Extrême-Orient Extrême-Occident

35 | 2013 Les astres et le destin. Astrologie et divination en Asie orientale Stars and fate. Astrology and divination in East Asia

Jean-Noël Robert et Pierre Marsone (dir.)

Édition électronique URL : http://journals.openedition.org/extremeorient/270 DOI : 10.4000/extremeorient.270 ISSN : 2108-7105

Éditeur Presses universitaires de Vincennes

Édition imprimée Date de publication : 1 mai 2013 ISBN : 978-2-84292-367-9 ISSN : 0754-5010

Référence électronique Jean-Noël Robert et Pierre Marsone (dir.), Extrême-Orient Extrême-Occident, 35 | 2013, « Les astres et le destin. Astrologie et divination en Asie orientale » [En ligne], mis en ligne le 01 mai 2015, consulté le 22 septembre 2020. URL : http://journals.openedition.org/extremeorient/270 ; DOI : https://doi.org/ 10.4000/extremeorient.270

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L’enseignement théorique et pratique de l’astrologie et de la divination constitue une tradition transmise depuis l’antiquité. Il forme un excellent domaine de recherche sur l’enseignement d’une science traditionnelle. Les civilisations de l’Inde et de l’Asie Orientale, par la variété de leurs langues et écritures comme par l’intensité de leurs croisements culturels, offrent un terrain d’investigation particulièrement riche. Les articles rassemblés ici visent à donner une vue globale des deux facettes de la transmission des techniques divinatoires : tradition et innovation. Alors que l’on ne tient compte d’ordinaire, en matière d’astrologie et d’arts divinatoires que d’une seule aire culturelle, ce numéro aborde à la fois la Chine et les cultures sinisées que sont la Corée, le Japon et le Viêtnam, l’Inde et le Cambodge indianisé, le Tibet, héritier de l’Inde, et la Mongolie, largement dépendante du Tibet culturellement. Cette diversification des angles permet de mettre en évidence de multiples transferts culturels : le Cambodge indianisé reprend des traditions calendériques chinoises, tout comme le Tibet, tandis que la Mongolie se forge une identité à partir des éléments qu’il reçoit du Tibet et de la Chine, sur la base de concepts propres plus anciens. On découvre l’usage politique de la divination, notamment par la fondation d’institutions officielles, ainsi que les surprenantes stratégies d’adaptation des arts divinatoires à l’époque moderne, que ce soit par le déguisement scientifique ou par le retour à l’identité nationale.

NOTE DE LA RÉDACTION

Numéro publié avec le soutien de l'UMR 8155 (CRCAO) et de l’association Nippon Koten Kenkyukai 日本古典研究会

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SOMMAIRE

Introduction Jean-Noël Robert

La relation de maître à disciple en question : transmission orale et écrite des savoirs divinatoires en Chine et à Taïwan Stéphanie Homola

Astrologues et devins du Koryŏ (918-1392) : une analyse de l’histoire officielle Yannick Bruneton

Les manuels de divination japonais au début de l’époque d’Edo (XVIIe siècle) : décloisonnement, compilation et vulgarisation Matthias Hayek

Astrology and Hemerology in Traditional Vietnam Alexei Volkov

Faculté de prévoir. L’astrologie dans les universités indiennes Caterina Guenzi

L’horoscope perdu des devins du Cambodge François Bizot

The Assimilation of Astrology in the Tibetan Religion Charles Ramble

By the Power of Eternal Heaven: The Meaning of Tenggeri to the Government of the Pre- Buddhist Mongols Brian Baumann

Regard extérieur

East (and South) Asian Traditions in Astrology and Divination as Viewed from the West Charles Burnett

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Introduction

Jean-Noël Robert

1 Au tout début, il avait été envisagé de consacrer ce recueil à une question plus générale : les méthodes de transmission du savoir traditionnel en Extrême-Orient considérées dans leur aspect transculturel. Les « trois doctrines » semblaient constituer en l’espèce une excellente matière ; le bouddhisme aurait permis de montrer comment un ensemble de pensée, de croyances et de pratiques passant de la Chine au Japon, extérieurement dans une même langue – le chinois classique – s’était trouvé engagé, en raison même de cette identité de surface, en un remaniement en profondeur qui lui assura une implantation peut-être plus solide dans l’ensemble de la société et de la culture japonaises qu’en Chine même ; comment le maintien d’une ferme distinction des traditions d’enseignement en écoles séparées, lesquelles finirent par fusionner entre elles en Chine, obligeait l’historien des doctrines bouddhiques à chercher dans l’archipel la suite de l’histoire doctrinale qui avait pris son essor sur le continent ; comment s’est maintenu, voire élaboré, au Japon, à partir de précédents chinois qui échappent à l’historien dans le détail, le procédé de la dispute scolastique, distinguée de la controverse entre sectes, écoles ou religions, selon des formes dont on ne trouve guère qu’au Tibet de frappantes analogies. De la même façon, la diffusion du confucianisme à travers le système des examens au Viêtnam et, pendant une période relativement brève, dans le Japon médiéval, ou encore à travers son intégration dans l’enseignement monastique bouddhique, puis dans le réseau des « académies » (juku) d’Edo, avant de faire partie du curriculum universitaire occidentalisé, aurait constitué un excellent sujet comparatif. Le taoïsme, enfin, aurait apporté le contraste très intéressant, si nous nous en tenons toujours à l’exemple japonais, d’une diffusion moins manifeste dans ses cheminements mais d’autant plus remarquable puisque, ne pouvant jouir dans la même mesure que le bouddhisme et le confucianisme des soutiens monastiques et académiques, il semble s’être propagé avant tout à la faveur du shintô, dont nombre de pratiques y feraient écho, mais aussi dans les traditions médicales. On aurait très certainement trouvé dans les autres pays sinisés des faits parallèles qui auraient permis l’élaboration d’un panorama général où l’on aurait aussi insisté sur les questions de l’enseignement de la langue chinoise classique et de son incorporation dans les différentes langues « locales ».

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2 Certaines circonstances ont cependant amené à changer assez rapidement l’orientation de départ. Bien qu’il ne fût pas question, à l’origine, d’accorder une attention particulière à l’astrologie ou à la divination, il est cependant vite apparu, lorsque l’on commença à passer en revue les possibles contributeurs à un recueil sur les méthodes d’enseignement traditionnel, qu’un assez grand nombre de chercheurs se consacraient à ces domaines dans une perspective voisine des thèmes qui étaient envisagés dans le contexte décrit plus haut. Bien mieux, de telles recherches étaient menées non seulement dans le monde sinisé, mais plus généralement dans l’ensemble du domaine asiatique qui s’étend de la Haute-Asie à l’Asie du Sud-Est, de la Mongolie au Cambodge, en passant par les aires culturelles indienne et tibétaine. Il apparut donc souhaitable de restreindre le thème tout en élargissant le périmètre concerné. Il faut bien évidemment prendre avec un grain de sel l’idée de « restreindre » le thème à l’astrologie et à la divination (avec en plus la science calendérique, inévitable compagne des deux arts), mais on comprendra aisément que le sujet ainsi redéfini paraisse plus abordable que la transmission des enseignements dans les trois doctrines. Un projet fut donc élaboré sous le titre provisoire virgilo-manilien Conscia fati sidera (« Les étoiles, qui connaissent le destin » ou « complices du destin »), et les points suivants proposés aux éventuels collaborateurs : • L’existence de centres distincts pour l’étude de l’astrologie, du calendrier ou de la divination. • L’inclusion de ces centres au sein d’institutions politiques ou religieuses plus vastes, ou leur indépendance de telles institutions. • Le statut de l’enseignement de ces arts : spécialisé ou inséré dans un curriculum plus large. • La langue de l’enseignement : existe-t-il une rivalité entre les langues d’enseignement (par exemple tibétain/mongol ou chinois/japonais), ou bien une gradation selon le niveau d’enseignement ? • L’existence de corpus écrits ou oraux et leur transmission. • La coexistence ou la concurrence de traditions différentes (tibétaine ou chinoise en Mongolie par exemple, ou bouddhiste et taoïste). • La diffusion de ces arts hors des institutions spécialisées : est-elle orale ou écrite, existe-t-il des corpus populaires ? Rôle des moines errants et des devins professionnels. • Les stratégies de survie et de transmission de ces savoirs traditionnels dans les sociétés modernes.

3 Alors qu’il était prévu d’accepter un maximum de six articles, pas moins de huit spécialistes acceptèrent de contribuer au recueil selon les thèmes proposés, et lorsque les articles arrivèrent, ce fut sans doute cette même joie qui avait jadis envahi Porphyre à la découverte de la structure parfaite des six fois neuf traités de son maître Plotin qui ravit cette fois les rédacteurs en découvrant que ces huit textes non seulement couvraient la plupart des grandes aires culturelles de l’Inde et de l’Asie Orientale, mais tissaient entre eux, pour la plupart, un réseau d’analogies qui devraient stimuler d’autres recherches. Partant du monde chinois, continental et insulaire, l’enquête se poursuit en effet dans la péninsule coréenne, au Japon et au Viêtnam, avant d’aborder l’autre foyer primordial, l’Inde, et l’un des plus anciens royaumes « hindouisés » de l’Asie du Sud-Est, le Cambodge, puis un dernier centre de rayonnement culturel, le Tibet, en finissant par le domaine mongol, qui a reçu du Tibet le bouddhisme et les arts indiens de l’astrologie et de la divination.

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4 Presque tous les auteurs ont accepté de traiter un certain nombre des thèmes proposés dans la présentation d’origine et donnent ainsi au lecteur quelques repères qui pourront être utiles dans le foisonnement de faits nouveaux qu’il trouvera ici, en même temps que des perspectives tout aussi innovantes. On devrait s’apercevoir aussi que, malgré sa diversité, ce recueil trouve une cohérence qui devrait en faire un livre de référence en plusieurs domaines encore peu explorés. L’une des impressions d’ensemble qui ressort de sa lecture est le caractère singulièrement bigarré de la plupart des traditions abordées, même celles qui se réclament de la plus grande antiquité et de la plus stricte orthodoxie de lignage. Que ce soit en Chine, en Inde, au Japon, au Tibet, l’éclectisme est de mise ; les spécialistes de ces arts n’hésitent pas à incorporer dans leurs pratiques et leurs enseignements des éléments extérieurs, étrangers, ou tout simplement inventés par eux-mêmes, leur conférant une unité de surface, un lissé que leur prête une tradition réinventée. Ici plus qu’ailleurs, il serait justifié de parler de « bricolage ». En même temps, ces arts traditionnels font preuve d’une étonnante faculté d’adaptation et de facilité à changer de registre, passant d’une transmission présentée comme immémoriale et exécutée sous le sceau de l’ésotérisme à la diffusion par l’enseignement universitaire moderne. Présentées comme matières scientifiques ou historiques et philologiques, l’astrologie et la divination regagnent ainsi le prestige qu’elles risquaient de perdre dans des milieux valorisant l’éducation moderne, tout en maintenant leur statut dans les croyances populaires. Ces arts ont donc su habilement user de la modernité pour déjouer les obstacles qu’elle devait leur poser. Le résultat est manifeste : en Inde comme en Chine, les arts divinatoires en général comptent sans doute plus de pratiquants professionnels et de clients fidèles que jamais auparavant dans l’histoire. L’Internet a de plus, comme chacun sait, donné à ces pratiques une diffusion et une audience inimaginables il y a une génération, mais c’est une question qu’il est peut-être encore prématuré d’aborder de façon globale. Il ne s’agit pas cependant d’une simple question de nombre ; nous voyons aussi changer et s’adapter le discours de ces arts, accentuant soit leur scientificité, soit leur antiquité.

5 Le premier article de ce recueil, celui de Stéphanie Homola, consacré comme de juste à l’exemple chinois, illustre au mieux la complexité des négociations qui s’opèrent au sein d’une même culture, stimulées par une influence extérieure que les acteurs les plus engagés s’efforceront d’oublier. Le cas de Taïwan, considéré dans la première partie, est très révélateur des détours que peut prendre la reconstitution d’une tradition : alors que le Guomindang avait combattu les « superstitions » sur le continent et que les autorités coloniales japonaises avaient fait de même sur l’île, après 1949 se constitua peu à peu et se répandit une technique divinatoire fortement inspirée des modèles japonais, qui avaient eux-mêmes évolué à partir d’anciennes transmissions chinoises. Alors que la transmission privée de type ésotérique a connu un essor important, les efforts pour transformer l’horoscopie en discipline universitaire à l’instar de la médecine traditionnelle chinoise révèlent la recherche d’une légitimité conforme au monde moderne. En contraste, l’enquête de terrain menée par l’auteur en Chine continentale montre la créativité qui peut se déployer pour former une pseudo- tradition fondée sur le secret de la transmission.

6 Yannick Bruneton présente un tableau d’ensemble de la divination en Corée à l’époque de Koryŏ (Xe-XIVe s.), malgré la difficulté d’en recueillir les éléments dispersés dans les sources. On voit se constituer l’« école de Tosŏn », dont l’influence se fera sentir jusqu’à l’époque contemporaine. Les japonisants seront très intéressés d’apprendre

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l’apparition, au XIIIe siècle, d’idées sur la Corée comme lieu de séjour des bouddhas et bodhisattvas, et singulièrement de Mahâvairocana, phénomène qui doit inciter à rechercher de possibles connexions avec les idées voisines développées au Japon.

7 Matthias Hayek donne une description détaillée de l’essor des sciences divinatoires dans le Japon d’Edo, époque de la généralisation commerciale du livre, et montre ici aussi la constitution d’un nouveau savoir à partir du « recyclage » de procédés plus anciens, chinois et japonisés, l’innovation étant légitimée en soulignant l’accord avec les sources chinoises anciennes tout en s’appuyant sur la diffusion en langue japonaise.

8 On doit à Alexei Volkov ce qui est sans doute la première présentation systématique des sources vietnamiennes sur l’astrologie et l’hémérologie ; elles sont constituées de textes chinois ou rédigés en chinois, mais aussi en vietnamien « démotique » (nôm), ce qui montre leur propagation au-delà des cercles lettrés officiels.

9 Caterina Guenzi brosse un panorama particulièrement éloquent de la fortune indienne de l’astrologie et montre comment cette science aux origines fort diverses, reconstruite à partir de traditions grecques et arabo-persanes, se trouva enchâssée dans une tradition censée remonter aux Védas. Cette nouvelle tradition, convenablement indianisée, fait à présent l’objet d’un enseignement universitaire qui entend se plier à la méthode scientifique.

10 François Bizot illustre par le cas cambodgien un autre exemple singulier de synthèse culturelle, où les douze animaux du « zodiaque » chinois sont mis en relation avec un système de divination fondé sur la version khmère, bouddhisée, du Râmâyana. On a ici un nouvel exemple de divination par le livre, analogue aux sortes virgilianae, aux poèmes de Hâfiz, au Kim Van Kieu, qui appelle d’urgence une étude d’ensemble de ce phénomène.

11 Charles Ramble apporte une autre illustration de l’importance de l’astrologie comme marqueur d’élaboration identitaire avec l’incorporation du système d’astrologie bouddhique Kâlacakra dans la religion bon, elle-même extraordinaire mosaïque d’éléments provenant des aires circum-tibétaines, y compris la chinoise.

12 Brian Baumann, enfin, dont l’important ouvrage Divine Knowledge sur l’astrologie mongole avait contribué à suggérer le thème de ce recueil, a choisi ici de se propulser hors des limites de la sphère des étoiles fixes pour aborder directement la vision allégorique du Ciel dans les conceptions politiques mongoles.

13 À la lecture de ces riches études, on découvrira que les arts divinatoires, que les pratiquants sont toujours soucieux de présenter comme remontant en toute pureté de tradition à d’immémoriales origines, sont l’un des lieux intellectuels les plus propices à l’emprunt, au recyclage, au démarquage, et que les étudier revient à reconstituer le cheminement de l’appropriation d’enseignements divers et de l’élaboration plus ou moins stable de ces derniers en systèmes se voulant à la fois traditionnels et originaux, mis en œuvre par des adeptes aspirant au statut de maître.

14 Il reste le plaisant devoir de remercier tout d’abord les contributeurs, qui ont eu le courage de relever le défi, les anonymes relecteurs qui n’ont ménagé ni leur peine ni leur temps, et, pour avoir bien voulu apporter à ce recueil l’éclairage enrichissant d’un « regard extérieur », le professeur Charles Burnett. Enfin, la plus élémentaire justice exige que soit pleinement reconnu ici le rôle fondamental de Pierre Marsone, à qui est due la totalité du travail rédactionnel proprement dit, c’est-à-dire celui qui commença

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aussitôt après qu’une première idée, toute virtuelle, eut été lancée. C’est à lui que revient l’entier mérite de la réalisation de ce numéro.

AUTEUR

JEAN-NOËL ROBERT Professeur au Collège de France, membre de l’Institut, directeur d’études à l’École Pratique des Hautes Études. Spécialiste de la pensée bouddhique japonaise, il travaille actuellement sur les rapports linguistiques entre chinois et japonais comme élément dynamique de la culture japonaise, notamment à travers l’étude de la poésie bouddhique. Il a publié notamment : (2008). Quatre courts traités sur la Terrasse Céleste. Paris, Fayard ; (2008). La Centurie du Lotus. Paris, Collège de France, IHEJ ; (2012). La Hiéroglossie japonaise. Paris, Fayard, 2012.

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La relation de maître à disciple en question : transmission orale et écrite des savoirs divinatoires en Chine et à Taïwan Challenging the Teacher-Student Relationship: Oral and Written Transmission of Divinatory Knowledge in China and Taiwan 師生傳承:中國大陸及臺灣占卜知識的口授和文本式教學

Stéphanie Homola

1 Longtemps condamnées comme « superstitions » par les régimes nationaliste et communiste, les pratiques de divination connaissent aujourd’hui une vague de popularité à Taïwan comme en Chine continentale. Elles ne bénéficient cependant d’aucune forme de reconnaissance institutionnelle. Pour lutter contre cette marginalisation, les spécialistes des arts divinatoires tentent d’adapter leurs savoirs à la société moderne. Comme dans tout processus de légitimation et de catégorisation des champs du savoir, la question de la transmission des connaissances et de l’enseignement est un enjeu central. Je propose ainsi de mettre en parallèle deux modes contrastés de transmission des savoirs mantiques à Taïwan et en Chine populaire, l’un privilégiant la transmission écrite, l’autre la transmission orale.

2 Cet article se concentre sur les pratiques divinatoires dites « déductives », regroupées sous l’appellation « arts divinatoires » (shushu ). Cet ensemble comprend, parmi les techniques les plus répandues aujourd’hui, l’horoscopie calendaire (mingli), la physiognomonie, la chiromancie, l’analyse des caractères d’écriture (cezi), la géomancie (fengshui) ainsi que les méthodes divinatoires fondées sur le Livre des Mutations (zhanbu). Le processus de transmission de la Chine continentale à Taïwan que je décris par la suite concerne principalement les techniques sophistiquées de calcul du destin de l’horoscopie calendaire, telles que la méthode liuren, la méthode ziweidoushu et la méthode des « huit signes » (bazi). Avec les méthodes taiyi (du « grand Un ») et qimen dunjia (du « cycle caché »), la méthode liuren (des « six troncs ren1 ») forme les sanshi,

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trois procédés mantiques pratiqués par le Bureau astronomique pour le bénéfice de l’empereur et qui connaissent leur âge d’or sous la dynastie Song (960-1279). À partir du VIIIe siècle, sous l’influence de l’astrologie grecque, hindoue et iranienne, la méthode taiyi se développe en une forme d’astrologie encore largement populaire aujourd’hui à Taïwan et connue sous le nom de ziweidoushu (« Nombres du Boisseau (du Nord) dans (le palais de) la Sublimité pourpre »). La méthode des « huit signes », fondée sur l’analyse des composantes calendériques de la date de naissance d’un individu, prospère également sous les Song, à une époque où l’analyse du destin qui était jusqu’alors réservée à l’empereur se répand parmi le peuple2.

3 Les arts divinatoires se distinguent des pratiques de divination dites « intuitives » qui visent à obtenir des informations en communiquant avec les dieux ou les ancêtres au moyen de blocs de divination (jiao), de bâtons de divination (qian) ou par l’intermédiaire d’un médium. Ils se distinguent également du choix des jours fastes (zeri) qui consiste à consulter des almanachs pour déterminer les dates les plus propices à différentes entreprises (déménagement, voyage…).

4 À Taïwan, l’horoscopie calendaire s’est développée à partir du repli du régime nationaliste sur l’île en 1949 ainsi que sous l’influence du Japon qui a contribué en particulier à l’essor de la méthode d’horoscopie ziweidoushu. Dans ce contexte, il est intéressant de mettre en relation deux dimensions de la transmission des connaissances, comprise à la fois comme circulation des savoirs et comme méthode d’enseignement. Dans les trois premières parties de cet article, consacrées à la transmission et au développement de l’horoscopie à Taïwan, je propose ainsi d’étudier comment la circulation des hommes et des livres dans le temps et dans l’espace a affecté le mode de transfert des connaissances.

5 À partir des années 1980, en réaction à la dégradation de la qualité de la transmission et à la multiplication des écoles de pensée, des spécialistes des arts divinatoires taïwanais entreprennent de reformuler et d’unifier les concepts et les techniques mantiques pour les adapter aux exigences rationnelles et scientifiques de la société contemporaine. Ils poursuivent en cela une entreprise de rationalisation qui a été initiée en Chine continentale à l’époque républicaine et qui se traduit, à Taïwan, par un essor des manuels de vulgarisation et une relative standardisation de la formation sous forme de cours collectifs. Les réformateurs tentent ainsi d’établir un nouveau paradigme de transmission des connaissances divinatoires en remplaçant le mode traditionnel d’enseignement fondé sur la relation de maître à disciple par un mode de transmission forgé sur le modèle universitaire.

6 En Chine continentale, depuis une dizaine d’années, la diffusion croissante de manuels de divination à destination du grand public semble également remettre en cause la relation de maître à disciple comme mode de transmission privilégié des arts divinatoires. Pourtant, en m’appuyant sur une enquête de terrain menée auprès de praticiens amateurs de Kaifeng, dans la province du Henan, entre 2009 et 2011, je propose de montrer, dans les deux dernières parties de cet article, qu’une véritable « économie » de la transmission orale reste vivante dans le cadre d’une relation de maître à disciple. L’enseignement des techniques s’accomplit ainsi sur le mode de l’« affinité prédestinée », du voyage initiatique et de la transmission orale des légendes et des savoir-faire.

7 L’étude de ces deux modes de transmission, l’un forgé sur le modèle universitaire, l’autre sur le modèle de la relation de maître à disciple, est menée à deux échelles

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différentes et s’appuie sur deux approches méthodologiques distinctes. D’un côté, je propose une analyse diachronique d’une tendance de fond d’adaptation du mode de transmission des savoirs divinatoires à la modernité, qui s’étend du début du XXe siècle à aujourd’hui, depuis la Chine continentale jusqu’à Taïwan. Ainsi, pour comprendre les tentatives de formation d’un système d’enseignement de type universitaire à Taïwan, je m’intéresse aux spécialistes reconnus des arts mantiques et à leurs textes, à l’histoire de la transmission des corpus écrits et au développement des écoles de pensée.

8 D’un autre côté, je propose de nuancer ce mouvement général de rationalisation du transfert des connaissances divinatoires par le contre-exemple d’une étude de cas qui met en évidence l’importance de la relation personnelle et de l’oralité dans la transmission des savoirs. L’étude de la relation de maître à disciple à Kaifeng s’appuie ainsi principalement sur les récits oraux de praticiens amateurs et l’observation de leur pratique dans la vie quotidienne.

9 Il ne s’agit donc pas d’opposer de manière simplificatrice Taïwan à la Chine continentale mais d’étudier les caractéristiques de ces deux modes de transmission et les conditions particulières dans lesquelles ils s’inscrivent.

Les vicissitudes de la transmission des savoirs divinatoires du continent à Taïwan

10 Au début du XXe siècle, le mouvement révolutionnaire anti-traditionnaliste et anti- confucéen qui lance le processus de modernisation de la société chinoise se traduit par l’introduction dans le champ intellectuel puis politique des catégories occidentales modernes de science, religion et superstition. Cette catégorisation bouleverse le statut des personnes qui pratiquent la divination et les modes de transmission des savoirs mantiques.

11 Dans la société impériale traditionnelle, la majorité des rites de ce que l’on peut appeler la « religion chinoise » (tels que le culte aux ancêtres, aux dieux locaux…) est effectuée au sein des communautés par ses membres eux-mêmes. Pour certains rituels (enterrement, inauguration d’un temple…), les communautés font appel à l’un ou l’autre des spécialistes des trois formes institutionnalisées de la religion chinoise que sont le bouddhisme, le taoïsme et le confucianisme. Des membres de la communauté peuvent aussi s’initier à certaines pratiques inspirées des trois enseignements afin de rendre directement service à la communauté. C’est le cas des devins qui exercent de manière professionnelle ou occasionnelle. Ils sont issus de lignées héréditaires de praticiens ou se forment auprès de maîtres locaux ou itinérants. Par ailleurs, le Livre des Mutations faisant partie des Classiques confucéens au programme des concours de recrutement des fonctionnaires impériaux, les lettrés confucéens se passionnent pour les « études du Livre des Mutations » (yixue) et pratiquent une forme élitiste de divination fondée sur la maîtrise de ce classique.

12 À la disparition de l’Empire, sont reconnues comme religions officielles, le bouddhisme, le taoïsme, le christianisme, le protestantisme et l’islam. En cohérence avec le concept occidental de religion, ces religions institutionnelles sont comprises comme des communautés exclusives de fidèles regroupés autour d’un clergé. Dès lors, les cultes et rituels religieux qui étaient assurés par les communautés, dénués de tout statut, sont qualifiés de « superstitions » et combattus comme tels. Le confucianisme, lui,

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indissociable du système impérial, perd toute structure institutionnelle : les anciens lettrés confucéens, représentants de l’élite intellectuelle, deviennent hommes politiques, professeurs d’université ou érudits locaux.

13 Le mouvement anti-impérialiste et anti-religieux du 4 mai 1919 marque une radicalisation des politiques de modernisation. Entre 1928 et 1930, diverses campagnes d’éradication de la superstition (pochu mixin yundong)3 s’attaquent directement aux devins.

14 Ces mesures se soldent pourtant par un échec. Les pratiques de divination restent très populaires sous la République et donnent lieu à de nombreuses publications sur la géomancie, la méthode des « huit signes » ou le choix des jours. Certains spécialistes jouissent d’une grande renommée, à l’instar des « Trois grands maîtres de Shanghai » : Yuan Shushan, Xu Lewu et Wei Qianli. Les autorités découvrent en effet que les devins savent s’organiser pour protester et revendiquer leur place dans la nouvelle société créée par le Kuomintang. Tout d’abord, ils s’approprient la rhétorique nationaliste et le « principe de bien-être du peuple » (minshengzhuyi) de Sun Yat-sen pour revendiquer le droit à gagner leur vie selon leurs moyens. Ils bénéficient également du soutien des élites politiques et économiques, notamment shanghaiennes, qui ont fréquemment recours à leurs services. Enfin, pour défendre les arts mantiques face aux campagnes contre les superstitions, des spécialistes tels que Yuan Shushan, entreprennent de les adapter à la nouvelle idéologie modernisatrice4.

15 De même que les institutions bouddhistes et taoïstes s’efforcent de conformer leur dogme et leur organisation au nouveau concept de religion, Yuan réalise l’urgence d’établir une synthèse des connaissances divinatoires pour répondre au défi posé par la science occidentale, perçue comme systématique et impersonnelle5. Tout d’abord, il prône une analyse critique des sources anciennes et ouvrages de référence afin de remédier à leurs travers (exemples sans commentaires ou commentaires sans exemples, foisonnement et incohérence des théories, passages verbeux ou trop généraux…) et d’en réaliser une synthèse. Il développe ainsi dans ses écrits une approche innovante combinant les explications des techniques, de larges références aux textes classiques et de nombreux exemples historiques à l’appui des théories. En établissant des références croisées systématiques entre différents arts divinatoires, il contribue également à l’unification des « études sur le destin » (lumingxue).

16 Une autre voie de réforme proposée par Yuan nous intéresse particulièrement ici. Poursuivant une réflexion entamée dès la fin du XIXe siècle par les réformateurs chinois, il prône le rejet de la transmission de maître à disciple comme méthode d’enseignement des arts divinatoires : « The appeal to abandon the traditional ways of transmission from “teacher to student” (shisheng guanxi) was one of the predominant definitions of “science” in Late Imperial and Republican China.6 » Ce modèle traditionnel de transfert des connaissances est fondé sur la relation personnelle entre le maître et son disciple. L’enseignement individuel et la constitution d’écoles ou de lignées permettent de contrôler le processus de transmission et de protéger les intérêts de la profession. La formation n’est pas uniquement technique : elle exige du disciple qu’il habite chez son maître, partage son mode de vie et le serve au quotidien. La relation s’inscrit aussi dans la durée : le maître ne révèle que progressivement son savoir pour éprouver la motivation et les capacités du disciple. Enfin, l’accent est mis sur la transmission orale et l’apprentissage par cœur des formules et techniques.

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17 Au contraire, les réformateurs des arts mantiques soutiennent que les théories divinatoires, une fois uniformisées, synthétisées et systématisées, peuvent être appliquées de manière fixe, telles des lois scientifiques, et donc être transmises dans des livres et non plus par des maîtres. Dans cette perspective, l’enseignement peut devenir collectif. Ainsi, en 1930, Yuan Shushan est le premier praticien à faire de la publicité dans les journaux de Shanghai pour proposer des cours sur les techniques de divination, d’abord par correspondance puis à des classes d’étudiants7. Il est suivi par de nombreux maîtres dans les années 1930 et c’est ce système d’enseignement de la divination qui perdure encore aujourd’hui à Taïwan.

18 En effet, alors que sur le continent le régime communiste tente d’éradiquer les pratiques superstitieuses, l’entreprise de rationalisation de l’horoscopie initiée par Yuan se poursuit à Taïwan à partir des années 1980.

19 Les méthodes de divination fondées sur le Livre des Mutations et les techniques sophistiquées d’horoscopie calendaire comme la méthode des « huit signes », sont très peu pratiquées à Taïwan avant 1949 et sont introduites sur l’île par les Chinois réfugiés du continent après la guerre civile. De manière ironique, c’est le repli du régime nationaliste, pourtant farouchement opposé aux pratiques « superstitieuses », qui a favorisé le développement de l’horoscopie à Taïwan.

20 Jusqu’au XIXe siècle, les populations d’origine chinoise à Taïwan, issues des vagues migratoires en provenance des provinces du Fujian et du Guangdong, pratiquent principalement des rituels de divination dans les temples au moyen de blocs et de bâtons de divination et le choix de jours auspicieux à l’aide d’almanachs8.

21 Le modèle japonais ayant fortement influencé la réflexion des intellectuels chinois sur la modernisation de la société ainsi que les politiques républicaines, il n’est guère surprenant que le régime colonial japonais (1895-1945) ait mené à Taïwan des politiques de lutte contre les superstitions similaires à celles conduites sur le continent. Une étude publiée en 1939 sur « La religion et les mauvaises habitudes superstitieuses à Taïwan9 » décrit ainsi les « coutumes anormales » (biantai fengsu) des géomanciens. Un praticien taïwanais contemporain explique ainsi pourquoi l’horoscopie était si peu répandue à cette époque : « À l’époque où Taïwan était sous contrôle japonais, le Japon interdisait l’importation de livres depuis le continent tels que les almanachs, les calendriers et les livres d’horoscopie, si bien que peu de personnes étudiaient l’horoscopie et qu’il y avait peu de spécialistes à Taïwan.10 »

22 Pendant et après la guerre civile, les spécialistes des arts divinatoires, souvent proches des milieux nationalistes, fuient la Chine populaire, certains vers Hong-Kong, d’autres vers Taïwan, comme Yuan. Parmi les troupes nationalistes et les civils qui se réfugient à Taïwan se trouvent également des praticiens professionnels et amateurs qui emmènent avec eux des éditions hongkongaises des livres de Yuan, Xu et Wei. La première édition taïwanaise d’un ouvrage d’horoscopie semble être une réédition d’un manuel de Xu à Taipei en 195911.

23 C’est avec ces ouvrages et auprès des Chinois réfugiés du continent (waishengren) que se forme une première génération d’horoscopistes taïwanais (bendiren).

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La formation d’une première génération d’horoscopistes à Taïwan et l’essor de la méthode ziweidoushu

24 Trois phénomènes caractérisent le développement des arts divinatoires à Taïwan : l’introduction de la méthode d’astrologie calendaire ziweidoushu ; un engouement populaire qui se traduit par un essor des publications ; la prolifération d’écoles de pensée autour de la méthode ziweidoushu.

25 Avant 1949, la méthode ziweidoushu était pratiquée à Shanghai et à Hong-Kong mais était beaucoup moins répandue que les autres formes d’horoscopie. À Taïwan, un Chinois du continent, Chen Yueqi, est connu pour avoir ramené avec lui un exemplaire de l’édition xylographique du Doushu quanji (Œuvres complètes de la méthode des Nombres du Boisseau du Nord), un ouvrage classique de référence de la méthode ziweidoushu, datant de la 9e année de l’empereur Tongzhi des Qing (1870) qu’il fait republier à Taipei en 1966. Mais ce sont surtout des ouvrages en provenance du Japon qui vont jouer un rôle déterminant dans l’essor de cette technique à Taïwan12.

26 En 1966, un vétéran des troupes nationalistes, Zhang Yaowen, effectue un voyage d’étude au Japon. Il se lie d’amitié avec des spécialistes japonais des arts divinatoires, Abe Taizan et surtout Satô Rikuryû qui lui enseigne diverses techniques dont la méthode ziweidoushu. Il rentre à Taïwan en 1967 où il fonde une école de pensée appelée « école de la transparence » (toupai). Ainsi, outre l’édition du Doushu quanji évoquée plus haut, les livres de ziweidoushu les plus anciens que j’ai retrouvés à Taïwan sont deux ouvrages de 1968, l’un compilé et publié au Japon par Satô et l’autre, publié en chinois à Taïwan par Abe13. En 1970, Zhang publie le premier livre de ziweidoushu d’un auteur chinois à Taïwan14. Par la suite, il compile des livres de Satô notamment dans une collection en cinq tomes qui reprend une grande diversité de techniques : horoscopie, divination par le Livre des Mutations , physiognomonie, médecine traditionnelle et fengshui15. Parallèlement et surtout à partir du début des années 1980, Zhang publie aussi ses propres ouvrages sur les arts divinatoires sans référence à Satô.

27 Le deuxième phénomène marquant est l’engouement que suscitent les arts divinatoires, et en particulier la méthode ziweidoushu, à Taïwan à partir des années 1980. Cela s’explique tout d’abord par un contexte politique favorable d’affaiblissement du discours officiel de dénigrement des pratiques populaires. En effet, l’opposition politique entre les régimes communiste et nationaliste chinois pousse ce dernier à réévaluer son héritage historique et, face aux destructions de la Révolution Culturelle sur le continent (1966-1976), à se poser en garant de la culture traditionnelle chinoise16. Dès lors, le régime amorce un tournant dans sa politique religieuse : les superstitions sont peu à peu réévaluées puis deviennent objet d’étude sous le nom de « religion populaire ». De plus, à partir de la fin des années 1980, le processus de démocratisation se traduit par un essor de l’industrie culturelle et du secteur de l’édition qui profite notamment aux publications sur les arts divinatoires.

28 Pour essayer d’évaluer l’ampleur des publications, j’ai mené une recherche systématique par mots-clés dans le catalogue de la Bibliothèque Nationale de Taïwan. Le graphique ci-dessous représente la répartition des 1395 publications classées dans la catégorie « livres de divination » (mingshu) entre 1980 et 2011. Le graphique fait

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apparaître deux hausses des publications, une première au milieu des années 1980 et une deuxième, plus importante en valeur absolue, au milieu des années 199017.

Tableau 1. Nombre de publications sur la divination à Taïwan entre 1980 et 2011

29 Comment expliquer ces deux vagues de publications ? D’après mes recherches, la vague du milieu des années 1980 correspond aux publications de la première génération de praticiens taïwanais qui s’est formée dans les années 1960 et 1970 auprès de Chinois du continent (spécialistes réfugiés à Taïwan comme Yuan, amateurs éclairés, moines) et de maîtres japonais, soit directement à leur contact soit par l’intermédiaire de leurs ouvrages. Comme le montre le parcours de Zhang Yaowen, étant donné la complexité des techniques, une vingtaine d’années a été nécessaire pour que des praticiens nés à Taïwan puissent les assimiler et les transmettre à leur tour à travers leurs écrits. Le nombre de publications de cette première vague, relativement faible en valeur absolue, correspond à une diffusion des ouvrages parmi les praticiens spécialistes des arts divinatoires.

30 L’ampleur de la deuxième vague du milieu des années 1990 (presque cent ouvrages publiés en 1997) suggère cette fois une diffusion auprès d’un public plus large, non seulement de praticiens professionnels et amateurs, mais également de clients. À cette époque, le développement médiatique et marchand de la divination autour des publications, des consultations et des cours, a été qualifié de « fièvre de la divination » (suanming re).

31 Quant au troisième phénomène, la prolifération d’écoles de pensée autour de la méthode ziweidoushu, il s’agit d’un développement récent apparu dans les années 1980, bien que les maîtres de ces écoles revendiquent leur appartenance à des lignées anciennes s’étendant sur plusieurs générations. Ainsi, après avoir étudié auprès d’Abe Taizan et Satô Rikuryû et diffusé leurs livres à Taïwan, Zhang Yaowen s’est présenté comme le grand maître de la 13e génération de l’école toupai, qui aurait été fondée à l’époque Ming. Chen Yueqi, à l’origine de la première publication à Taïwan du Doushu quanji en 1966, s’est présenté dans les années 1980, en s’appuyant notamment sur son nom, comme le grand maître de l’« école de la confirmation de l’oracle » (zhanyan pai) et unique descendant de la 41e génération de Chen Xiyi, inventeur légendaire de la méthode ziweidoushu.

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32 Des particularités revendiquées par chaque doctrine se dégagent, paradoxalement, des mécanismes communs de formation d’une école (pai). Tout d’abord, le prestige d’une école se compte en générations de disciples. Le disciple-fondateur moderne s’applique ainsi à reconstruire l’arbre généalogique en remontant le plus loin possible dans le temps. Pour asseoir la singularité de la lignée, il est courant de choisir un ancêtre différent de la tradition dominante (en l’occurrence Chen Xiyi), parmi les nombreux personnages taoïstes et érudits de l’histoire chinoise de l’époque Tang et Song, grandes périodes de développement de l’horoscopie calendaire. Autre élément essentiel dans la construction de l’identité d’une école, la possession d’un manuel ancien et rare prouve l’appartenance à la lignée du disciple-fondateur moderne. Le secret de la transmission, quant à lui, permet de justifier pourquoi le livre ne refait surface qu’au milieu des années 1980. Les disciples-fondateurs s’appliquent alors à collecter, éditer et commenter les ouvrages secrets de l’école. L’incohérence voire la trahison que représente la révélation de techniques secrètes conservées si longtemps est rarement évoquée. Enfin, chaque école se distingue par l’adoption d’une variante technique ou d’une interprétation singulière de la méthode ziweidoushu. Les ouvrages de ces différentes écoles, volontiers ésotériques et consacrés aux conceptions personnelles du maître, constituent une bonne part des livres publiés dans les années 1990.

33 Trois raisons peuvent être avancées pour expliquer que le monde du ziweidoushu ait cristallisé ce phénomène de foisonnement d’écoles. Tout d’abord, la complexité de la méthode et les multiples influences dont elle témoigne (chinoises, grecques, babyloniennes, hindoues, iraniennes, japonaises) offrent un grand choix de références et de particularités techniques aux praticiens qui souhaitent se singulariser. Ensuite, le caractère marginal de cette technique jusqu’à la moitié du XXe siècle n’a pas favorisé la formation d’un consensus autour de procédés et de textes de référence parmi les praticiens, contrairement à d’autres méthodes d’horoscopie telles que la méthode des « huit signes ». Enfin, comme nous le verrons par la suite, bien que des recherches académiques aient été menées sur l’histoire de la méthode ziweidoushu18, le cloisonnement entre le monde des praticiens et celui de la recherche ne favorise pas le partage des savoirs.

34 À partir des années 1980, c’est en réaction à cette multiplication des écoles de pensée et des publications qu’ils considèrent de médiocre qualité, que des praticiens préconisent une modernisation des arts divinatoires et de leur mode de transmission.

Du maître au professeur : vers un nouveau mode d’enseignement des arts divinatoires

Critique des écoles de pensée et du mode de transmission de maître à disciple

35 Contrairement à Yuan Shushan qui, à son époque, craignait pour la survie même des arts divinatoires, ces praticiens réformateurs font face à un foisonnement anarchique et incohérent de livres, de savoirs et de pratiques. Bien qu’ils soient souvent regroupés sous l’appellation d’« école moderne » (xiandai pai), ces praticiens refusent de s’inscrire dans une lignée. Ils critiquent ainsi la multiplication absurde des écoles, le culte de la personnalité et l’atmosphère magique qui entourent les maîtres et le soi-disant secret de la transmission des techniques. Ils déplorent que les maîtres de ces écoles, qui ont

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souvent reçu une formation superficielle du fait de la transmission chaotique des savoirs divinatoires du continent à Taïwan, véhiculent à travers leurs publications des conceptions irrationnelles des arts mantiques et en compromettent ainsi l’institutionnalisation.

36 Le rejet des écoles par ces praticiens s’accompagne également d’une critique de la relation maître-disciple, amorcée au début de l’ère républicaine où ce mode de transmission était considéré comme un obstacle à l’adaptation des savoirs traditionnels à la modernité. Ainsi, si les praticiens de l’« école moderne », comme la plupart des spécialistes contemporains, ont été initiés aux arts divinatoires par des maîtres originaires du continent, ils remettent largement en cause ce type de formation. C’est le cas de Ruli Jushi, un praticien de la région de Taipei dont je suis les activités d’enseignement et de publication depuis 2007 et qui a été le disciple d’un moine bouddhiste. Ce dernier, un ancien commandant des troupes nationalistes réfugiées à Taïwan, a quitté la carrière militaire pour vivre dans un monastère de Hong-Kong où, devenu moine, il s’est instruit dans les arts mantiques. Lorsque Ruli Jushi l’a rencontré en 1991 à Taïwan, il était âgé de 90 ans. Ruli Jushi est devenu officiellement son disciple (baishi) et le maître l’a initié au Livre des mutations jusqu’à sa mort trois ans plus tard. Pour Ruli Jushi, cette initiation a davantage été d’ordre spirituel que technique. En effet, même s’il reconnaît les talents de son maître, Ruli Jushi avoue n’avoir pas appris grand-chose pendant ces trois années qu’il a surtout passées à s’occuper du vieillard. Il insiste sur la nécessité d’apprendre par soi-même pour comprendre le véritable sens de la divination. C’est en lisant une grande quantité de livres de référence qu’il s’est formé lui-même à différentes techniques divinatoires19.

Rationalisation et vulgarisation des arts divinatoires

37 Les praticiens de l’« école moderne » reformulent les savoirs divinatoires pour les adapter aux avancées de la science et de la société contemporaine. Cette reformulation est nécessaire pour combattre les pratiques actuelles des charlatans (incarnés par les écoles), mais aussi pour réformer les techniques traditionnelles qui, par leur manque de rigueur, ont permis les mésinterprétations actuelles. Sans entrer dans les détails, il est possible de dégager les principes de cette entreprise de rationalisation qui vise à démarquer l’horoscopie de conceptions déterministes et magiques et de la croyance dans les esprits.

38 Tout d’abord, à l’instar de Yuan Shushan dans l’entre-deux-guerres, les réformateurs prônent un retour aux sources. Ainsi, pour être capable de juger par lui-même et ne plus être tributaire des interprétations embrouillées et irrationnelles de ses contemporains, Ruli Jushi a entrepris une relecture critique de tous les textes fondamentaux des arts divinatoires depuis le Lunheng (Balance des discours) de Wang Chong. En sélectionnant les ouvrages de référence, en retraçant et en évaluant les apports de chacun sur différents concepts fondamentaux, la démarche de Ruli Jushi contribue à une standardisation de la discipline.

39 Par ailleurs, le concept de destin est reformulé selon une conception non déterministe qui limite le rôle de l’horoscope dans la destinée d’une personne au profit des facteurs de l’environnement extérieur. Toujours pour se démarquer d’une conception déterministe, les réformateurs prônent une interprétation relativiste de l’horoscope : une personne ne peut être évaluée en elle-même mais en fonction des situations dans

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lesquelles elle se trouve. Elle est caractérisée non par une identité unique mais par de multiples identités qui s’actualisent selon les circonstances.

40 Enfin, les réformateurs insistent sur le caractère non magique de la divination. L’horoscopie est un produit de la statistique qui permet d’évaluer la personnalité d’un individu et de le conseiller dans son adaptation à son environnement. Ainsi, les différents éléments constitutifs de l’horoscope ne doivent pas être interprétés littéralement. L’horoscope est une représentation virtuelle du temps et de l’espace qui n’a qu’un sens symbolique. Toute référence aux esprits est éliminée et le nombre d’étoiles est réduit et ordonné. Par exemple, les étoiles dites « auspicieuses » (ji) et « néfastes » (sha) ne sont en elles-mêmes ni positives ni négatives et doivent être interprétées dans leurs relations les unes avec les autres. Les spécialistes contemporains considèrent même que les étoiles néfastes indiquent des prédispositions dans le domaine de la haute technologie.

41 Cette entreprise de rationalisation combinée à une diffusion à grande échelle a entraîné un phénomène de vulgarisation. Cet élargissement de l’accès aux savoirs divinatoires est symbolisé par l’essor de manuels didactiques qui a contribué à la vague de publications du milieu des années 1990. En effet, les ouvrages anciens de divination ne visaient pas à expliquer les méthodes de manière exhaustive et servaient principalement aux initiés comme mémentos techniques. Souvent incomplets, rédigés en langue classique et dans un langage volontairement ésotérique sous forme de poèmes rimés, ils n’avaient pas vocation à se substituer à l’enseignement oral du maître. Quant aux livres contemporains des écoles de pensée évoqués plus haut, ils visent moins à faire comprendre les techniques qu’à renforcer le prestige du maître et à accroître le nombre de ses adeptes. À l’inverse, rédigés en langue vernaculaire (baihua) et dans un langage simple, les manuels de l’« école moderne » ont l’objectif affiché de se substituer aux maîtres. Ils rendent les techniques accessibles à un public de non- spécialistes, soit aux apprentis praticiens qui peuvent s’initier et se perfectionner grâce à des manuels clairs et didactiques, soit aux clients même des devins qui font un usage domestique des techniques divinatoires et qui ne sont pas prêts à s’investir dans des années de formation. Les clients peuvent ainsi mener leur propre consultation grâce aux manuels de la veine « how-to » (buqiuren) sur des thématiques aussi diverses que le mariage, l’argent ou la maladie. Certains, développant un intérêt particulier, peuvent être amenés à conseiller leur entourage et à devenir eux-mêmes praticiens. Cette vulgarisation des savoirs mantiques tend ainsi à brouiller les catégories entre spécialistes professionnels, amateurs et usagers des arts divinatoires.

42 Dans ces manuels, l’usage de tableaux à la place des poèmes ou formules rimées (gejue ou koujue) est un exemple frappant de la manière dont le discours de modernisation de l’horoscopie se traduit très concrètement dans le mode d’enseignement des techniques. Dans les méthodes des « huit signes » et ziweidoushu, la première étape du calcul de l’horoscope consiste à traduire la date de naissance de l’individu du calendrier républicain (ou grégorien) dans le calendrier traditionnel luni-solaire, selon le cycle sexagésimal formé de la combinaison en binômes des dix troncs célestes (tiangan) et des douze branches terrestres (dizhi). Chaque paramètre de la date de naissance (année, mois, jour, heure) est ainsi représenté par un binôme tronc-branche, appelé également « pilier » (zhu). Ce sont les « huit signes » (bazi) ou « quatre piliers » (sizhu) qui ont donné son nom à cette méthode d’horoscopie calendaire. Ainsi, un poème rimé intitulé

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« déterminer l’heure à partir du jour20 » aide le praticien à calculer le binôme correspondant à l’heure de naissance à partir du tronc du jour de naissance : Jia ji jia zi Yi geng qi bing zi Bing xin qi zi Ding qi geng zi Wu gui qi ren zi. [Les jours de tronc] jia ou ji commencent par [le binôme de l’heure] jia zi [Les jours de tronc] yi ou geng commencent par [le binôme de l’heure] bing zi [Les jours de tronc] bing ou xin commencent par [le binôme de l’heure] wu zi [Les jours de tronc] ding ou ren commencent par [le binôme de l’heure] geng zi [Les jours de tronc] wu ou gui commencent par [le binôme de l’heure] ren zi.

43 La première ligne du poème s’interprète ainsi : si le tronc du jour est jia ou ji, commencer à compter la première heure du jour (de 23h à 1h) à partir du binôme jia zi, si bien que l’on compte ensuite, selon l’ordre fixe des binômes dans le cycle sexagésimal, que la deuxième heure est yi chou, la troisième bing yin, etc., jusqu’à atteindre l’heure de naissance considérée. L’ensemble des combinaisons comprises (mais non entièrement énoncées) dans ce poème peut être traduit sous forme de tableau. Seules les deux premières lignes du tableau (grisées) sont énoncées dans le poème.

Tableau 2. « Déterminer l’heure du partir du jour »21

Tronc du jour Heure de jia ji 甲己 yi geng 乙庚 bing xin 丙辛 ding ren 丁壬 wu gui 戊癸 naissance

23h-1h zi 子 jia zi 甲子 bing zi 丙子 wu zi 戊í geng zi 庚子 ren zi 壬子

1h-3h chou 丑 yi chou 乙丑 ding chou 丁丑 ji chou 己丑 xin chou 辛丑 gui chou 癸丑

3h-5h yin 寅 bing yin 丙寅 wu yin 戊寅 geng yin 庚寅 ren yin 壬寅 jia yin 甲寅

5h-7h mao 卯 ding mao 丁卯 ji mao 己卯 xin mao 辛卯 gui mao 癸卯 yi mao 乙卯

7h-9h chen 辰 wu chen 戊辰 geng chen 庚辰 ren chen 壬辰 jia chen 甲辰 bing chen 丙辰

9h-11h si 巳 ji si 己巳 xin si 辛巳 gui si 癸巳 yi si 乙巳 ding si 丁巳

11h-13h wu 午 geng wu 庚午 ren wu 壬午 jia wu 甲午 bing wu 丙午 wu wu 戊午

13h-15h wei 未 xin wei 辛未 gui wei 癸未 yi wei 乙未 ding wei 丁未 ji wei 己未

15h-17h 申 ren shen 壬申 jia shen 甲申 bing shen 丙申 wu shen 戊申 geng shen 庚申

17h-19h you 酉 gui you 癸酉 yi you 乙酉 ding you 丁酉 ji you 己酉 xin you 辛酉

19h-21h xu 戌 jia xu 甲戌 bing xu 丙戌 wu xu 戊戌 geng xu 庚戌 ren xu 壬戌

21h-23h hai 亥 yi hai 乙亥 ding hai 丁亥 ji hai 己亥 xin hai 辛亥 gui hai 癸亥

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44 Les formules rimées correspondent au modèle de la transmission orale. Leur style condensé et volontairement ésotérique nécessite les explications d’un maître et elles ne sont donc compréhensibles que des initiés. De plus, elles permettent de retrouver rapidement l’ensemble des cas par le calcul mental, ce qui, d’un côté, réduit l’effort de mémorisation mais, d’un autre côté, nécessite une grande pratique pour assimiler et manipuler les différents paramètres. Par ailleurs, ces poèmes rimés rendent la profession accessible, dans sa forme la plus populaire, à des aveugles comme à des personnes illettrées.

45 Les tableaux, eux, s’adressent à un public de néophytes qui veut pouvoir appliquer la méthode rapidement sans avoir besoin d’accumuler des années de pratique. Exhaustifs, ils sont conçus pour être consultés et non mémorisés. Ils révèlent également les mécanismes logiques et la cohérence interne des méthodes horoscopiques qui apparaissent ainsi accessibles à tous et non plus réservés à des « magiciens ».

Tentatives d’institutionnalisation académique

46 Ces tentatives d’adaptation des savoirs et pratiques divinatoires aux savoirs modernes, compris comme scientifiques, nourrissent une ambition de reconnaissance institutionnelle et académique. En effet, contrairement à l’Inde où l’astrologie, enseignée dans les universités et les collèges sanskrits, est pleinement établie comme discipline de l’enseignement supérieur22, les arts mantiques sont exclus du système éducatif taïwanais. Aujourd’hui à Taïwan, les personnes intéressées par les arts divinatoires se forment principalement dans des cours collectifs donnés par des spécialistes, dans le cadre de cours privés, d’associations de loisirs ou d’associations étudiantes, ou bien seules, en autodidactes, avec des manuels et l’aide éventuelle d’un ami connaisseur. Pour les réformateurs de l’horoscopie, ce mode de transmission des connaissances constitue un premier pas vers la formation d’une discipline universitaire. Leur démarche scientifique et de diffusion du savoir au plus grand nombre vise en effet à engager les études du destin dans la voie de l’académisme, c’est- à-dire à intégrer le monde de la recherche et de l’enseignement supérieur.

47 Ruli Jushi s’appuie ainsi sur l’exemple de la médecine chinoise pour revendiquer l’institutionnalisation académique de l’horoscopie. En effet, parmi les « cinq arts » traditionnels chinois (wushu)23, seule la médecine chinoise s’est développée en un système scientifique et a été intégrée dans les institutions académiques modernes24. Selon Ruli Jushi, l’horoscopie moderne devrait être reconnue comme une branche de la philosophie de la vie (shengming zhexue). Mais il a conscience qu’une telle institutionnalisation ne sera possible que si des professeurs ou des chercheurs qui possèdent déjà une reconnaissance académique entreprennent de fonder des programmes de formation élaborés à partir des conceptions rationnelles de l’« école moderne ».

48 Ruli Jushi fonde ses espoirs sur le fait que les héritiers des lettrés de l’époque impériale qui se passionnaient pour la divination ont intégré en grand nombre le monde de la recherche et de l’enseignement supérieur et perpétuent ce loisir en marge de leur activité professionnelle. Ainsi, des professeurs de littérature expliquent les techniques divinatoires pour illustrer un cours sur le Livre des Mutations, ou pratiquent la méthode de dissection des caractères (cezi) pour conseiller les élèves sur leur orientation en dehors des cours. Certains professeurs médiatiques jouent le rôle de conseiller du

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prince, tel Wu Zhangyu, professeur au département de religion de l’Université Catholique Furen, considéré comme le conseiller en horoscopie du président Ma Yingjiu, et qui expose régulièrement ses analyses politiques et économiques dans les médias. Dans le monde de la recherche, l’historien Ho Peng Yoke a découvert, à l’occasion de ses propres travaux sur l’histoire des arts divinatoires, que des intellectuels de Taïwan, Hong-Kong et des communautés chinoises de Malaisie et Singapour, perpétuent en privé des pratiques et un savoir élitistes. Ainsi, pour son travail sur la méthode des « huit signes », Ho a bénéficié de l’expertise du professeur Ho Ping-ti25.

49 Cependant les chercheurs, craignant les accusations de superstition, restent discrets sur leurs pratiques et ne sont pas prêts à les intégrer dans leurs activités académiques. Ho Peng Yoke raconte comment il a appris, aux détours de conversations, l’intérêt de nombreux intellectuels pour la méthode liuren, réputée particulièrement difficile : Professor Lao Siguang is a cousin of Professor Lao Kan. He informed me that in the early 1930s, when the two cousins both lived in Peking, their parents invited an expert to come to their home to teach them the art of Liuren and the Ziping method of fate-calculation. Although I knew professor Lao Kan very much earlier, I had never heard about his knowledge in this field. I was only aware of his reputation as an eminent Chinese scholar. This example goes to show again that Liuren is a living art, although it is seldom openly practiced or talked about26.

50 Ainsi, le cloisonnement entre le monde universitaire et celui des praticiens constitue un obstacle à l’institutionnalisation académique souhaitée par les partisans de l’« école moderne ». En effet, la recherche académique sur les arts divinatoires existe mais elle se limite principalement à une approche historique, la seule considérée comme acceptable, et exclut toute dimension contemporaine et pratique. Les anthropologues et sociologues taïwanais qui étudient les pratiques divinatoires depuis les années 1990 reconnaissent que seule une longue expérience permet de maîtriser véritablement ces techniques. Mais la plupart d’entre eux refusent de s’y impliquer de peur d’être soupçonnés de perdre tout recul et de se mettre à « y croire ». Quant aux praticiens, détenteurs de ces savoirs, ils se montrent incapables de produire des ouvrages de référence fiables. Ainsi, l’entreprise de rationalisation menée par les praticiens de la tendance moderniste n’a jusqu’ici mené à aucun projet collectif de normalisation ni de publication de traités de référence.

51 L’histoire de la transmission des savoirs divinatoires de la Chine républicaine des années 1930 à la société taïwanaise contemporaine met en évidence le passage d’un mode traditionnel d’enseignement de maître à disciple à un enseignement ouvert à tous forgé sur un modèle universitaire. Mais cette transition inachevée place les arts divinatoires dans un entre-deux inconfortable27. Ayant échappé au contrôle étroit que permettait d’exercer le mode de transmission de maître à disciple, ils ne bénéficient pas pour autant de la cohésion que procure une reconnaissance académique officielle. Ainsi, la vulgarisation des arts divinatoires qui se traduit par une plus grande diversité des parcours des praticiens, favorise les clivages entre ceux qui se revendiquent comme les héritiers de lignées de maîtres, et les nouveaux praticiens. Paradoxalement, elle favorise également la multiplication des écoles de pensée qui visent précisément à pallier le manque de prestige et de légitimé de traditions récemment constituées. Et les « modernisateurs » qui militent pour une standardisation des savoirs mantiques ne constituent aux yeux de leurs détracteurs, qu’une école supplémentaire.

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52 En Chine continentale, depuis quelques années, des signes comparables d’une ouverture au grand public des savoirs divinatoires et d’une volonté des praticiens d’uniformisation de la profession commencent à apparaître dans les grandes villes. En effet, après les persécutions de la Révolution Culturelle, les politiques religieuses ont été progressivement assouplies, surtout à partir des années 2000, et les pratiques de divination sont aujourd’hui largement tolérées. À Pékin par exemple, des praticiens professionnels militent pour la reconnaissance des arts mantiques, notamment sur le modèle « para-universitaire » des études nationales (guoxue), qui offre une légitimité institutionnelle tout en permettant des activités lucratives d’enseignement. Les publications sur les arts divinatoires à destination du grand public connaissent un essor comparable à celui qui a marqué Taïwan au milieu des années 1990.

53 En contraste avec cette évolution, je propose de montrer comment, dans une ville de moindre importance comme Kaifeng, dans le Henan, la formation de praticiens amateurs s’accomplit sur le mode de la transmission de maître à disciple. Il n’y a à Kaifeng ni librairies spécialisées ni cours sur les arts divinatoires. L’accès aux savoirs divinatoires, s’il n’exclut pas totalement les sources écrites, passe principalement par l’enseignement oral et la relation personnelle entre le maître et son élève.

Parcours initiatiques et récits légendaires en Chine continentale

54 L’un des plus anciens praticiens de la ville m’a raconté les époques tourmentées qu’ont traversées les devins de Kaifeng : « Sous la République, beaucoup de personnes pratiquaient ouvertement la divination malgré les interdictions et les accusations de superstition. L’interdiction a perduré après la Libération mais les gens ont continué à exercer chez eux. » La violence de la Révolution Culturelle a entraîné un coup d’arrêt des pratiques, même clandestines. Les rares livres de divination qui circulaient à l’époque ont été brûlés. Mais la transmission n’a pas été totalement interrompue car la plupart des praticiens s’appuyaient sur un savoir oral et ne possédaient aucun livre.

55 Dans la suite de cet article, j’expose le cas de deux praticiens amateurs de Kaifeng. J’examine tout d’abord leur parcours d’apprentissage, leurs récits et la façon dont eux- mêmes m’ont transmis leur expérience et leur savoir pour ensuite dégager les principes et mécanismes qui régissent le mode de transmission de maître à disciple.

56 Lorsque j’ai rencontré M. Liu à Kaifeng en 2009, il venait de créer, avec un groupe d’amis amateurs des arts divinatoires, un cabinet de consultation à proximité de l’Université du Henan pour toucher une clientèle d’étudiants. Il m’a ainsi raconté comment il s’est initié à la divination.

