HISTOIRE 1re L’école sous

> PAR ANNE ANGLÈS, PROFESSEURE D’HISTOIRE-GÉOGRAPHIE SÉQUENCE PÉDAGOGIQUE 2

Place dans les programmes autre idéal : Instinct, Sélection, Tradition (Jean-Michel Barreau). Les programmes du collège et du lycée font une large place Explorée depuis peu, l’entreprise d’idéologisation de l’école à l’étude du régime de Vichy et de l’année 1940. primaire et d’embrigadement des écoliers entre 1940 et En 3e, un thème du programme de 2008 explore l’« effon- 1944 commence à être mieux connue grâce aux travaux de drement et [les] refondations républicaines ». Rémy Handourtzel, Jean-Michel Barreau et Michèle Cointet. En 1re S, « la de l’armistice à la Libération » et en 1res L et ES « la France dans la Seconde Guerre mondiale » Aborder Vichy par l’école primaire permet de montrer sont abordées en fin d’année. En 1re STG, « l’année 1940 » est concrètement comment une idéologie réactionnaire et 38 un objet d’étude (programme de 2005). antirépublicaine entend façonner une jeunesse nou- velle. Les buts étant posés, on peut examiner les moyens qu’utilise le pouvoir pour parvenir à ses fins. Les raisons de l’échec de Vichy sont à lire dans le déni du réel propre au

TDC N° 986 régime, mais s’explique aussi par l’enracinement des valeurs • Objectifs et démarche humanistes et patriotiques transmises par l’école de la IIIe République dans la société civile et dans le monde des Avec 8 millions de Français sur les routes de l’exode, enseignants. De ce fait les notions travaillées lors de l’étude du 1,85 million de prisonniers de guerre, 92 000 soldats tués en thème consacré à la mise en place de l’école primaire, laïque, cinq semaines de combats, des frais d’occupation exorbitants, gratuite et obligatoire peuvent être réactivées. un territoire morcelé, Philippe Pétain et son gouvernement ont

L’ÉCOLE EN FRANCE fort à faire durant l’été 1940. Pourtant, deux mois après la Les documents proposés ont divers statuts. On ne saurait signature de l’armistice, un mois après les actes constitution- tous les mobiliser : un choix sera fait en fonction du niveau. Les nels qui légitiment son autorité, Pétain annonce… une réforme DOCS H et I réintroduisent le réel face à un discours officiel de l’école. Pourquoi une telle priorité? D’abord parce que pour qui le nie. Le DOC C permet de retravailler les procédés de la le cercle des idéologues qui entourent le chef de l’État, l’école, propagande tout en isolant les valeurs spécifiques célébrées c’est la république, et la république, c’est la « gueuse ». Ensuite par le régime de Vichy. Les DOCS A et E supposent une expli- parce qu’il faut proposer un bouc émissaire à des Français cation critique rigoureuse. Le DOC G a un double intérêt : inté- « sonnés » par l’ampleur de la débâcle et de la pagaille consé- grer le projet scolaire de Vichy dans le temps long et examiner cutive. Enfin parce que dans les milieux universitaires, dans les réactions de l’opinion ainsi que leur évolution. Il peut servir les cercles intellectuels, dans l’Église de France, dans les milieux de contrepoint au discours officiel, de même que le DOC J . syndicaux, dans l’armée, des responsables, gagnés aux idées C’est en confrontant le discours officiel (DOCS A àE ), la réalité de l’Action française, sont sincèrement convaincus que « nous vécue (DOCS H et I ) et les réactions suscitées dans l’opinion avons été battus parce que nous sommes coupables » (Michèle (DOCS G et J ) que l’élève pourra comprendre les raisons de Cointet). Déjà en 1934, Pétain, alors aspirant au poste de ministre l’échec de l’entreprise d’idéologisation scolaire de Vichy. de l’Éducation nationale, l’avait affirmé : « Avant de se jouer sur un champ de bataille, les destinées d’un peuple s’élaborent sur les bancs de la classe et de l’amphithéâtre. » La défaite SAVOIR légitime le combat mené dans l’entre-deux-guerres pour en ● AZÉMA Jean-Pierre, WIEVIORKA Olivier. Vichy 1940-1944. Paris : finir avec la loi de séparation et les erreurs de l’enseignement Perrin, 1998. républicain. C’est donc bien sur le terrain de l’idéologie que ● BARREAU Jean-Michel. Vichy contre l’école de la République : se situent Pétain et les hommes de Vichy. Parce qu’ils croient théoriciens et théories scolaires de la révolution nationale. Paris : les instituteurs gangrenés par le communisme, le pacifisme et Flammarion, 2001. ● COINTET Michèle. L’Église sous Vichy : la repentance en question, l’internationalisme, parce que, selon eux, l’école de la 1940-1945. Paris : Perrin, 1998. République a failli dans sa mission, il faut tout changer.Au trip- ● HANDOURTZEL Rémy. Vichy et l’école 1940-1944. Saint-Amand : tyque républicain Liberté, Égalité, Fraternité est substitué un Noêsis, 1997.

