Roch-Olivier Maistre, Président du Conseil d’administration Laurent Bayle, Directeur général

Jeudi 7 octobre Ciné-concert : Octobre

Dans le cadre du cycle Lénine, Staline et la musique 1 Du 7 au 17 octobre | Jeudi 7 octobre Octobre

Vous avez la possibilité de consulter les notes de programme en ligne, 2 jours avant chaque concert,

à l’adresse suivante : www.citedelamusique.fr Ciné-concert : Cycle Lénine, Staline et la musique 1

À la suite de la révolution d’octobre 1917, les artistes soviétiques rêvent d’un art appartenant à tous. Mais ils doivent rapidement déchanter, car le régime soviétique va très tôt dicter la ligne de conduite à adopter. Or la déinition oicielle du réalisme socialiste, mouvement prôné à partir de 1934, reste vague et changeante, comme la notion de formalisme qui, à la in des années 1940, condamne les dérives antipopulaires de façon tout à fait arbitraire. Exils volontaires ou forcés, actes de censure et déportations se multiplient. Malgré cette terreur, le bouillonnement artistique des années 1920 en URSS témoigne des tendances avant-gardistes et audacieuses de la jeune génération.

Scriabine l’inspirateur

En 1914, les pièces atonales de Scriabine (qui meurt prématurément en 1915) Vers la lamme op. 72 et les Deux Danses op. 73 soulignent une approche rythmique complexe et une utilisation percussive du piano – aspects partagés par les Deux Poèmes de Nikolaï Roslavets, la Quatrième Sonate pour piano d’Alexandre Mossolov, la Première Sonate pour piano de Chostakovitch (1926) ou, dans un autre contexte, le Ragtime de Stravinski qui abolit la barre de mesure dans un chromatisme généralisé. Il s’agit peut-être là d’un des premiers avatars du néo-classicisme, au même titre que les Pleurs de la Vierge Marie d’Arthur Lourié (1915).

L’avant-garde occidentale

À l’Ouest, la musique atonale de l’École de Vienne aboutit, en 1923, à la pratique du dodécaphonisme – technique qui n’apparaîtra que très tardivement chez Chostakovitch, et dans un cadre tonal (Quatuor à cordes n° 12, 1968). Cette inluence est pourtant sensible dès 1914 chez Roslavets et Lourié (Synthèses), et dans la musique d’Eim Golychev, également peintre dadaïste, dont le Trio utilise des complexes de douze hauteurs et durées diférentes, et qui associe les dynamiques de chaque mouvement à un tempo. Le courant futuriste et l’invention d’instruments intéressent également les compositeurs – la « Croix sonore », imaginée par Nikolaï Obouhov dès 1917, est un instrument électrique qui préigure le thérémine. Certaines pièces pour piano de Lourié présentent une notation cubiste, comme les Formes en l’air de 1915, dédiées à Picasso. Au même moment, Ivan Wyschnegradsky développe une musique ultrachromatique en tiers, quarts voire sixièmes de ton (Méditation sur deux thèmes de la Journée de l’existence), voie de la microtonalité poursuivie ensuite en exil et reprise à sa manière par Schnittke, dont le Concerto grosso n° 1 (1977) associe la musique fonctionnelle à une parodie de la musique baroque et à un langage au chromatisme exacerbé.

L’âge d’or du cinéma soviétique

La in des années 1920, marquée par les chefs-d’œuvre d’Eisenstein (Le Cuirassé Potemkine, Octobre), ravit les compositeurs qui, tels Vladimir Deshevov et le jeune Chostakovitch, s’intéressent à la scène et au cinéma. Les cinéastes Kozintsev et Trauberg signent en 1921 le Manifeste de l’excentrisme, dont une des priorités est de renouer, dans la mise en scène, avec les formes de spectacle populaire (music-hall, opérette, cirque). C’est dans cet esprit que Chostakovitch débute Le Grand Éclair (1931-1932) et compose sa première musique de cinéma pour le ilm La Nouvelle Babylone (1928-1929). Les résonances politiques y sont importantes, tout comme dans la curieuse Aelita de Protazanov, ilm de science-iction qui évoque un Moscou marqué par la Nouvelle politique économique, ainsi qu’une révolution prolétarienne sur… Mars. Au temps du cinéma parlant, les Montagnes d’or de Youtkévitch (1931) évoquent une grève d’ouvriers dans la Russie prérévolutionnaire. Comme pour Alexandre Nevski, Prokoiev collabore avec Eisenstein pour Ivan le Terrible (1944-1946) dont la seconde partie, censurée par Staline, ne sortira sur les écrans qu’en 1958, bien après la mort du réalisateur, contraint de laisser la fresque inachevée. DU JEUDI 7 AU DIMANCHE 17 OCTOBRE