57 Né en 1959, diplômé d’une université technique au début des années 1980, ses origines paysannes et son manque de relations ne lui ont pas permis de trouver un travail ni de s’engager dans l’armée. C’est à cette époque qu’il a commencé à s’intéresser aux « livres anciens, le genre de livres écrits en caractères non simplifiés » que lui a prêtés un ami, parmi lesquels les classiques du confucianisme ainsi qu’un ouvrage de physiognomonie, le Mayi shenxiang (Physiognomonie divine de Mayi), qui l’a particulièrement intéressé : « Je lisais jusqu’à ce que je m’endorme. Et quand je me réveillais, je lisais de nouveau. Puis je me suis demandé si ce que je lisais était juste ou pas, si on pouvait l’appliquer. J’ai alors décidé de voyager pour mettre ce livre en pratique. »

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58 Ainsi, de 1983 à 1984, Liu a entrepris une sorte de voyage initiatique afin « d’élucider si le Mayi shenxiang possède un véritable caractère scientifique ou bien s’il ne s’agit que de superstitions qui doivent être rejetées en bloc ». Il s’est d’abord rendu à Jinan, dans le Shandong. Pendant l’été, il s’est installé dans le parc de la Montagne aux Mille Bouddhas et a proposé ses services gratuitement. Dans ce parc, il a rencontré des praticiens originaires de toute la Chine qui lui ont enseigné d’autres techniques. Il est ensuite revenu dans le Henan, à Huaiyang, réputé pour ses spécialistes du Livre des Mutations. Pendant six mois, il s’est instruit auprès des anciens qui lui ont enseigné la méthode des « huit signes ». Mais Liu a trouvé cette technique trop compliquée et préfère la physiognomonie et la chiromancie qui sont certes moins précises, mais permettent d’identifier la situation d’un individu en un seul coup d’œil. Liu a poursuivi son voyage dans le nord-est, à Pékin et à Qingdao dans le Shandong.

59 Au début de son voyage, Liu ne se faisait pas rémunérer pour ses services. Puis il a accepté les cadeaux, les invitations à manger et les propositions de logement. Il a ainsi réussi à vivre pendant son périple grâce à l’aide des personnes qu’il rencontrait. À cette époque, j’ai rencontré beaucoup de bienfaiteurs (guiren), partout les gens m’ont compris et m’ont aidé. J’expliquais que mon souhait le plus cher était que les connaissances et la sagesse du Livre des Mutations puissent bénéficier au peuple. Je voulais comprendre les malheurs du peuple dans l’espoir d’alléger son fardeau. Par exemple, je suis allé plusieurs fois au Taishan28 et pendant mes séjours, je n’ai jamais payé aucun repas.

60 Après deux ans de voyage, Liu est rentré à Kaifeng. Malgré son expérience, il n’a pas réussi à travailler comme devin car à cette époque, explique-t-il, l’État ne soutenait pas ce genre d’activité. Mais le plus important pour lui, est que ce voyage lui a permis de découvrir son pays : « En mettant le Mayi shenxiang en pratique, j’ai compris les caractéristiques de la société chinoise. » L’expérience acquise au cours de ce voyage initiatique est une composante essentielle de la pratique des arts divinatoires : « Aujourd’hui, il y a beaucoup de livres mais la plupart ne valent rien. C’est l’expérience qui compte. » Ainsi, même si son intérêt pour la divination a été suscité par un livre, c’est le voyage et les multiples rencontres qu’il a rendues possibles qui ont nourri son apprentissage des arts mantiques29.

61 Liu m’a également raconté l’histoire légendaire de la transmission du Mayi shenxiang : Le Mayi shenxiang a été écrit par Damo30. C’était un homme très intelligent, capable d’analyser les dix mille choses et les dix mille êtres mais il sentait qu’il lui manquait quelque chose dans sa compréhension des hommes. Il a alors décidé de se retirer pendant neuf ans dans une grotte au Jiuzhushan pour méditer. Il y a écrit un livre qui, à cette époque, n’avait pas encore de titre. Il a ensuite voulu transmettre ce livre mais ne rencontrait que des gens médiocres et sans discernement. Un jour, il a fait la connaissance de Chen Xiyi, un homme très pauvre, vêtu de haillons, qui a compris la sagesse de cet enseignement. Damo a reconnu en lui son successeur et lui a transmis le livre. Chen Xiyi s’est alors mis à pratiquer la physiognomonie et a acquis une telle réputation qu’il a été surnommé « l’Immortel en haillons » (de chanvre, mayi). Un jour, Mayi a rencontré Liu Bang avant que celui-ci ne devienne empereur31. Il a examiné son visage et lui a prédit un destin extraordinaire. Mais à l’époque, personne n’a fait attention à ses paroles. Lorsque Liu Bang est devenu empereur, il a convoqué Mayi pour savoir comment il avait réussi à faire une prédiction aussi juste. Mayi lui a alors parlé du livre qu’il avait reçu de l’ancêtre fondateur Damo. Par la suite, il est probable que Liu Bang des Han ait intégré le livre dans les livres-

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trésors de l’Empire sous le titre de Mayi shenxiang. Voilà l’histoire de l’origine du Mayi shenxiang.

62 Liu semble considérer cette légende de manière littérale. Les nombreuses incohérences qu’elle recèle montrent qu’il n’a jamais cherché à approfondir ou à confirmer ce récit par des recherches ou des lectures.

63 Chen Tuan (877-989), alias Chen Xiyi, est en effet l’inventeur légendaire de la tradition de la physiognomonie. On lui attribue le traité de physiognomonie Shenxiang quanbian (Guide complet de physiognomonie divine)32, dont le Mayi shenxiang est une version contemporaine simplifiée. Selon la légende, Chen Tuan aurait reçu la tradition de l’immortel taoïste Lü Dongbin et d’un obscur taoïste nommé Mayi dans une grotte du Huashan. Certains passages du Shenxiang quanbian sont aussi attribués au moine indien Bodhidharma (appelé Damo en chinois), fondateur semi-légendaire du bouddhisme Chan en Chine et qui serait arrivé d’Inde en 470. Damo est connu pour avoir inventé une méthode de médiation appelée « contemplation du mur » (biguan) qu’il aurait pratiquée pendant une retraite de neuf ans. En 984, Chen Tuan reçut de l’empereur des Song Taizong (939-997) le nom de Chen Xiyi pour l’avoir reconnu en tant que futur empereur et avoir annoncé que l’Empire serait en paix lorsqu’il accéderait au trône.

64 Les éléments historiques dont nous disposons font remonter la tradition de la physiognomonie aux Cinq Dynasties (907-960), période à la fin de laquelle vécut Chen Tuan, dont les dons pour la physiognomonie sont attestés dans de nombreuses sources. Le Shenxiang quanbian, lui, a été compilé au début des Ming (1368-1644) par Yuan Zhongche (1367-1458), physiognomoniste à la cour impériale. Le père de Yuan Zhongche, Yuan Liuzhuang (1335-1410), fonctionnaire célèbre également pour ses talents de physiognomoniste, aurait reconnu le futur empereur des Ming Yongle (1360-1424) avant que celui-ci ne monte sur le trône.

65 Il est intéressant de constater que le récit de Liu mélange des personnages historiques et légendaires mais également des personnages légendaires entre eux. Liu présente Mayi et Chen Tuan comme une seule et même personne, une confusion qui apparaît dans de nombreuses légendes. En revanche, Liu ajoute un personnage à la légende en donnant le rôle du fondateur de la tradition au moine Damo. Il remplace également l’empereur Taizong des Song, que Chen Tuan a reconnu comme futur empereur, par Liu Bang, le fondateur de la dynastie Han qui a pourtant vécu un millénaire auparavant33. Par ailleurs, prédire le destin impérial des futurs empereurs est la marque des spécialistes de physiognomonie tout au long de l’histoire et il n’est guère étonnant qu’un tel exploit soit attribué à la fois à Chen Tuan et à Yuan Liuzhuang. Enfin, des éléments empruntés à différentes légendes sont intégrés à la trame générale de la légende de Chen Tuan. Ainsi, il est question d’une montagne, le Jiuzhushan, situé dans la province du Guanxi dans le récit de Liu, et du Huashan de la province du Shaanxi dans la légende plus classique de Chen Tuan. De même, il semble que, dans le récit de Liu, la légende de la grotte soit tirée de l’histoire de Mayi alors que les neuf ans de méditation font référence à celle de Damo.

66 La véracité historique de ce récit importe moins que le fait qu’il puisse être partagé entre amis, rassemblés autour d’un intérêt commun pour la divination : il a été transmis à Liu dans un parc de Qingdao lors de son périple et lui-même m’en a fait part lors de nos discussions dans le parc à proximité de l’Université du Henan.

67 Le cas de M. Tang, frère aîné d’une de mes informatrices à Kaifeng, permet de retracer le processus de transfert de savoirs divinatoires sur trois générations. Tang m’a en effet

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enseigné les différentes techniques qu’il a lui-même reçues de son maître et qu’il utilise couramment dans les petites et les grandes affaires de la vie, pour lui-même ou pour conseiller des amis. Lors de mes séjours à Kaifeng, il venait ainsi régulièrement me rendre visite le soir, après son travail, et nous nous installions à la table de la salle à manger pour étudier, un papier et un crayon sous la main. Lors de ces rencontres, ravi de constater mon intérêt et de trouver quelqu’un digne de recevoir cet enseignement, Tang a endossé consciencieusement le rôle de professeur. Deux ans auparavant, il avait tenté d’initier sa belle-sœur mais celle-ci, « seulement diplômée du collège », n’avait jamais persévéré. Nos discussions se poursuivaient également lors de promenades dans Kaifeng.

68 Né en 1955 à Kaifeng, Tang est diplômé du lycée et travaille aujourd’hui dans une entreprise pharmaceutique. Comme dans de nombreux cas, ce sont des circonstances malheureuses qui l’ont poussé à s’intéresser à la divination. Au début des années 1980, Tang occupait un emploi de chauffeur dans une entreprise de transport. En cette période d’ouverture économique, un de ses amis a décidé d’ouvrir une usine. Tang s’est associé avec lui et a récolté 40 000 yuans auprès de sa famille. Malheureusement, l’entreprise a fait faillite et l’ami a été arrêté pour activités illégales. Pour Tang, la honte de ne pouvoir rembourser sa famille a été insupportable. Il a démissionné et quitté Kaifeng. Dans le foyer de travailleurs où il s’est installé, il a rencontré un vieux monsieur auquel il a confié ses problèmes d’endettement. Ce dernier, trop fatigué pour se déplacer, lui a alors proposé d’aller de sa part au Jiangxi pour affaires contre une rémunération avec laquelle il pourrait commencer à rembourser ses dettes. Tang s’est donc rendu dans le Jiangxi et a profité du voyage pour visiter le Jiuhuashan, l’une des quatre montagnes sacrées du bouddhisme en Chine.

69 Alors qu’il logeait dans un refuge au pied de la montagne, il a rencontré un moine taoïste auquel il a raconté ses problèmes. Le lendemain, pendant l’ascension, le moine lui a prédit qu’il arriverait à rembourser ses dettes en trois ans et a offert de l’aider. Tang a ainsi passé deux semaines au Jiuhuashan pendant lesquelles le maître lui a enseigné la technique meihua yishu (numérologie de la fleur de prunier) tout en lui enjoignant de ne pas révéler ce savoir précieux à n’importe qui. Sur les conseils du moine, Tang s’est ensuite lancé dans la restauration et de bonnes affaires lui ont permis de rembourser ses dettes en deux ans. Cinq ans après leur première rencontre, Tang est retourné au Jiuhuashan rendre visite à son maître. Il y a séjourné un mois pendant lequel le moine lui a enseigné d’autres techniques divinatoires.

70 Un jour où nous pique-niquions dans un parc de Kaifeng, Tang m’a montré un genre de jeu divinatoire appelé « un dragon chinois » (Zhonghua yitiao long) ou « méthode de divination par les cartes » (pukepai suanming fa) qui se pratique avec un jeu de cartes classique, à la manière d’un solitaire. Il le tenait lui-même d’un ami qui lui a raconté que cette méthode aurait été rapportée par un militaire japonais qui aurait vécu en Chine pendant l’occupation. Celui-ci s’appelait Shanben et, comme il est mort à l’âge de 56 ans, il a été surnommé par la suite Shanben 56 (Shanben Wushiliu). Pendant son séjour en Chine, il aurait consulté un maître du Livre des Mutations pour savoir si l’attaque prévue sur Pearl Harbour réussirait. Le maître exécuta la méthode du « dragon chinois » et prédit que l’attaque sur Pearl Harbour serait un succès, mais que le Japon perdrait finalement la guerre. Shanben 56 mourut en avion pendant la guerre. Parmi les affaires qu’il avait laissées dans un coffre, on retrouva un cahier où il avait consigné la méthode transmise par le maître chinois ainsi que la prédiction sur

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l’attaque de Pearl Harbour. De nos jours, me raconte Tang, les Japonais croient encore beaucoup à cette méthode divinatoire.

71 Il est difficile d’évaluer la popularité de cette technique dont je n’ai retrouvé aucune autre trace. De brèves recherches révèlent que « Shanben 56 » n’est autre que Yamamoto Isoroku (1884-1943), dont le prénom signifie bien « 56 » mais qui est mort à l’âge de 59 ans34. Commandant en chef de la Marine Japonaise pendant la deuxième guerre mondiale, il a a été responsable de l’attaque sur Pearl Harbour. Son avion a été abattu par une embuscade américaine lors d’un tour d’inspection en avril 1943. Je n’ai retrouvé aucune trace de son rôle dans la transmission de la méthode du « dragon chinois ». Cependant, quelques éléments peuvent expliquer cette légende. Tout d’abord, en tant que commandant en chef, Yamamoto était amené à planifier et donc, d’une certaine manière, à formuler des « prédictions » sur de grands événements, d’autant plus relevées par les historiens qu’elles se sont avérées justes35. De tels récits ne sont pas rares, surtout dans le domaine militaire où l’on connaît l’importance accordée aux arts divinatoires dans l’histoire chinoise. Enfin, Yamamoto était connu pour être un joueur passionné de poker, ce qui a peut-être nourri la légende de la transmission de cette « méthode de divination par les cartes ».

72 La transmission du savoir de maître à disciple revêt des formes diverses selon qu’elle s’établit entre spécialistes religieux36, entre praticiens professionnels37, ou même entre l’instigateur d’un mouvement religieux et ses adeptes38. J’expose ici une forme peu institutionnalisée du lien d’enseignement qui se noue entre un spécialiste et un amateur ou entre deux amateurs. Les différents principes que révèlent les exemples de Liu et de Tang, ainsi que ma propre expérience d’apprentissage, me semblent néanmoins communs au mode de transmission orale de savoirs traditionnels dans le cadre d’une relation personnelle.

Les mécanismes de la transmission de maître à disciple

La construction d’une relation privilégiée

73 La transmission s’accomplit au cours de la construction d’une relation privilégiée entre la personne qui enseigne et celle qui apprend. Cette relation est tout d’abord fondée sur une « affinité prédestinée » (yuanfen), favorisée par le voyage et l’éloignement géographique initial des deux personnes. Plus les personnes viennent de loin, plus le yuanfen sera considéré comme fort. De même que Tang était destiné à rencontrer son maître au Jiuhuashan, il ne cesse de répéter que nous nous comprenons et communiquons selon une affinité prédestinée (youyuan). Si ce lien privilégié fait défaut, la transmission s’arrête d’elle-même. Ainsi, Tang a essayé d’enseigner les techniques de divination à sa belle-sœur mais, selon ses dires, celle-ci n’était pas assez intelligente et n’arrivait pas à suivre. Il est en effet souvent sous-entendu que les rencontres prédestinées ont lieu entre des personnes qui sortent du commun.

74 L’apprentissage s’inscrit également dans la durée. Tang a ainsi pris soin de répartir son enseignement dans le temps. Ce n’est que petit à petit qu’il m’a révélé les différentes méthodes qu’il connaissait. À la fin d’une sortie ou d’une séance de travail, il m’annonçait, comme pour me tenir en haleine : « La prochaine fois, je t’apprendrai la

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technique du « dragon chinois ». » Lui-même a investi du temps dans notre relation et n’a pas hésité à empiéter sur ses horaires de travail pour que nous nous rencontrions.

75 La transmission d’histoires ou de savoirs considérés comme précieux ou intimes se fait dans des moments particuliers. Ainsi, malgré son caractère extraverti, c’est avec une certaine pudeur que Tang m’a dévoilé les circonstances de sa rencontre avec son maître. Un jour où nous nous promenions dans un parc, nous sommes parvenus à une plate-forme circulaire au centre de laquelle trônait une pierre. Nous avons fait deux fois le tour de la plate-forme en silence puis Tang a récité un poème de Mao et un poème de Li Bai. Nous nous sommes ensuite assis sur un banc à proximité. Profitant du calme qui nous entourait, Tang m’a raconté comment il avait rencontré son maître. Sur le moment, j’ai été surprise qu’il récite ces poèmes d’un air solennel qui contrastait avec sa décontraction habituelle. Ce n’est que plus tard que j’ai fait le lien entre les poèmes et le récit de son histoire personnelle. La marche en silence et les poèmes ont contribué à créer une atmosphère et un instant propices aux confidences. Par la suite, j’ai pu observer une nette évolution dans notre relation. Si, au début, Tang faisait preuve d’une certaine retenue, ma constance dans mon désir d’apprendre l’a rassuré. Nous nous sommes alors retrouvés de moins en moins autour de la table de travail et de plus en plus lors de sorties avec des amis. La dimension ludique des méthodes divinatoires telle qu’elle apparaît notamment dans le jeu de cartes du « dragon chinois » n’en diminue pas le sérieux. Au contraire, les loisirs et le temps passé ensemble renforcent l’amitié et créent des circonstances favorables à la transmission et à la pratique entre personnes de confiance.

Une transmission orale et secrète

76 Une autre caractéristique du processus de transmission est l’importance accordée à l’oralité. Ni Liu ni Tang n’ont cherché à vérifier dans des livres les légendes attachées aux techniques qu’ils ont apprises oralement. Ils ne se soucient pas non plus d’approfondir leur savoir en recherchant les ouvrages dont il est issu et qui sont pourtant faciles à trouver de nos jours. Ainsi, de même que Liu ignore l’existence du Shenxiang quanbian, Tang ne semble jamais avoir eu le Meihua yishu entre les mains et n’a jamais entendu parler de Shao Yong, personnage pourtant célèbre de l’histoire chinoise à qui l’ouvrage est attribué.

77 Tang entretient même une sorte de défiance vis-à-vis de l’enregistrement écrit. Ainsi, lorsqu’il m’a enseigné la méthode du « dragon chinois », il a refusé que je prenne des photos ou des notes. Il ne concevait pas que je puisse écrire en même temps qu’il parlait et s’arrêtait dès que je prenais mon crayon. De plus, comme il voulait contrôler le processus de démonstration, ces pauses le coupaient dans son élan : « Regarde d’abord, tu écriras ensuite ! C’est mieux que je t’explique d’abord oralement (yanchuan bijiao hao). »

78 Enfin, les dispositifs mnémotechniques, les symboles et les supports tels que le jeu de cartes facilitent la transmission orale. Il est ainsi beaucoup plus facile de faire une démonstration de la méthode du « dragon chinois » que d’en rendre compte par écrit. De même, lors de nos promenades, Tang m’a fait travailler sur des cas de la méthode meihua yishu en traçant les chiffres et les trigrammes dans la terre battue avec son briquet.

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79 Cette importance donnée à l’oralité est indissociable d’une autre dimension, celle du secret de la transmission. De même que son maître lui a recommandé de ne pas révéler les techniques à n’importe qui, Tang m’a expliqué qu’elles ne se transmettent qu’exceptionnellement de vive voix entre personnes de confiance et que je dois me contenter de les appliquer pour moi-même. Il décrit ainsi la valeur de son enseignement : Ce que je t’ai appris aujourd’hui [sur la méthode liuren], personne ne voudra jamais te l’expliquer. Les gens aiment parler du Livre des Mutations, des cinq agents etc., mais ces techniques précises que l’on peut apprendre en une heure, personne ne te les enseignera. Et il faut savoir que même s’il n’a fallu qu’une heure pour t’expliquer le liuren et que les explications tiennent en une feuille, quand il s’agit d’étudier soi-même, on peut y passer trois ans.

80 Un incident m’a un jour fait prendre conscience de la façon dont le mystère est entretenu autour des pratiques de divination. Alors que nous nous promenions avec une amie de Tang, celle-ci nous a fait part de son inquiétude au sujet de son fils qui s’apprêtait à passer les concours d’entrée au lycée. Tang m’a alors proposé, comme exercice, de calculer avec la méthode liuren si le fils pourrait entrer dans un bon lycée. Encore peu entraînée, j’ai commencé à calculer à haute voix pour que Tang puisse contrôler que je ne me trompais pas. Celui-ci est alors venu rapidement s’asseoir à côté de moi en me demandant de calculer dans ma tête pour ne pas révéler la procédure. Nous avons débattu entre nous à voix basse, puis Tang a donné le résultat à la mère. L’attitude de Tang est pourtant moins sectaire et plus logique qu’il n’y paraît, du fait du paradoxe inhérent aux techniques de divination : si les calculs proprement dits peuvent être enseignés en très peu de temps, l’interprétation des résultats nécessite des années d’apprentissage et d’expérience. Faire entrevoir la logique de ces techniques sans expliciter le système de pensée dans lequel elles s’inscrivent donne une fausse image de simplicité qui dévalorise les arts mantiques et nuit à leur compréhension.

Risques et privilèges du maître

81 Même s’il n’a jamais été question de relation officielle de maître à disciple entre nous, Tang a rapidement pris goût à son rôle de professeur. L’ignorance qu’il me prêtait dans le domaine divinatoire et mon statut d’étrangère le mettaient en effet dans une position particulièrement valorisante au regard de ses compétences, finalement assez réduites. Pourtant, ce genre de relation, qui instaure une grande différence entre celui qui sait et celui qui ne sait pas, met parfois le maître dans une situation délicate. Du fait du prestige de sa position, le maître n’a pas le droit de se tromper. Or, le risque d’erreur est d’autant plus grand que les techniques divinatoires, comme tous les savoirs qui comportent une forte composante mathématique, s’oublient facilement si elles ne sont pas pratiquées régulièrement. Ainsi, à plusieurs reprises, Tang a dû dissimuler ses hésitations ou inventer des réponses à mes questions pour masquer son ignorance.

82 Une anecdote m’a ainsi fait réfléchir sur la crédibilité que je pouvais accorder à son enseignement. Dans la méthode du « dragon chinois » qui se pratique avec un jeu de cartes classique, les valeurs onze, douze et treize sont attribuées respectivement au valet, à la dame et au roi. Lorsque Tang m’a expliqué cette méthode, je lui ai demandé s’il existait en Chine des jeux de cartes qui n’utilisent pas les chiffres arabes mais le système de notation numérique chinois. Dans un tel cas, la dame correspond-elle par exemple au nombre douze ? Entraîné par son enthousiasme, Tang s’est mis à

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m’expliquer sur un ton péremptoire qu’il y a dans le monde trois types de chiffres : les chiffres arabes, romains et chinois. Il existe en effet des jeux de cartes qui utilisent les chiffres chinois où la dame correspond au douze. Et de m’expliquer ainsi le sens de la lettre Q inscrite sur la carte de la dame du jeu que nous utilisons : « En chiffre arabe minuscule, on écrit “12”, et en chiffre arabe majuscule, on écrit “Q”. “Q” signifie “12” en chiffre arabe majuscule. »

83 Un moment de surprise passé, cette anecdote révèle, d’une part, le dogmatisme inhérent à la position du maître et, d’autre part, remet en cause la vision souvent véhiculée par les travaux historiques sur les systèmes divinatoires, de devins « experts de leur art »39. La divination est pratiquée tout autant par des praticiens professionnels et des érudits que par des amateurs plus ou moins éclairés. L’expertise se définit ainsi comme un continuum et non comme une catégorie figée et bien délimitée. Les pratiques légères, ludiques voire dilettantes de la divination sont également dignes d’intérêt en ce qu’elles donnent accès à un domaine qui échappe justement à la rhétorique de l’expertise, celui des rythmes et des usages de la vie quotidienne.

Conclusion

84 Pour les réformateurs taïwanais, engager les arts divinatoires dans la voie de la recherche académique et de l’enseignement supérieur signifie non seulement adopter une démarche scientifique mais également rendre ces savoirs accessibles au plus grand nombre. En effet, les théories mantiques, une fois standardisées et partagées par une communauté de spécialistes, peuvent être appliquées de manière mécanique et univoque à la manière de théorèmes mathématiques. Elles peuvent donc être transmises dans des livres et expliquées par des enseignants qu’une formation sanctionnée par un diplôme reconnu par l’État rend interchangeables. Ils nourrissent ainsi le projet de passer d’un mode de transmission oral, secret et individuel, fondé sur la relation personnelle et élective entre le maître et son disciple, à un enseignement uniformisé, collectif et ouvert à tous, dans le cadre d’une institution extérieure et indépendante des individus40.

85 Peut-on alors parler d’une crise du modèle de transmission de maître à disciple ? L’exemple des praticiens amateurs de Kaifeng montre pourtant le rôle que jouent la relation personnelle et l’oralité dans la transmission des savoirs traditionnels sur le continent. Dans ce contexte, la qualité des savoir-faire transmis importe peu : les lacunes, simplifications abusives et affabulations qui émaillent les discours des praticiens témoignent de ce qui se perd et se transforme dans ces processus oraux. C’est au contraire l’appropriation personnelle des méthodes et leur usage efficace dans la vie quotidienne qui sont valorisés.

86 Comme tout système d’interprétation binaire, l’opposition entre transmission orale et transmission écrite est simplificatrice et ne recoupe pas entièrement la distinction que j’ai établie entre un mode de transmission de maître à disciple et un mode de transmission de type universitaire. Ainsi, même s’ils ne sont pas destinés à être isolés de l’enseignement du maître, les écrits jouent un grand rôle dans la construction de l’identité des écoles de pensée à Taïwan. À l’inverse, le mode d’apprentissage des praticiens amateurs de Kaifeng n’exclut pas entièrement les sources écrites. Quant aux cours collectifs qui s’appuient sur des manuels, répandus à Taïwan, ils n’empêchent pas

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le professeur de développer des relations personnelles avec ses élèves et de poursuivre son enseignement par d’intenses discussions lors de sorties ou loisirs communs.

87 Il me semble néanmoins possible de dire que l’importance accordée à l’écrit dans le transfert des connaissances favorise les querelles d’experts, les controverses techniques, l’obsession de l’authenticité, la compétition et la hiérarchisation des techniques et des spécialistes. Au contraire, la primauté de l’oralité met la relation humaine au centre d’un processus de transmission qui lie le transfert de connaissances à la rencontre, favorisée par le voyage et la proximité des montagnes sacrées, et à l’intimité qui naît du partage des expériences et des récits légendaires. Ainsi, davantage que les expressions « maître/disciple », employé principalement dans le cas de praticiens professionnels ou de spécialistes religieux, ou « professeur/élève », utilisé dans le cadre des cours de divination à Taïwan, c’est le vocabulaire de l’amitié qui prédomine dans les liens qui se nouent entre praticiens amateurs.

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ZHANG, Yaowen 張耀文 (1970). Ziwei chanweilu pingzhu, wu juan 紫薇闡微錄評註, 五卷 (Commentaires sur la méthode de la Sublimité pourpre, 5 tomes). Lugang, Yiwen.

ZHONG, Yiming 鍾義明 (1995). « Préface ». In Mingli yongshen jinghua pingzhu 命理用神精華評註 (Commentaires sur les esprits dans l’horoscopie). Taipei, Wuling.

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ANNEXES

Glossaire

Abe Taizan 阿部泰山 baihua 白話 baishi 拜師 bazi 八字 bendiren 本地人 biantai fengsu 變態風俗 biguan 壁觀 buqiuren 不求人 cezi 測字 Chen Tuan 陳摶 Chen Xiyi 陳希夷 Chen Yueqi 陳岳Ñ Damo 達摩 dizhi 地支 Doushu quanji 斗數全集 fengshui 風水 gejue 歌訣 guiren 貴人 guoxue 國學 Ho Ping-ti (He Bingdi) 何炳棣 ji 吉 jiao 珓 ou 筊 koujue 口訣 Lao Kan 勞榦 Lao Siguang 勞思光 Li Bai 李白 Liu Bang 劉邦 liuren 六壬 lumingxue 祿命學 Lunheng 論衡 Lü Dongbin 呂洞賓

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Ma Yingjiu 馬英九 Mayi 麻衣 Mayi shenxiang 麻衣神相 Meihua yishu 梅花易數 mingli 命理 mingshu 命書 minshengzhuyi 民生主義 pai 派 pochu mixin yundong 破除迷信運動 pukepai suanming fa 撲克牌算命法 qian 籤 qimen dunjia 奇門遁甲 Ruli Jushi 如理居士 sanshi 三式 Satô Rikuryû 佐藤六龍 sha 煞 Shanben Wushiliu 山本五十六 Shao Yong 邵雍 shengming zhexue 生命哲學 Shenxiang quanbian 神相全編 shisheng guanxi 師生關係 shushu 術數 sizhu 四柱 suanming re 算命熱 taiyi 太乙 Taizong 太宗 tiangan 天干 toupai 透派 waishengren 外省人 Wang Chong 王充 Wei Qianli 韋千里 Wu Zhangyu 吳彰裕 wushu 五術 xiandai pai 現代派

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Xu Lewu 徐樂吾 Yamamoto Isoroku 山本五十六 yanchuan bijiao hao 言傳比較好 yixue 易學 Yongle 永樂 youyuan 有緣 Yuan Liuzhuang 遠柳莊 Yuan Shushan 袁樹珊 Yuan Zhongche 遠忠撤 yuanfen 緣分 zeri 擇日 zhanbu 占卜 Zhang Yaowen 張耀文 zhanyan pai 占驗派 Zhonghua yitiao long 中華一條龍 zhu 柱 ziweidoushu 紫微斗數 Poème rimé : « Déterminer l’heure à partir du jour » Jia ji qi jia zi 甲己起甲子 Yi geng qi bing zi 乙庚起丙子 Bing xin qi wu zi 丙辛起戊í Ding ren qi geng zi 丁壬起庚子 Wu gui qi ren zi 戊癸起壬子.

NOTES

1. Du nom de la neuvième composante du cycle des dix troncs célestes, voir p. 24. 2. Sur l’histoire de ces méthodes, voir Ho 2003. 3. « Procédures pour l’abolition des métiers de la divination, de l’astrologie, de la physiognomonie, de la chiromancie, de la sorcellerie et de la géomancie » (1928), « Interdiction des médecines divinatoires » (1929), « Procédures pour l’interdiction et la gestion des objets et des métiers de la superstition » (1930). Voir Duara 1991 : 79-80. 4. Voir Lackner 2012 qui constitue une étude préliminaire à une biographie de Yuan Shushan. 5. Comme le note également M. Lackner, dans ce contexte, c’est par rapport à la science et non à la religion que les arts mantiques se positionnent. 6. Lackner 2012 : 13. 7. Foo 2009. 8. Feuchtwang 1974 : 277. L’auteur mentionne ainsi un rituel de divination accompli dans un temple à la suite d’un incendie pour connaître la raison de la colère du dieu. 9. Sô Keirai 1939.

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10. Zhong Yiming 1995. L’auteur signale l’ouvrage de Bai Huiwen comme le seul livre d’horoscopie disponible à Taïwan à cette époque. Cet ouvrage est répertorié dans le catalogue du National Digital Archives Program où il est classé dans la catégorie « Bibliothèque de la résidence du gouverneur de Taïwan ». Voir Bai Huiwen 1936. 11. Xu Lewu 1959. 12. Des ouvrages d’astrologie à l’origine de la forme moderne de la méthode ziweidoushu ont été introduits au Japon dès le IXe siècle. Voir Ho 2003 : 69-73. 13. Satô Fumio et Satô Rikuryû 1968 ; Abe Taizan 1968. 14. Zhang Yaowen 1970. 15. Satô Rikuryû et Zhang Yaowen 1975. 16. Il est ainsi remarquable que, malgré le rôle du Japon dans la transmission et le développement des arts divinatoires à Taïwan, les touristes japonais se rendent aujourd’hui dans les « rues de la divination » à Taipei pour retrouver des pratiques considérées comme plus « authentiques », du fait de l’origine chinoise, certes lointaine, de la divination japonaise mais aussi de l’image de conservatoire du patrimoine chinois dont bénéficie Taïwan par contraste avec la Chine continentale. 17. Cette recherche a été réalisée en décembre 2011. La recension de 1395 ouvrages est loin d’être exhaustive et dépend notamment du classement des bibliothécaires. Une recherche portant sur les 404 publications contenant « doushu » dans le titre entre 1980 et 2011 fait apparaître une répartition similaire. 18. Ho 2003. 19. David Kim note un phénomène semblable dans son étude sur les chamans-devins dans la société coréenne contemporaine : contrairement à ce que l’on peut lire dans la littérature folkloriste, les chamans sont loin d’entretenir une relation à vie avec le chaman qui les a initiés. Une fois seuls, ils doivent s’appuyer sur d’autres sources de connaissance comme la littérature académique ou des récits de fiction pour parfaire leur pratique. Voir Kim 2009 : 76. 20. Ruli Jushi 2010 : 106. 21. Ruli Jushi 2010 : 107. 22. Guenzi 2004. 23. Les wushu désignent les techniques taoïstes de longévité (shan 山), la médecine (yi 醫), les techniques de calcul du destin (ming 命), la divination (bu 卜) et la physiognomonie (xiang 相). 24. Sur l’institutionnalisation et la transmission de la médecine traditionnelle chinoise en Chine continentale, voir Marié 2011. Jusqu’au début du XXe siècle, la transmission de maître à disciple était le principal mode d’enseignement de la médecine traditionnelle chinoise, fondé sur la relation élective, personnelle et morale entre un maître et son élève, le partage de la vie quotidienne et des voyages, l’observation, l’étude intensive et la mémorisation des ouvrages classiques. À partir des années 1950, l’enseignement de masse organisé dans les universités de Chine continentale se caractérise au contraire par l’apprentissage collectif, la mobilité des étudiants, la standardisation des programmes et la faible intrusion de l’enseignement dans la vie personnelle des étudiants. À l’instar de l’essor des manuels de divination à Taïwan, la standardisation de l’enseignement à l’université « a conduit à un tri dans les matières transmises et à un abandon de la lecture et de l’étude des classiques médicaux au profit de celles de manuels composés dans ce cadre nouveau » (Obringer 2011 : 15). 25. Cet historien sino-américain, membre de l’Academia Sinica, a été le premier président de l’Association of Asian Studies né en Asie. 26. Ho 2003 : 137. 27. Même la médecine traditionnelle chinoise, dont l’enseignement est pourtant institutionnalisé, n’échappe pas à cette dichotomie. Ainsi, dès les années 1950 en Chine continentale, des praticiens « déclaraient que la modernisation de l’enseignement rompait la continuité de la médecine chinoise en tant que tradition vivante et ils suggéraient une

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valorisation plus marquée des sources classiques et un retour aux méthodes d’enseignement traditionnelles » (Marié 2011 : 8). Aujourd’hui encore, la relation de maître à disciple n’a pas disparu et des professeurs forment des disciples (tudi 徒弟) à côté de leurs étudiants (xuesheng 學 生) de l’université. Face à un modèle de transmission de la médecine chinoise par l’université, qui a montré ses limites, on assiste même à la tentative, depuis les années 1990, de revalorisation de l’enseignement maître-disciple (Obringer 2011 : 16). 28. Une des cinq montagnes sacrées du taoïsme, située dans la province du Shandong. 29. L’expérience de Liu est typique du mode de vie itinérant et de l’univers de la figure populaire du jianghu 江湖 (littéralement « lacs et rivières »), ces chevaliers errants, moines, mendiants, devins ou vagabonds, au statut ambivalent : d’un côté, ils véhiculent l’image utopique d’individus libres, jouissant de pouvoirs surhumains et dont la réputation se forge sur le mode de la rumeur et de la légende ; d’un autre côté, ils évoluent aux marges de la société, comme l’exprime un autre sens, péjoratif, de jianghu qui signifie « charlatan ». 30. Le moine Bodhidharma dont il sera question plus loin. 31. Le futur empereur Gaozu 高祖 (256 ou 247-195 av. J.-C.), fondateur de la dynastie des Han. 32. Sur les légendes autour de Chen Tuan et les traités de physiognomonie qui lui sont attribués, voir Kohn 1986 et 1988. 33. Le lien avec Liu Bang n’est cependant pas fortuit. Le Shiji史記 rapporte en effet qu’un physiognomoniste avait prévu la montée en puissance de Liu Bang et lui donna la main de sa fille, la future impératrice Lü qui régna de -188 à -180 av. J.-C. (Chavannes, II : 325, 327-330). 34. Selon une tradition répandue, le prénom Isoroku fait référence à l’âge du père au moment de la naissance de l’enfant. 35. Ainsi, avant l’attaque sur Pearl Harbour, Yamamoto répondit de manière prophétique au Premier Ministre japonais qui l’interrogeait sur l’issue probable d’une guerre contre les États- Unis : « I shall run wild considerably for the first six months or a year, but I have utterly no confidence for the second and third years » (Gailey 1995 : 68). 36. Chez les moines taoïstes par exemple, le lien de maître à disciple est fondé sur le modèle lignager et est assimilé à la relation père-fils. Voir Herrou 2005, Goossaert 2009. 37. Pour une description de la formation de géomanciens professionnels auprès de maîtres dans un village du Sichuan dans les années 1990, voir Bruun 2003 : 118-127. 38. L’histoire de l’homme qui a lancé un mouvement messianique au début des années 1980 dans le Hunan en déclarant être le prochain empereur de Chine, ressemble en de nombreux points aux expériences de Liu et Tang : mise à l’épreuve dans l’adversité, établissement de liens privilégiés avec les futurs adeptes, quête de connaissance dans les montagnes sacrées, transmission de récits légendaires. Voir Anagnost 1985. 39. Ce phénomène est également constaté par D. Kim à propos des chamans coréens spécialistes de divination (Kim 2009 : 62). 40. Pour reprendre la distinction établie par l’anthropologue chinois Fei Xiaotong 費孝通 (1910-2005), ce changement de paradigme peut être interprété comme le passage d’un mode d’organisation sociale « différentiel » à un mode « organisationnel ». Voir Fei 1992.

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RÉSUMÉS

Cet article explore deux modes contrastés de transmission des savoirs divinatoires à Taïwan et en Chine populaire à l’époque contemporaine, l’un forgé sur le modèle universitaire et qui privilégie la transmission écrite, l’autre forgé sur le modèle de la relation de maître à disciple et qui privilégie la transmission orale. À Taïwan, en réaction à la dégradation de la qualité de la transmission et à la multiplication des écoles de pensée, des spécialistes des arts divinatoires ont entrepris de réformer les savoirs mantiques et leurs modes de transmission pour les adapter aux exigences scientifiques de la société contemporaine. Ils poursuivent en cela une entreprise de rationalisation qui a été initiée en Chine continentale à l’époque républicaine et qui se traduit, à Taïwan, par un essor des manuels de vulgarisation et une relative standardisation de la formation. Je propose ensuite de nuancer cette évolution par une étude de cas menée en Chine continentale qui met au contraire en évidence l’importance de la relation personnelle et de l’oralité dans la transmission des savoirs divinatoires. L’enseignement des techniques s’accomplit alors sur le mode de l’« affinité prédestinée », du voyage initiatique et de la transmission orale des légendes et des savoir-faire.

This paper explores two contrasting modes of transmission of divinatory knowledge in contemporary Taiwan and mainland China. One is built on the academic model which emphasizes written communication and the other one on the teacher to student relationship which favors oral transmission. In Taiwan, faced with the declining quality of teaching and the multiplication of schools of thought, divinatory arts specialists tried to reform their knowledge and teaching methods to make them fit with the scientific requirements of contemporary society. This endeavor which had already been launched in mainland China in the Republican era, resulted in Taiwan in a boom of popular handbooks and a standardization of training. Then, I qualify this evolution through a case study conducted in mainland China which, on the contrary, highlights the importance of personal relationship and orality in the transfer of mantic techniques. In this context, methods and know-how are taught through predestined affinities, initiatory journeys and legends.

本文探討當代臺灣及中國大陸占卜知識傳遞方式的對比,亦即學院派文本式教學和師生口傳 之間的差異。在臺灣,為因應占卜知識傳承品質的低落以及諸多門派林立的現象,占卜專家 嘗試重塑其知識Ê構,並發展新的教學方式,以迎合現代社會對於科學精神的要求。此一努力 實延續著自民國初期開始的改革方向,在當代臺灣發展出普及占卜手冊的大量出版,以及標 準化的訓練模式。然而,本文的第二部份藉由收集自中國大陸的個案研究,與在臺灣發生的 演變做一對比。亦即,占卜知識在當代中國的發展彰顯人際關係以及口授文化的重要性。在 此一脈落下,占卜知識的傳遞乃藉由缘分、旅行中的精神啟迪以及講述傳說而傳播。

AUTEUR

STÉPHANIE HOMOLA Doctorante en anthropologie au Centre d’études sur la Chine moderne et contemporaine (CECMC) de l’EHESS. Elle mène actuellement une thèse sur les pratiques de divination en Chine contemporaine et à Taïwan. Ses recherches portent également sur les religions chinoises et la « science populaire ». http://cecmc.ehess.fr/document.php?id=1218 À paraître :

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(2013). « Pursue Good Fortune and Avoid Calamity : The Practice and Status of Divination in Contemporary Taiwan ». Journal of Chinese Religions, n° 41 ; (2013). « From jianghu to liumang : working conditions and cultural identity of wandering fortune- tellers in contemporary China ». In Michael Lackner (dir.), Divination in Contemporary East Asia. China, Japan, Korea, Vietnam. Leyde, Brill.

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Astrologues et devins du Koryŏ (918-1392) : une analyse de l’histoire officielle Astrologers and Divination Specialists of the Koryŏ (918-1392): an Analysis of the Official History

Yannick Bruneton

Introduction

1 De multiples indices de la culture écrite du Koryŏ (dynastie des Wang, 918-1392) prouvent que les pratiques divinatoires, déclinées selon leurs différents domaines d’application, étaient largement répandues dans toute la société médiévale de la Corée. En témoignent des regards extérieurs à la péninsule coréenne comme celui de Yelü Chun (1062-1122) des Liao (907-1125), compilateur du traité de divination astrale du Xingming zonggua (984 ?), prétendant être le dépositaire des savoirs d’un « maître du pays » guoshi du Koryŏ1, ou bien de Xu Jing (1091-1127) des Song du Nord (960-1126) envoyé à la cour de Kaegyŏng (actuel Kaesŏng) au début du XIIe siècle. Outre le fait que l’intervention des devins et astrologues semble avoir été requise aux moments d’étapes charnières de l’existence, les praticiens des arts divinatoires auraient été issus de statuts sociaux situés à divers degrés de l’échelle sociale. Dans ces conditions, la connaissance des arts divinatoires du Koryŏ, des théories qui les sous-tendent, des conditions et des enjeux de leur pratique, de l’identité et des motivations de leurs praticiens et de leurs destinataires, s’avère constituer une donnée de premier ordre pour comprendre la société de l’époque. De plus, parce qu’en ce domaine les techniques les plus formalisées proviennent de l’État impérial chinois, l’analyse des sources et des pratiques divinatoires de la Corée médiévale présente également l’intérêt de nous renseigner sur la nature des relations entre royaume coréen et empire en termes de circulation des savoirs.

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2 Cependant, l’état sinistré de la production écrite de la période rend délicate la description des pratiques ainsi que la connaissance des détenteurs des techniques. Le caractère limité et dispersé des données explique sans doute la rareté des études menées jusqu’à présent sur les astrologues et devins du Koryŏ en Corée du Sud2, le pays le plus avancé dans les recherches historiques sur la période. Par commodité, la recherche s’est focalisée sur l’analyse des « astrologues » ilgwan, le terme le plus utilisé pour désigner les devins d’État dans l’histoire dynastique, le Koryŏsa (Histoire du Koryŏ, 1451)3.

3 En effet, l’histoire officielle du Koryŏ constitue la principale source d’informations dont nous disposons aujourd’hui à propos des arts divinatoires de l’époque. Toutefois, force est de constater qu’il y existe peu de lieux précis de description de l’activité et d’expression directe des acteurs de la divination d’État. À cette limite fondamentale, il faut ajouter que les mentions, qui les concernent, comportent une valeur idéologique du point de vue de l’historiographie : en comprendre la nature est essentiel pour analyser les sources officielles de la Corée. En effet, dans le cadre de la pensée confucianiste orthodoxe, il semble que les pratiques divinatoires aient été conçues de manière hiérarchisée avec une tolérance proportionnelle à leur degré de conformité à la doctrine. Dans l’histoire officielle du Koryŏ, la mention sélective de la divination agit comme un révélateur de la moralité de la politique des souverains : les calamités étant comprises comme des « blâmes du Ciel » ch’ŏn kyŏn4. Ainsi, les devins étaient utiles dès lors que leur tâche consistait à les révéler, mais les remèdes qu’ils préconisaient, eux, étaient souvent implicitement critiqués.

4 La présente contribution cherche à mettre en évidence le fonctionnement de la divination d’État du Koryŏ à partir d’une analyse des acteurs de la divination telle qu’elle est rapportée dans le Koryŏsa, sur la base des questions suivantes : de quels dispositifs institutionnels étaient-ils issus, comment étaient-ils formés, recrutés, et quelles étaient leurs activités ? À quels traités se référaient-ils et quelles sources produisirent-ils ? Comment étaient-ils organisés ? Sous quelles modalités leurs savoirs furent-ils transmis ? Finalement, comment caractériser les devins et la culture divinatoire spécifique du Koryŏ en dépit des limites des sources ?

Le dispositif institutionnel et la littérature spécialisée

Les bureaux spécialisés

5 Comprendre le fonctionnement de la divination sous la dynastie des Wang requiert la connaissance des institutions qui servirent de cadre à ses pratiques. L’administration en charge de l’astrologie et de la divination servit en effet de référence aux devins officiels et privés.

Dans la capitale principale

6 Dans le « traité sur l’Administration » du Koryŏsa, sous l’appellation de Sŏun’gwan (litt. « Office de la rédaction de l’observation des nuages »5), est relaté, selon l’usage historiographique chinois, l’historique du bureau de la Divination. L’exposé préliminaire des fonctions6 qui y étaient théoriquement assurées est incomplet : à l’astronomie ch’ŏnmun, aux lots calendériques yŏksu, aux prévisions climatiques ch’ŭk’hu

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et au service de la clepsydre kangnu, il faut ajouter l’observation des phénomènes naturels extraordinaires chaesang7, les pronostics par tirage poksŏ8 et la géomancie chiri9, la prévision des éclipses et le choix des dates fastes sŏnt’aek, l’indication de l’heure10. La date de fondation du Sŏun’gwan est imprécise (« début du pays »), mais l’office aurait été dès l’origine divisé en deux bureaux11, dont l’un était spécialisé dans l’astronomie12, l’autre dans les pronostics (et la géomancie)13, avec un nombre indéterminé de membres. Il faut attendre le règne de Munjong (r. 1046-1083)14 pour qu’une nomenclature de référence soit fixée : deux ensembles de onze et quinze fonctionnaires rattachés respectivement au sach’ŏndae (litt. « terrasse des Affaires célestes ») et au t’aesaguk (litt. « bureau du Grand Historiographe ») 15. Une telle configuration est cependant tout à fait insuffisante à rendre compte des activités en lien avec la divination à l’échelle du territoire.

7 En dehors de changements d’appellations, la principale réforme qu’aurait connue l’institution fut la fusion des deux bureaux16 par le roi Ch’ungsŏn (r. 1308-1313), suivie d’une réduction du nombre des fonctionnaires17. Kongmin (r. 1351-1374), en 1356, rétablit l’ancienne nomenclature de Munjong, puis la révisa temporairement18. Le dispositif ainsi décrit reprend les appellations chinoises des Tang, des Song et des Yuan, révélant l’influence de l’administration impériale comme modèle, à la différence des institutions du Silla (dates officielles : -57, 935). La rubrique omet de plus de signaler les relations entre les deux bureaux19, ainsi que leur rattachement (au ministère des Rites ou au cabinet des Livres pisŏsŏng)20. En 1389, le Sŏun’gwan devint le lieu d’accueil des écoles de géomancie p’ungsuhak et du yin-yang ŭmyanghak21, indiquant par là une tendance à la spécialisation des connaissances divinatoires.

8 Un des aspects de la divination d’État passé sous silence est la description du système de relais existant entre l’administration centrale et les bureaux locaux pour le relevé des phénomènes naturels. Nous ignorons les modalités de production et de circulation de l’information entre la capitale et la province sans lesquels la consignation des 3124 notations du traité des Cinq agents aurait été impossible. Il est vraisemblable que le bureau d’Astrologie comportait des annexes provinciales dont les membres effectuaient des relevés climatiques et inspectaient les lieux symbolisant le pouvoir dynastique. Un inventaire manuscrit de 1230 rapportant l’ensemble des possessions du monastère de Susŏn22, signé de la main du sasin (litt. « préposé aux heures ») Yun Ch’ang (?- ?), et du saryŏk (litt. « préposé au calendrier ») Sim Chun (?- ?), deux charges de devins de 9 e (dernier) échelon, suggère l’existence de tels préposés dans les provinces. Nous savons en revanche qu’il existait des institutions autonomes dans une des capitales secondaires du territoire.

L’école de divination de la capitale de l’Ouest

9 Établie grande préfecture de défense dès 918, puis élevée au rang de capitale secondaire (capitale de l’Ouest)23, P’yŏngyang fut l’objet de l’attention de T’aejo Wang Kŏn (r. 918-943), le fondateur de la dynastie. Outre ses multiples déplacements dans la cité, il la dota d’un système de fortifications, la repeupla et en fit un centre urbain, démographique, et surtout militaire. La cité de l’Ouest constituait ainsi le poste avancé en vue de la reconquête des anciens territoires du Koguryŏ, dont la filiation avec le Koryŏ était revendiqué par le choix du nom de pays24. Les historiographes laissent entendre que T’aejo conçut le dessein de faire de P’yŏngyang la capitale principale, projet qu’il aurait abandonné en 932 en raison de la présence de signes jugés

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défavorables par les devins d’État25. La cité était néanmoins considérée comme un haut lieu de mémoire de l’histoire de la péninsule, un site fondateur du point de vue de la civilisation coréenne, justifiant des cultes nombreux et anciens26. À partir de 922, puis en 990 et en 1116, la capitale de l’Ouest ne cessa de s’enrichir d’un arsenal d’institutions séparées lui conférant autonomie vis-à-vis de la capitale principale, notamment dans les domaines de la défense, de la diplomatie et de la formation des lettrés fonctionnaires. Le statut ainsi acquis au XIIe siècle était sans équivalent. Les mesures prises par Yejong (r. 1105-1122) aboutirent à la mise en place d’une annexe du bureau d’Astrologie, remplaçant le bureau de la Clepsydre27, avec un nombre de membres sans quota, dirigé par un haut fonctionnaire au titre de charge cumulée. Une telle promotion eut des conséquences importantes puisqu’elle permit l’émergence de devins, qui revendiquèrent, une douzaine d’années plus tard, le transfert de la capitale à P’yŏngyang28.

La formation, le recrutement et la carrière

10 Dans la capitale, après l’instauration du concours de recrutement des fonctionnaires (958) inspiré du modèle des Tang, les aspirants devins étaient censés être formés au sein des sections spécialisées et subalternes chap ŏp dites de divination pok ŏp et de géomancie chiri ŏp29. Malheureusement, à la différence d’autres sections, nous n’en connaissons pas les lauréats30. À partir de 1136, fut établie la liste des ouvrages de référence (pour la section de géomancie seulement) servant à tester les connaissances théoriques des futurs devins fonctionnaires31. Dans l’administration, le rôle des devins d’État était purement consultatif : in fine c’étaient les conseillers d’État (sinon le roi) qui décidaient. Toutefois, par leur relative liberté de parole (pour dénoncer indirectement les carences politiques)32, leur capacité de persuasion, leur implication dans les processus de décision, ils jouaient un rôle décisif dans la vie politique. Autrement dit, aucune action politique un peu ambitieuse ne pouvait se réaliser sans leur collaboration.

11 Du point de vue économique, les devins, à échelon égal, recevaient un traitement inférieur en « appointements et commis » à celui de leurs homologues civils et militaires, en tant que techniciens issus des matières subalternes du concours33. Il semble que le rattachement à la section de géoscopie, au moins temporaire, rendait possible la rétribution d’experts indépendants. On trouve ainsi mention de rangs monastiques concernés par ce type de disposition34, révélant la reconnaissance de compétences de religieux dans le domaine. De fait, dans un système où la compétence primait35, il existait des modalités souples de recrutement des devins, autres que la formation par les sections spécialisées36. Toute personne jugée apte pouvait être recrutée pour les besoins de l’État dans des structures souples et collégiales de type « conseils temporaires » togam37. Ces cellules rendaient ainsi admissible la collaboration de séculiers et de religieux dans l’administration du Koryŏ, inimaginable dans le cadre plus rigide de l’État impérial.

12 Kim Ch’anghyŏn, qui a analysé les carrières de devins, conclut qu’il fallait une trentaine d’années pour qu’un fonctionnaire ayant débuté son parcours au bas de l’échelle parvienne à une charge de direction du bureau de la Divination. Il distingue aussi les devins ayant fait toute leur carrière dans le bureau (ou avec des passages entre le bureau de la Divination et celui d’Astrologie) des hauts fonctionnaires qui en

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occupèrent la direction en cumul. Le cumul des charges permit à certains d’intégrer une autre administration. Ainsi, en certaines circonstances (reconnaissance du mérite envers l’État), des devins fonctionnaires d’origine furent nommés conseillers d’État38. Du point de vue de l’origine sociale, les devins étaient principalement issus des clercs de province hyangni ou des ordres civil et militaire subalternes. Après la période de prise de pouvoir par les militaires (1170-1270), on constate des cas plus nombreux de nomination de militaires à des charges de divination : l’art militaire de l’époque recourant fréquemment aux pronostics divinatoires39. À la fin de la période, le passage par un poste de devin aurait constitué pour les clans des chefs de localités une voie de transition dans un parcours visant une haute charge civile40.

13 En plus de reconstituer les trajectoires des devins au sein de l’administration, il est nécessaire de saisir la nature de leurs activités : pour cela, analyser les traités administratifs du Koryŏsa s’avère indispensable.

Les traités astronomiques et divinatoires du Koryŏsa

14 Dans l’histoire dynastique, trois mémoires administratifs reflètent les attributions concrètes des astrologues et devins officiels : le traité d’Astronomie, celui de Calendérologie et celui des Cinq agents41.

Le traité d’Astronomie ch’ŏnmun chi

15 Le traité d’Astronomie précède celui des calendriers et des Cinq agents42, au début de la Section des mémoires administratifs chi. On y décèle l’influence du Yuanshi dans la structure comme dans le contenu43. Deux grandes parties sont dédiées respectivement aux « éclipses de soleil » ilsik (peu nombreuses) ; et aux « éclipses de lune wŏlsik et dérèglements astraux sŏngbyŏn » (majoritaires). Les observations de phénomènes célestes considérés comme irréguliers y sont rapportées par catégorie et chronologiquement. Elles résultent de l’activité régulière et scrupuleuse44 des astrologues de la cour. L’abondance des notations s’explique par le choix des compilateurs de l’histoire officielle de rapporter de manière exhaustive tous les relevés de dérèglements astraux consignés dans les sources primaires comme critères d’évaluation de la politique des souverains de la dynastie précédente45. En complément, on trouve sporadiquement d’instructifs commentaires d’astrologues. Ces derniers étaient placés sous la surveillance des censeurs et faisaient l’objet de blâmes s’ils ne prédisaient pas les éclipses en temps et en heure.

Le traité de Calendérologie ryŏk chi

16 Selon l’introduction du traité de Calendérologie46, la cour du Koryŏ se serait contentée d’utiliser le calendrier Xuanming (823 ?) des Tang47, sans développer de théories particulières et sans tenir compte des multiples changements de calendriers (vingt- deux) que connut la dynastie des Song. La réforme la plus notable intervint sous le règne de Ch’ungsŏn par l’adoption du calendrier Shoushi des Yuan en 128148, mais les astrologues auraient continué à se référer au précédent calendrier pour déterminer les dates des éclipses de soleil et de lune. Les notations du traité reprennent effectivement celles du Yuanshi49. En réalité, nous savons que d’autres calendriers impériaux furent introduits au Koryŏ, notamment le Jianxing des Song en 102250 et le Datong des Ming en

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137051. En outre, le Dayan li (729)52 était bien connu des astrologues de Kaesŏng 53, comme d’autres travaux divinatoires du moine Yixing (673-727)54. En outre, il faut signaler qu’au cours de la dynastie furent élaborés des calendriers par les astrologues de la capitale coréenne afin de tenter de diminuer les écarts entre les théories et les observations, mais aussi de prévenir des dérèglements. En 1052, effectivement, Munjong ordonna aux membres du bureau de la Divination de rédiger cinq calendriers particuliers55 afin de prédire les infortunes à venir 56 : un calendrier des Dix Essences sipchŏng, des Sept Astres ch’iljŏng, des Révolutions visibles hyŏnhaeng57, du Cycle caché tun’gap et du Grand Un T’aeil. De plus, on attribue en 1218 au président du bureau d’Astrologie Kim Tŏngmyŏng (?- ?) la rédaction d’un « nouveau calendrier » sin ryŏk 58. Fort de ce constat, les historiens sud-coréens se sont depuis longtemps interrogés sur l’existence d’une culture calendérique propre au Koryŏ, développée dans le souci de réduire les erreurs des calendriers des Song en usage59. Les astrologues avaient en effet la possibilité d’effectuer et de consigner leurs propres observations des phénomènes célestes à partir d’un observatoire ch’ŏmsŏngdae situé à proximité du palais à l’intérieur de l’enceinte royale60 dont la construction daterait du début de la dynastie61. Son usage fut considéré comme suffisamment important pour expliquer l’adoption en 1023 du terme sach’ŏndae en remplacement de t’aebokkam62.

17 Il est intéressant de noter dans le Koryŏsa la présence sous l’influence du bouddhisme d’éléments d’astrologie indienne tels que les « quatre astres invisibles » sa ŭm sŏng (dont Rahu et Ketu)63. Leur mention prend son sens dans le cadre de l’idéologie ritualiste du bouddhisme d’État qui accordait une grande place aux cérémonies originaires de la culture du bouddhisme ésotérique des Tang64. Ces astres sont ainsi mentionnés par exemple dans la « cérémonie d’extinction des calamités » sojae toryang65, un des rituels conjuratoires parmi les plus fréquemment mentionnés dans l’histoire dynastique. Connaissant l’idéologie anti-bouddhique notoire des compilateurs du Koryŏsa, il y a lieu de penser que les apports éventuels de la culture bouddhique à l’élaboration de théories et de pratiques originales autochtones furent négligés. Le même ouvrage mentionne pourtant en 1366 l’existence d’une carte du ciel sŏngsangdo dans un des plus prestigieux monastères de la capitale, le Pongsŏnsa, haut lieu du culte dynastique66.

Le traité des Cinq agents ohaeng chi

18 Le traité des Cinq agents est, lui aussi, largement inspiré de celui du Yuanshi. De plus, son introduction est fidèle à celle du même traité du Songshi. Une telle conformité marquerait la volonté des compilateurs néo-confucianistes d’appliquer la théorie de la « résonance entre le Ciel et l’Homme » ch’ŏnin kamŭng sŏl67. Dans le corps du traité, on trouve une compilation d’extraits des annales de règnes du Koryŏ se rapportant aux observations de phénomènes remarquables effectuées par les devins, classées par agent68. On comprend aisément que le principal enjeu de la compilation des dérèglements de la nature est idéologique : consigner les « blâmes du Ciel » pour mettre en évidence le degré de vertu de la politique des souverains69. L’étude de la fréquence des notations par règne montre la concomitance entre la fréquence des calamités (naturelles, humaines) et l’état de désordre de la politique à la cour70. Au cours de la dynastie, l’accroissement global et constant du nombre des observations appuie donc la thèse de la ruine morale du clan royal des Wang, contribuant à légitimer le changement de dynastie71.

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La littérature de référence de la divination d’État

19 L’absence regrettable d’un catalogue des fonds des bibliothèques royales du Koryŏ ne permet pas une recension aisée des ouvrages utilisés par les astrologues et devins d’État. Pour en avoir un aperçu, il faut donc examiner les trois traités précédents, ainsi que certaines biographies reproduisant rapports ou dissertations à propos de matières divinatoires. De manière empirique, nous distinguons ici trois catégories de sources : les ouvrages importés de Chine, les écrits bouddhiques et la littérature autochtone.

Les ouvrages importés de Chine

20 La mention d’ouvrages de référence importés de Chine n’est pas fréquente. En plus des calendriers72, il convient d’ajouter les textes à caractère technique servant à évaluer les connaissances des candidats au concours de recrutement des fonctionnaires pour la section de divination et de géoscopie : le Xinji Dilijing, le Liushishu, le Dilijuejing, le Jingweiling, le Dijingjing, le Koushijue, le Taicangjing, le Hejue, le Xiaoshishu73, ainsi que les ouvrages dont de courts extraits sont reproduits dans les commentaires des devins et des astrologues présents dans les trois grands traités : le Hongfan wuxingzhuan yueling74, le Jingfang yizhuan75, le Tiandi ruixiang zhi76, le Qian Hanshu zhu77, le Wojing78, le Kaiyuanzhan79, le Zhanshu80, le Bingzhi81, le Yinyang erzheshu82, le Yinyangshu83, le Zhenguan zhengyao84. Parmi la dizaine d’ouvrages recensés, on trouve une proportion de textes qui ne sont pas clairement identifiés (titres trop génériques), ou bien des ouvrages à caractère politique de portée générale.