TDC N° 986L’ÉCOLE EN FRANCE 39 • ROGER-VIOLLET © ,août 1940. 15 Revue des Deux Mondes

FRANÇAIS, qui s’imposent au Gouvernement, les tâches Parmi de l’éducation est pas de plus importante que la réforme il n’en de la personne humaine,avec le respect de demain enseignera française L’école la famille, la société, patrie. la Elle le français, comme par le passé […] à enseigner continuera primaire L’école les éléments des mathématiques, de des hommes ayant Français de tous les que le but de l’éducation est de faire de vue Nous ne devons jamais perdre primaireL’école encyclopédique de l’homme abstrait, à l’idéal ainsi conçue […] substituera conçu par des citadins Mes chers amis, on vous a parlé souvent depuis quelques années de l’École unique. unique, L’École c’était un mensonge DOCUMENTS Périgny (), octobre 1941. Article de Philippe Pétain dans la Article de Philippe Pétain ● ● nationale. système éducatif une illusion profonde Il y avait à la base de notre : les suffit d’instruire qu’il croire c’était de les caractères.les cœurs et pour tremper esprits pour former public, enseignement notre de erreur grave […] Une autre d’individualisme.c’est qu’il était une école […] plus à la neutralité.ne prétendra nationale avant tout, sera française […] L’école n’ont pas de plus que les Français parce […]. haut intérêt commun que celui de la France l’histoire, de la géographie, simplifiés, mais selon des programmes encyclopédique et théorique dépouillés du caractère qui les détournait de leur objet véritable. contre, Par manuels dont faite aux travaux y sera une place beaucoup plus large la valeur éducative est trop souvent méconnue. se pénètrent primaire enseignement de notre que les maîtres Il faudra de cette idée – élèves leurs et sachent en pénétrer et pas moins profitable, – qu’il n’est pas moins noble même pour l’esprit, de manier l’outil que de tenir la plume, à fond un métier, et de connaître toutes choses des clar- que d’avoir sur tés superficielles. […] et l’amour de l’effort.le goût du travail […] Restituer dans toute leur plénitude ces vertus d’homme, c’est l’immense pro- blème qui se pose à nous. jeunesse sportive répond à une partie de ce problème. La formation d’une Les projets actuels santé, française à la race de la Jeunesse visent à rendre du ministre courage, discipline. […] et pour des citadins, l’idéal beaucoup plus large, de l’homme appuyé sur un sol et sur un métier beaucoup plus humain déterminés. un sentiment nouveau de leur dignité. aux paysans Elle donnera […] parmi beaucoup d’autres, c’était, d’unité, sous couleur une école de division,lutte sociale, de de destruction nationale. Philippe Pétain maître d’école Philippe Pétain maître d’école Réformer l’école primaireRéformer l’école : catégorique un impératif >> B A 40 L’ÉCOLE EN FRANCE• TDC N° 986 SÉQUENCESÉQUENCE PÉDAGOGIQUE PÉDAGOGIQUE 2 2 C D Des concourspourmobiliserlesécoliers Hommage autalentinstinctifdesécoliersdeFrance ©DR u mgntosd .Cceu u éutosd .Fede e uraits quiveulentfaire participerl’enfanceà Freud etdessurréalistes, auxdéductionsdeM. Cocteau, aux imaginationsdeM. […]Cetterestriction estexcellentepourlajeunesse. pauvreté despalettes. quel’on àl’extrêmesoinquiestapporté C’estàlaminutiedesdétails, mais ellenetientpastoujoursenprofondeur. nombre […] ellelaprendra dansl’Europefuture. ; tiques n’apaslaplacequiluirevient