L’usine, le travail, la machine

À la suite de Paciic 231 d’Honegger, plusieurs œuvres suivent le courant urbaniste : la Deuxième Symphonie, dite « de fer et d’acier », de Prokoiev (1925) ; les Rails de Deshevov (1926), brève toccata présentant de courtes igures rythmiques obstinées ; le Premier Quatuor à cordes de Mossolov (1927). Pourtant, le constructivisme init par éveiller la méiance du régime, notamment deux ballets, Le Pas d’acier (1927) de Prokoiev, jugé caricatural, et Le Boulon de Chostakovitch.

Chostakovitch et le réalisme socialiste

Début 1936 survient l’afaire Lady Macbeth, suite à l’article « Du chaos à la place de la musique », qui dénonce le « naturalisme grossier » et les tendances formalistes de l’opéra, au nom d’une atteinte aux préceptes du réalisme socialiste, édictés plus tôt par Lénine : « L’art appartient au peuple. Il doit plonger ses racines les plus profondes dans les masses ouvrières les plus larges qui doivent pouvoir le comprendre et l’aimer. » Remanié après la mort de Staline sous le titre de Katerina Ismaïlova, l’opéra sera ilmé en 1966 par Mikhaïl Chapiro. Dès lors, Chostakovitch va se trouver en porte-à-faux entre les attentes d’un régime imprévisible et répressif et ses libres aspirations d’artiste. Comme les autres « ennemis du peuple » (Roslavets, Mossolov, etc.), il écrira souvent de la musique « pour le tiroir », par crainte de représailles. C’est le cas de De la poésie populaire juive ou du Quatrième Quatuor à cordes (1948-1949) qui furent exposés à l’antisémitisme violent de ces années-là, dont fut victime Moshe Weinberg, grand ami de Chostakovitch. Si la Cinquième Symphonie de 1937, présentée comme « la réponse créative d’un artiste soviétique à des critiques légitimes », le rachète aux yeux de Staline, les contraintes diverses exercées par le régime expliquent le conformisme de ses Dix Poèmes sur des textes révolutionnaires (1951) ou du Deuxième Quatuor à cordes de Mossolov (1942). Les compositeurs se réfugient alors dans des œuvres de musique pure, parfois à tendance autobiographique, dont le message intime est crypté, comme dans les Septième et Huitième Quatuors à cordes (1960) ; dans ce dernier, le motif DSCH, signature musicale du compositeur, parcourt toute l’œuvre comme une angoissante obsession. Le grotesque et la parodie semblent enin un moyen d’échapper à l’oppression, pourtant omniprésente, comme dans les acerbes Satires (1960), les Cinq Romances sur des textes du magazine Krokodil (1965), ou les Quatre Strophes du capitaine Lebiadkine de 1974. Le début du texte écrit par Chostakovitch pour la Préface à l’édition complète de mes œuvres et brèves rélexions sur cette préface (1966) est, à ce titre, d’une éloquente ironie : « Je noircis toute la feuille d’un trait. / J’en perçois le chuintement de mon oreille entraînée / Puis du monde entier je déchire l’ouïe, / Mes œuvres sont publiées – et je tombe dans l’oubli ! »

Grégoire Tosser

3 Cycle Lénine, Staline et la musique 1

JEUDI 7 OCTOBRE – 20H MARDI 12 OCTOBRE – 20H JEUDI 14 OCTOBRE – 20H Salle des concerts Amphithéâtre Amphithéâtre

