Line Renaud Une histoire de Line Renaud Une histoire de France Un film de Philippe Kohly

Une coproduction : ARTE France, Ina Entreprise (Christiane Graziani), LM Productions (Michel Boucau) (2005-90 mn)

Lundi 19 décembre 2005 à 22h30 dans «Grand format» n croit tout connaître de Line Renaud, cette présence familière de la télévision, qu’elle vienne animer des soirées contre le OSida ou soit la vedette de téléfilms. On sait aussi qu’elle est comédienne au théâtre et qu’elle fut une grande meneuse de revue. Mais qui peut vraiment imaginer sa carrière américaine, ses 10 années de succès à Las Vegas aux côtés de Frank Sinatra, Louis Armstrong, ? Et qui se souvient qu’elle fut dès 1949 la grande vedette de la chanson en France? Line a eu 4 vies successives. Etonnante histoire, parcours unique – qui traverse 6 décennies, 2 continents, 3 formes de spectacle – sur lequel ce film lève la totalité du voile au moyen de nombreux documents inédits. Un grand portrait qui est aussi le roman chaleureux, émouvant d’une petite fille du Nord qui «voulait voir ailleurs» et qui, à 77 ans, a gardé, intact, son désir. Line Renaud Quelques repères biographiques

Loulou Gasté À 17 ans, Jacqueline a pris la chanson au sérieux. En 1944-45, elle est devenue Jacqueline Ray, chanteuse réaliste, à la radio et dans les cabarets de Lille. Mais son instinct lui dit que la clé du destin se trouve à Paris et qu’elle s’appelle Loulou Gasté, un composi- teur dont elle est tombée amoureuse en Le Nord entendant ses succès à la TSF. Line Renaud est née Jacqueline Ente, le 2 Elle ne connaît ni l’âge ni le juillet 1928, à Pont-de-Nieppe, près visage de cet homme d’Armentières, dans un village de corons à la qui est alors une frontière belge. Son histoire est celle d’une vraie vedette, fille de la France d’en-bas. Issue d’un milieu mais elle aime trop populaire, elle restera fidèle à ses racines et violemment ses chansons : gagnera d’emblée et pour toujours le cœur du pour elle, il est, il sera, le public. La mère, Simone, est secrétaire dans magicien qui révélera son une filature. Le père, Edmond, est camion- destin. Il l’aimera et deviendra neur. Il joue du piston dans la fanfare muni- son mari! Scénario impossible entre cipale; il est volage, porté sur la boisson. Il une gamine de 18 ans qui débarque n’est pas fiable. Ce sont les femmes de la de son café ouvrier et un bourgeois lignée maternelle - sa mère, sa grand-mère, de 39 ans mais qui s’incarnera à la son arrière-grand-mère - qui sont solides et lettre dans la réalité! transmettent à Jacqueline des valeurs (de silencieux courage, de travail, d’amour de la vie). Ces femmes sont des modèles mais elles ont accepté leur sort. Ce sont des rési- Entre l’éblouissement gnées. Jacqueline ne fera pas comme elles. de la découverte de notre Partir, aller voir ailleurs, devient son idée fixe. En attendant, la chanson lui assure l’amour de amour et le succès qui la famille. Dès l’âge de 7 ans, elle chante dans commençait à venir, Loulou les fêtes de famille puis en 1939-40, pour les et moi vivions dans une soldats, dans le café de sa grand-mère. atmosphère survoltée et merveilleuse. Line Renaud La chanson 1949, c’est l’année de Ma Cabane au Canada, une ballade naïve que Loulou a composée pour cette apprentie chanteuse qu’il forme secrète- ment et sans relâche depuis deux ans : Line Renaud. Le 78 tours se vend à 1.300.000 exem- plaires et fait de la débutante de 21 ans la chan- teuse la plus populaire du pays. La voici grande vedette de la chanson, place qu’elle gardera jus- qu’en 1958, en France mais aussi à l’étranger (Angleterre, Italie, Espagne, pays scandi- naves). Suivront Le soir, Le Bal aux Baléares, Toi ma p’tite folie, Le chien dans la vitrine, Un amour d’été, Mister Banjo… La grande histoire de Line Renaud avec les Français est celle des années 50 au temps de la femme au foyer, de la cuisinière à charbon... La France découvre alors le frigidaire, la 4CV, le transistor. Les chansons de Line reflètent la cou- leur du temps, sa voix d’or apporte du tonus et promet du bonheur au pays qui doit reconstruire.