danslemonde uq’uce,dpi e esn e isd ier uq’ exdsjue aoad,[…]unmondeentier estrecréé. depuis les dessinsdesfilsdemineurs jusqu’àceuxdesjeunesSavoyards, jusqu’au ciel, laplusricheenespritetlendemain. ment enraciné etquelatransposition estlaplusnoble, C’estdanslasolitude[…]etparminature quel’artdetradition populaire estleplussolide- gnent l’artdesprimitifs. ilsontdesimpressions plusoriginalesetrejoi- ; lesjeunespaysans restent imprégnésdeleurs rêves mauvais exemples, […] que fraîcheur. jen’aitrouvé Devantcestémoignagesinstinctifsoùla fantaisiesedonnelibre cours, leurs obsessionsintellectuelles. ce faittromperarement. ; reconnaît lesvrais tempéraments d’artisteschezlesjeunes aupublicuneidéedecetteféerie. niserons àParis donnera l’expositionquenousenorga- : onm’aconfiélesoindelestrieràl’HôtelduParc […]Cesdessins, images ànotre chef. des parents quiveulentimposeràleursenfantsleurvisionfroidedumonde. àl’influence onestdéçuparce quel’onseheurteàune sortedeprostitutiondesyeux, dans lesmilieuxdebourgeoisie, ● ● fih ’li an-gn dteàLo,otbe14.Archivesdépartementalesdel’Indre. octobre1940. éditéeàLyon, Affiche d’AlainSaint-Ogan, er ’mrvle uéd ocus«L old aéhl», LeNoëlduMaréchal juréduconcours« Henri d’Amfreville, ’iasicntt ’bec etu etmn obd.L’extrême pureté del’inspiration enfantineestundémenti J’ai aussiconstatél’absencedetoutsentimentmorbide. J’ai d’abord constatéaprès avoirfaitmonchoixquelesfillesavaientdesdessinsattrayants enplusgrand pè ntlrsebeetatu umrca,aprèsavoirparcouru touslespaysagesdelaFrance dutréfonds Après untelrassemblement autourdumaréchal, Loindesdevantures etdes aisémentlesœuvres desécoliersvillesdeceuxcampagnes. […] Enfinonsépare Dès On distinguetoutdesuitelesdessinsdes«filsfamille» ceuxdesjeunespopulaires. n’ontd’autre causequela quelquefoisfulgurantes, Il fautaussiremarquer que d’ordinaire lesaudacesdecouleurs, rsd exmlin d eisFaçi] âgésde8à14 Près dedeuxmillions[depetitsFrançais], u e açn.Ctesproié letva,netsuetq’paet.Ellerepose surdeseffetsdecouleurs, n’estsouventqu’apparente. ilestvrai, Cettesupériorité, que lesgarçons. letéietqel rnedn edmiedesartsplas- Il estévidentquelaFrance dansledomaine n,ot pourlaseulezonelibr ont, ans, L’Illustration 3-10janvier1942. , ,écritouadressé leurs e, […] quel’onpénètre E Maréchal, nous voilà F La révision des manuels scolaires ● André Montagnard et Charles Courtioux, 1941. ● Caricature de Cep parue dans La Semaine, hebdomadaire illustré,no 9, 12 septembre 1940. Une flamme sacrée En nous donnant ta vie, Monte du sol natal Ton génie et ta foi, Et la France enivrée Tu sauves la patrie Te salue, maréchal ! Une seconde fois : Tous tes enfants qui t’aiment Et vénèrent tes ans Quand ta voix nous répète À ton appel suprême Afin de nous unir : Ont répondu « Présent ! » « Français, levons la tête, Regardons l’avenir ! » Refrain Nous, brandissant la toile Maréchal, nous voilà ! Du drapeau immortel, Devant toi le sauveur de la France, Dans l’or des étoiles Nous jurons, nous tes gars, Nous voyons luire un ciel : De servir et de suivre tes pas. Maréchal, nous voilà ! La guerre est inhumaine, Tu nous as redonné l’espérance Quel triste épouvantail ! La Patrie renaîtra ! N’écoutons plus la haine, Maréchal, maréchal, nous voilà! Exaltons le travail ; Et gardons confiance Tu as lutté sans cesse Dans un nouveau destin Pour le salut commun ; Car Pétain c’est la France,