Octobre Sergueï Prokoiev Dmitri Chostakovitch Film de Sergueï Eisenstein Sonate pour piano n° 1 Trio avec piano n° 1 URSS, 1928 Alexandre Scriabine Ivan Wyschnegradsky Musique de Dmitri Chostakovitch Deux Danses op. 73 Méditation sur deux thèmes de la Vers la lamme op. 72 Journée de l’existence op. 7 Orchestre National d’Île-de-France Nikolaï Roslavets Nikolaï Roslavets Dmitri Yablonsky, direction Deux Poèmes Trio avec piano n°3 Alexandre Mossolov Arthur Lourié Sonate pour piano n° 4 op. 11 Formes en l’air VENDREDI 8 OCTOBRE – 20H Arthur Lourié Alexandre Mossolov Amphithéâtre Syntheses op. 16 Quatuor à cordes n° 1 Igor Stravinski Aelita Ragtime Studio for New Music Moscow Film de Yakov Protazanov Vladimir Deshevov Vladimir Tarnopolski, direction URSS, 1924, 85 minutes. Rails op. 16 Musique de Dmitri Kourliandski Dmitri Chostakovitch Manifestation organisée dans le cadre (commande de l’Ensemble 2e2m, Sonate pour piano n° 1 op.12 de l’Année France-Russie 2010 / création) www.francerussie2010.com Olga Andryushchenko, piano Ensemble 2e2m Pierre Roullier, direction MERCREDI 13 OCTOBRE – 20H Salle des concerts SAMEDI 9 OCTOBRE – 20H Salle des concerts Sergueï Prokoiev Symphonie n° 2 La Nouvelle Babylone Concerto pour violon n° 2 Film de Grigori Kozintsev et Le Pas d’acier Leonid Trauberg URSS, 1928-1929 Deutsche Radio Philharmonie Musique de Dmitri Chostakovitch Saarbrücken-Kaiserslautern Gennady Rozhdestvensky, direction Orchestre Philharmonique de Radio Sacha Rozhdestvensky, violon France Frank Strobel, direction Le concert sera introduit par Gennady Rozhdestvensky et Bruno Monsaingeon.

4 DU JEUDI 7 AU DIMANCHE 17 OCTOBRE

SAMEDI 16 OCTOBRE – 15H SAMEDI 16 OCTOBRE – 20H DIMANCHE 17 OCTOBRE – 15H Amphithéâtre Amphithéâtre Salle des concerts

Forum Dmitri Chostakovitch Ciné-concert Les Joueurs Lullaby for Moscow Utopies révolutionnaires : musique Livret de Dmitri Chostakovitch et avant-garde sous Lénine d’apres Nikolaï Gogol D’après Moscow, ilm documentaire de Mikhaïl Kaufman et Ilya Kopaline, 15H table ronde Le Grand Eclair Russie, 1927 Animée par Grégoire Tosser, Livret de N.N. Aseeva musicologue Musiques de Yuri Kasparov, Dmitri Avec la participation de Solistes du Centre Vischnevskaia Kourliandski, Kirill Umanski, Anton Jean-Claude Marcadé, historien de de Moscou Safronov l’art, Bruno Monsaingeon, réalisateur, Orchestre du Conservatoire de Paris Intermèdes vidéo d’Olga Kumeger Gennady Rozhdestvensky, chef Jeune Chœur de Paris d’orchestre, et Pascal Huynh, Dmitri Jurowski, direction Moscow Contemporary Music commissaire de l’exposition Lénine, Ensemble Staline et la musique Coproduction Cité de la musique, Alexei Vinogradov, direction Conservatoire de Paris et Centre 17H30 concert Vischnevskaya de Moscou. Manifestation organisée dans le cadre de Moscow Contemporary Music l’Année France-Russie 2010 / Ensemble Manifestation organisée dans le cadre de www.francerussie2010.com l’Année France-Russie 2010 / Ivan Wyschnegradsky www.france-russie2010.com Dialogues à deux, pour deux pianos DIMANCHE 17 OCTOBRE – 16H30 en quarts de ton Salle des concerts Arthur Lourié Pleurs de la Vierge Marie - Fragments Russie éternelle, Russie engagée d’une chanson pieuse du XIIIe siècle, pour voix, violon, alto et violoncelle Piotr Ilitch Tchaïkovski Ivan Wyschnegradsky Liturgie de saint Jean Chrysostome Préludes, pour deux pianos en quarts de ton (extraits) Eim Golichev Sergueï Taneiev Trio Zwolftondauermusik, pour violon, Choeurs sur des textes de Polonski alto et violoncelle Dmitri Chostakovitch Sergueï Protopopov Dix Poèmes sur des textes Jeunesse, pour voix, violon, violoncelle révolutionnaires et piano Ivan Wyschnegradsky Accentus Intégrations, pour deux pianos en quarts Laurence Equilbey, direction de ton Coproduction Cité de la musique, Manifestation organisée dans le cadre Accentus. de l’Année France-Russie 2010 / www.francerussie2010.com

JEUDI 7 OCTOBRE – 20H Salle des concerts

Ciné-concert

Octobre Film de Sergueï Eisenstein URSS, 1928, 104 minutes. Musique de Dmitri Chostakovitch

Orchestre National d’Île-de-France Dmitry Yablonsky, direction

Coproduction Cité de la musique, Orchestre National d’Île-de-France.

