlementaires abusent de leurs droits, lorsque premièrement ils émettent des opinions hors de l’exercice de leurs fonctions. Car en tant que représentants élus du peuple, leur opinion pour être légale doit se borner dans l’exercice de leurs fonctions. De même, s’ils sont considérés comme tous les citoyens, leurs libertés d’opinion et d’expression, de communication, de presse, d’association, de réunion, de circulation, de conscience et de religion doivent être entreprises dans les limites du respect des libertés et droits d’autrui et par l’impératif de sauvegarder l’ordre public.

168 Cf. article 3 de l’Ordonnance 76-050 portant créations du Front National pour la Défense de la Révolution. 169 Cf. article 8 de la Constitution du 31 décembre 1975, révisée du 29 décembre 1989 par la loi n°89- 028. 66

B- LE PROBLEME DE JUSTICE DE LA PART DU POUVOIR

Les parlementaires ne sont pas les seuls à rendre difficile l’application du régime dérogatoire, les tenants du pouvoir viennent aussi y alourdir les mêmes problèmes. En effet, comme pour la plupart des Etats africains, le risque peut être à l’origine de l’application effective de la démocratie, exclusivement à l’usage des particuliers dont sont les parlementaires. Alors que le pouvoir est tenté vers l’absolutisme. L’absolutisme du pouvoir se manifeste par l’adoption du régime présidentiel (deuxième République et deuxième phase de la troisième République), auquel le Président de la République peut dissoudre la Chambre basse du parlement (l’Assemblée nationale) pour des causes déterminantes 170 . Ce qui signifie pour ces derniers de se méfier du pouvoir, de se taire au profit de celui- ci. On peut illustrer cette situation par la dissolution par le Président de la République Marc RAVALOMANANA de l’Assemblée nationale de la troisième législature de la troisième République, en août 2007. Par conséquent, la domination de l’opinion publique est totalement éclipsée au profit des dirigeants. D’où vient aussi le risque de déni de la démocratie, qui s’achemine par le terrorisme d’Etat. Autrement dit, la terreur dévorant et bafouant la démocratie vient de l’Etat qui crée des prisons pour les résistants. Ce qui s’approche du despotisme déguisé. Au vu de ce qui précède, l’on peut constater que l’inviolabilité parlementaire ou la protection des parlementaires dans l’exercice de leurs fonctions dépend plus des parlementaires que des tenants du pouvoir, qui parfois prônent la protection ou la réduction voire, carrément la supprimer. A ce système changeant (caméléon), il est intéressant de connaître l’application du régime dérogatoire dans d’autres pays.

170 Cf. article 98 de la Constitution de 2007 67

CHAPITRE II : L’INVIOLABILITE PARLEMENTAIRE EN DROIT COMPARE.

Si dans les cas précédents, nous avons exposé le phénomène qui explique comment les parlementaires malgaches sont-ils protégés et comment cette protection sera-t-elle levée. Ce dernier chapitre quant à lui, nous amène à étudier le régime d’immunité parlementaire en droit comparé. La plupart des pays démocratiques ont appliqué le système d’immunité parlementaire, pour protéger leurs parlementaires, en raison du mandat dont ils sont investis. Cependant, chacun de ces pays n’adopte pas le même régime. Mais nous ne prenons comme exemples que ceux des pays des européens et pays américains.

SECTION 1 : L’INVIOLABILITE PARLEMENTAIRE EN EUROPE.

Dans le système du droit parlementaire européen, nous allons mettre en exergue trois exemples. D’abord la France, puis l’Angleterre et enfin de l’Union Européenne elle-même.

§1- LE CAS DE LA FRANCE.

Institutionnellement, le parlement français est actuellement bicaméral. Il comprend, de ce fait, l’Assemblée nationale et le Sénat. A – LA COMPOSITION DU PARLEMENT FRANÇAIS 1- L’ASSEMBLEE NATIONALE. L’Assemblée nationale (appelée aussi la Chambre basse ou députés), siégeant au palais de Bourbon, est actuellement composée des 577 députés à l’Assemblée Nationale élus au suffrage universel direct, au scrutin majoritaire uninominal à deux tours dans les circonscriptions plus ou moins équivalentes à 100000 habitants, pour cinq ans, sauf dissolution de l’Assemblée. Pour être candidat à l’élection des députés, le candidat doit être âgé de 23 ans, et de citoyen français, puis il faut avoir satisfaire à la loi du service national. Mais, une éventuelle inéligibilité sera retenue à la suite de certaines condamnations pénales, en cas d’infractions graves à la législation sur le financement des campagnes électorales, non dépôt de déclaration de situation patrimoniale, liquidation judiciaire, faillite non réhabilitée, interdiction de gestion, fonctions d’autorité dans la circonscription (inéligibilité relative) 171 .

