UNIVERSITE IV - SORBONNE ECOLE DOCTORALE IV – Civilisations, cultures, littératures et sociétés

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THESE

Pour obtenir le grade de

DOCTEUR DE L’UNIVERSITE PARIS IV

Discipline : Études romanes (Espagnol)

Présentée et soutenue publiquement par

Soline JOLLIET Le 22 / 11 / 2008

Titre :

LE MÉTALANGAGE DES POÈTES DITS DE 27 : « UN MÊME IDIOME » ?

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Directeur de Thèse : Madame le Professeur Denise BOYER ______

JURY

Mme le Professeur Denise Boyer (Université Paris-Sorbonne) M. le Professeur Henry Gil (Université de Poitiers) Mme le Professeur Bénédicte Mathios (Université de Clermont-Ferrand) M. le Professeur Pierre Thiollière (Université de Besançon) Mme le Professeur Marie-Claire Zimmermann (Université Paris-Sorbonne) Avant-propos 1



Je remercie Mme Denise Boyer pour ses précieux conseils. Je suis également reconnaissante à mes collègues de l’Université d’Angers ainsi qu’à Cyril et Ivonne pour leurs encouragements. Avant-propos 2

                     EE        FFF  Avant-propos 3

Alrededor de una mesa fraternizan,se comprenden, hablan el mismo idioma : el de su generación. A la hora de la verdad, frente a la página blanca, cada uno va a revelarse con pluma distinta. Jorge Guillén, «Una generación»

Siempre es interesante lo que escribe un poeta sobre poesía, sobre la suya propia o sobre la ajena. , « »

Comprenderás que un poeta no puede decir nada de la Poesía. Federico García Lorca, « De viva voz a » Avant-propos 4

  

INTRODUCTION p. 6

Première partie: Le métalangage du poète: parler du poète en poésie p. 32

Introduction p. 33 1- Dámaso Alonso p. 38 2- Federico García Lorca p. 45 3- Gerardo Diego p. 59 4- Pedro Salinas p. 83 5- Rafael Alberti p. 88 6- p. 96 7- Vicente Aleixandre p. 101 8- Luis Cernuda p. 106 9- Manuel Altolaguirre p. 113 10- Jorge Guillén p. 119 Conclusion p. 124 Annexes : Tableaux p. 137

Deuxième partie : Le métalangage du poème : parler du poème dans le poème p. 152

Introduction p. 153 1- Dámaso Alonso p. 154 2- Federico García Lorca p. 166 3- Gerardo Diego p. 177 4- Pedro Salinas p. 188 5- Rafael Alberti p. 192 6- Emilio Prados p. 195 7- Vicente Aleixandre p. 200 8- Luis Cernuda p. 201 9- Manuel Altolaguirre p. 207 10- Jorge Guillén p. 209 Conclusion p. 211 Annexes : Tableaux p. 222

Troisième partie : Le métalangage de la poésie : parler de la poésie en poésie p. 234

Introduction p. 235 1- Dámaso Alonso p. 236 2- Federico García Lorca p. 244 3- Gerardo Diego p. 252 4- Pedro Salinas p. 260 5- Rafael Alberti p. 263 Avant-propos 5

6- Emilio Prados p. 266 7- Vicente Aleixandre p. 267 8- Luis Cernuda p. 270 9- Manuel Altolaguirre p. 272 10- Jorge Guillén p. 276 Conclusion p. 279 Annexes : Tableaux p. 288

CONCLUSION p. 291

GLOSSAIRES p. 315

1- Rafael Alberti p. 316 2- Vicente Aleixandre p. 323 3- Dámaso Alonso p. 326 4- Manuel Altolaguirre p. 335 5- Luis Cernuda p. 341 6- Gerardo Diego p. 345 7- Federico García Lorca p. 367 8- Jorge Guillén p. 385 9- Emilio Prados p. 390 10- Pedro salinas p. 394

BIBLIOGRAPHIE p. 398

TABLE DES MATIÈRES p. 411 Introduction 6

 Introduction 7

Ce travail est consacré à l’étude du métalangage interne de dix poètes majeurs1 de la génération dite de 27. Son objet est de déterminer le degré de cohésion entre ces différents métalangages, et l’hypothèse de recherche est qu’il est suffisamment élevé pour qu’on puisse considérer que ce groupe amical aux rapports relativement étroits constitue, sinon une génération, du moins un groupe qui aurait parlé, en matière de poésie, un « même idiome »2 ou du moins un « langage générationnel »3.