Les ouvrages bouddhiques

21 Il est instructif de constater que les membres du bureau de la Divination du Koryŏ recommandaient explicitement la tenue de cérémonies bouddhiques pour conjurer les calamités naturelles et humaines85. De telles préconisations impliquaient une collaboration étroite avec les experts bouddhistes des affaires rituelles de l’État, à commencer par les membres du bureau des Affaires bouddhiques sŭngnok sa86. Dans le traité des Cinq agents, on trouve mention de soutras cités par les devins fonctionnaires pour conjurer les désordres : le Soutra des Rois bienveillants, le Soutra de l’Ornementation fleurie, le Soutra de l’Extinction des calamités, le Soutra du Diamant, la Dhâranî de l’Astre précieux ainsi que des soutras du bouddhisme ésotérique 87. En fait, on peut supposer qu’en dehors de cultes périodiques funéraires dédiés aux membres de la famille royale, la plupart des rituels bouddhiques étaient exécutés avec la bénédiction des devins fonctionnaires : une pratique qui caractérise le ritualisme d’État de la cour88. La relation privilégiée des membres du bureau de la Divination au bouddhisme s’explique aussi parce que les édifices et sites bouddhiques (pagodes, cloches, statues) faisaient partie des catégories de bâtiments faisant l’objet de relevés par des fonctionnaires locaux, comme l’indique le traité des Cinq agents, impliquant une surveillance régulière des lieux concernés, effectuée par eux-mêmes ou des intermédiaires.

Les ouvrages autochtones

22 L’histoire officielle mentionne huit ouvrages autochtones qui relèvent de la littérature prophétique utilisée par les devins d’État. Celle-ci est caractérisée par des genres tels

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que les « notes secrètes » pirok89, pigi90, pisa, mais encore ch’amgi (litt. « écrits sur le destin du pays »). Parmi ces textes, la moitié environ semble avoir été héritée du Silla (Haedong kohyŏn ch’amgi91, Sinji pisa92) ; l’autre moitié rapporte les théories attribuées à Tosŏn, moine du Silla (828-897 ; alias Ongnyong, litt. « Dragon de jade ») : Tosŏn milgi93, Tosŏn tapsan’ga94, Ongnyonggi95. Elle témoigne ainsi de l’existence d’un courant de pensée actif au sein des devins fonctionnaires depuis le règne de Munjong, au milieu du XIe siècle96 et jusqu’à la fin de la dynastie. Dans ce courant, on trouve en particulier des genres propres à la littérature des maîtres de géomancie, de type tapsan ka « litt. « chants d’excursion dans les montagnes », ou encore myŏngdang ki (litt. « écrits sur les palais lumineux mingdang)97 ». L’influence de ces textes reflète l’importance de la fortune politique des théories géomantiques au Koryŏ, à un niveau sans véritable équivalent en Asie orientale. En se référant à Tosŏn (associé au mythe de fondation de la dynastie dans le Koryŏsa dans des écrits des XIIe et XIIIe siècles), les théories s’appliquent à deux domaines principaux : les capitales et les édifices bouddhiques. Après la légitimation du choix du site de la nouvelle capitale (Kaesŏng) – en fait, le lieu d’origine du clan royal – se répand la thèse du déclin de l’énergie terrestre de la capitale royale et la nécessité d’y remédier ; dans le même ordre d’idées, les édifices bouddhiques sont conçus comme devant pallier ou corriger (on parle de « géomancie de soutien de l’État » pibo98) les défauts géomantiques des sites du pays (à commencer par la capitale). Les théories sont finalement conçues par l’État comme un moyen de contrôler les constructions.

La compilation des Notes secrètes du pays de l’Est de la Mer

23 L’histoire de la divination en Chine est jalonnée d’étapes remarquables au cours desquelles furent réformés les traités en vigueur99. De la même manière, au début du règne de Yejong (r. 1105-1122) – un souverain féru de divination et de taoïsme – à partir de la 3e lune de 1106 fut mis en place le « conseil temporaire pour l’épuration (des textes) » sanjŏng togam, composé d’une dizaine de conseillers confucianistes ainsi que de membres du bureau de Divination (non cités). Il compilèrent un volume à partir de différents traités du yin-yang et de géomancie chiri, qu’ils présentèrent au roi100 qui lui donna le titre de Haedong pirok (litt. « Notes secrètes du pays de l’Est de la Mer »)101. Une édition de référence fut conservée à la Maison royale, d’autres exemplaires furent déposés à la cour du palais, au bureau de l’Astrologie et au bureau de la Divination102. Par la suite, il n’est pratiquement plus fait mention de l’ouvrage dans l’histoire dynastique.

24 Au début du Chosŏn, en 1394, une compilation/épuration des ouvrages de divination, le (Chiri) Pirok ch’waryo (litt. « Contenus essentiels sélectionnés des notes secrètes »), fut réalisée. Puis, la même année, un conseil procéda à un nouveau tri des ouvrages divinatoires de la précédente dynastie conservés dans les fonds du bureau de la Divination103. Si l’on ajoute à ces mesures la destruction de la quasi-totalité de la littérature prophétique du Koryŏ ordonnée par T’aejong104, on peut estimer qu’au cours du XVe siècle – à l’exception de bribes citées dans les sources officielles – s’éteignit durablement la mémoire de la culture divinatoire des Wang.

25 Les quelques clés nécessaires à la compréhension des rouages de la divination officielle du Koryŏ, que nous venons d’examiner, nous permettent à présent de situer et

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d’interpréter les activités des devins et astrologues impliqués dans son fonctionnement.

Les acteurs de la divination du Koryŏ

26 Dans le Koryŏsa, la terminologie utilisée pour désigner devins et astrologues est souvent imprécise105. Elle constitue donc un obstacle fondamental à la compréhension des relations entre, d’une part, les pratiques privées et étatiques de la divination, et, d’autre part, leur caractère laïque ou religieux. Autrement dit, il est souvent difficile d’identifier les acteurs de la divination ainsi que leur statut administratif et social. En outre, quand il s’agit de mentionner les devins fonctionnaires en tant que groupe (communiquant leurs rapports à la hiérarchie), l’anonymat domine. Entre l’émiettement que produisent les citations sporadiques d’individus et l’opacité des mentions collectives rapportées « en bloc », la difficulté est extrême à saisir la nature des associations et collaborations au sein de la divination d’État. Un traitement aussi négligé s’explique par un ensemble de causes relevant de l’état des sources et de l’idéologie des historiographes. En dehors de l’histoire officielle, les apports de l’épigraphie (épigraphie bouddhique, épitaphes enterrées) et des sources à caractère privé, comme les recueils d’œuvres de lettrés (il en existe environ une quarantaine pour la période qui nous intéresse), sont peu abondants, et, sauf exception, ne sont guère plus précis. J’ai choisi de présenter ici une typologie empirique des devins du Koryŏ en distinguant les acteurs de la divination appliquée à des enjeux politiques et les praticiens de la divination privée : ils représentent deux groupes sociaux distincts (mais non mutuellement exclusifs), traités de manière contrastée dans le Koryŏsa.

Les acteurs politiques

27 Les difficultés inhérentes à la source que nous analysons, conjuguées à la diversité des enjeux politiques impliquant le recours à la divination au cours de la période étudiée, rendent complexe la présentation des acteurs de la divination d’État. Aussi est-il nécessaire de procéder à différents niveaux d’analyse, dont les plans s’articulent en fonction de leur rapport à l’idéologie politique du Koryŏsa, en commençant par les aspects les plus explicites. Dans un premier temps, nous examinerons le lieu par excellence de mise en valeur des devins dans le genre de l’histoire dynastique : les biographies des spécialistes panggi (section des biographies). Ensuite, nous porterons notre attention sur les liens étroits entre enjeux politiques, théories divinatoires et statut administratif des devins à travers l’analyse de figures emblématiques. Enfin, nous nous intéresserons à l’aspect sans doute le plus original de la divination officielle du Koryŏ : l’école de Tosŏn, et à la problématique connexe de la transmission des savoirs de la culture divinatoire de la Corée médiévale.

Les personnalités mises en valeur dans les biographies des spécialistes

28 Dans le Koryŏsa, il existe peu de personnalités mises en valeur pour leur activité en matière de divination. Dans la catégorie des « spécialistes » panggi106, on trouve seulement cinq exemples dont deux devins107. La première biographie, celle de Kim Wije (?- ?)108 est constituée d’extraits du rapport que ce dernier communiqua au roi Sukchong (r. 1095-1105) en 1096 pour demander le transfert de la capitale principale

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dans la capitale du Sud (Yangju)109. Il ne s’agit donc pas en réalité d’un texte biographique. Le personnage, en 1096, n’était pas membre du bureau de la Divination mais assimilé assistant au conseil des Insignes, fonctionnaire de sixième échelon inférieur. Cependant, il est précisé qu’il bénéficiait du soutien du devin fonctionnaire ilcha Mun Sang (?-?), en deuxième position au sommet de la hiérarchie des devins d’État110. Kim Wije représente ainsi un cas peu courant de fonctionnaire non affilié aux bureaux spécialisés de la divination dont l’initiative – en l’occurrence la communication d’un rapport au souverain portant sur des matières divinatoires – trouva crédit à la cour, grâce à la complicité des dirigeants du bureau de la Divination. En effet, quelques années après l’émission du document, une procédure se mit en place, aboutissant à l’instauration du « Conseil temporaire de la fondation de la capitale du Sud », qui fut chargé de trouver un site pour la nouvelle capitale secondaire111. La biographie de Kim Wije est en définitive un texte d’une importance cruciale pour la compréhension de la divination d’État du Koryŏ puisqu’il représente un condensé unique des théories géomantiques en vigueur à la cour, comportant la plus grande densité de références à la littérature prophétique de Tosŏn. Par ailleurs, il était sans doute important pour les compilateurs du XVe siècle de mettre ainsi indirectement en valeur le site de la capitale du Sud du Koryŏ en raison de sa proximité avec celui de la future (et unique) capitale du Chosŏn112.

29 La quatrième biographie est celle d’O Yunbu (?-1304), le second devin de la catégorie. Sous le règne de Ch’ungnyŏl (r. 1274-1298.1299-1308), celui-ci occupa la charge de président du bureau de l’Observation du climat kwanhusŏ. On dit qu’il excellait dans la prédiction du caractère faste des phénomènes célestes et terrestres chŏmhu et dans les pronostics par le tirage des tiges d’achillée poksŏ113. Sa réputation fut renforcée par le fait qu’il fut convoqué par Kubilai (r. 1260-1271, alias empereur Shizu des Yuan) pour être mis à l’épreuve de son art. Il réalisa une carte du Ciel pour le souverain, que les astrologues prirent tous pour modèle par la suite. Le roi le comparait à Cui Hao (?-450) qui s’illustra dans l’histoire des Wei du Nord. En outre, il recommanda la tenue de cérémonies bouddhiques pour répondre aux « blâmes du Ciel ».

30 L’ensemble des éléments plus ou moins décousus décrivant la carrière de ce devin modèle ne sont pas explicitement liés à des enjeux politiques majeurs. Certes, on ne peut nier qu’il incarne un certain esprit de résistance à la domination mongole en prenant, à plusieurs reprises, position contre l’intervention de la reine Wŏnsŏng (1259-1297), originaire de la cour des Yuan et fille de Kubilai, sur des sujets concernant les rites dans le Temple des ancêtres de la dynastie, les cérémonies conjuratoires et la construction de palais, n’hésitant pas pour cela à y sacrifier sa position et s’attirer les foudres de l’intéressée. La biographie d’O Yunbu s’inscrit en définitive dans la tradition historiographique du genre : montrant un modèle de devin incorruptible et loyal114, mais son rôle politique le distingue de la plupart des autres figures de devins du Koryŏsa , telles que celles que nous présentons maintenant.

Enjeux politiques, théories et statuts des devins

31 Dans l’histoire officielle, évaluer le rôle des devins et leur position à la cour nécessite d’analyser l’articulation entre les enjeux politiques liés aux domaines d’application de leurs compétences, les théories qu’ils préconisent, ainsi que leur statut administratif. Je propose ici de décrire plusieurs exemples remarquables de devins autour de trois

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enjeux cruciaux pour le clan régnant : la légitimation du pouvoir, la protection du pays contre les calamités, la prolongation de la durée de la dynastie.

Légitimer le pouvoir en place

32 L’utilisation d’arguments divinatoires pour légitimer le pouvoir en place est un phénomène qui se manifesta à au moins deux reprises dans l’histoire du Koryŏ : 1) au moment de l’instauration de la dynastie des Wang, au début du Xe siècle, et 2) pendant la période de la domination du clan des Ch’oe d’Ubong (1196-1258), à partir de Ch’oe Ch’unghŏn (1149-1219) et jusqu’à la quatrième génération de ses descendants. La problématique particulière de la légitimation du pouvoir par la divination suppose des relations étroites entre devins et souverains : les premiers étaient récompensés soit par l’octroi d’une charge de devin soit par le statut spécial de conseiller privé (favori) du roi.

33 Du début du Xe siècle, nous ne connaissons guère comme devins que la figure de Ch’oe Ch’ongjin (907-987), plus connu sous le nom de Chimong (litt. « connaisseur des rêves »), que lui attribua le fondateur de la dynastie. S’il ne figure pas parmi les « spécialistes », c’est vraisemblablement parce que sa biographie officielle a été classée dans la catégorie des biographies des « sujets méritants de fondation du pays ». On le dit expert en matière de connaissance des signes du Ciel et de pronostics par tirage des tiges d’achillée115. Faisant partie de l’escorte rapprochée de Wang Kŏn, il lui prédit en 936 qu’il gouvernerait les Trois Han116. Il compte parmi les tout premiers devins fonctionnaires de la nouvelle dynastie à être cités dans le Koryŏsa. Membre du bureau de l’Astrologie sach’ŏn kwan en 945, il prédit le complot de Wang Kyu (?-945) en observant une étoile filante pénétrer dans la zone de la Ténuité pourpre (ziwei), puis en tirant les sorts. Chŏngjong (r. 946-949) le nomma conseiller d’État. Sous Kyŏngjong (r. 975-981), il prédit encore le complot de Wang Sŭng (?-?) en annonçant au roi qu’un « astre étranger était entré irrégulièrement dans la constellation impériale ». En définitive, il joua un rôle important de légitimisation et de consolidation de la dynastie pendant les premiers règnes du Koryŏ.

34 Au cours de la « période de prise de pouvoir par les militaires » (1170-1270), à la suite de son père Ch’oe Ch’unghŏn, Ch’oe I (?-1249) se distingua par l’emploi de devins tels que l’ancien moine Chu Yŏnji117, renommé Ch’oe Sanbo (?-1127), et son disciple To’il (?-1227)118, un « moine spécialiste » sulsŭng. En effet, après sa venue dans la capitale, Ch’oe Sanbo utilisa ses compétences en divination chŏmsul pour s’attirer les faveurs des puissants, dont celle de l’homme fort du régime. Ch’oe I prit l’habitude de le consulter sur tous les sujets, si bien que l’influence du devin augmenta à la cour. En 1227, le devin lui annonça secrètement que sa physionomie lui prédisait pour destin de prendre la place du roi. L’affaire fut ébruitée de sorte que Ch’oe Sanbo et To’il furent exilés puis noyés. L’histoire officielle ne faisant pas état du statut administratif des deux personnages, il n’est pas possible d’affirmer qu’ils étaient rattachés au bureau de la Divination.

Protéger le pays des calamités

35 L’idéologie ritualiste de la dynastie des Wang, qui s’appuyait en partie sur une conception magique du bouddhisme, produisit un imposant dispositif de cultes bouddhiques de conjuration, dont une proportion importante relevait de pratiques du

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milgyo, le bouddhisme ésotérique. Elle supposait de ce fait une collaboration étroite entre les spécialistes des cultes et devins fonctionnaires, qui se retrouvaient chargés de missions similaires du point de vue de l’État. Au cours du Koryŏ, il n’est donc pas étonnant de trouver certains moines dont le statut combinait, semble-t-il, les deux types de compétences. À partir du XIIe siècle, le Koryŏsa rapporte l’existence de religieux ou de devins incitant les souverains (Ŭijong : r. 1146-1170, Myŏngjong : r. 1170-1197) à pousser la logique ritualiste à un niveau accru : soit en augmentant la fréquence des cérémonies périodiques existantes, soit en diversifiant le type de rituels, soit en recommandant leur exécution par anticipation, à titre préventif. Le moine Ch’isun et le devin Yŏng Ŭi en sont deux exemples emblématiques.

36 Yŏng Ŭi (?-1170), qualifié par les historiographes de devin pok cha, fit son apparition à partir de 1152, en tant que membre d’un groupe de fonctionnaires dont l’expulsion était réclamée par plusieurs censeurs119. En 1157, il est mentionné comme intendant et devin, mais son appartenance au bureau de la Divination n’est pas précisée. Toujours est-il qu’il prôna la théorie des cérémonies de conjuration yanghoe et que le souverain y accorda crédit120. Pour le devin, la durée de vie de la dynastie ainsi que la longévité du roi dépendaient de l’assiduité à pratiquer les prières de conjuration, et de la fréquence des tournées d’inspection royale. Il effrayait Ŭijong avec l’annonce de calamités à venir pour justifier la mise en place de rites bouddhiques. Sur ses recommandations, le roi fit réaliser de nombreuses images d’Indra et d’Avalokiteshvara, qui furent diffusées dans les monastères de la capitale et des provinces. En tant que progéniture de rebelle, sa carrière était limitée, mais le roi fit corriger sa généalogie. Yŏng Ŭi fut assassiné avec d’autres favoris du roi au moment de la révolte de 1170.

37 À partir de la prise de pouvoir des militaires, l’histoire dynastique rapporte l’existence d’une nouvelle catégorie de religieux : les « moines spécialistes » sulsŭng121, particulièrement influents auprès du clan des Ch’oe. Le plus important d’entre eux fut Ch’isun (?-?) : sous le règne de Myŏngjong, il persuada d’abord la cour de procéder à des cérémonies conjuratoires dont les dépenses seraient prélevées sur les appointements des fonctionnaires122. À cette occasion, en 1178, fut instauré un « conseil temporaire des prières extraordinaires pour les bienfaits »123. Ensuite, l’année suivante, il obtint d’organiser à titre extraordinaire124 la cérémonie des Cent sièges des Rois bienveillants pour conjurer les effets néfastes des révoltes armées des années précédentes125. L’influence du moine suggère qu’il occupait une place importante et qu’il recevait l’appui des devins fonctionnaires. Je fais donc l’hypothèse qu’il était rattaché au bureau des Affaires bouddhiques, avec une éventuelle charge cumulée au bureau d’Astrologie, justifiant ses compétences à la fois dans le domaine des rites bouddhiques et dans celui de la divination.

Prolonger la durée de la dynastie par le déplacement du roi

38 À partir du milieu du XIe siècle, l’histoire officielle mentionne l’apparition de théories inédites au sein de la divination d’État. Celles-ci s’appuient sur la littérature prophétique de Tosŏn. La thèse centrale de l’ensemble de cette littérature consiste en la croyance dans le déclin à plus ou moins brève échéance de l’énergie terrestre chigi (ou énergie royale wanggi)126 de la capitale principale du Koryŏ, et dans la nécessité, pour y remédier, de faire se déplacer le souverain (physiquement ou symboliquement), temporairement ou définitivement, dans un autre lieu. Par l’expression yŏn’gi127, le Koryŏsa décrit des remèdes à un tel déclin, conçus par des générations de devins plus ou

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moins officiels. On comprend dans ces conditions que l’histoire de la divination au Koryŏ est caractérisée par le poids de la géomancie – l’art du choix des sites des demeures (palais) – qui sous-tend une telle idéologie, ainsi que par l’originalité des applications politiques des théories, qui donnèrent lieu à une géomancie des capitales. À partir du règne de Munjong et jusqu’à celui d’Injong (1056-1135), la géomancie des capitales conduisit à fonder deux capitales secondaires : celle du Sud et celle de l’Est, en plus de la capitale de l’Ouest préexistante. La période est marquée par la fondation de la capitale du Sud (deux tentatives en 1056 et en 1101), puis par la révolte de la capitale de l’Ouest de 1135128. Toutes les fondations débutent par la sélection du site d’un palais secondaire, susceptible d’accueillir le souverain. La révolte de 1135 éclata à l’issue de plusieurs années d’efforts d’une faction régionaliste à la cour129 pour persuader le roi de transférer la capitale principale à P’yŏngyang. Selon le Koryŏsa, deux devins de la cité de l’Ouest y jouèrent un rôle majeur.

39 Le duo formé par le moine Myoch’ŏng (?-1135) et son disciple Paek Suhan (?-1135) incarne symboliquement l’étroitesse des liens entre bouddhisme et divination130, mais aussi et surtout, la fidélité aux théories de Tosŏn, relayée par l’école de divination de P’yŏngyang (cf. supra). À ce titre, ils trouvèrent du crédit auprès d’une partie des tenants de la divination à la cour de Kaegyŏng, sans toutefois y faire l’unanimité. Pour s’en persuader, il suffit d’observer le nombre de calamités relevées dans le traité des Cinq agents correspondant à la période d’influence de Myoch’ŏng et de ses partisans (1128-1135), ainsi que les commentaires des astrologues131. De la vie de Myoch’ŏng et de son comparse, nous ne savons à peu près rien ; cependant, à l’apogée de son influence à la cour, en 1134, Myoch’ŏng reçut un habit violet et fut nommé premier conseiller au bureau de la Clepsydre (de la capitale de l’Ouest), montrant par là que, outre la reconnaissance de son statut de devin fonctionnaire, il existait dans certains cas la possibilité pour un religieux d’être nommé à une charge du bureau de la Divination. Quant à Paek Suhan, il semble qu’il fût intégré au bureau de la Divination de la capitale principale après avoir été devin de P’yŏngyang.

40 À propos de l’école bouddhique d’affiliation du moine, les thèses des historiens se bornent à des conjectures. Myoch’ŏng se fit d’abord connaître comme promoteur de rituels ésotériques (cérémonies d’Âtavaka et d’Aparâjita). En 1132, il officia lors de la cérémonie d’ouverture des travaux pour la reconstruction du palais royal de la capitale principale en exécutant la technique dite de la « Marche de la tente de jade du Grand Un »132 : un procédé censé conférer l’invincibilité, s’apparentant aux méthodes du Cycle caché tun’gapsul133. Par de telles pratiques, Myoch’ŏng présente plusieurs points communs avec une catégorie de praticiens mentionnée seulement au début du XVe siècle (1401, 1417-1419) sous la désignation de mirwŏn (« officiants ésotériques ») rattachés à l’école du bouddhisme ésotérique du Ch’ongji134, dont on peut supposer qu’ils existèrent au Koryŏ.

41 Les deux devins de la capitale de l’Ouest furent exécutés après l’éclatement de la révolte, l’un dans la capitale secondaire, l’autre, à Kaegyŏng. De plus, il semble que l’école de divination de la cité de l’Ouest fut dissoute par la suite. Ainsi, P’yŏngyang fut durablement disqualifiée comme site de remplacement de la capitale royale. Toutefois, dès le règne suivant (Ŭijong), les devins préconisèrent d’autres déplacements royaux, mais au moyen de formulations nouvelles. Yŏng Ŭi, cité précédemment, recommanda en 1157 la construction d’un palais secondaire dans la province du Nord-Est (Kwandong)135. Dans le même ordre d’idées, en 1158, le préposé à la température du

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bureau de la Divination, Yu Wŏndo (?- ?), fit la promotion d’un site dans les monts T’o à Paekchu afin de mater les « Barbares du Nord » pungno dans l’espace de sept années136. Le conseiller d’État Ch’oe Yunŭi (1102-1162) fut alors dépêché sur place pour examiner la configuration géomantique p’ungsu du lieu. Finalement le palais Taehwa fut bâti en un temps record, mais il suscita la critique de certains experts sulcha, férus des thèses de Tosŏn. L’inauguration des bâtiments fut ponctuée de signes néfastes faisant douter le roi de l’efficacité de la méthode.

42 À la théorie des écrits de Tosŏn préconisant la mise en place d’un système de tournées saisonnières dans trois capitales, fut alors substitué un avatar : la théorie dite des Trois So (So de gauche, de droite et du Nord), ou lieux de régénération (de l’énergie terrestre), apparue à partir de 1174137, et réactualisée jusqu’en 1379. Elle marque les règnes de Kojong (r. 1213-1259), Ch’ungnyŏl, Kongmin et U. De plus, sous le long règne de Kojong (1218, 1228, 1234, 1235, 1259), fut reprise l’idée inaugurée par Myoch’ŏng qu’il était possible de pallier la présence royale par la déposition ritualisée de la tenue royale dans les palais édifiés sur les sites favorables. Il n’est pas possible ici d’énumérer tous les astrologues et devins mentionnés dans l’histoire officielle pendant cette période. Je retiens les cas les plus remarquables et les plus ambigus du règne de Kojong retenus par les historiographes.

43 Yi Chisik (?- ?), expert surin, ainsi que Kim Tŏngmyŏng (?- ?) firent une première apparition en 1217, par l’entremise de Ch’oe Ch’unghŏn, l’homme fort du régime, attentif aux conseils des devins dans un contexte politique instable138. Le premier, de statut inconnu, semble avoir exercé une influence considérable en matière de divination. Le second, la même année, se préoccupa de conjuration militaire par la géomancie139, mais sans avoir de position établie au sein de l’appareil d’État, si l’on considère le manque de coopération du bureau d’Astrologie pour appliquer ses recommandations. Il provoqua ainsi l’exil du président du bureau d’Astrologie, Ch’oe Kyeryang (?- ?), auquel il succéda rapidement. Un devin anonyme sulsa (Yi Chisik ?) préconisa alors le séjour du roi dans un palais secondaire pour renflouer l’énergie royale de la capitale principale. À la fin de 1217, Yi Chisik prôna différents types de mesures : la destruction d’un monastère pour conjurer les armées ennemies, le déplacement de la tablette funéraire de Sŏngjong dans un autre « monastère de vœux140 », la construction d’un nouveau palais au pic Paek, et le déplacement du roi dans le monastère de Hyŏnsŏng, centre de la lignée spirituelle de Myŏngnang (école du Sceau sacré)141. Au vu de l’ensemble de ces faits, on peut présumer, à l’instar d’un Myoch’ŏng, que le devin était proche des milieux pratiquant les rituels ésotériques bouddhiques. Rétrospectivement, ce fut vraisemblablement sous son instigation qu’au cours de l’année écoulée, l’on exécuta les rituels de Muduru142, d’Aparâjitâ143, et de Marichi144.

44 En 1218, Kim Tŏngmyŏng présenta au roi son « nouveau » calendrier. Les historiographes précisent alors que le personnage était à l’origine un religieux, qui proférait des propos inconsidérés sur le yin et le yang, mais qu’ayant trouvé faveur auprès de Ch’oe Ch’unghŏn, qui l’avait nommé à ce poste, il ne se trouva ni astrologues ni censeurs pour le contester (le calendrier en question aurait été truffé d’erreurs)145. Parallèlement à la nomination de Kim Tŏngmyŏng, tout porte à croire que l’influence de Yi Chisik se poursuivit, présumant d’une collusion entre les deux personnages. La 9e lune, il aurait prescrit au roi de donner sa tenue militaire pour la déposer dans un sanctuaire en vue de conjurer les armées Khitan146. En 1228, il est encore indirectement question de lui, puisqu’un membre du Conseil secret fut envoyé dans le palais

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secondaire du pic Paek147, porteur de l’habit et de la ceinture royaux, dans la ligne des directives de l’ancien devin dont il n’est plus fait mention. En 1234, on assiste à la reprise, au moins partielle, de théories semblables, suscitée par l’influence d’un moine inconnu. Ce dernier réactualisa la théorie des Trois So en affirmant que le site de Yangju (la capitale du Sud) correspondait à Asadal, le So de gauche, qu’il fallait y construire un palais pour que le roi s’y rende et prolonge ainsi de huit siècles la fortune du pays. De fait, au cours de la 7e lune, l’eunuque Yi Paekchŏn se rendit dans le palais de la capitale du Sud pour y déposer l’habit royal148.

45 La fin du règne de Kojong est marquée par l’activité d’un nouveau devin, Paek Sŭnghyŏn (?- ?), mentionné dans la catégorie négative des « favoris »149 et dont on dit qu’il vivait de la pratique de la géomancie150. En 1259, ce fut en tant que colonel remplaçant151 qu’il fut sollicité par le roi pour définir des sites susceptibles de prolonger la durée de vie de la dynastie. Il préconisa que le souverain se déplaçât dans le monastère Hyŏlgu de Kanghwa pour y débattre du Soutra du Lotus, puis de construire un palais à Samnangsŏng (litt. « fort des Trois Gentilhommes ») afin d’en vérifier les effets positifs. Les deux conseils du gouvernement s’en tinrent à l’avis du président du bureau d’Astrologie, An Pangnyŏl (?-1271), quant au bien fondé de l’entreprise. Après une discussion interminable entre Paek Sŭnghyŏn et le devin fonctionnaire, ce dernier finit par recommander de tester provisoirement la méthode, bien qu’il ne la considérait pas comme crédible. Les biographes ajoutent que le géomancien se nourrissait des lectures de textes taoïques, bouddhiques, divinatoires et prophétiques pour justifier ses théories. Il mettait en avant la croyance, répandue au Koryŏ, selon laquelle les sites de la péninsule coréenne correspondaient aux lieux de séjour permanents des divinités bouddhiques (Bouddhas et êtres d’Éveil), en l’occurrence le roi du Grand Soleil (Vairocana)152. Paek Sŭnghyŏn trouva ensuite crédit auprès de puissants, tels que Kim Chun (?-1268)153, sous le règne de Wŏnjong (r. 1259-1274), mais apparemment sans être nommé au bureau de la Divination.

46 À partir du règne de Kongmin et jusqu’à la fin de la dynastie, la question du transfert de la capitale, en tant que mesure nécessaire pour susciter un « nouvel essor » chunghŭng, refit surface154 et mobilisa les devins d’État. D’un point de vue technique, celle-ci prit fréquemment la forme de tirages au sort effectués par les devins ou conseillers d’État dans le Temple des ancêtres de la dynastie, ou bien dans le pavillon funéraire du fondateur T’aejo. Il semble qu’alors la théorie des Trois So ne faisait plus recette, de plus en plus contestée par une partie de la haute administration.

47 C’est dans ce contexte, et parmi les mentions diaphanes relatives aux astrologues de la cour, que, par contraste, s’impose la figure honnie de Sin Ton (?-1371?)155. Le personnage, fils d’une esclave de monastère156, moine collecteur itinérant157, illettré, connut une ascension fulgurante à partir de 1364158. Kongmin le prit pour maître et lui octroya, en 1365, un titre de noblesse ainsi que les plus hautes fonctions, le propulsant à la tête du gouvernement. Outre la présidence des conseils, il occupa la direction du bureau des Affaires bouddhiques en cumul avec celle du bureau de la Divination. Le caractère cumulé de la fonction est instructif en soi de la nature étroite des relations entre les deux bureaux. Cependant, la description de ses activitiés dans les matières divinatoires passe le plus souvent au second plan de celles des réformes institutionnelles qu’il entreprit159. Sin Ton, en tant chef des devins, ne fit pas preuve d’originalité : il se référa à la littérature prophétique. Il répondit favorablement à la sollicitation d’un moine du grand monastère de Yŏnbok de la capitale pour aménager le

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monastère conformément aux anciennes prophéties, montrant son intérêt pour la géomancie des édifices bouddhiques. À partir de 1366, Sin Ton recommanda au roi de faire donner des cérémonies bouddhiques nouvelles : les assemblées de Munsu (Manjusri), pour lui assurer une descendance qui n’arrivait pas. Il conçut surtout, en 1367, l’ambitieux projet de déplacer la capitale en se référant aux écrits secrets de Tosŏn. Il se rendit pour cela successivement dans la capitale de l’Ouest, puis à Ch’ungju en 1369. Les deux tentatives n’aboutirent à aucun résultat. Finalement, au nom de la théorie des Trois So, il fit édifier un palais secondaire dans les deux villes. Avant d’être condamné à mort pour avoir fomenté un complot contre le roi en 1371, le pseudo moine fut l’objet de critiques virulentes de la part des hauts fonctionnaires et du clergé monastique régulier. Dans le milieu des devins, s’organisa une forme de résistance contre Sin Ton. Le président du bureau d’Astrologie, Chin Yŏngsŏ (?- ?), quant à lui, s’arrangea pour faire échouer les projets de déplacements du souverain en persuadant Kongmin de leur caractère néfaste.

L’école de Tosŏn et la question de la transmission des savoirs

48 De tout ce qui précède, il ressort avec une certaine évidence qu’en dépit de l’influence incontestable de canons de la divination chinoise des Tang et des Song160, la cour du Koryŏ, dans la continuité probable des pratiques spéculatives caractéristiques de la période troublée précédant l’instauration de la dynastie (898-935), élabora une culture divinatoire propre. Il est vraisemblable que celle-ci prit pour point de départ des enjeux politiques aussi fondamentaux que la légitimation de la politique du fondateur vis-à-vis du choix des nouvelles capitales, principale (Kaegyŏng) et secondaire (P’yŏngyang), ainsi que le soutien à la construction des édifices bouddhiques. La fonction légitimante de telles théories explique l’officialisation progressive de la figure du moine Tosŏn, associée au mythe de fondation de la dynastie161, et promue par étapes au cours de la période (jusqu’à recevoir le titre inédit de « maître national de géomancie » chiri kuksa en 1308)162, mais aussi et surtout à la formation d’une véritable école divinatoire traitant principalement de sujets liés à la géomancie. Au cours d’un tel processus, il est instructif de constater que Tosŏn fut affilié symboliquement au maître de dhyâna Yixing des Tang, parce que la tradition attribuait à ce dernier la rédaction d’une partie des traités de référence servant à former les devins du Koryŏ, notamment par le biais de la section de géoscopie163. On peut affirmer que la mise en exergue de l’école de Tosŏn est une des grandes leçons du Koryŏsa sur la divination d’État. C’est en tout cas mon hypothèse, bien qu’en Corée du Sud, les théories de Tosŏn ne soient pas présentées en tant qu’« école ». À l’appui indirect d’une telle thèse, on observe dans la durée l’existence de résistances internes à ces théories par certains devins et astrologues, suggérant que la divination officielle du Koryŏ était influencée par différents courants, reflet de sa vitalité. Toutefois, il n’est pas possible d’identifier les écoles concurrentes. Au cours de la période, le fait que les zélateurs des théories de l’école de Tosŏn furent généralement intégrés dans l’administration comme membres des bureaux spécialisés, est la preuve la plus solide de son caractère institué164.

49 Il est vraisemblable que l’école de Tosŏn s’enrichit au cours du temps, sinon de nouveaux textes, du moins de gloses qui s’amalgamèrent à des noyaux originaux. On ignore toutefois l’impact de mesures d’épuration de la littérature divinatoire comme celle qui intervint en 1106 (cf. supra). Les documents étaient conservés dans les fonds des archives des bureaux d’Astrologie et de Divination, comme le confirment a posteriori

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les Annales de règne du Chosŏn au XVe siècle. On peut penser qu’en raison du caractère politique sensible de ces textes, leur accès était limité aux spécialistes, aux hauts fonctionnaires, et à ceux que ces derniers autorisaient. Dès lors, considérant la relative diversité du statut des adeptes (opportunistes ou convaincus) de l’école de Tosŏn, il est possible que ceux-ci aient constitué une sorte de réseau au sein duquel étaient transmis textes et interprétations. On constate en effet, à la lecture du Koryŏsa, que l’activité des devins d’État se caractérisait implicitement par sa nature collégiale : pour communiquer avec les politiques, ceux-ci se devaient de parler à l’unisson. Autrement dit, la somme des compétences mises en œuvre, réparties hiérarchiquement entre les différents membres, devait aboutir à une formulation unique portée par le responsable du bureau. Cela explique en partie le caractère anonyme des rapports du bureau de la Divination mentionnés dans l’histoire officielle. La persistance de l’influence de l’école de Tosŏn entre le milieu du XIe siècle et jusqu’à la fin XIVe siècle pose donc de manière aiguë et implicite la question de la transmission des savoirs en matière de divination.

Les modes de transmission des théories de Tosŏn

50 L’histoire officielle est avare de données à propos des modes de transmission des connaissances, à plus forte raison des techniques et savoir-faire comme ceux des arts divinatoires, considérés comme subalternes. Dans le cas des théories de Tosŏn, il n’est pas difficile de supposer que les textes étaient, sinon enseignés, tout au moins consultés et étudiés (sinon copiés)165 par les devins fonctionnaires, puisque conservés – nous l’avons dit – dans les locaux des bureau spécialisés. À ce premier cercle d’initiés put se joindre, en certaines circonstances, un deuxième cercle de fonctionnaires, non officiellement devins, mais qui entretenaient relations et affinités avec le milieu des devins de la cour. À cet égard, il est légitime d’envisager deux types de relations privilégiées : fondées sur l’hérédité ou sur la relation de maître à disciple. En effet, l’apprentissage des arts divinatoires commençait, semble-t-il, au sein des familles166 : O Yunbu, devin modèle du Koryŏsa (cf. supra), était issu d’un tel clan (les O de Puhŭng)167. Son gendre, Kang Mi (?-?) et le père de celui-ci, Kang Hŏn (?-?), impliqués dans l’affaire de la divination du site de la tombe du roi Ch’ungnyŏl en 1309168, étaient sans doute, eux aussi, issus d’un clan de devins héréditaires169. Un autre exemple de ce type de transmission est donné par Yŏng Ŭi170, dont le père, Yŏng Sang (?-?), avait été directeur du bureau d’Astrologie171. Concernant la relation de maître à disciple, l’exemple le plus explicite est celui de Myoch’ŏng du monastère de Chunghŭng et de Paek Suhan, de l’école de la capitale de l’Ouest. Un passage instructif de la Biographie de Myoch’ŏng, par sa rareté et son originalité, nous renseigne même sur le caractère ésotérique de la transmission de techniques assimilées au Cycle caché172. Le cas de l’association entre le devin fonctionnaire Mun Sang et celui de Kim Wije est moins explicite et est difficile à interpréter à cause de notre ignorance des antécédents des deux personnages.

51 Nous avons présenté jusqu’ici les données les plus remarquables relatives aux devins qui intervinrent dans l’histoire du Koryŏ en tant qu’acteurs influents à la cour, justifiant leur consignation par les chroniqueurs. Le Koryŏsa mentionne également, mais de façon encore plus discrète, l’existence de devins œuvrant parmi la population parce qu’étant eux-mêmes généralement issus du peuple.

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Les praticiens de la divination domestique et privée

52 Au Koryŏ, les devins et astrologues pratiquant au sein de la population173 dans un cadre domestique et privé constituent la catégorie à propos de laquelle nous disposons du moins d’informations. On sait toutefois qu’il existait de multiples interdits formulés parfois en termes d’« évitements du yin et du yang » ŭmyang kugi 174. Quand elles existent, les données sont le plus souvent indirectes, témoignant par exemple d’une étape dans le parcours de praticiens ayant connu une promotion sociale, comme ce fut le cas des anciens moines Chu Yŏnji (cf. supra) ou Cho Sin’gyŏng (?-? ; XIVe siècle)175, ou bien de leur caractère extraordinaire (au sens littéral et généralement négatif). Dans les milieux monastiques, artisans et experts en géomancie exerçaient localement dans le cadre de procédures de construction d’édifices bouddhiques, et bénéficiaient d’une relative liberté de déplacement, mais ils sont absents de l’histoire officielle. Enfin, il ne faudrait pas oublier les lettrés retirés, fonctionnaires subalternes ou moines, qui, par goût personnel de l’étude, mirent en pratique leurs connaissances. Dans le Koryŏsa, il est possible de mettre en évidence deux catégories de devins privés : les moines dissidents et les aveugles.

Moines dissidents

53 Les moines devins formaient au Koryŏ une des catégories de spécialistes parmi les plus actives auprès de la population. En raison des règles de compilation de l’histoire dynastique, leur mention ne se justifiait toutefois pas a priori dans le Koryŏsa. On trouve cependant la citation ponctuelle et laconique de cas limites consignés pour avoir troublé l’ordre public et enfreint le domaine d’activités réservé aux devins fonctionnaires. Ainsi, pour l’année 1101, sont cités deux moines considérés comme subversifs. Dans la capitale, le moine Kwanggi (?-?) rattaché au monastère de Kwangmyŏng, avec deux complices fonctionnaires subalternes, falsifia la rédaction d’un ouvrage sur le yin-yang ŭmyang sŏ176. L’affaire fut révélée et l’intéressé fut passible de bastonnade et d’exil. Au cours de la lunaison suivante, à P’yŏngju (actuel P’yŏngsan, prov. Hwanghae), un moine maléfique yosŭng, Kakchin (?-?), aurait, quant à lui, tenu des propos erronés sur le yin et le yang, et abusé les foules. Il fut envoyé en exil à Kokchu (actuel Koksan, prov. Hwanghae)177. Ici encore, nous restons dans l’ignorance du fond de l’affaire. On remarque par ailleurs que le début du XIIe siècle connut une certaine effervescence dans le domaine des affaires divinatoires, possiblement causée par la difficulté de contrôler le foisonnement des théories et leur diffusion parmi la population par l’intermédiaire des religieux. En cette même année 1101, la cour s’apprêtait en effet à faire le choix d’un site pour la nouvelle capitale secondaire du Sud. Dans le même temps, il était question d’interdire des rassemblements de religieux et de membres du peuple formant les assemblées dites des Dix mille Bouddha manbul hoe, et tenant des « discours extravagants »178. On peut douter de l’efficacité de l’interdiction : trente ans plus tard, c’est au tour des « groupes d’encens (fidèles bouddhistes) des Dix mille Bouddhas » manbul hyangdo, de faire l’objet d’une interdiction par le « Conseil du yin et du yang » ŭmyang hoeso179.

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Devins aveugles

54 À l’époque du Koryŏ, la divination, en raison de son caractère lucratif, semble avoir été une pratique permettant d’assurer la subsistance de certaines catégories de population : aveugles, laïcs et religieux. On trouve ainsi plusieurs mentions de devins aveugles dans l’histoire officielle : les mae pok maeng’in180. Ils étaient assimilés au vil peuple et n’avaient pas le droit de bénéficier d’allocations foncières à l’instar des esclaves (d’État ou privés), des artisans et des marchands181. En dehors de la divination (tirage de pronostics), les aveugles étaient connus pour leur activité d’incantations bouddhiques182. Le Koryŏsa rapporte nominalement l’activité de deux devins aveugles, impliqués dans des affaires politiques aux XIIIe et XIVe siècles, qui ne se terminèrent pas à leur avantage. Le premier, le moine aveugle Paengnyang (?- ?), fut employé pour juger du caractère faste de la peine infligée à plusieurs fonctionnaires qui avaient fomenté un complot contre Kim Chun en 1258, peu de temps avant que ce dernier élimine le dernier rejeton du clan des Ch’oe d’Ubong. Il finit par faire jeter à la mer les comploteurs, et réduire leur maisonnée en esclavage183. Le second devin aveugle, Sŏk Ch’ŏllok (?-?), est cité dans la biographie d’O Int’aek (?-? ; XIVe s.) 184, car lorsque ce dernier, en 1364, fut envoyé en exil (à Ch’ŏngp’ung) pour corruption, les membres de sa famille proche eurent recours aux services de l’augure pour savoir quand ceux qui l’avaient condamné (Ch’oe Yŏng, Yi Kwisu) seraient eux-mêmes bannis de la cour. La réponse de Sŏk Ch’ŏllok fut ébruitée, et valut aux protagonistes de l’affaire d’être punis : le devin fut exilé avec plusieurs membres du clan des O, et reçut la bastonnade185. Après la chute de la dynastie des Wang, les annalistes du début du Chosŏn continuèrent de mentionner des devins aveugles, révélant une continuité dans l’organisation et les pratiques sociales du Koryŏ186.

Conclusion

55 En dépit des limites inhérentes aux sources, toute recherche sur la divination à l’époque du Koryŏ ne saurait faire l’économie d’une investigation minutieuse de l’histoire officielle, principal apport d’informations sur le sujet. En ce sens, la tentative de synthèse ici présentée constitue un premier effort d’analyse du phénomène politique, technique, intellectuel et social complexe que représentent la divination et ses acteurs. Ce travail contribue d’abord à caractériser la culture divinatoire de la période étudiée : tout en bénéficiant des apports théoriques fondamentaux des Tang et des Song, celle-ci se trouvait placée au cœur du système politique et ritualiste du Koryŏ. Pour cette raison, le bouddhisme, en tant que religion d’État de la dynastie des Wang, participait, par ses enseignements, ses monastères, ses rituels, et les membres de son clergé, pour une part importante aux activités divinatoires. La collaboration nécessaire entre devins séculiers et religieux en vue de remplir leur mission commune de protection de la dynastie, était facilitée par l’usage des structures souples et collégiales qu’étaient les conseils provisoires, mais aussi par un système – au moins ponctuel – de cumul de fonctions entre les bureaux de la Divination et celui des Affaires bouddhiques. Outre l’activité de moines devins qualifiés de sulsŭng à la cour à partir du XIIe siècle, le Koryŏsa met en évidence l’existence d’une école de divination que nous avons appelée ici « école de Tosŏn », fonctionnant comme une idéologie de référence dans le milieu des devins fonctionnaires entre le XIe siècle et la fin de la dynastie. Centrée sur les questions de choix de sites fastes pour le séjour du souverain, elle produisit le

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phénomène original de la géomancie des capitales et de la géomancie « de soutien » par les édifices bouddhiques. Sans faire nécessairement l’unanimité parmi les experts, elle constitua une source d’inspiration constante et proposa des solutions de réorganisation du territoire dans les situations de crise. En tant qu’élément de légitimation du pouvoir de la dynastie des Wang, elle était inattaquable auprès des souverains, mais dut néanmoins renforcer son prestige (sinon ses théories) par l’affiliation de Tosŏn du Silla à Yixing, révélant par là une certaine parenté avec la culture divinatoire des Tang, notamment du point de vue de ses relations avec le bouddhisme.

56 Notre étude montre que l’école de Tosŏn eut de nombreux adeptes, séculiers ou religieux, et que leur action politique ne fut viable que par l’existence de réseaux de connivence de différents membres de l’État, à commencer par les devins eux-mêmes. Ainsi, l’école de Tosŏn renvoie à la problématique plus générale de la transmission des connaissances divinatoires au Koryŏ. Celle-ci est délicate à traiter en raison non seulement de l’état des sources, mais aussi parce que la catégorie sociale des devins fonctionnaires, se définissant avant tout par la reconnaissance de compétences plus que par la naissance, remet en question imperméabilité supposée des grandes distinctions administratives et sociales (en particulier entre séculiers et religieux) et bouleverse les cadres rigides posés par l’historiographie. Il conviendrait de compléter la présente contribution sur la base des travaux de Kim Ch’anghyŏn, qui, à ma connaissance, est le premier chercheur à avoir établi un recensement nominal quasi exhaustif (87) des devins et astrologues d’État dans les sources du Koryŏ, et à avoir reconstitué partiellement leurs origines sociales et le déroulement de leurs carrières.

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La traduction des charges administratives provient du Répertoire Historique de l’Administration coréenne (1890.1986) de Maurice Courant ; en cas d’absence dans le Répertoire, elle se fonde sur les explications fournies par A Dictionary of Official Titles in Imperial China de Hucker, Charles O.

Abréviations

CWS Chosŏn wangjo sillok HKC Han’guk kŭmsŏk chŏnmun KRS Koryŏsa KRSCY Koryŏsa chŏryo TYS Tongguk Yŏji sŭngnam

NOTES

1. 星命總括. Litt. « Somme générale sur la destinée [de naissance] par les astres ». Selon la préface de l’ouvrage, l’auteur aurait été membre d’une légation envoyée à la cour du Koryŏ en 984, mais l’information n’est pas corroborée par les sources coréennes. Voir aussi le Chibong ryusŏl 芝峰類說 : 18 (技藝部 : 方術, 星曜書). 2. L’article de fond remarquable de Kim Ch’anghyŏn fait exception (cf. Bibliographie). J’ai utilisé ici largement les résultats de son travail pour ce qui concerne l’analyse des institutions et les carrières des devins d’État. D’une manière générale, la présente contribution reflète l’état de la recherche en Corée du Sud. 3. 高麗史. Histoire dynastique en « annales et biographies » (紀傳體), abrégée en plan chronologique (編年體) dans la version du Koryŏsa chŏryo 高麗史節要 (publiée en 1452), qui n’en est toutefois pas l’exact résumé (la consultation des deux ouvrages est indispensable). 4. Les textes du Koryŏ qui traitent de cette thèse fondamentale sont par exemple : la discussion de Im Wan (林完, ?-?, XIIe s. ; chaei sangsŏ 災異上書, KRS : 98,34a.36a ; TMS : 52), un rapport de Yi Kyubo (1168-1241) : Chisihwang pulbun chuyŏk non 秦始皇不焚周易論 ; TMS : 99 ; le rapport de Kwŏn Kyŏngjung (KRS : 101,12b-21a). KRS : 2,2b.26a ; 7,40a ; 8,10 ; 20,36a ; 29,38a ; 55,5a ; 117,28b ; 122,7b ; 133,25a. Le terme ch’ŏn’gyŏn (天譴) est mentionné une douzaine de fois dans le KRS.

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5. 書雲觀. Appellation de l’époque des Yuan, utilisée au Koryŏ à partir de 1308 (KRS : 76,45a). 6. À l’époque des Han, Liu Xin (劉歆, -50 ? ; -23), astrologue et historiographe des Xin, définit six principaux domaines d’application des écoles du yin et du yang : « astronomie, almanachs, Cinq agents, tiges d’achillée et [carapaces de] tortues, pronostics divers, école des formes » (天文, 歷 譜, 五行, 蓍龜, 雜占, 形法 ; Kim 1992 : 97). Kim 1992 : 98. 7. 災祥. CWS : 1392.7.28. 8. 卜筮. 4 occurrences dans le KRS. 9. 地理. Dans le KRS, l’autre terme utilisé pour désigner la géomancie est p’ungsu (風水). 10. Cf. Ch’ŭngbo Munhŏn pigo 增補文獻備考 : 223, 職官考 10, 觀象監 (本朝 太祖元年 因麗制 置書 雲觀 掌天文 地理 曆數 測候 漏刻 等事). CWS : 1392.7.18 (定文武百官之制… 書雲觀 掌天文 災祥 曆日 推擇 等事). Kim recense sept principales attributions des devins fonctionnaires du Koryŏ : 1) l’observation des phénomènes célestes (天文) et les méthodes d’éradication des irrégularités ; 2) la rédaction de calendriers (撰曆) servant à la prédiction des phénomènes remarquables comme les éclipses, et aussi à la prévention des calamités ; 3) l’harmonie des Cinq agents à l’origine des phénomènes terrestres et climatiques : relevé des épisodes et recommandations des méthodes pour les éliminer ; 4) pronostics par tirage sur le caractère faste d’une affaire importante (déplacement du roi, transfert de la capitale, sortie de l’armée régulière) ; 5) choix des dates fastes (funérailles, réception d’un décret, rites, sortie de l’armée) ; 6) la clepsydre (horloge à eau ; parfois ambulante) : annonce des heures pour les grandes cérémonies (dans le temple des ancêtres de la dynastie, les fêtes bouddhiques annuelles des Lanternes et des Huit commandements) ; 7) la géomancie (choix des sites fastes pour les funérailles, la construction de palais, d’édifices bouddhiques). En raison de telles attributions, les devins participaient aux escortes du roi en déplacement (扈從), accompagnaient les armées (從軍), assuraient des tours de veille (直宿), intervenaient dans les procédures de rites sacrificiels (祭儀) : installation des tablettes des esprits notamment (Kim 1992 : 100-106). 11. Pour Kim Ch’anghyŏn, ce fut d’abord le sach’ŏndae qui fut mis en place sous T’aejo. La première apparition du terme t’aesaguk dans les sources daterait de 981, et de 993 pour t’aebokkam (Kim 1992 : 85). 12. Le t’aebokkam aurait été spécialisé dans les pronostics par tirage poksŏ. Dans son Répertoire Historique de l’administration coréenne, Maurice Courant associe le t’aebokkam 太卜監 (n o 600) au bureau de la Divination et le t’aesaguk 太史局 au bureau de l’Astrologie (no 602). 13. Kim 1992 : 92. Pour Kim Haeyŏng, la division en deux bureaux s’explique pour des raisons fonctionnelles. Cependant, comme le montre bien Kim : 1) les membres des deux entités se partageaient des tâches similaires (notamment en ce qui concerne la géomancie) ; 2) les carrières s’effectuaient par des passages d’un bureau à l’autre ; 3) ils sont qualifiés de ilgwan 日官 astrologues (ou ilcha 日者) de manière quasi indifférenciée par les historiographes (Kim 1992 : 94-95). La tendance à une véritable spécialisation des compétences divinatoires par domaine d’application n’apparaît qu’à la fin de la période avec la création des dix écoles (KRS : 77,29a-b). 14. Munjong accomplit une refonte de l’administration en 1076. T’aejo, le fondateur, et Munjong constituent selon les historiographes, les deux règnes de référence pour les institutions de la dynastie. 15. La nomenclature est très proche de celle des Tang dont elle s’inspire (Kim 1992 : 87), avec quelques différences, notamment dans les appellations de charges (Kim 1992 : 88). D’un point de vue économique, Munjong porta les classes de rétributions foncières rétribuant les charges des devins fonctionnaires au même niveau que celles des autres administrations à échelon équivalent (Kim 1992 : 121). 16. La tendance à la fusion s’observe également dans les institutions équivalentes des Tang (Kim 1992 : 88). 17. Pour le détail, cf. Kim 1992 : 90.

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18. Pour l’historien Min Hyŏn’gu, les quatre vagues successives de réformes concernaient l’ensemble de l’administration et s’expliquent principalement par les fluctuations en matière de relations internationales (Kim 1992 : 91, note 61). Le bureau fut réformé sous la dynastie suivante à partir de 1392 (CWS : 1392.7.28). 19. Pour Kim, le t’aesaguk était rattaché au sach’ŏndae, comme le révèle la hiérarchie comparée de leur nomenclature respective (Kim 1992 : 95). Il faut ajouter un système de cumul des charges au sommet de la hiérarchie. Dans le manuscrit de 1230 (cf. infra p. 4), la signature des fonctionnaires du t’aesaguk est accompagnée de l’apposition du sceau du sach’ŏndae (Kim 1992 : 96). 20. Kim 1992 : 95. Aucun élément ne précise leur rattachement. 21. KRS : 77,29a-b (置… 風水陰陽等學于書雲觀). 22. 修禪社. Actuel monastère de Songgwang (松廣寺 ; Sunch’ŏn, prov. Chŏlla du Sud). Hŏ 1994 : 269-271. 23. KRS : 77,36b. 西京 Sŏgyŏng. 24. Dans les sources chinoises, le Koguryŏ 高句麗 est souvent abrégé en Koryŏ 高麗. Voir aussi KRS : 94,4b. 25. KRS : 2,2b. 26. KRS : 58,31a (cultes à Jizi, Kija 箕子 et à Tongmyŏng 東明王, fondateur du Koguryŏ, et autres). 27. 漏刻院. 28. Cf. infra p. 67. 29. 雜業 : 卜業, 地理業. KRS : 73,1b. 30. Les historiographes ne consignent que les lauréats de la section de rédaction chesurŏp 製述業 ou bien les « protégés de l’État » ŭmsŏ 蔭敍, exemptés de concours. 31. Nous connaissons le déroulement des épreuves (KRS : 73,8a-b ; Bruneton 2002 : 298-301) 32. Kim 1994 : 110-111. 33. À partir de 1136, les épreuves du concours furent assurées par les bureaux spécialisés (en l’occurrence le bureau d’Astrologie). Kim 1992 : 127-128. Il existait le système de t’alma 脫麻 permettant à des candidats ayant étudié plus de dix ans d’entrer dans la carrière. Dans la capitale de l’Ouest, les candidats ayant étudié plus de vingt ans et en ayant plus de cinquante entraient dans la carrière (KRS : 74,6b). 34. KRS : 78,13a. Il semble que les milieux monastiques recouraient à des moines géomanciens locaux dans les procédures de construction des édifices bouddhiques. Cf. Hŏ 1988 : 66.72.261. 35. Kim 1992 : 140. 36. Kim 1992 : 132. Certains lettrés et membres de la famille royale (comme Wang Uk ; KRS : 90,3a) excellaient dans la connaissance des techniques divinatoires. 37. 都監. Bruneton 2002 : 821. 38. Kim 1992 : 139. 39. 鄕吏. Kim 1992 : 144. 40. Kim 1992 : 150. 41. Ces traités ont été récemment retraduits (première traduction aux éditions de l’Université Yonsei) et minutieusement annotés par Kim Ilgwŏn en 2011 (cf. Bibliographie). 42. 天文志. L’ordre adopté dans le KRS n’est pas le même que celui du Songshi et du Yuanshi. Pyŏn 1982 : 65. 43. Pyŏn 1982 : 63.64. 44. Pyŏn 1982 : 65 (note 9). 45. Cf. règles de compilation du KRS et du KRSCY (凡例 : 災異之驗於事者 雖小必書 謹天譴也). 46. 曆志. KRS : 50,1a-b. 47. 宣明曆. 48. KRS : 29,30b. Par la suite, en 1298, l’astrologue Kang Po (姜保, ?- ?) fut dépêché à la cour de Beijing pour se familiariser avec le nouveau calendrier. Il fut suivi en 1309 par l’envoi de Ch’oe Sŏng’il. En 1343, Kang Po rédigea le Susiryŏk ch’ŏppŏp ipsŏng (授時曆捷法立成).

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49. Pyŏn 1982 : 67. Les spécialistes notent que les versions des deux calendriers chinois conservés au bureau de l’Astrologie comportent des différences avec les versions canoniques. CWS : 1451.6.15. Pyŏn 1982 : 66-67. 50. 乾興曆. KRS : 4,38a. Rapporté de la cour de Kaifang par une légation du Koryŏ dirigée par Han Cho (韓祚, ?- ?), avec un traité de géomancie, le Shenghuifang yinyang erzheshu (聖惠方陰陽二宅 書). 51. 大統曆. KRS : 42,6a. 52. 大衍曆. Cf. CWS : 1451.6.15. 53. KRS : 50,55a. Le Dayanli bingshu jieyao (大衍曆兵書接要) fait partie de la liste des quelques 125 ouvrages dont une copie fut demandée à la cour de Kaesŏng par l’empereur des Song en 1091 (KRS : 10,25b). 54. Cf. infra p. 20. 55. Pyŏn 1982 : 69. 56. KRS : 7,22a (命太史…撰十精曆…七曜曆…見行曆… 遁甲曆… 太一曆 以禳來歲災祥) 57. Quelques décennies plus tard, en 1100, le Conseil du palais réclama que l’auteur du calendrier fût relevé de sa charge en raison des erreurs du texte (KRS ; 11,21b). 58. 新曆. KRSCY : 15,12b-13a. 59. Pak Sŏngnae cité par Pyŏn 1982 : 69 (note 15). L’historien établit un lien entre la rédaction de calendriers autochtones et la mise en vigueur de noms d’ères propres à la dynastie à partir du XIe siècle. Kim Yongguk formule une thèse similaire (Kim, 1982 : 211). KRS : 9,33a-b. 60. 瞻星臺. À l’Ouest de Manwŏldae (滿月臺 ; litt. « la Terrasse de la pleine lune ») cf. Chunggyŏng chi 中京誌 : k.7. 61. Kim 1982 : 207. On a retrouvé les vestiges d’une structure en colonnes de pierre de 3m x 3m supposée construite sur le modèle de l’observatoire du Silla à Kyŏngju. 62. KRS : 76,44a. Kim 1982 : 207. 63. KRS : 52,75a-b (四暗星). Les quatre astres (quatre émanations issues des grandes planètes) sont : émanation de Jupiter (紫氣), émanation de Mercure (月孛), nœud lunaire de Mars (羅㬋), nœud lunaire de Saturne (計都). Inclus dans le groupe des « neuf luminaires » (九曜) ; cf. KRS (salle des Neuf luminaires, 九曜堂) : 9,34b ; 13,29a ; CWS : Sejong Chiriji : P’yŏngyanbu. 64. On attribue à Yixing plusieurs textes de rituels de conjuration des calamités astrales (T. n o 1304.1310). 65. 消災道場. 147 mentions dans les Annales de règnes du Koryŏ selon Sŏ Yun’gil (Sŏ 1993 : 174). Selon Sørensen, le soutra de référence de ce rituel serait T. no 964 (Sørensen : 2010). 66. 星象圖. KRS : 41,12b. 奉先寺. Monastère de vœu wŏnch’al 願刹 du fondateur de la dynastie. Han 1998 : 289. 67. 五行志. Pyŏn 1982 : 70 (天人感應說). 68. Kim 2011 : 15. 69. Cf. supra note 45. Voir aussi KRS : 47,1a. 70. Les périodes caractérisées par la plus grande fréquence des phénomènes naturels irréguliers correspond à la période de prise de pouvoir des militaires (1170-1270) dont le régime de domination des Ch’oe d’Ubong (1219 ?-1268 ?) et les guerres contre les Mongols (1231-1270). Cf. Kim 2011 : 49. 71. Cf. Kim 2011 : 49. 72. 元嘉曆. Kim 1992 : 82. KRS : 108,11b. 73. KRS : 73,8a-b. Si l’on traduit littéralement les titres des ouvrages selon leur ordre de mention, cela donne : La Nouvelle compilation du Classique de géomancie ; Le traité de Maître Liu ; Le Classique des méthodes de géomancie ; Les ordonnances des trames et des chaînes ; Le Classique du miroir de la Terre ; Les recettes révélées de la tradition orale ; Le Classique de l’inhumation des placentas ; Recettes en rimes ; Le traité de Maître Xiao.