Fin du ciné-concert vers 21h50.

7 Octobre Film de Sergueï Eisenstein URSS, 1928, 104 minutes.

Si Octobre illustre éloquemment la formule de son réalisateur : « Le cinéma soviétique doit fendre les crânes », il marque aussi le début des positions acrobatiques que devra défendre Sergueï Mikhaïlovitch Eisenstein par rapport à la montée en puissance du système répressif stalinien. Commande oicielle du Comité central pour la célébration du dixième anniversaire de la révolution, Octobre est terminé en novembre 1927, juste au moment de l’exclusion de Trotski des instances du Parti. Pour sa sortie publique, le 14 mars 1928, le ilm sera amputé de mille mètres (2 800 au lieu des 3 800 du montage initial), soit le métrage correspondant aux séquences où apparaissait Trotski.

Eisenstein, « metteur en scène de la nation », selon Hélène Carrère d’Encausse, paraissait tout désigné, après le succès international du Cuirassé Potemkine, pour mettre en images Les dix jours qui ébranlèrent le monde de John Reed. On s’imagina, logiquement, que les trouvailles stylistiques du récit de la mutinerie de juin 1905 à Odessa allaient se retrouver, ampliiées et magniiées, dans celui des journées révolutionnaires de 1917 à Petrograd. Or, en tournant et en montant Octobre, Eisenstein voulut précisément se démarquer des procédés qui avaient pourtant prouvé leur eicacité dans Le Cuirassé Potemkine. Il s’en était clairement expliqué en écrivant en 1928 au critique Léon Moussinac : « La plus grosse bêtise (que l’on a faite dans presque tous les journaux allemands) serait de comparer Octobre à Potemkine. Octobre, c’est la dénégation dialectique de Potemkine ! Et l’intérêt principal d’Octobre est dans les bouts et morceaux qui ne ressemblent pas au Cuirassé ! »

En premier lieu, Eisenstein met à proit, beaucoup plus nettement que dans le Potemkine, les acquis de sa formation théâtrale auprès de Vsevolod Meyerhold, maître adulé puis rejeté : maîtrise des mouvements de foule et des éclairages violemment contrastés, géométrie constructiviste et composition architecturale de la mise en scène. Parallèlement à cette volonté esthétique se manifeste un souci quasi documentaire dans l’utilisation d’acteurs non professionnels et une manière de ilmer « comme les actualités », attitude que revendiquera un Jean-Luc Godard une trentaine d’années plus tard.

Sur le plan du montage, il n’est plus question d’« attractions », mais d’associations (« enchaînements d’associations », précise Eisenstein). Il est autant rythmique que métaphorique, voire allégorique (le joueur de lyre ictive, le paon de métal articulé dénigrant « les laquais du tsar », la série des statues de divinités africaines et asiatiques ponctuant l’appel à la religion des contre-révolutionnaires, les images pieuses introduisant le bidet et le pot de chambre de la tsarine avant la mise en pièces de son édredon…). Un montage qu’on pourrait également qualiier de « motorique » par le caractère répétitif de la succession rapide de plans quasi identiques (maniement des fusils et des sabres, exemplaires de la Pravda jetés dans la Neva, séries de portes claquées et de fourches de téléphone frénétiquement agitées) et dans la scansion

8 des intertitres où les guillemets revêtent une importance particulière (les « traîtres » bolcheviks), ces divers éléments s’articulant autour d’une structure organique de tension-détente commune à l’ensemble des ilms d’Eisenstein, où, précise le réalisateur, « le centre de gravité de leur efet n’est pas tant dans les explosions que dans le processus de compression qui précède les explosions. »

Toute cette inquiétude rythmique répond d’une conception essentiellement musicale, et il n’est pas surprenant que, d’entrée de jeu, Eisenstein ait voulu tourner le dos à l’habituelle « musique d’accompagnement » en vigueur tout au long de la période dite « muette ».

Partant du principe que « dans un ilm, la musique est bonne quand elle assume une fonction dramatique », Eisenstein était allé à en 1926 pour rencontrer Edmund Meisel, un compositeur déjà très impliqué dans l’étude des relations musique-image sous l’égide de l’Institut Allemand de Recherches Cinématographiques, pour lui proposer de composer une partition originale pour l’exploitation allemande du Cuirassé Potemkine. Nonobstant l’immense succès que remporta le ilm en Allemagne, les audaces de la musique de Meisel afolèrent les distributeurs au point de l’interdire d’exportation (avant l’inscription de la piste sonore sur pellicule, il était loisible de changer de musique…). En 1928, pour la difusion d’Octobre en Allemagne, Eisenstein reit néanmoins coniance à Edmund Meisel, qui avait entre-temps composé une partition originale pour le fameux Berlin, symphonie d’une grande ville de (1927). À Berlin, Meisel était par ailleurs, et principalement, le collaborateur musical du grand scénographe Erwin Piscator, lequel avait à l’époque pour chef d’orchestre et assistant metteur en scène le jeune Louis Saguer (21 ans), futur compositeur de la musique du Signe du lion d’Éric Rohmer (1959), qui découvrit ainsi, avant même l’apparition du ilm sonore, le travail pour le cinéma.