On parle avec tendresse La France, c’est Pétain ! ©DR Du héros de Verdun. 41 D °986 N° TDC G Le regard d’un intellectuel juif

● Léon Werth, Déposition (journal 1940-1944), © Viviane Hamy, 1992. • ’CL NFRANCE EN L’ÉCOLE 23 octobre 1940. « M. Ripert [secrétaire d’État à l’Instruction publique, sept.-déc. 1940] a estimé qu’il ne serait plus tolérable que les opinions exprimées au-dehors par le maître fussent en désaccord avec l’enseignement qu’il donne à l’école. […] » 6 décembre 1940. Les nouveaux programmes introduisent Dieu à l’école primaire. […] Mais ce Dieu de l’école pri- maire, quel est-il ? Celui du maréchal Pétain ou celui de Voltaire ? 13 mars 1941. Chaque matin, à l’école primaire, on doit écrire sur le tableau noir : Travail, Famille, Patrie. […] 14 mars 1941. Chevalier [secrétaire d’État à l’Éducation nationale, 13 déc. 1940-23 fév. 1941] avait réintroduit Dieu à l’école. Carcopino [secrétaire d’État à l’Éducation nationale, 23 fév. 1941-18 avr. 1942] dit que ce n’est point la place de Dieu. Ils jouent avec Dieu à coucou le voici, coucou le voilà. […] 30 mai 1941. Une conférencière officielle […] parle devant les enfants des écoles. […]. Elle fait joujou avec Saint Louis, Montaigne, Corneille, Péguy et le maréchal. […] 21 juin 1941. Qui n’a entendu en effet cette « explication » infâme ? Les instituteurs responsables de la débâcle et par leur enseignement et parce que, presque tous officiers de réserve, ils avaient abandonné leur unité ou conseillé la fuite à leurs hommes […]. 29 juillet 1941. [Projets de Carcopino sur l’enseignement.] Là-dessus, j’ai entendu une voix de paysan : « On envoyait les gosses à l’école pour qu’ils en sachent un peu plus que nous… […] On ne leur apprend plus qu’à chanter un ou deux couplets de La Marseillaise et à marcher en rangs. » […] 24 mai 1942. [Un portrait de Pétain chez Riffault.] Le gosse (dans les 12 ans) m’apporte le portrait au dos duquel on a cliché un autographe du maréchal. C’est le remerciement qu’il adressa en 1940 aux enfants des écoles, qui, par ordre de l’administration, lui avaient envoyé un dessin […] : « Mon enfant. Votre dessin m’a plu. Vous l’avez fait avec un soin qui montre que vous avez du goût pour ce genre de travail. Je vous en félicite ; continuez. Ph. PÉTAIN. » […] Je demande à Riffault s’il croit que cette propagande, cette innombrable publicité, cette mise en scène postale furent efficace ; l’enfant répond lui-même : « On sait bien qu’on a tous reçu la même lettre. » […] 8 juin 1944. Le centre d’information régionale organise un grand concours. […] Tous les enfants de 7 à 15 ans pour- ront prendre part à ce concours dont le sujet est une lettre sur le thème : Pourquoi l’Europe s’est-elle unie pour com- battre le bolchevisme? […] Les enfants de 7 ans font d’agréables dessins. Peut-être ont-ils aussi d’étonnantes intuitions sur le bolchevisme, le matérialisme et les lois de l’économie. 42 L’ÉCOLE EN FRANCE• TDC N° 986 SÉQUENCESÉQUENCE PÉDAGOGIQUE PÉDAGOGIQUE 2 2 H J L’école rattrapée parlaguerre Le casdesécoliersjuifs © LAPI/ROGER-VIOLLET lors d’unbombardementàParis enoctobre1943. ● ● osrielaei ilshabitaientnotrequartier : construire l’avenir uelsn ’n a ulé tmi j’ajoutelesnotesdulivret. qu’elles net’ontpasoubliéeetmoi, Tes camarades vonttemettre unpetitmotpourtemontrer poursupporterensemblel’épreuve commune. nécessaire, etcelanepeutquecréer entre vousunespritdesolidarité effet quel’asileoùtuétaisnecomptaitdesIsraélites, MadameBollom’aditen etnousenréjouissons. tun’espasmalheureuse, et c’esttoi-mêmequinousl’assures, ova.Tu emneaéécarnd o éat atess lvse acntrainl lsvv én,mais élèvesetlaconsternationplusvivearégné, maîtresses, Tout lemondeaétéchagrindetondépart, nouveau. à […]Jeprendrai doncsijelepeuxuneautre detescamarades silesortfrappe aussilongtempsqu’ellelepourra. cousine, »[…] Ta Mademoiselle? aura-t-il bientôtunroienFrance, tante t’aditàquellesdémarches jem’étaislivréemaiscomprends fortbiensonlégitimedésirdetejoindre Y àtapetite « tutesouviens? quetumeposas, ce commeladernière tu aurais puêtre 3 tparl’occupant. et organisationcontrôléepar policiers françaisetplacéedansuncentresurveillédel’UniongénéraledesJuifsFrance(UGIF), rnep hselhvr» etebas,mon petitavecbeaucoupd’affection. Je t’embrasse, ». printemps chasse l’hiver famille […]. oiéÉoed areTecn(1redsAades 52 ai,[email protected]), 75020Paris, Comité Écoledelarue Tlemcen (61ruedes Amandiers, Des écoliersetleurmaîtreréfugiésdansunabri ag:5 Rang : 62,5 Total : 4 2 Dessin: décompter: à Ordre 6 Calcul: 12 Travail : 7 Rédaction: 9 Devoirs : 7,5 14 Français : Leçons : 5 Conduite : ’jueqes ant ecnut vi t eler au lieu de5ousitun’avaispaseumauvaisesnotesd’ordre, 7 : J’ajoute quesitanotedeconduite avaitétémeilleure Hélène estnerveuseets’agite…Dommage. Depuisquelquesjours, Observation : rvil iu noedn anuel cl,ptt éèe celatedonnera desheures d’oublietfera plaisiràta petiteHélène, Travaille mieuxencore danstanouvelleécole, et ute acèeHln,nnsn edr org,srot sèe ad o ofatsuie tusaisbienquele garde tonconfiantsourire, espère, surtout, courage, nonsanstedire « machère Hélène, Je tequitte, utjusc ai u osaosvieetcecétsbuls tonsourire ettesquestionspleinesd’innocen- Huit jourscematinquenousavonsvainementcherché tesboucles, Bonjour petiteHélène arrêtéele28janvier1943parde àHélèneSimony, institutricedel’écolelarue Tourtille àParis, Lettre deMmeCourtois, e e pè eiee uan,tni u ecasmn s eie-SzneG lc .-ClteB ettoi. -ColetteB. - Alice S. tandisqueleclassementestDenise-SuzanneG. après DeniseetSuzanne, e dtosd oobe,2006. ©LesÉditionsduColombier, , et agriculteurs de 13 Adolescents de force Travailleurs à adultes de21 à Enfants de6 plus de70ans vieillards de anset 6 Enfants de3 moins de3ans Enfants de I 70 ans 13 anset Les enfantsdesécolesontfaim! 1940-1944, ● à 21ans ore:RémyHandourtzel, : Source à