Les revues 1959 : la vague yé-yé déferle et Line, vedette depuis 10 ans, est une vieille chanteuse de 30 ans ! Elle choisit (contre le gré de Loulou Gasté) de changer de peau, de «se mettre hors concours» en menant une revue créée pour elle au Casino de Paris : Plaisirs. Line ne sait pas danser comme Joséphine Baker, elle n’a pas la gouaille de Mistinguett, mais – avec de tout autres atouts - elle devient la 3ème et dernière grande meneuse de revue Je fonce droit devant moi. du siècle. Sa vie est alors une J’ai la santé et le désir d’aller chaîne d’exploits (sprint de chaque soir, marathon au fil toujours plus loin. Depuis mon des mois) qui, à la millième enfance, j’ai travaillé, avec de Plaisirs en 1963, compte- la volonté de bousculer la vie. ra 358 OOO marches, 18 Line Renaud 000 changements de cos- tumes…Vie de fête, vie de bagne qui n’est pas pour déplaire à cet ath- lète de la chanson qui ne s’épanouit que dans les missions impossibles. L’Amérique et Las Vegas elle explose dans son personnage de Folle Amanda et reçoit l’archange de la meilleure Dès 1955, Line démarre une carrière aux Etats- comédienne. Un changement de peau dans Unis. Elle se produit dans les plus grands shows lequel elle exorcise ses angoisses : Folle télévisés de l’époque (, Bob Amanda est l’histoire d’une chanteuse, célèbre il Hope, Ed Sullivan) et chante en duo avec notam- y a 20 ans, qui vit dans le souvenir de son heure ment Dean Martin. En 1963, le nouvel exploit de gloire, et dont l’imprésario s’appelle Loulou! sera d’imposer son nouveau personnage en Pleins Feux (pièce américaine, qu’elle fait adap- Amérique : elle accepte d’être meneuse de revue ter par Didier Kaminka), La Visite de la Vieille à Las Vegas. De 1963 à 1969, Line mène deux Dame (de Friedrich Dürrenmatt), Poste revues à l’hôtel casino Dune’s. La voici star dans Restante: Line jouera quatre pièces en 20 ans. la capitale mondiale du spectacle : son nom s’af- fiche aussi haut que celui de Louis Armstrong, Frank Sinatra ou Nat King Cole… La lutte contre le Sida 1985, le Sida se mêle à la vie de la comédienne La production qui a perdu plusieurs amis et crée la toute pre- mière association contre le nouveau fléau, 1969 marque un virage : Line n’en peut plus l’AACS. Une association, qui est tout sauf un d’être chaque soir sur la scène, elle est saturée «coup» pour Line : chaque année, des jours et de music hall et vit séparée de Loulou. De part et des jours de travail avec une équipe initialement d’autre de l’Atlantique, chacun a sa vie. Line réduite à trois personnes. 20 ans après, elle devient productrice américaine et envisage de continue son combat au sein du Sidaction dont vivre aux Etats-Unis entre Las Vegas, Los elle est aujourd’hui la vice-présidente. Angeles et Miami où elle monte des shows musicaux. La France ou l’Amérique? Pendant trois ans, elle s’interroge. Line, l’actrice 1995, la comédienne de théâtre devient actrice Paris-Line de cinéma. Elle a déjà eu un rôle marquant dans 1972, elle a choisi la France, une nouvelle vie J’ai pas sommeil de Claire Denis et s’apprête à avec Loulou Gasté. Dans la carrière de Line, ces recommencer dans Belle Maman (une lesbien- années 70, qui mènent vers la cinquantaine, sont ne) et Chaos (mère dépressive). Line cherche à la décennie difficile. La France d’après 68 n’est explorer de nouvelles facettes, quitte à maltraiter plus celle de la reconstruction et Line ne sait pas joyeusement son image. Cette liberté elle la qui sont ces Français ni ce qu’elle représente trouve enfin à la télévision où après de nom- pour les enfants de son premier public. Elle breux téléfilms écrits sur mesure, (femme d’ac- entreprend une revue itinérante, puis, alors tion, chef d’entreprise, pilier de la famille, qu’elle avait tiré un trait sur le Casino de Paris, la avocate…) elle explore avec Suzie Berton de voici qui accepte d’y mener une nouvelle revue, toutes les facettes d’un vrai per- Paris-Line, nouveau bail de quatre ans. Cette sonnage : une grande menteuse, une magistra- Line-là, qui depuis bientôt 20 ans descend le le ambiguë. Téléfilms, cinéma, théâtre, les grand escalier et lève toujours la jambe à 50 ans, projets de Line sont nombreux, mais une chose est une proie en or pour les sketches de Thierry est sûre: elle n’entend pas marcher longtemps Le Luron. sur les mêmes brisées. Encore une fois, elle changera de peau : une nouvelle Line ravivera sa présence familière. C’est ainsi qu’au bout de Le théâtre 60 ans, son histoire avec les Français reste tou- 1981, Line change de peau. Elle quitte le jours jeune. monde de la revue, elle ne chante plus et s’en- gage sur une autre scène, le théâtre. D’emblée,