Les inluences croisées des deux plus importantes igures théâtrales du moment, Meyerhold et Piscator, devaient ouvrir sur des perspectives musicales novatrices. Pour ne citer qu’un exemple, on se souvient que le ilm commence sur le déboulonnage de la statue géante du tsar Alexandre III. « Au début, écrit Eisenstein dans Au-delà des étoiles, on démonte la statue et ensuite on la remonte. Une musique a été écrite pour ce ilm, composée pour un orchestre ; de plus, elle marchait aussi à l’envers, c’est-à-dire qu’il y avait une musique pour le moment où l’on démontait la statue, et les mêmes phrases musicales se répétaient en sens inverse au moment où on la remontait. » C’était donc, juste cinq ans après sa mise au point par Arnold Schönberg, la première application au cinéma de la technique de composition rétrograde « à l’écrevisse », chère aux adeptes du système sériel.

Edmund Meisel disparut quelques mois plus tard, sans avoir connu l’éclosion du cinéma sonore. Sa partition pour Octobre demeura dans l’oubli jusqu’au jour de 1989 où, à la demande conjointe du British Film Institute et du Festival d’Avignon, elle fut reconstituée pour un orchestre de 46 musiciens par Alan Fearon qui la dirigea à Avignon le 25 juillet 1989 avant de la redonner au Théâtre des Amandiers de Nanterre en avril 1990.

99 Auparavant, dans le courant des années soixante, une version « complète » d’Octobre avait été reconstituée et sonorisée par les soins de Grigori Alexandrov, co-signataire avec Eisenstein en 1928 du fameux manifeste sur le contrepoint image-son, version – aujourd’hui difusée – qui recourait musicalement à des extraits d’œuvres de Dimitri Chostakovitch, principalement les Symphonies n° 11 (op. 103, 1957) et 12 (op. 112, 1961) et le Concerto pour violoncelle op. 107 (1959). Des emprunts qui, s’ils étaient inattendus (bien que Chostakovitch n’ai jamais collaboré avec Eisenstein, il était possible de lui commander une partition originale), n’étaient pas sans justiication, puisque le compositeur, à l’époque d’Octobre, avait, comme Eisenstein, travaillé avec Meyerhold (pour La Punaise de Maïakovski), et, autre justiication postérieure, il sera en 1971, quatre ans avant sa mort, décoré de l’ordre de la révolution d’Octobre…

