Extrait du site www.concours-eurovision.fr

Mon Cinéma Sans Image, le nouveau projet d’Anne- Marie David

18 SEPTEMBRE 2015 / NO COMMENTS

Les 21 et 22 septembre 2015, ont eu lieu à Paris, à l’Alliance Française, deux représentations de Mon Cinéma Sans Image, un nouveau spectacle, dont le concept est de plonger le public dans le noir total d’une salle de cinéma, et dans une histoire, qui, dans une ambiance sonore mêlant voix, musique et bruitages, permet à chaque spectateur de solliciter son imagination pour créer sa propre œuvre cinématographique. A la manœuvre, il y a un duo inédit : Jean Musy et Anne-Marie David.

Jean Musy est un musicien, compositeur et arrangeur de chansons et de musiques de films. Il a enregistré plus d’un millier de 45 tours et 150 albums, et composé près de 200 musiques de films et séries TV et de nombreuses chansons. Il a travaillé avec les plus grands noms de la chanson Française, de à Barbara, en passant par Yves Duteil, Gilbert Bécaud, Dalida ou Joe Dassin. Dans la longue liste de ses collaborations on trouve aussi des artistes liés au petit monde de l’Eurovision comme ( 1962 et 1968), (France 1969), Jeane Manson (Luxembourg 1979), (France 1975) et Noëlle Cordier (France 1967). Quant à Anne-Marie David, lauréate du concours Eurovision en 1973 pour le Luxembourg, et représentante de la France en 1979, on ne la présente plus.

Directrice de Production de l’évènement, Anne-Marie David a accueilli le public présent, un peu moins de 200 personnes, pour leur présenter l’évènement. Puis la salle est plongée dans le noir. Deux films sonores ont été diffusés. D’abord Un mariage à Lyon, d’après une nouvelle de Stefan Zweig, le 21 septembre. Ensuite Louis Braille, l’enfant lumière, écrit par Anne-Marie David, le 22 septembre, qui raconte la vie, un peu romancée, de celui qui a inventé au 19ème siècle l’alphabet qui porte son nom. Jean Musy a composé les musiques. C’est à ce second spectacle que nous avons assisté et ainsi découvert la vie passionnante de Louis Braille, né à Coupvray en 1809, devenu aveugle à trois ans, et qui, alors qu’il n’était qu’un adolescent, a imaginé ce système d’écriture tactile à points saillants, à l’usage des personnes aveugles ou fortement malvoyantes qui depuis porte son nom et qui est utilisé dans le monde entier. Il est mort à Paris en 1852. En 2009 pour célébrer les 200 ans de sa naissance, de nombreuses manifestations ont eu lieu dans le monde entier, comme aux Etats-Unis, en Italie et en Belgique où des pièces ont été frappées à son effigie.

Afin que les voyants s’imprègnent de l’histoire, comme les non-voyants, un masque a été donné à tous les spectateurs, parce qu’il y a des personnes qui ont du mal à s’isoler nous dit Anne-Marie, ajoutant il faut un peu de temps pour arriver de l’extérieur, s’assoir dans un fauteuil et retrouver son équilibre et grâce à ma maman qui a fabriqué les 400 masques de repos, chaque personne a pu se mettre en isolement, ce qui contribue à ce que les spectateurs rentrent dans les films au fur et à mesure. Plongé dans le noir, on est peu à peu pris par l’histoire.

La musique y est pour beaucoup, mais surtout c’est la voix de Jean Musy qui porte ce film sans image. Une voix douce et presque envoutante. Le film Louis Braille, l’enfant lumière est particulièrement poignant, et quand il se termine et que la lumière revient, c’est une Anne-Marie David très émue qui reprend la parole et qui parle de son projet. On a retrouvé Anne-Marie comme on l’aime, pétillante et passionnée. Elle défend ce projet avec enthousiasme. Elle s’est investie dans l’écriture du film avec ardeur, ne prétendant pas faire œuvre d’historienne ou d’auteur, mais voulant faire entendre l’enfant, l’adolescent, au milieu de cette vie qui a priori aurait dû le détruire et qui finalement l’a construit pour l’amener à se dépenser sans compter, dépasser ses limites et offrir aux personnes aveugles la possibilité de savoir et de lire. Elle remercia aussi chaleureusement Jean Musy, qui a donné du lyrisme et de la profondeur, bref la vie, à ce petit garçon.

Parmi les invités les réactions sont très favorables. Ségolène Neuville, Secrétaire d’État chargée des Personnes handicapées et de la Lutte contre l’exclusion, était présente et a déclaré avoir fait un voyage comme quand on va voir un bon film, et que cette expérience, très sensorielle, finalement lui semble assez naturelle. Bref elle se dit prête à retenter l’expérience. Serge Moati, célèbre journaliste et réalisateur français, dit avoir vécu un moment très fort, car ce n’est pas seulement un film, mais c’est surtout un bon film qu’il a imaginé dans sa tête et qu’il voyait Louis Braille, bercé par la voix de Jean Musy, une voix de poète. Je ne savais pas qu’on pouvait pleurer sous un bandeau avoua-t-il très ému, ajoutant Une barrière a été franchie entre mon monde à moi et celui des non-voyants. Beaucoup d’émotion aussi pour Vincent Michel, président de la Fédération des Aveugles de France, qui en profita pour rappeler que les aveugles continuent d’être exclus de la société et continuent de subir des discriminations notamment à l’ère du numérique. Ainsi le budget qui permettrait le financement des projets permettant aux aveugles de France d’avoir accès à internet ne serait même pas le budget du PSG, ni même le salaire de Zlatan. Enfin, Chantal Rubio, Présidente de l’association Pourquoi Pas Moi, nous a raconté le jour elle a vu débouler Anne-Marie David dans son bureau, et comment le dynamisme et la volonté d’Anne-Marie l’ont convaincue de participer à l’aventure, persuadée du bien-fondé du concept de Mon Cinéma Sans Image.

Dans un court entretien Anne-Marie David nous a confié qu’il y a eu un avant, il y aura un après, et il y aura une vraie suite, parce que tous les partenaires du projet sont prêts à nous aider, et à faire découvrir ce cinéma très particulier, ce cinéma des non- voyants qui nous invitent dans leur cinéma, et non plus l’inverse. Ce n’est qu’un début.

Plusieurs dates sont annoncées. Troyes, le 5 novembre, et le même mois le festival du cinéma d’Aubenas, puis Saint-Priest en janvier, et le festival de Luchon en février. Ce que je veux, dit Anne-Marie, c’est que les gens me contactent et me disent qu’ils veulent tenter l’expérience avec nous. Mais surtout Anne-Marie souhaite que ce soit un cinéma mixte, avec des voyants et des non-voyants, parce que l’expérience et l’échange sont bien plus forts lorsque les deux formes de vision se confrontent, mais dans le partage. La force du cinéma sans image s’est de savoir comment votre voisin non voyant a vu le film ajoute-t-elle. Il y a cette notion, on est tous quelque part un jour un handicapé de quelque chose, les non-voyants avec notre cinéma à nous gens ordinaires, voyants, et nous les gens ordinaires quand nous devenons handicapés dans le cinéma des personnes non-voyantes conclut-elle.