LA TROISIÈME ÉDITION D’ALTERNATIBA, FORUM CITOYEN POUR LE CLIMAT, PREND SES QUARTIERS À GENÈVE PAGE 3

JAA / PP / JOURNAL, 1211 GENÈVE 13

SUCCESSEUR DE LA «VOIX OUVRIÈRE» FONDÉE EN 1944 • WWW.GAUCHEBDO.CH N° 37 • 15 SEPTEMBRE 2017 • CHF 3.-

En Grèce, l’austérité rime avec Deux photographes ont destruction du droit du travail. arpenté la zone d’exclusion Reportage page 5 autour de Fukushima page 8 IL FAUT LE DIRE... PV2020 fragilise les rentiers! Sale temps pour les salariés de la Poste Le 24 septembre on votera sur la pré- voyance vieillesse: face à une majorité de droite, la gauche parlementaire a bataillé SUISSE• «J’ai le sentiment d’avoir été éjectée», raconte Lucienne, licenciée par le géant jaune après 40 ans de dur pour chercher un compromis accep- service, qui participait à une action vendredi dernier contre la fermeture des offices de poste. Elle rappelle que table pour le PDC et il ne s’agit pas de la blâmer sur les concessions obtenues. Mais si les restructurations affectent les usagers, elles touchent aussi les employés. le projet, soumis à votation, va globale- ment péjorer les rentes, ceci alors que 330’000 personnes ont déjà recours aux prestations complémentaires, sans comp- ter les quelque 100’000 qui ne connaissent pas leurs droits à ces prestations et vivent en dessous du seuil de pauvreté: c’est déjà plus d’un rentier sur 3. Il faut enfin rappeler que les Chambres fédérales ont prévu d’économiser environ 300 millions sur ces prestations pour «limiter les dépenses publiques» en 2018, quelle que soit l’issue de la votation. Le 2ème pilier a clairement montré ses fragi- lités. Il a accentué les inégalités de rente en fonction du revenu, il dépend de moins en moins des derniers salaires mais davan- tage du «capital accumulé», et les fonds de réserves sont gérés par des banquiers qui participent aux «bulles» boursières ou immobilières, quand ils ne les créent pas, rendant la pérennité du système incertain. Ils jouent avec l’argent de nos retraites sans que l’on s’en rende compte et ensuite on nous dit qu’il faut se serrer la ceinture et accepter, comme le prévoit PV 2020, de perdre 800 francs par année pour chaque 100’000 d’argent d’économie forcée (car le 2ème pilier est obligatoire) pendant la vie professionnelle. Si le 2ème pilier «va mal», c’est beaucoup moins à cause du vieillisse- ment de la population qu’en raison de cette somme d’argent évaluée à 900 mil- liards, qui est épargnée plutôt qu’injectée « e n’arrive pas à avaler la pilule, anticipée. «Quelques mois plus tard, notamment que les personnes âgées informé qu’avec le 2ème pilier anticipé dans l’économie courante et soumise aux Jje ne dors plus la nuit!» mon lieu de travail figurait sur la liste de 62 ans et plus concernées par une et en m’inscrivant au chômage, je spéculations boursières. Lucienne (prénom d’emprunt), des offices menacés», constate-t-elle, restructuration partent à la retraite perdrais seulement 300 francs par De plus, le projet PV2020 fait globalement qui participait à une action menée rappelant que «le démantèlement du anticipée. Elle reçoit sa rente 2ème mois. J’ai donc accepté.» Mais elle se financer les 70 frs d’augmentation de l’AVS vendredi dernier à Lausanne contre la réseau a des conséquences non seule- pilier et les cotisations LPP conti- rend compte par la suite que le fermeture des offices de poste (voir ment pour les usagers, mais également nuent à lui être payées par La Poste manque à gagner est plutôt de l’ordre (qui coûte 1.3 milliard) par les femmes, qui encadré), n’a pas encore digéré la façon pour les employés». jusqu’à 64 ans. Mais cela ne change de 1000 francs par mois. «J’ai le sen- devraient travailler une année de plus (ce dont s’est terminée sa longue carrière rien à son ressenti, d’autant plus timent d’avoir été éjectée, qu’ils vou- qui rapporterait 1.2 milliard). Il entérine chez le Géant jaune. Cela faisait plus «Et on nous demande de voter pour qu’elle estime avoir été mal rensei- laient vraiment se débarrasser de aussi l’idée d’une retraite flexible entre 62 de 40 ans, depuis 1970, qu’elle tra- augmenter l’âge de la retraite?» gnée. «Mon employeur m’a expliqué moi, après autant d’années, je ressens et 70 ans, ce qui va mettre à mal les reven- vaillait au guichet d’un office lausan- Lucienne bénéficie du plan social qu’il y avait trop de personnel dans un profond manque de reconnais- dications syndicales d’une retraite à 60 ans nois lorsque, en février dernier, à 62 accepté par les partenaires sociaux mon office. J’ai d’abord dit que j’étais sance», confie celle qui se retrouve suivant la pénibilité du travail, notamment ans, on lui propose de partir en retraite en vigueur depuis 2011, qui prévoit prête à aller ailleurs, puis il m’a aujourd’hui à devoir faire des dans la construction. recherches d’emploi au chômage pour les quelques mois qui lui res- Le projet PV 2020 participe à la fragilisa- La directrice de La Poste licenciée! tent avant l’AVS. Et de rappeler que tion des rentiers, et met un emplâtre sur «je suis la 3e génération de postiers un 2ème pilier dont on nous dira dans Le comité vaudois «Touche pas à ma poste», composé notamment tions parlementaires actions citoyennes communales et cantonales», dans ma famille, j’ai vraiment du quelques années qu’il faudra encore le du POP, de l’association de défense des services publics Acidus et de de favoriser une dégradation de la qualité du service et le dumping sang jaune»! C’est surtout l’ensemble raboter. C’est pourquoi il faut dire 2x non à Syndicom, poursuit sa lutte contre les restructurations du géant salarial en remplaçant des offices par des agences postales, ce qui lui du processus qui la choque. «Com- ce projet mal ficelé et dès le 25 septembre jaune. Vendredi dernier, une action a été menée devant le bureau de permet d’«éviter de rétribuer correctement les employés», de ne pas ment la Confédération, propriétaire se battre pour renforcer l’AVS et lui per- poste de la Riponne à Lausanne. Après avoir rappelé leurs revendi- respecter la loi qui lui impose d’ «assurer un service universel suff- majoritaire de La Poste, qui fait des mettre de remplir la mission que la consti- cations, les militants se sont rendus dans l’office pour envoyer une isant, à des prix raisonnables, à tous les groupes de population et centaines de millions de bénéfices, tution lui donne: couvrir les besoins vitaux lettre de licenciement à la Susanne Ruoff, directrice de La Poste dans toutes les régions du pays», ou encore de «négliger sa respon- permet à celle-ci de licencier des et assurer une retraite digne. J’en appelle employés à une année de l’AVS et suisse. Prétexte: la gestion «calamiteuse» de l’entreprise par cette sa bilité d’entreprise socialement responsable en licenciant du per- à la gauche radicale à lancer une initiative dernière. Il lui est en particulier reproché de «refuser d’écouter la sonnel qualifié et compétent». Deux interpellations ont également faire payer le chômage, donc la col- lectivité? C’est inacceptable». «Je ne unitaire dans ce sens-là, le plus rapide- population qui a clairement exprimé son opposition au démantèle- été déposées au Grand Conseil, notamment concernant le risque de suis pas la seule, depuis que la fer- ment possible. ment d’offices postaux», notamment via «de nombreuses interven- dumping salarial dans les agences postales. Bernard Borel Suite en page 2 2 • NATIONAL N° 37 • 15 SEPTEMBRE 2017

Suite de la page 1 meture de nombreux office est en Communales: que d’élections tacites! examen, plusieurs collègues âgés de 62 ans ont reçu leur congé», assure- t-elle encore. «Et on nous demande JURA• La population du canton élit le 22 octobre ses autorités communales. Mais dans près de la moitié des de voter pour augmenter l’âge de la retraite?» communes, il n’y aura aucune élection. 39 maires et 29 conseils communaux (sur 55) sont déjà élus.