François Porcile

10 Dmitry Yablonsky Guarneri, l’invite à suivre son National de Taïwan, Orchestre Dmitry Yablonsky est né à Moscou enseignement au Curtis Institute Symphonique d’Israël, Orchestre dans une famille de musiciens. of Music. Durant l’été 1980, Dmitry National d’Île-de-France… Il a dirigé Sa mère est la pianiste Oxana Yablonsky rencontre Aldo Parisot, Montserrat Caballé, Roberto Alagna, Yablonskaya, et son père, Albert violoncelliste et professeur à Olga Borodina et joué le Concerto Zaionz, fut le hautboïste solo de l’Université de Yale où il va étudier de Penderecki sous la direction du l’Orchestre de la Radio et de la pendant 4 ans. C’est à Yale qu’il compositeur. Dmitry Yablonsky a Télévision de Moscou pendant 30 commence à s’intéresser à la direction fait plus de 70 enregistrements pour ans. Dmitry Yablonsky commence d’orchestre avec Otto-Werner Muller, Naxos, Erato-Warner, Chandos, Belair le violoncelle à 5 ans et entre très professeur de direction. Après Music, Sonora et Connoisseur Society, vite à l’École Centrale de Musique être sorti diplômé de l’Université nombre d’entre eux ont reçu des prix des enfants surdoués à Moscou. Il de Yale, il passe deux années à la dont un disque de trios (Tchaïkovski donne à 9 ans son premier concert Juilliard School en étudiant auprès et Chostakovitch) avec Vadim Repin et en interprétant le Concerto en ut de Zara Nelsova. Durant ces années Boris Berezovsky. Son enregistrement majeur de Haydn. En Russie, Dmitry d’études, Dmitry Yablonsky va des 40 Études pour violoncelle seul de Yablonsky a étudié auprès de jouer avec János Starker, Mstislav David Popper est paru chez Naxos Stefan Kalianov, ancien assistant Rostropovitch, André Navarra, in 2008. Il a transcrit et édité de de Mstislav Rostropovitch, et Isaak Maurice Gendron et bien d’autres. nombreuses œuvres pour violoncelle Buravsky, longtemps violoncelle Plus tard, il aura pour partenaires publiées par International Music solo de l’Orchestre du Bolchoï. Avant de musique de chambre Victor Company et Dover. Dmitry Yablonsky d’émigrer aux États-Unis, Dmitry Tretyakov, Leif Ove Andsnes, Yuri a été directeur artistique de plusieurs Yablonsky a joué à de nombreuses Bashmet, et se produira au Carnegie festivals dont le Wandering Stars occasions à Moscou et dans Hall à New York, à La Scala de Milan, Festival qui se tient dans divers pays d’autres villes de l’ancienne Union au Conservatoire Tchaïkovski à du monde chaque année (Russie, soviétique. Quitter l’URSS n’a pas Moscou, à la Philharmonie de Saint- États-Unis, Israël, Italie…). Il est été facile pour Dmitry Yablonsky et Pétersbourg, à la Cité de la musique, aujourd’hui codirecteur artistique il lui a fallu plusieurs années avant au Théâtre Mogador, à l’Auditorium du Festival International de Kabala d’obtenir l’agrément, grâce à l’appui du Musée du Louvre… Au Festival de en Azerbaïdjan. Depuis 2009, Dmitry de personnalités telles Leonard Camerino en Italie, Dmitry Yablonsky Yablonsky est membre de l’Académie Bernstein et Katharine Hepburn. En va connaître sa première expérience Indépendante des Beaux-Arts de 1977, Dmitry Yablonsky et sa mère de direction en remplaçant au pied Moscou et professeur de violoncelle arrivent à New York. Dmitry Yablonsky levé le chef prévu et diriger l’Octuor au Conservatoire de Bakou. Dmitry auditionne aussitôt pour entrer à la de Stravinsky avec les musiciens de Yablonsky vit depuis plusieurs années Juilliard School et est admis dans la l’Orchestre de l’Académie Sainte- dans un village catalan des Pyrénées, classe de Lorne Munroe, violoncelle Cécile de Rome. Pendant 4 ans, à la frontière franco-espagnole. solo de l’Orchestre Philharmonique Dmitry Yablonsky a été principal chef de New York. En 1979, âgé de 17 invité de l’Orchestre Philharmonique Orchestre National ans, Dmitry Yablonsky est le plus de Moscou et a dirigé de nombreux d’Île-de-France jeune musicien participant au orchestres de par le monde : L’Orchestre National d’Île-de- Festival de Marlboro où il joue aux Orchestre National de Russie, France, créé en 1974, est inancé par côtés de grands instrumentistes. Orchestre National de Belgique, le conseil régional d’Île-de-France Après l’avoir entendu jouer, David Orchestre de l’Opéra de Catane, et le ministère de la Culture. Sa Soyer, violoncelliste du Quatuor Orchestre de Bologne, Orchestre mission principale est de diffuser