1 Rafael Alberti, Vicente Aleixandre, Dámaso Alonso, Manuel Altolaguirre, Luis Cernuda, Gerardo Diego, Federico García Lorca, Jorge Guillén, Emilio Prados, et Pedro Salinas 2 Alrededor de una mesa fraternizan,se comprenden, hablan el mismo idioma : el de su generación. A la hora de la verdad, frente a la página blanca, cada uno va a revelarse con pluma distinta. Jorge Guillén, «Una generación». 3 Examinemos las condiciones necesarias, según este autor [Petersen, Las generaciones literarias], para que pueda darse como existente une generación literaria, lo que él llama sus elementos constitutivos, sin los cuales, o por lo menos sin la mayoría de los cuales, no puede existir. Es el primero, naturalmente, la coincidencia en nacimiento en el mismo año o en años muy poco distantes. (p. 28) [...] Otro elemento constituyente indispensable para la existencia de una generación es lo que llama Petersen los elementos formativos. Eso es: la homogeneidad de educación, en el sentido más lato, de fuerzas concurrentes a la especial modelación mental del individuo, en que se desarrolla un grupo nacido en los mismos años. [...] Pero si se aguza la atención caemos en la cuenta de que hay una profunda unidad en el modo como se formaron los espíritus de estos hombres: su coincidencia en el autodidactismo. [...] El trato humano, las relaciones personales entre los hombres de la generación, es otro de los elementos que la constituyen, según Petersen. (p. 29) [...] Sobre estos factores hay otro, el decisivo e indispensable para poder decir que existe una generación: lo que Petersen llama acontecimiento o experiencia generacional. Es un hecho histórico de tal importancia que, cayendo sobre un grupo humano, opera como un aglutinante y crea un estado de conciencia colectivo, determinando la generación que de él sale. (p. 30) [...] Indispensable es también, según Petersen, para que exista una generación, que se dé un “lenguaje generacional”, entendiendo el lenguaje en su acepción más amplia. [...] Por último, cita Petersen lo que denomina el anquilosamiento o parálisis de la generación anterior. (p. 32) (Pedro Salinas, “El concepto de generación literaria aplicado a la del 98”, Discours prononcé le 6 décembre 1935 à lors d’une réunion du PEN Club. Literatura española siglo XX, Alianza, 1970). Introduction 8

1- Le métalangage

On entendra ici par métalangage4 l’ensemble des termes renvoyant au langage dans un corpus donné. Ce travail concernera donc le métalangage présent dans le texte poétique, autrement dit, si l’on se fonde sur la définition de Josette Rey- Debove, à savoir que le métalangage est le « langage qui parle du langage »5, on s’efforcera d’analyser comment le texte poétique parle du langage poétique, donc de lui-même, et il s’agira d’étudier, comme le dit Salinas dans La realidad y el poeta, la poésie sur la poésie: Junto a la poesía sobre el árbol o el crepúsculo hay una poesía sobre la poesía, sobre el arte mismo6. On distinguera ici deux types de métalangage. D’abord, le métalangage que l’on a choisi d’appeler « interne »7, c’est-à-dire celui qui figure dans les différentes œuvres poétiques. Les glossaires que l’on a établis et qui recensent les termes parlant du langage poétique font état de la présence effective d’un métalangage interne au texte littéraire. Le deuxième est le métalangage que l’on a choisi d’appeler « externe »8, par opposition au premier ; il se trouve à l’extérieur du texte poétique, par exemple dans les essais théoriques, les textes critiques, les articles, les entrevues9 des poètes étudiés. On utilisera le métalangage externe dont on a pris