quotidienne Ration atsupprim Lait Pain supprim Lait Pain les 6-13ans) (pour Lait Pain Lait Pain Lait Pain Noêsis © é é 901941 1940 500 g 500 g 1/4 l 300 1/2 l 200 g 3/4 l 100 g 1997. , à 350g 400 g 400 g 1/4 l 275 g 1/2 l 200 g 3/4 l 100 g Vichy etl’école 921943 1942 400 g 350 g 1/4 l 275 1/2 l 200 g 3/4 l 100 g à Se souvenirpour 300g 350 g 350 g 1/4 l 275 1/2 l 200 g 3/4 l 100 g à 300g , Vichy 1944 375 g 350 g 1/4 l 300 g 1/2 l 225 g 3/4 l 100 g s >> ANALYSE DES DOCUMENTS

ration des sexes et des fonctions : aux filles la couture, aux garçons la bêche, maniée sur des parcelles consa- A àG École républicaine vs école crées à des expérimentations agricoles plus ou moins abouties. On prépare ainsi chacun à remplir sa tâche dans nationale une société régénérée. L’élève est réinstallé dans les « com- munautés naturelles » (famille, patrie, terroir). Le cours Dans une France morcelée, encore hébétée par la d’instruction civique et de morale est profondément renou- débâcle, Philippe Pétain, chef de l’État français depuis le velé : nouvelles notions Travail, Famille, Patrie, lecture des 10 juillet 1940, dresse un véritable réquisitoire contre discours du Maréchal et introduction brève, en option l’école républicaine (DOC A ). Il le fait dans un organe de facultative, de « Dieu » dans les programmes scolaires presse conservateur qu’il connaît bien, La Revue des Deux (décret du 6 janvier 1941). Des fêtes nouvelles ponctuent Mondes. Il y a exposé dès 1934 ses conceptions en le calendrier scolaire : Sainte-Jeanne-d’Arc, Saint-Philippe, matière pédagogique. Dressant un catalogue des erreurs Assomption, etc. commises par les maîtres, Pétain attaque les fondements mêmes de l’école de Jules Ferry. Confondant « instruc- Une telle révolution suppose une transformation des tion » et « éducation », l’école s’est focalisée sur la for- méthodes et des outils. Les manuels scolaires sont passés mation de l’intelligence au détriment de l’âme et de la au crible. Le DOC F propose un regard humoristique sur personne. Que valent des connaissances livresques quand l’une des nombreuses actualités de La Semaine. Une com- se joue ici-bas le salut éternel ? Ces connaissances mission de révision des manuels vient d’être installée ; abstraites ont abâtardi les masses, les faisant céder à trois listes de manuels scolaires interdits sont successi- « l’esprit de jouissance » cristallisé par les grèves de 1936, vement publiées : ouvrages d’arithmétique, de littérature, les congés payés, et la revendication du droit aux loisirs. d’histoire ou de géographie trop républicains ou trop anti- La « neutralité » – c’est-à-dire la laïcité – fait également allemands. l’objet d’une attaque en règle. Elle a « déraciné » des géné- 43 rations d’écoliers, les privant de leur terroir et des Le nouvel hymne Maréchal, nous voilà (DOC E ) est 986 N° TDC croyances ancestrales qui les y rattachent. chanté chaque matin à l’école. Le texte d’André Montagnard Pétain met fin aux espoirs de ceux qui, dans les années est directement inspiré du catéchisme. Destiné à être