171 Voir un article de Wikipédia.fr 68

2- LE SENAT.

Pour le Sénat (ou la Chambre haute), dont le siège se trouve au sein du palais de Luxembourg, compte 343 sénateurs élus au suffrage universel indirect par des « grands électeurs » qui sont des élus nationaux, régionaux, départementaux et des délégués des conseils municipaux 172 . La durée de la législature sénatoriale était auparavant de 9 ans, tandis qu’elle est passée de 6 ans actuellement, et les sénateurs qui sont actuellement renouvelés par tiers tous les trois ans, seront à terme renouvelés par moitié toujours tous les trois ans à partir de 2010 173 . En ce qui concerne les conditions d’éligibilité, pour être candidat à l’élection sénatoriale, il faut avoir d’abord l’âge de 30 ans révolus, et être de citoyen français. Ensuite, il faut avoir accomplis des obligations militaires, et ne pas encore faire l’objet de certaines condamnations pénales, d’une poursuite pour infractions graves à la législation sur le financement des campagnes électorales. Le candidat peut être aussi frappé d’inéligibilité, en cas non dépôt de déclaration de situation patrimoniale, liquidation judiciaire, faillite non réhabilitée, interdiction de gestion, fonctions d’autorité dans la circonscription (inéligibilité relative).

B- LE PRIVILEGE DES PARLEMENTAIRES FRANÇAIS.

• L’immunité parlementaire.

L’immunité parlementaire française est actuellement régie l’article 26 la Constitution du 4 octobre 1958 174 . L’ancien article 26 alinéa 1, 2, 3 et 4 dispose que : « Aucun membre du Parlement ne peut être poursuivi, recherché, arrêté, détenu ou jugé à l’occasion des opinions ou votes émis par lui dans l’exercice de ses fonctions. Aucun membre du Parlement ne peut, pendant la durée des sessions, être poursuivi ou arrêté en matière criminelle ou correctionnelle qu’avec l’autorisation de l’Assemblée dont il fait partie, sauf le cas de flagrant délit.

172 Idem 173 Voir un article de wikipédia sur IPU PARLINE. 174 révisée par la loi constitutionnelle n° 95-880 du 4 août 1995, l’immunité parlementaire s’énonce comme suit :

69

Aucun membre du Parlement ne peut, hors session, être arrêté qu’avec l’autorisation du bureau de l’Assemblée dont il fait partie, sauf le cas de flagrant délit, de poursuites autorisées ou de condamnation définitive. La détention ou la poursuite d’un membre du Parlement est suspendue si l’Assemblée dont il fait partie le requiert. » Dans sa nouvelle version du 4 août 1995, les alinéas 2 à 4 sont rédigés comme suit : « Aucun membre du Parlement ne peut faire l’objet, en matière criminelle ou correctionnelle, d’une arrestation ou de toute autre mesure privative ou restrictive de liberté qu’avec l’autorisation du Bureau de l’Assemblée dont il fait partie. Cette autorisation n’est pas requise en cas de crime ou délit flagrant ou de condamnation définitive. La détention, les mesures privatives ou restrictives de liberté ou la poursuite d’un membre du Parlement sont suspendues pour la durée de la session si l’Assemblée dont il fait partie le requiert. L’Assemblée intéressée est réunie de plein droit pour des séances supplémentaires pour permettre, le cas échéant, l’application de l’alinéa ci-dessus. »

• LES PROCEDURES DE LEVEE DE L’IMMUNITE PARLEMENTAIRE.

Conformément à l’article 9 bis de l’Ordonnance du 17 novembre 1958 (rédaction de la loi n°96-062 du 29 janvier 1996), l’arrestation ou toute autre mesure privative de liberté prise à l’encontre d’un parlementaire doit faire « à peine de nullité l’objet d’une demande d’autorisation formulée par le procureur général près la cour d’appel compétente et transmise par le garde des sceaux, ministre de la justice, au Président de l’Assemblée intéressé ». Il appartient en conséquence, au bureau de l’Assemblée de désigner en son sein une délégation représentative des groupes. Celle-ci auditionne le parlementaire concerné et fait rapport devant le bureau 175 . En cas d’autorisation, l’autorisation donnée par le bureau « ne vaut que pour les faits mentionnés dans la demande 176 » Ce faisant, le bureau autorise l’action pénale lorsqu’il estime d’abord que la demande est sérieuse, c'est-à-dire qu’elle repose sur des faits constitutifs de crime ou délit imputable au parlementaire, loyale et sincère, c'est-à-dire, non fondée sur des arrière-pensées politiques 177 .