4 On reproduit ici la définition de R. Jakobson dans Dictionnaire de la linguistique, pp. 212-213) : Métalangage ou Métalangue : C- Chez Jakobson, la fonction métalinguistique* a le même sens : c’est celle qui permet de parler du langage au moyen du langage. Dire que requérir est un verbe irrégulier est du métalangage. 5 Josette REY-DEBOVE, Le métalangage, p. VI. 6 1976, p. 31. 7 C’est le choix terminologique que l’on a fait pour nommer ce métalangage mais on pourrait employer d’autres adjectifs: « réflexif » ou « immanent » ou « intrinsèque » ou « au premier degré ». 8 On pouvait aussi le nommer: «critique» ou «transcendant» ou «extrinsèque» ou «au second degré». 9 T. S. Eliot souligne son importance dans « The Music of Poetry » : I believe that the critical writings of poets, of which in the past there have been some very distinguished examples, owe a great deal of their interest to the fact that the poet, at the back of his mind, if not as the ostensible purpose, is always trying to defend the kind of poetry he is writing, or to formulate the kind that he wants to write. Especially when he is young, and actively engaged in battling for the kind of poetry which he practises, he sees the poetry of the past in relation to his own, and his gratitude to those dead poets from whom he has learned, as well as his indifference to those whose aims have been alien to his own, may be exaggerated. He is not so much a judge as an advocate. His knowledge even is likely to be partial : for his studies will have led him to concentrate on certain authors to the neglect of others. When he theorizes about poetic creation, he is likely to be generalizing one type of experience ; [...] What he writes about poetry, in short, must be assessed in relation to the poetry he writes. T. S. ELIOT, « The Music of Poetry » (1942), On Poetry and Poets, 1969, p. 26. Introduction 9 connaissance, mais que l’on n’étudiera pas ici, pour éclairer le métalangage interne de chaque poète10. Le concept de métalangage, comme le rappelle Philippe Hamon, en retraçant brièvement son évolution et ses diverses acceptions11 au début de son article « Texte littéraire et métalangage »12, vient d’abord de la logique puis a été appliqué au domaine linguistique : La notion de métalangage, telle qu’elle s’est élaborée dans le champ linguistique ces dernières années, vient essentiellement de la logique. Si la plupart des auteurs qui l’ont utilisée en font une propriété fondamentale et spécifique des langues naturelles (la langue peut parler non seulement du monde, mais aussi d’elle-même : le mot « dictionnaire » est dans le dictionnaire), cette notion, cependant, et à prendre les textes théoriques les plus importants (L. Hjelmslev, R. Jakobson, E. Benveniste), est loin d’être « située » de façon identique. Chez Hjelmslev, elle est élaborée au sein d’un couple à deux composantes, métalangage et langage de connotation : « il existe (…) des langages dont le plan de l’expression est un langage et d’autres dont le plan du contenu est un langage. Nous appellerons les premiers langages de connotation et les seconds métalangages13 » ; « la linguistique, par exemple, est un métalangage14 ». Chez certains linguistes ou logiciens, le métalangage ne saurait être une donnée des langues naturelles, mais est une langue artificielle construite (batteries de règles, procédures de réécritures, notations symboliques, modèles mathématiques, etc.). En revanche, chez R. Jakobson, le modèle de Bühler, élargi pour faire entrer les paramètres de l’œuvre (Fonction poétique) et du système (Fonction métalinguistique) situe le métalangage au sein d’un modèle hexafonctionnel du langage15, et n’est pas tant considéré comme une opération spécifique et particulière liée à certaines professions hautement spécialisées (discours du critique littéraire, du linguistique, du lexicologue, du logicien, de l’herméneute, etc.) que comme une opération fondamentale, mais « banale », déprofessionnalisée, du langage quotidien : « l’interprétation métalinguistique des messages, au moyen de paraphrases, de synonymes, ou par la traduction effective du message dans une autre langue ou même dans un système de signes différents, joue un rôle énorme (…). Ces propositions équationnelles occupent une place importante dans le corpus total des énoncés, et, au même titre que tous les spécimens d’un corpus donné, elles peuvent être soumises à l’analyse distributionnelle (est-il dit, et dans quel contexte, que « A est B », que « B est A », et/ou que « A n’est pas B » et « B n’est pas A » ?)16. L’intérêt de la réflexion de R. Jakobson est qu’elle se porte immédiatement sur ce qui constitue vraisemblablement les concepts clés d’une approche de la notion de métalangage, la notion d’embrayage Code- Message, d’une part17, et la notion d’équivalence (qui n’est pas réductible à la simple synonymie) d’autre part.

10 Le métalangage incorporé au texte poétique est l’objet de cette étude. Le métalangage présent dans les textes critiques pourra venir confirmer, nuancer, enrichir ou infirmer les conclusions auxquelles on aboutira dans l’étude du premier métalangage. Il apparaîtra en note. 11 Dans Le métalangage Josette Rey-Debove consacre aussi quelques pages à l’histoire de la problématique du métalangage (pp. 4-7). 12 Dans Poétique, n°31, 1977, pp. 261-284. C’est un article sur leq uel on se fondera, puisqu’il met en relation directe le métalangage et le texte littéraire, pour déterminer les outils d’analyse et la démarche que l’on adoptera pour mener à terme ce travail. 13 Prolégomènes à une théorie du langage, texte de 1943, traduction française, Paris, Minuit, 1968, p. 155. 14 Ibid. p. 161. 15 Ou heptafonctionnel si l’on se réfère à la définition de l’« énonciation » donnée dans le Gradus (pp. 182-183) : fonction émotive ou expressive, fonction « phatique », fonction conative ou injonctive, fonction de situation, fonction dénotative ou référentielle, fonction métalinguistique et fonction poétique. 16 Essais de linguistique générale, traduction française, Paris, Minuit, 1963, p. 204. 17 Ibid. Chapitre IX.