1930 avec Jean Zay et le Syndicat national des instituteurs appris par cœur, il affirme la dimension messianique du •

(SNI), ont prétendu réformer le système bicéphale de la chef, la confusion entre sa personne et la nation, repre- FRANCE EN L’ÉCOLE fin des études primaires en une « école unique ». Pourtant, nant la phrase prononcée à Lyon par le cardinal Gerlier soucieux de développer les élites et de maintenir les hié- en novembre 1940 « car Pétain c’est la France et la France, rarchies, Pétain maintient le système existant : pour la c’est Pétain ». Il refonde quotidiennement le lien personnel majorité des jeunes Français, l’école s’achèvera, le « certif » qui unit l’écolier au chef de l’État français par une pro- en poche, par une ou deux années d’école primaire supé- messe : « Nous jurons de servir et de suivre tes pas », rieure. Pour moins de 7 % des élèves, le lycée continuera directement inspirée du scoutisme. Il décline la nouvelle d’ouvrir la voie à une formation d’excellence. Pétain syn- trilogie : Travail, Famille, Patrie. La chorale donne forme à thétise ici les théories d’intellectuels, de militaires et de l’embrigadement. Sur un rythme ternaire de marche, en pédagogues qui, nourris de la lecture des Déracinés de grande partie plagié, Maréchal, nous voilà est le seul hymne Maurice Barrès, portent le fer contre l’école de la commun aux écoliers des zones nord et sud. Le principe « gueuse ». Le cercle Fustel-de-Coulanges, fondé en 1927, du chœur fusionne l’ensemble des voix pour ne plus qui compte des académiciens, des universitaires, des laisser entendre qu’un groupe dirigé par un chef. Il réalise enseignants issus de la rue d’Ulm, a été un laboratoire de l’idéologie anti-individualiste de Vichy. l’idéologie scolaire promue par Pétain. Mouvements cor- poratifs hostiles au SNI, officiers, tenants de la droite catho- lique qui n’ont jamais accepté la loi de séparation, ont contribué à sa formulation. Pour ces intellectuels et ces idéologues, la défaite est une « divine surprise » (selon la formule de Charles Maurras) qui leur offre la possibilité B àD ,F et G Le maître détrôné de mettre en œuvre leur programme scolaire. Le régime de Vichy s’emploie à amoindrir les attribu- Six semaines avant la rentrée des classes de 1940, tions et l’aura de l’instituteur jugé laïcard et « mal-pen- Pétain annonce une réforme profonde de l’enseignement sant ». Dans la salle de classe (DOC B ), le maître autant et du « travail » de l’élève. Les programmes disciplinaires que l’élève travaillent sous le contrôle du chef de l’État, sont « simplifiés ». Il faut dégager du temps pour des ensei- dont la photographie s’est substituée à la représentation gnements nouveaux : 4 ou 5 heures selon le sexe doivent de Marianne. Cette mise en scène souligne la hiérarchie être consacrées à des activités sportives de plein air. que le régime entend restaurer : à l’échelon inférieur L’objectif est de viriliser la jeunesse, de lui rendre « santé, l’écolier, sur l’estrade le maître, au sommet le chef. Jouant courage, discipline ». Les « travaux manuels » occupent sur les références chrétiennes, le Maréchal impose sa « une place beaucoup plus large ». Ils renforcent la sépa- présence réelle et s’offre en personne à l’adoration de la 44 L’ÉCOLE EN FRANCE• TDC N° 986 SÉQUENCESÉQUENCE PÉDAGOGIQUE PÉDAGOGIQUE 2 2 d’un échec culture etdel’histoire françaises ( polisent laparoleetimposentunelecture officielledela cesontdesconférenciers payéspar Vichy quimono- parle, Quandcen’estpaslechefqui muette. une sageécolière, letemps delavisitePétain, elledevient, mains croisées, misedecôté, : de relégation dontl’institutricefaitl’objet Laphotographie montre l’entreprise culture delafacilité. »etla triche table coursdemorale radiodiffusé contre la« ildispenseunvéri- rentrée desclassesenoctobre 1941, lors dela Àl’écoledePérigny(Allier), jeunesse desécoles. de larévolution nationalenepénètre pas l’écoleenpro- sil’idéologie : ment pardeux documentsdepropagande Lapremière réponseestapportée involontaire- ? donc Pourquoi publique nedonnepaslesrésultats espérés. F pare letempsetl’espace delaclasse. Leconcoursestdevenuunrituel quiacca- surréalistes. paysans noncorrompusparlemondedesvilleset instinctetpureté sontl’apanagedepetits fraîcheur, : rural idéologues delarévolutionnationaleprêtentaupeuple trouve-t-il danslesdessinsde1942valeursque le montre letémoignagedeLéon Werth ( etenexonèrent ainsil’État-Majorcomme bilité deladéfaite, Lesjournaux leurimputentlaresponsa- des instituteurs. lepacifismeetl’internationalisme est orchestrée contre unevéritablecampagnedepresse dèsaoût 1940, De plus, pable d’imposerunequelconquedisciplineàsonélève. l’instituteurdeCepsembleinca- (bouteille àl’arrière-plan), l’image del’instituteur sien pro-allemand tPuce et trrl.Leconcoursdisqualifielescompositionstri- et rurale. bref uneFrance passéiste des