175 Cf. article 16 de l’instruction générale du bureau de l’Assemblée nationale, arrêté du 15 novembre 1995 et article III bis de celle du sénat, arrêté du 24 janvier 1996. 176 Cf. article 9 bis, alinéa 2 de l’Ordonnance précitée. 177 CC. N° 62-018 DC, 10 juillet 1962 70

En tout état de cause, le bureau n’a pas à se prononcer sur le fond, car cela constituerait un empiétement sur le terrain judiciaire. C’est ainsi que pour le même motif, l’autorisation des poursuites ne détermine pas la qualification des faits. Dans la réalité, en terme d’émission d’opinion, on constate la véritable démocratie, car les députés peuvent s’exprimer librement et émettre leurs opinions sur toutes les affaires politiques du pays. Chaque acte du Gouvernement est étudié, acculé et empêché par les députés de l’opposition qui ne s’embarrassent pas du tout des mots à utiliser pour fustiger une politique que les députés jugeaient néfastes pour la Nation, maladroite 178 . Les tenants du pouvoir acceptant la démocratie et les débats politiques ne font que répliquer pour éclairer l’opinion publique. Et c’est au peuple de juger la politique de deux antagonistes à travers les votes. Aussi, il serait impensable de voir un parlementaire mis en cause par sa parole. Car même un député issu de la majorité au pouvoir commet parfois des critiques à propos de la politique appliquée par l’exécutif. Ces opinions poussent parfois le gouvernement à faire marchée arrière lors d’une décision jugée trop impopulaire. Mais certains ont quand même connu des arrestations et condamnation. Mais du fait non de l’opinion mais du comportement trop énergique voire anarchiste 179 . Il en est ainsi du député José Bové (Joseph Bové) qui était devenu un habitué de la justice 180 .

§2 : LE CAS DE LA GRANDE-BRETAGNE.

A – LA COMPOSITION DU PARLEMNT BRITANNIQUE

Géographiquement, le Royaume-Uni est formé de quatre composantes : l’Angleterre, le Pays de Galles, dont l’intégration date de 1536, l’Ecosse, réunie aux deux précédents par le traité de l’Union en 1707, et enfin l’Irlande du Nord. Le parlement britannique, sur sa vue d’ensemble, est constitué des trois éléments : le roi, la Chambre des communes (House of Commons) et la Chambre des Lords (House of Lords). Mais l’expression est utilisée habituellement pour désigner les deux Chambres. Le parlement dont les deux Chambres siègent, se situe au sein du palais de Westminster, il est présidé par un speaker, pour toutes les deux Chambres dont la durée du

178 Député Le Guen propos de l’achat des caccins anti-grippes. La France après plus de 500 000 d’Euros se trouvent dans l’ensemble de stocks. Et la revente s’avère difficile. 179 Le projet de nomination de Jean Sarkozy 180 José Bové ou Joseph Bové, un personnage illustre, issu des députés verts « sydicalisme agriccoll », représentant de la France à l’Union Européenne le 7 juin 2009. C’est un anti-OGM reputé qui n’hésite pas avoir de comportement marginal pour démontrer sa position. Ce qui lui a valu des multiples démêlées avec la Justice. 71 mandat s’élève à 5 ans, qui équivaut à la législature de la Chambre des Lords. Son mandat n’est interrompu que pour cause de démission, de décès, et de maladie.

B- L’IMMUNITE PARLEMENTAIRE BRITANNIQUE

1 – Les procédures en matière d’immunité.

Comme les parlementaires britanniques bénéficient des immunités destinées à leur permettre d’exercer leurs fonctions à l’abri de poursuites civiles ou pénales. Il en est celle qui vise la liberté de parole. La notion existe, Initialement conçue pour protéger les parlementaires contre un souverain par trop interventionniste 181 . Mais des dérogations sont prévues à celle-ci. Ainsi, les propos de nature à semer le désordre ou incompatibles avec la dignité parlementaire, tel qu’il est prévu par l’Art. 42 et 43 du règlement de la Chambre des députés relatif aux affaires publiques et ou outrage au Parlement dans le cas de désobéissance aux ordres, aux injonctions et aux règles de la Chambre (chap., 8 et 9 de l’ouvrage d’Erskine May : « Pratique parlementaire », Butterworths, 21 ème édition) 182 . Quant à l’inviolabilité parlementaire, elle ne s’applique qu’en matière civile, couvre toutes les infractions mais ne préserve le parlementaire que de l’arrestation et de la mise en détention (loi de 1770 sur les Privilèges parlementaires) 183 . Mais des dérogations sont aussi prévues : la Chambre consent qu’en cas d’atteinte à l’autorité de la justice, les députés soient placés en détention. Mais l’inviolabilité parlementaire empêche la citation à comparaître en qualité de témoin devant un magistrat ou un tribunal si le Président certifie que leur présence est requise à la Chambre. Et techniquement, la protection commence 40 jours avant la session et est assurée 40 jours après que la Chambre ait été prorogée ou dissoute (toutefois, le délai entre l’annonce de la prorogation et la nouvelle session est ordinairement d’une quinzaine de jours) 184 . Cette immunité est aujourd’hui absolue pour tout propos tenu au cours des travaux parlementaires.