11 l’art symphonique sur l’ensemble constituent les deux premiers Yoko Lévy-Kobayashi, 2e solo du territoire régional et tout titres. Depuis la rentrée 2005, Yoel Virginie Dupont, 2e solo particulièrement auprès de Levi est le chef principal de la Grzegorz Szydlo, 2e solo nouveaux publics. De 2002 à 2008, formation. Son arrivée a renforcé Jérôme Arger-Lefèvre le compositeur Marc-Olivier Dupin l’exigence de qualité, la volonté Marie-Claude Cachot assure la direction générale de la d’élargir le répertoire symphonique Prisca Carsalade formation ; il l’ouvre à de et la cohésion musicale de Marie Clouet prestigieux chefs et solistes, élargit l’Orchestre, ainsi que son Delphine Douillet son répertoire, et rénove son rayonnement national et Isabelle Durin approche du concert et du public. international. Après quatre saisons Domitille Gilon Roland David en a ensuite pris la fructueuses passées à la tête de Bernadette Jarry-Guillamot direction. L’orchestre compte l’orchestre, Yoel Levi a été Léon Kuzka désormais parmi les formations reconduit dans ses fonctions Marie-Anne Pichard-Le Bars nationales les plus dynamiques. jusqu’en 2012. L’Orchestre est très Mathieu Lecce Depuis avril 2009, il igure au top engagé en faveur du jeune public. Il Jean-François Marcel 10 des orchestres les plus engagés élabore et développe des actions Laëtitia Martin au monde du fameux mensuel ambitieuses : ateliers, rencontres Julie Oddou Gramophone. L’Orchestre, composé avec les artistes, concerts éducatifs Marie-Laure Rodescu de 95 musiciens permanents, et spectacles musicaux. Ces actions Pierre-Emmanuel Sombret donne chaque saison une centaine donnent ainsi aux jeunes le goût et la Sylviane Touratier de concerts, offrant ainsi aux connaissance du répertoire Justine Zieziulewicz Franciliens une grande variété de symphonique, tout en leur faisant programmes sur trois siècles de découvrir la relation directe aux Altos musique, du grand symphonique à musiciens et au spectacle vivant. Muriel Jollis-Dimitriu, 1er solo la musique contemporaine, du Les concerts Oi Brasil, La Fontaine Renaud Stahl, 1er solo baroque aux diverses musiques de de l’île, Renard et, plus récemment, Sonia Badets, 2e solo notre temps (Lenine, Pink Martini, Chantons avec l’Orchestre à la Salle Inès Karsenty, 2e solo Craig Armstrong, Paolo Conte ou Pleyel ont réuni plusieurs milliers de Anne-Marie Arduini encore Nosfell). L’orchestre innove jeunes choristes. Benachir Boukhatem également et a créé, depuis une Frédéric Gondot quinzaine d’années, une centaine Premiers violons supersolistes Catherine Méron de pièces contemporaines et un Ann-Estelle Médouze Lilla Michel-Peron festival, Île de découvertes, dont la Alexis Cardenas François Riou quatrième édition aura lieu à David Vainsot Cergy-Pontoise en mai 2012. Violons solos L’Orchestre est très engagé dans la Stefan Rodescu Violoncelles promotion et la création d’œuvres Bernard Le Monnier Frédéric Dupuis, 1er solo pour le jeune public. Une collection Anne-Marie Rochard, co-soliste de livres-disques, en collaboration Violons Bertrand Braillard, 2e solo avec Le Chant du Monde, a été Jean-Michel Jalinière, chef Jean-Marie Gabard, 2e solo lancée en avril 2010. Robert le cochon d’attaque Béatrice Chirinian et La Princesse Kofoni, commandés Flore Nicquevert, chef d’attaque Jean-Michel Chrétien et créés par l’Orchestre, en Maryse Thiery, 2e solo Sébastien Hurtaud

12 Camilo Peralta Bassons Bernard Vandenbroucque Henri Lescourret, 1er solo Nn Frédéric Bouteille, co-soliste Gwendal Villeloup Contrebasses Robert Pelatan, 1er solo Contrebasson Didier Goury, co-soliste Cyril Exposito Pierre Maindive, 2e solo Jean-Philippe Vo Dinh, 2e solo Cors Philippe Bonnefond Robin Paillette, 1er solo Tom Gélineaud Tristan Aragau, co-soliste Florian Godard Marianne Tilquin Pierre Herbaux Jean-Pierre Saint-Dizier Annouck Eudeline Flûtes Hélène Giraud, 1er solo Trompettes Sabine Raynaud, co-soliste Yohan Chetail, 1er solo Pierre Blazy Nadine Schneider, co-soliste Patrick Lagorce Piccolo Pierre Grefin Nathalie Rozat Trombones Hautbois Patrick Hanss, 1er solo Jean-Michel Penot, 1er solo Laurent Madeuf, 1er solo Jean-Philippe Thiébaut, co-soliste Matthieu Dubray Hélène Gueuret Sylvain Delvaux

Cor anglais Contretuba/tuba basse Marianne Legendre André Gilbert

Clarinettes Timbales Jean-Claude Falietti, 1er solo Jacques Deshaulle Myriam Carrier, co-soliste Percussions Clarinette basse Georgi Varbanov Benjamin Duthoit Gérard Deléger Pascal Chapelon Petite clarinette Didier Keck Sandrine Vasseur Harpe Florence Dumont