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74. 洪範五行傳月令. Litt. « Ordonnances mensuelles transmises selon les Cinq agents du Grand Plan ». Yi 1984 : 20.31.36. 75. 京房易傳. Litt. « Le Traité sur les mutations de Jing Fang ». KRS : 10,23a ; 11,7b ; 101,19b. 76. 天地瑞祥誌 (666) Litt. « Mémoire sur les signes fastes du Ciel-Terre ». KRS : 53,54b. Cité 3 fois dans le KRS : 932, 1040, 1130. Selon certains spécialistes, l’ouvrage pourrait avoir été compilé par Sŏl Sujin 薛秀眞 (?- ?) du Silla (on attribue traditionnellement le texte au dashi Sa Shouzhen 大史 薩守眞). Il n’existe pas de trace de l’ouvrage en Chine, mais il est signalé au Japon en 876, puis en 928. Kwŏn Tŏgyŏng, en 1999, fait l’hypothèse de la transmission au Japon par la Corée (Kim 2001 : 221). 77. 前漢書註. Litt. Annotation de l’Histoire des Han Antérieurs. KRS : 101,14a. 78. 握鏡. Litt. La Saisie du miroir. Le terme « saisie du miroir » est une expression métaphorique pour désigner la réception du mandat céleste par l’empereur. KRS : 54,35b. 79. 開元占. Abrégé du Tang Kaiyuan zhanjing (唐開元占經, 718). Litt. Classique de la divination de l’ère Kaiyuan des Tang. KRS : 54,24a. 80. 占書. Litt. Traité de divination. KRS : 53,47a. 81. 兵志. Litt. Traité sur l’armée. KRS : 55,25b. 82. 陰陽二宅書. Litt. Traité sur les deux demeures du yin et du yang. KRS : 4,38a. 83. 陰陽書. Litt. Traité sur le yin et le yang. KRS : 9,33b. 84. 貞觀政要. Litt. Essentiels de la politique de l’ère zhenguan. KRS : 55,3a. 85. En 1090, Ch’oe Sagyŏm (崔士謙 ; ?- ?), président du bureau d’Astrologie, envoyé en légation à la cour des Song, rapporta à Kaesŏng le protocole du Shuilu yiwen (水陸儀文 ; litt. « Rituel pour la délivrance des êtres de la Terre et des Eaux »). 86. 僧錄司. Absent des traités administratifs. Cf. Hŏ 1993 : 342-355. 87. La 4e lune de 1101, un rapport du bureau de la Divination prescrivit de recourir aux rituels de l’Abhiseka 灌頂, de Munduru 文豆婁, de l’Astre Précieux 寶星 pour conjurer le parasitage de la pinède du pic des Pins, Song’ak, montagne de protection chinsan 鎭山 de la capitale. En 1102, pour le même phénomène, ce fut la lecture du Soutra de l’Ornementation fleurie qui fut utilisée (KRS : 54,1b). En 1130, le bureau des devins recommanda la tenue d’une cérémonie bouddhique du Secours dans la détresse 度厄道場 pendant dix-sept jours pour éradiquer la présence d’un arc-en-ciel blanc (KRS : 54,42a). 88. 水陸儀文. KRS : 10,20b. Le culte est assez fréquent dans la liturgie du XVe siècle. 89. 秘錄. 90. 秘記. KRS : 54,39a. 91. 海東古賢讖記. Litt. « Récits prophétiques [sur le destin du pays] des anciens sages de l’Est de la Mer ». KRS : 54,2b. 92. 神誌秘詞. Litt. « Compositions secrètes des traités divins ». KRS : 122,2b. SGYS : 3, 興法, 寶藏 奉老 普德移庵. 93. 道詵密記. KRS : 56,9b.58.15a. 94. 道詵踏山歌. Litt. « Chant d’excursion en montagne de Tosŏn ». KRS : 122,1b. 95. 玉龍記. Litt. « Récits du Dragon de jade ». KRS : 72,11b. 96. KRSCY : 4,65a-66a ; KRS : 56,5b (1056). 97. 三角山明堂記. Litt. « Écrits sur le palais lumineux du mont des Trois Cornes ». KRS : 122,1a. 98. 裨補. Bruneton 2002 : 31. 99. À l’époque des Tang, Lü Cai (606-665) épura la littérature spécialisée et rédigea le Livre du Yin et du Yang 陰陽書. Cf. Xin Tangshu 新唐書 : 107 (呂才傳). 100. 刪定都監. KRS : 12,21a (命儒臣與太史官…刪定陰陽地理諸家書 編一冊以進). 101. 海東秘錄. Deux mentions dans le KRS (KRS : 96,11a). 102. KRS : 12,21a ; KRSCY : 7,12b. Il semble que la pratique du dépôt d’ouvrages de divination importants dans plusieurs administrations était ordinaire (voir par exemple KRS : 127,28b).

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103. 秘錄撮要. CWS : 1393.12.11 ; 1394.2.14.16 ; 1394.7.11-12. Un rescrit du conseil général des Délibérations précisa que des « notes secrètes » pirok (秘錄) avaient été transmises de l’ancienne dynastie et que les théories y étaient confuses et non concordantes. Le lendemain, un « conseil temporaire d’épuration du yin-yang » (陰陽刪定都監) fut mis en place, composé de neuf conseillers et de membres du bureau de la Divination. Il est précisé que les ouvrages examinés étaient des traités de géomancie relatifs aux prophéties. 104. CWS : 1417.12.15. 105. En dehors des noms de charges, les termes indifférenciés employés sont par exemple ilcha (日者), ilgwan (日官), sulcha (術者), sulsa (術士), surin (術人), pokcha (卜者), ŭmyang ka (陰陽家). 106. Les biographies des « spécialistes » se trouvent au kwŏn 122 du KRS, juste avant la première catégorie négative des Biographies : les « Eunuques » hwanja 宦者. 107. Les autres exemples sont un peintre (Yi Nyŏng 李寧, ?- ? ; XIIe s.) et deux médecins (Yi Sangno 李商老, ?- ?, XIIe s. ; Sŏl Kyŏngsŏng 薛景成, 1237-1313). 108. 金謂磾. On trouvera une traduction en français de la Biographie de Kim Wije en appendice de Bruneton 1997 (cf. bibliographie). 109. 南京 Namgyŏng à Yangju 楊州. KRS : 56,9a-10a. 110. 日者文象. La même année, il est cité comme directeur provisoire du bureau de la Divination et premier conseiller du bureau d’Astrologie (攝司天監知太史局事 ; HKC no 231, p. 546). Mun Sang est mentionné en 1101 comme directeur de la Petite intendance (charge de 4e échelon supérieur) à la retraite et participant au conseil temporaire de la fondation de la capitale du Sud (KRS : 11,31a). Si l’on considère que sa charge de retraite constitue le point culminant de sa carrière, on en déduit qu’il devait occuper un poste de devin d’échelon inférieur : directeur ryŏng 令 ou kam 監. 111. 南京開創都監. KRSCY : 6, 40b-41a. KRS : 11,31a-b. 112. Bruneton 1997 : 253. 113. 伍允孚. KRS : 122,5b-8b (精於占候… 又善卜筮). 114. La description d’O Yunbu est conforme aux stéréotypes des devins de la tradition historiographie chinoise (laideur, obstination, sincérité, fidélité au souverain). 115. 崔知夢 (崔聰進). KRS : 92,12b-14a (精於天文卜筮). 116. 三韓. Expression désignant l’ensemble de la péninsule coréenne (territoire), sa population, sa culture, sans référence politique (voir par exemple : KRS : 81,1a). 117. 周演之 (崔山甫). KRS : 101,25a ; 102,12b ; 129,32b. 118. 道一. KRS : 129, 33a. 119. 卜者 榮儀. Sa biographie est en KRS : 123,2a-3b. KRSCY : 11,14a. 120. 禳禬. KRS : 123,2a-3b. 121. 術僧. 7 mentions dans le KRS. 122. 致純. KRS : 77,26a-b. 123. 別例祈恩都監. KRS : 77,26a-b ; KRSCY : 12,36b. 124. La cérémonie des Cent sièges était censée être exécutée une fois tous les trois ans selon les codes. 125. KRS : 20,3a. 126. 地氣, 王氣. 127. 延基(業). Littéralement : « prolongement de la base (de l’œuvre dynastique) ». Le terme est relativement fréquent dans les sources (13 mentions dans le KRS). Il est parfois également question de « site de restauration (de la dynastie) » chunghŭng chi chi 重興之地. KRSCY : 11, 27b. 128. Les historiens contemporains le désignent généralement par l’expression « Révolte de Myoch’ŏng » (Myoch’ŏng-ŭi nan 妙淸의 亂), une formulation mal venue en ce qu’elle fait porter de manière excessive le poids de la responsabilité à un individu. 129. La faction était formée en partie de hauts fonctionnaires originaires de P’yŏngyang, et représentée par Chŏng Chisang 鄭知常 (?-1135), Kim An 金安 (?-1135), Mun Kong’in 文公仁

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(conseiller d’État ; ?-1137), Im Kyŏngch’ŏng 林景淸 (président de la Cour centrale du gouvernement ; ?- ?), Hong Isŏ 洪彛敍 (conseiller d’État ; ?- ?), Yi Chungbu 李中孚 (?- ?). 130. 白壽翰. KRS : 127, 26b-36a. Les données proprement biographiques relatives aux deux personnages sont maigres. L’association entre bouddhisme et divination est recherchée par les compilateurs de l’histoire officielle pour démontrer le caractère funeste de leur combinaison pour le destin de la dynastie. On trouve une traduction annotée de la biographie de Myoch’ŏng dans Bruneton 2002 : 343-357. 131. Parmi les phénomènes néfastes qui se produisirent, on note les foudroiements de la pagode de neuf étages du monastère de Chunghŭng de la capitale de l’Ouest auquel le moine était rattaché (1129.9 ; 1130.9), ainsi qu’un déchaînement d’intempéries lors d’un voyage du roi qui se rendait à P’yŏngyang. KRS : 54,2b.31a.42a ; 55,4b.10a-b. 132. 太一玉帳步法. KRS : 127,30a. 133. 遁甲術. 134. 密員 (摠持宗密員). Bruneton 2002 : 376. 135. KRSCY : 11,21a. 136. KRS : 18,11b-12a (太史監候劉元度奏 白州兎山半月岡 實我重興之地 若營宮闕 七年之內可 呑北虜). 137. 三蘇. KRSCY : 12,12a. 138. Le régime des Ch’oe d’Ubong (1196-1258) faisait l’objet de menaces à l’intérieur et à l’extérieur du pays. 139. Yi Chisik expliqua à Ch’oe Ch’unghŏn que les troubles armés s’expliquaient par la position de la tombe Hu (厚陵), mais le « conseil temporaire pour le déplacement de la tombe Hu » fut dissous peu après (KRS : 22,9b-10a). 140. Les versions du KRS et du KRSCY suggèrent deux interprétations possibles concernant l’attribution à Yi Chisik du déplacement des tablettes. Quant aux déplacements de Kojong dans les monastères, il s’inscrivaient dans la continuité avec les pratiques de l’année précédente. 141. SGYS : 5 (神呪, 明朗神印). 142. KRS : 22,11a.14b. 143. KRS : 22,10b.13b. 144. KRSCY : 15,7b ; KRS : 22,11b. 145. KRSCY : 15,13a (所進新曆 率皆任意變更古法). Le passage est absent du KRS. 146. KRS : 22,15b-16a ; KRSCY : 15,15a. 147. 白岳. TYS : 12,2b (長湍都護府). KRSCY : 15,44a. 148. KRS : 23,28a-b ; KRSCY : 16,21b. 149. KRS : 123,5b. 150. 白勝賢. KRS : 123,5b (業風水). 151. 補郞將. Hucker : no 3564.4763. Charge militaire de l’époque des Tang et des Song. 152. Sur les dires de Paek Sŭnghyŏn fut construit le monastère de Hyŏlgu, en tant que lieu de séjour permanent de Vairocana (以爲大日王常住處). KRS : 123,6b. 153. 金俊 (金仁俊). Un des militaires qui renversa le régime des Ch’oe d’Ubong en assassinant Ch’oe Ŭi (崔誼, ?-1258) en 1258 avec la complicité de Yu Kyŏng (柳璥, 1211-1289) et Pak Songbi (朴松庇, ?-1287). De basse extraction, il parvint, grâce à son mérite militaire, à monter dans la carrière sous les Ch’oe. Il devint sujet méritant de deuxième classe pour avoir contribué à la restauration du pouvoir royal des Wang. 154. En 1356, 1360, 1382, 1390, 1391. 155. Il fait l’objet d’une longue biographie dans la catégorie des « Rebelles ». KRS : 132. Les historiographes le dépeignent comme un personnage dépravé, cruel, buveur, libidineux et démagogue. Selon le KRS, Sin Ton aurait eu un fils d’une esclave, qui aurait été intronisé en tant que fils de Kongmin en 1374, le roi U (r. 1374-1388). On trouve une traduction annotée de la Biographie de Sin Ton en Bruneton 2002 : 434-462.

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156. Selon le KRSCY, il s’agirait du monastère Okch’ŏn de Yŏngsan (靈山縣 玉泉寺 ; KRSCY : 28,11a), alors que le KRS mention le monastère Okch’ŏn du district de Kyesŏng (桂城縣 玉川寺 ; KRS : 132,1a). 157. Son nom de moine était P’yŏnjo 遍照 alias Sin Ton du clan des Sin de Yŏngsan 靈山辛氏. La description du KRS suggère qu’il n’était pas un religieux ordonné, mais qu’il vivait d’extorsion des fidèles sous prétexte de collecte de dons. Il utilisa définitivement son nom de laïc à partir de 1365. 158. KRSCY : 28,11a (1365 ?). Le KRS donne la date de Kongmin 13 : 1364. Introduit à la cour par Kim Wŏnmyŏng (金元命, ?-1370), le souverain reconnut dans les traits du moine, un religieux qui, au cours d’un rêve de la nuit précédente, l’avait sauvé providentiellement. Il se fit pousser les cheveux et se donna l’apparence d’un ascète (dhuta). Le roi lui donna le titre de Ch’ŏnghan kŏsa 靜閑居士. 159. Les historiographes suggèrent que le souverain se servit d’un personnage sans attaches à la noblesse et aux intérêts des coteries pour procéder aux épurations souhaitées par le roi dans l’administration et dans les rangs des sujets méritants qui s’étaient distingués dans la lutte contre les invasions des Turbans Rouges (1359-1361). Sin Ton écarta nombre de hauts fonctionnaires pour placer ses partisans. Il accapara le pouvoir avec le titre de « conseiller » ch’ŏmŭi 僉議 et traita le roi d’égal à égal. 160. En plus des ouvrages, la cour du Koryŏ recourut parfois à l’emploi de transfuges des Song : ce fut le cas de Chang Wan (張琬, ?-?), reçu en 1057 à la cour de Kaesŏng. Spécialiste de la pratique de la divination par le « cycle caché et les esprits des troncs célestes (trois ki et six im 遁 甲三奇六壬) ». Il fut nommé « préposé à la température » (太史監候, de 9e échelon inférieur) après avoir été testé sur ses connaissances (KRS : 8,6a-b). 161. KRS : Segye (世系, citations d’ouvrages du XIIe et du XIIIe siècles). 162. 地理國師. Cf. Promotion en quatre étapes. Bruneton 2002 : 812. 163. La filiation de Tosŏn à Yixing relevait vraisemblablement d’une volonté politique de légitimer les théories du moine du Silla et de leur conférer du prestige en les associant à la grande tradition divinatoire des Tang (Bruneton 2012). 164. Le cas de Kim Wije est exemplaire à cet égard : sa connaissance des théories de Tosŏn lui valut d’être employé comme expert dans le conseil temporaire pour la construction d’un palais secondaire dans la capitale de l’Ouest en 1106 (KRSCY : 7,17a ; KRSCY : 96,39b). Il est même possible qu’il participât, associé à Mun Sang, au conseil temporaire pour la fondation de la capitale du Sud en 1101, ainsi qu’à la compilation du Haedong pirok en 1106. 165. Le KRS atteste la pratique de la conservation de textes chez les fonctionnaires kajang (家藏). Le cas le plus célèbre est celui de Ch’oe Anje (崔齊顔, ?-1046) chez qui, à sa mort, l’on retrouve une version du testament politique du fondateur (KRSCY : 4,38a). On peut supposer que l’entourage immédiat des devins fonctionnaires pouvait donc avoir accès à la littérature spécialisée. Ce point rejoint la question de la transmission par l’hérédité. L’interdiction promulguée en 1417 de la détention à titre privé de textes divinatoires jugés non conformes, en est la preuve indirecte (CWS : 1417.12.15.). 166. Parmi les quelques dizaines de noms de devins et d’astrologues qui nous sont parvenues (87 selon le recensement de Kim Ch’anghyŏn), on trouve plusieurs mentions des clans Mun (Mun Sang, Mun Chang’yu, Mun Sŏyŏng), Ch’oe (Ch’oe Sagyŏm, Ch’oe Chaho, Ch’oe Chahyŏn), Sŏ (Sŏ Ung, Sŏ P’il, Sŏ Hŭi), Yu (Yu P’aeng, Yu Tŭkso) et Yang (Yang Wŏnho, Yang Kwan’gong, Yang Nin, Yang Hae). Le problème réside dans l’identification des lieux d’origine patronymiques pon’gwan 本貫 et la connaissance des biographies des intéressés. Le nombre de pon’gwan connus des membres des bureaux de la Divination et de l’Astrologie serait de l’ordre de 18,4 %. Pour Kim Ch’anghyŏn, il s’agit de « patronymes de terroir » t’osŏng 土姓, suggérant qu’ils étaient issus de clans locaux, avec peu d’ancêtres prestigieux (Kim 1992 : 137). 167. 復興吳氏. KRS : 122,5b : 世爲太史局官. O Yunbu est l’unique devin connu issu de ce clan.

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168. KRS : 33,19b. À l’occasion d’une visite rituelle du roi Ch’ungsŏn à la tombe de son père (le roi Ch’ungnyŏl), le site de la tombe Ko (高陵) fut soupçonné de ne pas être faste. Les membres du conseil qui effectuèrent le choix du site furent emprisonnés ainsi que deux des petits-fils d’O Yunbu. 169. Kim 1992 : 145. 170. Cf. supra p. 65. 171. 司天監 榮尙. 監 kam, 3e échelon inférieur. Il fut envoyé en exil dans une île. KRS : 123,2a. 172. À l’occasion de la pratique de la technique dite de la « Marche de la Tente de jade du Grand Un », exécutée au moment de l’ouverture des travaux pour la reconstruction du palais royal à Kaesŏng en 1132, les historiographes prêtent à Myoch’ŏng d’avoir eu la pensée de transmettre la technique à Paek Suhan, lorsqu’il serait vieux, afin qu’elle ne fût pas connue d’un grand nombre de personnes. Il en aurait reçu l’enseignement d’un dénommé Kang Chŏnghwa (康靖和, inconnu) instruit par Tosŏn (KRS : 127, 30a). 173. La classe du bon peuple yangmin 良民 était inférieure à celle des clercs de province hyangni 鄕吏 et des lettrés fonctionnaires sadaebu 士大夫. 174. 陰陽拘忌. 175. KRS : 124,24b. 曹莘卿. Bruneton 2002 : 414.419. 176. 光器. KRS : 11,27a. 177. 妖僧 覺眞. KRS : 11,27b. 178. 萬佛會. KRSCY : 6,39b. 179. 萬佛香徒. KRS : 85,11a (陰陽會所). 180. 賣卜盲人. 181. KRS : 78,41b. 182. CWS : 1394.1.16 ; 1394.4.17 ; 1405.1.11 ; 1417.9.2 ; 1418.2.11. Au Chosŏn, on note la pratique de faire prier des aveugles au monastère de Myŏngt’ong 明通寺. Voir aussi Ko Sang’an 高尙顔, 泰村 集 卷4, 叢話 ; Pak Tongnyang 朴東亮, 寄齋雜記, 歷朝舊聞 ; Cho Kyŏngnam 趙慶南, 續雜錄, 戊 辰 ; Yi Kyugyŏng 李圭景, 五洲衍文長箋散稿, 經史篇, 論史類, 明通寺辨證說. 183. KRS : 130,14a. 以盲僧伯良卜其吉凶. 184. 石天祿. KRS : 114,19b-21a. 吳仁澤 (?-?). Sujet méritant qui s’était distingué dans la lutte contre les Turbans Rouges et la récuparation de Kaesŏng après son invasion. Il reçut les faveurs du roi Kongmin. 185. KRS : 114,20b-21a. KRSCY : 28,7b-8a. 186. Mentions avant le règne de Sejong (世宗, r. 1419-1450) : CWS : 1394.1.6 ; 1394.2.6 ; 1394.2.25 ; 1394.4.17 ; 1399.6.1 ; 1403.6.29 ; 1405.1.11 ; 1417.9.2 ; 1417.9.21 ; 1418.2.11.

RÉSUMÉS

L’analyse de l’histoire officielle du Koryŏ (918-1392), principale source d’informations sur les matières divinatoires, permet de caractériser la culture divinatoire de la Corée médiévale. En s’appuyant d’abord sur la description du cadre institutionnel (formation, recrutement, carrières, bureaux spécialisés) ainsi que sur le recensement des traités de référence, sont mises en évidence l’influence prépondérante des théories et des institutions des Tang et des Song, mais aussi l’existence d’une école autochtone (l’école du moine Tosŏn). Ensuite, l’étude catégorise les acteurs de la divination en fonction de leur lien à l’État (statut administratif et enjeux politiques).

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Au Koryŏ, la divination était placée au cœur du système politique et ritualiste de la cour, impliquant la participation des moines bouddhistes et expliquant la prégnance de la géomancie pour la gestion du territoire (capitales et monastères).

This article analyzes the Koryŏsa, the History of Koryŏ Dynasty (918-1392), the main source of information on divination matters. It allows us to characterize the culture of medieval Korea divination, firstly by a description of the institutional framework (training, recruitment, careers, specialized offices) and the inventory of treaties used by specialists. It highlights the preponderant influence of the Tang and Song’s theories and institutions, but also the existence of a native school (the School of Tosŏn). Secondly, this study categorizes actors of divination based on their relationship to the state (administrative status and political issues). The Koryŏ Dynasty divination was at the heart of the political and ritualistic system of the court involving a necessary collaboration of Buddhist monks, explaining also the significance of geomancy for land management under the influence of the Tosŏn’s School.

AUTEUR

YANNICK BRUNETON Maître de conférences à l’université Paris-Diderot (UFR LCAO) membre de l’UMR 8173. Son domaine de spécialité est l’histoire de la période « médiévale » du Koryŏ (918-1392). Il a soutenu une thèse sur les moines géomanciens et a publié plusieurs articles sur les relations entre État et bouddhisme en Corée. Il est actuellement responsable du programme de recherche du Réseau des Études sur la Corée (2010-2015). Il a publié récemment : - (2011). « Comment la répression du religieux a-t-elle accompagné la réforme du régime monarchique de T’aejong ? Les mesures antibouddhiques au début du xve siècle en Corée », In État, religion et répression en Asie. Chine, Corée, Japon, Vietnam (XIIIe-XXIe s.), Paris, Karthala : 73-147 ; - (2012). « The Figure of Baozhi (418-524) : A Model for the Buddhist Historiography of the Koryŏ Dynasty ? », Journal of Korean Religions, Institute for the Study of Religion, Sogang University, Seoul, vol. 3, n° 2 : 117-151.

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Les manuels de divination japonais au début de l’époque d’Edo (XVIIe siècle) : décloisonnement, compilation et vulgarisation Divination Manuals in Early Edo period (17th century): Disclosing, Compiling, and Vulgarizing 要旨

Matthias Hayek

1 Le développement d’un marché du livre, imprimé ou manuscrit, est l’une des caractéristiques bien connues de l’époque d’Edo (1603-1868). À côté des livres d’art ou des feuilletons illustrés, on voit également fleurir des ouvrages d’un genre nouveau, dont il convient d’étudier la place qu’ils occupèrent dans le paysage intellectuel et cognitif de cette période. Il s’agit de manuels, shinan-sho, dont le but avoué est de mettre des connaissances spécialisées à la portée du plus grand nombre. Une simple recherche dans le « Catalogue des livres japonais anciens » (mis à disposition par l’Institut National de Littérature Japonaise) avec pour seul mot-clé le terme même de shinan ramène quelque 625 entrées, mais il faudrait revoir ce nombre à la hausse dans la mesure où tous les manuels ne comportent pas ce mot dans leur titre. En observant ces résultats, on constate que de tels ouvrages couvraient quasiment tous les champs du savoir de l’époque, depuis les « sciences » (médecine, nutrition, astronomie, calendrier) jusqu’aux plaisirs du monde (jeux de société, séduction, pratiques sexuelles) en passant par les arts (musique, peinture, poésie) et la vie quotidienne (règles épistolaires, tenue de la maisonnée…). Au cœur de cette variété, on trouve notamment un nombre très important de manuels dédiés à toutes sortes d’arts divinatoires.

2 Cela ne devrait pas nous surprendre outre mesure : le Canon des mutations, Yi jing (jp. Ekikyô), célèbre ouvrage fondant la méthode de divination par l’achillée millefeuille, fait partie des Classiques du confucianisme depuis l’époque des Han en Chine. Les lettrés japonais, férus de sciences chinoises, ont eux aussi goûté les joies de la glose de ce

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classique, et nous ont laissé nombre de commentaires1. Mais les « ouvrages pointant le Sud » (shinan-sho) dont il sera question ici appartiennent à un tout autre registre. Loin de la pure spéculation intellectuelle, ils se présentent comme des guides pratiques destinés à donner les clés d’utilisation de diverses méthodes divinatoires.

3 L’existence même de tels ouvrages nous révèle à quel point la mantique pouvait être présente dans le paysage intellectuel et cognitif de l’époque d’Edo. Dès lors, l’étude de ces manuels devrait nous permettre de mieux comprendre comment la divination était intégrée au domaine du « savoir » ou du « savoir-faire », au point que l’on lui consacre des livres entiers d’initiation.

4 Nous verrons ainsi comment les premiers livres imprimés de divination sont apparus au début du XVIIe siècle en tant que substituts améliorés d’outils jusqu’alors manuscrits. Puis, nous tenterons de mettre en lumière le développement de commentaires, c’est-à- dire de véritables guides destinés à être utilisés conjointement avec lesdits outils. Enfin, nous observerons les transformations subies par les manuels à partir de la fin du XVIIe siècle, et comment ces changements ont été rendus possibles par l’émergence progressive d’auteurs/compilateurs s’affirmant comme diffuseurs et correcteurs du savoir.

5 Notons d’emblée que nous nous intéresserons principalement à des ouvrages essentiellement destinés à un public de spécialistes, confirmés ou en devenir, c’est-à- dire de devins professionnels. Cela ne signifie pas qu’il n’existait aucun ouvrage de vulgarisation à destination des non-spécialistes — des almanachs imprimés, porteurs d’indications pour connaître le caractère faste ou non des jours, ainsi que d’autres ouvrages connexes ont été publiés tout au long de l’époque d’Edo — mais nous préférons laisser cette question en suspens, car les rapports complexes qu’ils entretiennent avec les livres spécialisés et la pratique des spécialistes mériteraient un article à part.

6 En retraçant l’évolution des manuels de divination, il s’agit avant tout pour nous de replacer les art mantiques au sein d’une dynamique plus globale, d’« exotérisation », compilation, et ré-ordonnancement critique des savoirs qui caractérise ce que l’on pourrait qualifier d’humanisme japonais. En effet, ce que l’on peut observer nous semble présenter d’importantes similarités avec les transformations de la production et de la diffusion du savoir en Europe entre la Renaissance et l’époque des Lumières : émergence d’une nouvelle intelligentsia, « redécouverte » du passé lointain et critique du passé immédiat, et développement de nouveaux media de diffusion2.

Des manuscrits aux imprimés

7 L’aube de la période d’Edo constitue un pivot important dans l’histoire de la divination japonaise. Après une centaine d’années de guerres et de rivalités intestines entre des seigneurs régnant sur des fiefs dispersés, le gouvernement imposé par Tokugawa Ieyasu, vainqueur de la bataille de Sekigahara (1600), apporta progressivement paix et unité à l’archipel à partir du début du XVIIe siècle. Cette nouvelle donne permit non seulement le développement de grandes centres urbains comme Kyôto, centre culturel essentiel, un mouvement déjà amorcé au siècle précédent3, mais contribua également à bouleverser les fondements même des modes « traditionnels » de transmission du savoir. En ce qui concerne la divination, la « Pax Tokugawa » conduisit à des

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changements lourds de conséquences, entraînant graduellement d’importantes transformations.

8 Il ne s’agit bien sûr pas de dire que la divination ne jouait qu’un rôle mineur dans la société japonaise avant l’époque d’Edo. Bien au contraire, rien n’indique que les arts mantiques aient été délaissés depuis l’établissement au VIIIe siècle d’un bureau officiel (onmyôryô) en charge de ce domaine ainsi que des domaines connexes que sont l’astronomie et le calendrier. Quelles que soient les transformations survenues par la suite, notamment en ce qui concerne les praticiens et les techniques, la divination a continué d’occuper une place de choix au sein de la culture des élites dirigeantes au travers des « deux Moyen-Âge », c’est-à-dire des époques Kamakura (fin XIIe siècle-1333) et Muromachi (1336-1573)4. Qui plus est, de nombreux témoignages, qu’il s’agisse de chroniques militaires, de notes personnelles ou même d’œuvres de fiction, font état de la participation active des devins dans les affaires militaires du XVIe siècle, cette période troublée dite des « Provinces en lutte » (sengoku) qui précède l’époque d’Edo. Véritables stratèges, ces devins au service des chefs de guerre conseillaient des tactiques à leurs maîtres, prévoyaient les mouvements ennemis ou choisissaient les jours propices aux batailles5. Par ailleurs, d’autres sources de la fin du XVIe siècle, comme certains rouleaux illustrés (emaki) ou encore des pièces de théâtre, mettent en scène des devins intervenant dans des affaires plus « mondaines »6. Néanmoins, avant l’essor de l’imprimerie, les arts mantiques restaient limités à double titre. En termes d’accessibilité d’une part, ils demeuraient réservés aux spécialistes et à une petite élite cultivée, en particulier la noblesse de cour. La variété des techniques, d’autre part, semble avoir été relativement restreinte, vraisemblablement suite à la disparition et/ ou au non-renouvellement des sources. En résumé, les connaissances divinatoires « médiévales » étaient concentrées entre les mains de quelques spécialistes, proches de grands centres de savoir : les cercles religieux, les aristocrates en lien avec l’antique bureau de la divination (surtout issus des familles Abe et Kamo) ou avec la « voie du calcul » (sandô), et enfin l’école Ashikaga, sorte d’école confucéenne qui, au XVIe siècle en tout cas, formait notamment des devins militaires7. La transmission des connaissances mantiques se faisait sur le mode du « secret » (hiden), quoiqu’il ne faille pas forcément prendre ce terme au pied de la lettre. En pratique, livres manuscrits et enseignements oraux étaient transmis de manière a priori exclusive au sein d’une famille de spécialistes, ou de maître à disciple dans les cercles religieux. Bref, on peut parler ici d’une véritable « ésotérisation » du savoir. Un texte en particulier exemplifie à merveille cet état de fait : le Hoki naiden, compilation du XIVe siècle présentant divers interdits de directions et journaliers entremêlés de mythes cosmologiques, de sorte que son contenu était vraisemblablement inaccessible pour des yeux profanes8. Par exemple, des éléments calendaires fondamentaux tels que les dix troncs célestes (jikkan) et les douze branches terrestres (jûnishi) y sont décrits comme les enfants de deux des « cinq princes dragons », personnifications des cinq agents (gogyô)9. Ainsi, bien que le système cosmologique en tant que tel conserve sa cohérence derrière le mythe (l’ordre d’apparition des différents éléments suit leur répartition saisonnière), il demeure difficilement perceptible pour le non-initié. Qui plus est, les entrées de ce texte composite ne donnent pour la plupart aucune explication quant à l’utilisation des notions abordées. Nous pouvons certes penser que, dans le cadre d’une transmission secrète, un commentaire oral accompagnait la lecture ? Nous verrons d’ailleurs plus bas que ce qu’on peut considérer comme des transcriptions de tels commentaires fut publié

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ultérieurement. Mais il n’en reste pas moins que le texte lui-même demeure profondément abscons.

9 On peut dire la même chose à propos d’autres textes manuscrits. Dans un autre article, nous avons eu l’occasion de mettre en avant une des principales techniques divinatoires, employée au plus tard depuis la deuxième moitié du XVIe siècle10. Cette méthode composite repose sur un cycle annuel des huit trigrammes (hakke), accompagné d’autres éléments calendaires, comme les neuf astres lumineux (kuyôshô), les douze conduites (jûni.un), etc11.

10 Pour la mettre en œuvre, les devins médiévaux disposaient de livres pliés en accordéon (orihon), habituellement appelés hakke ou « livre des trigrammes », dérivant probablement d’une sorte d’almanach du même nom que les employés du bureau de la divination du XVe siècle avaient pris coutume de remettre à la noblesse chaque année en même temps que le nouveau calendrier12. Le plus ancien manuscrit de ce type à nous être parvenu, conservé à l’Observatoire National du Japon, date du milieu du XVIe siècle. Contrairement au Hoki naiden et aux manuscrits issus de la tradition de cour, il offre de nombreux diagrammes et tables, mais quasiment aucun détail pratique sur la méthode employée. De plus, il y est fréquemment fait usage de caractères sanskrits, non seulement pour des formules à réciter, mais également dans les tableaux. Dès lors, il paraît raisonnable de considérer que les utilisateurs potentiels de ce genre d’ouvrage possédaient une connaissance préalable des procédures mises en œuvre, obtenue grâce à un enseignement oral ou bien à l’aide d’autres types de textes. Malheureusement, nous ne disposons que de très peu de documents de ce genre, et ils ne sont le plus souvent pas datés, de sorte qu’il nous est difficile d’affirmer quoi que ce soit à leur propos.

11 Concernant la variété des techniques, le Hoki naiden possède certes une section dédiée à la « domognomonie », l’art de juger du caractère faste ou néfaste des habitations, mais en réalité les textes médiévaux semblent pour la plupart s’être plutôt concentrés sur l’hémérologie. Ce terme, utilisé par les spécialistes de la divination en Chine, est ici employé afin de rendre le japonais rekisen, soit « divination calendaire ». Néanmoins, comme on peut le constater dans le volume éponyme du Wakan sansai zue (Les trois puissances illustrées de Chine et du Japon), une encyclopédie compilée par Terajima Ryôan et publiée au début du XVIIIe siècle, cette catégorie ne se limite pas aux seuls interdits journaliers, mais comprend en réalité toutes sortes de techniques utilisant des paramètres temporels (heure, jour, mois, année), combinés ou non, comme variables fondamentales afin de déterminer la fortune de chacun ou le caractère propice ou non d’un jour, d’une direction pour certaines activités, etc13.

12 Nous ne pouvons certes pas exclure l’emploi d’autres techniques avant le XVIIe siècle, notamment basées sur le Canon des Mutations, mais force est de constater que les techniques hémérologiques et/ou astrologiques constituaient, depuis l’Antiquité, le noyau des pratiques divinatoires à la Cour, de sorte qu’il nous semble possible d’établir sinon une continuité parfaite des contenus, du moins un tropisme privilégiant ce type de techniques.

13 Jusqu’à l’époque d’Edo, les arts mantiques étaient en tout cas peu accessibles à une audience profane, et principalement fondés sur un corpus de connaissances endogames élaboré au cours du Moyen Âge. C’est précisément cette situation que les premiers libraires imprimeurs ont dans un premier temps prise en considération, avant de chercher à y remédier, induisant à terme d’importantes transformations dans ce

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domaine. Les premiers livres imprimés en lien avec les arts mantiques ont d’abord contribué à maintenir le statu quo, comme la plupart des autres ouvrages de la même époque, en proposant des versions imprimées de textes qui circulaient déjà sous forme manuscrite.

14 Cependant, ils marquent tout de même une volonté d’aller vers une plus grande accessibilité du savoir. En pratique, ils conservent le caractère relativement obscur des manuscrits, tout en proposant parfois des contenus inédits, influencés par la demande ou l’introduction de nouveaux livres chinois. Remarquons ici que les plus anciens exemplaires ont vu le jour dès la fin de l’ère Keichô (1596-1614), soit à l’aube du développement de l’imprimerie commerciale au Japon et de sa sortie du giron des élites traditionnelles (temples, cour, etc.). En d’autres termes, les éditeurs les considéraient comme suffisamment importants et utiles pour les publier aux côtés des Classiques japonais et chinois. Notons enfin que les livres de cette époque diffèrent sensiblement des éditions postérieures pour ce qui est du contenu et de la présentation. La première édition du Hoki naiden, imprimée à l’aide de caractères mobiles en 1612, est ainsi assez éloignée des versions ultérieures, mais aussi des manuscrits complets (soit en cinq parties) les plus anciens. Comme aucun de ces derniers, parmi ceux qui appartiennent à la même lignée, n’est plus ancien que cette édition, on pourrait penser qu’il s’agit donc d’une version relativement récente, apportant non seulement des contenus différents, mais surtout une présentation un peu plus claire. Par exemple, l’entrée dédiée aux « trois accablements » (sanbukunichi) se présente comme suit dans cette version : Le premier jour aîné du métal à partir de la onzième division saisonnière commençant lors du sixième mois est le « premier accablement ». Le premier jour aîné du métal après le début de la douzième division saisonnière est l’« accablement médian ». Le premier jour aîné du métal après l’équinoxe d’automne est le « dernier accablement ». C’est ce qu’on appelle les « trois accablements ». Le premier est le premier, le second le médian, le troisième le dernier. Ce sont tous des jours très chauds et les cinq céréales ne peuvent donner leurs fruits. C’est pourquoi on ne plante pas des grains de riz dans les rizières ces jours-là14.

15 Le contenu informatif n’est en rien différent des autres versions du texte, mais on ne peut pas en dire de même de la formulation choisie. Comme on peut le voir dans l’édition de Nakamura Shôhachi, qui propose les différentes versions, la lignée réputée plus ancienne ne comprend pas les mêmes répétitions, et n’adopte pas le ton plus didactique de l’édition de Keichô. La langue elle-même, bien que limitée aux seuls caractères chinois, est plus éloignée de la grammaire chinoise que dans les autres manuscrits, avec plusieurs séquences « japonisées » du type « complément + verbe ». Ainsi, bien que la plupart des entrées restent peu compréhensibles sans une connaissance préalable de l’arrière-plan calendaire, cosmologique et technique du texte, la présentation elle-même tend néanmoins à le rendre plus intelligible.

16 On observe une tendance similaire dans les premiers « livres des trigrammes » imprimés, ainsi que dans un autre type d’ouvrage, appelé « ancien calendrier » (koreki), qui servait apparemment de support à des pratiques mantiques. Concernant cette dernière catégorie, la première version imprimée en 1617 omet la plupart des informations habituellement portées sur un calendrier, telles que les dates des équinoxes et solstices. À la place, nous trouvons des listes annuelles, de 1532 à 1617, donnant la longueur des mois (29 ou 30 jours), les binômes branche-tronc pour les nouvelles lunes, et les dates des divisions saisonnières. Au bas de chaque page sont imprimés deux hexagrammes, soit une combinaison de trigrammes. Sachant que l’on

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compte 64 hexagrammes, on s’attendrait à voir une figure différente pour chaque année. Or il n’en est rien : l’hexagramme Kon (6 lignes yin) est répété sur chaque page, suivi du nom d’une autre figure et de chiffres désignant les mois. Autrement dit, il n’y a pas de correspondance entre le nom de l’hexagramme et son image, de sorte que celle- ci apparaît plutôt comme une « balise » rappelant ce dont il est question. On supposait donc que le lecteur potentiel était capable de reconnaître les hexagrammes uniquement par leurs noms15.

17 Pour ce qui est des hakke-bon, la plus ancienne édition imprimée est tout à fait particulière. Publié en 1611, le Hakke zue (« Les huit trigrammes en images ») est unique en son genre, et il constitue presque une énigme. L’essentiel de son contenu suit celui du manuscrit de l’Observatoire National : une illustration du cycle annuel du yin et du yang à l’aide de douze hexagrammes, une introduction présentant brièvement l’origine supposée de la technique et son principe fondamental, une table chronologique des cycles de 60 ans depuis 724, une table des sons induits, natchin (ch. naiyin, soit l’agent interne propre à chaque binôme sexagésimal), et deux diagrammes circulaires utilisés pour déterminer le trigramme et l’astre lumineux (planète) correspondant à un individu donné selon son âge et son sexe.

18 La grande originalité de ce livre réside dans les diagrammes qui suivent ces premiers éléments : les huit figures à neuf cases indiquant la position de chaque trigramme autour d’un trigramme central étaient déjà visibles dans le manuscrit de l’Observatoire, mais elles sont ici accompagnées d’un jeu de dessins reprenant à l’identique leur disposition. Compte tenu du caractère redondant des scènes présentées, ces images apparaissent comme des illustrations expliquant le sens général de chaque position des trigrammes correspondants. Cela dit, à part cette innovation, le Hakke zue ne contient guère que des tables et des listes, la partie textuelle étant limitée à la seule introduction et à quelques notes sous les digrammes circulaires, indiquant en termes assez obscurs la méthode de décompte pour aboutir aux trigrammes et astres recherchés. Dès lors, en l’absence d’explication détaillée et de résultats, la technique en elle-même n’a pas vraiment été dévoilée dans cette première édition.

19 La présence intrigante des illustrations conduit à émettre deux hypothèses quant à la nature de cet ouvrage. Ou bien il s’agit d’une évolution des hakke annuels en vogue à la cour au XVe siècle, et il était donc destiné à des non-spécialistes, ou encore il s’agit bien d’un support pour une pratique professionnelle, un de ces « calendriers utilisés par les astrologues », comme le présente le Vocabulario da Lingoa de Japam (jp. Nippo jisho, dictionnaire édité en 1603 par les missionnaires jésuites). Dans ce cas-là, les connaissances spécialisées du praticien devaient provenir d’une source distincte, et les images s’adressaient alors aux clients16. Dans un cas comme dans l’autre, on constate que les premières versions imprimées d’ouvrages traitant d’hémérologie sont d’abord apparues comme des produits destinés à se substituer à des versions manuscrites. Elles apportent, certes, quelques améliorations tributaires des nouvelles possibilités offertes par la technologie de l’époque, mais on ne peut pas dire qu’elles modifient radicalement l’accessibilité proprement dite des connaissances mantiques.

20 Cependant, un vent de changement commence à souffler autour de 1630. En effet, à partir de cette époque les éditeurs cherchant à affermir leur position sur le marché ont pris conscience de l’intérêt qu’ils pourraient trouver à proposer à leurs lecteurs non seulement les classiques au sens large, mais également de nouveaux contenus. Dès 1628, un nouveau livre des trigrammes, dont l’édition de référence est appelée

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aujourd’hui On.yô hakke no hô (Fonds Kanô, bibliothèque de l’université du Tôhoku), fait son apparition chez un éditeur inconnu sis à Gojô Matsuyachô, à Kyôto. En guise de colophon, il fait état de la popularité de ce type de livres : Bien qu’il y ait de nombreux livres des trigrammes disponibles dans le monde, j’ai compilé celui-ci afin que les ignorants s’instruisent. Ce sera à coup sûr un sujet de plaisanterie pour ceux qui connaissent cette voie17.

21 Qui plus est, cette édition est supposée « nouvelle », eu égard à la mention d’une « nouvelle planche gravée » (shinshi), ce qui suggère qu’il a pu y avoir des éditions antérieures. La plupart des exemplaires de cette version ne donnent ni date ni imprimeur, exception faite de deux d’entre eux, datés de 1635 et 1640. Cette dernière version présente la même adresse que celle de 1628, tout en ajoutant le nom de Sakubê comme éditeur. C’est aussi le cas de certaines éditions « pirates », ne portant ni date ni adresse de l’éditeur. Notons enfin que l’édition de 1635 a été produite par Nakano Ichiemon, un des grands libraires de Kyôto spécialisé dans les textes bouddhiques des écoles ésotériques, et dans les Classiques chinois18. La première moitié de cette nouvelle version correspond peu ou prou à ce que proposait déjà le Hakke zue, moins les images. La seconde moitié, quant à elle, apporte de nouveaux éléments comprenant de nombreuses illustrations, diagrammes, et textes. La majorité desdits éléments consiste en pronostics hémérologiques basés sur différents systèmes cycliques, dont certains se trouvaient déjà dans le Hoki naiden, tandis que d’autres font ici leur première apparition. Les textes donnent de brèves explications sur l’entrée concernée ainsi que des pronostics très généraux. Pour ce qui est des nouveaux éléments, comme les « quatre empereurs saisonniers » ou les « douze bêtes et oiseaux », le texte est d’abord donné en chinois, suivi d’une traduction en japonais. La plupart de ces éléments trouvent leur origine dans un livre Ming attribué à un auteur de l’époque des Tang, Yuan Tiangang (?-627) : le Yanqin doushu sanshixiang-shu (jp. Enkin tosū sanzesô-sho). Celui-ci comprend diverses méthodes hémérologiques destinées à déterminer le passé, le présent et le futur (les trois âges, ch. sanshi, jp. sanze) d’une personne. Les emprunts faits à cet ouvrage ne se limitent pas au seul texte, mais incluent également des images. Ces ajouts sont visibles dès l’édition de 1628, mais il est intéressant de noter que le même Nakano fut le premier imprimeur à produire une édition japonaise d’une version du Yanqin doushu…, et ce, la même année que son livre des trigrammes. Qui plus est, il est également l’éditeur d’une version xylographiée du Hoki publiée en 1633. Ainsi, dans les années 1630, les éditeurs étaient en possession de nouvelles sources leur permettant d’actualiser des ouvrages préexistants et d’y adjoindre de nouveaux contenus. Ce faisant, ils entendaient probablement rendre leurs produits plus attractifs, mais on peut également supposer qu’ils essayaient de répondre à une demande du lectorat. En effet, on note des similarités frappantes entre les mentions manuscrites portées au dos du Hakke zue et certains des ajouts apportés par l’On.yô hakke no hô. En mêlant des sources anciennes et nouvelles, cette nouvelle version apportait, certes, des explications plus détaillées dans les parties récentes, mais laissait encore le cœur de la technique dans l’ombre. Fondamentalement, ce nouveau hakke-bon, livre plié richement illustré et utilisant un papier de haute qualité, reste davantage un support de la divination, un outil à montrer au client plutôt qu’un guide expliquant comment procéder. Néanmoins, les ajouts qu’il propose préfigurent des changements importants qui surviendront au cours des décennies suivantes.

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Fig. 1 Koreki, c1637, années 1561 et 1562 (conservé à l’Observatoire National du Japon).

Premiers commentaires : vulgariser et étendre la cible

22 Les éditeurs des années 1630 ne se sont pas contentés de fournir aux utilisateurs des versions améliorées d’ouvrages techniques plus anciens : ils ont également compris qu’il serait profitable de proposer des clés pour lire les « classiques », y compris des livres de divination. Ainsi, suite à la publication de commentaires médiévaux des classiques chinois et japonais (shômono), on trouve, dès 1628, un commentaire en caractères cursifs du Hoki, intitulé Hoki kana shô. Il s’agit vraisemblablement du Commentaire du Hoki, Hoki-shô, réputé avoir des racines médiévales bien qu’aucun manuscrit ancien ne subsiste. Il faut attendre l’année suivante pour voir ce même titre au catalogue de Matsuoka Sakuzaemon, un libraire-imprimeur de Kyôto, responsable de nombreuses éditions en caractères mobiles du Hoki depuis 1625. Ce commentaire, comme son prédécesseur manuscrit, le Hoki shûriden, ne couvre pas la totalité des contenus du Hoki, ou du moins n’accorde pas la même importance à toutes ses parties. Ainsi, il se concentre sur les sections narratives et mythiques qui ouvrent les deux premiers chapitres, et ne donne pour les entrées proprement hémérologiques que très peu d’informations pratiques. Suivant la tradition des commentaires médiévaux destinés à accompagner des lectures « publiques » (kôshaku) de textes de référence, il s’attarde plutôt sur des interprétations sémantiques19.

23 Pour trouver un véritable guide pratique du Hoki naiden, il fallut attendre 1634, et la publication du Chôreki (« Long calendrier »), compilé par un moine du nom de Shinetsu.

24 Ces deux volumes en kanbun se présentent comme un chapitre supplémentaire au Hoki d’origine, mais proposent en réalité une vision synthétique des contenus du Hoki, destinée à une utilisation pratique (choix de jours fastes, évitement des jours néfastes, etc.). Principalement composé de tableaux (premier volume) et de listes d’activités (second volume), ce Chôreki dépoussière l’hémérologie du Hoki naiden et la rend à nouveau utilisable directement, du moins par ceux capables de lire le chinois. On retrouve une approche similaire concernant les livres des trigrammes, avec l’apparition de commentaires/guides pratiques, que nous appellerons hakke-shô. Ces ouvrages offrent au lecteur ce qui manquait jusqu’alors aux livres pliés : une présentation détaillée de la méthode, accompagnée de résultats et pronostics. À la différence du Chôreki, ces guides sont toujours rédigés en langue vernaculaire, le plus souvent en mêlant le syllabaire katakana, plus « académique », et les caractères chinois. Selon Naraba Masaru, les plus anciens exemples d’ouvrages de ce type seraient le Tenmon hakke-shô (1650) et le Hakke hiden-shô (1652) 20. Ces deux textes semblent appartenir à deux traditions différentes, mais possèdent au moins un point commun : la technique qu’ils proposent se fonde non seulement sur les huit trigrammes, mais également sur

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les soixante-quatre hexagrammes, reconstruits à partir des carrés à neuf cases en combinant le trigramme central aux trigrammes périphériques. Naraba considère qu’il s’agit là de la méthode « originale » et opère une distinction entre ces deux lignées « anciennes » et une troisième, composée d’une série de livres intitulés Shinsen on.yô hakke narabini-shô, dont le premier exemplaire aurait été publié sous ce titre en 1665. Néanmoins, cette affirmation mérite d’être nuancée, car elle soulève plusieurs problèmes. D’une part, la version de 1665 est dite « augmentée », ce qui laisserait entendre qu’il existait une version antérieure. D’autre part, la postface figurant dans une version sans date, conservée à la bibliothèque de l’Institut des Hautes Études Japonaises du Collège de France, correspond terme à terme avec celle d’un livre en hiragana portant aujourd’hui un titre différent, On.yô hakke uranai-shô21. Ce dernier aurait été publié en 1637 par Sugita Kanbê, un libraire de Kyôto sans véritable spécialité, et connu pour avoir produit de nombreuses éditions pirates de livres édités par ses concurrents22.

25 Le Shinsen on.yô narabini-shô est un petit livre en deux parties. Comme l’indique son titre, il se veut une reprise des livres des trigrammes ainsi qu’un commentaire (shô) de ceux-ci. Cependant, il ne reprend que les contenus « originaux » (ceux qui étaient présents dans le Hakke zue, à l’exception des illustrations) et ne commente pas les ajouts qui correspondent à des emprunts ultérieurs au Sanzesô chinois ou au Hoki. Néanmoins, c’est vraisemblablement le premier ouvrage à donner une présentation claire de la méthode afférente aux diagrammes des livres pliés, ainsi que des résultats assez précis. Grâce à ce livre, nous comprenons enfin comment utiliser les figures circulaires présentes au début des hakke-bon : elles servent de support à un décompte des trigrammes selon l’âge de la cible, et ce dans un ordre déterminé par son sexe et son année de naissance. La formule mystérieuse figurant toujours sous les diagrammes circulaires, « Homme aîné à l’endroit, cadet à l’envers, Femme aînée à l’envers, cadet à l’endroit », est rendu compréhensible en distinguant clairement les quatre cas possibles23, et il en va de même pour l’autre formule, encore plus obscure, « dépasser le premier huit, bondir sur quarante et un, dépasser quarante-huit, bondir sur quatre- vingt-un, dépasser quatre-vingt-huit, bondir sur cent un »24. Le manuel ne se contente pas de donner des explications sur cette règle : prévoyant les difficultés qu’elle est susceptible de poser, il offre un exemple de décompte complet de un à cent un. Qui plus est, afin de faciliter cette opération fastidieuse, le compilateur a pensé à inclure des méthodes « personnelles » (watakushi ni iwaku) pour réduire le décompte en comptant de dix en dix tout en préservant les règles du système. Rédigé en syllabaire et faisant un usage minimal des caractères chinois, ce livre ne cherche pas de justification théorique aux opérations décrites, mais donne au contraire un moyen rapide et efficace pour utiliser la méthode des huit trigrammes. Sa taille réduite en fait un objet facile à transporter, et pouvant être employé conjointement avec un livre plié. La postface mentionnée plus haut nous offre des éléments particulièrement intéressants pour saisir la place occupée par cette méthode au milieu du XVIe siècle, ainsi que sur les intentions du compilateur : Concernant cette méthode de divination par les huit trigrammes et le yin et le yang, il y a de nombreux courants différents de par le monde, mais ce livre se concentre seulement sur les deux catégories yin et yang : c’est ce que j’appelle la divination à deux paramètres. Y a-t-il en effet quoi que ce soit au sein de ce qui est né entre Ciel et Terre qui n’appartienne à l’une ou à l’autre ? Lorsque j’utilise cette méthode, tout se passe comme si je regardais le miroir de pur cristal [d’Enma, le juge des enfers],

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et que je lançais une flèche en plein milieu de la cible. Nul doute qu’elle donnera de nombreuses preuves de son efficacité25.

26 Ainsi, le compilateur nous dit avoir choisi une technique, sans doute la plus simple, parmi différentes « écoles » existant à l’époque. Les autres commentaires publiés dans les années 1650 seraient alors issus de ces autres courants. Le seul exemplaire du Tenmon hakke-shô de 1650 à nous être parvenu est malheureusement incomplet, de sorte qu’il est difficile d’affirmer quoi que ce soit à propos de la technique originale, mais si l’on en croit une réédition de 1685, il semble qu’il s’agisse d’une méthode plus complexe, impliquant au moins trois paramètres. Quant au Hakke hiden-shô, il comprend huit chapitres, chacun étant dédié à huit hexagrammes, ce qui le rend plutôt volumineux. De plus, les commentaires donnés sont souvent peu éclairants, et comprennent de nombreuses corrélations non expliquées, empêchant d’avoir une vision claire de la technique. Ces deux livres possèdent une forte coloration bouddhique, et peuvent ainsi être considérés comme des exemples d’exotérisation de techniques utilisées par des devins appartenant à des écoles ésotériques (Tendai, Shingon) ou assimilées (shugendô). De ce point de vue, il est fort possible que la technique présentée dans le Tenmon hakke-shô soit plus ancienne que celle à deux paramètres, ne serait-ce que parce qu’elle tient compte d’éléments matérialisés par des tiges de calcul déjà visibles dans le Hoki naiden ainsi que dans d’autres manuscrits médiévaux26. Dans tous les cas, ces ouvrages constituent des tentatives de « divulgation » de connaissances jusque-là considérées « secrètes », tout en proposant un contenu plus dense que celui des livres déjà sur le marché. Derrière ce phénomène, il est possible de discerner au moins deux lignes d’influence croisées : la volonté des éditeurs d’offrir des nouveautés compétitives, et une certaine motivation des auteurs et compilateurs, dont la nature reste à préciser.

27 Ainsi, après avoir initié ce processus d’exotérisation des savoirs, les éditeurs de Kyôto ont développé de nouvelles stratégies commerciales pour améliorer leurs ventes. Dès lors, ils ont été amenés à prendre en compte différentes questions interconnectées, notamment celles de la nouveauté, de la légitimité, et du caractère pratique des contenus proposés. Tout en conservant un fond de roulement avec des rééditions ou des mises à jours (éditions augmentées, révisées etc.), les libraires ont progressivement tenté d’apporter de nouveaux atouts à leurs catalogues. Cependant, ils ne pouvaient plus se contenter d’emprunts plus ou moins discrets et anarchiques à des livres chinois : en partie à cause de leur propre production, les éditions japonaises de textes chinois étaient devenues bien plus courantes en un demi-siècle. Au contraire, la « valeur ajoutée » des extraits d’ouvrages continentaux en est venue à résider dans le fait de les citer ouvertement, comme le montre bien une édition de 1667 du Hoki. Celle- ci comprend en effet un volume supplémentaire rempli d’images et de diagrammes. On y trouve notamment un arbre généalogique des familles Abe et Kamo, ainsi que des dessins des deux récipients rituels donnant leur nom à ce texte, des images de divinités astrales, mais aussi de plantes et de mobilier. Dans la plupart des cas, ces illustrations sont suivies d’une mention explicitant leur provenance : des livres chinois nommément identifiés. Ce supplément a deux fonctions : aider le lecteur à mieux comprendre le contenu énigmatique du Hoki, et établir une forme de continuité entre les livres chinois et japonais, une tendance confirmée par les nombreux ouvrages dont le titre contient le wakan, soit « Chine et Japon », indiquant une mise en regard des savoirs issus des deux pays. Les citations de sources chinoises servent également d’argument d’autorité

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montrant que l’éditeur ou le compilateur a effectué des recherches poussées avant de publier cette nouvelle version.

28 C’est précisément autour de cette question de la légitimité des contenus que les éditeurs et les auteurs ont pu trouver un intérêt commun. En effet, les auteurs jusque- là anonymes de manuels de divination ont commencé à se mettre en avant et à affirmer leur présence dès le milieu du XVIIe siècle. Au moment où la divination quittait le cercle restreint de la cour, des temples, ou de l’entourage des seigneurs, la plupart des savoirs techniques (calcul, médecine, astronomie, etc.) faisaient de même, passant entre les mains de lettrés laïques. Cette intelligentsia naissante, souvent formée à l’ancienne école, et qui jouissait d’un accès privilégié aux sources chinoises ainsi que d’importantes compétences techniques, joua un rôle décisif dans la diffusion des savoirs, notamment mantiques. Les éditeurs purent rapidement compter sur des auteurs à succès ayant des connaissances en calcul et en science calendaire pour apporter nouveauté et autorité à leurs manuels. Ainsi Yoshida Mitsuyoshi (1598-1672), connu pour son guide introductif aux mathématiques, le Jinkôki, se trouve également être l’auteur d’une refonte du Koreki, le Koreki benran, publié en 1648. Dans sa préface, Yoshida expose clairement la place qu’il entend donner à son travail, et les raisons qui l’ont poussé à publier ce livre : J’ai là un petit livre intitulé « calendrier ancien ». Il concerne les spécialistes en calendrier, mais il peut également servir pour la voie des Mutations. Cela fait quelque temps qu’il en est ainsi. Néanmoins, les erreurs d’impression et de calcul sont innombrables, et il y a longtemps qu’elles exercent leur mauvaise influence de par le monde. Bien que je n’aie pas le moindre talent, je suis connu pour avoir quelques lumières sur les nombres. Ainsi, je n’avais d’autre choix que de corriger ces erreurs. J’ai rassemblé ces corrections en deux chapitres, et appelé ce livre Guide pratique de l’ancien calendrier. Il débute à l’année du Cheval, aîné de la terre, et se termine l’année du Rat, aîné du bois. Des cinq planètes, sons induits, mansions lunaires, branches et troncs, jusqu’aux divisions saisonnières, les dates des jours d’anéantissement et d’accablement, les phases de la lune et les étoiles animales, il n’y a rien ici que je n’aie dûment vérifié. Ce livre n’est pas pour les hommes de lettres éclairés qui discernent l’angoisse et le regret en interrogeant l’achillée et en lisant le Canon des Mutations. Je ne peux qu’espérer qu’il aidera les ignorants à déterminer les jours fastes et néfastes, les gains et les pertes, en observant les figures mantiques selon les années27.

29 La posture adoptée ici par Yoshida est clairement celle d’un lettré souhaitant partager ses connaissances avec des lecteurs supposés moins éclairés, tout en critiquant l’indigence des ouvrages préexistants. Qui plus est, notons qu’il s’est fait un devoir non seulement de corriger les erreurs des ouvrages précédents, mais qu’il a aussi voulu inclure des contenus supplémentaires en lien avec le calendrier, probablement pour améliorer la cohérence du manuel, mais également pour le démarquer des anciens koreki. Dans cette préface, Yoshida établit ce qui deviendra une sorte d’attitude standard parmi les auteurs/compilateurs postérieurs.