181 Reconnue pour la première fois par Elisabeth I et confirmée dans la Déclaration des droits de 1688 181 . Elle est prévue par l’Art.IX de la Charte des droits (Bill or rights du 13 février 1689 ou Bill des droits), qui prévoit l’irresponsabilité parlementaire se limitant aux propos et aux écrits du parlementaire et aux suffrages exprimés par lui au sein du Parlement Cf. IPU PARLINE. fr. 182 Idem. 183 Idem 184 Idem 72

La même protection est accordée à ceux qui publient des documents parlementaires comme le Hansard (le journal des débats parlementaires). Mais le champ de ces immunités est strictement limité à l’activité parlementaire, et le député soupçonné d’avoir enfreint la loi, poursuivie pour une infraction pénale ou en réparation d’un préjudice civil, ne saurait les utiliser pour faire entrave au fonctionnement de la justice 185 . L’inviolabilité parlementaire ne couvre pas les procédures judiciaires en général, et elle ne s’étend pas non plus aux procédures judiciaires engagées à l’encontre d’un parlementaire avant son élection 186 . Et l’immunité parlementaire ne peut être levée. Puisque le parlement ne peut pas soumettre les poursuites et ou la détention à certaines conditions 187 . Et enfin, le parlement ne peut pas suspendre les poursuites et ou la détention d’un de ses membres. En cas de détention préventive ou d’emprisonnement, les parlementaires concernés ne peuvent pas être autorisés à assister aux réunions du parlement 188 . 2 – La réalité. Malgré tout, même si le système britannique est assez démocratique, la réalité démontre encore prééminence du pouvoir face aux parlementaires trop critiques Il en est ainsi le cas de John Wilkes 189 . Ayant multiplié ses attaques virulentes contre le Gouvernement et en particulier contre Lord Bute 190 , il avait enfin pour cible la personne du Roi 191 . Ce qui était à l’origine de sa poursuite pour outrage et « libelle séditieux. Jugé et incarcéré à la tour de Londres, son procès occupa cependant les esprits de tous les londoniens. Du fait du caractère politique de son procès, il fut très vite libéré à la faveur du mouvement populaire. Après sa réélection en 1768 par le comité de Middlesex, ses sympathisants manifestent aux Champs Saint-Georges. Et cette manifestation se suivit chaque jour. Ce qui finit par le

185 Idem 186 Idem 187 Idem 188 Idem 189 John Wilkes (17 octobre 1725 – 26 décembre 1797), était un homme politique et journaliste britannique. Député au Parlement de Westminster, Lord-Maire de Londres. Il était élu à la Chambre des Communes par les électeurs d’Aylesbury, en 1757. Son nom reste attaché aux scandales et aux émeutes que provoquèrent ses articles et ses combats pour la liberté de la presse, l’inviolabilité parlementaire et le droit des classes moyennes à élire leurs représentants. Voir : ( in « John Wilkes : http://fr.wikipedia.org/wiki/john_wilkes ») 190 Un ministre d’origine écossaise perçu par l’opinion cmme un intriguant étranger. 191 Il s’agit de George III, l’affaire était connu sous le nom d’affaire Wilkes en France. 73 réchauffement des esprits et les forces de l’ordre, de faible proportion avaient perdu le contrôle et faisaient feu. En conséquence, John Wilkes demeurait toujours en prison. Néanmoins cette affaire de John Wilkes sépare le régime britannique du XVIII ème siècle de celle d’aujourd’hui. Car la liberté d’opinion et d’expression et la lutte pour le droit politique des minorités, étaient à cette époque bafoués. Ce qui avait rendu la lutte de John au mépris des représailles massives de la part du pouvoir. Actuellement, le système semble être plus démocratique. En effet, la poursuite des parlementaires britanniques est à présent loin de toute nature politique. Si les parlementaires. Ainsi, l’affaire du scandale des notes de frais rend les deux députés britanniques et un Lord au collimateur de la Justice. Ils sont actuellement inculpés pour avoir réclamé des remboursements de frais indu 192 . Ces quatre parlementaires auraient produit de fausses factures pour se faire rembourser des dépenses sans liens évidents avec leur fonction en mai et juin 2009. Dans la réalité, la justice semble un peu plus indépendante dans sa fonction. Car, si plus de la moitié des parlementaires ont plus ou moins abusé de la largesse de la fraude. Les juges n’ont retenu que quatre cas les plus graves. Il en est ainsi du député travailliste Elliott Morley. Il aurait produit de faux documents relatifs à une propriété pour pouvoir bénéficier de prêts de 20 000 euros. Même suspicion concernant David Chaytor, lui aussi travailliste. Il aurait déclaré des dépenses fictives de téléphones pour plusieurs milliers d’euros. Troisième député travailliste poursuivi : Jim Devine. Les fausses factures qu’il a produites concernent des dépenses fictives de papeterie. Enfin, il y a Lord Hanningfield, issu du parti conservateur 193 .