Une évolution «inquiétante» a difficulté de trouver des candi- POP et des Verts à Delémont (et du PS En février dernier, le syndicat Syndi- Ldats pour les fonctions commu- et des Verts à Porrentruy, Haute- com dénonçait déjà «une vague de nales a fortement diminué l’inten- Sorne, Courroux, etc.). Actuellement, licenciement dans les offices de sité des luttes électorales locales. Dans il y a une conseillère PS, une CS-POP poste en Suisse romande», pointant 25 communes, il n’y aura tout simple- & Verts, une PDC et un PCSI. Les du doigt le cas de 20 personnes à ment pas d’élections le 22 octobre, car deux élues de gauche se représentent, Genève et 6 à Fribourg orientées vers tous les postes ont été repourvus tacite- les deux autres pas. Le PS ne cache pas le plan social sans qu’une offre alter- ment. Cette évolution ne touche pas que ses ambitions de conquérir un second native ne leur ait été faite et alors que les petites communes, puisque sur les siège, il l’avait raté de peu il y a cinq les discussions avec les cantons onze communes les plus peuplées, il y a ans. Si le PDC ne semble guère concernant les offices menacés huit élections tacites à la mairie. Et c’est menacé, les sièges du PCSI et de CS- n’étaient pas achevées. La Poste donc sans joute électorale que des mai- POP & Verts sont moins assurés. «manque à ses promesses», jugeait ries passent d’un parti à l’autre, comme Quant au PLR, il ne paraît pas en alors le syndicat, rappelant que celle- par exemple du PDC au PS à Cour- mesure de reconquérir un siège. ci s’était engagée à «chercher pour les rendlin et Courtételle. Dans ces deux La liste CS-PO P & Verts com- employés concernés par les change- grands villages, c’est aussi pour le prend trois candidates, Esther Gelso, ments des solutions adéquates dans Conseil communal (exécutif) qu’il n’y a conseillère sortante et députée sup- d’autres domaines» et à «entretenir pas de lutte, comme dans la majorité des pléante, Jeanne Beuret, conseillère de un dialogue actif avec les partenaires communes. Il n’y en a que 20 (36 %, ville (toutes deux CS-POP) et Magali sociaux». mais 65 % de la population) où le Rohner, députée verte, ainsi qu’un Contacté, Christian Capacoel, porte- nombre de candidats a dépassé le candidat vert aussi, Théo Burri. parole de Syndicom, confirme que le nombre de conseillers à élire. Dans la CS-POP & Verts ont déjà bien nombre de personnes concernées par le plupart des communes, l’élection est commencé leur campagne puisqu’ils plan social – qui garantit notamment donc tacite et dans six autres, elle est ont trouvé 41 personnes et ainsi maximum 18 mois de salaire aux per- totalement ou partiellement «libre», déposé une liste complète pour le sonnes licenciées qui ne sont pas en âge c’est-à-dire que, faute de candidats, les Conseil de ville. Il y a cinq ans, de prendre la retraite - est en augmenta- électeurs peuvent choisir n’importe quel aucune liste ne dépassait 21 candidats tion. «Ce serait un scandale si La Poste citoyen de la commune. et cette fois, seul le PS a aussi déposé utilise ce plan social pour licencier en Il y a tout de même des communes une liste complète, les autres se limi- masse. Il ne doit en principe concerner qui font exception et notamment Por- tant à 20 (PDC, PLR), 13 (PCSI), 7 que des cas exceptionnels. Si elle conti- rentruy, avec cinq candidats à la mairie: (UDC) et 2 (P. évang.). nue avec ses restructurations, il devra PDC sortant, PLR, PS, PCSI (chrétien- La liste CS-POP & Verts est pari- être amélioré», commente-t-il. Et de social) et un sans-parti. Dans douze taire (21 hommes, 20 femmes) et souligner que «La Poste doit faire des autres communes, il y a aussi lutte pour relativement jeune, avec une efforts pour transférer, autant que pos- la mairie, mais la gauche n’est guère pré- moyenne de 38 ans et 14 personnes Pour les élections à l’exécutif de Delémont, le CS-POP et les Verts présentent trois candidats. DR sible, les employés des offices vers sente qu’à Clos-du-Doubs, avec un can- de moins de 30 ans. Elle est ouverte, d’autres secteurs, d’autant plus qu’elle didat vert, un député PS sur une liste puisqu’à côté de 10 membres du POP prétend développer de nouveaux «apolitique», face à un PDC. A Saigne- et 8 des Verts, une majorité des can- Pas de «Papyrus» dans le Jura domaines comme le numérique». Le légier, le PS perd la mairie faute de can- didats ne se réclament pas d’une La semaine passée, le Parlement jurassien a refusé, par 28 voix contre 26, une motion du syndicat observe également «avec didat. Elle passera au PDC ou au PCSI. appartenance partisane précise, mais groupe Verts et CS-POP défendue par Ivan Godat, demandant que le canton s’inspire de inquiétude» une diminution progressive sont pour la plupart actifs dans du pourcentage de travail des employés Majorité de gauche à Delémont? diverses associations. l’opération Papyrus du canton de Genève et régularise la situation de sans-papiers à cer- de plusieurs offices de poste, sans toute- Si la réélection de Damien Chappuis Les listes CS-POP & Verts sont taines conditions: intégration réussie, indépendance financière, 10 ans de séjour continu fois que les horaires d’ouverture ne (PCSI) à la mairie est tacite, la lutte donc bien armées pour maintenir le (5 ans pour les familles avec enfant), … Les arguments de lutte contre le travail au noir et soient modifiés. «Au final, le même tra- pour les quatre sièges du Conseil com- siège au Conseil communal et aug- la sous-enchère salariale, contre l’hypocrisie de la situation actuelle et l’appel à l’esprit vail doit être effectué, ce qui représente munal risque d’être serrée. Celui-ci est menter le nombre de conseillers de d’ouverture et aux «valeurs chrétiennes» n’ont pas suffi à la droite. PDC et PLR n’ont pas une pression sur le personnel.» élu à la proportionnelle, mais sans ville et éventuellement permettre une pipé mot dans le débat et ont refusé la motion, comme évidemment l’UDC, alors que PS, possibilité d’apparentements, ce qui a majorité de gauche. n chrétiens-sociaux et bien sûr Verts et CS-POP l’ont soutenue. JPKr «Circulez, il n’y a rien à voir!» fortement favorisé l’alliance de CS- Jean-Pierre Kohler «La Poste devrait attendre une déci- sion politique avant de procéder à des licenciements et fermetures d’offices », estime encore le syndicaliste, qui rap- COURRIER COUP DE GUEULE pelle que de nombreux politiques ont manifesté leurs craintes quant aux Le Parti communiste terposer dans le conflit Numeiry-PCS: il La RTS doit fédérale, celle-ci étant revue au manœuvres du géant jaune et que dif- était un ami personnel d’Abdel Khalek désavantage de Neuchâtel. Un jour- férentes interventions parlementaires soudanais réprimé Mahjoub, le secrétaire général du PCS. aborder les naliste lui a répondu en ces termes: sont pendantes aux chambres fédé- Nasser n’avait jamais oublié qu’en 1956, «(...)Votre remarque sur la rales. «Mais le processus prend du il y a un demi-siècle lors de l’agression anglo-franco-égyp- questions péréquation financière pour le can- temps et La Poste semble en profiter tienne contre l’Egypte, le PCS avait envoyé ton de Neuchâtel est tout à fait per- pour avancer dans sa besogne et prati- Hans-Peter Renk réagit à l’article des brigades de volontaires combattre aux complexes tinente. Nous avons bien sûr envis- quer une politique du fait accompl i», d’Amanda Ioset sur le décès de la côtés de l’armée et des maquisards égyp- agé de donner cette explication… critique-t-il. féministe soudanaise Fatima Ahmed tiens dans la zone du canal de Suez. Notre rédacteur Alain Bringolf très technique comme vous dites! Alors, La Poste a-t-elle oui ou non Ibrahim, paru dans «Gauchebdo» Le coup d’Etat du 19 juillet 1971, réagit à une réponse donnée par la Difficile de placer une longue expli- commencé à licencier en douce ou à du 8 septembre dernier. mené par l’aile gauche de l’armée souda- RTS au conseiller général Chaux- cation dans ce genre de reportage. réduire le pourcentage de travail de ses naise sous la direction du commandant de-Fonnier Julien Gressot. Et je ne suis pas sûr que tout le employés? Contactée, sa porte-parole a nécrologie de Fatima Ahmed Hachem El-Atta, fut écrasé trois jours ulien Gressot, actuellement monde comprenne le concept. Nathalie Dérobert Fellay élude, mais ne LIbrahim, parue dans Gauchebdo no plus tard par une action conjointe de Jresponsable du groupe POP au Délicat à illustrer et à vulgariser. La dément pas non plus. «La Poste ne 36 du 8 septembre 2017 sous la plume l’Egypte (dirigée par Anouar El Sadate) législatif de La Chaux-de-Fonds, a démonstration est complexe et donne aucune information au sujet de d’Amanda Ioset, rappelle la répression et par la Libye (du colonel Moamar El- réagi à l’émission Temps présent de demande du temps. A notre grand dossiers liés au droit du travail et tou- contre la gauche soudanaise, il y a près Khadafi). Le régime libyen intercepta, le la RTS du 8 juin 2017, qui présen- regret nous avons dû renoncer à chant à la sphère privée du personnel», d’un demi-siècle. En 1969, une junte 22 juillet, un avion transportant deux tait la situation économique du cette séquence (...)». déclare-t-elle dans une prise de posi- «nassérienne» (dirigée par le général dirigeants du nouveau régime et les livra canton de Neuchâtel. Estimant que Ne pas vouloir approfondir les tion écrite, tout en assurant que «La Numeiry) avait pris le pouvoir au ensuite à Numeiry. les propos tenus n’abordaient pas sujets difficiles ne favorisera pas un Poste assume sa responsabilité sociale», Soudan. Initialement, elle fut soutenue Les dirigeants de la gauche militaire les causes profondes des difficultés changement de cap et les majorités que «l’objectif déclaré est de continuer par le Parti communiste soudanais et le secrétaire général du PC soudanais financières de ce canton, il a inter- politiques continueront de décider à éviter des licenciements» et que «les (PCS), mais ce dernier refusa - ayant tiré furent pendus quelques jours plus tard. pellé les responsables de l’émission des coupes dans les tâches collaborateurs touchés par un change- des conclusions négatives sur l’expéri- Est-ce donc à cette date que fut aussi en soulignant un élément qui publiques pour le plus grand béné- ment peuvent bénéficier de l’accompa- ence de ses camarades égyptiens - de assassiné l’époux de Fatima Ahmed n’avait pas été mentionné: le fait fice des intérêts privés. Pas question gnement prévu par le plan social négo- s’intégrer à un parti unique sur le mod- Ibrahim? que la baisse du taux d’imposition d’envisager davantage de recettes, cié avec nos partenaires sociaux». En èle de l’Union socialiste arabe (Egypte). La connaissance de ces événements accordée aux entreprises dans le on ne prend pas aux riches pour d’autres termes, «Circulez, il n’y a rien Or, plusieurs responsables de l’armée fait que je n’ai jamais eu d’illusions sur la canton avait provoqué un manque donner aux pauvres. Le mépris des à voir»! soudanaise – ce qui servit de prétexte à nature du régime de feu Khadafi et sur de 40 millions dans la péréquation téléspectateurs estimés incapables Pour rappel, La Poste avait leur limogeage en novembre 1970 – sym- son chef. Qu’il se soit réclamé, comme financière cantonale. En effet, avec de comprendre des explications annoncé fin 2016 que 1200 personnes pathisaient avec le PCS ou du moins Numeiry, de Nasser démontre l’exacti- l’arrivée de holdings attirées par compliquées est inacceptable car pourraient être touchées au niveau n’éprouvaient pas à son égard les senti- tude de ce constat de Marx, «L’histoire une fiscalité avantageuse, la fortune pour sortir de l’ornière du système Suisse d’ici 2020 par ses décisions de ments hostiles de Numeiry. Le président se répète, la première fois comme tragé- existante dans le canton a aug- capitaliste il faudra bien analyser restructuration. n égyptien Gamal Abdel Nasser, dans les die, la seconde comme farce». n menté, ce qui a eu un impact sur le ses défauts. n Juliette Müller derniers mois de sa vie, avait tenté de s’in- Hans-Peter Renk calcul de la péréquation financière Alain Bringolf N° 37 • 15 SEPTEMBRE 2017 NATIONAL • 3 Alternatiba, vitrine de la transition écologique GENÈVE• Troisième du nom, le festival Alternatiba Léman se déroulera à Genève jusqu’au 16 septembre comme dans plusieurs villes françaises. Il propose des alternatives économiques et sociales et un programme de transition écologique pour enrayer le changement climatique par des solutions relocalisées. a genèse du projet fait déjà partie Lde l’histoire. En prévision de la Cop 21 sur le climat qui s’est déroulée à Paris en 2015, un mouve- ment citoyen pour le climat et la justice sociale a bourgeonné en 2013 à Bayonne, où 12’000 personnes s’étaient retrouvées dans un premier village des alternatives au changement climatique, Alternatiba. L’objectif était tout à la fois de dénoncer l’urgence climatique qui, cet été, a encore montré qu’elle n’était pas une vue de l’esprit, en mettant en place des alternatives concrètes autour des thématiques «qui font société». Ce qui implique une réorganisation de l’es- pace public aussi bien dans les domaines de l’économie que de la finance, de l’agriculture, de l’alimenta- tion, des transports, de l’éducation ou de l’habitat. Décroissance? « Nous uti- lisons peu ce mot, mais il est clair qu’il faut décroître notre empreinte carbone, notamment en ce qui concerne les pra- tiques de production et les relations commerciales des entreprises », explique Antonin Calderon, socio-éco- nomiste et secrétaire général de Mon- naie Léman, l’association gérant cette monnaie locale, qui participe à l’orga- nisation de l’événement.