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Fig. 2 Koreki Benran, 1648, années 1561 et 1562 (conservé à la bibliothèque de l’université Waseda)

L’ascension des auteurs dans un marché en expansion

30 La croissance constante du marché du livre amena dès le milieu du XVIIe siècle les éditeurs à produire des catalogues des livres disponibles (Shojaku mokuroku). La plus ancienne version, publiée entre 1666 et 1670, établit un modèle de classement qui perdurera durant plus d’un siècle. Parmi ces catégories, toujours intercalée entre les livres sur les dieux (shinsho) et les livres sur les arts militaires (heisho), nous trouvons une catégorie « calendrier ». Il s’agit bien sûr ici en premier lieu d’ouvrages hémérologiques, mais également de toutes sortes d’ouvrages de divination. Dans les versions ultérieures, cette catégorie est devenue « calendrier et divination », et au XVIIIe siècle « calendrier, astronomie et divination », recréant ainsi la triple mission des devins de cour de l’Antiquité. Sans surprise, la plupart des livres évoqués jusqu’à présent figurent dans les 28 titres proposés par le premier catalogue, notamment les livres des trigrammes (pliés) et les commentaires reliés. Le nombre total de titres peut sembler restreint, et ce premier catalogue ne fait aucune mention des auteurs/ compilateurs, mais dès 1670, le nombre de références atteint 54, et quelques noms d’auteurs font leur apparition. En 1685, le catalogue s’est encore enrichi, avec 79 titres au total, et en 1692, soit durant l’ère Genroku, considérée comme le premier âge d’or de l’imprimerie commerciale au Japon, on dénombre 105 livres différents dans la catégorie qui nous occupe. Autrement dit, le nombre de livres a quadruplé en un peu moins de trente ans.

31 Grâce à ces catalogues, il est ainsi possible de suivre l’évolution du marché, mais aussi de constater la présence grandissante des auteurs. Certains d’entre eux ont tenté d’adopter une approche différente de la divination par les huit trigrammes, d’une façon

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qui pouvait rappeler celle de Yoshida. Le Kokon hakke taizen, une compilation de 1671 comptant six volumes présentant la technique à trois variables et basée sur des manuels déjà disponibles, possède des caractéristiques nouvelles. En effet, il s’agit d’un livre annoté avec notamment des explications terminologiques et des éclaircissements concernant le contexte de telle ou telle référence littéraire. Son compilateur anonyme était sans doute proche des cercles bouddhiques, le livre ayant été coédité par le Mont Kôya, centre de la secte ésotérique Shingon. Dans cet ouvrage, il expose avec soin les récits d’origine de la divination en Chine, en Inde et au Japon, tout en se montrant critique à l’égard d’affirmations douteuses relayées par des livres plus anciens. Il dénonce par exemple l’anachronisme de la rencontre supposée entre Kibi no Saneyasu (sic)28 et Abe no Seimei. Par ailleurs, il cherche à légitimer son entreprise en se réclamant de connaissances issues du « Canon des Mutations, des courants Tendai, Shingon, et des spécialistes de l’astronomie », et expose clairement son intention : « corriger les mauvaises théories, élaguer ce qui est trop dense et clarifier ce qui est trop bref »29.

32 À côté du simple argument de la nouveauté, nous voyons émerger ici l’idée que les utilisateurs potentiels gagnent en autonomie : ils ne peuvent se contenter de connaissances partiellement vulgarisées, et d’explications tronquées. Tout nouvel ajout se doit d’être légitimé par un élément faisant autorité, que ce soit la renommée personnelle dans le cas de Yoshida, ou le bagage intellectuel dans le cas du compilateur du Kokon hakke taizen.

33 Ce double intérêt des éditeurs et des auteurs devient de plus en plus visible dans les manuels postérieurs, et conduit à l’apparition de plusieurs lignes d’évolution avant que les livres de divination n’entrent dans une phase nouvelle de leur développement. D’un côté, nous avons des rééditions avec notes de haut de page (tôchû/kashiragaki), et de l’autre, les compilations en plusieurs volumes (taizen, taisei, shûsei, etc.) ajoutant de nombreux éléments sans forcément de liens entre eux. Ces deux groupes ne sont pas étanches, et partagent en réalité de nombreux points communs, notamment la présence de plus en plus marquée des compilateurs et leur intention affirmée de corriger et d’améliorer les techniques divinatoires existantes, tout en offrant à leurs lecteurs « ignares » des outils plus pratiques. Dans les deux cas, il s’agit de proposer un savoir nouveau ou au moins une nouvelle présentation de techniques « anciennes », ledit savoir devant être légitimé d’une manière ou d’une autre. Qui plus est, les deux catégories témoignent d’une augmentation du volume de connaissances à la fin du XVIIe siècle. En d’autres termes, il y avait suffisamment de variété des contenus à l’époque pour qu’il soit possible de produire des commentaires sur les commentaires, ou des compilations issues de sources multiples.

34 Un ouvrage de 1680 peut nous aider à saisir la transition entre les simples « éditions révisées » et les compilations ou ouvrages annotés. Le Baika shin.ekisû meikan est un livre particulier : c’est l’une des premières tentatives d’introduction d’une nouvelle technique de divination, dite des « Mutations en esprit de la fleur de prunier », baika shin.eki (ch. meihua xinyi), une forme d’arithmomancie partant d’une date et d’une heure pour obtenir un hexagramme complet. Ce livre ne présente pas la technique dans son intégralité. Le premier volume propose une sorte de table perpétuelle permettant d’arriver à un hexagramme sans effectuer de calcul. D’après la préface de l’éditeur, cette table aurait été mise au point par Koizumi Shôtaku, un spécialiste en calendriers de la province de Kii (actuel département de Wakayama et partie sud du département

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de Mie). Néanmoins, Koizumi n’aurait pas donné d’exemples détaillés ni d’explications quant à l’utilisation de cet outil, le laissant ainsi « incomplet ». C’est pourquoi l’éditeur éprouva le besoin d’ajouter un second volume, pour aider les « amateurs » (dômô). À vrai dire, il ne s’agit là ni d’une compilation ni d’un livre annoté, mais cet ouvrage reflète bien l’esprit qui planait sur le marché des manuels de divination à la fin du XVIIe siècle : offrir non seulement de nouvelles connaissances, mais aussi, et surtout, des connaissances pratiques et faciles à mettre en œuvre.

35 Le même Koizumi est également l’auteur d’un Chôreki annoté, Tôchû chôreki, publié en 1688, qui illustre parfaitement l’objectif de ce genre de livre. Dans les deux volumes qui le constituent, nous trouvons le texte original de Shinetsu accompagné d’éléments supplémentaires clairement indiqués comme tels au bas des pages, et des notes et commentaires détaillés en haut. Koizumi exprime nettement son dessein dans l’introduction, avançant qu’il manquait de nombreux articles au livre original, qu’il comportait beaucoup d’erreurs et que les explications données étaient trop brèves, de sorte qu’il « était difficile à comprendre pour les gens non entraînés » (tanren naki hito). C’est pourquoi il a voulu compiler cette version annotée, destinée à un « usage quotidien » par des « gens du commun », mais avec des sources solides et des connaissances héritées des spécialistes en calendrier30.

Fig. 3 Koizumi Shôtaku Gôtô chôreki 1816 (réédition du Tôchû chôreki), section sur les huit généraux divins (hasshôjin) (conservé à la bibliothèque de l’université Waseda)

36 Au cours des années suivantes, la plupart des manuels déjà présentés ici ont bénéficié de rééditions annotées et augmentées de commentaires ajoutant des méthodes alternatives, voire des éléments totalement hétérogènes au contenu originel. L’addition de notes en tant que telle est un procédé intéressant, dans la mesure où, en combinant texte original et commentaire, il réunit en un seul ouvrage les intérêts respectifs des éditeurs et des compilateurs : la création d’un produit nouveau à partir de contenus anciens pour les uns, et l’occasion de démontrer leurs connaissances et leurs intentions

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pédagogiques pour les autres. Le caractère pléthorique des informations fournies par ces livres jette pourtant un doute quant à leur facilité d’utilisation. Il semblerait plutôt que la volonté des auteurs de donner des références variées et des outils pratiques, combinée à celle des éditeurs de produire de la nouveauté, ait contribué à créer des « monstres » peu utilisables, donnant seulement une vision fragmentaire des éléments présentés. De ce point de vue, le Wakan hakke shoshô taisei, publié en 1695, représente l’apex de la « fièvre de la compilation » qui avait gagné le marché à la fin du XVIIe siècle. Comme le titre l’indique, cette somme impressionnante en quatre volumes est encore dédiée aux huit trigrammes, ou du moins c’est le cas des quatre premiers chapitres. La place que le compilateur, un certain Okamura Kotôken, entendait donner à son ouvrage est exprimée clairement dans la postface. Il considère en effet que la divination par les huit trigrammes est incomplète et dégradée par tous les commentaires inadéquats et inutiles, et c’est pourquoi il a décidé de l’amender, non en retrouvant un corpus original depuis longtemps disparu, mais au contraire en y ajoutant des éléments simplifiés, et surtout corrigés, à partir de sources chinoises : […] On ne sait pas qui a écrit les Livres des trigrammes. En ce qui concerne la transmission de cette méthode au Japon, c’est d’abord Kibi no Saneyasu [sic] qui la rapporta de Chine, après quoi elle se diffusa. […] Puis, Abe no Seimei se rendit lui aussi en Chine et transmit son Recueil du Corbeau d’or et du lièvre de jade, mais malheureusement le texte en est perdu. Les ouvrages qui circulent aujourd’hui sous ce nom sont fragmentaires et ne proposent que les neuf graphiques ou les astres. Ah ! Quel dommage ! Les travaux de Leurs Excellences Kibi et Seimei ne nous sont pas vraiment parvenus, et c’est pourquoi à notre époque la science des huit trigrammes est incomplète et inutile. (On y a certes ajouté telle et telle méthode, mais ce sont toutes des conceptions hérétiques). C’est pourquoi, ayant du temps libre, j’ai ajouté quelques concepts issus des Mutations, réuni différents ouvrages sur les huit trigrammes, et proposé cette compilation ainsi que les secrets des différents courants, en coupant les passages trop denses, en simplifiant le complexe […] et ce pour servir aux devins débutants (shogaku no bokushi)31.

37 En insistant sur l’absence de source claire, défaut majeur des premiers manuels, il valorise du même coup sa propre entreprise. En effet, il n’hésite pas à donner, en tête d’ouvrage, l’ensemble des textes auxquels il fait référence, tout en précisant qu’il ne les citera pas tels quels. Cette liste, qui ne compte pas moins de trente-cinq titres différents, dont des formulations génériques regroupant sans doute plusieurs ouvrages, nous donne un aperçu édifiant de ce que pouvait être la bibliothèque d’un lettré versé dans les arts mantiques à la fin du XVIIe siècle. À côté d’ouvrages japonais médiévaux, comme le Hoki naiden, on y trouve ainsi des « nouveautés » chinoises allant des Song (960-1279) aux Ming (1368-1644), soit nombre de textes qui serviront par la suite de base aux manuels de vulgarisation. Dans une certaine mesure, c’est toute la divination pré-moderne qui se trouve en gestation dans cette anthologie.

38 La position même de l’auteur par rapport à son travail est tout aussi éloquente, et résume très bien la situation de ce type de savoir à cette époque : Même si ce livre fait référence à de nombreux ouvrages des sages, il ne reprend pas toujours leur lettre, mais, s’adressant aux débutants (shogaku), il en conserve le sens tout en en donnant une traduction (yawarageru) et des annotations simplifiées en caractères syllabiques (kana)32.

39 Les deux termes, shogaku et yawarageru (littéralement « adoucir », mais également « traduire en japonais »)33, sont ici les mots clés : ce manuel, comme tant d’autres après lui, n’est en aucun cas destiné à des experts pouvant avoir accès à de vastes bibliothèques d’ouvrages chinois, mais à ceux qui désirent obtenir un savoir simplifié,

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condensé pour une plus grande facilité de compréhension et d’utilisation. Par exemple, Okamura a inclus des diagrammes circulaires pour déterminer les sons induits et d’autres éléments hémérologiques ne nécessitant aucun calcul. Cependant, de par sa nature même, une telle compilation peut difficilement servir le grand dessein de son auteur. Certes, elle offre de nouveaux éléments fondés sur des sources clairement identifiées, mais la soif d’exhaustivité du compilateur, voire de l’éditeur, en a fait un produit superficiel et obscur. En réalité, l’insistance d’Okamura et d’autres compilateurs dans la même veine à vouloir compléter la méthode « originale » les a empêchés d’aboutir à un contenu clair et cohérent. En d’autres termes, l’intention pédagogique mise en avant dans les préfaces cède rapidement le pas à une tendance encyclopédique peu contrôlée. Quoi qu’il en soit, Okamura, comme Koizumi et Yoshida avant lui, a sans l’ombre d’un doute contribué à la création de nouveaux standards pour la diffusion des connaissances mantiques, jetant les bases des transformations à venir et ouvrant le chemin pour le changement de paradigme apporté par leurs successeurs.

40 Au vrai, il ne faudra que quelques années pour que ce changement advienne, en particulier grâce à l’œuvre de Baba Nobutake (?-1715). Ce médecin de Kyôto, qui fut un temps au service d’un prince impérial à la tête d’un temple (monzeki), passa une partie de sa vie à vulgariser et diffuser des connaissances d’origine chinoise, et ce dans des domaines aussi divers que l’astronomie, le calendrier, les classiques confucéens, la divination, mais aussi les récits militaires, la poésie, la peinture et même la prestidigitation. Pionnier dans la plupart de ces domaines, il fait figure d’archétype des lettrés intermédiaires polymathes qui devinrent incontournables durant la période Genroku. Reprenant, sans le citer pour autant, les deux mots clés du Wakan hakke shoshô taisei, il est finalement parvenu à accomplir ce que ses prédécesseurs n’avaient pu réaliser : un éventail de manuels consacrés à une technique spécifique et dotés d’explications claires et faciles à mettre en pratique. En résumé, il a entrepris la lourde tâche d’offrir des versions simples et pratiques de différentes techniques liées de près ou de loin au Canon des Mutations, déjà accessibles dans des livres en chinois, ou parfois introduites partiellement dans des compilations. Ainsi, il fait partie des premiers auteurs à avoir donné une vision complète en langue vernaculaire de la technique des « mutations en esprit ». Son premier livre, publié en 1697, Baika shin.eki shôchû shinan, se veut un guide à l’original chinois attribué à Shao Yong (1011-1077), poète et cosmologue de l’époque des Song. Cet original circulait déjà sous forme manuscrite avant l’époque d’Edo, et une version japonaise fut produite en 1643. Qui plus est, nous avons vu que Koizumi Shôtaku avait déjà produit un guide basé sur cette méthode, et nous retrouvons son influence dans plusieurs compilations dédiées aux trigrammes. Néanmoins, aucun de ces travaux n’est allé aussi loin que celui de Baba. Au long des cinq volumes en syllabaire katakana et en caractères chinois, il présente toutes les clés de la technique à un lecteur supposé incapable de lire le chinois. Sans pouvoir entrer ici trop dans les détails, disons simplement que Baba a pris soin de donner de nombreux exemples et des procédures détaillées, accompagnées de diagrammes expliquant comment utiliser la main gauche comme support de calcul divinatoire. Sa position par rapport à son travail apparaît clairement dès les remarques introductives : En ce qui concerne les graphiques de la succession du ciel antérieur (senten) de , de la succession du ciel postérieur (kôten) du Roi Wen, le Diagramme du Fleuve et l’Écrit de la Luo (kato rakusho), j’ai transcrit simplement en syllabaire kana pour servir aux premiers pas […] Concernant les ordres d’engendrement et de prévalence des cinq agents, on les trouve certes dans de nombreux livres, mais comme ils ne

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sont pas traités dans le détail, j’ai rédigé un texte que j’ajoute ici afin qu’il serve aux débutants ignorants34.

41 Ou encore, dans un style rappelant le Wakan hakke shoshô taisei : [Ce livre] cite certes nombre de paroles des sages, mais je les ai toutes simplifiées en syllabaire pour les débutants. Dans le Shin.eki, les exemples de divination selon les successions du ciel antérieur et du ciel postérieur sont regroupés à un endroit, mais comme c’est difficile à lire quand on débute, je les ai séparés et mis ceux de la succession du ciel postérieur dans le dernier chapitre35.

42 Ainsi, l’objectif premier de Baba est de donner aux « débutants » un accès simplifié à des connaissances au départ complexes, quitte à s’écarter un peu de l’original chinois. Notons que dans sa postface, il explique avoir commencé à compiler ce travail longtemps auparavant, avec l’idée d’aider les « amateurs » à saisir les concepts difficiles via la langue vernaculaire, mais ce n’est finalement qu’à la demande expresse d’un éditeur qu’il s’est résolu à publier son œuvre, en y ajoutant bon gré mal gré certains éléments hétérogènes.

43 De tels arguments, mettant en avant l’importance des « premiers pas », se retrouvent dans les autres manuels de Baba, comme en témoignent leurs titres, qui comportent fréquemment les mots shogaku ou shinan. Dans un de ses derniers ouvrages, le Shokatsu kômei senpô rigen-shô, il affirme sans complexe avoir « abandonné l’usage militaire [original] au profit d’un usage quotidien, et transformé les vrais caractères (shinji/ mana, c’est-à-dire les mots chinois) en mots vernaculaires. Ce faisant [il] jette la forme mais garde le fond, entendant réduire l’écart avec les gens du commun36. »

44 Baba ne s’est donc pas arrêté au Baika shin.eki, mais a poursuivi son travail de vulgarisation avec d’autres techniques chinoises qui n’avaient encore jamais été présentées en langue vernaculaire. Son but n’est plus de collationner ou de compléter des techniques médiévales défectives, mais plutôt de proposer des ouvrages nouveaux, cohérents et se voulant pratiques pour des devins professionnels n’ayant que de maigres connaissances en chinois. Sa position est celle d’un correcteur critique, combattant l’ignorance qu’il perçoit derrière les pratiques des devins de son temps. Pour atteindre son but, il fait un usage efficace de diagrammes dûment commentés, de phrases mnémotechniques, d’exemples, et de « divination sur-le-champ » (sokuji no uranai), c’est-à-dire de listes de résultats détaillés et répartis en plusieurs catégories (choses perdues, personnes attendues, maladie etc.)37. Comme il le dit lui-même, il n’entend pas accumuler des citations abstruses de textes chinois, ou des commentaires poussés sur les hexagrammes, mais au contraire mettre à la disposition des « gens du commun », c’est-à-dire des non-lettrés, des connaissances chinoises pratiques et relativement nouvelles. Sa retenue des premiers temps a fait long feu : on lui connaît au moins trente titres différents, dont plus de la moitié sont consacrés à des techniques divinatoires. De ce point de vue, Baba fut sans doute l’un des premiers auteurs à se consacrer aux manuels de divination, avec une autorité bien établie et assumée, comparable à celle de savants comme Kaibara Ekken (1630-1714), Nishikawa Joken (1648-1724), etc. Dès lors, il représente un pur produit de son époque, et illustre la façon dont les connaissances mantiques ont pu être largement diffusées et renouvelées entre le XVIIe et le XVIIIe siècle.

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Conclusion

45 L’exotérisation et les transformations du savoir divinatoire au cours de la première moitié de l’époque d’Edo représentent l’aboutissement d’un faisceau de processus conjoints. Dans cet article, nous avons surtout voulu mettre l’accent sur le rôle du médium (livre imprimé) et sur celui des auteurs de la fin du XVIIe siècle. Le fait que des savants laïques, ou redevenus laïques, et n’appartenant pas aux élites politiques, se soient approprié ces savoirs et aient choisi de les diffuser tout en opérant à terme un travail critique sur les contenus, conditionne en effet la réception, et par-là même l’usage de ces connaissances à cette époque, voire au-delà. Cette nouvelle intelligentsia se démarque des élites traditionnelles sur plusieurs points, mais nous en retiendrons surtout un : la plupart de ses membres n’exerçaient pas un métier directement lié à leurs talents dans les domaines qu’ils ont choisi de vulgariser. Autrement dit, ils n’étaient pas des spécialistes professionnels formés au sein d’un organisme dédié, comme pouvaient l’être les devins de cour de l’Antiquité. Yoshida Mitsuyoshi ne travaillait pas à l’établissement de calendriers officiels, Nishikawa Joken n’a pas commencé sa carrière comme astronome et Baba Nobutake ne gagnait pas, a priori, sa vie en pratiquant la divination. Nakane Genkei (1662-1733), auteur de plusieurs ouvrages sur le calendrier (dont une refonte du Koreki benran de Yoshida), les mathématiques ou encore l’astronomie et la lexicographie, était employé auprès de l’agence chargée de la régulation du cours de l’argent (ginza) à Kyôto38. Bref, aucun de ces savants ne dépendait de son savoir pour assurer sa subsistance, mais ils écrivaient plutôt durant leur « temps libre » et à la demande des éditeurs.

46 Ces lettrés intermédiaires purent produire leurs livres pour au moins trois raisons : ils avaient le temps de le faire, n’étant pas au centre d’une bureaucratie gouvernante comme leurs « collègues » chinois et coréens ; les matériaux de base (livres chinois) nécessaires à l’élaboration des manuels étaient relativement disponibles grâce aux publications locales et aux échanges commerciaux ; et enfin ils étaient capables de lire lesdits textes chinois et ils avaient acquis, par un moyen ou un autre, des compétences techniques dans les domaines liés à la divination leur permettant de vulgariser leurs connaissances pour le bénéfice d’autrui, sans pour autant nécessairement chercher à s’imposer comme des « maîtres » dans ces domaines. Experts en « études confucéennes », c’est-à-dire en sciences chinoises, ces auteurs n’étaient pas liés de manière existentielle à ces connaissances spécialisées, ni à une classe sociale particulière, mais appartenaient plutôt à un groupe informel partageant une culture commune, proche de la Freischwebende Intelligenz théorisée par Mannheim39.

47 Ce sont donc les écrits de ces savants à temps partiel qui ont servi de base à la diffusion des connaissances mantiques auprès d’un public spécialisé. En effet, plusieurs types d’indices (notes manuscrites dans les imprimés, listes de livres, déclarations lors de procès-verbaux, etc.) indiquent clairement que la plupart des manuels évoqués ici ont fait l’objet d’une utilisation par des devins professionnels, appartenant souvent à des groupes de religieux populaires, notamment des « ascètes montagnards » (yamabushi)40. Bien que l’on observe une laïcisation progressive du métier de devin, surtout en ville, à partir de la fin du XVIIe siècle, ces religieux diseurs de bonne aventure étaient (et restent encore) actifs dans le monde rural. Le fait qu’ils aient été en possession de manuels imprimés ou de copies manuscrites nous montre qu’une partie au moins de leurs activités était basée sur des connaissances issues des milieux intellectuels urbains,

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de sorte qu’ils pouvaient, de ce point de vue, servir d’interface entre ville et campagne. Ce faisant, ils ont pu contribuer à terme à l’uniformisation des savoirs mantiques à l’échelle du pays, et au-delà à la diffusion d’une vision du monde développée par les auteurs et compilateurs « humanistes » des manuels de divination.

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ANNEXES

Glossaire

梅花心易数明鑑 Baika shin.ekisû meikan 卜士 bokushi 童蒙 dômô 絵巻 emaki 演禽斗数三世相 Enkin tosû sanzesô 元禄 Genroku 銀座 ginza 五行 gogyô 八卦本 hakke-bon 八卦秘伝抄 Hakke hiden-shô 八卦図会 Hakke zue 兵書 heisho 秘伝 hiden 平仮名 hiragana

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簠簋仮名抄 Hoki kana-shô 十干 jikkan 塵劫記 Jinkôki 十二支 jûnishi 十二運 jûni. un 漢文 kanbun 片仮名 katakana 河図洛書 kato rakusho 慶長 Keichô 九翟星 kuyôshô 古暦 Koreki 坤Kon 講釈 kôshaku ý天 kôten 門跡 monzeki 納音 natchin 二十八宿 nijûhasshuku 日葡辞書 Nippo jisho 陰陽寮 onmyôryô 陰陽道 onmyôdô 陰陽師 onmyôji 陰陽八卦占抄 On.yô hakke uranai-shô 折り本 orihon 暦占 rekisen 算道 sandô 三世 sanze 三伏日 sanbukunichi 戦国 Sengoku 先天 senten 邵雍 Shao Yong 指南 shinan 心易 shin.eki 真言 Shingon 新梓 shinshi

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神書 shinsho 初学 shogaku 書籍目録 Shojaku mokuroku 初蒙 shomô 抄物 shômono 修験道 shugendô 即時の占い sokuji no uranai 大成 taisei 集成 shûsei 鍛錬無ª人 tanren naki hito 天台 Tendai 天門八卦抄 Tenmon hakke-shô 頭注 tôchû 山伏 yamabushi

NOTES

1. Ng 2000 : 24 sqq. 2. Voir Barbier 2006, Burke 2000. 3. Il ne s’agit évidemment pas ici de dire que Kyôto n’existait pas en tant que ville avant le XVIIe siècle : la capitale, fondée à la fin du VIIIe siècle, fut toujours un centre culturel. Néanmoins, les profondes transformations de son paysage entamées par Toyotomi Hideyoshi 豊臣秀吉 (1537-1598) à la fin du XVIe contribuèrent largement à sa renaissance en tant que ville moderne prête à assumer un rôle décisif dans la production et la diffusion du savoir. Voir Fiévé (dir.) 2008. 4. Voir Butler 1996. 5. Voir Owada 小和田 1998. 6. Voir Hayek 2010. 7. Voir Kawase 川瀬 1948. 8. Le titre complet, Sangoku sôden onmyô kankatsu hoki naiden kin.u gyokuto-shū 三国相伝陰陽輨轄簠簋内伝金烏玉兎集, consiste en une succession d’éléments opposés reflétant la dualité yin/yang. À l’époque d’Edo, il était le plus souvent appelé Hoki. Attribué à Abe no Seimei 安倍晴明 (921-1005), devin fameux de l’époque de Heian, son véritable auteur est inconnu, et il existe plusieurs hypothèses quant à sa date de compilation, mais on considère d’ordinaire qu’il vit le jour au XIVe siècle. Voir Murayama 村山 1981, Nakamura 中村 2000, Suzuki 鈴木 2005, Taniguchi 谷口 2005. 9. Voir Faure 2005. 10. Voir Hayek 2011. 11. Les neufs astres lumineux 九曜星, issus de l’astrologie indienne, comprennent les deux luminaires (Soleil et Lune), les cinq planètes (Mars, Mercure, Jupiter, Vénus, Saturne), et deux planètes fictives, Ragô (sk. Rahu) 羅睺 et Keito (sk. Ketu) 計都, représentant les deux nodes lunaires (ascendant et descendant). Quant aux douze conduites 十二運, il s’agit de douze étapes d’un cycle des cinq agents selon les mois (branches terrestres), mises en correspondance avec les

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étapes de la vie humaine selon le tronc de la date de naissance. Nous avons ainsi Embryon, tai 胎, Nutrition, yô 養, Naissance et croissance, chôsei 長生, Purification, mokuyoku 沐浴, Maturité, kantai 冠帯, Entrée en fonction, rinkan 臨官, Règne, teiô 帝旺, Déliquescence, sui 衰, Maladie, byô 病, Mort, shi 死, Tombe, bo 墓, et Expiration/Formation du souffle, zetsu 絶. 12. Kimura 木村 2012 : 356-358. 13. Terajima 寺島 c1712 : vol. 5. 14. Nakamura 2000 : 292. 15. Naraba 奈良場 2010 : 197 sqq. 16. Voir Hayek 2010, Hayek 2012, Naraba 2010. 17. Anon. 1628 : dernier rabat. 18. Konta 今田 2009 : 28, Yayoshi 彌吉 1983. 19. Sur le Hoki-shô 簠簋抄 et ses spécificités, ainsi que sur ses relations avec le Hoki shûriden 簠簋 袖裡伝, voir Watanabe 渡辺 1988, et sa suite dans Mori 森 & Tamura 田村 (dir.) 1995 : 151-186. Voir également Fukazawa 深沢 (dir.) 2004 : vol. 3. 20. Naraba 2010, 28 sq, 177. 21. Oka 岡 et al. 2011 : 204. 22. Voir Wada 和田 2007, Yanagizawa 柳沢 2003. 23. Cela signifie en fait que le sens de décompte des trigrammes sur le diagramme circulaire dépend du sexe et du tronc de l’année de naissance de la cible. Pour les hommes nés une année yang et les femmes nées un année yin, on compte « dans l’ordre », c’est-à-dire dans le sens des aiguilles d’une montre. Pour les hommes yin et les femmes yang, on compte dans le sens inverse. 24. Il s’agit d’une règle intervenant lors du même décompte. Lorsqu’ils tombent sur certains chiffres, les trigrammes doivent être sautés ou au contraire être comptésdeux fois. 25. Anon. (s.d.) : f. final. 26. Voir notamment l’Onmyô zassho 陰陽雑書 (compilé à la fin du XIIe siècle avec des ajouts jusqu’au XVe siècle), dans Nakamura 2000 : 117 sq. 27. Yoshida 吉田 1656 : « introduction ». Voir Naraba 奈良場 2010 : 199 sq. La référence à l’« angoisse et au regret » est directement issue du Yi jing 易経. Dans la première partie du « Commentaire sur les formulations adjointes » (ch. Xi Ci Zuan 繋辞伝), il est en effet dit que « le regret (悔吝) est l’image (象) de l’angoisse (憂虞) ». 28. Il s’agit vraisemblablement de Kibi no Makibi 吉備真備 (695-775), ministre de l’époque de Nara ayant effectué un long séjour à la cour des Tang. 29. Anon. 1671 : vol. 1, f. 2 ro. 30. Koizumi 小泉 1688 : vol. 1, « Remarques préliminaires » (hanrei 凡例). 31. Okamura 岡村 1695 : vol. 4, f. 40 ro sq. 32. Okamura 1695 : vol. 1, f. 8 ro. 33. Il s’agit d’un jeu de langage : les caractères utilisés, 和解, habituellement lus wage, signifient littéralement « explication simplifiée », mais le premier caractère, yawaragu (adoucir, simplifier), sert également à désigner le Japon. 34. Baba 馬場 1697 : hanrei. 35. Baba 1697 : hanrei. 36. Baba 1713 : vol. 1, f. 4 ro. 37. Voir Hayek 2008, Naraba 2010. 38. Takahashi 高橋 1985 : 54. 39. Mannheim 1936 : 136 sq. 40. Voir Hayek 2011, Fukawa 布川 1992.

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RÉSUMÉS

Dans cet article, nous nous proposons d’étudier l’évolution des modes de diffusion des techniques divinatoires durant la première partie de l’époque d’Edo (1603-1868). Plus précisément, nous observerons comment, entre la fin du XVIe et le début du XVIIIe siècle, les connaissances mantiques, jusque-là transmises « secrètement » au sein de groupes restreints, en sont venues à être diffusées dans des manuels imprimés destinés à un public plus large. Nous verrons ainsi comment les premiers livres de divination sont apparus au début du XVIIe siècle en tant que substituts améliorés d’outils jusqu’alors manuscrits. Puis, nous tenterons de mettre en lumière le développement de commentaires, c’est-à-dire de véritables guides destinés à être utilisés conjointement avec lesdits outils. Enfin, nous observerons les transformations subies par les manuels à partir de la fin du XVIIe siècle, et comment ces changements ont été rendus possibles par l’émergence progressive d’auteurs/compilateurs s’affirmant comme diffuseurs et correcteurs du savoir. En retraçant l’évolution des manuels de divination, il s’agit avant tout pour nous de replacer les art mantiques au sein d’une dynamique plus globale, d’« exotérisation », compilation et ré- ordonnancement critique des savoirs qui caractérise ce que l’on pourrait qualifier d’humanisme japonais.

In this paper, I attempt to study how the diffusion of divination techniques evolved during the first part of the Edo period (1603-1868). More specifically, I will focus on the critical changes met by the ways such techniques were transmitted : from a “secret” transmission among selected circles to the production of printed manuals targeted at a broader audience. Thus, we will see how divination books first appeared at the beginning of the 17th century as a replacement or upgrade of already existing tools, which as yet used to circulate in manuscript form. Then, I will try to shed light on the development of commentaries and guides to be used along with the aforementioned tools. Finally, we will observe what kind of transformations manuals went through from the end of the 17th century, and how they relate to the emergence of a new literati class presenting itself claiming to provide a “corrected” knowledge to readers. The aim of this study is to situate mantic arts within a broader process of unveiling, compiling and reordering knowledge, which appears as a characteristic feature of what we may call “Japanese humanism”.

本稿では近世初期において占術知識の流布を検討する。具体的には占いのような専門技術 の伝播が 特定の専門家層の間の「秘伝」から、もっと広い読者相を対象にした指南書を媒 体にしてªたという過程を考察したい。 まずは、十七世紀初頭において従来写本の形でしようされたものに取って代わり、あるい は更新するという形で刊行された占い本の出現を検討し、そして十七世紀半ばから確認でª る「抄もの」的な指南書の生産と内容に注目する。最ýには、元禄期前ýに見られる占い本 の質的変化に焦点を当てて、その過程とより正確で便利な知識を読者に提供しようとする 中間的な知識人・著者層の誕生との関係を探る。 拙稿は今までほとんど研究されてこなかった占い本を通して、近世初期における知識の通 俗化・集成・訂正という、いわゆる「日本的なヒューマニズム」の形成に新たな視点から 照明を当てようとするものである。

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AUTEUR

MATTHIAS HAYEK Maître de conférences, université Paris-Diderot (Paris 7), CRCAO (UMR 8155). Il a publié notamment : - (2011). « The Eight Trigrams and Their Changes : An Inquiry into Japanese Early Modern Divination », Japanese Journal of Religious Studies, vol. 38, n° 2 : 329-368 ; - (2011). « Astrologia giapponese d’Antelmo Severini : de la réception de l’hémérologie dans le Japon pré-industriel ». In Sekiko Matsuzaki-Petitmengin, Cécile Sakai et Daniel Struve (dir.), Études Japonaises, textes et contextes, Commémoration du 50e anniversaire de la fondation de l’Institut des Hautes Études Japonaises du Collège de France. Paris, Collège de France, Institut des Hautes Études Japonaises : 27-43.

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Astrology and Hemerology in Traditional Vietnam Astrologie et hémérologie dans le Viêt-Nam traditionnel

Alexei Volkov

AUTHOR'S NOTE

The study of the Vietnamese treatises discussed in this paper was supported by the research grants 95-2411-H-007-037 (in 2006-2007) and 96-2411-H-007-004-MY3 (in 2007-2012) of the National Science Council (Taiwan), as well as by a grant from the Project “Multiculturalism in Monsoon Asia” (National Tsing-Hua University, Hsinchu, Taiwan) in 2008-2012. The author is grateful to two anonymous reviewers for helpful comments on the first draft of this paper.

Introduction: historical background

1 The northern part of present-day Vietnam formally became a province of the Chinese Han Empire in the late 2nd century BC, yet intellectual exchanges between this region and other parts of China had existed long before that time. When Vietnam ceased to be a Chinese province in the 10th century AD, the newly born Vietnamese state implemented a bureaucratic system similar to that of the Chinese Song dynasty (960-1279), including educational institutions and the examination system. Chinese cultural influence remained strong throughout subsequent Vietnamese dynasties, and became even stronger during and after the short-term Chinese occupation of Vietnam in 1407-1427. The French colonization that started with the Cochinchina campaign in 1858-1862 marked the beginning of a rapid decline of traditional Sino-Vietnamese scholarship, and the decisive coup de grâce was delivered by the abolishment of the state examination system in 1919.

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2 During the period that Vietnam was a full-fledged province of the Chinese empire (now often referred to by Vietnamese authors as the period of “Chinese domination”), local government used classical Chinese for official documents, education, and state examinations. The earliest documents (inscriptions on stone steles of the first millennium AD) contain none, or very few, of the “local” characters designed on the basis of Chinese script. After the separation of Vietnam from China in the 10th century, an increasing number of local characters appear in written documents. The local script designed on the basis of Chinese characters and used to record the Vietnamese language is known as Nôm 喃.1 Several times Vietnamese rulers made attempts to use Nôm as the language of official documentation and of scholarship instead of classical Chinese (Hán 漢), but classical Chinese remained more often used. Nowadays the term “Hán-Nôm 漢喃 books” is used to refer to the entire corpus of Vietnamese books written in classical Chinese or in Vietnamese (using Nôm characters), or in a mixture of both.2

3 In the late 19th century, the French colonial government systematically eradicated the traditional Hán-Nôm writing system partly naively misunderstood and partly intentionally interpreted by the proponents of French colonization as a sign of the political and cultural domination of China over Vietnam. The use of a phonetic writing system using Latin letters with diacritical signs designed by Catholic missionaries in the late 16th and early 17th century (nowadays, paradoxically, referred to in Vietnam as Quốc Ngữ 國語, “national language”) was originally suggested as a solution for problems arising from the difficulties experienced by functionaries of the French colonial administration when using Vietnamese. At the same time, it was perceived as a means to eradicate dependence on the Chinese-style education system and, ultimately, to replace it by modern French education.3 The Vietnamese anti-colonial movements gaining momentum in the early 20th century also championed the alphabetic script Quốc Ngữ as important for national liberation and for the rapid modernization of the country.4 Later, when instruction of and in French was interrupted (in the 1940s in the North) or reduced (in the South), the Quốc Ngữ script eventually became the only written language used by the Vietnamese ethnic majority group, Kinh (or Việt, nowadays constituting ca. 85% of the entire population). As a result, the literary heritage of more than ten centuries of the independent development of the nation was lost in just a few decades, and today only a few individuals are capable of reading old texts written in Hán-Nôm script. Moreover, during the wars that took place in Vietnam in the 20th century, the books preserved in the Imperial Library in Huế as well as in private collections were damaged, destroyed, or lost. As far as the books on divination are concerned, in 1948-49, 1956, 1968, and 1976 the Vietnamese government conducted several campaigns aiming at the eradication of “superstitions,” in particular divination, during which the tools and books used by professional diviners were confiscated.5 To conclude, in Vietnam in the past several decades a large number of books related to divination were lost, destroyed, or became unavailable to researchers.

Vietnamese astrology: secondary literature and primary sources

4 The history of divination practiced by the majority ethnic group Kinh has, to my knowledge, never been systematically discussed in publications in Western languages.6

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The first attempts to study and to describe Vietnamese literary sources as well as the actual practices of diviners were made by the French colonial scholars Gustave Dumoutier (1850-1904) and Georges Coulet (active in the 1920s).7 An introduction to Vietnamese civilization written for a general audience by Nguyen Van Huyen very briefly mentions several kinds of divination, in particular those related to mediumistic practices.8 Huard and Durand (1954) present an outline of Vietnamese divination (in this case apparently referring to the divination of the Kinh, since the authors never mention any minority groups); they list geomancy, astrology, “sorcery,” physiognomy, and “zoochiromancy” as the most widely practiced forms of divination.9 The Chinese origin of the Vietnamese tradition of divination is not discussed by Huard and Durand, but they do mention the astrological treatise Zi wei dou shu quan shu (Vietnamese Tử vi đẩu số toàn thư) 紫微斗數全書 by the Chinese author Chen Tuan 陳摶 (also known as Chen Xiyi 陳希夷, 871-989) as the most popular divination manual in Vietnam.10

5 The extant treatises on divination can be found listed in two standard catalogues of Hán-Nôm books. One of them is a bilingual (Vietnamese and French) catalogue by Trần Nghĩa and François Gros (1993), and the other is a catalogue compiled (in Chinese) by Liu Chun-Yin 劉春銀, Wang Xiaodun 王小盾 and Trần Nghĩa 陳義 (Liu et al. 2002). The catalogue Trần and Gros (1993) contains 5,038 bibliographical entries listing the holdings of the library of the Institute of Hán-Nôm Studies (Hanoi), the libraries of the École française d’Extrême-Orient (hereafter EFEO) and the Société Asiatique (both in Paris), as well as some Vietnamese and Japanese libraries. Each entry of the catalogue includes short annotations in Vietnamese and in French; the titles of the books are listed in alphabetical order according to the transliteration system Quốc ngữ. To identify books on divination, one can use an index provided at the end of the catalogue. The books on astrology are found in the subsection Tín ngưỡng dân gian (Traditional beliefs) which contains references to books belonging to a wide variety of disciplines, from “anthropology” and “religion” to “literature.” This classification system makes it difficult to identify books related specifically to astrology. The catalogue of Liu et al. (2002) is based on the catalogue Trần and Gros (1993), but the bibliographical entries in it are reorganized according to the traditional Chinese system of “four categories” (“canonical books” 經, “historical compilations” 史, “philosophical schools” 子, and “literary collections” 集). Books on divination are found in the section “numerology” (shushu 數術) of the category “philosophical schools” and are subdivided into five categories: geomancy (kanyu 堪輿), astrology ( xingming 星命), divination based on hexagrams of the Yijing (Yigua 易卦), physiognomy and [related (?)] miscellaneous types of divination (xiangfa zazhan 相法雜占), and “tallies and omens” (qianchen 籤讖). However, a cursory inspection of the section bingjia 兵家 (Military arts) of Liu et al. (2002) shows that it also contains books whose descriptions suggest that they may feature methods of divination related to military . Similarly, the books devoted to the Yijing in the category of “canonical books” 經 and some medical treatises contain descriptions of mantic procedures or discussions of the philosophical and theoretical foundations of divination.

6 Both catalogues Trần and Gros (1993) and Liu et al. (2002) do not list the books preserved in several large collections holding texts on astrology.11 There is also reason to believe that a number of Hán-Nôm books on astrology from the Imperial library in Hue are still extant; unfortunately, they are preserved in private collections and

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therefore remain unavailable for systematic study. The overview of the primary materials presented in this paper will thus necessarily be incomplete.

Vietnamese astronomical and astrological facilities: an overview

7 According to the [Đại] Việt sử lược [大]越史略 (An abridgement of the history of the [Great state of] Viet) that covers the period from the 2nd century BC to the year 1225 and is considered by some historians the oldest extant Vietnamese chronicle,12 the Vietnamese rulers started building astronomical/astrological facilities in the capital Thăng Long 昇龍 (i.e. modern Hanoi) as early as 1029, when the second Emperor of the (Later) Lý Dynasty (ý)李朝 (1009-1225), Thái Tông 太宗 (personal name Lý Phật Mã 李 佛瑪, r. 1028-1054), ordered to rebuild the palace Càn Nguyên Điện 乾元殿 after the earthquake of 1017;13 the newly built facilities included the Pavilion of Paying Tribute to Heaven (Phụng Thiên Điện 奉天殿) on the top of which was placed a Noon Tower (Chính Dương Lâu 正陽樓) with a clepsydra clock inside.14 It appears quite probable that astronomical and astrological observations at the courts of the Vietnamese rulers may have started even earlier, in the late 10th century, almost immediately after Vietnam gained its independence from China. The moment in time when the first observations were conducted can be approximately calculated on the basis of the records of solar eclipses (see below).

8 In 1206 this astronomical facility was damaged by fire, and it was restored only some time later15 which, theoretically, may be the reason why the Vietnamese chronicles [Đại ] Việt sử lược and Đại Việt sử ký toàn thư 大越史記全書 (Complete Annals of the great [state of] Việt) do not contain records of the eclipses that occurred between 1206 and 1242.16 Two facilities most likely related to astronomical and astrological activities are depicted as located near the Palace in a 17th century copy of the atlas Hồng Đức Bản Đồ 洪德版圖 (Maps [of Vietnam] printed [in the era] “Overwhelming virtue”) of 1490 (Fig. 1),17 they are the “Office of Paying Tribute to Heaven” (Phụng Thiên Phủ 奉天府) and the “Directorate of Heavenly Affairs” (Ti Thiên Giám 司天監, Chinese Si jian).18

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Fig. 1. The map of Hanoi from the Hồng Đức Bản Đồ 洪德版圖 (the West is at the top) showing the locations of the “Directorate of Heavenly Affairs” Ti Thiên Giám 司天監 (A), the “Office of Paying Tribute to Heaven” Phụng Thiên Phủ 奉天府 (B), and the “Directorate of Education” Quốc tử giám 國子 監 (C).

9 Even though the name of the “Office of Paying Tribute to Heaven” mentions Heaven and is conspicuously similar to that of the “Pavilion of Paying Tribute to Heaven” (Phụng Thiên Điện 奉天殿) of the (Later) Lý Dynasty, I am currently not aware of any evidence suggesting that the functions of the Office involved time-keeping or other activities related to astronomical observations. The “Directorate of Heavenly Affairs” is depicted on the map as located to the South of the Imperial Palace between the “Office of Paying Tribute to Heaven” and the “Directorate of Education” (Quốc tử giám 國子監, Chinese Guo zi jian), the higher education authority. The name of the former institution, Ti Thiên Giám司天監, is identical with that of its Chinese counterpart; in China it was given to the Astronomical/Astrological Bureau for the first time in the 10th century and used almost systematically during the Yuan (starting from the 1260s), the Ming, and (unofficially) the Qing dynasties.19 The exact time of establishment of the Vietnamese “Directorate of Heavenly Affairs” is not known.

10 It remains unknown whether the original “Directorate of Heavenly Affairs” of the early 11th century was built in the location shown on the map. It was most likely shut down during the Chinese occupation of 1407-1427, because it would otherwise have challenged the exclusive right of the Chinese official astrologers to conduct and interpret astronomical observations. One can conjecture that the institution was re- opened soon after the retreat of Chinese army, and remained functional throughout the 17th century, when the copy shown in Fig. 1 was produced.

11 Equally unknown is how exactly the personnel of the astronomical/astrological service was trained, yet it would be reasonable to conjecture that the Vietnamese authorities established a special educational program to train future astronomers and astrologers, as was the case in China. The Directorate would thus have been responsible for

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conducting observations, interpreting astronomical and meteorological data, performing computations of the calendar, predicting eclipses, and training future employees. Most likely this institution had a specialized library holding books on astronomy and astrology that were not supposed to circulate outside of the office. An indirect piece of evidence supporting this assumption is found in the Chinese collection of statutes Song hui yao 宋會要: in a record dated 1107 it is mentioned that the Vietnamese envoys to China made attempts to obtain books on various disciplines, and that they were given permission to purchase all texts except those deemed “forbidden,” that is, related to divination, yin-yang, the calendar, and numerology; this very mention seems to suggest that the envoys were especially interested in books on these topics.20 Attempts to obtain texts related to calendars (and, most likely, astrology) continued through the early 14th century.21

12 The curriculum of the Chinese School of Computations (Suan xue 算學) of the early 12th century included a number of subjects directly related to the calendar and to astrology, in particular to the so-called “three schemes” or “three cosmic boards” san shi 三式, that is the three major methods of divination (see below), as well as other unidentified astrological texts.22 If astronomical and astrological texts were included in the curriculum of the discipline referred to as “counting” 算 (Vietnamese toán, Chinese suan) in Vietnam, then the state examinations on “counting” mentioned in historical documents may have included parts related to calendrical and astrological computation, as was the case in China during the Song dynasty.23 There exist records of state examinations on “counting” held in Vietnam in 1077,24 1261,25 1363,26 1404,27 1477, 28 1507,29 and 1762.30

13 Descriptions of the activities of the professional astronomers and astrologers employed by the Vietnamese authorities can be found in the memoirs of the Italian Jesuits Christophoro Borri (1583-1632) and Giovanni Filippo de Marini (1608-1682), who visited Cochinchina (Central Vietnam) and Tonkin (Northern Vietnam), respectively. Borri’s description shows that not only the King of Cochinchina, but also the princes, had their own astrologers whose work included calculation of solar eclipses; de Marini describes a special ritual that was supposed to be conducted by the ruler on the day of the solar eclipse.31 These descriptions suggest that by the 17th century the Vietnamese astronomers enjoyed a rather high official status, that they used Chinese methods of prediction of eclipses, and that they sometimes could not correctly adjust these methods to the locations (i.e. northern and central Vietnam) where the eclipses were supposed to be observed.

14 An official institution responsible for astronomical affairs and the calendar continued to exist in Vietnam until the 20th century. A description (dating to 1930) of the astronomical/astrological office Khâm Thiên Giám 欽天監, the successor of the Ti Thiên Giám 司天監, 32 describes the structure and personnel of the astronomical/astrological office located in Hue, the capital of the Nguyễn dynasty (1802-1945), and briefly relates its history, beginning from the era of the Emperor Minh Mang (r. 1820-1841).33

Astronomical observations conducted in Vietnam

15 Ho Peng Yoke in his paper (1964) provided a list of the solar eclipses mentioned in the Đại Việt sử ký toàn thư 大越史記全書 (Complete Annals of the Great [State of] Việt) as observed in Vietnam. Ho’s analysis demonstrated that “much of the earlier materials of

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the Đại Việt sử ký toàn thư were taken from Chinese sources, including their misprints” (p. 128). The records of eclipses in the Annals are not distributed homogenously: there are 21 eclipses for the period from 205 BC to 122 BC, one eclipse for each of the years AD 41, 479, and 547,34 and then a series of 45 eclipses for the period from AD 993 to 1671. The records concerning the eclipses from 205 BC to AD 547 were, as Ho suggests, copied from Chinese sources. One is thus tempted to suggest that the beginning of a (relatively) systematic observation of solar eclipses in Vietnam may have coincided with the establishment of an astronomical/astrological service in the capital.35 The above-mentioned [Đại] Việt sử lược [大]越史略 (An Abridgement of the History of the [Great state of] Viet) also contains records of solar eclipses, yet these records are not identical with those listed in the Đại Việt sử ký toàn thư. More specifically, [Đại] Việt sử lược contains records of only five solar eclipses, of which the earliest is dated February 15th 1040;36 this eclipse, actually visible in Vietnam, is also listed in the Đại Việt sử ký toàn thư.37 Interestingly enough, the four remaining eclipses recorded in the [Đại] Việt sử lược are not found in the Đại Việt sử ký toàn thư. Only one of them, the eclipse of March 11th 1206, corresponds to an eclipse that actually happened (even though most likely it was not visible in Vietnam);38 two out of the remaining three eclipses occurred in years slightly different from those indicated in the [Đại] Việt sử lược,39 while one record does not correspond to any actual eclipse that might have happened either earlier or later, unless both the month and the year of the eclipse were changed considerably by the compilers of the history or by later copyists.40

Astrological treatises: introductory remarks

16 Astrological treatises preserved in collections of Vietnamese books written in Hán and Nôm are listed in the bibliography found at the end of this paper; the reader can see that in the majority of cases one deals with undated manuscript copies of uncertain origin. The printed books usually bear the dates of publication, and these dates are comparatively recent, from the late 19th to the early 20th century. These late dates of print do not necessarily correspond to the actual time of compilation; however, without substantial evidence to the contrary, it seems reasonable to suggest that most of the extant Vietnamese materials on astrology were physically produced relatively late, even though, hypothetically, they might have been based on earlier sources. This statement does not deny that historically much earlier astrological literature may well have existed in Vietnam. There are two reasons to claim so: firstly, the official institutions dealing with astronomical and astrological matters established in independent Vietnam in the early 11th century must have possessed a number of texts pertaining to their activities; secondly, there are mentions of influential astrological works compiled by Vietnamese scholars which are no longer extant. For example, it is known that Trần Nguyên Đán 陳元旦 (1325-1390), a high-level advisor to the Vietnamese Emperor, compiled the treatise Bách thế thông kỷ thư 百世通紀書 (Scripture of the comprehensive chronicles of a hundred generations); this treatise was lost, but, according to a description found in a slightly later text, it contained a reconstruction of Chinese (?) chronology and a (retrospective?) calculation of eclipses.41

17 According to the conventional accounts, a large number of the books in Vietnamese governmental libraries were lost to fire or taken by the Chinese invaders in the late 14th – early 15th centuries. If, according to legends, the fire that occurred during the

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sack of the capital by the Chams in 1371 indiscriminately destroyed a number of unspecified libraries, the Chinese invaders who allegedly seized a large number of books and transported them to China most probably especially targeted texts seen as symbolically affirming the independence of the Vietnamese state, that is, first of all, local chronicles, calendars, astronomical and astrological texts.42

18 The search for Vietnamese materials related to astrology is also complicated by the composite structure of the extant documents; a number of the manuscript books preserved in libraries are collections of texts of different natures that may contain sections copied from astrological books. Several astrological treatises catalogued in Trần and Gros 1992 and Liu et al. 2002 contain appendices that sometimes consist of minor astrological texts with different titles often unrelated to each other and to the principal treatises (for examples, see below). Moreover, even when the title of a treatise coincides with that of a well-known Chinese astrological text, it may well be an abridgement or a variation on the theme of the Chinese prototype, or an edition with commentaries in Classical Chinese or in Nôm added by Vietnamese authors. This is why the list of primary astrological sources found in the bibliography below cannot be considered complete; nevertheless, it allows us to see, at least to a certain extent, which types of astrological texts were most frequently reproduced and commented upon.

19 In the next section I will briefly discuss the extant sources. The discussion is subdivided into two parts: firstly, I will introduce the three major systems of Chinese astrology and briefly present the extant Vietnamese treatises apparently influenced by them; secondly, I will, equally briefly, discuss the structure of a Vietnamese treatise based on a Chinese prototype.

Three traditions of Chinese medieval astrology and their reception in Vietnam

20 The three most influential traditions of Chinese astrology, represented in the curriculum of the Song dynasty School of Computation as the “three [astrological] schemes” or the “three cosmic boards” (san shi 三式), were the divinatory systems Tai yi 太乙, Qimen dunjia 奇門遁甲, and Liu ren六壬.43

21 (1) The Tai yi system. In China, this system was adopted by the Astrological Bureau during the Tang dynasty (618-907) and was used through the Song dynasty (960-1279).44 Yan Dunjie 嚴敦杰 (1917-1988) discovered that the divination techniques of this tradition already existed in the early 6th century AD.45 The foundational text of this tradition was the Taiyi jinjing shijing 太乙金鏡式經 (Golden Mirror Manual for the Tai yi Cosmic Board) by Wang Ximing 王希明 (Tang dynasty), preserved (probably with later additions) in the 18th century Chinese collection Si ku quan shu 四庫全書. The divinatory procedure involved manipulation with a divinatory board (or, possibly, a diagram) which featured a central circle and four concentric circular layers subdivided into 16 sectors each. The first layer was filled with numbers from 1 to 4 and from 6 to 9, forming, together with the number 5 in the central circle, a magic square; the first circular layer also contained 8 trigrams and some cyclical signs. The next layer contained names of “divine agents,” and the third layer, names of Chinese provinces.46 The last layer was empty and was supposed to be filled during the process of divination. As Ho suggests, the applications of this method were mainly related to military affairs,

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yet there were also cases when the divination was concerned with natural phenomena, such as earthquakes, thunderstorms, and even eclipses.47

22 Among the extant Vietnamese texts there are two treatises directly related to this tradition: the Thái Ất Dị Giản Lục 太乙易簡錄 (Brief record [concerning divination according to the method] Tai Yi and [to the Book of] Changes) [A38] and the Thái Ất Thống Tông Bảo Giám 太乙統宗寶鑑 (Precious mirror of Unified Origins of the [methods of] Tai Yi) [A39]. The former treatise is credited to the authorship of the famous literatus Lê Quý Đôn 黎貴惇 (1726-1784). According to the biography of Lê Quý Đôn authored by Nguyễn Hữu Tạo 阮有造 (who obtained the doctoral degree Tiến Sĩ 進士, Chinese jinshi, in 1844), Lê wrote three more astrological treatises, one of which, namely the Thái Ất Quái Vận 太乙卦運 (Circulation of Tai Yi [among] the trigrams), now lost, was apparently related to the same system of divination.48 As for the treatise Thái Ất Thống Tông Bảo Giám 太乙統宗寶鑑, it is possible that this book is a copy or an abridgement of the Chinese treatise (reproduced in the Si ku quan shu 四庫全書) of the same title by an obscure author of the Yuan dynasty (1279-1368), known under the pseudonym “Old Man from the Xiao Mountains” (Xiao shan lao ren 曉山老人). Several Chinese editions of this Chinese treatise exist, the earliest is a Ming dynasty manuscript and there are several editions dating from the Qing dynasty.

23 In China, the Tai yi system was preserved within the so-called tradition of “Numerical divination of Purple Rose and Dipper” (Ziwei doushu 紫微[= 薇]斗數).49 Ho Peng Yoke claimed that there were two branches of the latter tradition: one of them was a direct continuation of the Tai yi system, while the other, represented by a version of the treatise found in the Daoist Canon (Daozang 道藏), resulted from a synthesis of several astrological systems of Western origin.50 There exist seven Vietnamese texts belonging to this tradition: An tử vi quốc ngữ ca 安紫微國語歌 [A1], Tử Vi Đẩu Số 紫微斗數 [A47], Tử Vi Đẩu Số Giải Âm 紫微斗數解音 [A48], Tử Vi Giải 紫微解 [A49], Tử Vi Hà Lạc Nhâm Thìn Số 紫微河洛壬辰數 [A50], Tử Vi Số 紫微數 [A51], and Tử Vi Thập Nhị Cung Đoán Pháp Quốc Âm Ca 紫微十二宮斷法國音歌 [A52]. Four out of these seven treatises, namely, [A1, A47, A48, A52] are written in Nôm or contain commentaries in Nôm and were apparently intended for those readers who were not comfortable with classical Chinese.

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Fig. 2. A horoscope from the Tử Vi Đẩu Số 紫微斗數 (Institute of Han-Nom Studies, call number VHb. 163).

24 There exist 10 manuscript copies of [A47] (a horoscope from it is shown in Fig. 2); this large number of copies suggests that the treatise was rather popular among practitioners. Meanwhile, two of the seven texts, [A49] and [A50], are handwritten copies of unidentified Chinese printed originals. Unfortunately, none of these manuscript texts is dated. The titles of the treatises might seem to suggest that they were entirely devoted to only one system of divination; however, this is not necessarily the case: for example, the text [A1] contains an independent treatise Mã tiền bốc pháp 馬 前卜法 [A24] as its last section.

25 (2) The Qimen dunjia system. Early mentions of the methods Qimen 奇門 and Dunjia 遁 甲 can be found in the treatise Baopuzi 抱樸子authored by the famous Chinese scholar Ge Hong 葛洪 (283-343). A number of books apparently related to the Dunjia tradition are mentioned in the bibliographic chapters of the standard Chinese histories Hou Han shu ý漢書, Sui shu 隋書, Jiu Tang shu 舊唐書 and Xin Tang shu 新唐書, but none of these books is now extant. A text titled Huangting Dunjia yuan shen jing 黃庭遁甲緣身經 is found in juan 14 of the Daoist collection Yun ji qi qian 雲笈七籤 (Seven Tablets from Cloudy Book Depository) edited in the early 11th century and preserved in the Daozang; however, the system described there was not one of the “three cosmic boards” used for instruction in the Song dynasty “School of Computations.”51 It appears that originally Qimen and Dunjia referred to two different systems that were combined by the 8th century at the latest.

26 This tradition was apparently not very popular in Vietnam; I was able to locate only two manuscripts related to it, the Độn Giáp Kì Môn 遁甲奇門 [A13] and Tam Kì Bát Môn Độn Pháp 三奇八門遁法 [A36]. Both are compiled in classical Chinese by anonymous authors; the dates of their compilation are unknown. The former manuscript contains

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an appendix titled Chiêm Tinh Bốc Pháp 占星卜法 (Methods of divination on the basis of asterisms). However, it appears that a number of extant treatises preserved elements of the Qimen dunjia system combined with the third of the “cosmic boards” traditions, the Liu ren.