clochersetpâturages, deschâteauxforts, deJeanned’Arc, celle de Vercingétorix, laFrance qu’ilsdoiventaimerest : attentes desautorités Leursœuvres révèlentles symbolisé parlesseptétoiles. pr d’écoliers met enscèneunefilejoyeusemaisnondésordonnée coloré del’imagequiillustr Lestylenaïfet résoudre desproblèmesdebaignoires. Lesenfantssontappelésàdessineretnon gnés. motssouli- usagedurougeavecpleinsetdéliés, gnée, écoliers ( de Vichy quicommententetévaluentlesproductionsdes Le maître perd toutpouvoiricipuisquecesontleshommes Ilsuscitel’émulationetpermet lasélection. mestrielles. du dessinateur Alain Saint-Ogan( l’affiche Appelàlamobilisationdesélèves, rité dumaître. l vin bnon eruié » ils avaientabandonnéleurunité. gnement etparce quepresque tousofficiersde réserve, instituteurs responsables deladéfaiteetparleurensei- oteons:lesraisons : Contrepoints à La révolutionque Vichy entendimposeràl’école La caricature ( Le concoursestunautre moyendedélégitimerl’auto- J DOC subtiliseaumaîtr , D sé efieue«srrs »auMaréchal, surprise essés defaire une« .Ainsil’hommedelettres Henrid’Amfreville ). DOC La Semaine éril,zzu peut-être alcoolique , Débraillé, . F publiéeparl’hebdomadaire pari- ) e oe calligraphie soi- : e sescodes e lerèglement oteladégradation de montre DOC DOC C G ,l’auteurde ), ). DOC du concours G ):«Les Zig cancre de Le c’estparce quelaFrance estunpaysoccupé. fondeur, rpeànueu». frappe ànouveau si lesort si ellelepeutunecamarade juived’Hélène« promettantd’accueillir pour faire libérer sonélèvearrêtée, buées àParis de1940à1944( tableau diachroniquedesquantitésdepainetlaitattri- Le froidetfaim. lesécoliersontpeur, et auxbombes, Confrontésàlapénurie monde que Vichy prétendrecréer. des réalitésdelaguerre etledécalageesttotalavec Lesenfantsn’ignorent doncrien classe partempsd’alerte. C’estdanslescavesdesécolesquesefaitla des enfants. gande iréniquedurégimeseheurteàl’expériencevécue air Le papier. viennent pasdanslesécolesenraison delapénurie ceux-cinepar- : rance parl’absencedemanuelsrévisés s’inclinent commeceluideSaint-Amour( tance passiveprogresse. Larésis- écoliers nesontplusnilusentendusen1943. cours destinésauxinstituteursetlesexhortations Lesdis- orientations desprogrammes sontcritiquées. sur laréintroductiondeDieuàl’écoleetlesnouvelles Lescommérages vontbontrain la cheminéedesRiffault. mais laphotographie duMaréchalestquandmêmesur 1940 etsesrécompensessuscitentunedistancecritique Leconcoursde mais ilsnelefontpassansambivalence. cesontlesparents etleursenfants Ceux quirésistentici, L’instituteur apeurets’incline.Saint-Amour estsaisissante. Lapeinture qu’ilfaitdeshabitantsde commente. écoute, observe, lit, victimedesloisd’exclusion, Werth, Libération, puisdeParis oùilattendetvitla jusqu’en janvier1944, petitvillageduJura oùilrésideseul Depuis Saint-Amour, illivre lesréactionsd’unintellectuel juif. 16 août1944, Écritaujourledelafinjuillet1940 jeunesse. régime de Vichy danssonentreprise deremodelage dela inestimable surlesrésistancesauxquellesseheurtele le 20 prévues parlesprogrammes. ilssontincapablesdesoutenirlesheures desports : tion inspecteurs d’académiedénoncentleursous-alimenta- Les enfants de6à14anssontparticulièrement rationnés. uleet AinsiMmeCourtois( duellement. D’autres s’engagentindivi- torien RémyHandourtzel). traitements (plusieursmilliersd’enseignantsselonl’his- découragés parlafaiblessedeleurs coup démissionnent, ’tn a u 0700enfantsarrêtésparce quejuifs. s’étend pasaux10 laprotectiondel’enfancene par laloidu26août1942, ConfiéeàPierre Laval n’ont pasdesentimentd’immunité. montrent quelesenfants que révèlesoncarnetscolaire, comportement d’HélèneSimonyavantsonarrestation, Lestroublesdu perturbent lesclassesetinstituteurs. e aRssac s us efi e ate.Sicertains La Résistanceestaussilefaitdesmaîtres. lsgae noe lesrafles desécoliersjuifs( Plus graves encore, Le journaldeLéon Werth ( rodseetd ai,multiplielesdémarches arrondissement deParis, La Semaine DOC H oteqe aslsvle,lapropa- danslesvilles, montre que, ( DOC DOC F peutjustifiersonigno- ) DOC DOC G fr untémoignage offre ) J I ,institutrice dans ), montre que les ) DOC G DOC ,beau- ), J ) >> ACTIVITÉS 1 1res L, ES, S l docs A à J L’école primaire : laboratoire de la révolution nationale a. De quoi l’école républicaine est-elle coupable selon Philippe Pétain (DOC A )? b. Quelles réformes impose-t-il en août 1940 ? À quelles fins ? c. Par quels moyens le régime de Vichy construit-il le culte du chef à l’école (DOCS C ,E et F ) ? Relevez les principaux aspects de ce culte. d. Quelle image des instituteurs les DOCS B et F donnent-ils à voir ? De quoi cette image est-elle révélatrice ? e. Quel est le rôle des concours organisés par le pouvoir et diffusés par l’école (DOCS C et D ) ? f. En quoi ces concours contribuent-ils à disqualifier l’autorité du maître ? Réponse organisée : Caractérisez les principaux aspects de la politique scolaire promue par Vichy.