Réduire l’empreinte climatique Alternatiba, Forum citoyen pour le climat, est né en 2013 à Bayonne. Depuis, il s’est développé dans de nombreuses villes. Ici, à Paris en 2015. DR Pour réaliser leur programme, les acti- vistes de la cause font souvent référence sont les premières causes du réchauf- revendique la feuille de route pour la lieu de synergies. «Ce festival permet sibles, et des organisations qui tra- à la théorie de la transition écologique. fement climatique. Face à cette situa- transition de la Chambre de l’écono- à un plus grand nombre de gens de se vaillent dans les domaines de la réin- Concept défendu par l’enseignant tion, il convient alors de réduire équi- mie sociale et solidaire (Après-GE), familiariser avec le modèle d’une sertion, la précarité, le handicap, la anglais en permaculture, Rob Hopkins, tablement notre empreinte écolo- cheville ouvrière du rendez-vous société post-pétrole et post-spécula- solidarité internationale. à travers des ouvrages comme Manuel gique. Ce qui passe par le concept de alternatif genevois. tion, plus écologique et plus sociale», Une telle économie peut-elle essai- de Transition: de la dépendance au société à 2000 watts, qui postule une explique-t-il. Outre des films et mer dans un monde régi par les règles pétrole à la résilience locale ou Le pou- réduction par trois de notre consom- «Pas qu’un festival bobo» conférences, le festival Alternatiba du capitalisme? Antonin Caderon y voir d’agir ensemble, ici et maintenant, mation d’énergie et le remplacement «Tout comme Paris, Mulhouse, Tou- Léman proposera de nombreux croit, rappelant qu’à l’échelle locale, celui-ci cherche à orienter le développe- de celle subsistante par des énergies louse ou Dakar, Genève est une des stands, liés tant à l’agriculture de celle des villes et des quartiers, de plus ment dans une direction plus durable, renouvelables. «Il ne faut dépasser villes qui continuent à perpétuer ce proximité avec notamment la Fédéra- en plus de cités défendent une par la participation de tous, en identi- aucune des frontières écologiques de rendez-vous annuel du mouvement tion romande d’agriculture contrac- approche de transition écologique, fiant et en restructurant fondamentale- la biosphère, tout en assurant le res- citoyen pour le climat», explique tuelle de proximité qu’à la mobilité notamment par la création d’éco-quar- ment les systèmes insoutenables qui pect des droits économiques, sociaux Antonin Calderon. Pour ce membre douce, à l’éco-habitat qu’à la solidarité tiers. Dans sa feuille de route, Après- sous-tendent notre société. et culturels garantis internationale- du comité de l’épicerie participative internationale ou aux alternatives Ge estime que le calendrier du passage Parmi les premiers problèmes ment comme le droit à l’alimentation sans emballages Le Nid, et de l’asso- numériques et aux médias alternatifs de la situation actuelle de non-durabi- identifiés, la prédominance toujours au logement, à la santé ou la sécurité ciation Ithaque qui promeut l’habitat (dont Gauchebdo). Antonin Calderon lité à celle de durabilité prendra deux actuelle des énergies fossiles (pétrole, sociale. Il faut aussi assurer des condi- coopératif et communautaire, le festi- récuse l’étiquette de festival bobo, décennies, voire trois. Il est temps que gaz, charbon) dans l’économie et nos tions de travail favorables à l’épanouis- val Alternatiba, qui se tiendra cette soulignant que parmi les acteurs de tout le monde s’y mette. n sociétés. Tout à la fois non renouve- sement humain et respecter les année au Parc des Cropettes derrière l’économie sociale et solidaire et Joël Depommier lables, inégalement réparties, tendan- conventions de base de l’Organisation la gare de Cornavin, doit servir de d’Après-Ge, on trouve beaucoup d’en- Informations complémentaires et pro- ciellement de plus en plus chères, elles mondiale du travail (OIT) à ce sujet», vitrine à la transition écologique et de treprises de biens et de services acces- gramme sur www.alternatibaleman.ch Les aides-soignants du plus grand Un oui pour plus de démocratie bloc opératoire des HUG en colère GENÈVE• Le 24 septembre, les électeurs se prononcent sur un abaissement du nombre des signatures pour les initiatives et les référendums. GENÈVE• Le personnel s’oppose aux journées de dix heures entrées en vigueur le 11 septembre. éposé en mai 2016 par le groupe parlementaire importante du vote à l’urne et son remplacement par DEnsemble à Gauche (EaG), le projet de loi le vote par correspondance», a ainsi expliqué le socia- constitutionnelle intitulé «Renforçons les droits liste Cyril Mizrahi. Pour EaG, Pierre Vanek a rappelé e lundi 11 septembre, les aides-soi- à tard le soir. Le SSP a plusieurs populaires» se propose de «faciliter l’exercice du droit que dans le canton de Zurich, qui compte 900’000 Lgnants du bloc Opéra, le plus grand fois écrit à la direction pour faire part de la d’initiative et du droit de référendum». Pour ce faire, électeurs, le référendum ou l’initiative législative des HUG, soutenus par le SSP et le nette opposition du personnel à cette nou- le projet stipule «que 3% (contre 4% actuellement) des requiert 6’000 signatures, soit 0,7% du corps électoral. SIT se sont rassemblés en fin d’après-midi velle dégradation de ses conditions de tra- titulaires des droits politiques peuvent soumettre au «On a vraiment un problème, les droits populaires sur la rotonde située devant l’entrée princi- vail et pour demander une réunion avant Grand Conseil une proposition de révision totale ou des citoyens genevois de tous bords sont bridés et pale des Hôpitaux universitaires. Ils se sont l’entrée en vigueur de ces nouveaux partielle de la constitution». Ainsi, il suffirait de 7’697 réduits par rapport à ceux qu’ils auraient l’honneur, le ensuite rendus auprès de la direction pour horaires. En vain», explique le Syndicat des signatures contre 10’263 aujourd’hui pour déposer plaisir et le pouvoir d’exercer s’ils résidaient à Zurich», lui remettre une pétition munie d’une cin- services publics. Le SSP ajoute que les une initiative. Un référendum exigerait 5’131 signa- a souligné le député. Des arguments que n’avaient pas quantaine de signatures demandant le conditions de travail des aides-soi- tures contre 7’697 paraphes actuellement. Dans les voulu entendre en janvier le PLR, le PDC et le chef du retour aux journées de 8 heures, des postes gnants,«maillon essentiel de la chaîne de communes de 5’000 à 30’000 habitants, le nombre de gouvernement François Longchamp, qui voulaient supplémentaires ainsi que le respect des soins», ne cessent de se dégrader avec un signatures nécessaires doit correspondre à 8% de une hausse du nombre de signatures du fait de l’aug- engagements antérieurs et de la Loi sur le manque chronique de personnel, une com- l’électorat contre 10% aujourd’hui. mentation de la population, tout en rappelant que la travail. En effet, au mois de juin, la direc- plexité croissante de l’activité, une augmen- nouvelle constitution avait allongé les délais de récolte tion des HUG a décidé sans consultation tation de la charge de travail et un environ- Des citoyens moins bien lotis qu’à Zurich de signatures pour les référendums pendant les préalable du personnel et des syndicats nement difficile (travail sans lumière du Lors des débats au Grand Conseil en janvier dernier, vacances d’été et de fin d’année. Une salve qui n’avait d’augmenter à 10 heures la journée de tra- jour). Face à cette fin de non-recevoir de la la gauche a défendu son projet, en expliquant la diffi- pas fait fléchir le Grand Conseil, qui s’était résolument vail. La mesure est entrée en vigueur le 11 part de la direction, le personnel se réunira culté croissante de l’exercice démocratique. «La positionné en faveur de ce renforcement des droits septembre. «Ce changement ne se justifie prochainement pour décider de la suite à récolte de signatures n’est pas devenue plus facile mal- politiques. Au peuple maintenant de transformer cet pourtant pas: des équipes se relaient durant donner à la mobilisation. n gré l’augmentation du nombre de citoyens, elle est en essai. n toute la période d’ouverture du bloc de tôt Réd. réalité devenue plus difficile avec la raréfaction JDr 4 • ENJEUX N° 37 • 15 SEPTEMBRE 2017 L’économie est-elle prête LA CHRONIQUE FÉMINISTE On ne prend pas à se remettre en question? les femmes au sérieux RÉFLEXION• Le magazine suisse de la recherche scientifique «horizons» consacre Les femmes ont beau avoir obtenu tous les droits (en Occident), pu se former dans toutes les disciplines et occuper tous les postes et toutes les fonctions, elles ne sont toujours pas un dossier spécial à la science économique, questionnant sa capacité à s’améliorer prises au sérieux. et à évoluer, notamment suite à des crises comme celle de 2007 et 2008. Quand j’étais étudiante, j’avais lu le rapport d’une enquête américaine sur l’évaluation de profs d’université. On avait soumis à un échantillon test des copies identiques, mais l’une ans son éditorial, le rédacteur en était signée par une femme et l’autre par un homme. Systématiquement, celles des D chef d’horizons Daniel Saraga se hommes recevaient des remarques élogieuses et obtenaient une bonne note, alors que demande s’il ne serait pas pos- celles des femmes étaient jugées moyennes et obtenaient une moins bonne note. sible que l’économie progresse et sorte du fatalisme consistant à considérer J’étais déjà sensibilisée au sexisme, mais ce rapport m’avait abasourdie. Comment pouvait- que les crises sont cycliques et s’en- on juger un travail selon le sexe de son auteur? Peu à peu, je relevai les comportements et