13 EXPOSITION Arts Graphiques Francede Imprimeur:

licences n° 757541, 757542, 757543 licences757542, 757541, n° • • Russie Saint-Pétersbourg,Musée d’Histoire Politique dela R • • R Staline, D © 1945 Exposition au • Musée de la musique du 12 octobre 2010 © Photos © Lénine, : 1919

au 16 janvier 2011 wa75 • Billet-coupe file en vente sur www.citedelamusique.fr Nocturne le vendredi 22

jusqu’à heures LaurentMészáros Porte de Pantin

Exposition organisée dans le cadre de l’Année France-Russie 2010 Conceptiongraphique : Cité de la musique www.citedelamusique.fr 01 44 84 44 84

14 Et aussi…

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Cycle Les musiciens de Brecht SAMEDI 4 DÉCEMBRE 2010, 20H En écho à ce concert, nous vous proposons… VENDREDI 5 NOVEMBRE, 20H Sergueï Prokoiev Nada Strancar chante Brecht / Dessau Cinq Mélodies Sur le site Internet Sonate n° 1 pour violon et piano op. 80 http://mediatheque.cite-musique.fr Nada Strancar, chant Leoš Janácek François Martin, piano, direction Sonate … d’écouter un extrait dans Jean-Luc Manca, accordéon Maurice Ravel les « Concerts » : Guillaume Blaise, percussions Sonate pour violon et piano Dix poèmes sur des textes de poètes révolutionnaires op. 88 pour chœur MERCREDI 10 NOVEMBRE, 20H Vadim Repin, violon mixte a cappella de Dmitri Boris Berezovsky, piano Chostakovitch par le Chœur Œuvres de Kurt Weill, HK Gruber Accentus, Laurence Equilbey, DIMANCHE 5 DÉCEMBRE 2010, 15H direction, enregistré à la Cité de la Orchestre Philharmonique musique en mars 2008 • Symphonie de Radio France Piotr Ilitch Tchaïkovski de chambre de Dmitri Chostakovitch Chœur de Radio France La Belle au bois dormant par le Chamber Orchestra of Europe, HK Gruber, direction Sergueï Prokoiev Heinz Holliger, direction, enregistré Hakan Hardenberger, trompette Pierre et le Loup à la Cité de la musique en 1996. Matthias Brauer, chef de chœur Tchaikovsky Symphony Orchestra (Les concerts sont accessibles dans leur SAMEDI 13 NOVEMBRE, 20H Vladimir Fedoseyev, direction intégralité à la Médiathèque de la Cité Marie-Christine Barrault, récitante de la musique.) Œuvres de Paul Hindemith, Kurt Weill, Hanns Eisler, Heiner > À la médiathèque

Goebbels > MUSÉE … de lire : Ensemble Intercontemporain Des visites-ateliers sont proposées Dimitri Chostakovitch par Krzysztof Perter Rundel, direction le samedi et pendant les vacances Meyer Dagmar Manzel, voix scolaires Les Musiques de ilm, … de regarder : DIMANCHE 14 NOVEMBRE, 16H30 pour les 7 à11 ans Octobre de Sergueï Eisenstein • Cette visite propose d’explorer Dmitri Chostakovitch : le chemin Dialogues d’exilés lors d’un parcours dans le Musée de la vérité dans Orchestral music les liens existant entre la musique in the 20th century : leaving home, Œuvres de Mauricio Kagel et extraits et le cinéma et de découvrir, grâce a conducted tour by Sir Simon Rattle, de Dialogues de au 7e art, d’autres facettes de City of Birmingham Symphony l’univers musical. Un atelier permet Orchestra • Dimitri Chostakovitch, Solistes de l’Ensemble ensuite de créer la musique d’un Chants et danses de la mort, la leçon intercontemporain extrait de ilm. de musique de Jean-François Zygel Jörn Cambreleng, Vincent Nemeth,

récitants 1014849, 1013248, 1013252 Les mercredis 27 octobre, … de consulter la partition : o 3 novembre, mercredi 22 et La nouvelle Babylone de Dmitri mardi 28 décembre, Chostakovitch mardi 22 février – mercredi 2 mars, mercredi 20 et vendredi > ÉDITIONS 29 avril, de 14h30 à 16h30 Catalogue d’exposition : Lénine, > CITÉSCOPIE Staline et la musique

256 pages • 2010 • 39 € Imprimeur FOT | Imprimeur BAF | Licences n Dmitri Chostakovitch Collectif : Musique et utopies Samedi 8 et dimanche 9 janvier 154 pages • 2010 • 19 €

Éditeur : Hugues de Saint Simon | Rédacteur en chef : Pascal Huynh | Rédactrice : Gaëlle Plasseraud | Maquette : Ariane Fermont | Stagiaire : Léa Demillac