§3 – LE CAS PARTICULIER DE L’UNION EUROPEENNE.

L’Union européenne est composée des 27 pays actuellement. Son parlement est une institution propre et différente de ceux des Etats membres de l’Union européenne. De ce fait, il est nécessaire de porter un aperçu général sur ce parlement avant d’en étudier le régime d’immunité de ses membres.

A – Aperçu général sur le parlement de l’Union européenne.

Le parlement européen est l’une des trois institutions décisionnelles de l’Union européenne, avant le Conseil de l’Union européenne (réunion des ministres nationaux), qui

192 http://Lci.tf1.fr/monde/europe/2010-02/scandale-des-notes-de-frais-de-la-justice-britannique 193 Idem 74 représente les Etats membres, et la commission européenne qui a pour mission de défendre les intérêts de l’Union dans son ensemble. En effet, le Parlement européen (PE), qui représente les citoyens européens et dont les membres sont élus au suffrage universel direct 194 ., est le seul organe parlementaire de l’Union européenne 195 . Ce parlement compte 785 membres depuis 2007 avec l’adhésion de Bulgare et de la Roumanie. Après avoir porté un regard sur le parlement européen, nous allons passer à son immunité.

B – L’immunité parlementaire des députés européens.

En ce qui concerne l’immunité parlementaire de l’Union européenne, elle est régie par le Protocole sur les immunités et les privilèges des communautés du 8 avril 1965. Dans ses articles 9 et 10, on confère aux membres du Parlement européen, les classiques immunités parlementaires. Par le biais de cette protection immunitaire, les parlementaires de l’Union européenne, bénéficient des mêmes immunités que les parlementaires nationaux dans leur propre pays. Autrement dit, les députés de l’Union européens sont protégés à la fois dans la mesure où tous les Etats membres reconnaissent l’immunité parlementaire à leurs parlementaires, mais aussi que les mêmes députés européens sont protégés différemment, car la notion d’immunité parlementaire est loin de recouvrir les mêmes garanties selon les pays 196 . L’irresponsabilité est prévue par l’article 9, « Aucun membre de l’Assemblée ne peut être recherché, détenus ou poursuivis en raison des opinions ou votes émis par eux dans l’exercice de leurs fonctions. ». Quant à l’inviolabilité, l’article 10 dispose que : « Pendant la durée des sessions de l’Assemblée, les membres de celle-ci bénéficient : Sur leur territoire national, des immunités reconnues aux membres du Parlement de leur pays ;

194 Voir Que sais-je ? Le parlement européen, Jean Louis Burdan. Le point de connaissances actuelles, 6ème édition, Presses Universitaires de France, mars 1997, p9 195 Les députés européens sont élus aux suffrages universels directs à partir du mois de juin 1979 196 Cf. J. L. Burdan, Sources commentaires et sciences nationales des règles applicables au parlementaire européen in Annuaire français du droit international, 1979, t.XXV, p. 779 à 791 75

Sur le territoire de tout Etat membre, de l’exemption de toute mesure de détention et de toute poursuite judiciaire. L’immunité les couvre également, lorsqu’ils se rendent au lieu de réunion de l’Assemblée ou en reviennent. L’immunité parlementaire ne peut être invoquée dans le cas de flagrant délit et ne peut non plus mettre obstacle, au droit de l’Assemblée de lever l’immunité d’un de ses membres. » 1- Régime des sessions. Quant à sa durée, certes l’article 10 du protocole est clair en la matière « pendant la durée des sessions ». En principe, le Traité de Rome énonce une session annuelle, qui s’ouvre le premier mardi du mois de mars. Mais, le Parlement européen siège dans la pratique environ une semaine par mois 197 . 2- Procédure de levée de l’immunité parlementaire. Quant à la procédure de levée de l’immunité parlementaire, elle est énoncée par l’article 5 du règlement du Parlement. En ce que la demande, en provenance des autorités nationales compétentes, est renvoyée à la commission du règlement, qui l’examine sans délai et la soumet à l’Assemblée un rapport contenant une proposition de décision, sur laquelle celle-ci vote 198 . Dans la pratique, la poursuite et l’arrestation des députés européens ne sont plus justifiées par des mobiles politiques. Même si dans les années 80, les demandes de levée de l’immunité parlementaire se sont multipliées 199 . Mais le parlement avait rarement accordé la demande des levées de l’immunité parlementaire. Dès lors que le « délit » invoqué par les autorités nationales s’apparentait un délit d’opinion ou faisant partie de l’exercice normal du mandat parlementaire (article de presse, présence dans la manifestation, etc.)200 Toutefois, depuis 1989, le Parlement décide de lever deux fois l’immunité parlementaire de Monsieur Jean Marie Le Pen, le 11 décembre 1989 à propos de l’affaire du jeu de mots « Durafour crématoire », et le 12 mars 1990 à propos de la mise en cause « maçonnerie et de l’international juive dans la création de l’esprit antinational » à la demande du Garde des sceaux, Monsieur Pierre Arpillange 201 . Après avoir étudié le cas de certains pays d’Europe, nous allons entamer maintenant le régime d’immunité parlementaire, aux pays américains.