chaînent tous les dix ans sans que l’on les remarques sexistes qui ont lieu au travail. L’enseignement est relativement épargné, ne puisse y faire grand-chose. La der- mais les postes de direction sont encore majoritairement occupés par des hommes. nière grosse crise, celle dite des «sub- primes», ayant débuté en 2007, réflé- Avant la transformation de l’école du Grütli en lieu culturel, une de mes amies, cinéaste, y chir sur ce point peut paraître relative- avait tourné une fiction philosophique. Lors de la projection du film, que je trouvai très ment urgent. réussi, je lui ai demandé pourquoi elle avait choisi un homme plutôt qu’une femme. Sa Le titre du premier article du dos- réponse m’avait sidérée: «Parce que cela n’aurait pas fait sérieux.» sier est assez symptomatique des apo- ries auxquelles se confrontent les Pendant la campagne PLR pour le poste que laisse Didier Burkhalter, plusieurs politiques et chercheurs: «Le casse-tête d’une médias se sont employés à affaiblir la candidature d’Isabelle Moret, en prétendant notam- croissance durable». Polluer ne coûte ment qu’elle ne maîtrise pas bien ses dossiers. Or chaque fois que je l’ai entendue en rien et c’est une des raisons qui expli- défendre un, lors d’émissions politiques comme Infrarouge, j’ai trouvé au contraire qu’elle quent que l’économie ne se préoccupe les maîtrisait parfaitement, qu’elle était claire et convaincante. Sournoisement, d’aucuns pas ou trop peu de réduire son insinuent qu’il lui serait difficile de concilier sa vie de mère de famille et celle de conseillère impact sur l’environnement. Pour concilier l’économie et l’écologie, le fédérale. C’est en effet la première fois en Suisse qu’une femme brigue cette fonction en débat porte sur la question de savoir ayant de jeunes enfants (deux). A nouveau, on renvoie la femme à sa fonction de mère, de s’il faut favoriser des taxes incitatives reproductrice. «Qui gardera les enfants?» avait dit Fabius quand Ségolène Royal s’était ou le subventionnement. Selon Joëlle déclarée candidate pour la présidentielle. Noailly, du Graduate Institute de Isabelle Moret est née en 1970, Alain Berset en 1972. Lui aussi a de jeunes enfants (trois) Genève, en théorie les taxes d’incita- tion constituent l’outil le plus efficace mais personne ne s’est demandé comment il allait concilier vie familiale et fonction poli- mais dans la pratique subventionner tique. Tant il est évident, normal, dans les usages que les hommes bâtissent leur carrière les technologies «propres» et interdire professionnelle et/ou politique indépendamment de leur statut de père. Sa femme pour- les «sales» fonctionne mieux. On En 2008, Occupy Wall Street dénonçait le capitalisme de Casino des grandes banques privées. Steve Rhodes voira aux soins du ménage et à l’éducation des enfants! «Derrière chaque grand homme se remarquera que ces solutions suppo- cache une femme», dit l’adage. Dirait-on que derrière chaque grande femme se tient un sent toutes des modifications des préciser qu’avec de tels raisonnements sique d’un homme cherchant unique- homme? comportements tant des individus la croissance ne devrait pas être ment à maximiser ses profits est diffi- que des entreprises, qui sont ainsi mis remise en question avant longtemps. cilement vérifiable sur le terrain. Un On apprenait récemment que deux femmes dirigeant une PME ont inventé l’ex istence d’un sur le même plan. Il s’agit donc essen- Il n’est pas non plus précisé que la message d’espoir donc, l’homme serait homme, qui signe les courriels adressés à leurs clients. Du coup, les réponses sont devenues tiellement d’attendre que les consom- croissance actuelle profite très large- autre chose qu’une machine à amasser plus rapides, plus conciliantes, plus respectueuses. Avant, on leur disait «les filles» d’un ton mateurs et producteurs prennent ment aux plus riches, que ce soit en des zéros sur un compte en banque. ironique, soudain, leurs propositions étaient prises au sérieux. Cette anecdote est caracté- conscience des méfaits qu’ils créent, termes de pays ou d’individus, et la ristique. C’est comme si, en dehors du foyer, les femmes n’étaient pas «à leur place». sans trop réfléchir aux fondements du question d’une meilleure répartition L’influence des revues prestigieuses système. Aucune réflexion n’est des richesses, qui est un des facteurs La recherche scientifique dans le Le pire est que les femmes ont intégré cette dévalorisation. Lorsqu’un-e journaliste les menée dans l’article sur l’asymétrie de des crises économiques, n’est pas domaine économique est traversée appelle pour s’exprimer sur un sujet qu’elles connaissent bien, la plupart refusent, prétex- pouvoir et d’impact que les plus abordée. par différents courants. Il semblee qu tant qu’elles ne sont pas à la hauteur, qu’un collègue masculin le fera mieux qu’elles. Un grandes entreprises ont sur la planète Dans un second article, deux éco- certains commencent à s’interroger homme sollicité ne refuse jamais, même s’il ne maîtrise pas le sujet. Toute l’éducation lui a et la responsabilité importante qu’elles nomistes confrontent leurs visions sur ce qui devrait être leur raison répété qu’il doit se battre, qu’il est à la hauteur, qu’il est le plus fort... on a martelé le ont en conséquence vis-à-vis de sa sur la question de savoir comment d’être première à savoir permettre aux contraire à la fille. Si une femme ne se sent pas assez sûre d’elle-même, elle devrait au détérioration. éviter les crises. Le premier, Marc hommes de bien vivre. C’est une moins suggérer le nom d’une collègue. Sinon, on est pris dans un cercle vicieux. Les Chesney, professeur de finance à démarche qui a le mérite d’exister. hommes sont en première ligne, les femmes derrière, les filles finissent, inconsciemment, La croissance pas remise en question l’Université de Zurich, souhaite que Malheureusement, elle semble encore par se dire que les hommes sont plus compétents que les femmes. Au moment du choix En début d’article, une question inté- les banques soient davantage contrô- très minoritaire et bien tardive si l’on ressante est soulevée: l’économie lées alors que le second, Thomas prend en compte que la prochaine d’un métier, elles n’oseront pas se lancer dans des filières prestigieuses, pensant qu’elles pourrait-elle «à la fois accroître la Bieger, recteur de l’Université de grande crise, selon les théories écono- sont trop difficiles pour elles. Elles deviendront infirmières plutôt que médecins, secrétaires prospérité et utiliser moins de res- Saint-Gall, explique que cela ne sert miques de crises cycliques tous les dix plutôt que cadres, etc. Certes, la situation est en train de changer en médecine: il y aujour- sources? Est-il envisageable qu’elle à pas grand-chose et que le néces- ans dénoncées par Daniel Saraga dans d’hui plus d’étudiantEs que d’étudiants, mais les places d’assistant-e-s ou de chef-fe-s de apporte de la stabilité sans crois- saire a déjà été fait car tous les pro- son éditorial, devrait bientôt survenir. clinique restent l’apanage des hommes. En re vanche, il y a toujours une petite minorité de sance?». La réponse, donnée par duits sont susceptibles d’être la proie De plus, les réponses apportées sem- filles dans les écoles et les branches technique, dans les sciences exactes, comme la phy- Lucas Bretschger, de l’ETH Zurich, des spéculateurs, qui sont la cause blent pour le moment très limitées et sique, la mécanique, etc. survient un peu plus loin: «Nous principale des crises. Il prend enfermées dans un vieux cadre de [ndlr: les économistes] sommes l’exemple de la crise de la tulipe en pensée qui en diminue la portée. Une En politique, où les chances devraient être égales, les femmes sont minoritaires sur les listes ouverts à la critique, mais il est diffi- Hollande en 1630 pour montrer que des raisons qui explique cette situa- des partis de droite (seuls les Verts, les socialistes et Ensemble à Gauche présentent autant cile de collaborer avec des personnes la spéculation a existé de tout temps. tion, selon Marc Chesney, est la de femmes que d’hommes, en alternance). Naturellement, s’il y a moins de femmes sur les qui rejettent les instruments de base Pourquoi? Parce que, selon lui, «c’est manière dont est organisé le système listes, elles sont moins nombreuses parmi les élues. Lors des élections de 2015, 64 femmes de l’économie [ndlr: en parlant du dans la nature humaine que de vou- académique. Pour faire carrière, il faut ont décroché un fauteuil au Conseil National, soit 32%, et 7 aux Etats, ce qui représente PIB et de la croissance]». Les alterna- loir s’enrichir le plus vite possible être publié dans les revues écono- 15%. On est loin de la parité! tives évoquées dans l’ensemble du avec un minimum d’efforts». C’est le miques prestigieuses qui sont en dossier parlent de croissance ou fameux homo oeconomicus, égoïste et majorité fortement imprégnées, dans En France, en juin 2017, grâce à la loi sur la parité, 224 femmes ont été élues à l’Assemblée d’économie durable, mais sans plus de ne pensant qu’à lui. le domaine financier, par l’École de nationale, soit 38,8 % des 577 sièges de député-e-s. Elles étaient 155 – soit 26,9% – sous précisions. Et les différents experts Heureusement, dans un troisième Chicago et son hypothèse d’efficience la précédente législature, ce qui constituait déjà un record. Il avait fallu attendre 1997 pour interrogés s’accordent tous pour dire article Ernst Fehr, un neuroécono- des marchés. Les jeunes chercheurs dépasser 10% d’élues au Palais-Bourbon, après les 33 pionnières de 1945 (5,6%). que pour éradiquer la pauvreté à tra- miste de l’Université de Zurich, doivent donc s’y