Note du réalisateur

J’ai toujours eu le désir de réaliser un J’attendais beaucoup des Discoramas des portrait de Line Renaud. Petit garçon, années 60, ces longs face à face avec Denise je m’étais chauffé au soleil et à l’amitié Glaser qui furent une mine d’or pour le portrait de sa voix «américaine». La chanteuse de Dalida. L’attente fut déçue. Jusqu’à m’aper- fut une des fées de mon enfance. cevoir, de document en document, qu’avant l’âge de 50 ans, Line n’avait pas donné d’inter- Devenu réalisateur, avide de «portraits- view vraiment intéressante ! En revanche, pas- romans», je me trouvais en face d’une sée la cinquantaine, sa parole se libère : une femme de spectacle dont le chemin personne est là tout d’un coup, qui pèse de traverse six décennies, plusieurs plus en plus lourd, jusqu’à dominer par sa formes d’expression, et dont l’histoire liberté d’allure les plateaux auxquels elle parti- se confond avec une histoire des cipe! Français. Bref, un chantier en or, mais La cinquantaine : le moment où Line quitte le dont j’avais sous-estimé les difficultés. monde de la chanson et les tutelles, les attentes qu’elle subissait, pour aller vers le a première tenait à la dramaturgie. théâtre qui est son choix, son défi personnel. Celle-ci allait de soi dans les portraits Le sens du portrait apparaissait : le chemin L que j’avais réalisés de Dalida ou est celui d’une autonomie croissante, d’une Barbara. Leur chemin se place sous le signe conquête de sa liberté. Line Renaud, à l’heure du tragique, de l’autodestruction. Tandis que du diktat de l’image, se moque de son propre Line est leur exact contraire, une «autocons- vieillissement : elle va du personnage à la tructrice»! Le bonheur n’a pas d’histoire et il personne. L’image physique justement confir- n’est pas évident de marier l’intensité drama- mait ce parcours intérieur. Sur les documents, tique avec une démache positive. Cette Line fait beaucoup plus jeune à 60 ans qu’à 50 démarche heureusement offrait quatre méta- ou même à 40 ans ! On voit vivre chez la morphoses, quatre tournants majeurs qui comédienne, quand elle aborde la soixantaine, dotaient le film d’une colonne vertébrale une allégresse, une légèreté, une ardeur de solide. Car Line s’est offert le luxe de jeune fille ! Rajeunir en vieillissant ce changer quatre fois de peau. n’est pas le moindre paradoxe du person- Performance unique au pays des étiquettes nage. définitives (la France), dont le monde du Le répertoire de la chanteuse était un autre spectacle n’offre pas d’autre exemple. La sujet d’étonnement. Quand on la voit chanter, deuxième difficulté tenait à l’abondance des avec tant d’aisance, des chansons aussi diffé- documents : 676 références «Line Renaud» rentes que Buona Sera ou Le plat pays de à l’Ina… Oui, je l’ai souvent maudite d’avoir Jacques Brel, la question surgit : pourquoi fait tant de «Midi Trente» avec Danièle Line Renaud n’a-t-elle chanté qu’un seul et Gilbert ! C’est l’examen des documents unique compositeur, Loulou Gasté (grande pourtant (le maniement du temps) qui de lui- vedette des années 40) ? Pourquoi n’a-t-elle même a dégagé les vérités du portrait. A tra- pas chanté Charles Aznavour ou Serge vers les interviews de Line par exemple. Gainsbourg ? Pourquoi n’a-t-elle pas emprunté aux chanteuses américaines, de Peggy Lee à Ella Fitzgerald? La réponse tient en un mot : fidélité. La chanteuse était la femme de son compositeur, Loulou, et celui-ci Le talent n’est pas une était d’un naturel jaloux. Line Renaud n’a pas question d’âge. Le voulu lui faire de peine. La femme a gouverné talent c’est d’être bien la carrière de la chanteuse. Vouloir s’accom- dans sa peau, d’être plir, changer de peau, tout en restant fidèle : heureux de ce que l’on Line n’est pas avare de contradictions. A la fait, d’accrocher des voir sur les documents porter cinq revues pen- ailes à son coeur. dant 20 ans on sent de quelle trempe est ce soldat (douze jours de relâche parfois sur Line Renaud quatre années et pas une seule défaillance !) et puis, à la connaître, on découvre une fêtar- de qui en fait arpentait les boîtes de nuit et les pistes de danse tout en assumant chaque soir la revue! Double caractère qui s’explique dans un autre trait : une insomniaque. Line ne dort pas ou peu. Cette femme qui réconforte et offre du bonheur est une anxieuse. Elle semble toujours tout entière investie dans l’instant et sans cesse elle pense à ce qu’elle fera dans six mois ou dans cinq ans. Il y a toujours, pour elle, péril en la demeure ! C’est ainsi qu’elle est devenue ce stratège qui a forgé elle-même ses person- nages successifs (achetant les droits de pièces de théâtre, développant des sujets de téléfilms, allant à la rencontre des réalisateurs…). Ce portrait de Line Renaud, femme de spectacle, est donc celui d’une lente et vertigineuse mutation permanente : un abîme sépare la chanteuse des années 50 – la bonne petite Française, tonique, saine, décou- rageante de bonne humeur – de la comédien- ne qui se plaît au cinéma à être une mère lesbienne (Belle Maman) ou qui au théâtre, incarne la figure de la vengeance (La Visite de la Vieille Dame). Cet abîme donne la mesure du temps mais surtout il matérialise un phéno- mène de vie, Line Renaud, un personnage qui n’est jamais installé, et qui, à 77 ans, est toujours en devenir !