L’école de Vichy : discours et réalités a. Quel est l’enjeu du concours organisé en 1940 auprès des écoliers (DOC C )? b. Quelle représentation de la France le régime entend-il construire par le biais de ce concours ? Cette représentation est-elle conforme à la réalité ? Quel est le contexte en 1940 ? c. Quelles qualités des écoliers Henri d’Amfreville célèbre-t-il (DOC D ) ? En quoi son compte-rendu des résultats du concours est-il idéologique ? d. Quelles sont les réalités vécues par les écoliers dans la France de Vichy (DOCS H ,I et J ) ? En quoi invalident-elles le discours officiel ? Réponse organisée : Quels sont les objectifs de la propagande scolaire mise en place par le régime de Vichy ? À quelles résistances se heurte-t-elle ? 45 Le regard d’un témoin 986 N° TDC a. Quelles transformations affectant l’école Léon Werth relève-t-il dans ces extraits de son journal (DOC G )? b. Quelles sont ses sources d’information ? •

c. Quelles réactions la politique scolaire de Vichy suscite-t-elle au village? Comment Léon Werth lui-même réagit-il? FRANCE EN L’ÉCOLE d. Y a-t-il des évolutions dans la manière dont sont reçues les réformes de Vichy ? Réponse organisée : Quelles sont les raisons de l’échec de la politique scolaire du régime de Vichy ?

2 1re STG l doc C Rédigez une réponse courte : caractérisez une situation et un acteur a. Quelle est la situation de la France, de son armée et de ses habitants quand Philippe Pétain annonce sa réforme de l’école ? b. Qui est Pétain le 15 août 1940 ? Dans quelles circonstances est-il arrivé au pouvoir ? Quels sont les fondements de son autorité ?

Dégagez l’apport d’un document à la connaissance d’une question a. Présentez le DOC C . De quand date cette affiche ? Dans quelles circonstances (politiques, militaires et économiques) est-elle produite ? À qui s’adresse-t-elle ? Que propose-t-elle ? Relevez dans le document les éléments qui permettent de l’identifier comme un document de propagande. b. Analysez le document. – Le dessin à gauche : Où la scène se situe-t-elle ? Que symbolisent les sept étoiles dans le ciel ? Comment les écoliers sont-ils représentés ? Que représentent les dessins qu’ils apportent en offrande ? – Le texte à droite : Qu’est-ce qui est mis en valeur par la typographie ? La France évoquée par le règlement du concours correspond-elle à la France réelle de 1940 ? c. Exploitez le document. Quelles sont les qualités des écoliers mises en évidence par ce document ? Pourquoi ? Quelle relation entre les enfants et le maréchal Pétain cette affiche veut-elle construire ? En quoi cette relation rompt-elle avec les pratiques républicaines antérieures ? En quoi ce concours de dessin destiné aux écoliers est-il révélateur des nouvelles valeurs du régime de Vichy ? © CNDP