adapter pour être vers le monde, il faut de la croissance. influencé par l’anthropologie, rappelle publiés, ce qui produit un certain Au Conseil fédéral, les femmes ne sont plus que deux: Simonetta Sommagura et Doris Leu- Il y aurait un devoir de croissance à que les études sur l’homme démon- conservatisme et un manque d’inno- thard. Cette dernière a déjà annoncé qu’elle ne briguerait pas un nouveau mandat fin 2019. l’égard des régions pauvres. C’est une trent qu’il serait plutôt un homo reci- vation sur ces problématiques. n Avec un peu de malchance, la Suisse va se retrouver avec une seule femme sur les sept question de responsabilité. Inutile de procans et donc que la théorie néoclas- Julien Gressot «Sages», une sacrée régression puisque nous avons connu 4 femmes sur 7 (Micheline Calmy-Rey, Doris Leuthard, Eveline Widmer-Schlumpf, Simonetta Sommaruga), et failli en avoir 5, quand la brillante Karin Keller-Sutter a été écartée au profit du terne Johann Schnei- IMPRESSUM der-Ammann en 2010. Pourtant, le Conseil fédéral avec une majorité de femmes a très bien Société d’édition de Gauchebdo Rédaction Publicité fonctionné et les concernées trouvent plus facile de travailler dans un contexte favorable (au 25, rue du Vieux-Billard, 1205 Genève 25, rue du Vieux-Billard, 1205 Genève Tarifs et informations sur www.gauchebdo.ch/tarifs-publicitaires moins 40% de femmes). Christophe Grand, président [email protected] [email protected] Maquette Administration 022 320 63 35 Retour à la «juste» répartition des rôles? Les femmes à la maison et les hommes dans la Jean-Pierre Kohler [email protected] Solidaridad Graphisme, 1204 Genève res publica? Misère!... Joël Depommier, rédacteur en chef [email protected] Abonnements Juliette Müller, secrétaire de rédaction jmr@gauchebdo. ch Impression [email protected] | www.gauchebdo.ch/abo Stéphane Montavon, dessinateur [email protected] Pressor, 6, route de Courroux, 2800 Delémont Huguette Junod N° 37 • 15 SEPTEMBRE 2017 INTERNATIONAL • 5 En Grèce, les toxiques ordonnances de la précarité GRÈCE• L’austérité imposée depuis 2012 au pays s’est accompagnée d’une démolition totale du droit du travail. Reportage.

u bout d’un chapelet de bou- défense, marginalisé les syndicats, A tiques aux vitrines poussié- sanctuarisé la toute-puissance patro- reuses, aux grilles baissées nale. Surtout, ces contre-réformes se depuis longtemps, l’agence de l’OAED, sont accompagnées d’un démantèle- le Pôle emploi grec, semble se fondre ment délibéré de l’inspection du tra- dans le paysage de dévastation écono- vail, une institution qui a vu, comme mique qu’offre l’avenue Stadiou, une le reste de la fonction publique, ses grande artère du centre d’Athènes. Les effectifs sévèrement comprimés ces chômeurs s’y pressent, sans illusions, dernières années. «Toutes nos tenta- dossiers sous le bras, visages marqués. tives pour rétablir les conventions Kostas est développeur informatique. collectives se sont heurtées au veto Avant la crise, son salaire net se mon- des créanciers. L’objectif était d’ancrer tait à 1’300 euros. Il a été mis à la une mentalité sociale, d’installer l’idée porte en 2012. Pendant quatre selon laquelle le droit du travail est un longues années, avec deux jeunes luxe d’un autre âge, interdit à ceux qui enfants à charge, il a connu les limbes doivent accepter n’importe quel tra- du chômage. Il n’a retrouvé un emploi vail, à n’importe quel prix», analyse qu’au début de l’année. Une mission l’historienne et députée (Syriza) Sia de huit mois seulement, à temps par- Anagnostopoulou. tiel, assortie d’un salaire de 480 euros. De ce point de vue, la Grèce a bien Son contrat vient de s’achever… servi de laboratoire européen. «C’est retour à la case chômage. «On ne effarant. Emmanuel Macron n’a trouve que des contrats courts, pré- même pas eu besoin de la troïka à caires et mal payés, qui permettent à Paris pour emprunter le même che- peine de survivre. À 47 ans, je suis min, avec ses ordonnances qui démo- prêt à accepter n’importe quelle offre», lissent le droit du trav ail», grince une soupire-t-il. source proche du gouvernement. Sur Dans la longue file d’attente où le terrain économique pourtant, cette patientent les chômeurs à l’intérieur offensive contre les salariés grecs ne de l’agence pour l’emploi, Kostas ne porte que des fruits bien amers. croit pas à l’embellie économique «L’abolition du droit du travail n’a pas célébrée ces dernières semaines par le dégagé les gains de compétitivité premier ministre, Alexis Tsipras, avec escomptés. Mais elle a provoqué une des prévisions de croissance pour chute brutale du revenu disponible et 2017 sérieusement revues à la baisse un effondrement de la demande inté- mais flirtant avec les 2%, après huit rieure. Au final, cette agression contre ans de récession, puis de stagnation. les salariés n’a conduit qu’à une vaste Sa vie fracassée résume à elle seule les redistribution des revenus en faveur innombrables mesures d’austérité des classes dominantes», analyse imposées depuis 2012 à la Grèce par Dimitris Sérémitis, professeur d’éco- ses créanciers et la violente offensive nomie à l’université de la mer Égée. menée, dans ce pays, contre le monde Avec ce processus inédit de précarisa- du travail, les droits des salariés et tion, les rapports de forces sociaux leurs garanties collectives. ont été bouleversés au détriment des classes populaires, qui supportent Les salariés laissés sans défense Une manifestante lors de la grande grève générale du 26 septembre 2012 contre un nouveau plan d’austérité. George Laoutaris seules le fardeau de la crise. Et deux Au nom de la flexibilité, les contre- ans après la signature, par le gouver- réformes de 2010, 2011 et 2012 ont travail est désastreux, surn le pla vingt-huit heures hebdomadaires, préavis. On te fait comprendre qu’il y nement de Syriza, du troisième organisé le démantèlement systéma- social, bien sûr, mais aussi sur le plan rémunérées 7,50 euros de l’heure. aura toujours moins cher et plus mémorandum d’austérité, un terrible tique du droit du travail, avec des dis- de la légalité. «Depuis 2010, nous Cette femme de 36 ans, francophile docile que toi. Ceux qui se syndi- sentiment d’impuissance s’est installé. positions telles que l’abolition des avons vu exploser le nombre d’abus passionnée, se considère comme une quent sont immédiatement mis sur «De nombreux Grecs, désespérés, ont conventions collectives, la refonte du commis par les employeurs. Ces «privilégiée». «Je travaille dix mois liste noire et la moindre journée de perdu confiance dans la gauche, c’est droit de négociation collective don- réformes ont fragilisé les salariés, ins- par an, en enchaînant les CDD. L’été, grève peut valoir un licenciement aux vrai, admet Rania Svigkou, porte- nant la primauté à des accords d’en- tauré un lourd climat de peur. Au je n’ai pas d’autre choix que celui de récalcitrants. En cassant parole de Syriza. Mais treprises pouvant être conclus avec point que, dans la région de l’Attique, vivre de l’allocation-chômage, 360 les droits des salariés, on L’abolition du droit nous avons gagné les des «associations de personnes» au un salarié sur deux connaît des situa- euros par mois. La plupart des ensei- a facilité les licencie- du travail n’a pas élections de septembre détriment de la représentation syndi- tions de travail non rémunéré. Les gnants du secteur privé n’ont pas ments, aggravé la pres- dégagé les gains 2015 sur un programme cale, la possibilité de licencier sans salaires ne sont tout simplement pas cette chance. Les plus récemment sion sur ceux qui tra- limitant les conséquences délai de préavis ni indemnité un sala- versés pendant un ou plusieurs embauchés gagnent péniblement 3 vaillent et favorisé les de compétitivité du mémorandum sur les rié recruté en CDI mois», s’alarme Giorgos euros par heure et ne cumulent pas profits des patrons, mais escomptés plus démunis. Et si la durant une période pro- Ces réformes ont Mylonas, président de assez d’heures pour prétendre aux sans créer d’emplois. Ce droite revenait au pou- batoire étendue à un an, fragilisé les salariés, l’Union des syndicats indemnités de chômage», calcule-t- n’est plus du travail, c’est de l’escla- voir, avec l’agenda ultralibéral de son la mise en cause des trois d’Athènes (EKA). Au elle. Plus vulnérables que jamais, les vage!» enrage-t-elle. Despina refuse chef, Kyriakos Mitsotakis, elle met- semaines annuelles de instauré un lourd nom de la «flexibilité» et salariés jonglent en permanence pourtant de basculer vers le statut de trait en cause les mesures prises en congés payés pour les climat de peur. de la «compétitivité», les pour s’assurer une protection sociale travailleuse indépendante facturant faveur des plus fragiles, comme l’ac- apprentis, etc. Autant de contre-réformes du mar- minimale. ses services, comme l’y encourage son cès aux hôpitaux pour ceux qui sont mesures qui contreviennent aux ché du travail déployées en Grèce ont Faute de travail dans la capitale, actuel employeur. Au total, 300’000 privés de couverture sociale.» Dis- conventions de l’Organisation inter- laissé les salariés sans défense face Despina quitte Athènes chaque prin- Grecs subissent cette situation de tancé dans les sondages, Alexis Tsi- nationale du travail (OIT), à la charte aux employeurs indélicats, encoura- temps pour profiter de la longue sai- salariat dissimulé, qui exonère les pras table toujours sur une renégocia- sociale du Conseil de l’Europe et geant la généralisation du travail au son touristique crétoise. Elle travaille, patrons des cotisations sociales. tion de la dette grecque et promet une même au traité de Lisbonne et à