Line Renaud, une femme au cœur de la vie, qui instinctivement a pris pour maxime la phrase de Lampedusa : «Il faut que tout change pour que tout demeure pareil».

Philippe Kohly

Fiche technique Le réalisateur Philippe Kohly Auteur-réalisateur Philippe Kohly Montage Dernières réalisations Christiane Lack Directeur artistique Portraits Hervé Saouzanet Image Dalida, le grand voyage Arnaud Stefani 1997 – 123 mn Production : Ina Entreprise / ARTE Voix Barbara, je chante ma vie Christine Gagnieux 1999 – 77 mn Production : Pierre Bouteiller Productions, INA Entreprise, Tournage extérieur RTBF / ARTE, France 5 Stanislas Graziani Françoise Giroud Son 2003 – 54 mn Production : Cinétévé / France 2, France 5 Laurent Schwartz Matisse- Picasso Illustration musicale 2002 59 mn Production : Les Films d’Ici / France 3, France 5 Sébastien Bonneau (Justement Music) Jacques-Henri Lartigue Niels Poux 1999 – 56 minutes Production : Cinétévé / France 3, France 2, France 5 Documentalistes Patricia Highsmith Gwen Michel 1997 – 46 mn Production : Anabase, TSR / France 3 «Un siècle d’écri- Marie-Nicole Feret vains» Conformation et étalonnage Le mystère Anquetil Isabelle Laclau 1997 55 mn Production : Compagnie des Phares et Balises / France 2 / Mixage Palme d’argent Festival de Palerme 1997 Benoît Fort Merckx – Ocana Coproduction 2004 – 53 mn Production : Ethan (Marc Silvera) / ARTE ARTE France Unité de Programme L’ambition d’une famille Thierry Garrel (les Servan-Schreiber) Pierrette Ominetti 2002 – 90 mn Production Cinétévé / ARTE Chargé de programmes Yvonne de Gaulle Pierre Merle 2001 – 53 mn Production : MFP / France 2 Ina Entreprise Producteur délégué Christiane Graziani Directeur de production Thierry Ippolito Autres LM Productions La chute de la maison Potin Coproducteur délégué 1997 Production : Compagnie des Phares et Balises / France 3, France Michel Boucau 5, Chaîne Histoire, Planète Administrateur Serge Massy Les Congés payés 1999 52 mn Production : Cinétévé / France 5

Avec la participation Le dos au mur 1999 90 mn Production : Capa TV / France 3, de France 2, et de TV 5, Grand prix Festival d’Angers 1998 RTBF,TSR Avec le soutien du CNC

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