27 (3) The Liu ren system. The origin of the third Chinese “cosmic board” system of divination, Liu ren 六壬 (Vietnamese Lục Nhâm), goes back to the period antedating the Han dynasty (206 BC-AD 220), even though the first complete description of the method dates to the Tang dynasty (618-907).52 A detailed discussion of the method provided by the polymath Shen Gua 沈括 (or Shen Kuo, 1031-1095) in his Mengxi bitan 夢溪筆談 shows how much the system of Liu ren was interrelated with the calendar. 53 In the process of divination a duodenary circular table (cosmic board) was supposed to be used; it could be substituted by the diviner’s palm, which made the system more “portable,” if compared with the two other systems.54

28 This tradition apparently enjoyed great popularity in Vietnam; I was able to locate the following treatises: Đại Lục Nhâm Đại Toàn 大六壬大全 [A11], Lục Nhâm 六壬 [A17], Lục Nhâm Đại Độn 六壬大遁 [A18, A19], Lục Nhâm Đại Độn Pháp 六壬大遁法 [A20], Lục Nhâm Kinh Vĩ Lược 六壬經緯略 [A21], Lục Nhâm Quốc Ngữ 六壬國語 [A22], Lục Nhâm Tiện Lãm 六壬便覽 [A23], and Tân San Lục Nhâm Đại Độn Bí Truyền 新刊六壬大遁祕傳 [A35].55 The first of these texts [A11] is an adaptation of chapters (juan 卷) 4 and 5 of the Chinese treatise Liu ren da quan 六壬大全 (Great Compendium of the [works on the] Liu ren [method]) by the Chinese author of the Ming dynasty Guo Zailai 郭載騋 (dates unknown; active in the early 17th century); one of the extant copies also includes chapters (juan) 118 and 119 of the Chinese treatise Wubei zhi 武備志 (Records on Military Provisions, 1621) by Mao Yuanyi 茅元儀 (1594-1640). Manuscript [A19] contains two appendices titled Lục Nhâm Khởi Lệ 六壬起例 (Examples for initiation in the Liu ren method) and Ngọc Trướng Đàm Binh Ca 玉帳談兵歌 (Stanzas discussing military [applications] of the Jade Canopy) explaining in Nôm the Lục Nhâm (that is, Liu ren 六壬) system of divination; these appendices are credited to the authorship of the famous literatus and high level governmental officer Phùng Khắc Khoan 馮克寬 (1528-1613) who was sent as ambassador to China in 1597 and returned in 1599.56 According to some sources, Phùng Khắc Khoan translated the Yijing into Vietnamese (that is, Nôm);57 this fact may be used to confirm his expertise in mantic literature as well as his interest in the translation of Chinese texts into Vietnamese, even though one cannot entirely rule out the possibility that the authorship of Phùng, the famous literatus and ambassador to China, was assigned to anonymous astrological texts only later to increase their importance. A text titled Binh gia yếu chỉ 兵家要旨 (Chinese: Bing jia yao zhi) (Essential indications for militaries), devoted to applications of divination for military purposes and supposedly authored by Phùng, is appended to the treatise [A22], while a short treatise titled Thiên Vận Bí Thư 天運秘書 (Chinese Tian yun bi shu), Secret scripture on heavenly cycles, featuring connections between meteorological phenomena and calendars, and also credited to Phùng’s authorship, is appended to the treatise Xin lüe tian shu 心略天樞 written by the famous Chinese scholar and astrologer Liu Bowen 劉伯溫 (Liu Ji 劉基, 1311-1375).58

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Processing Chinese texts: the example of the Ngọc Hạp Kí 玉匣記

29 In this section I would like to demonstrate the complexity of the process of compilation of Vietnamese astrological texts on the basis of their Chinese prototypes. Let us consider the case of a group of treatises related to the tradition of the Chinese astrological compendium Yu xia ji 玉匣記 (Records from the Jade Chest). The titles of a number of Vietnamese texts contain the term Ngọc Hạp 玉匣 (Jade Chest), namely, the Ngọc Hạp 玉匣 [A25], Ngọc Hạp Toản Yếu 玉匣纂要 [A26], Ngọc Hạp toản yếu thông dụng 玉 匣攢要通用 [A27], Tăng Bổ Tuyển Trạch Thông Thư Quảng Ngọc Hạp Kí 增補選擇通書廣玉 匣記 [A37], and Thông Thư Quảng Ngọc Hạp Kí 通書廣玉匣記 [A44]. This tradition was apparently quite popular: the Library of the Institute of Hán-Nôm Studies holds 10 printed copies of [A25], one of them dated to 1876 and one to 1923; the treatises [A27], [A37] and [A44] were also printed. The authors of the catalogs Trần and Gros 1993 and Liu 2002 agree that these texts reproduce a Chinese original and credit the authorship of them to the Daoist immortal “Perfected Lord Xu” (許真君), that is, Xu Xun 許遜 (239-292/374?).59 The text of the Daozang entitled Xu zhen jun yu xia ji 許真君玉匣記 (Records from the Jade Chest of the Perfected Lord Xu) with a preface of 1433 [YXJ], is, indeed, explicitly credited to his authorship.60 Was Xu Xun, famous mainly as a dragon- slayer and a pious son, also an expert in astrology?61 The question is probably not as relevant to the topic of this section as the following one: Was this text from the Daozang indeed reproduced in the above-mentioned Vietnamese treatises? A cursory analysis shows that the answer is in the affirmative, but the situation is far from being simple. The original text found in the Daozang under the title 玉匣記 (Records from the Jade Chest) technically contains three parts: (A) the text titled Zhu shen sheng dan jie ri qi 諸神聖誕令節日期 dating to the mid-15th century; (B) the above-mentioned Xu zhen jun yu xia ji 許真君玉匣記 [YXJ]; and (C) the Fa shi xuan ze ji 法師選擇記 (Records on the choices [of auspicious days] by Masters of Dharma) [XZJ]. The relatively short initial section of part (C), hereafter C1 [XZJ: 325-326], dates to AD 627 and is followed by a very long “Postscript” (C2) [XZJ: 327-346] dating to 1488 and consisting of a large number of relatively short astrological texts. If we now look at the Vietnamese treatise Ngọc Hạp toản yếu thông dụng 玉匣攢要通用 [A27], we can see that part (A) is entirely omitted, a large portion of (B) is reproduced in the opening section of the Vietnamese treatise (pp. 2b-6b), and part (C1) is reproduced immediately after it (pp. 6b-9b); then follows a long section entitled (in Chinese) “Zhan san shi er gua ding ji xiong” 占三十二掛定吉凶 (Divination [using] 32 hexagrams to determine good and bad luck, pp. 9b-19b) not found in the Daozang edition. Only after that is the section entitled (in Chinese) “Jin fu jing” 金符經 (Treatise on the Golden Talisman, pp. 19b-25a) reproduced from the Daozang text [XZJ: 331-334]. It is interesting that in the Daozang the subtitle of this section is missing (p. 331), and the fact that the compilers of the Vietnamese edition correctly identified the location of the title in their edition of the text strongly suggests that they had at their disposal a version of the treatise that was not based on the Daozang edition. How and when this alternative version of the treatise reached the Vietnamese diviners will probably remain unknown.

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Conclusions

30 To study the history of the Vietnamese astrological tradition, several approaches appear equally plausible. An investigation of the extant written sources provided in the present paper is only one of them; another plausible methodology would be a study of the written reports of the Western missionaries active in Vietnam since the early 17th century, as well as of those by Western and Chinese travelers and merchants. For a study of the present-day situation, the results of recent anthropological field studies could be used. Each approach has its weak points. Numerous ancient documents are lost, and it is unknown to what extent the extant Hán-Nôm treatises represent the corpus of astrological works that circulated among Vietnamese astrologers from the 10th to the early 20th century; it is equally unknown how much the actual divinatory practices of those astrologers corresponded to written texts. If one studies the reports of missionaries, merchants and travelers, the rare mentions of indigenous practices of divination make it clear that their study was not central to the scholarly agenda of the missionaries and explorers, and, moreover, the rationale of divinatory practices as well as the relevant documents were never disclosed to them by the Vietnamese diviners. As for modern anthropologists, even those of them who have attempted to take a closer look at the actual practices of diviners nowadays were, in a large number of cases, not familiar with the historical antecedents of the phenomena they observed, in particular with the divinatory texts in Hán-Nôm.

31 In this paper I briefly described the institutional setting of the first centuries of the independent state-sponsored Vietnamese astrological tradition, and provided the results of a cursory inspection of a small part of the extant astrological materials. All the discussed materials turned out to be either copies of Chinese texts (sometimes altered or abridged) or works based upon Chinese prototypes. The history of their transmission to Vietnam is obscure; the majority of the extant Vietnamese texts are not dated, and those dated were produced (usually, printed) relatively late. Very often the authorship of the texts is unknown; in some cases, the dates of life of the putative authors suggest that the transmission may have taken place rather early, as in the case of the treatises credited to the authorship of Phùng Khắc Khoan 馮克寬, yet there is always a possibility that the name of the presumed author, usually a famous scholar or a high-level functionary, was associated with an anonymous text only after the scholar’s lifetime. However, as the history of astrological institutions demonstrates, astrology certainly started being practiced for the purposes of the Vietnamese state as early as the 11th century; unfortunately, it remains unknown how and when the earlier Chinese astrological texts found their way to the breakaway province after the 10th century, and what they were exactly. In the modern libraries holding collections of Hán-Nôm books all the astrological texts are put together, which might appear to suggest that astrology was a discipline practiced by just one group of experts; however, one can argue that the transmission of astrological texts and expertise went from China to Vietnam through a number of channels, and, on both sides, the social groups involved in this process ranged from the imperial astrologers to countryside fortune- tellers.

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BIBLIOGRAPHY

I. Primary sources

A. Extant Vietnamese astrological treatises

[The texts in this section are ordered alphabetically according to the Vietnamese readings of their titles. For each text I provide the Vietnamese reading of its title, its original title in Hán- Nôm, its Chinese reading (in pinyin), and a tentative translation (which in some cases may not be fully satisfactory). Each text has a reference number used in the body of this paper; for example, A35 refers to the text listed in this section under number 35. The dates of compilation and production, the name of the author(s) are mentioned in the cases when they are known; if they are not provided, it means that they remain unknown to me. For each text, references are provided to the catalogues Trần and Gros 1993 (starting with the letters TG) and Liu et al. 2002 (starting with the letter L); in the cases when a text is found in the National Library of Vietnam, I provide the call number from the catalogue of this library starting with the letters BNV.]

1. An tử vi quốc ngữ ca 安紫微國語歌 (An Zi wei guo yu ge). (Explanations of the [numerical divination on] Purple Rose [and Northern Dipper] in poems [written in] national language [= Nôm]). BNV R.293.

2. Bốc Phệ Chính Tông 卜筮正宗 (Bu shi zheng zong) (Orthodox origin of the [methods of divination] bu and shi). 1848-1859. By Master Cổ La (Chinese: Gu Luo) 古羅先生 (dates unknown). TG 277; L 2470.

3. Chiêm Bốc Tạp Nghiệm 占卜雜驗 (Zhan bu za yan) (Miscellaneous practices of divination). TG 440; L 2491.

4. Chiêm Luận Sự Niên Nguyệt Nhật Thì Tích 占論事年月日辰跡 (Zhan lun shi nian yue ri chen ji) (Divination on the basis of the years, months, days, and constellations [= hours] [of birth]). TG 442; L 2492.

5. Chiêm Nhật Nguyệt Cát Hung Đồ 占日月吉凶圖 (Zhan ri yue ji xiong tu) (Diagrams for divination concerning good luck and bad luck [on the basis] of days and months). TG 443; L 2484.

6. Chiêm Phu Thê Giá Thú Hợp Hôn Cát Hung Số 占夫妻嫁娶合婚吉凶數 (Zhan fu qi jia qu he hun ji xiong shu) (Divination on good luck and bad luck of marriages). TG 444; L 2493.

7. Chiêm Thiên Văn Chư Loại Đẳng Tinh Cát Hung Đồ 占天文諸類等星吉凶圖 (Zhan tianwen zhu lei deng xing jixiong tu) (Diagrams for divination on celestial figures, all classes and ranks of celestial bodies, concerning good luck and bad luck). TG 447; L 2485.

8. Chiêm Thiên Văn Loại 占天文類 (Zhan tian wen lei) (Categories of divination on celestial patterns). TG 448; L 2486.

9. Chiêm Thiên Văn Thư 占天文書 (Zhan tian wen shu) (Scripture on divination on celestial patterns). TG 449; L 2487.

10. Cửu Thiên Huyền Nữ Toán Pháp 九天玄女算法 (Jiu tian xuan nü suan fa) (Counting methods of the Obscure Maiden of Nine Heavens). TG 640; L 2471.

11. Đại Lục Nhâm Đại Toàn 大六壬大全 (Da Liuren daquan) (Great compendium of the great Six [signs] ren). Alternative title: Đại Lục Nhâm Đại Toàn 大六壬大遁 (Da Liuren dadun) ([Methods] of

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Great Evasion and of the great Six [signs] ren). By Guo Zailai 郭載騋 of the Ming dynasty. TG 823; L 2472.

12. Diệu Tiên Kinh 曜仙經 (Yao jing) (Hemerological treatise of [Daoist] immortals (?)). TG 736; L 2504.

13. Độn Giáp Kì Môn 遁甲奇門 (Dun jia qi men) ([Methods] of dunjia and qimen).62 TG 1094; L 2500.

14. Khâm Định Hiệp Kỉ Biện Phương 欽定協紀辨方 (Qin ding xie ji bian fang) ([Scripture on] unifying eras and separating positions, approved by the Emperor). Alternative titles: Hiệp Biện協辨 (Xie bian) (Unification and separation); Tạp Chiêm 雜占 (Za zhan) (Miscellaneous [methods of] divination). TG 1652; L 2498.

15. Linh Văn Thắng Lãm Kinh Tổng Luận 靈文勝覽經總論 (Ling wen sheng lan jing zong lun) (Integral discussion [based upon] inspection of treatises in “script of spirits”). TG 2010; L 2506.

16. Lục Giáp Toàn Thư 六甲全書 (Liu jia quan shu) (Complete scripture concerning the [method of] Six [signs] jia). TG 2075; L 2507.

17. Lục Nhâm 六壬 (Liu ren) (Six [signs] ren). TG 2077; L 2476.

18. Lục Nhâm Đại Độn 六壬大遁 (Liu ren da dun) ([The methods of] Six [signs] ren and of Great Evasion). TG 2078; L 2508.

19. Lục Nhâm Đại Độn 六壬大遁 (Liu ren da dun) ([The methods of] Six [signs] ren and of Great Evasion). TG 2079; L 2477.

20. Lục Nhâm Đại Độn Pháp 六壬大遁法 (Liu ren da dun fa) (The methods of Six [signs] ren and of Great Evasion). TG 2080; L 2478.

21. Lục Nhâm Kinh Vĩ Lược 六壬經緯略 (Liu ren jing wei lüe) (Abridgement of the Canon and Apocrypha on the Six [signs] ren). TG 2082; L 2479.

22. Lục Nhâm Quốc Ngữ 六壬國語 (Liu ren guo yu) ([The methods of] Six [signs] ren [explained in] national language [= Nôm]). TG 2083; L 2480.

23. Lục Nhâm Tiện Lãm 六壬便覽 (Liu ren bian lan) (Reader’s digest on Six [signs] ren). TG 2084; L 2481.

24. Mã tiền bốc pháp 馬前卜法 (Ma qian bu fa) (Divination methods [concerning “pouring water] in front of [one’s] horse”).63

25. Ngọc Hạp 玉匣 (Chinese: Yu xia) ([Records from] the Jade Chest). By Perfected Lord Xu (許真君) [= Xu Xun 許遜]. TG 4744; L 2511.

26. Ngọc Hạp Toản Yếu 玉匣纂要 (Yu xia zuan yao) (Essentials of the compilation from the Jade Chest). TG 4745; L 2483.

27. Ngọc Hạp toản yếu thông dụng 玉匣攢要通用 (Yu xia zan yao tong yong) (Comprehensive use of the essentials of the collection from the Jade Chest). Printed in 1926. BNV R.2227.

28. Ngọc Trướng Huyền Cơ 玉帳玄機 (Yu zhang xuan ji) ([Methods of] Obscure Pole and Jade Canopy). TG 2354; L 2488.

29. Ngọc Trướng Huyền Cơ Bí Độn Thư Pháp 玉帳玄機祕遁書法 (Yu zhang xuan ji bi dun shu fa) (Methods of the scripture on secret escape [according to the] [treatise on] Obscure Pole and Jade Canopy). TG 2355; L 2489.

30. Ngọc Trướng Huyền Cơ Bí Pháp 玉帳玄機祕法 (Yu zhang xuan ji bi fa) (Secret methods of Obscure Pole and Jade Canopy). TG 2356; L 2490.

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31. Quỷ Cốc Đại Định Hoàng Tuyền Số 鬼谷大定黃泉數 (Guigu da ding huang quan shu) (Numerical [divination] on the [return to?] Yellow Sources, majestically established by the [master] Guigu). TG 2912; L 2496.

32. Quỳnh Lâm Huyết Hải Thư 瓊林血ú書 (Qiong lin xue hai shu) (Scripture of Forest of Jasper and Sea of Blood). TG 2914; L 2505.

33. Sách Coi Số 冊[…]64 數 (Ce […] shu) (Numerical [divination] according to […] books). TG 2921; L 2494.

34. Số Pháp Thư 數法書 (Shu fa shu) (Scripture on methods of numerical [divination]). TG 2966; L 2502.

35. Tân San Lục Nhâm Đại Độn Bí Truyền 新刊六壬大遁祕傳 (Xin kan Liu ren da dun bi chuan) (Newly printed [sic] secret tradition of the [methods of] Six [signs] ren and of Great Evasion). A manuscript dated 1883. TG 3192; L 2501.

36. Tam Kì Bát Môn Độn Pháp三奇八門遁法 (San qi ba men dun fa) (Methods of Evasion [using] Three Strange [Agents] and Eight Gates). TG 3078; L 2473.

37. Tăng Bổ Tuyển Trạch Thông Thư Quảng Ngọc Hạp Kí 增補選擇通書廣玉匣記(Zengbu xuanze tongshu guang Yu xia ji) (Almanac book on the choice [of auspicious days] [combined with] the extended Records from the Jade Chest, with additions and complements). Alternative title: Tăng Bổ Tuyển Trạch Thông Thư Quảng Ngọc Hạp Kí 選擇通書廣玉匣記 (Xuanze tongshu guang Yu xia ji) (Almanac book on the choice [of auspicious days] [combined with] the extended Records from the Jade Chest). Prints of 1876, 1920, and 1923. By Perfected Lord Xu (許真君) [= Xu Xun 許遜 (239-374)]. TG 4855; L 2518; BNV R.60.

38. Thái Ất Dị Giản Lục 太乙易簡錄 (Tai Yi yi jian lu) (Brief record [concerning divination according to the method of] Tai Yi and [to the Book of] Changes). Compiled in 1766 by Lê Quý Đôn 黎貴惇 (1726-1784). TG 3290; L 2475.

39. Thái Ất Thống Tông Bảo Giám 太乙統宗寶鑑 (Tai yi tong zong bao jian) (Precious mirror of Unified Origins of the [methods of] Tai Yi). TG 3291; L 2482.

40. Tham Bình Bí Quyết Kim Tỏa Ngân Chủy Ca 參評祕訣金鎖銀匙歌 (Can ping bi jue jin suo yin shi ge) (Stanzas on compared and critically [evaluated] secret prescriptions of Golden Lock and Silver Key). TG 4889; L 2514.

41. Thần Lịch Tạp Kị Pháp 神歷雜忌法 (Shen li za ji fa) (Various methods of malevolent [days according to] spirits’ itineraries). TG 3388; L 2521.

42. Thiên Văn Thể 天文體 (Tian wen ti) (Structure (?) of celestial patterns). TG 3543; L 2474.

43. Thông Thư Chính Quyển 通書正卷 (Tong shu zheng quan) (Almanac: an orthodox volume). TG 3601; L 2497.

44. Thông Thư Quảng Ngọc Hạp Kí 通書廣玉匣記 (Tongshu guang Yuxia ji) (Almanac book [combined with] the extended Records from the Jade Chest). Printed in 1876. TG 4926; L 2513.

45. Tiền Định Lập Thành 前定立成 (Qian ding li cheng) (Ready-made [manual for identification of] predestinations). TG 3724; L 2495.

46. Toát Kim Bốc Pháp 撮金卜法 (Cuo jin bu fa) (Divination methods [worth one] cuo of gold). TG 3797; L 2524.

47. Tử Vi Đẩu Số 紫微斗數 (Zi wei dou shu) (Numerical [divination according to the method of] Purple Rose and Dipper). TG 4992; L 2515.

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48. Tử Vi Đẩu Số Giải Âm 紫微斗數解音 (Zi wei dou shu jie yin) (Explanations and [correct] reading of the Numerical [divination according to the method of] Purple Rose and Dipper). TG 4102; L 2509.

49. Tử Vi Giải 紫微解 (Zi wei jie) (Explanations of [the method of] Purple Rose). TG 4993; L 2516.

50. Tử Vi Hà Lạc Nhâm Thìn Số 紫微河洛壬辰數 (Zi wei He Luo ren chen shu) (Numerical [divination according to the methods] of Purple Rose, He [tu] and Luo [shu], [Six (?) signs] ren and constellations). TG 4995; L 2517.

51. Tử Vi Số 紫微數 (Zi wei shu) (Numerical [divination] of the Purple Rose). TG 4103; L 2499.

52. Tử Vi Thập Nhị Cung Đoán Pháp Quốc Âm Ca 紫微十二宮斷法國音歌 (Zi wei shi er gong duan fa guo yin ge) (Rhymed methods of making decisions [on the basis of the methods] Purple Rose [and] Twelve Palaces [described] in national language [= Nôm]). TG 4104; L 2510.

53. Tuyển Trạch Thông Thư Đại Toàn 選擇通書大全 (Xuanze tongshu daquan) (Selected [topics] from the great compendium of almanacs). A MS copy dated 1880. TG 4044; L 2503.

B. Vietnamese Chronicles

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NOTES

1. For a detailed description of the history and main features of Nôm see Lê 1995; on pages 93–96 of this dissertation the reader will find numerous references to relevant publications in Vietnamese and in French. For publications in English see, for example, Nguyễn 1956; 1990. 2. Here and everywhere in this paper I provide Vietnamese readings of the Hán-Nôm characters; Chinese readings of them in the pinyin transliteration system, when provided, are marked with the word “Chinese.” The titles of Chinese books and names of Chinese authors are provided in the pinyin transliteration system without their Hán-Nôm reading. 3. In 1878 the colonial administration decreed that after 1882 Quốc Ngữ would be the only official form of writing, apart from French; see Osborne 1997: 163. However, as was promptly suggested by the anonymous reviewers of the present paper, the stand taken by the French colonial authorities and by the Vietnamese literati concerning the instruction of, and in, Quốc Ngữ, went through considerable modifications in the early 20th century. Unfortunately, a detailed discussion of this fascinating topic would not be relevant here; the interested reader is referred to Marr 1981, Osborn 1997, Poisson 2004, and Trinh 1995, among others. 4. As D. Marr put it, “By the 1930s the idea that quoc ngu development and dissemination constituted essential components of the struggle for independence and freedom was part of every radical [anti-colonial] platform.” (Marr 1981: 150) 5. Văn 2008: 266-267. 6. On the mantic techniques used by some ethnic minorities in Vietnam see, for example, Arhem 2009; Vargyas 2004. 7. Dumouutier 1899; 1914; 1915; Coulet 1926; 1929. 8. Nguyen 2002: 245-256. 9. Huard et Durand 1954: 65-71. 10. Huard and Durand 1954: 66. There are numerous copies of the book entitled Tử Vi Đẩu Số 紫微 斗數 preserved in the library of the Institute of Hán-Nôm Studies (Hanoi) as well as in the library of the Société Asiatique (Paris) (see item [A47] in the bibliography at the end of this paper), but I

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was unable to locate any copy of the book Tử vi đẩu số toàn thư mentioned by Huard and Durand. Surprisingly, the authors also claim that the Vietnamese astrologers used the Chinese mathematical encyclopaedia Shu li jing yun數理精蘊 (Vietnamese Số Lí Tinh Uẩn) compiled in 1723 under the direction of Mei Juecheng梅瑴成 (1681-1763). Compare with the mention of this collection in a Chinese official calendar quoted (but not properly identified) by C. Morgan (1980: 21). 11. Such as the collection of the National Library (Hanoi) as well as some smaller collections, for example, that of the Institute of History of the Academy of Social Sciences of Vietnam. My inspection of the two latter libraries undertaken in 1998-2008 showed that they held a number of texts on divination (including astrology) not catalogued in Trần and Gros (1993) or in Liu et al. (2002). 12. The [Đại] Việt sử lược [SL 1936] contains an addendum entitled “Chronology of the Trần 陳 dynasty” that covers the period from 1225 to 1377; L. Cadière and P. Pelliot (1904: 626) used this fact to conclude that the chronicle was compiled during the reign of the Trần Emperor Phế Đế 廢 帝 (personal name Trần Hiện 陳晛, r. 1377-1388). However A. Polyakov, on the basis of his textual analysis of the chronicle, convincingly argues that its first two chapters were compiled in the early 12th century (Polyakov 1980: 74). 13. SL 1936: 27; Polyakov 1980: 143. 14. The relevant record in the [Đại] Việt sử lược [大]越史略 reads: 前安奉天殿。上建正陽樓。為 掌漏刻之處。 [SL 1936: 29], that is, “In front [of the Dragon Stairs 龍墀, the King] set the Pavilion of Paying Tribute to Heaven. On the top [of it he] built the Noon Tower. [It] was the place to operate the clepsydra”; see also a translation in Polyakov [1980: 147]. This event is described in the Đại Việt sử ký toàn thư大越史記全書 in slightly different terms: “前安奉天殿。上建正陽樓。 以為主掌籌刻之處” [TT 1984: 221]. If the word 籌 was not a copyist’s mistake, it may have referred to the counting rods used for astronomical computations. These counting rods were used by Vietnamese astronomers until the 17th century or even later; see Volkov 2009. 15. SL 1936: 61; Polyakov 1980: 206. 16. The chronicles do not mention the annular eclipse of August 4th 1217, visible in Northern Vietnam, or the eclipse on May 23rd 1221, visible in China and in Northern Vietnam. The [Đại] Việt sử lược does not contain any relevant information dated after 1225, and the Đại Việt sử ký toàn thư 大越史記全書 does not mention the eclipses that occurred on July 3rd 1228 and December 19th 1237. The eclipse of 1229 mentioned in the Đại Việt sử ký toàn thư (Ho 1964: 139, no. 34) is fictitious; the earliest actual eclipse among those listed in the latter chronicle as having occurred in the 13th century is that of September 26th 1242 (ibid., no. 35). Information about these and other solar eclipses is taken from the NASA webpage “Eclipse Predictions by Fred Espenak, NASA’s GSFC” at http://eclipse.gsfc.nasa.gov/SEatlas/SEatlas.html. 17. The replacement of the taboo characters 邦 and 新 (used in the personal names of the Vietnamese emperors Anh Tông 英宗, personal name Lê Duy Bang 黎維邦, r. 1557-1572, and Kính Tông 敬宗, personal name Lê Duy Tân 黎維新, r. 1600-1618) in the extant atlas suggests that it is not an exact copy of the original edition but its later modified version, see Liu et al. 2002: 305. John. K. Whitmore (1995: 486) provides additional details suggesting that the extant atlas is a 17th century re-edition of the 15th century prototype; see also Papin 2001: 123-124. 18. For the homonymous Chinese prototype of this institution, Si tian jian司天監, Hucker (1985: 456) suggests “Directorate of Astronomy”; this rendering might imply that this office (literally “Supervising Authority in charge of [matters related to] Heaven”) was conducting exclusively astronomical activities, while the institution was actually in charge of observation of all kinds of celestial phenomena (including meteorological ones) and of their interpretation, astronomical as well as astrological. 19. Hucker 1985: 456-457, no. 5780.

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20. Han 1991: 4. On the restrictions imposed upon the circulation of astronomical and astrological literature during the Tang and Song dynasties see Morgan 1987: 57. 21. Fedorin 2009. 22. Lee 1985: 96; Friedsam 2003: 52. 23. The anonymous reviewers of this paper rightly pointed out that the description of the examinations on “counting” of 1762 (CM 1996: 3720-3721) mentions problems on flat-rate and weighted distribution (Viet. bình phân 平分 and sai phân 差分 respectively) as the topic of the examinations on “counting” (actually, the chronicle mentioned this topic as one among others, yet those “others” were not specified); on distribution problems in Vietnamese mathematics see Volkov 2012, and on administrative activities involving a certain mathematical knowledge, such as land surveying and accounting, see Poisson 2004. This record thus suggests that by the 18th century mathematical and astrological subjects were most probably taught separately; this conjecture may be supported by a record dated to the 7th year of the (Vietnamese) Cảnh Hưng 景 興 era (1740-1786), that is, 1746 (mentioned in CM 1969 as corresponding to the 11th year of the (Chinese) Qianlong 乾隆 era, 1735-1796, that is, 1745) concerning examinations conducted exclusively on astrological subjects (CM 1969: 3606). However, the separation of the two curricula apparent in these documents of the mid-18th century does not warrant the conclusion that instruction in mathematics and astrology was always conducted separately; in other words, it cannot be ruled out that at an early stage Vietnamese mathematical instruction imitated the Song dynasty model in which a number of subjects, purely mathematical from a modern viewpoint, were taught together with astronomical and astrological ones, see Lee 1985: 96 and Friedsam 2003: 52. 24. CM 1969: 697. 25. CM 1969: 984. 26. CM 1969: 1292. 27. CM 1969: 1458. In this source the year in question is mentioned as the second year of the Khai Đại 開大 era (1403-1407) of the Hồ 胡 dynasty (1400-1407), that is, 1404, and, at the same time, the second year of the Chinese Yongle 永樂 era (1402-1424), that is, 1403. 28. CM 1969: 2253, TT 1984: 703; misprinted as “1472” in Han 1991: 6. 29. CM 1969: 2456. The examinations took place in the 12th month of the first year of the Chinese era Zhengde 正德 (1506-1522) and of the second year of the Vietnamese era Đoan Khánh 端慶 (1505-1509); both dates correspond to the beginning of the year 1507. 30. CM 1996: 3720-3721. This record contains the aforementioned description of an examination that took place in the 5th month of the 23rd year of the (Vietnamese) Cảnh Hưng 景興 era (1740-1786), that is, 1762, mentioned in CM 1969 as corresponding to the 27th year of the (Chinese) Qianlong 乾隆 era, 1735-1796, that is, 1761. 31. Volkov 2008. 32. The name of this institution was identical with the name of its Chinese counterpart, Qin tian jian 欽天監, used during the late Ming and Qing dynasties in China; see Hucker 1985: 169. Hucker translates the name of this institution (meaning literally “Directorate of paying respect to Heaven”) as “Directorate of Astronomy,” even though his own description makes it clear that the occupations of its staff included meteorological observations and divination. 33. See [KTG]. 34. Ho 1964: 138, nos. 22–24, respectively. 35. It is possible that the distribution of the eclipses mentioned in the Đại Việt sử ký toàn thư was intentionally brought into correspondance with the political history of Vietnam, because all the recorded eclipses, except those of 479 and 1422, belonged to periods of the formal independence of Vietnam from China: the period from 205 to 122 BC corresponds to the Vietnamese Triệu 趙 dynasty (207-111 BC), the eclipse of AD 41 happened during the rebellion of the Trưng 徵 sisters (AD 40-43), and the eclipse of 547 falls within the period of rule of the Vietnamese Early Lý

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Dynasty (544-602). The eclipse of April 8th 479 was an annular one, visible in India and China and probably hardly noticeable in Vietnam; conversely, the total eclipse of September 20th 461, perfectly visible in Northern Vietnam, was not listed. The eclipse of 23rd January 1422 was not visible in Vietnam either. 36. SL 1936: 30; Polyakov 1980: 149. 37. Ho 1964: 139, no. 29. 38. SL 1936: 61; Polyakov 1980: 206. 39. These two eclipses are: (1) the one on the first day of the 11th month of 1105 (a partial eclipse), see SL 1936: 42, and Polyakov 1980: 173, and (2) the one on the first day of the second month of 1188, see SL 1936: 57, and Polyakov 1980: 198. The former record probably corresponds to the eclipse on December 16th 1107, and the latter to the eclipse on February 17th 1189; both eclipses were visible in Vietnam. 40. The eclipse on the first day of the 10th month of the year 1093; see SL 1936: 41; Polyakov 1980: 170. From 1081 to 1100 there were only two eclipses that might have been visible in Hanoi: one on March 19th 1094, and the other on October 14th 1083. No eclipses were visible in China in this time interval. 41. See the Records of Dreams of the Old Man from the South (Vietnamese Nam ông mông lục 南翁夢錄, Chinese Nan weng meng lu) by Hồ Nguyên Trừng 胡元澄 (also known as Lê Trừng 黎澄, 1374?-1446?), the relevant excerpt reads: 其人通曉曆法,甞著 《百世通紀書》,上考堯甲辰,下至宋元,日月交蝕,星辰纏度,與古符合 (This man [=Trần Nguyên Đán] comprehended and understood the methods of the calendar; [he] compiled the Scripture of the comprehensive chronicles of a hundred generations [which] started with the original [configuration of] constellations of [the mythical Chinese emperor] Yao and went down to the Song and Yuan [dynasties]. [He calculated (?)] solar and lunar conjunctions and eclipses, the degrees [= coordinates] of planets and stars on [their respective] orbits. [All these data (?)] fitted well with antiquity.); see also Knorozova 2009: 156-157. 42. Tran 1938: 43, n. 3; Cadière and Pelliot 1904: 619, n. 3. 43. Ho Peng Yoke (2003) suggests the following translation of the names of these three astrological techniques: (1) “Method of the Taiyi Deity” (p. 36), (2) “[Aligning] the Distinguished- Ones and the [auspicious] Gates [together with] concealing the [Wood] jia stem” (p. 84) while criticizing such more straightforward renderings as “Strange Gates Escaping Techniques” (p. 83), and (3) “The method of employing the six sexagenary cyclical numbers with the Yang Water stem” (p. 5) preferring it to the more literal “The art of the six Yang Waters” (p. 113). For the sake of brevity I will use the Chinese transliteration of these names below. 44. Ho 2003: 36. 45. Ho 2003: 36-40: 171, n.3-4; Ho suggests that a recently unearthed divinatory instrument of the Han dynasty may have represented a rudimentary form of this technique (p. 41). See also Kalinowski 1991: 105, 542, n. 79, 568, n. 23. 46. This element of the divinatory scheme must apparently have been modified when transmitted to Vietnam. 47. Ho 2003: 66-68. 48. Tran 1937: 33. Two other treatises were related to the system of divination Liu ren; I will return to them below. Tran also mentions another literary work of Lê devoted to divination (Tran 1937: 34); this text, titled Haỉ hội minh châu 海會明珠 and available when Tran was writing his article, is now lost. 49. Here the “Rose” is Rosa Multiflora (Chinese: wei 薇). Zi wei (Purple Rose) refers to a northern circumpolar asterism, see, for example, Ho 2003: 76. 50. Ho 2003: 74-82. 51. Ho 2003: 83-84. 52. Kalinowski 1983.

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53. Ho 2003: 113-119. 54. Ho 2003: 137. 55. Tran 1937: 33 mentions two more treatises related to the tradition of Lục Nhâm (that is, Liu ren 六壬) authored by Lê Quý Đôn 黎貴惇 (see above): the Lục Nhâm Hội Thông 六壬會通 (Tran translates this title as Notions générales de la science de la divination appliquée à la guerre, probably on the basis of its contents) and Lục Nhâm Tuyển Túy六壬選粹 (Choix de principes essentiels de la science de la divination appliquée à la guerre, according to Tran); both treatises are not found in the catalogues Trần and Gros 1993, Liu et al. 2002, nor in the National Library of Vietnam. 56. His travel to China is mentioned in CM 1969: 2832; it is dated to the fourth month of the 20th year of the Vietnamese Quang Hưng 光興 era, 1578-1599, that is, 1697 (indicated in CM 1969 as the 25th year of the Chinese Wanli 萬曆 era, 1572-1620, that is, 1596). Phùng returned from China in the 12th month of the 21st year of the Quang Hưng era, that is, in 1599 (mentioned as the 26th year of the Wanli era, that is, 1598), see CM 1969: 2847. On Phùng Khắc Khoan, see also Gaspardone 1934: 115-116; Tran 1938: 106-107, 117; Knorozova 2009: 244, n. 38; on his meeting with a Korean ambassador in Beijing, see Cheng 2009. 57. Tran 1938: 106-107. 58. See also the voluminous mansucript Binh Pháp Tập Lược 兵法輯略 (Chinese Bing fa ji lüe) allegedly compiled by Liu Bowen (Liu Ji) and edited by Nguyễn Đức Uông 阮德汪 (dates unknown), TG 246 (a microfilm copy of it is available in the library of the EFEO in Paris); this treatise is devoted to military applications of astrology. 59. For biographic data on Xu Xun as found in the Daozang and his cult, see Boltz 1987: 70-78. 60. For a short description see Ren 1991: 1170, no. 1467. 61. One text compiled no earlier than 1295 mentions Xu Xun as “Xu Taishi zhenjun” 許太史真君, that is, Xu Xun is explicitly mentioned here as Great Astrologer taishi 太史 (Head of the Astrological Bureau, see Hucker 1985: 481, no. 6212); J. Boltz suggested “Perfected Lord Xu, the Grand Scribe” (1987: 75) 62. Ho Peng Yoke’s (adapted) translation of the title would read: “Concealing the (Wood) Jia stem (together with aligning) the Distinguished-Ones and the (auspicious) Gates” (Ho 2003: 84). 63. The title contains an allusion to the Chinese chengyu (idiomatic expression) ma qian po shui 馬 前潑水 (“To pour water in front of [one’s] horse”), meaning the impossibility of reunification for a divorced couple, and coming from the anonymous Chinese opera of the Yuan or early Ming dynasty Zhu Taishou feng xue yu qiao ji 朱太守風雪漁樵記 (Governor Zhu going fishing and cutting wood in strong wind and snow). I am thankful to Lin Hung-Chun 林虹君 for her explanations of the meaning and etymology of this chengyu. 64. An unidentified Nôm character.

ABSTRACTS

The paper is focused on astrology (that is, observations and mantic interpretations of positions of celestial bodies, in particular those resulting in solar eclipses) and hemerology (predictions made on the basis of calendar) in traditional Vietnam. The author provides a short description of the history of institutions dealing with astronomical observations and with their astrological interpretations, and discusses the extant Vietnamese materials relevant to the topic.

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L’article se concentre sur l’astrologie (c’est-à-dire sur les prédictions faites à partir des observations des positions des corps célestes, et, en particulier, de celles qui résultent en éclipses solaires) ainsi que l’hémérologie (c’est-à-dire les prédictions basées sur le calendrier) au Viêt- Nam traditionnel. L’auteur offre un historique des organismes concernés par les observations astronomiques, par leurs interprétations astrologiques et présente brièvement les traités astrologiques vietnamiens.

AUTHOR

ALEXEI VOLKOV Professeur associé à l’Université nationale Tsing-Hua à Taïwan. Ses travaux portent sur l’histoire des sciences en Chine et au Viêt-Nam traditionnels. Il a publié notamment : - (2012). « Evangelization, Politics, and Technology Transfer in the 17th-Century Cochinchina : the Case of João da Cruz ». In Luis Saraiva (dir.), Europe and China : Science and the Arts in the 17th and 18th Centuries. Singapour, World Scientific : 31-67 ; - (2012). « Argumentation for state examinations : demonstration in traditional Chinese and Vietnamese mathematics ». In Karine Chemla (dir.), The History of Mathematical Proof in Ancient Traditions. Cambridge, Cambridge University Press : 509-551.

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Faculté de prévoir. L’astrologie dans les universités indiennes Faculty of Predicting. Astrology in Indian Universities

Caterina Guenzi

1 Lorsqu’on se rend sur le site Internet de la Banaras Hindu University, la plus importante université de Bénarès et l’une des plus réputées d’Inde, on découvre actuellement, dans la page consacrée à la faculté d’études sanskrites, un bandeau tournant de couleur rose affichant le titre « Data Collection Notice for the major project at Jyotish Deptt » [sic]1. Ce bandeau nous propose de télécharger un document mis en ligne par le département d’astrologie (jyotiṣ vibhāg) à propos d’un projet de recherche sur le « diagnostic et traitement astrologiques des maladies cardiaques » (hṛdayarog kā jyotiṣśāstrīya nidān evaṃ upacār). Financé par la University Grant Commission (UGC), l’agence gouvernementale de la recherche scientifique indienne, ce projet, d’une durée de deux ans, vise à recueillir des données statistiques auprès des cardiopathes afin d’examiner le rapport entre les combinaisons planétaires (grahayoga) décrites dans leur horoscope et le développement des maladies. Bilingue hindi et anglais, le document en ligne invite les patients concernés à adresser au responsable du projet, le Dr Tripathi, assistant professor au sein du département d’astrologie, les données concernant la date, l’heure et le lieu de leur naissance, ainsi que le type de pathologie développée et le moment de son déclenchement.

2 L’exemple de l’enquête en ligne menée par le Dr Tripathi introduit d’emblée plusieurs questions à propos de la transmission du savoir astrologique dans le contexte indien. Tout d’abord, celle des modalités d’adaptation à l’institution universitaire d’un savoir brahmanique qui pendant des siècles avait été transmis dans le cadre de la relation personnelle entre maître (guru) et disciple (śiṣya). Deuxièmement, le soutien financier reçu par l’agence nationale de la recherche nous incite à réfléchir sur le rôle des politiques gouvernementales et les enjeux idéologiques liés à la transmission de l’astrologie dans l’Inde contemporaine. Troisièmement, en raison du procédé statistique qu’elle mobilise, inconnu de la littérature astrologique classique (jyotiḥśāstra ), cette enquête nous amène à interroger le rapport entre innovation et tradition dans

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la pratique et la transmission du savoir. Enfin, par le sujet qu’elle traite, les maladies cardiaques, ce projet soulève la question de l’impact des transformations sociétales sur les élaborations théoriques de l’horoscopie à l’époque contemporaine. Un questionnement plus profond relie néanmoins toutes ces interrogations et sera le fil conducteur de cette contribution : quels problèmes particuliers soulève l’étude des processus de transmission de l’astrologie dans le monde indien ? Comment le matériel que nous présentons peut-il apporter un éclairage nouveau à la question de la transmission ? Cette étude s’attache à montrer que la science astrale sanskrite, par son statut épistémologique, par son rôle social et par son rapport à l’orthodoxie brahmanique, a fait l’objet de processus de transmission originaux, qui la distinguent fortement d’autres savoirs de la tradition sanskrite.

3 Les pratiques d’enseignement et d’apprentissage de l’astrologie seront ici observées à partir d’une enquête ethnographique menée à Bénarès. Bien que notre regard soit celui d’une ethnologue, afin de mettre en perspective le matériel étudié nous considérons également certains processus de transmission concernant les sources sanskrites qui fondent le savoir des astrologues. On s’intéressera ici en particulier aux traités canoniques de la littérature astrale (jyotiḥśāstra) qui continuent à être enseignés et étudiés aujourd’hui dans le cadre des diplômes universitaires2. Afin de situer l’enseignement académique de l’astrologie dans la longue durée et de comprendre les enjeux qui y sont associés, on prendra également en considération des documents de la période coloniale. Bénarès constitue une ville exemplaire pour l’étude des processus de transmission de la discipline astrale. Comme nous le verrons, en effet, dès la première modernité jusqu’à nos jours, en passant par la période coloniale, ce centre urbain, ville sacrée de l’hindouisme et bastion de l’orthodoxie brahmanique – connu également sous le nom de Kāśī –, ne cesse de constituer un centre d’attraction majeur pour l’apprentissage des sciences astrales. Si l’observatoire astronomique en maçonnerie que le mahārāja Jayasiṃha (Sawāī Jai Singh II) y fit bâtir au XVIIIe siècle sur la rive du Gange, et que l’on peut visiter encore aujourd’hui en tant que monument de l’Archeological Survey of India, atteste de la grandeur passée de cette tradition, sa vitalité et son renouvellement actuels peuvent être constatés en observant l’activité des quelques centaines de praticiens qui sont régulièrement consultés dans la ville par des clients venant de toutes les régions de l’Inde3. Parmi les plus réputés, il y a ceux qui, en dehors du titre honorifique de paṇḍit, « savant brahmane », peuvent afficher sur leur carte de visite également le titre de « docteur » (« Dr »), attestant ainsi de leur formation universitaire. En effet, même si l’acquisition d’un diplôme académique dans la discipline astrale n’est pas une condition nécessaire à l’exercice de la profession d’astrologue – l’identité brahmanique, la tradition familiale et les recommandations de bouche à oreille étant des gages suffisants de la fiabilité du praticien –, les astrologues ayant accompli des études supérieures en astrologie sont particulièrement appréciés, en raison de l’incontestabilité de leurs compétences et du prestige associé aux études universitaires. Les diplômes de licence, de master et de doctorat sont dispensés par les départements de jyotiṣa de la Banaras Hindu University (Kāśī hindu viśvavidyālaya) et de la Sampurnananda Sanskrit University (Sampūrṇānanda saṃskṛta viśvavidyālaya)4. Nous allons alors voir comment l’enseignement dans ces deux départements est animé par une tension constante entre une politique de préservation de la tradition brahmanique et une ouverture à la « modernité ». Un rapide aperçu des lieux nous permet de voir cette tension réifiée dans les ordinateurs et d’autres appareils technologiques qui sont régulièrement utilisés en tant qu’outils didactiques et de recherche d’une part, et, de

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l’autre, dans l’observatoire en plein air que la Sampurnananda Sanskrit University a fait bâtir en 1991, comme pour afficher la preuve tangible d’une tradition qui reste intacte depuis des siècles, avec des instruments (yantra) en maçonnerie qui reproduisent ceux que l’on construisait au XVIIIe siècle sous Sawāī Jai Singh II, et dont les chercheurs et les étudiants universitaires se servent régulièrement pour accomplir des expériences (prayoga) et apprendre les principes de leur discipline5. Ce même aperçu laisse entrevoir la complexité et le caractère parfois paradoxal de certaines pratiques de transmission qui, comme dans ce cas, visent à préserver et revivifier la tradition brahmanique à travers la construction d’instruments astronomiques qui, inspirés de ceux de l’observatoire d’Ulugh Beg à Samarcande, témoignent de l’influence de l’astronomie arabo-persane sur le jyotiṣa.

Que transmet-on ?

4 Avant d’entreprendre l’analyse des processus de transmission, il est indispensable de préciser ce qui fait l’objet de la transmission. Les modalités d’enseignement et d’apprentissage ne peuvent en effet pas être comprises si l’on fait abstraction du type de savoir transmis, de ses caractéristiques épistémologiques et de sa fonction sociale. Le savoir enseigné dans les universités de Bénarès porte le nom de jyotiṣa, littéralement « (étude des) lumières célestes (jyotis) ». Il s’agit d’une discipline à la structure très complexe, comprenant plusieurs branches et sous-branches, et dont les origines remontent à l’époque védique. Le jyotiṣa est en effet mentionné parmi les six disciplines auxiliaires du Véda, appelées vedāṅga (« membres » du Véda) et incluant également la phonétique (śikṣā), la grammaire (vyākaraṇa), l’étymologie (nirukta), la métrique (chandas) et la science des instructions concernant l’exécution des rituels (kalpa). La fonction auxiliaire de la discipline astrale par rapport au Véda est clairement énoncée dans le Jyotiṣa-vedāṅga, le plus ancien traité qui nous soit parvenu dans ce domaine, composé probablement autour de 400 avant notre ère, mais présentant des données astronomiques plus anciennes6. D’après ce texte, l’étude du mouvement des astres et l’identification d’un système de calendrier ont pour but « l’obtention des moments propices aux sacrifices » (yajña-kāla-artha-siddhi)7. Bien que le jyotiṣa de l’époque védique soit fondamentalement une science du calendrier, purement astronomique, qui ne mentionne de prédictions d’aucune sorte, le rapport d’interdépendance avec l’orthodoxie brahmanique est fixé d’emblée et restera constant jusqu’à aujourd’hui : la discipline astrale est indispensable à l’exercice de la prêtrise car elle permet d’identifier les moments appropriés (muhūrta) pour l’exécution des rituels. Tout prêtre brahmane se doit donc de connaître les fondements de la science du calendrier. La légitimité et l’utilité de ce savoir, de nos jours comme par le passé, sont donc pleinement reconnues par les représentants de l’autorité religieuse hindoue, les brahmanes, et cela a une grande importance pour l’étude des processus de transmission.

5 Un autre aspect qu’il faut prendre en considération lorsqu’on examine les pratiques de transmission de la discipline astrale et qui marque une différence majeure par rapport à d’autres savoirs de la tradition brahmanique – tels que la grammaire, la philosophie ou la science rituelle – est l’ouverture aux influences étrangères, l’échange avec d’autres traditions astrales et l’emprunt de termes et de concepts venus d’autres langues telles que le grec, le persan et l’arabe en particulier. Comme l’ont montré les

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travaux de D. Pingree (1976, 1978, 1981), un tournant majeur dans l’histoire du jyotiṣa a lieu aux premiers siècles de notre ère lorsque des traités astrologiques grecs sont traduits en sanskrit par des représentants de la communauté des Yavana (Grecs) dans les satrapies de l’Inde nord-occidentale8. Ces traductions introduisent en Inde une technique astrologique nouvelle, l’horoscopie natale (jātaka), centrée sur l’observation du mouvement des planètes (graha) – parmi lesquelles on compte soleil et lune – à travers les douze signes zodiacaux (rāśi) et les douze maisons du ciel (bhāva). Les planètes, qui n’avaient qu’un rôle très marginal dans la littérature sanskrite antérieure au début de notre ère, viennent occuper une place majeure (Yano 2003 et 2004).

6 L’emprunt de concepts d’origine étrangère ne se fait néanmoins pas sans embarras, car au sein de l’orthodoxie brahmanique, l’étranger est considéré comme un mleccha, un « barbare » dont il faut éviter le contact. Afin de ne pas compromettre le statut et la réputation de l’astrologue/astronome, des stratégies sont alors mises en place afin de « camoufler » l’origine étrangère et de rendre les termes autochtones. Ainsi, par exemple, le nom sanskrit de l’horoscopie, horā, est une transcription phonétique du mot grec ὥρa9. Varāhamihira fournit néanmoins l’étymologie suivante du terme horā : « Ce qu’on appelle horā, certains [sages] affirment, est une corruption du mot aho-rātra [= le jour et la nuit] auquel on aurait enlevé la première et dernière syllabe »10.

7 Lors de la transmission des traités d’horoscopie, la matrice théorique allochtone est progressivement transformée et élaborée afin d’être adaptée aux particularités culturelles et sociales du contexte indien. Les plus anciens traités d’horoscopie sanskrite contiennent déjà de nombreuses adaptations de l’original grec à la culture hindoue. La théorie hellénistique de l’horoscope s’y trouve enrichie non seulement des vingt-sept nakṣatra (maisons lunaires) de l’astrologie védique, mais également de passages qui mentionnent la théorie de la réincarnation, les quatre varṇa qui composent la société (brāhmaṇa, kṣatriya, vaiśya et śūdra), les différentes sectes d’ascètes hindous et bouddhistes, l’iconographie de Śiva, de Lakṣmī et d’autres divinités, ainsi que les catégories propres à la théorie médicale ayurvédique11. Ces adaptations deviendront de plus en plus nombreuses dans la littérature astrologique successive, le squelette gréco-babylonien de la théorie de l’horoscope prenant progressivement corps dans une chair hindoue. Ainsi, les planètes (graha) acquièrent des traits anthropomorphes et des attributs iconographiques propres aux divinités hindoues et passent du nombre de sept – Soleil, Lune, Mars, Mercure, Jupiter, Vénus et Saturne – à neuf, suite à l’introduction de Rāhu, le démon de l’éclipse, au début du VIe siècle, et de Ketu, la personnification des comètes, au début du VIIe siècle (Markel, 1995)12. Le processus d’adaptation et d’appropriation de la théorie de l’horoscope au sein de la littérature sanskrite apparaît également dans le développement et la sophistication de techniques horoscopiques telles que le calcul de la longévité (āyurdāya), le système de subdivision (varga) des signes, la théorie des aspects (dr̥ṣṭi), et le système des périodes planétaires (daśā), qui acquièrent des caractéristiques propres et une importance particulière au sein de l’horoscopie transmise dans la tradition sanskrite.

8 Une troisième caractéristique qu’il faut garder à l’esprit lorsqu’on considère le processus de transmission des sciences astrales sanskrites est la complexité épistémologique du jyotiṣa. Depuis le sixième siècle de notre ère, lorsque l’astrologue- astronome Varāhamihira systématisait les principes et les divisions de la discipline, le jyotiṣa se compose de plusieurs branches (skandha) telles que les mathématiques (gaṇita ), l’astronomie (siddhānta), l’astrologie (horā ou phalita) et la divination ou lecture des

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présages (saṃhitā)13. Ces branches se divisent à leur tour en plusieurs spécialités : l’astrologie, par exemple, comprend l’horoscopie natale (jātaka), l’astrologie des interrogations (praśna) et l’astrologie des élections ou des « moments appropriés » (muhūrta). Cette dernière inclut à son tour deux sections – les mariages (vivāha) et les expéditions militaires (yātrā). Malgré la diversité des domaines traités et des méthodes d’investigation utilisées, l’ensemble de ces branches constitue un tout cohérent car il définit le domaine de compétence de l’astrologue/astronome (jyotiṣī). Nous verrons néanmoins que, à partir de la période coloniale et avec la progressive affirmation du paradigme scientifique moderne, l’éclectisme épistémologique de la discipline a profondément affecté le processus de transmission de la discipline, certaines branches étant reconnues comme plus valides que d’autres et leur enseignement étant privilégié à une certaine époque.

9 L’évolution et le rapport entre les différentes branches ne relèvent cependant pas seulement de critères épistémologiques, mais aussi du contexte social et historique dans lequel le métier d’astrologue est pratiqué. Nous en venons ici à la dernière caractéristique de la discipline qu’il faut souligner afin de comprendre les processus de transmission : son utilité pratique. À la différence d’autres savoirs brahmaniques, la science astrale avait et continue à avoir maintes applications pratiques dans le domaine, non seulement du rituel, mais aussi de la santé, du travail, de la famille ou de la politique. La valeur attribuée à chacune des branches au sein de la discipline astrale varie ainsi de manière importante selon l’usage qu’on en fait aux différentes époques. L’astrologie militaire (yātrā) jouait par exemple un rôle crucial à l’époque de Varāhamihira, ainsi que sous les empereurs moghols, et était comptée parmi les branches principales de la discipline, alors qu’elle a de nos jours pratiquement disparu. Tout pareillement, dans les cours royales de l’époque ancienne et médiévale, la saṃhitā – l’inspection des présages – était tenue pour indispensable au bon fonctionnement du royaume (Inden 1985). Elle a un rôle beaucoup moins important de nos jours, car le « patron » (yajamāna) qui garantit la subsistance de l’astrologue n’est plus le roi commanditant des prédictions collectives – à propos du royaume, de l’armée, des régions et des populations – mais les familles de classe moyenne ou haute qui demandent des consultations à l’échelle individuelle ou familiale, et que les astrologues satisfont généralement à travers la lecture de l’horoscope et de l’almanach14. L’horoscopie (horā, phalita) s’affirme de nos jours comme la branche dominante également par rapport aux mathématiques (gaṇita) et à l’astronomie (siddhānta), ces dernières offrant très peu de débouchés professionnels lorsqu’elles ne sont pas étudiées et pratiquées dans le cadre des sciences modernes.

10 Le développement des branches de la discipline varie également en fonction des traditions régionales. Ainsi, par exemple, l’Inde nord-occidentale, et en particulier le Gujarat, en raison de sa position frontalière, a été le berceau d’importants échanges avec les savoirs astrologiques grecs et arabes. C’est dans cette région que non seulement l’« horoscopie des Grecs » (Yavana-jātaka) a été assimilée et diffusée au début de notre ère, dans les satrapies établies par Alexandre, mais aussi, à partir du treizième siècle, une forme d’horoscopie riche en éléments arabo-persans a été élaborée dans la péninsule du Saurāṣṭra, où la cohabitation avec les marchands musulmans était intense (Pingree 1997). Appelée tājika – du Pahlavī tāzīg, « arabe » –, cette forme particulière d’horoscopie natale (jātaka), rédigée en sanskrit et combinant à la fois des notions indiennes et arabo-persanes, sera diffusée dans les siècles successifs à travers les cours de l’empire moghol, atteignant ainsi les différentes régions de l’Inde15. Une autre

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particularité qui caractérise la tradition astrale au Gujarat et son ouverture aux milieux non-brahmaniques est l’implication de moines jainas dans la composition de textes de jyotiṣa, attestée aussi bien à la période ancienne, dans le domaine de la saṃhitā, que pendant la période médiévale, sous le règne des Caulukya, par des auteurs de traités de muhūrta (Pingree 1981).

11 Du point de vue des conformations régionales, le Kerala est bien connu pour les développements sophistiqués dans le domaine des mathématiques (gaṇita) accomplis au sein de l’école (guru-paraṃparā) de Mādhava entre le XIVe et le XVIIe siècles. La science astrale pratiquée dans cette région se caractérise également par l’importance accordée à la branche du praśna (« interrogations »), comme l’atteste non seulement la production textuelle des siècles derniers, mais aussi l’utilisation particulière de cette technique divinatoire dans la gestion des temples (Tarabout 2002). Au Tamil Nadu, une spécialité divinatoire appelée nāḍī jyotiṣa a été élaborée sur la base d’un corpus textuel contenant une collection d’horoscopes sur feuille de palmier et composé probablement à partir du XVIIe siècle (Gansten 2003). Cette littérature a de nombreux points communs avec les traités de jātaka du point de vue conceptuel, mais s’en distingue en ce que, plutôt que d’illustrer les règles théoriques de l’horoscopie, elle présente une séquence de cas empiriques. L’astrologue doit identifier le texte correspondant à son client dans une série d’horoscopes déjà rédigés et prêts à l’emploi16. Bien que le nāḍī jyotiṣa soit de nos jours présenté (et vendu aux touristes) comme étant une tradition tamoule (« millénaire »), le corpus textuel sur lequel il se base a été rédigé, en plus du sanskrit, en plusieurs langues sud-indiennes, ce qui fait penser à une origine commune à toute la région dravidienne (Gansten 2003). Une technique horoscopique similaire, basée sur le même principe, existe également en Inde du Nord et se réfère à la Bhr̥gu-saṃhitā, traité composé probablement autour du XVIe siècle et contenant une collection de milliers d’horoscopes individuels (Pingree 1981). Les variations régionales des savoirs astraux et divinatoires restent cependant largement inexplorées aussi bien du point de vue historique qu’anthropologique, et nous espérons que des recherches futures viendront éclairer maints aspects des formes locales du jyotiṣa.

12 Outre les développements régionaux, il existe certaines villes ou districts où les études astrales et divinatoires connurent à une certaine époque une floraison exceptionnelle. La vitalité d’une tradition locale s’explique souvent en raison de la présence de familles de jyotiṣī particulièrement prolifiques, transmettant leur savoir de génération en génération. Tel est le cas de Pārthapura, sur le fleuve Godavari, dans l’actuel Maharashtra, où deux lignages de brahmanes donnèrent, entre le XIVe et le XVIIe siècle, plusieurs auteurs – Jñānarāja, Sūryadāsa, Gaṇeśa, Vīreśvāra, et d’autres encore – dont les œuvres ont marqué l’histoire des études astrales de la première modernité (Minkowski 2002). Néanmoins, la vitalité d’une tradition locale était également strictement liée à la présence de généreux patrons s’engageant dans la promotion du travail des jyotiṣī. Si de nos jours le patronage a été partiellement remplacé par le cadre institutionnel des universités, dans le passé, les mahārāja hindous et les empereurs moghols jouaient un rôle fondamental dans le développement des activités locales des astronomes/astrologues. Le cas le plus connu de patronage est celui du mahārāja Jayasiṃha (Sawāī Jai Singh II), souverain des cours royales d’Amber et de Jaipur dans la première moitié du XVIIIe siècle. Ce passionné et érudit promoteur de la science des astres fit construire cinq observatoires astronomiques dans les villes de Delhi, Jaipur, Ujjain, Mathura et Bénarès, tout en soutenant la collaboration entre les astronomes

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hindous, musulmans et jésuites invités à sa cour et en encourageant la traduction de traités arabes et latins en sanskrit (Sarma 1998 et 2009). Tout comme Jayasiṃha soutint le travail des astronomes musulmans, les souverains des cours mogholes promurent longtemps celui des brahmanes jyotiṣī, qui étaient régulièrement employés dans leurs cours en tant qu’astrologues/astronomes royaux (jyotiṣa-rāja, en sanskrit, ou, en persan, jotik rāi). Un cas exemplaire est celui de l’empereur Akbar, mécène de savants de tous horizons, sous le patronat duquel fleurirent les travaux du très prolifique Nīlakaṇṭha, nommé « astrologue royal » (jyotiṣarāja), ainsi que de son frère Rāma, auteur du célèbre traité Muhūrta-cintāmaṇi (Pingree 1997).

13 Nīlakaṇṭha et son frère Rāma s’installèrent et composèrent leurs œuvres à Kāśī (Bénarès) dans la deuxième moitié du XVIe siècle, lorsque la ville était gouvernée par le roi Ṭoḍaramalla, ministre d’Akbar. Leur cas est loin d’être isolé. À partir du XVIe siècle, Kāśī devient en effet un centre d’attraction pour les jyotiṣī d’autres régions de l’Inde. L’histoire de la littérature astrale témoigne de plusieurs lignées de brahmanes jyotiṣī – la plupart originaires du Maharashtra – se rendant à Bénarès afin d’obtenir une formation auprès d’un maître, et fondant ensuite une lignée d’astronomes et astrologues dans la ville17. Du XVIe au XVIIIe siècle, Bénarès remplissait en effet les trois conditions favorisant une concentration locale de jyotiṣī – la présence de familles spécialisées dans le domaine, la renommée de certains maîtres, le patronage – et, comme dans d’autres domaines du savoir brahmanique, la ville s’imposait progressivement comme la capitale des études sanskrites. Cette réputation, nous le verrons dans les pages qui suivent, ne fit que croître sous la domination britannique, bien que d’importants changements se fussent produits au niveau de la transmission et de la production du savoir astral.