cer- noir, déjà bien ancré avant la crise. la moitié de l’année, comme guide, sortie des mémorandums au terme de taines directives européennes. Le pre- faisant découvrir aux visiteurs les sen- Le droit du travail, un luxe l’actuel programme, qui s’achève en mier mémorandum d’austérité conclu Un travailleur sur cinq n’est pas tiers de randonnée de l’île. Déclarée à d’un autre âge? 2018. Mais la troisième «revue» par entre la Grèce et ses créanciers en déclaré du tout mi-temps, elle cumule les heures sup- Avec le projet de loi discuté ces der- laq uelle les créanciers contrôlent la échange de nouveaux prêts à leur tour Un travailleur sur cinq n’est pas plémentaires non rémunérées et rem- nières semaines à la Vouli, la ministre stricte application des mesures d’aus- engloutis par la dette infligeait encore déclaré du tout et 200’000, au moins, bourse chaque mois au patron de son du Travail, Efi Achtsioglou, promet térité qu’ils exigent s’annonce très aux salariés grecs une baisse de 22% travaillent à plein-temps, alors qu’ils agence touristique les cotisations de remettre de l’ordre dans cette délicate. Au point qu’elle pourrait du salaire minimum (586 euros brut). sont déclarés à temps partiel auprès sociales patronales qui lui assurent jungle, de faire reculer le travail non bousculer cet agenda politique… et Les moins de 25 ans, eux, voyaient du ministère du Travail. Professeur une couverture en cas de chômage ou déclaré et de durcir les sanctions peut-être même précipiter des élec- leur salaire minimum amputé de de français dans un centre d’appren- de maladie… Marché de dupes, contre les employeurs qui contrevien- tions anticipées. n 32%… tissage des langues étrangères, Katia qu’elle est contrainte d’accepter si elle nent à la loi. Problème, les torpilles Rosa Moussaoui, Cinq ans plus tard, le bilan de cette s’est battue avec acharnement pour veut garder cet emploi. «En cinq ans, des créanciers contre le droit du tra- de retour d’Athènes entreprise de démolition du droit du être déclarée vingt heures, sur ses j’ai déjà été licenciée trois fois sans vail ont privé les salariés d’outils de Paru dans L’Humanité 6 • INTERNATIONAL N° 37 • 15 SEPTEMBRE 2017 Le Sud face à l’urgence climatique Dans le cortège parisien contre le CLIMAT • Ouragans ou inondations: l’été qui s’achève a sévèrement frappé les pays en développement et replace sur le devant de la scène l’enjeu de les soutenir face au changement climatique. Code du travail on nom est d’ores et déjà gravé dans FRANCE• Plus de 400’000 Sl’histoire: Irma, l’ouragan le plus intense personnes en France, et 60’000 dans qu’ont jamais connu les Caraïbes, a ravagé la région avec des vents de plus de 350 la capitale ont participé à une km/h. Le bilan est lourd. Irma s’achève ainsi comme une fenêtre ouverte sur un futur première journée de mobilisation. inquiétant, dans lequel les épisodes clima- tiques deviendront de plus en plus assassins, a journée de mobilisation a été qualifiée à raison notamment vis-à-vis des plus pauvres. Fata- L de «réussie» par Philippe Martinez, secrétaire lité? Non, quand des solutions d’adaptation général de la CGT. En début du cortège des 60’000 existent et que le nombre de victimes reflète manifestants parisiens, la section cadres et techniciens d’abord une inaction politique coupable. de la CGT a recouru au symbole, par un «lâcher de C’est une petite phrase qui a fait le tour du CDI» par ballons gonflables interposés. Une pancarte globe en l’espace de quelques heures et marqué fluorescente «en solde» autour du cou, et des ballons les esprits. «Je ne savais pas qu’un cyclone arri- «non au CDD jetable» à la main, ingénieurs et techni- vait. On ne reçoit pas l’électricité ici, donc on ciens voulaient dénoncer la casse sociale en marche que ne peut pas avoir d’informations». Alors les ordonnances Macron vont accélérer. Mais il est qu’Irma balayait les Caraïbes et semblait fon- Avant Irma,ouragan le plus intense qu’ont connu les Caraïbes, Harvey avait déjà dévasté le Texas. Lt. Zachary West encore temps d’arrêter ça, estime le syndicat CGT. «Le cer droit sur Haïti, Jacquie Pierre, habitant de cow-boy Macron nous ramène avec diligence au XIXe l’île, balançait à la face du monde - du moins bâtiments sont souvent construits sur un modèle versés chaque année par les pays industrialisés à siècle, ironise Daniel Guillemot, informaticien à la de monde occidental -, la réalité crue de son français. De façon générale, l’urbanisation ne tient ceux en développement. «Mais sur ces sommes, Mutuelle sociale agricole. On a vu dans mon secteur ce pays. Livrés à eux-mêmes face au pire ouragan compte ni des cyclones, ni de la force des pluies, 16% seulement sont consacrés à l’adaptation», que le contrat de projet a donné. C’est pire qu’un CDD qu’a connu la région, les Haïtiens n’avaient pas avec du bétonnage partout qui favorise les inon- reprend Armelle Le Comte, d’Oxfam. «A l’hori- et maintenant on veut le généraliser. Le salarié ne béné- même la possibilité de s’y préparer, faute d’ac- dations», affirme-t-elle, n’hésitant pas à dénoncer zon 2020, l’OCDE estime que cette part ne ficie plus de la prime de précarité, reçoit des indemni- cès aux infrastructures les plus élémentaires. une discrimination entre noirs et blancs. dépassera pas les 20%.» Le reste est destiné aux tés minimales et peut être viré du jour au lendemain.» Une chose est claire en matière de catas- L’enjeu de soutenir les pays les plus pauvres mesures dites d’atténuation, visant essentielle- trophes naturelles: «Qu’il s’agisse d’ouragan ou face aux effets du changement climatique traverse ment le développement des énergies propres. Déguisée en poubelle pour signifier son statut jetable séismes, le nombre de victimes est directement les débats internationaux depuis plusieurs années. Un déséquilibre notable qui trouve sa source Derrière des fonctionnaires et des infirmières arbo- lié au niveau de développement des régions», Il est même devenu un point central des négocia- chez les bailleurs eux-mêmes. «Une très large rant sur leur blouse un autocollant «Soignantes extré- explique Stéphane His, expert climat à l’AFD tions climatiques, qui se déroulent depuis près de partie de cet argent est versée sous forme de mistes, cyniquement fainéantes», en référence aux (Agence française de développement). 25 ans sous l’égide de l’ONU. «En 1997, quand le prêts et provient du secteur privé. Or celui-ci provocations verbales du président Macron, une protocole de Kyoto a été signé, on en parlait très attend des retours sur investissements, explique enseignante retraitée s’est déguisée en poubelle pour 1000 morts en Haïti contre 19 aux USA peu, reprend Stéphane His, de l’AFD. A l’époque, Armelle Le Comte. S’il est facile d’en espérer sur bien signifier son statut jetable. «Je suis là pour la Si la hausse des températures globales engendre on espérait encore pouvoir réduire suffisamment une centrale solaire, la construction d’infra- jeune génération qui subit la dégradation, assure partout une intensification des événements vite les émissions de gaz à effet de serre (GES), de structures urbaines ou de système d’alerte des Mimosa Ponsich. Pour ma génération, le travail était météorologiques, ceux-ci ne tuent pas au hasard. façon à empêcher la hausse des températures.» La populations sont des secteurs moins promet- fondamental, la reconnaissance importante. On veut Sur les plus de 3000 morts survenus depuis le désillusion s’imposera durant les années 2000. teurs», note-t-elle encore. nous individualiser en faisant primer les accords d’en- mois de juin, à peine 70 sont comptabilisées «Quand il est devenu évident que nous n’évite- Les prochaines sessions de discussions qui se treprise sur ceux de branche, diviser en instaurant le dans les pays industrialisés. L’Inde, le Bengla- rions pas une hausse des températures, il est du tiendront en décembre prochain à Bonn, en Alle- référendum, éviter la négociation avec le délégué syn- desh et le Népal en comptent à eux seuls plus de même coup devenu évident qu’il fallait consacrer magne, remettront le sujet sur le tapis. Avec cette dical. Mais je suis fille d’anarchiste espagnol, j’ai une 1500, le Sierra Léone plus de 500. En octobre des moyens pour s’y adapter». Reconnus comme difficulté en sus, venue s’ajouter au débat depuis trajectoire de résistance derrière moi. On m’a dia- dernier, l’ouragan Matthew déferlait d’une traite principaux responsables du réchauffement du fait la COP21: les Etats-Unis, qui avaient promis de gnostiqué un début de Parkinson, mais résister sur Haïti et les Etats-Unis. Bilan: 1000 morts de leurs taux d’émissions historiquement élevés, verser 3 milliards de dollars au Fonds vert pour le fabrique plus de dopamine que les médicaments!» pour la première, contre 19 aux USA. les pays industrialisés se voient, depuis, sommés climat d’ici 2019, se sont retirés de l’accord de Alors que les premiers gaz lacrymogènes sont lan- Cela vaut aussi pour la France, dont les popu- de mettre la main au portefeuille pour aider ceux Paris, après n’en avoir crédité qu’1 milliard. Alors cés peu avant la place d’Italie, certains manifestants lations d’Outre mer s’avèrent singulièrement vul- en développements, entre autres pour leur per- que la réalité du changement climatique les n’ont pas encore quitté la place de la Bastille. Comme nérables. Certes, ces territoires sont plus exposés mettre de faire face aux aléas climatiques. frappe sévèrement à leur tour, le congrès qui doit les dissidents de la CFDT métallurgie qui, contraire- aux ouragans. «Mais la politique d’abandon par se réunir à l’automne reviendra-t-il sur cette déci- ment au mot d’ordre