197 Voir Que sais-je ? Le Parlement européen, op. cit. p 114 198 Idem 199 Certaines de ces demandes avaient visé les radicaux ou les verts allemands à cause du terrorisme ambiant ou de Jean Marie Le Pen à cause de propos racistes. 200 Voir Que sais-je ? Le Parlement européen, op.cit.p114 201 Idem 76

SECTION II : L’IMMUNITE PARLEMENTAIRE AUX PAYS AMERICAINS.

Dans l’étude cette immunité parlementaire américaine, nous allons prendre l’exemple du Canada et celles des Etats-Unis d’Amérique.

§1 : LE CAS DU CANADA

Dans l’étude de l’immunité parlementaire canadienne, nous commençons d’abord par voir sur l’aperçu général du parlement canadien, avant de passer sur son régime d’immunité.

A – APERCU GENERAL SUR LE PARLEMENT CANADIEN.

Le Parlement canadien est un parlement bicaméral, formé par la Chambre des communes (House of Commons) et le Sénat (Senate)

1 – La Chambre des Communes.

La Chambre des communes canadienne (Canadian House of Commons), dont le siège social se trouve sur la colline du Parlement à Ottawa (Ontario), constitue la Chambre basse du Parlement canadien ; elle est composée de 308 députés, élues pur un mandat de cinq ans, sauf dissolution anticipé du Parlement Chaque député représente une des circonscriptions électorales du pays. En ce qui concerne son élection, la candidature doit emporter les conditions suivantes : Tout électeur âgé de 18 ans ; De citoyen canadien, résident au Canada ; les non-résidents ne peuvent avoir quitté le pays, pendant plus de cinq années consécutives. Avec une éventuelle inéligibilité, en cas de fraude électorale, condamnation pour corruption ou pratiques illicites (peine de cinq à sept ans) ; pour les candidats ayant participé aux élections précédentes, non-respect de l’obligation de soumettre des états financiers. Durant toute la législature, les députés canadiens sont frappés d’incompatibilités, avec certains fonctionnaires ou agents électoraux, aux membres des Assemblées et des conseils provinciaux ou territoriaux ; aux juges.

2- Le Sénat.

Le Sénat du Canada (the Senate of Canada) est l’une des trois composantes du Parlement du Canada avec le Souverain (représentée par le gouverneur général) et la

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Chambre des communes. Le Sénat et la Chambre des communes siègent dans deux Chambres différentes sur la Colline du Parlement à Ottawa (Ontario) 202 . Le Sénat est actuellement composé de 105 membres nommés par le gouverneur général, sur recommandation du Premier ministre, pour une durée ininterrompue, dont les membres exercent leurs fonctions jusqu’à l’âge de 75 ans. Pour être élu au Sénat canadien, la candidature doit être issue d’un individu : _ âgé de 30 ans, résident dans la province ; _ propriétaire dans la dite province de terres estimées à 4000 dollars canadiens, toutes charges déduites ; des biens personnels, mobiliers et immobiliers, avec une valeur nette de 4000 dollars canadiens. _ L’inéligibilité est prévue pour la citoyenneté d’un autre pays, la faillite non réhabilité.

B- IMMUNITES

Le régime d’immunité parlementaire est la même pour les deux Chambres, et ne s’éloigne pas du régime britannique, sauf dérogation, en matière de levée de l’immunité, dont chacune de deux Chambres est compétentes suivant l’appartenance du parlementaire intéressé. En matière d’irresponsabilité, nommée aussi « liberté de parole », la notion est prévue par l’article 18 de la loi constitutionnelle de 1867 et l’article 4 de la loi sur la Parlement du Canada 203 . En principe, elle se limite aux propos et aux écrits du parlementaire et aux suffrages exprimés par lui au sein du Parlement. Les propos tenus à l’extérieur mais qui se rapportent à une action exercée dans le Parlement peuvent faire l’objet d’une autre forme de privilège. Mais, des dérogations sont prévues en cas d’outrage au Parlement. En ce qui concerne sa durée, l’irresponsabilité prend naissance le jour du début du mandat et s’étend, une fois le mandat exprimé, aux poursuites pour des opinions émises pendant l’exercice du mandat au sein du Parlement. Quant à son régime, l’irresponsabilité prend naissance le jour du début du mandat et s’étend, une fois le mandat expiré, aux poursuites pour des opinions émises pendant l’exercice du mandat au sein du Parlement 204 .