L’enseignement d’un savoir « utile »

14 La période coloniale est vectrice d’importants changements dans les processus de transmission de la science astrale à deux niveaux. À un niveau institutionnel d’abord, du fait de la création des universités, elle établit des nouvelles formes de transmission du savoir où la relation personnelle entre maître et disciple (guru-śiṣya paraṃparā) n’est plus au cœur du dispositif d’enseignement. De l’autre, à un niveau idéologique, du fait de l’affirmation progressive de la science moderne en tant que paradigme de connaissance dominant, elle introduit une fracture entre les savoirs « scientifiques » et les « superstitions » au sein du jyotiṣa. Le cas des université de Bénarès nous permettra d’observer de près comment prennent forme ces changements et les débats qu’ils provoquent entre administrateurs britanniques et savants brahmanes à la période coloniale.

15 La fondation de la Sampurnananda Sanskrit University (SSU) et de la Banaras Hindu University (BHU) est intimement liée à la réputation de Bénarès comme centre de la culture sanskrite et de l’orthodoxie brahmanique18. Aussi bien le Benares Sanskrit College – qui deviendra au XXe siècle la SSU – que la BHU jouent, dans leur diversité, un rôle majeur dans l’histoire indienne en tant que centres de nationalisation, standardisation et institutionnalisation des traditions religieuses hindoues19. Selon le projet éducatif sous-jacent à la création de ces deux établissements, la culture sanskrite représente la plus haute expression non seulement de l’hindouisme, mais aussi de l’indianité. En tant que tradition sanskrite et brahmanique, le jyotiṣa est intégré aux

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programmes de ces deux établissements dès leur création. Cependant, en raison de son éclectisme épistémologique, le jyotiṣa subit un processus d’institutionnalisation particulier, qui le différencie des autres études sanskrites.

16 Le Benares Sanskrit College, fondé sous le patronage britannique en 1791 par Jonathan Duncan, Résident de la Compagnie orientale des Indes, fut crée dans le but de préserver et cultiver « the Laws, Literature and Religion of that [Hindoo] nation, at this centre of their faith [=Benares] »20. Duncan attribuait aux brahmanes de Bénarès la plus haute autorité en matière religieuse, légale et littéraire, et visait à préserver, à institutionnaliser et à contrôler leur savoir (Dalmia 1997 ; Dodson 2007). Dans ce but, les méthodes traditionnelles d’apprentissage, basées sur la transmission de la connaissance de maître à disciple – guru-śiṣya-paramparā – devaient être transformées (Kumar 1997). La relation personnelle entre maître et disciple allait être remplacée par le rôle des institutions dispensant des cours et des diplômes standardisés. Le processus d’adaptation des formes traditionnelles aux nouvelles méthodes rencontra néanmoins de nombreux obstacles, engendrant des problèmes pédagogiques et de corruption, ainsi que des conflits idéologiques qui opposèrent les autorités coloniales aux pandits brahmanes dans les décisions relatives au programme des cours. Pour les autorités coloniales voulant reformer et restructurer l’apprentissage traditionnel sanskrit, l’enseignement du jyotiṣa allait soulever d’épineuses questions.

17 Dans le programme établi par Duncan au Sanskrit College en 1791, le « Jyotish » était présenté comme une discipline portant sur « Astronomy, Geography and pure Mathematics » (Nicholls 1907 [1848] : 3) ; l’astrologie et la divination n’étaient pas mentionnées alors que, comme nous avons vu, elles sont partie intégrante de la discipline astrale telle qu’elle apparaît dans la littérature sanskrite. Selon les administrateurs britanniques, les branches astronomique et mathématique du jyotiṣa – siddhānta et gaṇita – représentaient la plus haute expression de l’esprit scientifique et rationnel de la culture brahmanique et leur étude devait donc être encouragée. Ces savoirs étaient utilisés par les administrateurs coloniaux en tant qu’outil didactique permettant la « greffe » (engraftement) de la science moderne et de la « connaissance utile » (useful knowledge) en Inde21. L’astrologie et la divination, en revanche, étaient tenues pour des croyances superstitieuses et irrationnelles, expression la plus infime et dégénérée de la tradition brahmanique22.

18 Toutefois, pendant les premières décades du XIXe siècle les superviseurs britanniques du Sanskrit College réalisèrent non seulement que les pandits préposés à l’enseignement du jyotiṣa dispensaient des cours en toutes les branches de la discipline astrale, mais aussi que les sujets astrologiques – phalita et saṃhitā– étaient parmi les plus populaires auprès des étudiants. Ainsi, dans son rapport de 1839, le superintendant du Sanskrit College observa à propos de l’enseignement du Jyotish : The study of Mathematics is at a very low ebb and I fear but little improvement can be hoped, for the pupils appear to evince scarcely any desire for strictly scientific attainments ; their chief object appears to be the acquisition of Astrology and they learn little of Algebra and Astronomy with the view of using them in Astrological computations. I have endeavoured to introduce Geometry amongst them, but hitherto without success. The bias in favour of astrological researches which is so prevalent among the students is much to be regretted. » (Nicholls 1907 : 83, italiques ajoutés)

19 Interrogés sur les raisons pour lesquelles les étudiants s’intéressaient davantage à l’astrologie, les pandits enseignant le Jyotish expliquèrent que, sans la maîtrise des sujets astrologiques, les étudiants n’obtiendraient « neither subsistence nor respect. »

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Le rapport cite à ce propos les mots d’un des pandits professeur dans le Sanskrit College : That science the reading of which will procure money by which support is obtained will be ardently studied by the students ; the people of Hindustan ask questions on Phuludeshi [=phaladeśa] or Phalagranth, i.e. Astrology, and give something for the answer, therefore astrology is read ; without reading Astronomy (Siddhanta) and Algebra (Ganita), Astrology cannot be understood, therefore the Siddhantas and Ganita are studied by all called Yotish [Jyotiṣī]. But those who study Siddhantas (Astronomy) alone cannot by means of it obtain a livelihood and therefore do not give their minds to it. (Nicholls 1907 : 88, italiques ajoutés)

20 Si pour les administrateurs coloniaux elle constituait un obstacle à la diffusion de ce qu’ils appelaient la « connaissance utile », la science moderne, pour les étudiants l’astrologie était une science éminemment « utile » car elle leur permettait de gagner de quoi vivre. Malgré sa popularité, l’enseignement de l’astrologie fut néanmoins interdit au Sanskrit College par l’évangéliste John Muir, en 1845, sous l’influence des réformes éducationnelles des années 183023. Selon Muir, les pandits enseignant le Jyotish devaient limiter « their predilections to arithmetic, algebra, mathematics and astronomy » (Young 1981 : 53). Comme l’observe Young, l’interdiction de l’astrologie fut la seule mesure draconienne imposée par Muir dans la gestion de l’institution. Le cours d’astrologie fut réintroduit lorsque, après l’Indépendance, le Sanskrit College fut transformé en Université en 195824.

21 Si pour les Britanniques l’enseignement du jyotiṣa était problématique en raison de l’ambivalence de cette discipline comprenant à la fois des savoirs « scientifiques » et des « superstitions », aux yeux du fondateur de la Banaras Hindu University, le leader nationaliste Pandit Madan Mohan Malaviya, cette même ambivalence épistémologique constituait la force de la discipline astrale en la positionnant au cœur d’un projet éducationnel où l’étude des śāstra hindous devait se combiner à celle des sciences modernes. Alors que la plupart des universités créées en Inde par le gouvernement anglais au XIXe siècle avaient été des instruments du pouvoir colonial où l’on enseignait exclusivement la « Western knowledge », la BHU fut fondée en 1916 avec l’idée de créer une université où la pensée hindoue et les connaissances indiennes dans les différents domaines de l’art, de la littérature et des sciences pouvaient être promues dans le dialogue avec la tradition européenne (Renold 2005).

22 Dans ce cadre, l’enseignement du jyotiṣa s’intégrait parfaitement au projet de la nouvelle université conçu par Malaviya non seulement parce qu’il permettait d’établir un lien entre science moderne et tradition sanskrite, mais aussi en raison du caractère « pan-indien » de cette discipline dont les traités canoniques avaient été rédigés, transmis et utilisés dans le Nord comme dans le Sud de l’Inde et avaient fait l’objet d’une circulation transrégionale. Comme l’observe Christopher Bayly dans Empire and Information, les astrologues contribuent activement au processus de nationalisation des traditions à la période coloniale. En tant que véhicule de propagation de la « grande tradition » sanskrite aux dépens des « petites traditions » locales de divination et de nécromancie, la discipline astrale aurait ainsi contribué à l’émergence d’une « conscience nationale » (Bayly 1996 : 263).

23 Dans son projet initial de création de l’université, élaboré au début du XXe siècle, Pandit Malaviya préconise que le jyotiṣa soit l’un des enseignements principaux de la faculté d’études védiques (Vaidik College) et qu’un observatoire astronomique et astrologique soit rattaché au département afin de favoriser le dialogue entre tradition sanskrite et

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recherche scientifique25. Dans les premières années suivant la fondation de l’université, les cours de jyotiṣa étaient dispensés dans la faculté d’études religieuses (College of Theology) et dans celle d’études orientales (College of Oriental Learning). Si dans le premier ils faisaient partie de la formation en études sanskrites, dans le deuxième l’enseignement des jyotiḥśāstra était mené de manière conjointe avec celui de l’astronomie et des mathématiques modernes. Malgré les efforts de Pandit Malaviya pour réunir les sciences sanskrites et modernes au sein d’une même formation, le département d’études orientales, en raison du manque d’étudiants, fusionna avec celui d’études religieuses pour devenir celle qui est aujourd’hui la faculté d’études religieuses et orientales26. Depuis, aucun diplôme universitaire ne relie l’enseignement du jyotiṣa à celui des disciplines scientifiques relevant des départements de physique, mathématiques ou chimie. Cependant, le lien entre la discipline astrale et la science moderne ne cesse d’être affirmé, dans les discours et les publications des chercheurs universitaires, tout comme dans les politiques gouvernementales récemment promues par le parti nationaliste hindou.

L’astrologie en tant que « science védique »

24 Les débats concernant la nature du jyotiṣa et sa légitimité dans le cadre des institutions universitaires, loin d’appartenir à un lointain passé colonial, ont repris le dessus de la scène publique indienne ces dernières années lorsque, au début des années 2000, le gouvernement indien guidé par le Bharatiya Janata Party (BJP), le parti nationaliste hindou, lance une campagne visant à promouvoir la création de départements de « Vedic astrology » ou jyotir vigyan (jyotirvijñān, « science astrale ») dans les universités indiennes27. En 2001, la University Grant Commission (UGC) – l’agence nationale chargée des fonds pour la recherche et l’enseignement, émanant du ministère de l’éducation – publie un appel visant à instituer des cours d’astrologie védique au niveau « under-graduate, graduate, post-graduate and research level ». Les départements créés comprennent un professeur, un reader, deux lecturers, un bibliothécaire et un informaticien, ainsi qu’une bibliothèque, un observatoire, et un « Computer Lab & Horoscope Bank »28. Les cours d’astrologie védique s’adressent à « students, teachers, professionals from modern streams like doctors, architects, marketing, financial, economic and political analysts, etc »29. D’après le document publié par l’UGC, la création de ces départements répond à l’« urgente nécessité » de revitaliser cette ancienne science : « there is an urgent need to rejuvenate the science of Vedic Astrology in India, to allow this scientific knowledge to reach the society at large, and to provide opportunities to get this important science even exported to the world. »

25 Après la publication du décret de financement, quarante et une universités se portent candidates dans seize états indiens, et dix-neuf reçoivent les fonds30. Une vive polémique enflamme la classe politique et l’opinion publique indiennes : le décret de l’UGC est condamné par beaucoup en tant qu’expression de la volonté du BJP, le parti nationaliste hindou au pouvoir, de « safraniser », rendre couleur safran, c’est-à-dire « hindouiser », le système éducatif public31. L’opposition argumente en outre que, dans un pays où plus du 40 % de la population est illettrée et où les ressources financières des universités n’arrivent même pas à garantir l’électricité dans les salles de classe, le gouvernement devrait avoir d’autres priorités que celle de financer la création de départements d’astrologie védique32. Quelques scientifiques et intellectuels de renom

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s’adressent à la Cour Suprême indienne pour demander la suspension du décret de l’UGC. Ils contestent la légitimité de cette loi de finance qui, définissant l’astrologie védique comme une « connaissance scientifique », contreviendrait à l’article 51A de la constitution indienne, selon lequel l’état se doit promouvoir un « tempérament scientifique » chez les citoyens. Malgré ce mouvement de protestation, en 2004 la cour suprême émet un jugement en faveur de l’UGC, en statuant que : « the teaching of ‘Jyotir Vigyan’ can under no circumstances be equated with teaching of any particular religion […] ; the courts are not expert in academic matters and it is not for them to decide as to what course should be taught in university and what should be their curriculum33. » Sans vouloir entrer ultérieurement dans le débat politique soulevé par la question, notre propos est ici de montrer la manière dont cette loi de finance structure son argument afin de renforcer la légitimité de l’astrologie en tant que discipline universitaire.

26 Notons tout d’abord que, si à l’époque coloniale le jyotiṣa avait été intégré au système éducatif gouvernemental en tant que branche du savoir brahmanique, il est maintenant caractérisé en tant que « connaissance scientifique ». À ce propos, on constate un glissement terminologique de śāstra (« traité », « théorie », « savoir ») à vijñān, l’appellatif traditionnel de jyotiḥśāstra étant remplacé par celui de jyotir vigyan (jyotirvijñān). Ce choix implique un changement épistémologique assez radical car, comme l’observe Pollock (1985), alors que le concept de śāstra accorde une priorité absolue à la théorie sur la pratique, aux règles sur leur application pratique, le concept de vijñān désigne une connaissance exacte basée sur l’observation empirique. L’impact de cette nouvelle terminologie se fait ressentir également au niveau des orientations données à la recherche académique. Les enseignants et chercheurs des départements d’astrologie des universités de Bénarès non seulement se mobilisent pour défendre la légitimité des nouveaux départements d’astrologie financés par l’UGC34, mais fondent également en 2003 la Jyotiṣa vijñān samiti, l’« Académie de la science astrale », ainsi que la revue annuelle Jyotiṣa vaijñānikī « Le jyotiṣa scientifique », les deux initiatives ayant pour but l’avancement et la diffusion des études « scientifiques » menées par les astrologues dans le cadre académique et, en particulier, nous le verrons, dans le domaine médical.

27 Bien que décrite comme une connaissance scientifique, la discipline enseignée dans les nouveaux départements n’est pas pour autant un savoir séculier. L’astrologie dont le parti nationaliste hindou veut encourager l’enseignement est en effet définie comme « védique ». Cet attribut a une valeur idéologique très marquée et mérite d’être examiné. Il qualifie de manière inexacte le savoir astral enseigné de nos jours dans les universités car, nous l’avons vu, le jyotiṣa de la période védique est un savoir fondamentalement astronomique qui ne fait mention ni des planètes, ni des signes zodiacaux, ni des horoscopes, ni d’autres techniques divinatoires utilisées par les astrologues de nos jours. Le choix de cet attribut doit donc plutôt être situé dans le contexte de la campagne pour la promotion des « sciences védiques » – incluant également les « mathématiques védiques » – menée par la droite nationaliste hindoue, visant à faire de l’hindouisme une religion ayant un fondement scientifique et étant le symbole de l’identité nationale indienne.

28 Néanmoins, pour comprendre le revivalisme de l’astrologie védique, il faut également considérer l’engouement des pays occidentaux pour la « spiritualité orientale » et l’impact des nouvelles technologies sur la diffusion des savoirs. Si l’on examine la

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littérature de vulgarisation astrologique publiée ces dernières décennies, on constate que l’appellatif « Vedic Astrology » s’est d’abord imposé dans les pays anglo-saxons à partir des années 1990, tout en remplaçant progressivement les appellatifs « Hindu astrology » ou « Indian astrology » qui étaient utilisés auparavant. Depuis, le nombre de manuels d’astrologie védique, chez des éditeurs indiens, américains et anglais, ne cesse d’augmenter, de même que les sites Internet commercialisant la vente d’horoscopes, de consultations en ligne, de remèdes, ou de voyages en Inde au nom de l’astrologie védique sont en prolifération constante. La diaspora indienne d’une part, la vague de la « New Age » et des nouveaux mouvements religieux qui traversent les pays occidentaux, avec leur quête de spiritualité et de mysticisme de l’autre, font de l’astrologie védique un marché économique extrêmement important. L’adjectif « védique » semble satisfaire aussi bien les attentes des hindous, pour qui les Véda représentent l’essence même de l’hindouisme et qui retrouvent donc dans l’astrologie védique une attache identitaire, que celles des consommateurs d’astrologie occidentaux pour qui l’attribut « védique » est synonyme de « spirituel », « ancien », « inspiré » ou « ésotérique ».

29 Le décret de l’UGC formule par ailleurs explicitement l’idée selon laquelle les départements d’astrologie védique répondent à la « nécessité pressante […] d’offrir à cette importante science l’opportunité d’être exportée dans le monde » et le président de l’UGC, Hari Gautam, ancien vice-chancelier de la Banaras Hindu University, a affirmé dans une interview télévisée que ces départements ont pour but de former des « personnes certifiées » (certified persons) dans le domaine de l’astrologie védique et du karmakāṇḍ (savoir rituel brahmanique) afin de fournir des opportunités d’emploi à l’étranger. À l’instar des prêtres formés dans les écoles agamiques du Tamil Nadu, étudiés par Fuller (2003), les titulaires de diplômes en astrologie védique peuvent ainsi satisfaire la demande en matière d’horoscopes et de consultations de la diaspora indienne aux États-Unis et en Angleterre.

30 Nous avons vu jusqu’ici que la légitimité de l’astrologie en tant qu’enseignement universitaire est affirmée à travers un double discours : d’une part, l’autorité de la science est invoquée afin de garantir la modernité et la validité universelle du savoir astrologique, de l’autre, la référence aux Véda garantit du caractère autochtone, éternel et authentiquement hindou de cette discipline. L’astrologie est donc présentée comme un savoir qui est à la fois divin et révélé, puisque « védique », et laïque et pragmatique, car destiné à rendre service à des docteurs, des architectes ainsi qu’à des analystes financiers et conseillers politiques ; il est à la fois archaïque, car rédigé dans des textes anciens, et au pas avec les temps, comme l’atteste la volonté d’équiper les départements d’un laboratoire informatisé et d’une horoscope bank. Dans le discours tenu par les représentants du BJP l’astrologie est censée concilier « religion » et « science », « tradition » et « modernité », « spiritualité » et « technologie ». Nous allons maintenant voir comment ces principes se traduisent dans la pratique des chercheurs et enseignants des départements de jyotiṣa des universités de Bénarès.

La vie de département

31 Les départements de jyotiṣa de la BHU et de la SSU remplissent trois fonctions fondamentales : la formation des étudiants, l’avancement de la recherche et la publication annuelle d’un almanach. Cette contribution n’abordera que les deux

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premiers aspects car ils concernent plus directement la question de la transmission. Chaque établissement compte environ quatre-vingts étudiants partagés entre licence, master et doctorat35. Les enseignements de licence et master se divisent en deux spécialités – mathématico-astronomique (gaṇita) et astrologico-divinatoire (phalita) – qui concourent de manière paritaire à l’obtention du diplôme (les doctorants peuvent en revanche se spécialiser dans l’une ou l’autre branche). Les cours sont en hindi, mais portent sur des traités sanskrits qui font partie du corpus canonique de la littérature astrale (jyotiḥśāstra) et la maîtrise du sanskrit est donc indispensable. Bien que l’inscription soit nominalement ouverte à tout le monde, les étudiants sont tous, à quelques exceptions près, mâles et brahmanes, et le personnel enseignant est composé exclusivement d’hommes brahmanes36. La composition sociale des étudiants de littérature (sāhitya), logique (nyāyā), grammaire (vyākaraṇa) ou dharmaśāstra (traités normatifs) – les autres départements d’études sanskrites – est comparativement plus mélangée, incluant plusieurs femmes et étudiants non-brahmanes. Interrogés sur cette question, quelques étudiants en jyotiṣa de la BHU et de la SSU expliquent que, même si le seul département de la faculté d’études sanskrites qui soit formellement réservé aux hommes brahmanes est celui d’études védiques, le cursus astrologique « est considéré comme étant interdit » (varjit mānā gayā hai) aux femmes et aux non-brahmanes. Pourquoi ces critères de sélection sociale – qu’ils soient formellement établis ou substantiellement respectés – ne s’appliquent-ils qu’aux deux départements de jyotiṣa et d’études védiques ? Qu’est-ce qui distingue ces deux disciplines des autres sciences sanskrites ? La réponse à ces questions ne doit pas être recherchée au niveau des hiérarchies entre les sciences, en attribuant un plus haut degré de pureté, de sophistication ou d’orthodoxie aux disciplines réservées aux mâles brahmanes. Plutôt que la nature du savoir concerné, c’est l’identité professionnelle liée à ces formations qui détermine la composition sociale des étudiants. Alors que les cursus en grammaire, philosophie, littérature ou autres disciplines savantes n’ouvrent d’autres perspectives professionnelles que l’enseignement, les études védiques et l’astrologie préparent à un métier, celui de prêtre et d’astrologue, qui est pratiqué, selon les conventions établies, par les hommes brahmanes.

32 Une distinction doit toutefois être établie entre les études védiques et le jyotiṣa. Alors que l’office de prêtre (purohit), selon les textes tout comme selon la pratique courante, ne peut pas être accompli par une femme ou un non-brahmane, les normes concernant le métier d’astrologue deviennent de nos jours de moins en moins strictes. Bien que rares à Bénarès, de plus en plus de non-brahmanes et de femmes exercent de nos jours ce métier dans les métropoles indiennes. L’accès aux diplômes académiques en jyotiṣa reste cependant substantiellement limité aux hommes brahmanes en raison du niveau de sanskrit requis, qui doit être avancé, et de la « pollution » traditionnellement associée au métier d’astrologue, la réputation d’une jeune fille s’engageant dans ce genre d’études pouvant être compromise.

33 L’enseignement universitaire ne remplace pas les méthodes traditionnelles d’apprentissage de la discipline, mais vient plutôt s’ajouter à celles-ci pour donner forme à un système mixte. En ce qui concerne l’accès à la formation, comme nous venons de voir, les critères traditionnels basés sur la caste et sur le genre côtoient les critères d’admission académique basés sur une inscription administrative et sur la validation des compétences acquises. Tout pareillement, au niveau des méthodes de formation, la participation aux cours et aux examens coexiste avec un système éducatif

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basé sur la « relation personnelle de maître à élève » (guru-śiṣya sambandh). Les étudiants s’adressent à leurs enseignants en les appelant gurujī (« Monsieur le maître ») ou paṇḍitjī (« Monsieur le pandit ») et leur touchent les pieds en signe de respect. Ils se rendent régulièrement non seulement dans les salles de cours, mais aussi dans la maison de leurs maîtres où ils poursuivent leur formation théorique, assistent aux consultations astrologiques et participent parfois aux tâches ménagères (sevā). Grâce à l’observation des consultations, l’étudiant apprend comment appliquer les règles abstraites formulées dans les textes aux cas individuels soumis par les clients, comment établir un diagnostic et identifier les remèdes appropriés pour la résolution des problèmes concrets.

34 La formation académique et celle auprès du maître sont considérées comme complémentaires et également nécessaires. Alors que la première privilégie l’apprentissage textuel et fournit des titres certifiant de manière objective l’acquisition des compétences théoriques, la deuxième apporte aux étudiants l’expérience nécessaire pour l’exercice du métier au quotidien. Étudiants et enseignants conviennent néanmoins pour dire que l’apprentissage sérieux auprès d’un guru garantit une formation plus complète que celle universitaire car il permet d’assimiler aussi bien la théorie que la pratique, alors que les cours universitaires ne garantissent que l’enseignement des doctrines. Cependant, en raison de la menace représentée par le nombre toujours croissant de praticiens qui s’improvisent astrologues et ouvrent un cabinet en ville sans disposer des compétences nécessaires, la formation académique apparaît aujourd’hui comme un moyen essentiel pour certifier de la formation d’un spécialiste et protéger ainsi la profession astrologique du charlatanisme.

35 Les diplômes universitaires sont appréciés par les étudiants en ce qu’ils ouvrent un éventail de perspectives professionnelles plus ample que celui offert par l’apprentissage personnel auprès d’un guru. En particulier, ils préparent aux emplois gouvernementaux, le fonctionnariat étant une aspiration largement partagée par les jeunes brahmanes. Les diplômés ou docteurs ont accès à des postes d’enseignants dans les lycées tout comme dans les universités, ou bien ils peuvent obtenir les très convoités postes de dharm guru (ou religious teacher) dans l’armée. Dans le domaine du privé, les titres universitaires s’avèrent être utiles pour les jeunes astrologues désirant se rendre à l’étranger – et nous en avons rencontrés plusieurs – car la certification des compétences est requise non seulement par les communautés hindoues de la diaspora indienne, mais également par des organisations spirituelles internationales qui offrent des enseignements et des prestations en « astrologie védique ». Les écoles et les universités de la fondation Maharishi Mahesh Yogi, par exemple, implantées partout dans le monde, recrutent régulièrement des astrologues au sein des programmes en « Jyotish and yagya » (ou « Vedic astrology and Vedic ritual ») et certains anciens élèves de la BHU ont été intégrés dans ces structures. En Inde, bien que la perspective professionnelle la plus commune soit celle d’une activité indépendante exercée dans un cabinet, certains diplômés ont trouvé un emploi auprès de firmes demandant une expertise en matière d’astrologie et de vāstuśāstra (organisation propice de l’espace de travail), ou bien auprès d’entreprises de téléphonie mobile vendant à leur clients des prestations astrologiques. D’autres ont crée un site Internet pour fournir des horoscopes et des consultations on-line, ou bien ont installé leur cabinet dans un hôtel de luxe ou dans un centre commercial. D’après le directeur du département de Jyotiṣa de la BHU, en raison de ces opportunités professionnelles toujours croissantes et diversifiées, « aucun diplômé en jyotiṣa des dernières années n’est aujourd’hui sans

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emploi ». Bien que nous n’ayons pas pu vérifier statistiquement la validité de cette information, les étudiants semblent partager cet optimisme face à leur avenir professionnel et les diplômés que nous avons rencontrés ont un poste d’enseignement ou exercent une activité astrologique à temps plein.

Nous avons toujours été modernes

36 En dehors de l’enseignement, les astrologues du département se consacrent également à la recherche. Non seulement ils publient régulièrement des éditions avec commentaire des traités classiques dans les différentes branches des jyotiḥśāstra, mais abordent des thèmes d’actualité de la société indienne, tout en organisant des colloques en en publiant les résultats de leurs travaux dans des numéros de revues ou des volumes collectifs. Parmi les thèmes traités ces dernières années par le département de jyotiṣa de la BHU, plus actif à cet égard que celui de la SSU, on trouve par exemple une enquête sur la stabilité des mariages et les facteurs de stérilité/fertilité, adultère/ fidélité, divorce/veuvage, etc. Les maladies telles que le cancer, le diabète, le sida ou les pathologies cardio-vasculaires constituent un domaine de recherche en plein essor. L’« astrologie médicale » (cikitsakīya jyotiṣa) est devenue, dans les dernières décennies, un champ d’investigation privilégié et certaines universités indiennes dispensent des diplômes de spécialisation en ce domaine. Selon l’ancien directeur du département de jyotiṣa de la BHU, Ram Chandra Pandey, le but de la recherche iatro-astrologique n’est pas de remplacer la recherche médicale, mais d’offrir à cette dernière des outils complémentaires, favorisant la prévention et le traitement des maladies incurables : « alors que la médecine ne peut diagnostiquer une maladie que lorsqu’elle se manifeste, la science astrale est capable de prédire à l’avance le moment où elle se manifestera » (Pandey 2003 : 8). Si la biomédecine s’attache à étudier comment les maladies évoluent, se développent et se transmettent, la recherche astrologique offrirait des instruments pour comprendre quand la maladie est susceptible de frapper et qui sont les individus prédisposés à en souffrir, selon les conditions de naissance. Dans les dernières années, le département de jyotiṣa de la BHU ainsi que celui du Lal Bahadur Shastri Rashtriya Vidyapeetha de Delhi ont obtenu des financements de la University Grants Commission (UGC) pour la réalisation de projets de recherche pluriannuels en astrologie médicale, et en particulier pour l’étude des maladies cancéreuses et cardiaques. De nombreuses publications concernant le rapport entre astrologie et maladies ont vu le jour ces dernières années, dans le domaine académique tout comme dans la littérature de vulgarisation37. À partir des travaux menés par les chercheurs universitaires dans ce domaine, nous allons voir comment la théorie décrite dans les traités classiques d’astrologie est reformulée de nos jours afin d’être adaptée à de nouvelles exigences sociales et à de nouveaux critères de validité.

37 En premier lieu, il est important de souligner que, dans la littérature sanskrite, l’« astrologie médicale » n’existe pas en tant que domaine spécialisé du savoir astral. Dans les jyotiḥśāstra, les réflexions sur le rapport entre le corps, la santé, les maladies et les phénomènes célestes ne forment pas une branche, ne font pas l’objet d’un corpus textuel différencié ou de sections séparées, mais se trouvent éparpillées dans des nombreux passages des traités d’horoscopie38. Les pathologies physiques ne sont pas traitées comme une catégorie distincte par rapport à d’autres types de souffrances pouvant survenir au cours de l’existence, telles que les deuils, les accidents, la pauvreté,

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la faim, l’exil, le déshonneur, la dépendance aux drogues ou la perte de statut et de pouvoir ; les prédictions concernant les unes et les autres se mélangent sans solution de continuité. Les astrologues contemporains, en isolant la recherche sur les maladies de celle concernant d’autres formes de malheur, rendent ainsi la théorie de l’horoscope conforme au modèle épistémologique de la biomédecine, selon lequel les pathologies physiques constituent un domaine d’investigation qui doit être considéré séparément d’autres événements de l’existence humaine. Du point de vue étiologique également, les traités anciens n’établissent pas de distinction nette entre causes naturelles (liées par exemple à une dysfonction des trois humeurs), causes surnaturelles (attaques des esprits néfastes, des dieux ou de leurs serviteurs, malédictions, etc.) et causes qu’on pourrait qualifier de « sociales » (pauvreté, conflits avec des ennemis, attaques par des gens d’autres castes), les configurations planétaires indiquant (ou engendrant) toutes sortes d’agents pathologiques. Dans les travaux académiques contemporains dans le domaine de l’astrologie médicale, en revanche, seules les causes naturelles sont prises en compte et les liens avec la théorie ayurvédique sont soulignés (Sharma 2008 ; Jha 2008).

38 La recherche en « astrologie médicale » consiste en premier lieu à repérer les passages qui, dans les anciens traités d’horoscopie, décrivent le rapport entre mouvements célestes et physiologie humaine, selon le modèle mélothésique. Ces passages font l’objet de plusieurs types de traitements visant à actualiser, à la fois du point de vue linguistique, conceptuel et méthodologique, la connaissance des anciens auteurs. Les śloka sanskrits non seulement sont traduits, paraphrasés ou commentés en hindi, mais peuvent aussi être reconfigurés sous la forme de tableaux, de graphiques ou de schémas39. La connaissance discursive et poétique des anciens prend ainsi la forme, dans les publications académiques récentes, d’une séquence ordonnée, systématique et objective de données, la valeur mnémotechnique des vers étant remplacée par l’efficacité visuelle des représentations graphiques.

39 Un deuxième type de traitement des textes anciens est d’ordre interprétatif et consiste à effectuer une exégèse « biomédicale » des traités astrologiques. Les chercheurs mènent un travail herméneutique consistant à faire ressortir le sens biomédical des śloka sanskrits composés par les auteurs anciens 40. En ce qui concerne la recherche astrologique sur le cancer, par exemple, les chercheurs identifient les passages où des termes sanskrits polysémiques sont susceptibles de désigner des pathologies tumorales. Ainsi, ils étudient les configurations astrales associées à des pathologies portant le nom d’arbuda (excroissance, polype), de gulma (enflure glandulaire), de vraṇa (lésion, plaie, ulcère, abcès, tumeur), de tāpagaṇḍa (tuméfaction douloureuse), de vidradhi (abcès), et de sphoṭa (excroissance, tumeur) (Tripathi 2008, Upadhyay 2008 et Devduta 2006). Sur la base du système de correspondances planétaires, les chercheurs peuvent mener des études spécialisées sur les configurations astrales responsables de certaines formes topiques de la maladie, telles que le cancer de l’utérus (garbhāśay-kainsar) (Chowbe 2008), le cancer de l’estomac (udar-kainsar), du sang (rakta-kainsar), du cerveau (mastiṣka-kainsar), « des os » (asthi-kainsar) ou « de la gorge » (gale kā kainsar) (Mishra 2008). Bien que cette interprétation biomédicale des textes puisse modifier profondément la signification des passages sanskrits, selon les chercheurs concernés elle ne compromet nullement l’autorité des traités brahmaniques et se situe plutôt dans la continuité des formes traditionnelles de savoir. Elle peut être en effet regardée, du

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point de vue méthodologique, comme une forme contemporaine du « commentaire » ( ṭīkā, bhāṣya, vyākhyā), genre très courant dans la littérature sanskrite.

40 Un changement de type méthodologique est opéré dans certains projets de recherche visant à soumettre les règles théoriques formulées dans les traités anciens à une analyse de type expérimental. L’influence de certaines configurations planétaires sur la santé est ainsi examinée à travers l’observation de cas empiriques. Dans son étude « Diagnostic astrologique du cancer du sein » (stan-kainsar kā jyotiḥśāstra nidān), le Dr Tripathi, lecturer dans le département de jyotiṣa de la BHU, analyse et compare, par exemple, les horoscopes de trente femmes souffrant du cancer du sein dans le but d’identifier les combinaisons planétaires susceptibles d’engendrer ce genre de pathologie (Tripathi 2008)41. Afin de réunir un nombre statistiquement significatif d’horoscopes, les chercheurs ont parfois recours aux nouvelles technologies de la communication, comme l’atteste l’exemple cité en exergue à cette contribution, où les données statistiques sont recueillies à travers un formulaire en ligne. Dans cette même perspective méthodologique, le prof. Nagendra Pandey, du département de jyotiṣa de la SSU, collabore avec le Lal Bahadur Shastri Sanskrit Rashtriya Vidyapeetha de Delhi à un programme de recherche ayant pour but d’analyser une base de données d’un millier d’horoscopes de patients pris en charges dans les hôpitaux de Delhi et souffrant de maladies cardio-vasculaires, de diabète et de troubles psychiques. Outre l’analyse des configurations astrales, les chercheurs font tester aux patients titulaires des horoscopes des remèdes astrologiques à base de pierres précieuses et de formules (mantra) afin d’évaluer, par des études statistiques, l’efficacité « clinique » de ces remèdes42.

41 L’ensemble des procédés analytiques mis en place par les chercheurs universitaires dans le domaine de l’astrologie médicale – la création d’un domaine spécialisé, les dispositifs graphiques, l’exégèse biomédicale des termes sanskrits, la méthode empirique – visent à rendre la connaissance brahmanique conforme aux catégories et aux méthodes « scientifiques », sans pour autant remettre en question l’autorité des traités sanskrits. Ils font ainsi de l’astrologie un lieu de cohabitation privilégié entre vérité brahmanique et connaissance scientifique43.

Conclusion

42 Nous avons vu que l’enseignement de l’astrologie dans le cadre des universités suscite des questionnements non seulement auprès de l’opinion publique ou des instances de pouvoir qui en contestent ou en affirment la légitimité, mais aussi auprès des spécialistes mêmes de ce savoir, qui sont amenés à interroger et à définir la nature du savoir qu’ils détiennent. Bien que la dialectique entre une transmission fidèle à l’autorité des maîtres et l’ouverture à des innovations conceptuelles et méthodologiques caractérise le processus de transmission du jyotiṣa depuis ses origines – en raison des échanges continuels avec les sciences astrales venues d’ailleurs –, l’enseignement de la discipline astrale dans les universités, et la confrontation plus ou moins directe avec la science moderne en tant que paradigme de rationalité dominant, engendre des questionnements de nature réflexive sur le rapport entre tradition et innovation. Les spécialistes s’attachent à définir la nature de l’enseignement qu’ils dispensent tout en le positionnant dans le paysage des sciences modernes et en l’adaptant aux transformations de la société dans laquelle ils vivent. L’astrologie semble

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ainsi survivre en Inde au XXIe siècle en tant que langage permettant de faire dialoguer la tradition brahmanique et la science moderne. Les activités des départements d’astrologie nous montrent cependant une transmission in fieri, dont nous ne connaissons pas l’aboutissement. Ce sont les limites d’un regard ethnologique qui n’a pas le privilège de connaître les effets sur le long terme de ce qu’on observe aujourd’hui. Nous pouvons alors nous demander ce qu’il adviendra de ces départements dans une vingtaine d’années et si la transmission à la postérité aura réussi. Tout en laissant aux astrologues la faculté de prévoir, cette étude a voulu montrer comment la transmission consiste non seulement à préserver une tradition, mais aussi et surtout à l’adapter aux transformations sociales, politiques et idéologiques de la société.

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NOTES

1. Cette contribution a bénéficié de la relecture de deux rapporteurs, Nalini Balbir et Agathe Keller, que je tiens à remercier vivement pour leurs remarques. 2. Notre approche n’est cependant pas celle d’une philologue. Pour une discussion des questions que soulève l’étude philologique des processus de transmission textuelle dans l’Inde classique, voir Colas et Gerschheimer 2009. À propos de l’étude de la transmission en anthropologie, voir Berliner 2010. 3. D’après mon enquête, ainsi que d’après les estimations fournies par Pugh 1983, il y aurait entre trois cents et quatre cents astrologues à Bénarès, pour la plupart hommes et brahmanes. Lors des terrains de recherche menés à Bénarès entre 1995 et 2008, j’ai eu l’occasion de rencontrer une quarantaine de praticiens et de suivre de près le travail d’une douzaine d’entre eux, choisis en fonction de leur réputation et du flux continu et régulier de clients venant remplir leurs maisons ou cabinets. 4. Dans le système d’éducation sanskrite, ces diplômes correspondent aux titres de śāstrī (licence), ācārya (master), et vidyāvāridhi (doctorat). 5. Dédié à la mémoire de Sudhākar Dvivedī, illustre astronome du XIXe siècle et professeur du Sanskrit College de Bénarès, l’observatoire a été créé dans l’idée de donner une nouvelle vie à l’observatoire Man Singh, aujourd’hui privé de toute fonction scientifique (Sharma 1992). La construction du nouvel observatoire fait partie d’un plus vaste projet de réhabilitation des anciens jantar-mantar de l’époque de Sawāī Jai Singh. Le promoteur de ce projet, l’astrologue et chercheur Kalyanadatta Sharma (Singh et Sharma 1978 ; Sharma 1992), fit en effet construire, à partir des années 1980, des observatoires en pierre également dans les villes de Haridwar, Delhi et Ayodha, ainsi que sur les collines aux alentours de Jaipur (je remercie Ch. Minkowski et S. R. Sarma de m’avoir transmis ces informations concernant les autres observatoires bâtis par K. Sharma). 6. À propos du Jyotiṣa-vedāṅga ou Vedāṅga-jyotiṣa, sa datation et ses différentes éditions, voir Kuppanna Sastry et Sarma 1985, ainsi que Pingree 1981 : 9-10 et Plofker 2009 : 35-40.

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7. Il existe deux principales recensions du Jyotiṣa-vedāṅga : l’Ārca-jyotiṣa ou R̥g-jyotiṣa-vedāṅga (RJV), de 36 vers, qui appartient au R̥gveda et est attribuée à Lagadha (ou Śuci reprenant Lagadha) ; le Yājuṣa-jyotiṣa-vedāṅga (YJV), de 44 vers, probablement plus tardive et appartenant au Yajurveda. Le passage cité correspond à RJV 3 et YJV 2. 8. Ainsi, le Yavana-jātaka, « Horoscopie (jātaka) des Grecs », composé en 149/150 par Yavaneśvara (« le Seigneur des Grecs ») à la cour de Ujjain (Ujjayinī), est la traduction d’un traité grec rédigé en Égypte au début du deuxième siècle. Bien que le traité de Yavaneśvara ne nous soit pas parvenu, nous disposons de sa version versifiée et adaptée, le Yavana-jātaka de Sphujidhvaja, composée en 269/270 (Pingree 1978). Un troisième texte, attribué à Satya et cité par la postérité, a été perdu. 9. Dans les traités d’horoscopie sanskrits, l’emprunt de concepts étrangers se fait selon trois modalités : a) par transcription phonétique ; b) par traduction littéraire ; c) par traduction « analogique ». Ainsi, dans le cas du grec, nous avons par exemple : a) drekāṇa, les décans, du grec δεκανός ; b) kumbha, « verseau », du grec υδροχόος ; et c) graha, « saisisseur », qui remplace πλανήτης, « errant ». Dans le cas c), les auteurs des traités sanskrits ont cherché dans la culture locale des concepts correspondants à ceux décrits dans les traités grecs, tout en changeant la signification littéraire des mots. Les graha étaient en effet des puissances démoniaques, des agents de possession, déjà mentionnés dans l’épopée et dans la littérature ayurvédique et ont pris une signification astrologique dans les traités d’horoscopie. 10. Horā iti aho-rātra-vikalpam eke vāñchanti pūrva-apara-varṇa-lopāt/(Bṛhat-jātaka I, 3a). 11. Pour ce dernier aspect, voir Zimmermann 1981. 12. Ces deux démons de la mythologie hindoue viennent représenter, dans la théorie astrologique, les nœuds lunaires ascendant et descendant, correspondant aux points d’intersection entre l’orbite de la lune et le cercle de l’écliptique. 13. Pour une étude des techniques d’apprentissage et de transmission des savoirs mathématiques et astronomiques, voir Yano 2006. 14. Les astrologues continuent de nos jours à être consultés par les élites politiques, mais afin de prédire leur avenir individuel ou familial plutôt que celui du pays qu’elles dirigent. 15. La technique tājika, appliquée aussi bien à l’horoscopie natale (jātaka) qu’à l’astrologie des interrogations (praśna), est de nos jours considérée comme partie intégrante du jyotiṣa et est utilisée par les astrologues des différentes régions de l’Inde, notamment pour l’interprétation des « prévisions annuelles » (varṣaphala). À Bénarès, la formation universitaire en jyotiṣa prévoit l’étude du Tājika-nīlakaṇṭhī, un traité de tājika composé à Bénarès en 1587 par Nīlakaṇṭha. 16. De nos jours, l’identification de l’horoscope approprié se fait par impression du pouce de la main droite, mais l’ancienneté de cette technique ne semble pas être attestée (Gansten 2003). 17. À ce propos, voir les généalogies établies par Pingree 1981 : 125-127. 18. Bien que la renommée de la ville soit attestée déjà à l’époque prémoderne et soit amplement décrite dans la littérature puranique, les politiques éducatives du gouvernement britannique contribuent de manière fondamentale à alimenter et à amplifier le prestige brahmanique de Bénarès (Dalmia 1997). 19. Pour une histoire détaillée du Benares Sanskrit College (qui devint au XXe siècle la Sanskrit University), on renvoie aux études de Dalmia 1996, 1997 et surtout de Dodson 2002, 2007 ; pour la Banaras Hindu University, voir Dar et Somaskandan 1966 et Renold 2005. 20. Nicholls 1907 : 1. 21. À ce propos, bien connue est l’expérience pédagogique menée par l’officier colonial Wilkinson à Sehore (Maharashtra). Dans son école, fondée en 1839, les siddhānta (traités astronomiques) étaient enseignés dans un but propédeutique, afin de préparer les étudiants à l’apprentissage des concepts et des méthodes de la science moderne (Wilkinson 1834). À propos de cette expérience éducative, voir Sarma 1995-1996, Bayly 1996, Prakash 1999, Minkowski 2001 et Dodson 2007 ;

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pour une étude de la notion de « connaissance utile » dans les projets éducatifs menés par les Britanniques en Inde, voir Dodson 2002. 22. L’intéressante étude de M. Harrison, « From medical astrology to medical astronomy : sol- lunar and planetary theories of disease in British medicine, c. 1700-1850” (Harrison 2000) montre que l’attitude des Britanniques à l’égard de l’astrologie n’a pas toujours été de ferme condamnation. Bien au contraire, au XVIIIe siècle, les médecins britanniques installés en Inde portent un grand intérêt à l’astrologie médicale. Dans leurs recherches, l’influence des astres sur la santé, et en particulier du soleil et de la lune, est étudiée dans des termes compatibles avec la physique mécaniciste newtonienne. 23. Le texte qui a longtemps été considéré comme le « manifesto » des réformes menées par les Britanniques à partir des années 1830 est le célèbre « Minute on Indian Education » de T. B. Macaulay, publié en 1835, qui marque la victoire des politiques « Anglicistes » visant à remplacer, dans les écoles indiennes, l’usage des langues vernaculaires sanscrite, persane et arabe, par celui de l’anglais (à ce propos, voir Macaulay 1935). 24. Nous n’avons pas pu repérer les données historiques nous permettant d’établir si l’astrologie (phalita) fut réintroduite dans les programmes d’enseignement du Sanskrit Collège avant la transformation de ce dernier en université, en 1958. Des recherches ultérieures devraient être menées dans cette direction. En 1958 l’université s’appelait Vārānaseya Saṃskr̥ta Viśvavidyālaya et fut renommée Sampūrṇānanda Saṃskr̥ta Viśvavidyālaya en 1973, sous le U.P. University Act. 25. Voir Dar et Somaskandan 1966. Vaidik College est le nom donné initialement à celui qui deviendra ensuite le College of Theology. L’observatoire, malgré la volonté de Pandit Malviya, ne fut jamais construit. 26. Probablement découragés par l’absence de débouchés professionnels valorisant ce diplôme, les étudiants se tournaient de préférence soit vers les études sanskrites soit vers les diplômes en sciences modernes offerts par d’autres départements de l’université (Renold 2005). 27. Le texte du décret « Guidelines for Setting up Departments of Vedic Astrology in Universities Under the Purview of University Grants Commission » a été accessible pendant une dizaine d’années sur le site du ministère de l’éducation du gouvernement indien : http://education.nic.in/ circulars/astrologycurriculum.htm (page consultée le 26 juillet 2011). 28. En dehors du salaire du personnel (environ 20 000 roupies par mois pour un Professeur, 15 000 pour un Reader et 10 000 pour un Lecturer), la UGC attribue 400 000 roupies pour la bibliothèque, 600 000 roupies pour l’observatoire et 500 000 roupies pour le laboratoire informatique et la « Horoscope bank ». 29. Dans cette citation, comme dans les suivantes, les italiques sont ajoutés. 30. University Grants Commission, Annual Report 2003-2004 : 101. 31. M. M. Joshi, le ministre ayant promu cette loi de finance, est connu pour être un membre de la Rashtriya Swayamsevak Sangh (RSS), « Association des volontaires nationalistes », une frange extrémiste du parti nationaliste hindou. 32. Nous reprenons ici certains des arguments cités dans des articles parus dans le magazine Frontline, ainsi que dans les quotidiens The Hindu et Asia Times, entre le mois de mai et le mois de septembre 2001. Pour une analyse des arguments menés pour et contre ce projet de loi, voir Sundar 2002. Pour une théorisation du rapport entre nationalisme hindou et science, et pour une critique des approches postmodernes des science studies, voir Nanda 2003. 33. Supreme Court of India 2004. 34. La mobilisation des astrologues académiques de Bénarès est décrite dans un article publié dans le Times of India le 18 September 2001 (à un moment où le reste du monde semblait avoir d’autres préoccupations). Voici quelques extraits de cet article intitulé « Vedic scholars defend astrology » : « Scholars of Vedic Astrology have joined hands to convey to people, especially those who are opposing the introduction of the astrology in the University curriculum, that astrology is the basis of modern sciences. Prof. Ram Chandra Pandey, head of the Departement of

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Astrology, Banaras Hindu University, Prof. Uma Shankar Shukla, head of the Departement of Astrology, Sampurnanand Sanskrit University […] have come on a single platform to justify the introduction of the ancient subject in university curriculum. “The fact is that the astrology provides the very base to modern sciences” they said, adding that it was a matter of great concern that “jyotish”, the oldest science of the world, was being described as an unscientific subject without any proof. » (http://articles.timesofindia.indiatimes.com/2001-09-18/lucknow/ 27256282_1_astrology-vedic-university-curriculum, page consultée le 22/08/2011). 35. Selon les données publiées par la University Grants Commission, la SSU comptait pour l’année 2003-2004, vingt-trois étudiants inscrits en licence, quarante en master et dix-huit en doctorat. Selon les données fournies par le secrétariat de la BHU, le nombre d’étudiants inscrits en jyotiṣa dans cet établissement est similaire. Les départements font partie de la faculté d’études sanskrites dans le cas de la BHU et de la faculté de « Veda-vedāṅga » à l’université sanskrite. 36. Lors du terrain mené en 2005 et en 2008 parmi les étudiants et les enseignants des départements des deux universités, il n’y avait aucune femme préparant les diplômes de jyotiṣa. Nous avons cependant rencontré deux femmes à Bénarès qui étaient titulaires d’un master en jyotiṣa de la BHU, obtenu dans les années 1990. D’après les enseignants des départements il arrive très rarement – une fois tous les cinq ou six ans – qu’une femme prépare ce genre de diplôme. Il arrive plus souvent que des femmes assistent aux cours de jyotiṣa poussées par un intérêt personnel, sans pour autant être inscrites. 37. Voir, par exemple, les actes du colloque sur le cancer organisé par le département de jyotiṣa en mars 2007 (Jyotish department 2008), ainsi que Pandey 2003, K. K. Jha 2003, D. Jha 2006, Shastri 2006, Tiwari 2006. Pour la littérature de vulgarisation, voir, entre autres, Chaturvedi 2007 et Charak 1997. 38. Le seul traité qui, à notre connaissance, porte sur l’astrologie médicale en tant que domaine de recherche distinct est le Vīrasiṃhāvaloka de Rājavīrasiṃhatomara. Composé en Inde du Nord en 1383 (Meulenbeld 2000, IIA : 229-230), cet intéressant traité compare, maladie par maladie, les étiologies et la thérapeutique établies respectivement par la théorie astrologique, ayurvédique et du (basée sur le principe du karmavipāka, la maturation des actes accomplis dans les vies précédentes). 39. Voir, par exemple, Pandey 2003, Tiwari 2006 et Upadhyay 2008. 40. Pour une analyse des discours visant à rendre la théorie ayurvédique conforme à la biomédecine, dans les universités comme chez les praticiens contemporains, voir Langford 2002. 41. Le directeur du département de jyotiṣa de la BHU m’expliqua dans un entretien personnel que les trente horoscopes de femmes souffrant de cancer du sein avaient été envoyés aux chercheurs du département par les médecins du Tata Medical Institute de Mumbai. Je n’ai pas pu contre- vérifier cette information. 42. D’après un article publié le 6 septembre 2009 dans le Hindustan Times, ce projet d’astrologie médicale bénéficie d’un financement de 3 200 000 roupies de la part de la University Grants Commission, la plus haute instance gouvernementale en matière de politique universitaire (Mohapatra 2008). L’auteur de l’article, tout comme mon informateur le prof. Nagendra Pandey, précisent en outre que non seulement des astrologues, mais également des docteurs de l’AIIMS (All India Institute of Medical Science), ainsi que des hôpitaux Guru Teg Bahadur et Moolchand de Delhi ont été impliqués dans le projet. L’enquête dans cette direction mériterait d’être approfondie, mais l’implication du personnel médical dans ce projet de recherche ne devrait pas surprendre le lecteur. On note en effet par exemple que le directeur de l’University College of Medical Science de Delhi, le Dr S. Dwivedi, mentionne parmi les distinctions professionnelles obtenues en 2007 : « Invited speaker in National Symposium on Medical Astrology organized Sri Lal Bahadur Shastri Kendriya Sanskrit Vidyapeeth (Deemed University) on “Diabetes – Etiopathogenesis, Symptoms and Prevention”, 3-4 Nov 2007 » (source : http://www.ucms.ac.in/ d_medicine. htm, page consultée le 22 décembre 2009). En outre, l’auteur le plus populaire de

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livres de vulgarisation en astrologie médicale, le Dr K.S. Charak, est chirurgien à l’Indira Gandhi ESI Hospital. 43. La volonté d’affirmer une continuité entre les savoirs brahmanique et scientifique n’est cependant pas une prérogative des chercheurs astrologues, mais elle est partagée par de nombreux scientifiques académiques également. À Bénarès, non seulement les scientifiques consultent régulièrement les astrologues, mais sont eux-mêmes souvent personnellement impliqués dans des pratiques astrologiques.

RÉSUMÉS

Le jyotiṣa – savoir comprenant à la fois l’astronomie, l’astrologie et la divination – est une discipline enseignée aujourd’hui dans plusieurs universités indiennes. En conjuguant l’analyse de sources textuelles, de documents coloniaux et de matériaux ethnographiques, cette contribution interroge le processus de transmission de ce savoir à partir du cas des universités de Bénarès. Elle examine les modalités d’adaptation d’un savoir brahmanique qui pendant des siècles avait été transmis dans le cadre de la relation personnelle entre maître (guru) et disciple (śiṣya) aux institutions académiques, ainsi que les politiques gouvernementales et les enjeux idéologiques liés à la transmission de l’astrologie dans l’Inde contemporaine. Tout en examinant le rapport entre innovation et tradition dans la pratique et la transmission du jyotiṣa, cette étude s’attache à montrer que la science astrale sanskrite, par son statut épistémologique, par son rôle social et par son rapport à l’orthodoxie brahmanique, a fait l’objet de processus de transmission originaux, qui la distinguent fortement d’autres savoirs de la tradition sanskrite.

Several contemporary universities in India teach jyotiṣa, a Sanskrit knowledge system that includes astronomy, astrology and divination. Drawing on case studies from universities in Banaras and combining analyses of astrological literature, colonial documents and ethnographic materials, this contribution interrogates the processes through which jyotiṣa has been transmitted. It examines the modalities used to adapt Brahmanical knowledge, which for centuries was conveyed through the of a guru and pupil, to the academic institution. Furthermore, it probes the role of governmental policies and the ideological stakes involved in the transmission of jyotiṣa in contemporary India. By exploring the relationship between innovation and tradition in the practice and transmission of jyotiṣa, this study attempts to show that due to its epistemological status, social function, and relation to Brahmanical orthodoxy, Sanskrit astral science has undergone distinct processes of transmission that differentiate it from other Sanskrit learned traditions.

AUTEUR

CATERINA GUENZI Maître de conférences à l’École des Hautes Études en Sciences Sociales et membre du Centre d’études de l’Inde et de l’Asie du Sud (CEIAS). Ses recherches portent sur l’anthropologie des savoirs divinatoires dans le monde indien et combinent l’étude de matériaux ethnographiques et de sources textuelles, en sanskrit et en hindi.

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Elle a publié notamment : Avec S. D’Intino (dir.) (2012). Aux abords de la clairière. Études indiennes et comparées en l’honneur de Charles Malamoud. Brepols.(2013) Le Discours du destin. La pratique de l’astrologie à Bénarès. Éditions du CNRS, « Bibliothèque de l’anthropologie ».

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L’horoscope perdu des devins du Cambodge The Lost Horoscope of Cambodia’s Astrologers

François Bizot

1 En pays khmer, l’être voit le jour, existe et se meut dans un monde fermé, intérieur, « utérin » ; c’est à la suite d’un regressus, d’un retour par les « états supramondains » (lokuttara = loka-udara), qu’il lui est donné de contempler les trois caractéristiques de l’existence, les quatre Chemins, les quatre Fruits, le Nibbāna1. Depuis fort longtemps les Hindus affirment que l’embryon a connaissance de l’acte bon et mauvais, contemple l’impérissable, pense à la syllabe OM et se souvient de sa naissance précédente.

2 Ainsi, les opinions ayant trait à l’au-delà, à la mort, à la vie de l’être transmigrant, sont communément théorisées, sinon sur la base d’une symbolique obstétrique nécessairement imagée et précise – comme c’est le cas par exemple pour les rites obligatoires de la vie ordinaire (naissance, puberté, ordination, mariage, funérailles) –, en se référant à l’idée d’une scène dramatique globale conçue comme une matrice. C’est par cet interstice spatial et temporel où se confondent secrètement les virtualités de la vie et les modalités latentes de tous les possibles, là où s’immisce l’existence embryonnaire, que se tisse, selon des signes établis par les dieux, la trame des destinées humaines. Sont alors signifiants toute une série d’indices et de calculs grâce auxquels la tradition peut produire des interprétations magiques, une fois ceux-ci déchiffrés à l’aide d’une grille, en les rapportant le plus souvent aux signes avant-coureurs d’un événement édifiant, dérivé d’un Jātaka ou tiré d’un récit légendaire devenu système divinatoire2.

3 Cette conception de la marche des choses peut aussi bien remonter au vieux fond des croyances prénatales de l’Asie du Sud-Est qu’aux conceptions indiennes de la cosmologie traditionnelle. Entre-temps, elle est devenue intrinsèque à l’enseignement du bouddhisme, de ses règles, de ses correspondances, et perdure en marge des nombreuses façons de croire qui relient entre eux une grande partie des habitants de la péninsule indochinoise3.

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4 De ce fait, la divination est devenue un mode de connaissance complexe qui intervient à tous les niveaux ; sa fonction, ses procédés ne sont pas ceux d’un domaine de la pensée isolé et circonscrit, susceptible d’être extrapolé. Au contraire, il faut aborder les savoirs divinatoires comme le lieu privilégié des interactions qui existent – à la fois conceptuellement et matériellement – entre les domaines de la religion, du rituel, du culte des morts, des rites de guérison, etc.4. Les matériaux offerts par les pays de l’Asie du Sud-Est sont foisonnants à cet égard, aussi bien du point de vue des ressources textuelles que des pratiques. Non seulement astrologues, oracles et devins font partie de la collectivité des maîtres que consulte régulièrement l’ensemble des populations, mais leur savoir est utilisé par les moines au monastère, ainsi que par les spécialistes du culte – ācāry (ācariya), grū (guru), hora, guérisseurs, médiums, géomanciens – au village.

5 À cet égard le royaume est perçu comme un cœur vivant en même temps qu’un lieu sacré où le mont Meru se dresse au centre du zodiaque. C’est une allégorie du corps rénové de l’adepte, celui que le yogin (i.e. le Yogāvacar) a pour mission d’intégrer au cours de ses exercices, avec sa géographie, ses routes, ses points cardinaux, ses montagnes, ses étages célestes, ses planètes, ses dieux, ses démons, ses périls et ses refuges, à l’image de cette matrice où croît le « Figuier à cinq branches »5. Le monde n’est jamais qu’un vaste amphithéâtre ; le combat des forces du bien et du mal s’y étage, et son influence sur l’existence des êtres vivants s’y exerce par le biais des planètes avec lesquelles ces forces sont en relation de correspondance. Plus précisément, les devins du Cambodge ont colporté cette science en y rapportant de nombreux épisodes archétypes, tirés du Rāmāyaṇa indien, parce que les héros de la célèbre épopée, à la suite d’un transfert entre leurs exploits et les choses, sont sensés influer sur le destin des hommes.

6 Il faut savoir en effet que toute l’activité de l’adepte est tendue vers l’Éveil d’un « Joyau » ou « Globe de cristal » dont le siège se trouve dans l’ombilic. Il est précisé qu’au cours des exercices d’ascèse, l’esprit du Yogāvacar s’éprend du Joyau situé dans le vide au milieu du nombril et que le Joyau n’est autre que le Dhamma ou le Bouddha. Dans le Rāmaker (Rmk) – p. rāmaker (ti) « la gloire de Rām », du nom donné au Cambodge et en Thaïlande6 à la version locale du Rāmāyaṇa, cet élan du fidèle est métaphorisé par la conquête amoureuse de Nāṅ Setā.

7 La version complète du Rāmaker éditée au Cambodge et les études associées consacrées à ses sources et à sa dimension mystique7, montrent que la structure de l’œuvre, paradoxalement caractérisée par des interpolations originales, est une mise en scène de l’adepte bouddhiste dans son cheminement vers l’immortalité. Il ne s’agit peut-être pas à proprement dire d’une version « ésotérique » – la pensée symbolisée n’y est pas exprimée –, mais plutôt d’une lecture spéciale, d’une « appropriation » du vieux poème épique, modifié selon la perspective philosophique et didactique que prêtent les Cambodgiens à l’effort ascétique. Tout est mis en place autour d’une idée centrale et de son corrolaire : la quête de Nāṅ Setā, symbole de l’achèvement spirituel, et l’ascèse mise en œuvre pour y parvenir. Principe immatériel mais indestructible, la belle Setā (p. seta « blanc », « pur ») symbolise le véhicule d’immortalité, et l’on peut considérer que cela s’apparente aux croyances en un « soi » transmigrant. Pour être plus précis, si le « Joyau » est bien au singulier une sorte d’équivalent de l’ātman éternel et lumineux, au pluriel, les « Joyaux » sont les caractères de l’immortalité qui s’acquièrent virtuellement par l’initiation8. Ces caractères sont ceux d’un nouveau « corps » (kāya), élaboré à l’aide des lettres de la « doctrine » (dhamma) ; l’aboutissement en est le

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« Joyau », c’est-à-dire, pour employer un terme de la philosophie bouddhique : le « dhammakāya »9. Cette idée résume à elle seule l’Enseignement tel qu’il a été interprété chez les Khmers. C’est à partir de cela que s’est développée toute une symbolique relative aux initiations, et que l’on retrouve dans la divination. Ainsi, la formation de l’individu s’élaborant dans un ventre maternel, il n’est pas surprenant que s’y produisent également les conditions de son devenir ici-bas.