confédéral, ont tenu à se dépla- l’Etat et le taux de pauvreté, parmi les plus élevés Des investissements influencés par le privé sion de ne pas participer à l’effort international ? cer, comme la fédération et plusieurs syndicats de France, finissent de fragiliser les habitants», En 2015, dans le cadre de la COP21 et de l’ac- Dans le cas contraire, démonstration est faite que l’avaient déjà fait contre la loi travail. estime Françoise Vergès, politologue, spécialiste cord de Paris sur le climat, les pays dits du nord leur argent manquera cruellement aux pays vul- des territoires d’outre-mer et titulaire de la chaire se sont engagés très officiellement à verser 100 nérables. n «Macron est né avec une cuillère en or dans la bouche» «Sud global» à la Maison des sciences de milliards de dollars par an pour soutenir ceux Marie-Noëlle Bertrand Derrière une bannière «Non aux licenciements bour- l’homme. Et de vilipender des plans d’aménage- dits du sud. Où en est-on deux ans plus tard? Paru dans L’Humanité siers», une soixantaine d’ouvriers de Semperit, entre- ment qui fleurent bon, le post-colonialisme. «Les Près de 60 milliards de dollars sont aujourd’hui Texte adapté par la réd. prise de fabrication de tapis roulants pour les mines, exigent toujours l’arrêt du projet de délocalisation de leur usine d’Argenteuil (Val-d’Oise). «95 % des effec- tifs sont dans la rue, ça fait du bien au moral, sourit Omar Qanboue, délégué du personnel CGT. On refuse de perdre notre savoir-faire, notre CDI et notre bleu de travail.» Les dernières saillies méprisa ntes d’Emmanuel Macron sur les fainéants lui restent aussi en travers de la gorge: «On se lève à 5 heures du matin, on gagne notre pain alors que lui est né avec une cuillère en or dans la bouche.» A Pôle emploi, les agents redoutent d’accueillir les futurs naufragés de la flexibilisation des contrats de travail de la loi travail XXL. «On voit déjà beaucoup de chômeurs arriver à Pôle emploi pour des fins de CDD et on n’arrive pas toujours à faire face, déplore Christine Brou, secrétaire de la FSU Île-de-France. Nous n’avons plus d’écouter les gens. A Pôle emploi de Livry-Gargan, où je travaille, les arrêts pour longue maladie ont explosé de 300%.» Partout, la contestation contre la suppression et le non-renouvellement de centaines de milliers de contrats aidés se structure. Le syndicat Asso, affilié à Solidaires, avait posé son stand à l’entrée du pont d’Aus- terlitz. «Les associations sont le troisième employeur de France, mais comptent aussi le plus de précarité, précise Florence, porte-parole du syndicat. Nous préférons être des morts-vivants en contrats aidés que morts tout courts. Il faut continuer à se fédérer, à gagner en visibi- lité, même les directeurs d’associations rejoignente l combat.» Confirmant l’opposition quasi unanime au projet de société d’Emmanuel Macron. n Kareen Janselme et Cécile Rousseau Paru dans L’Humanité Texte adapté par la réd. N° 37 • 15 SEPTEMBRE 2017 CULTURE • 7

Cézanne, précurseur de l’art contemporain EXPOSITION• La fondation Gianadda offre un panorama complet de l’oeuvre du «maître d’Aix», présenté à la fois comme héritier de ceux qui furent ses maîtres, comme artiste profondément original et comme précurseur de l’art contemporain du 20ème siècle.

u cours de ses quelque qua- jamais «la réalité», mais une recréa- A rante ans d’existence, la Fonda- tion de celle-ci. C.-F. Ramuz, alors à tion Gianadda a proposé un Paris, l’écrivait déjà en 1908: large cycle dédié à l’impressionnisme «Cézanne ne copie pas, il transpose». et aux peintres proches de celui-ci: L’artiste fut aussi un maître de la Degas, Manet, Gauguin, Van Gogh, nature morte. Zola lui apporta une Berthe Morisot, Monet, Renoir... Elle fois un panier de pommes. Cézanne clôt ce parcours avec Paul Cézanne allait en tirer une série de petites (1839-1906). Celui-ci fut-il vraiment huiles, où les fruits sont accompagnés un impressionniste? On y reviendra. de verres, pots de céramique, vase de Cette exposition est exceptionnelle fleurs, bouteilles et autres objets. Au à plus d’un titre. D’abord par la qua- contraire des peintres hollandais du lité des œuvres accrochées. Ensuite 17e siècle ou de Chardin au 18e, qui parce que celles-ci – grâce au réseau s’ingéniaient à donner l’illusion de la relationnel établi depuis des décen- matière même du fruit, de sa texture, nies par Léonard Gianadda – pro- et presque de sa senteur, Cézanne viennent de musées prestigieux de s’intéresse davantage à la forme, qu’il Paris, New York, Moscou ou encore schématise de plus en plus. «Toute la Tokyo, mais aussi de collections pri- nature par le cylindre, la sphère, le vées dont elles ne sont parfois jamais cône», écrit-il en 1904. Par ces propos sorties. Enfin et surtout parce que comme par ses œuvres, il annonce cette présentation à la fois chronolo- clairement le cubisme. gique et thématique propose un Un dernier volet de son œuvre panorama complet des divers aspects présent dans l’exposition, ce sont les de l’œuvre de Cézanne. portraits (auxquels une autre exposi- tion est actuellement consacrée à Une amitié interrompue avec Zola Paris, au Musée d’Orsay) et les corps On commence avec les années d’ap- humains. Il va plutôt chercher ses prentissage (1860-1870), méconnues modèles chez les gens simples: un et dont les travaux sont trop rarement ouvrier, un jardinier, un paysan. Il montrés. Passons sur les études aca- représente à de nombreuses reprises démiques assez convenues. Les pre- sa jeune épouse Hortense. Sans mières huiles, faites d’une pâte Cézanne fut notamment un maître de la nature morte. Ici, «Bouteille de liqueur»,vers 1890 (Huile sur toile). Pola Museum of Art compter quelques admirables auto- épaisse, sont sombres: elles rappellent portraits. Dès les années 1870, il les tableaux de Courbet (par exemple «Arriverai-je au but tant recherché si grand marcheur: plusieurs photos le fication des formes, au pré-cubisme. peint des nus audacieux. Ses nom- dans Rochers) ou les premières toiles longtemps poursuivi?» écrit-il dans montrent en route vers un lieu où il Sans rompre avec eux, il s’éloignera breuses Baigneuses et Baigneurs, dont peintes en Hollande, à caractère une lettre. Mais il savait être aussi un va peindre en pleine nature, son donc du groupe des impressionnistes. Martigny présente un beau florilège, social, de Van Gogh. homme sociable. Il partagea avec barda sur le dos. Un tableau d’un expriment le mouvement et la liberté. Depuis le collège, Paul Cézanne est Monet une grande estime mutuelle et intérêt exceptionnel, judicieusement Les paysages de la maturité Ils inspireront fortement Matisse. très lié avec son condisciple, l’écrivain fut invité à Giverny. Il était lié à retenu pour l’affiche de l’exposition: Ce qui nous amène aux paysages de la Cette exposition remarquable a Emile Zola. Cette amitié prendra fin Renoir par une profonde amitié. Plu- Montagnes en Provence – Le Barrage maturité (1890-1906). Là, c’est une donc le mérite de nous présenter en 1886, avec la publication de sieurs impressionnistes lui achetèrent de François Zola (ingénieur et père de succession de chefs-d'œuvre, dont Paul Cézanne à la fois comme héri- L’Œuvre, parce que l’artiste s’est des tableaux. Quant à Matisse et l’écrivain). Ici, Cézanne est déjà plei- deux représentations très attendues tier de ceux qui furent ses maîtres, reconnu dans le personnage de Picasso, ils le reconnaîtront comme nement lui-même, et on reconnaît de La montagne Sainte-Victoire. Des comme artiste profondément origi- Claude Lantier, le peintre du roman, leur maître. immédiatement sa «patte». A la spécialistes y ont décelé l’influence du nal et à ce titre justement tenu pour présenté comme un personnage irré- Puis c’est la rencontre avec Camille volonté des impressionnistes de saisir japonisme alors très en vogue. La un génie, et comme précurseur de solu, toujours mécontent de son tra- Pissarro, que les impressionnistes un moment précis se substitue celle montagne près d’Aix que Cézanne a l’art contemporain du 20e siècle. A vail, qui n’achève jamais son grand considèrent comme leur aîné. Et le de faire quelque chose de durable et rendue célèbre serait une transposi- voir absolument! n tableau et finit par se suicider. A ce choc de la lumière, de la couleur. Sa quasi éternel. Et l’artiste procède déjà tion du Mont Fuji dans les esta mpes Pierre Jeanneret propos, dissipons un mythe, celui du palette s’éclaire. Cette période impres- par ces hachures (notamment dans sa d’Hokusai. Par ailleurs, des géo- Cézanne solitaire, voire misanthrope. sionniste va durer de 1873 à 1885. Ce représentation des arbres) si caracté- graphes se sont penchés sur les 87 «Cézanne. Le chant de la terre», Martigny, Fondation Pierre Gianadda, jusqu’au 19 Ce n’est qu’en partie vrai. Certes, sa sont surtout des paysages aux verts ristiques de sa manière de peindre. tableaux de Cézanne consacrés à la novembre. Signalons une exposition paral- personnalité était complexe, et ses intenses, avec souvent un chemin qui On y perçoit aussi le début de cette montagne Sainte-Victoire. Ils ont lèle de photographies d’artistes et écrivains exigences envers lui-même très fortes: file vers le lointain. Cézanne était un évolution qui l’amènera, par la simpli- constaté que celles-ci ne montrent par Henri Cartier-Bresson. Montreux propose ses sculptures sur fond de lac et de montagnes EXPOSITION• Longer le quai de Montreux est déjà un ravissement en soi, avec ses paysages de carte postale, ses massifs de fleurs, ses palmiers et bananiers, ses vues sur le lac parcouru par les bateaux à vapeur de la CGN, et de l’autre côté de celui-ci les montagnes de Savoie...