202 http://fr.wikipédia.org 203 IPU PARLINE 204 Idem 78

Pour l’inviolabilité, elle est aussi énoncée par l’article 18 de la loi constitutionnelle de 1867 et l’article 4 de la loi sur le Parlement du Canada. Elle ne s’applique qu’en matière civile, et couvre toutes les infractions. Mais, elle préserve le député ou le sénateur seulement de l’arrestation et de la mise en détention préventive et non pas de l’ouverture de poursuites juridiques à son encontre et de la perquisition domiciliaire. Toutefois, la perquisition dans le bureau d’un député et dans l’enceinte du Parlement, doit être autorisée au préalable par le Président de la Chambre des communes. Contrairement à l’irresponsabilité, le régime de l’inviolabilité n’a pas de dérogation. Néanmoins, elle empêche la citation à comparaître en qualité de témoin devant un magistrat ou un tribunal pendant que le Parlement siège. Il en est également, dans les cas où le député est partie à une action à titre de demandeur ou de défendeur ou accusé. En ce qui concerne sa durée, la protection est assurée à partir de 40 jours avant le début de la session jusqu’à 40 jours après sa prorogation ou la dissolution anticipée pour la Chambre des communes et jusqu’à sa prorogation pour le Sénat. Mais, cette inviolabilité n’inclut pas, en règle générale, les poursuites, et elle ne comprend non plus, les procédures judiciaires engagées à l’encontre d’un sénateur avant sa nomination ou d’un député avant son élection. Et l’immunité parlementaire peut être levée par la Chambre à laquelle appartient et dispose le seul recours, le parlementaire poursuivi. Malgré tout, le Sénat ou la Chambre des communes ne peut pas soumettre les poursuites ou la détention à certaines conditions. Mais, les tribunaux, par déférence pour l’institution, sont souvent prêts à collaborer pour éviter que leurs procédures ne se déroulent pendant les séances de la Chambre des communes ou du Sénat. De plus, le Sénat ou la Chambre des communes ne peut suspendre la poursuite ou la détention d’un de ses membres. Et qu’en cas de détention préventive ou d’emprisonnement, les sénateurs ou les députés concernés ne peuvent être autorisés à assister aux réunions du Parlement que par l’autorité judiciaire ou pénitentiaire.

§2 : LE CAS DES ETATS-UNIS D’AMERIQUE.

Le congrès (U.S. Congrès) constitue le département législatif des trois institutions des Etats-Unis d’Amérique, après le président (département exécutif) et la justice (département judiciaire). C’est un organe législatif bicaméral, formé d’un Sénat et d’une Chambre des représentants (House of representatives).

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A – Composition du Congrès américain. a) - La Chambre des représentants. La Chambre des représentants (House of representatives) est composée des 435 membres, élus au scrutin majoritaire à un tour, pour une durée de deux ans, dans le cadre des Etats. Et chaque Etat obtient un nombre des représentants proportionnel à sa population conformément au principe adopté au XVIII ème siècle. 205 . Pour être élu, au niveau de la Chambre des représentants, il faut : _ Avoir l’âge de 25 ans ; _ Etre de citoyen américain depuis sept ans au moins, et résident dans l’Etat concerné. Cependant, le titre des représentants est incompatible avec des fonctions publiques relevant de l’autorité des Etats-Unis 206 . b) Le Sénat (the Senate). D’une représentative à base égalitaire, le Sénat des Etats-Unis est composé de deux sénateurs par Etat. Et en tout, les 50 Etats fédérés élisent un nombre de100 sénateurs, choisis pour un mandat de six ans, par le peuple des Etats 207 , renouvelable, par tiers, tous les deux ans. L’éligibilité d’un sénateur est conditionnée de la façon suivante : _ Avoir l’âge de 30 ans ; _ Etre de citoyen américain depuis neuf ans au moins, et résident dans l’Etat concerné. Dans tous les cas, ce titre sénatorial est frappé d’incompatibilité, avec des fonctions publiques relevant de l’autorité des Etats-Unis. En ce qui concerne sa présidence, elle est assurée par le vice-président des Etats-Unis. Mais, il ne s’agit que d’une attribution honorifique. Car, ce dernier ne vote pas, sauf, en cas de partage de voix et n’a que peu de pouvoir.

B –PRIVILEGES.