ais un plaisir nouveau – et tout aussi gra- l’allusion à la disparition progressive des ressources M tuit – vient s’y ajouter, et cela jusqu’à fin de la planète ou à la pollution: le Français Emeric octobre. C’est la Biennale de sculptures en Jacob a composé sa Créature du lac Léman avec des plein air, dont la première édition a eu lieu en 2008. objets hétéroclites récupérés dans ce plan d’eau hélas Deux prix seront décernés à l’issue de la manifesta- trop souillé. D’autres ont une valeur symbolique : tion: celui du public et celui du jury. L’œuvre cou- ainsi le cercle fondamental, fait d’une belle pierre ronnée par le second sera acquise par la ville et non polie, signifiant «La Genèse» en hébreu, de For- exposée de façon permanente. tunée Szpiro Dagmy (USA). D’autres encore tou- Nous avons été surpris par la qualité des œuvres chent au fantastique, telles Black Bird, composé de présentées, provenant de nombreux pays. Elles ont plaques soudées, de la Française Caroline Brisset, ou en commun leurs dimensions importantes, impo- L’Echappée du Lac de Nathalie Masset (Suisse), un sées par le règlement du concours, afin d’être bien être mi-femme mi-poisson. On trouve aussi des visibles. Certes, toutes n’ont pas le volume spectacu- œuvres réalistes, voire hyper-réalistes, comme Les laire de l’éléphant de Dominique Andreae (Suisse), amoureux serrés l’un contre l’autre sur un banc, de fait de tubes d’acier, avec ses 4 tonnes, ses 15 mètres l’artiste belge Margaret Michel, ou encore les Vénus de long et 12 m. de haut! D’autres matériaux sont vagabondes peintes en bleu du Français Gérard présents: la pierre, le bronze et le cuivre, les matières Cazé, influencées par les personnages obèses de plastiques, le bois, et même des objets de récupéra- Botero et les figures féminines de Nicky de Saint- tion, telles les bonbonnes de titane composant Love Phalle, la compagne de Tinguely. Nous avons été is all du Français Michel Laurent. Tous ces travaux particulièrement séduit par le banc de poissons de ont en commun d’être mis en valeur par le fond métal s’élevant vers le ciel du Studio C & C (Italie). naturel admirable rappelé plus haut. Mais finalement, à chacun-e de décider quelles Mentionnons quelques tendances. Certaines sculptures lui plaisent le plus! n œuvres sont porteuses d’un «message», par exemple Pierre Jeanneret Emeric Jacob, a composé sa «Créature du lac Léman» avec des objets hétéroclites récupérés dans le lac Léman. PJeanneret N° 37 • 15 SEPTEMBRE 2017 CULTURE • 8 Retour en images sur l’archipel des séismes PHOTOGRAPHIE• Carlos Ayesta et Guillaume Bression ont arpenté la zone d’exclusion autour de Fukushima, un désastre toujours actuel aux nombreux visages et paysages. Exposé jusqu’au 24 septembre à Arles, leur travail fait également l’objet d’un livre.

a catastrophe de la centrale L nucléaire de Fukushima-Daiichi du 11 mars 2011 aurait déjà chassé environ 200’000 personnes de la région du Tohoku. Les photographes Carlos Ayesta et Guillaume Bression évoquent eux, la situation compliquée de «120’000 à 160’000 déplacés», éva- cués dans des circonstances bien plus abruptes que lors de l’accident de Tchernobyl. Sans juger, ils tiennent à rappeler, en interview, les étapes de la tragédie. Ainsi un tremblement de terre de magnitude 9 et le tsunami avec ses vagues de trente mètres de haut qui a tué plus de 20’000 personnes. La déso- lation et la pollution nucléaire encore en cours touchent les générations pré- sentes et celles à venir. Au cœur du no man’s land de 1000 kilomètres carrés entourant la centrale de Fukushima (littéralement «l’Île du bonheur»), les photographes ont tenté de mettre au jour, notamment sous des flashs de studio, «la trace la plus brutale et la plus visible de l’accident nucléaire», dans leur reportage (qui est aussi un ouvrage Fukushima, zone d’exclusion (2011-2016)), couronné par le Prix Découvertes des Ren- contres arlésiennes de la photogra- phie. On peut le compléter notam- ment par le documentaire visible sur le net, Fukushima, les voix silencieuses réalisé par Chiho Sato et Lucas Rue. Ce dernier donne la parole aux locaux Un magasin de musique à Namie, à 7 km de la centrale, pillé dans les jours suivants la catastrophe. C.Ayesta et G.Bression vivant dans la zone d’évacuation volontaire de Fukushima (dans un vée», souligne Carlos Ayesta. Il y a 21’000 habitants, est passée par le stade pratiquent avec une incroyable liberté zone». Le taux de retour serait d’envi- rayon de 60 km autour de la centrale). aussi les natures mortes avec denrées de cité fantôme et souffre toujours de les possibles de la photographie dans ron 10% parmi les habitants. Témoignant du séisme, un habitant y sous cellophane, reliques issues d’une pollution nucléaire, malgré une décon- son rapport interprétatif au réel.» Evoquant l’univers du cinéaste japo- déclare: «Lorsque cette terre fait dis- supérette abandonnée. tamination inégale et sujette à caution. nais Kiyoshi Kurosawa, ses plans paraître tous les repères que nous Côté mise en scène pour réactiver la Les autorités ont pourtant décidé de la Retours problématiques contemplatifs et d’apparitions fantoma- connaissons, l’humain en perd sa sta- mémoire ou l’oubli de vies brisées, le rouvrir partiellement cette année. Six ans après le désastre, le gouverne- tiques à l’inquiétante étrangeté, des bilité psychologique.» tandem s’est rendu avec d’ex-habitants Au gré du chapitre intitulé «25 mil- ment japonais estime donc qu’un cer- images nous immergent en forêts, dans leurs lieux familiers dévastés, lions de mètres cubes», l’œil découvre tain nombre de villages et villes sinis- considérées par les Japonais comme Approche plurielle recueillant leurs témoignages au fil les déchets radioactifs disséminés en trés sont désormais habitables, sou- espaces sacrés et lieux de nombreux La réalisation photo multiplie les d’un récit choral commentant les de vastes zones de stockage qui ne vent partiellement. Des associations esprits. Alors qu’une jeune femme approches. Un volet documentaire images. Ainsi, assis devant sa machine semblent pas à l’abri des intempéries. anti-nucléaires qualifient, elles, cette contemple l’invisible d’une menace qui opte pour une forme de «neutralité désertée, le vieux Honoka Kurabeishi Des sacs noirs empilés, ou excrois- politique d’incitation au retour de rôde, les photographes ont barré le pay- opérationnelle» cadrant des bâti- explique: «Même si je décidais de sances contenant la terre contaminée «criminelle». Elles dénoncent les sage de larges bandes de films plas- ments de nuit qui rappelle les toiles reprendre le travail à l’usine, il n’y dans un décor évoquant les paysages déplacements forcés de sinistrés, les tiques matérialisant les incertaines et d’Edward Hopper hantées par la soli- aurait plus d’activité ici dans mon apocalyptiques du film Stalker signé seuils d’alerte manipulés et le secret- controversées limites entre zones conta- tude. On compte aussi des paysages domaine. Il serait donc vain de reve- Andreï Tarkovski. Le commissaire de défense opposé à toute investigation minées et aires supposées viables. n d’une nature froide où la végétation nir.» Les années passant, Keiko Suzuki l’exposition Christian Caujolle écrit: indépendante sur le long terme. Pour Christophe Pequiot prolifère. La première image réalisée? a décidé «qu’il était temps de passer à «En jouant tour à tour du constat – le tandem Bression-Ayesta, «ceux qui «Une voiture violemment déportée autre chose, car la ville ne sera plus une nature exubérante –, de la mise en avaient des logements gratuits jusqu’à Rencontres de la photo, Arles. Jusqu’au 24 septembre. Retracing our steps. Fukushima par le tsunami dans la gare de jamais la même, tout le monde est en scène – le retour des personnages sur maintenant n’y auront plus droit et exclusion zone – 2011-2016 (fr-angl-japn), Tomoyoka. D’année en année, d’un train de racheter des maisons ailleurs.» leurs anciens lieux de vie –, de la fic- leurs indemnisations vont être arrê- Ed. Kehrer Verlang. Rens. : www.fuku- séjour à l’autre, elle n’a pas été enle- Leur Namie natale, qui comptait tion ou du réalisme, les deux auteurs tées un an après la réouverture de la shima-nogozone.com

AGENDA CULTUREL ET MILITANT Les Editions Samizdat, les Editions des Sables et les Editions Eliane Vernay fêtent leurs anniversaires (25, 30 et 40 ans) Samedi 16 septembre de 10h30 à 16h à la Villa Dutoit, chemin Gilbert-Trolliet 5, au Petit-Saconnex (Genève) 10h30-11h45: lectures d’auteur-e-s des trois maisons, interventions musicales par le quatuor vocal «Musance», chants du 16e siècle. 11h30-12h30: vente aux enchères: livres de tête ; originaux de couvertures et illustrations, etc. dont le poème « le dire au subjonctif imparfait », lu les 13, 20 et 27 mai au cimetière des Rois, devant la tombe de Grisélidis Réal, avec une petite culotte d’Huguette. 14-15h: buffet offert par les éditrices. Il y aura à boire, à manger, à échanger. Conférences d’Aleida Guevara, fille du Che Lundi 18 septembre à 18h, Auditoire Erna Hamburger, Université de Lausanne Mardi 19 septembre à 18h, Cinéma Rex, Bvd Perolles 5, Fribourg A Lausanne, Aleida Guevara évoquera une «Approche globale et féministe de la santé à Cuba». La conférence de Fribourg a pour thème «Le Che, Cuba et la jeunesse de 2017» Festival ALTERNATIBA Le 16 septembre au parc des Cropettes, Genève. Le réseau Alternatiba Léman se mobilisera pour une 3ème édition dans le but de renfo rcer le mouvement pour la justice climatique en montrant que les solutions locales existent.