Selon l’article premier, section 6, 1° de la Constitution fédérale des Etats-Unis d’Amérique du 17 septembre 1787, les membres du Congrès jouiront du privilège de ne

205 Selon l’article premier, section 2 (1), de la Constitution du 17 septembre 1787, …les électeurs dans chaque Etat devront posséder les qualifications requises des électeurs de la branche la plus nombreuse de la législature de l’Etat. 206 Cf. article premier, section II, 2° de la Constitution fédérale des Etats-Unis d’Amérique, op.cit. 207 Jusqu’en 1913, ils étaient désignés par la législature de leur Etat. 80 pouvoir en aucun cas, sauf pour trahison, crime et violation de la paix publique, être mis en état d’arrestation pendant leur présence à la session de leurs Chambres respectives, ni pendant leur présence à la session de leurs Chambres respectives, ni pendant qu’ils s’y rendent ou qu’ils en reviennent ; et, pour tout discours ou débat dans l’une ou l’autre Chambre, ils ne pourront être mis en cause dans aucun autre lieu 208 .

208 Voir Textes constitutionnels étrangers, Stéphane Rials et Denis Baranger, Presses Universitaires de France, p 28 81

CONCLUSION

L’institution de l’inviolabilité parlementaire a connu des mouvements signifiant les tendances politiques des Gouvernants de chaque régime. Privilège parlementaire reconnu par tout régime démocratique, l’inviolabilité dérange parfois les Gouvernants ; elle leur cause des soucis, à tel point qu’elle a été façonnée différemment d’un régime à l’autre. Mais, ce qui met parfois en commun les Gouvernants de différents régimes, c’est la volonté de contourner cette institution dérangeante en « créant » des situations de flagrance qui permet contourner l’obstacle de la demande de levée de l’immunité parlementaire. En effet, de toutes ces mises en scènes, la situation de flagrance arrangées en vue de frapper le parlementaire gênant, le but du pouvoir est unique et évident : écarter toute procédure de demande de levée de l’inviolabilité (immunité) parlementaire dont l’issue n’est pas certaine 209 . La flagrance qui permet d’outrepasser cette exigence est devenue une arme fatale pour les Gouvernants, afin de neutraliser un parlementaire opposant qui fait peur. Ainsi, au parlementaire « gibier », le Gouvernant tend un « appât » pour le piéger. Et la Justice, dans cette mascarade, joue un rôle prépondérant, car c’est elle qui, finalement, achèvera la croisade par une décision de condamnation ferme. Ainsi, avec le fardeau de la condamnation, le « délinquant » ne pourra plus nuire. En effet, même après sa libération, il lui sera interdit d’aspirer à un quelconque mandat électif vu le passé pénal inscrit dans son casier judiciaire. Ainsi, frappé d’inéligibilité, le parlementaire condamné verra la fin de sa carrière politique. Cependant, l’on a pu constater que cette notion a été utilisée à tort. Ou bien la notion est ainsi élargie ou bien elle n’a servi que pour l’arrestation dans la mesure où la condamnation prononcée plus tard se basera sur une autre infraction que celle qui a permis cette arrestation. Or, normalement, s’il n’est pas tenu par l’infraction flagrante, motif de son arrestation, il devrait être libéré. Et toute autre affaire de poursuite ou arrestation devrait faire l’objet d’une demande d’autorisation de poursuite ou d’arrestation. L’on peut dire que dans le désir de neutraliser le parlementaire, d’intimider le reste la loi elle-même a parfois été bafouée.

209 Cette attitude permet au proverbe « quand on veut noyer un chat, on dit qui’il a la rage » d’avoir tout son sens. 82

C’est probablement pour éviter cette situation, critique que la procédure de demande d’autorisation a été abrogée par la Constitution de 2007 210 . En effet, depuis lors, la poursuite des parlementaires, ne fait plus l’objet d’une demande, en vue d’une autorisation par l’Assemblée à laquelle appartient le parlementaire. Cette modification radicale permet de porter un jugement de valeur sur l’avancé de la démocratie dans le pays. L’abrogation est une décision tendant à fragiliser la situation des parlementaires face à l’exécutif et surtout au judiciaire. Elle a de l’influence sur l’existence de véritables débats politiques et démocratiques, donc la place et la valeur des parlementaires eux-mêmes. Cette abrogation de la protection constitue une dévalorisation de ces personnalités politiques. Cependant, cette dévalorisation n’est pas motivée par une idée de responsabilité pénale, mais plutôt d’une élimination de tout esprit d’opposition. La réduction ou l’abrogation de l’inviolabilité parlementaire démontre donc la faiblesse d’un pouvoir, qui pour s’assurer de sa longévité ressent le besoin de menacer d’éventuels opposants politiques et d’éliminer les réels. Car, Madagascar comme la plupart des pays africains ne veut admettre la démocratie qu’à travers l’allégeance absolue de tous au parti majoritaire. Vu la crise politique que connaît le pays ces derniers temps et qu’on s’achemine vers une nouvelle République, il serait très édifiant de connaître le sort que la prochaine Constitution réservera à cette protection parlementaire.

210 Article 70 alinéa 2 de la Constitution du 4 avril 2007 83