8 En pratique, il s’agit de maîtriser le processus par le façonnement d’un corps immaculé, le degré de pureté obtenu conditionnant la renaissance. S’il est entièrement débarrassé des souillures qui lient à l’existence, il conduit le disciple au Nibbāna ; s’il ne l’est que partiellement, celui-ci retourne à la vie mortelle, mais dans un état plus avancé sur la voie, ne comportant plus qu’un nombre limité de renaissances. Le devin représente Māhā Paṭṭān, le dieu instructeur qui est indispensable au voyage de l’être transmigrant. Dans le Rāmaker, celui-ci est personnifié par Bibhek, dont l’apport stratégique permet toujours à Braḥ Rām d’affronter victorieusement les épreuves faisant obstacle à son union avec Nāṅ Setā10. Sous cet angle la divination n’est rien d’autre qu’une initiation, en d’autres termes une méthode d’investigation. De même que le succès de l’effort ascétique repose sur l’importance du nissaya de chacun, c’est-à-dire des « protections », des « supports », des « aptitudes requises », qui résultent de la plus ou moins grande accumulation de mérites au cours des existences passées ; de même, ici-bas, l’oracle est rendu par l’examen des forces mises en présence au moment de la naissance. Le devin raccroche le devenir du sujet à la biographie des héros de l’épopée ; le Rāmaker devient ici l’histoire de tout le monde.

9 Ce court article n’a pas l’ambition de poser, même très succinctement, les jalons d’une ethnographie de la divination au Cambodge, et encore moins de relever les questionnements que ce champ d’étude peut soulever par rapport aux théorisations de l’anthropologie. En m’appuyant sur les textes et les matériaux ethnographiques que j’ai pu recueillir sur place (de 1965 à 2011), mon intention est de décrypter cette pratique divinatoire qui consiste à mettre en scène des personnages de l’histoire de Rām et de Setā. Ce faisant, contrairement à ce qu’on pouvait attendre, je montre que le système des signes et des aphorismes utilisés ne restituait pas la version adaptée au modèle cambodgien, mais que, le plus fidèlement possible, et probablement depuis Angkor, les devins s’étaient attachés à transmettre le poème tel qu’ils l’avaient reçu, en partant de sa composition primitive.

10 Les Cambodgiens ont un calendrier luni-solaire, à la fois basé sur le mouvement de la lune et corrigé en accord avec l’année solaire, mais ils ne tiennent compte couramment que des lunaisons sur lesquelles se fonde le calendrier religieux. Celles-ci portent des noms d’origine sanskrite, et sont désignées par un chiffre qui fait commencer l’année au mois de maksir (novembre/décembre). Les mois sont divisés en deux parties : la première, dite « croissante » (khnöt), va de la nouvelle lune à la pleine lune ; et l’autre, dite « décroissante » (rnoc), part du lendemain de la pleine lune et comporte quatorze ou quinze jours. Enfin, à côté de la chronographie indienne, les Cambodgiens se servent aussi, depuis au moins la fin du Xe siècle, du cycle chinois des douze animaux se succédant indéfiniment pour désigner l’année. Ce cycle, combiné avec divers numéros d’ordre, forme un comput de soixante années inconnu en Inde. Dans ce système, la nouvelle année qui marque les changements de nom et de quantième débute le premier jour de cet (mars/avril).

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11 Toutes les populations de la péninsule indochinoise connaissent un cycle duodénaire comparable, identique au système chinois. Curieusement, dès le XIVe siècle, les Siamois donnent aux douze animaux des noms qu’on retrouve aussi en khmer, mais qui sont apparentés à des formes très anciennes, communes aux langues muong et vietnamienne11. Les autres peuples de langue taï (Lao, Ahom, Shan, etc.) comptent les jours, les mois et les ans, au moyen d’un cycle sexagénaire formé par la combinaison d’une série duodénaire avec une série dénaire12.

12 Ces animaux ont partout une grande importance. C’est suivant l’animal présidant à l’année de naissance que l’on règle les questions qui se posent, telles que le traitement à suivre ou les sacrifices à faire pour guérir un malade, fixer les prières pour conjurer un malheur, déterminer le moment propice d’entrer dans une maison neuve, etc., et que l’on tire les horoscopes qui déterminent la possibilité ou l’impossibilité, par exemple, d’entreprendre un voyage, de contracter un mariage, etc.

13 L’origine du cycle des douze animaux remonte au mythe de la création. Au commencement de l’humanité, la première femme prend naissance à partir de l’élément terre, et son époux, à partir de l’élément feu. Tous deux mettent au monde un garçon, une fille et un hermaphrodite, puis créent le Mont Meru, le soleil, la lune, etc. Leur progéniture donne naissance à treize enfants (dont l’un meurt) qui reçoivent dans l’année de leur naissance des jouets modelés en forme d’animaux. Ces figurines prirent vie et devinrent les ancêtres des espèces actuelles. Chaque enfant fit reposer sa santé sur cet animal et pour guérir il fallait relâcher celui correspondant à sa naissance, lequel devenait son génie protecteur. L’image gardée sur soi était le gage de sa prospérité. Le nom des animaux servit à nommer les années du cycle duadécimal : année du rat, du bœuf, du tigre, du lièvre, du grand serpent (ou dragon), du serpent, du cheval, de la chèvre, du singe, du coq, du chien, du porc (ou éléphant)13.

14 D’autre part, les Khmers font usage d’un système basé sur le Rāmāyaṇa, sans intervention de la position astronomique des corps célestes pris seulement comme symboles numériques. Ils recourent pour cela à des calculs et à des tables de correspondances consignés dans les traités d’astrologie, sans égard au calendrier sexagésimal, parce que ce système fonctionnait déjà par lui-même au début, indépendamment du cycle des douze animaux14. Les augures sont tirés d’après l’arrangement d’épisodes se rapportant à des personnages types : Braḥ Rām (Rāma), Nāṅ Setā (Sītā), Rāb (Rāvaṇa), Bibhek (VibhīÒaṇa), Khar/Dūbhī (Ghara ou Khāra), Braḥ Lakh (Lakṣmāṇa), Hanumān (Hanumat), Setayūs (Jeṭāyus). Suivant l’année de sa naissance, le sujet reçoit pour « siège » un de ces huit personnages (dinaṃṅ) et dépend de la « race » des hommes, des démons (yakhs) ou des dieux. C’est ainsi, par exemple, que des jeunes gens ayant pour « véhicule » respectif Rāp et Nāṅ Setā, ou appartenant à la race des démons et à la race des dieux, ne peuvent se marier sans danger.

15 Parmi les manuscrits qui ont été sauvés du Cambodge en 1975 dans le cadre de mes « Recherches sur le bouddhisme khmer », et en particulier ceux rédigés sur « papier indigène » (krāṃṅ), certains font de longues mentions aux pratiques divinatoires. Ces manuels, jamais datés, souvent illustrés, sont à l’usage des maîtres et par voie de conséquence offrent peu d’explications. Leur objet est de fixer par écrit les prescriptions et formules nécessaires à l’expression de l’oracle et de servir de support aux calculs. Si leur rédaction peut remonter au XVIIIe siècle pour certains (la durée de ce type de support très épais peut dépasser plusieurs siècles), il s’agit de copies dont le contenu est généralement beaucoup plus ancien.

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16 Cinq manuscrits ont été consultés (TK 280, TK 287, TK 300, TK 307, TK 480), dont trois en particulier (TK 287, TK 307, TK 480), parce qu’ils exposent, sous forme de sentences extraites des épisodes d’un Rāmāyaṇa, deux façons différentes de réaliser les prédictions. La première est intitulée les « Huit influences », la seconde les « Flèches de Braḥ Rām ».

Les huit influences

17 Cette méthode implique l’usage de deux « grilles » (tārāṅ) de chacune 32 cases réparties selon quatre colonnes de 8 chiffres (Fig. 1 et 2). Les colonnes correspondent, de gauche à droite, aux âges de la vie : enfance, adolescence, maturité, vieillesse, des héros de l’épopée. Les chiffres sont associés aux « huit influences » (aṭhagroḥ) ou « planètes » (tonsā) : les sept jours de la semaine, plus Rāhū intercalé entre le jeudi et le vendredi. Dimanche a le nombre 1, lundi le nombre 2, mardi le nombre 3, mercredi le nombre 4, jeudi le nombre 5, vendredi le nombre 6, samedi le nombre 7, Rāhū le nombre 8. La numérotation est donnée dans un ordre particulier et différent suivant que le sujet est une femme ou un homme. Pour une femme : 1, 2, 3, 4, 5, 8, 7, 6 (Fig. 1) ; pour un homme : 7, 5, 8, 6, 1, 2, 3, 4 (Fig. 2).

Fig. 1 et 2

18 On compte, de haut en bas et de gauche à droite, autant de cases que le sujet a d’années, revenant à la case départ tous les 32 ans. Le chiffre obtenu permet de déterminer, à l’aide d’une liste de concordances, le point cardinal imputé : 1 = Nord-Est, 2 = Est, 3 = Sud-Est, 4 = Sud, 7 = Sud-Ouest, 5 = Ouest, 8 = Nord-Ouest, 6 = Nord.

19 Enfin, ce point cardinal renvoie à un personnage du Rāmāyaṇa :

Nord-Est : Bibhek Sud-Ouest : Rāb

Est : Braḥ Rām Ouest : Nāṅ Setā

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Sud-Est : Khar/Dūbhī Nord-Ouest : Setayūs

Sud : Braḥ Lāks Nord : Hanumān

20 Pour chaque personnage sont donnés quatre épisodes. Le devin retient celui qui correspond à la colonne enfance, adolescence, maturité ou vieillesse, en fonction du chiffre obtenu. Par exemple, le chiffre d’une femme de 40 ans sera le « 6 » dans la colonne « enfance » ; celui d’un homme de 25 ans sera le « 7 » dans la colonne « vieillesse ». Le « siège » (dinaṃṅ) pour la femme de 40 ans sera donc « Hanumān enfant » et celui de l’homme de 25 ans « Rāb vieillard ».

21 Voici la liste des épisodes tels qu’ils sont donnés dans TK 48015 :

Bibhek

1. [A24] siddhikāryy doḥ dinaṃṅ nūv bīybhek kmīṅ pān jā apparājjā aṃmcāss khluon eṅ āsraiy tèh khluon eṅ doḥ thkāt mān thmah pāk bvaṃ noḥ saṃmröt nūv phdaḥ eṅ aoy dos trūv khmoc ābuk eṅ aoy sūn rūp prus 1 nāṅ 3 beh rūtth 3 kandoṅ 5 jūn dov īsāṇ thṅaiy 3 saḥ hoṅ « Succès ! Si le siège est en Bibhek enfant : “Il est vice-roi” [Rmk ?]16. Chacun ne peut s’en remettre qu’à soi-même. Si l’on est malade, la faute en est une pierre ou du bronze cassé enfoui sous la maison ; le khmoc17 du père nous a frappé. Modeler 1 image d’homme et 3 de jeune fille dans un bè18 à 3 ruot [contenant] 5 kandoṅ19 et le déposer au Nord-Est. Guérison dans les trois jours. » 2. doḥ dinaṃṅ nūv bīybhek bāl dāy thā rābbh paṃmpar’paṅ doḥ dinaṃṅ nūv nèḥ nūv köt put caṃmnèḥ eṅ nūv sabv thṅaiy jā dukkh doḥ thkāt krèṅ pāṅ ph-Un eṅ khöṅ phaṅ gnāh doḥ thkāt jaṃmṅịh crön jhịh kpāl nimit sasar’drut bvaṃ noḥ jöṅ klīy aoy doss pröh sūn rūp braḥ rāmm 1 rūp devatā jīḥ taṃrīy 1 beh rūtth 6 jūn dov Isāṇ thṅaiy 3 saḥ hoṅ « Si le siège est en Bibhek adolescent : “Il prédit, et Rāb le bannit” [Rmk 23]. Si le siège est celui-là, [le danger] naît de notre propre science. Aujourd’hui le malheur s’est abattu sur nous. Si l’on est malade, on peut craindre que ce soit à cause de la famille ; si l’on souffre notamment de maux de tête, un pilier [de la maison] s’est creusé, sinon il est trop court. Modeler 1 image de Braḥ Rām, 1 image d’un dieu sur un éléphant dans un bè à 6 ruot et le déposer au Nord-Est. Guérison dans les 3 jours. » 3. doḥ dinaṃṅ nūv bīybhek kanṭāl aoy prayāt krèṅ mān kṭīy smöh slāpp khlūn nūv brāt braḥbandh kūn cov eṅ nūv sabv thṅaiy jā dukkh nūv It pramān pān löy gey möl ṅṅāy doḥ thkāt trūv khmoc ābuk eṅ khöṅ phaṅ aoy prayāt bhlöṅ nūv chèḥ phdaḥ aoy sūn rūp satv 1 sūn rūp khlāh 1 rūpp pana’kkhāh 1 rūp braḥ rām debv 1 braḥ ādity 1 braḥ rāhūv 1 beh rūtth 7 kandoṅ 1 jūn dov Isāṇ thṅaiy 3 saḥ hoṅ « Si le siège est en Bibhek adulte : faire attention. Craindre la survenue d’un conflit mortel ou d’une séparation de l’épouse et des enfants [Rmk 23]. Aujourd’hui un malheur sans fin s’est abattu sur nous. On nous méprise. Si l’on est malade, le khmoc du père s’est fâché contre nous. Prendre garde qu’un incendie n’éclate dans la maison. Modeler 1 image d’animal, modeler 1 image de tigre, 1 image de Puññakāy, 1 image de Braḥ Rām, 1 du soleil, 1 de Rāhū, dans un bè à 7 ruot [contenant] un kandoṅ et le déposer au Nord-Est. Guérison dans les 3 jours. » 4. [A25] doḥ dinaṃṅ nūv bīybhek cāss braḥ rām aoy svoy rāj saṃmpātti nūv laṅkāh doḥ prus niṅ pān braḥbandh doḥ srīy niṅ pān phṭīy gịmoḥ aoy prayāt krèṅ paṅ ātmāh bvaṃ noḥ khñaṃm ratth doḥ thkāt braḥ lịṅ min nūv knaṅ khluon löy aoy pūjā braḥ groḥ höy aoy dadūl braḥ lịṅ aoy sūn rūp braḥ paramīysūr 1 nāṅ bhogavatīy 1 yaks kān taṃmpoṅ 1 beh rūtth 4 kandoṅ 7 jūn dov Isāṇ thṅaiy 3 saḥ hoṅ « Si le siège est en Bibhek vieillard : “Braḥ Rām le fait régner à Laṅkā” [Rmk 66]. S’il s’agit d’un homme, il va trouver une épouse ; s’il s’agit d’une femme, elle va trouver

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un mari. Sinon la survenue d’un accident ou une obligation de s’enfuir est à craindre. Si l’on est malade, les esprits vitaux ont quitté notre corps. Exorciser le mal et faire revenir les esprits vitaux. Modeler 1 image d’Ῑśvara, 1 de Bhogavatī 1 d’un yaks tenant un bâton, [dans] 1 bè à 4 ruot [contenant] 7 kandoṅ et le déposer au Nord-Est. Guérison dans les 3 jours. »

Braḥ Rām

5. doḥ dinaṃṅ nūv braḥ rām kmīṅ lök dhnūv sīöl mahā Ṝsīy dinam [ṅ] nūv nèḥ pān satv catupād dvepād anak ddhaṃm nūv aoy broḥ yak āsā gey doḥ prus niṅ pān braḥbundh doḥ srīy niṅ pān phṭīy bvaṃ noḥ niṅ pān khñaṃm doḥ thkāt trūv khmoc ābuk eṅ pröh sūn rūp prus 1 nāṅ 1 brāy 2 sèḥ 2 beh rūtth 3 kandoṅ 7 jūn dov pūr thṅaiy 3 saḥ hoṅ « Si le siège est en Braḥ Rām enfant : “Il soulève l’arc magique du Grand-ascète” [Rmk 14]. Si le siège est celui-là : acquisition d’animaux quadrupèdes ou bipèdes due à une personne importante que nous servons. Un homme va rencontrer une épouse, une femme un mari, sinon des serviteurs. Si l’on est malade, le khmoc du père a frappé. Il convient de modeler 1 image de garçon, 1 image de fille, 2 images de brāy20, 2 images de chevaux [dans] un pè à 3 ruot [contenant] 7 kandoṅ et le déposer à l’Est. Guérison dans les 3 jours. » 6. doḥ dinaṃṅ nūv braḥ rām bāl pān setā höy rābbh lūc viṅ doḥ tör aoy prayāt krèṅ khuṇāṅ dhvöh dos doḥ thkāt jhịh khluon prāṇ jhịh kpāl trūv khmoc ābuk eṅ aoy sūn rūp prus 5 srīy 5 beh 7 rūtth chāt duṅ 10 kandoṅ 18 jūn dov [A26] pur thṅaiy 3 saḥ hoṅ « Si le siège est en Braḥ Rām adolescent : “Il a obtenu Setā, mais Rāb la ravit” [Rmk 18]. Si l’on doit aller quelque part, faire attention qu’une Khun Nāṅ ne vienne nous porter malheur. Si l’on est malade, qu’on souffre de partout, qu’on a mal à la tête, le khmoc du père nous a frappé. Modeler 5 images de garçon, 5 de fille [dans] un bè à 7 ruot [contenant] 10 fanions à étages et 18 kandoṅ, et le déposer à l’Est. Guérison dans les 3 jours. » 7. doḥ dinaṃṅ nūv braḥ rām kanịāl tām pröss mās rābbh lūc nāṅ setā E kroy aoy prayāt satv jöṅ 2 4 aoy dos doḥ thkāt aoy sūn rūp brāy 14 pruss 1 beh rutth 5 kandoṅ 7 jūn dov pūr thṅaiy 3 saḥ hoṅ « Si le siège est en Braḥ Rām adulte : “Il poursuit la gazelle d’or. Pendant ce temps, Rāb enlève Nāṅ Setā” [Rmk 18]. Faire attention que des animaux bipèdes ou quadrupèdes ne nous portent malheur. Si l’on est malade, modeler 14 images de brāy, 1 de garçon [dans] un bè à 5 ruot [contenant] 7 kandoṅ et le déposer à l’Est. Guérison dans les 3 jours. » 8. doḥ dinaṃṅ nūv braḥ rām cāss pān saṃmpātti laṅkāh dinaṃṅ nūv nèḥ pān satv catupād dhvehpād anak phaṅ sraleñ doḥ tör mān tammkāt put sasar’phdaḥ drut bvaṃ noḥ jöṅ klīy bvaṃ noḥ bhūm dābv aoy dos bvaṃ noḥ khmoc yak braḥ lịṅ dov duk knaṅ gohā ddhaṃm aoy pūjā braḥ groḥ dadūl braḥ lịṅ höy aoy sūn rūp brāy 4 beh rūtth 6 paṃbuṅ tāk srāh 1 jūn dov pūr thṅaiy 3 saḥ hoṅ « Si le siège est en Braḥ Rām vieillard : “Il obtient les richesses de Laṅkā” [Rmk ?]. Si le siège est celui-là : acquisition d’animaux quadrupèdes ou bipèdes ; des gens nous veulent du bien. Si l’on doit se déplacer quelque part, il y a danger : un pilier de la maison est creux ou trop court ; sinon, c’est le sol en pente qui porte malheur ; sinon, un khmoc va se saisir de nos esprits vitaux pour les enfouir dans une grotte profonde. Exorciser le mal et faire revenir les esprits vitaux. Modeler 4 images de brāy [dans] un bè à 6 ruot [contenant] un tube de bambou plein d’alcool, et le déposer à l’Est. Guérison dans les 3 jours. »

Ghar21

9. doḥ dinaṃṅ nūv ghar kmīṅ Dūrabhñīy ūt prayut niṅ ābuk eṅ mān kṭīy aoy prayāt citr Eṅ doḥ thkāt aoy pūjā braḥ groḥ aoy sūn rūp sṭec 1 muntrīy 4 beh rūtth 3 kandoṅ 4 jūn dov agneh thṅaiy 3 saḥ hoṅ « Si le siège est en Ghar enfant : “Dūbhī affronte orgueilleusement son propre père”

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[Rmk 20]. En cas de conflit, se méfier de soi-même. Si l’on est malade, exorciser le mal. Modeler 1 image de Prince, 4 de dignitaires [dans] un bè à 3 ruot [contenant] 4 kandoṅ et le déposer au Sud-Est. Guérison dans les 3 jours. » 10. doḥ dinaṃṅ nūv ghar bāl dūrabhīy pān saṃmpātti ābuk eṅ nūv mān lābbh catu pād dvepād bvaṃ noḥ aoy prayāt krèṅ bhlöṅ chèḥ saṃmbat kuṃ prahèss löy gey nūv dhvö dos [A27] kuṃ duk citr gey begy löy doḥ thkāt putth chīy sec aoy sūn rūp brāy 6 beh rūtth 4 kandoṅ 4 jūn dov agneh thṅaiy 3 saḥ hoṅ « Si le siège est en Ghar adolescent : “Dūbhī obtient les richesses de son père” [Rmk 20]. Chance ! [Acquisition] d’animaux quadrupèdes ou bipèdes. Sinon, attention : craindre que du feu enflamme des étoffes. Ne pas être distrait. Quelqu’un nous veut du mal. Ne pas faire confiance trop facilement aux gens. Si l’on est malade, c’est qu’on a mangé de la viande. Modeler 6 image de brāy [dans] un bè à 4 ruot [contenant] 4 kandoṅ et le déposer au Sud-Est. Guérison dans les 3 jours. » 11. doḥ dinaṃṅ nūv ghar kanṭāl tör braiy kuṃ ūt āṅ ātmā Eṅ doḥ thkāt min sraṇuk citr Eṅ mān taṃmpūk aoy dos aoy sūn rūp khlā 3 kandoṅ 7 jūn dov agneh thṅaiy 3 saḥ hoṅ « Si le siège est en Ghar adulte : “Il marche en forêt” [Rmk 20]. Ne pas se vanter. Si l’on est malade ou qu’on éprouve de l’inquiétude, une termitière provoque le mal. Modeler 3 images de tigre [dans un bè contenant] 7 kandoṅ et le déposer au Sud- Est. Guérison dans les 3 jours. » 12. doḥ dinaṃṅ nūv ghar cāss prayut niṅ bālīy gey sap khluon sabv thnaiy jā dukkh doḥ thkāt trūv khmoc ābuk Eṅ bvam noḥ bhūm kbuss aoy dos aoy sūn rūp bālīy sbāy krapīy 1 brāy 6 beh rūtth 4 kandoṅ 8 jūn dov agneh thṅaiy 3 saḥ hoṅ « Si le siège est en Ghar vieillard : “Il se bat avec Bālī” [Rmk 20]. Quelqu’un nous déteste. Aujourd’hui on est malheureux. Si l’on est malade, le khmoc du père nous a frappé. Sinon, c’est une surélévation du sol qui porte malheur. Modeler 1 image de Bālī portant le buffle sur son épaule, 6 brāy [dans] un bè à 4 rūtth [contenant] 8 kandoṅ et le déposer au Sud-Est. Guérison dans les 3 jours. »

Braḥ Laks

13. doḥ dinaṃṅ nūv braḥ lākkh kmīṅ dov möl setā knaṅ gohā dinaṃṅ nūv nèḥ krèṅ poṅ ph- Un pracand phaṅ gnāh doḥ thkāt trūv khmoc tāy hoṅ aoy dhvöh beh rūtth 4 kandoṅ 8 jūn dov dāksīöṇ thṅaiy 3 saḥ hoṅ « Si le siège est en Braḥ Laks enfant : “Il va voir Setā dans la grotte” [Rmk ?]. Si le siège est celui-là : crainte de jalousies dans la famille. Si l’on est malade, le khmoc [d’une personne disparue] de mort violente nous a frappé. Faire un bè à 4 ruot [contenant] 8 kandoṅ et le déposer au Sud. Guérison dans les 3 jours ». 14. doḥ dinaṃṅ nūv braḥ lākkh bāl cèṇ puss pan’gey niṅ jā kṭīy phaṅ höy niṅ mān lābbh catupād dvepād doḥ thkāt braḥ lịṅ min nūv knaṅ khlūn trūv khmoc ābuk Eṅ yak brāy 7 anak mak dhvöh dos put bhūm gey kapp khmoc brāy aoy sūn rūp braḥ lāk 1 [A28] beh rūtth 4 kandoṅ 6 jūn dov dāksīöṇ thṅaiy 3 saḥ hoṅ « Si le siège est en Braḥ Laks adolescent : “Il s’en va pratiquer les observances” [Rmk 12]. Une personne va nous préserver d’un conflit. Chance ! [Acquisition] d’animaux quadrupèdes ou bipèdes. Si l’on est malade, les esprits vitaux ont quitté notre corps. Le khmoc du père nous a frappé [par le biais de] 7 brāy qui nous font du mal ; un cadavre se trouve enterré dans le sol. Modeler 1 image de Braḥ Laks dans un bè à 4 ruot [contenant] 6 kandoṅ et le déposer au Sud. Guérison dans les 3 jours. » 15. doḥ dinaṃṅ nūv braḥ lāk kanāl mān kṭīy aoy prayāt doḥ thkāt trūv kröttiyā gey dhvöh dos bvaṃ noḥ sasar drut dhvöh dos aoy sūn rūp taṃrīy 1 braḥ lāk 1 dūrabhīy 1 manussa boḥ ddhaṃm 1 beh rūtth 4 kandoṅ 4 jūn dov dāksīöṇ thṅaiy 3 saḥ hoṅ « Si le siège est en Braḥ Laks adulte : “…”22 S’il y a conflit, faire attention. Si l’on est malade, une personne qui nous veut du mal nous a jeté un sort ; sinon, un pilier s’est creusé et nous porte malheur. Modeler 1 image d’éléphant, 1 de Braḥ Laks, 1 de Dhūbhī, 1 d’une personne à gros ventre [dans] un bè à 4 ruot [contenant] 4 kandoṅ et le déposer au Sud. Guérison dans les 3 jours. »

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16. doḥ dinaṃṅ nūv braḥ lāk cāss pān svoy rāj saṃmpātti dinaṃṅ nūv nèḥ mān lābbh sabv prakāry ˝ höy aoy prayāt poṅ ph-Un Eṅ srīy pruss niṅ dhvöh dos bvaṃ noḥ jhịh phdaiy ceñ jhām aṃbīy khlūn krèṅ trūv sahassa gey doḥ thkāt mān taṃmpūk baṃ noḥ mān anṭūṅ bvaṃ boḥ mān khmoc mèmutth dhvö dos aoy sūn rūp cor kān laṃbeṅ 1 brān kān snāh 1 braḥ lāk 1 manuss brāy 3 beh rūtth 7 kandoṅ 3 jūn dov dāksīöṇ thṅaiy 3 saḥ hoṅ « Si le siège est en Braḥ Laks vieillard : “Il jouit de la royauté” [Rmk ?]. Le siège étant celui-là, on a de la chance dans tous les domaines. Se défier des gens de notre famille, homme ou femme, qui nous veulent du mal ; sinon, si l’on a mal au ventre et qu’on rejette du sang, quelqu’un nous a empoisonné. Si l’on est malade, c’est une termitière, sinon un puits, sinon un khmoc memat’23 qui nous veut du mal. Modeler 1 image de brigand tenant une lance, 1 d’un chasseur tenant une arbalète, 1 de Braḥ Laks, 3 de brāy [dans] un bè à 7 ruot [contenant] 3 kandoṅ et le déposer au Sud. Guérison dans les 3 jours. »

Rāb

17. doḥ dinaṃṅ nūv Rābbh kmīṅ pān svoy rāj saṃmpātti mān lābbh aotaṃm mān kṭīy anak ddhaṃm jūy doḥ thkāt put jhīy sec bvaṃ noḥ mān gey cut nūv phdaḥ noḥ aoy dos aoy sèn khmoc knaṅ phdaḥ höy aoy sūn rūp brāy 4 beh rūtth 4 kandoṅ 7 jūn dov nīratīy thṅaiy 3 saḥ hoṅ « Si le siège est en Rāb enfant : “Il jouit de la royauté” [Rmk ?]. Chance extrême ! En cas de conflit, une personne importante va nous aider. Si l’on est malade, on a mangé de la viande ; sinon, c’est à cause d’un invité de passage dans la maison. Préparer un [plateau] d’offrandes à l’intention des khmoc. Modeler 4 images de brāy [dans] un bè à 4 ruot [contenant] 7 kantoṅ et le déposer au Sud-Ouest. Guérison dans les 3 jours. » 18. [A29] doḥ dinaṃṅ nūv Rābbh bāl bālī yak kandūy bāt aoy prayāt krèṅ strūv dhvöh dos nūv sabv thṅaiy min sraṇuk citr doḥ thkāt braḥ bhūm aoy dos aoy sūn rūp brāy 7 beh rūtth 7 duṅ chāt bvöt jūn dov niratīy thṅaiy 3 saḥ hoṅ « Si le siège est en Rāb adolescent : “Bālī l’entoure de sa queue” [Rmk 16]. Craindre qu’un ennemi nous veuille du mal. On a l’esprit sans cesse préoccupé. Si l’on est malade, c’est Braḥ Bhumi qui cause notre malheur. Modeler 7 images de brāy [dans] un bè à 7 ruot [contenant] une bannière à étages et le déposer au Sud-Ouest. Guérison dans les 3 jours. » 19. doḥ dinaṃm nūv rābbh kanṭāl pān setā mān lābbh höy niṅ paṅ viṅ put srīy gāp citr doḥ diñ avīy 2 bvaṃ noḥ mān poṅ ph-Un Eṅ niṅ bīy bāt sabv thṅaiy bvaṃ sraṇuk citr put satv jöṅ 2 4 doḥ thkāt trūv khmoc knaṅ phdaḥ Eṅ aoy dhvöh beh rūtth 3 kandoṅ 3 rūp brāy 1 chāt duṅ paṅ dov nīratīy thṅaiy 3 saḥ hoṅ « Si le siège est en Rāb adulte : “Il détient Setā” [Rmk 18]. On a de la chance puis on la perd tout de suite, à cause d’une femme qu’on aime. Qu’on achète n’importe quoi, ou qu’il s’agisse de parents dans la difficulté, on a l’esprit sans cesse préoccupé à cause d’animaux bipèdes ou quadrupèdes. Si l’on est malade, c’est à cause d’un khmoc dans la maison. Faire un bè à 3 ruot [contenant] 3 kantoṅ, 1 image de brāy, [une] bannière à étages et l’abandonner au Sud-Ouest. Guérison dans les 3 jours. » 20. doḥ dinaṃṅ nūv rābbh cāss trūv sar’braḥ rām bvaṃ jā mān kṭīy cāñ gey doḥ thkāt dhvöh beh 7 rūtth kandoṅ 7 sūn rūp brāy 1 bvöt chāt duṅ siṅ 7 jūn dov niratīy thṅaiy 3 saḥ hoṅ « Si le siège est en Rāb vieillard : “Il est touché par la flèche de Braḥ Raṃ” [Rmk 66]. Ce n’est pas bon. En cas de conflit, on perd. Si l’on est malade, faire un bè à 7 ruot [contenant] 7 kantoṅ, 1 image modelée de brāy et 7 bannières à étages, et le déposer au Sud-Ouest. Guérison dans les 3 jours. »

Nāṅ Setā

21. doḥ dinaṃṅ nūv setā kmīṅ mahā Īsīy yak jā cov dov ciñcīm duk khaṅ gohā mān lābbh aotaṃm doḥ prus niṅ pān braḥbundh doḥ srīy niṅ bān phṭīy bvaṃ noḥ khñaṃm ratth

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gῑmoḥ aoy pūjā braḥ groḥ niṅ mān lābbh doḥ thkāt trūv khmoc knaṅ phdaḥ Eṅ pa’pūl yak [A30] brāy mak dhvöh dos aoy dhvöh beh rūtth 3 kandoṅ 9 sūn rūp sīet nūv phkāh jhūk 1 yaks kān taṃmpoṅ 1 khmoc khvāk bhnek 1 paṅ dov puscim thṅaiy 3 saḥ hoṅ « Si le siège est en Setā enfant : “Le Grand-ascète la prend pour petite-fille et l’élève dans la grotte” [Rmk 6]. Chance extrême ! Un homme trouvera une épouse ; une femme, un mari. Sinon, un serviteur se sauvera. Préparer [un plateau] d’offrandes destiné au “siège de notre planète”24 pour retrouver la chance. Si l’on est malade, un khmoc dans la maison incite des brāy à venir nous faire du mal. Faire un bè à 3 ruot [contenant] 9 kantoṅ, y placer dans un lotus 1 image de Yaks tenant un bâton et 1 de khmoc aveugle, et l’abandonner à l’Ouest. Guérison dans les 3 jours. » 22. doḥ dinaṃṅ nūv setā bāl rābbh lūc dov pān doḥ thkāt put bhit kantāl phlūv aoy prayāt krèṅ pāt drāby bvaṃ noḥ krèṅ nūv cāk sṭhān doḥ mān kṭīy aoy bịṅ anak ddhaṃm saṃmpor tāṃmṭèṅ kṭīy noḥ jhnaḥ gey doḥ thkāt mamöh jhịh kpāl trūv devatā ddhaṃm aoy dhvöh beh rūtth 3 kandoṅ 9 sūn rūp yaks kān taṃmpoṅ 4 paṅ dov puscim thṅaiy 3 saḥ hoṅ « Si le siège est en Setā adolescente : “Rāb parvient à l’enlever” [Rmk 18]. Si l’on est malade, c’est parce que l’on a pris peur au beau milieu d’un chemin. Faire attention, on risque de perdre un bien. Sinon de partir de chez soi. En cas de conflit, s’en remettre à une personne importante de carnation cuivrée pour gagner. Si l’on est malade, [avec] délire et maux de tête, c’est un devatā puissant qui nous veut du mal. Faire un bè à 3 ruot [contenant] 9 kandoṅ, 4 images de Yāks tenant un bâton, et l’abandonner à l’Ouest. Guérison dans les 3 jours. » 23. doḥ dinaṃṅ nūv setā kanṭāl rābbh yak dov duk knaṅ aosok citr nịk phṭīy put cāk sṭhān doḥ thkāt laṃpāk ktāt pöh pvaṃ thkāt löy krèṅ kūn cov ratth aoy prayāt krèṅ mān kṭīy doḥ thkāt aoy dhvöh beh rūtth 3 kandoṅ 9 sūn rūp sèḥ dim radeḥ 1 brāy 7 paṅ dov puscim thṅaiy 3 saḥ hoṅ « Si le siège est en Setā adulte : “Rāb l’enferme dans [le parc des] Asok” [Rmk 32]. Son cœur se morfond [à la pensée de] son mari qui a quitté le logis. Si l’on est malade, on souffre beaucoup ; si l’on n’est pas malade, il faut craindre la fuite d’un enfant ou d’un petit-enfant. Faire attention. Craindre la survenue d’un conflit. Si l’on est malade, faire un bè à 3 ruot [contenant] 9 kandoṅ, modeler 1 image de cheval attelé à une charrette, 7 de brāy, et l’abandonner à l’Ouest. Guérison dans les 3 jours. » 24. doḥ dinaṃṅ nūv setā cāss braḥ rām vil dov vịṅ niṅ pān drāby ṭöm cūl mak vịṅ doḥ dhvöh guṇ niṅ gey niṅ köt dos viñ hoṅ doḥ thkāt aoy pūjā braḥ groḥ höy yak cèñ krèṅ phṭīy braḥbundh [bvaṃ] gāpp [A31] citr gnāh doḥ thkāt aoy dhvöh beh rūtth 3 kandoṅ 9 sūn rūp rābbh aop setā 1 svā 1 nāṅ bhogavatīy paṅ dov puscim thṅaiy 3 saḥ hoṅ « Si le siège est en Setā vieille : “Braḥ Rām revient [la délivrer]” [Rmk 67]. On rentre en possession d’un bien perdu. Si l’on aide quelqu’un, on en retirera du malheur. Si l’on est malade, préparer [un plateau] d’offrandes destiné au siège de notre planète et le sortir [de la maison] de peur que le mari et l’épouse se disputent. Si l’on est malade, faire un bè à 3 ruot [contenant] 9 kandoṅ, modeler 1 image de Rāb étreignant Setā, 1 de singe, 1 de Bhogavatī et l’abandonner à l’Ouest. Guérison dans les 3 jours. »

Setāyas

25. doḥ dinaṃṅ nūv setāyas kmīṅ braḥ rām yak jā klöh phaṅ mān lābbh satv catupād dvepād doḥ thkāt jhịh kpāl nīmit put gey cat’nūv phdaḥ aoy dhvöh beh 4 rūtth kandoṅ 5 sūn rūp debtāh boḥ ddhaṃm 1 aṃröttiyūv 1 brāy 7 paṅ dov bāyābv thṅaiy 3 saḥ hoṅ « Si le siège est en Setāyas enfant : “Braḥ Rām en fait son ami” [Rmk 18,19]. Chance ! Acquisition d’animaux quadrupèdes ou bipèdes. Si l’on est malade, qu’on a mal à la tête, c’est à cause d’une personne qui a séjourné dans la maison. Faire un bè à 4 ruot [contenant] 5 kandoṅ, 1 image de devatā avec un gros ventre, 1 de Mrtyu, 7 de brāy, et l’abandonner au Nord-Ouest. Guérison dans les 3 jours. » 26. doḥ dinaṃṅ nūv Setāyas bāl sratīy khlāc tè ciñjīen braḥ daṃmruṅ aoy prayāt māt niṅ mān pöh pandos tpid māt noḥ doḥ thkāt thmah pāk bvaṃ noḥ ciñjīen bvaṃ snöt aoy dos

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mān pöh pan’min aoy paṇṇan’aoy dhvöh beh rūtth 7 kandoṅ 9 sūn rūpp debtāh 7 paṅ dov bāyābv thṅaiy 3 saḥ hoṅ « Si le siège est en Setāyas adolescent : “Il dit craindre seulement l’auguste anneau” [Rmk 18]. Faire attention à ce qui sort de notre bouche. Sanctions encourues à cause de ce que l’on dit. Si l’on est malade, c’est une pierre cassée, sinon une bague [dont le gemme] a un défaut, qui provoque le malheur. [Sinon] c’est une promesse qu’on n’a pas tenue. Faire un bè à 7 ruot [contenant] 9 kandoṅ, 7 images de devatā, et l’abandonner au Nord-Ouest. Guérison dans les 3 jours. » 27. doḥ dinaṃṅ nūv Setāyas kantāl pāk caṃm-Iṅ krèṅ jhām ceñ aṃbīy khlūn kuṃ auy yak āsāh gey anak ddhaṃm dhvöh dos paṅ khlūn bvaṃ jā doḥ thkāt krèṅ mān ciñjīen bvaṃ snöt auy dos bvaṃ noḥ mān thmah pāk auy dos auy col paṅ auy dhvöh beh 3 rūtth kandoṅ 4 sūn rūp devatā˙ kpāl 3 taiy 6 paṅ dov bāyābv thṅaiy 3 saḥ hoṅ « Si le siège est en Setāyas adulte : “Il se brise l’articulation de l’aile” [Rmk 19]. Craindre un écoulement de sang. Ne porter secours à personne [sous peine] d’être châtié par quelqu’un d’important. Malheur, mauvais ! Si l’on est malade, c’est une bague défectueuse qui provoque le malheur ; sinon c’est une pierre cassée. S’en débarrasser. Faire un bè à 3 ruot [contenant] 4 kantoṅ, 1 image de devatā à 3 têtes et 6 bras, et l’abandonner au Nord-Ouest. Guérison dans les 3 jours. » 28. [A32] doḥ dinaṃṅ nūv setāyas cāss braḥ rām lök khmoc niṅ paṅ drāby smöh paṅ khlūn pāmmröh anak ddhaṃm auy prayāt rūc aṃbīy noḥ höy niṅ mān lābbh hoṅ doḥ thkāt mān ciñjīen chār bvaṃ noḥ krèṅ dov sṭhān E dīet mān pöh luss braḥ lịṅ tör min nūv knaṅ khlūn löy aoy sūn rūp manuss ddhāmm 1 brāy 8 beh rūtth 3 kandoṅ 8 paṅ dov bāyābv thṅaiy 3 saḥ hoṅ « Si le siège est en Setāyas vieillard : “Braḥ Rām enlève sa dépouille” [Rmk 19]. Perte de biens, comparable à la perte de la vie. [Si l’on] est au service d’une personne importante, faire attention. En dehors de cela, on a de la chance. Si l’on est malade, une bague s’est fendue. Sinon, nos esprits vitaux ont pris peur au cours d’un déplacement et ont quitté le corps. Modeler 1 image d’un être gros, de 8 brāy [dans] un bè à 3 ruot [contenant] 8 kandoṅ, et l’abandonner au Nord-Ouest. Guérison dans les 3 jours. »

Hanumān

29. doḥ dinaṃṅ nūv hullamāṇ kmīṅ braḥ ādity nūv māt dinaṃṅ nūv neḥ kuṃ ūt āṅ niṅ anak ddhaṃm löy krèṅ mān kṭīy aoy prayāt doḥ thkāt mān pöh chīy paṃñöh gey phñöh bvaṃ noḥ mān pöh chīy phlèh jhöh krahām bvaṃ noḥ mān sasar phdaḥ mān bhin khāṅ E jöṅ pöh gmān löy bhūm noḥ gey kāp saṃmlāp ghāh bīy mun aoy dhvöh beh rūtth 3 kandoṅ 12 sūn rūp sèḥ 1 svā 1 brāy 6 paṃbuṅ srāh 1 paṅ dov autar thṅaiy 3 saḥ hoṅ « Si le siège est en Hanumān enfant : “Le soleil est dans sa bouche” [Rmk 13]. Si le siège est celui-là, ne jamais se vanter devant une personne importante. Craindre un conflit ; faire attention. Si l’on est malade, on a mangé quelque chose qu’on nous a offert, sinon on a mangé des fruits rouges, sinon c’est un défaut du pilier nord de la maison. Si ce n’est pas le cas, un crime y a été commis jadis. Faire un bè à 3 ruot [contenant] 12 kandoṅ, 1 image de cheval, 1 de singe, 6 de brāy, 1 tube de bambou contenant de l’alcool, et l’abandonner au Nord. Guérison dans les 3 jours. » 30. doḥ dinaṃṅ nūv hullamān bāl braḥ rām prö dov kān stec mahā jaṃmbūv mān kṭīy jhnāḥ gey vịṅ doḥ thkāt braḥ lịṅ min nūv knaṅ khlūn bvaṃ noḥ khmoc knaṅ phdaḥ Eṅ yak dov [A33] duk knaṅ go’hā ddhaṃm höy khmoc ābuk Eṅ pröh khmoc 4 anak mak dhvöh dos kaṃ aoy chīy caṃmnīy gey löy aoy dhvöh be rūtth 6 kandoṅ 6 sūn rūp debtāh dhaṃm 1 brāy 6 svā 1 paṅ dov autar thṅaiy 3 saḥ hoṅ « Si le siège est en Hanumān adolescent : “Braḥ Rām l’envoie chez le roi Mahā Jamb” [Rmk 24]. En cas de conflit on gagne. Si l’on est malade, les esprits vitaux ont quitté le corps, sinon un khmoc dans la maison les a emmenés au fond d’une vaste grotte ; [sinon] 4 khmoc envoyés par le khmoc de notre père nous font du mal. N’accepter aucun aliment de personne. Faire un bè à 6 ruot [contenant] 6 kandoṅ, 6

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images de grands devatā, 6 de brāy, 1 de singe, et l’abandonner au Nord. Guérison dans les 3 jours. » 31. doḥ dinaṃṅ nūv hullamāṇ kanṭāl kāl thvāy ciñjien braḥ daṃmruṅ krèṅ trūv kṭīy doḥ thkāt aoy dhvöh beh 6 rūtth kandoṅ 6 sūn rūp Kippakār kān taṃmpoṅ mamoṅsak’1 buss 1 brāy 6 svah 1 paṅ dov aotar thṅaiy 3 saḥ hoṅ « Si le siège est en Hanumān adulte : “Lorsqu’il va porter l’auguste anneau” [Rmk 30]. Craindre d’entrer en conflit [avec quelqu’un]. Si l’on est malade, faire un bè à 6 ruot [contenant] 6 kandoṅ, 1 image de Kumpikar tenant une massue, 1 de serpent, 6 de brāy, 1 de singe, et l’abandonner au Nord. Guérison dans les 3 jours. » 32. doḥ dinaṃṅ nūv hullamāṇ cāss dov tal laṅkāh mak vịṅ mān kṭīy krèṅ trūv caṃmnaṅ gey doḥ thkāt trūv khmoc brāy yak braḥ lịṅ khmoc knaṅ phdaḥ Eṅ dhvö dos aoy dhvöh beh 6 rūtth kandoṅ 6 sūn rūp debtāh ddhaṃm 1 brāy 6 prus 1 devatā kān sar’1 paṅ dov aotar thṅaiy 3 saḥ hoṅ « Si le siège est en Hanuman vieillard : “Il part à Laṅkā et revient” [Rmk ?]. En cas de conflit, craindre le sortilège de quelqu’un. Si l’on est malade, un khmoc-brāy a ravi nos esprits vitaux. C’est un khmoc dans la maison qui nous veut du mal. Faire un bè à 6 ruot [contenant] 6 kandoṅ, 1 image de grand-devatā, 6 de brāy, 1 d’homme, 1 de devatā tenant un arc, et l’abandonner au Nord. Guérison dans les 3 jours. »

Les flèches de Braḥ Rām

22 L’autre méthode de divination s’appuie sur la lecture de huit chiffres associés aux extrémités de quatre flèches entrecroisées disposées à l’intérieur d’un diagramme. Le Grū compte autant de chiffre que le sujet a d’années, revenant au chiffre 1 tout les neuf ans. Une série de huit chiffres disposés dans l’axe vertical du diagramme permet d’obtenir plus facilement le numéro de l’âge correspondant. Chaque flèche possède donc deux chiffres opposés : 1-8, 2-6, 3-7, 4-5, qui renvoient à deux épisodes de l’histoire de Braḥ Rām, celui de l’aileron indiquant toujours un augure favorable, celui du fer un augure défavorable. Dans ce dernier cas, il convient d’opérer un rite d’expulsion du mal avec confection d’un bè spécial en offrande à Braḥ Rām.

Les quatre flèches.

23 Quatre doubles formules sont associées aux quatre flèches :

24 Flèche 4-5

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33. [TK480/A33] bālīy jhnāḥ dūrabhīy niṅ caṃmnèḥ Eṅ hoṅ « Bāli vainc Dūbhī par son propre savoir. » [Rmk 20] 34. setāyas trūv braḥ daṃmrruṅ pāk caṃ-Iṅ’ slāp bvaṃ jā « Setāyas est touché par l’auguste anneau qui brise l’articulation de son aile. » [Rmk 19] Mauvais !

25 Flèche 3-7 35. dūrabhīy prayut niṅ bālīy [A34] pān saṃmpātti ābuk jā « Dūbhī se bat avec Bāli et obtient les richesses de son père. » [Rmk 20] Excellent ! 36. rābbh trūv sar braḥ rām paṅ setāh bvaṃ jā aoy krèṅ « Rāb reçoit la flèche de Braḥ Rām qui retrouve Setā. » [Rmk 66] Mauvais ! Se méfier !

26 Flèche 2-6 37. braḥ rām thlèṅ sar trūv rābbh pān setā vīñ jā braḥbundh « Braḥ Rām tire une flèche sur Rāb et retrouve Setā son épouse. » [Rmk 66] 38. bālīy cāñ dūrabhīy aoy krèṅ aṃböh gey bvaṃ jā « Bālī perd devant Dūbhī. » [Rmk 20] Se méfier des sortilèges. Mauvais !

27 Flèche 1-8 39. braḥ rām vāt kovdān pāñ rābbh jā begy « Braḥ Rām bande son arc et touche Rāb. » [Rmk 66] Excellent ! 40. dūrabhīy trūv braḥ khān bālīy slāp bvaṃ jā aoy krèṅ « Dūbhī est touché à mort par l’épée de Bālī. » [Rmk 20] Mauvais ! Se méfier !

28 Ces épisodes ne sont cependant pas tous évoqués de façon identique et l’on compte un certain nombre de variantes, que voici : 41. [TK307/B1] doḥ dịnāṃṅ nau braḥ rām kmịṅ lok jrom rāsār nau nīṅ sammpāt debtār caṃrön oy jaiy tpītth braḥ rām prāp "sar trūv kā phdaiy krom « Si le siège est en Braḥ Rām enfant : “Le seigneur protège les biens des dieux, les fait prospérer vers la victoire, car Braḥ Rām chasse les ennemis pour sauver le monde d’en bas”. » [Rmk 7] 42. [TK307/B6] doḥ dịnāṃṅ nau rāp´ bāl´ kāl [B7] dauv luoc braḥbun braḥ ind kāl cuḥ ceñ mak "kakrök dāṃṅ phdaiy kraum « Si le siège est en Rāb adolescent : “Lorsqu’il abuse de l’épouse de Braḥ Indr. Quand il ressort (du palais), le monde d’en bas tremble”. » [Rmk 6] 43. [TK307/B8] doḥ dịnāṃṅ nau setārr kmiṅ stec duk knaṅ boṅ bāy pan stav´ ddau nār chner sdīṅ mahār ṛssī ghöñ anak rös yak jā cauv nāṃṅ dau āsraṃmm « Si le siège est en Setā enfant : “Le roi la place sur un radeau qu’il abandonne au fil de la rivière. Le Grand-ascète la voit, la recueille, l’adopte comme sa petite-fille, la ramène à l’ashram”. » [Rmk 6] 44. [TK307/B2] doḥ dịnāṃṅ nau kha kmịṅ mḍāy aup rāksārr jā stec « Si le siège est en Khar enfant : “Sa mère le protège avec ; il est roi”. » [Rmk 20] 45. [TK307/B2] doḥ dịnāṃṅ nau kha bāl´ pān dau rien haur « Si le siège est en Khar adolescent : “Il va apprendre la divination”. » [Rmk ?] 46. [TK307/B2] doḥ dịnāṃṅ nau kha kanḍāl kāl dau cpāṅ niṅ braḥ lākkh´ trūv "sar « Si le siège est en Khar adulte : “Lorsqu’il combat Braḥ Laks et reçoit la flèche” » [Rmk ?]. 47. [TK307/B3] doḥ dịnāṃṅ nau khar cās prās rājj saṃmpātt´ « Si le siège est en Khar vieillard : “Il perd la royauté”. » [Rmk ?] 48. [TK307/B3] doḥ dịnāṃṅ nau braḥ lākkh´ khmīṅ mḍāy rāksār thnam « Si le siège est en Braḥ Laks enfant : “Sa mère le protège”. » [Rmk ?] 49. [TK307/B13] doḥ dịnāṃṅ nau hunnamānd´ kmịṅ braḥ āditth kraḷek chèḥ pān slāp braḥ aditth möl mak yal´ tūc svā 1 braḥ ādit prasap´ ras´ löṅ hu"nmān mān riṭṭị anubhāpp mān braḥ āddit dāṃṅ 7 knaṅ mātth « Si le siège est en Hanumān enfant : “Braḥ Adity le brûle d’un coup d’œil ; il meurt.

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Braḥ Adity regarde et aperçoit comme un singe ; il le ressuscite. Hanumān [en] obtient une grande puissance ; il a sept soleils dans la bouche”. » [Rmk 13] 50. [TK307/B4] doḥ dịnāṃṅ nau braḥ lākkh bāl kāl töh des tām braḥ rāmm sḍec le lā prāp chner sdöṅ tāp kūn devatār dāṃṅ 7 anak lök dhnuor sil anak tār mahā Ṝssịy öṅ 2 chchau 2 braḥ rām sḍec E braḥ rāmm pröh braḥ lākkh cūl dau möl key ghöñ key lök dhnuor sil anak tā mahār Ṝssịy thā pöh anak eṇār lök dhnuoh neḥ rūc nịṅ oy cau añ jā prabun neḥ döbd braḥ lākk vil mak krāp duol braḥ rāmm ththā key lökkh dhnuor sil mahār Ṝssịy pö anak eṇār lök ruoj nịṅ oy cauv jā braḥbun´ « Si le siège est en Braḥ Laks adolescent : Lorsque Braḥ Rām quitte la ville, Braḥ Laks le suit. Ils cheminent le long des rivières et croisent sept fils de dieux [qui vont] soulever l’arc magique du vénérable Grand-ascète : eug ! eug ! chau ! chau ! Braḥ Rām entend [le tumulte de l’épreuve] et envoie [Braḥ Laks] observer [les concurrents]. Le vénérable Grand-ascète dit : “À celui qui soulèvera cet arc, je donnerai ma petite-fille pour épouse”. Braḥ Laks revient, se prosterne devant Braḥ Rām et dit : “Ils soulèvent l’arc magique du Grand-ascète ; à celui qui y parvient il donnera sa petite-fille pour épouse”. » [Rmk 14]. 51. [TK307/B9] doḥ dịnāṃṅ nau setā bāl´ braḥ rāmm lök dhnūr sil bhnāl pān sètārr jā prabun´ braḥ rāmn nāṃm sètār bāk kanḍāl phluov tāp sūr panakkhā « Si le siège est en Setā adolescente : “Braḥ Rām concourt pour soulever l’arc magique et obtient Setā pour épouse. Il l’emmène. À moitié chemin, ils rencontrent Sūrpanakhā”. » [Rmk ?] 52. [TK307/B6] doḥ dịnāṃṅ nau rāp kmīṅ kāl dau vamahorr srapp’pradāḥ niṅ bālīy gāt ththā jā kḍam’groṅ gāt yak mak caṅ oy sūrgrip lèṅ « Si le siège est en Rāb enfant : “Lorsqu’il va au spectacle et tombe sur Bālī, celui-ci dit : Rāb s’est transformé en gros crabe de rizière ! Il l’attrape, le ficelle et le donne pour que Sugrīb s’amuse”. » [Rmk 17] 53. [TK307/B10] doḥ dịnāṃṅ nau catāyuḥ kmīṅ mḍāy aup rāksā « Si le siège est en Setāyas’enfant : “Sa mère le protège avec affection”. » [Rmk ?] 54. [TK307/B11] doḥ dịnāṃṅ nau catāyuḥ bāl kāl dauv rien sil nịṅ braḥ isūr braḥ nar rāy braḥ dhanīy phaṅ oy phlās khsèr sèmā brātth lok noḥ döbv braḥ isur anak srāy lèṅ dauv « Si le siège est en Setāyas’adolescent : “Lorsqu’il va apprendre la magie auprès de Braḥ Isūr, Braḥ Narāy, Braḥ Dharaṇī. Il remplace les sīmā en lanières [de peau de buffle] du séjour, afin que Braḥ Isūr parvienne à les défaire”. » [Rmk ?] 55. [TK307/B11] kāl cattarryuḥ dau yal rāpp namm sètārr catāryuḥ kāṅ cuṃ iṅ pāṃṅ braḥ āditth oy ṅarṅṅit rāpp yul hœy vā pūt junjen braḥ duṃmruṅ ambīy ṭaiy nāṅ setār ccaul dauv trūv pāk caṃ iṅ catāyuḥ ṭpịt yak āsār braḥ rāmm « Lorsque Setāyas voit Rāb emporter Setā, il étend les ailes, voile le soleil, provoque l’obscurité. Voyant cela, Rāb arrache l’auguste anneau du doigt de Nāṅ Setā et le lance, brisant l’articulation de Setāyās parce que celui-ci porte aide à Braḥ Rām. » [Rmk 18] 56. [TK307/B12] doḥ dịnāṃṅ nau catāyuḥ kantāl’braḥ rām yak dau mœl bvaṃ mān saḥ lœy « Si le siège est en Setāyas adulte : “Braḥ Rām emmène Setāyas pour le soigner. Il ne guérit pas”. » [Rmk 19] 57. [TK307/B12] doḥ dịnāṃṅ nau catāyuḥ cās kāl slāp’dauv kœt jā grudhdh rājj mān aṃmnāj jā aṃmcāss is anak jā mitth niṅ braḥ rāṃm tèṅ juoy kār phdaiy kraum « Si le siège est en Setāyas vieillard : “Lorsqu’il meurt, il renaît en roi des Garuda, puissant, et maître de tout le monde. Il est l’ami de Braḥ Rām et l’aide à sauver le monde d’en bas”. » [Rmk 19] 58. [TK307/B14] doḥ dịnāṃṅ nau hunamm ān kanḍal kāl braḥ rām prœh dau yak s"ar aṃbīy pād bhnaṃm braḥ sūmèh hoḥ jrèk sdịṅ [B15] 1 dœbv pān s"ar noḥ « Si le siège est en Hanumān adulte : “Lorsque Braḥ Rām l’envoie se procurer la flèche au pied du Mont Sumer ; il s’envole, plonge dans la rivière, et l’obtient”. » [Rmk ?] 59. [TK307/B7] doḥ dịnāṃṅ nau Rāpp kanḍāl kāl paṅ bīybhèkkh oy pœk klas’jaiy braḥ rāmmm thlèṅ s"ar nèḥ tec ratn kuṃbal

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« Si le siège est en Rāb adulte : “Lorsque l’aîné Bibhek fait ouvrir le parasol de victoire ; Braḥ Rām tire une flèche et déchire le tissu précieux”. » [Rmk 36] 60. [TK307/B5] doḥ dịnāṃṅ nau braḥ lākkh’kanḍāl’kāl trūv moṅkasāks guṃmburkār « Si le siège est en Braḥ Laks adulte : “Lorsqu’il est touché par la massue de Kumbhīkar”. » [Rmc 38] 61. [TK307/B8] doḥ dịnāṃṅ nau braḥ rām thlèṅ sar trūv thlœm slāp paṅ luṅkā « Si le siège est en Rāb : “Braḥ Rām lui décoche une flèche dans le foie ; il meurt et perd Laṅkā”. » [Rmk ?] 62. [TK307/B1] doḥ dịnāṃṅ nau braḥ rām cāss pān soy rājj saṃmpāt jā cau braḥ nagar is srīy snaṃm kraṃmakār ddebvī ddhaṃ tūc braḥ rāmm lœṅ jā sḍec kāl sètā gūv rūp rāp ou srīy snaṃ [kraṃma] kāri mœl « Si le siège est en Braḥ Rām vieillard : “Il jouit de la royauté, maître de l’auguste cité, de toutes les servantes, épouses et concubines ; il devient roi. Lorsque Setā dessine le portrait de Rāb pour le faire voir aux servantes”. » [Rmk 72] 63. [TK307/B9] doḥ dịnāṃṅ nau sètā kanḍal kāl braḥ rām pān mak oy jā debīy ddhaṃm braḥ rām bvaṃ duk cit sètā lœy « Si le siège est en Setā adulte : “Lorsque Braḥ Rām la retrouve, il en fait sa première épouse. Il n’a pas confiance en elle”. » [Rmk 72] 64. [TK307/B10] doḥ dịnāṃṅ nau sètār cās mān 1 jā 2 niṅ braḥ rāmm bvaṃ pān lœy sūv slāp khluon « Si le siège est en Setā vieille : “Les soupçons de Braḥ Rām lui sont insupportables ; elle préfère mourir”. » [Rmk 72] 65. [TK287/B20] kāl rāb prèh kāy jā brāhm briddhā « Lorsque Rāb prend l’apparence d’un vieux brāhmane. » [Rmk 16] 66. [TK287/B3] braḥ lakkh āṇucjā stec draṅ ceḥstār toy nūv vitththīy kan’laṅ « Braḥ Laks : “Le cadet possède le pouvoir grâce à la voie correcte”. » [Rmk 12] 67. [TK287/B3] kāl sèr [B4] tā nīmul rāb vā dhvœr kal dauv duk knaṅ tœm ausauk « Lorsque Rāb abuse de la pure Setā et qu’il va la déposer au Parc des Asok. » [Rmk 32] 68. [TK287/B3] braḥ rāmm stec tām sèrtār laṃpāk bruoy prān moḥhīmmār « Braḥ Rām poursuit Setā et éprouve beaucoup de peine. » [Rmk 22] 69. [TK287/B4] bīybhek bunrāy draṅ rīdhīy kāy bāllār aṃṇāj « Bibhek, le resplendissant, possède un grand pouvoir. » [Rmk ?] 70. [TK287/B4] kraṅ rabd bhanār cīt drœs maḥhīmmār paṃphlāñ luṅkār « Le roi Rāb au cœur sans aucune pitié fait détruire Laṅkā. » [Rmk ?] 71. [TK307/45] dūbhīy tœr braiy kuṃ ūt aṅ ātmāś eṅ « Dūbhī marche en forêt : Ne pas se vanter soi-même. » [Rmk 20]

L’horoscope perdu des devins

29 Ces soixante et onze extraits s’ordonnent ainsi pour nous livrer les grandes lignes d’une version du cycle que nous ne connaissons pas au Cambodge. J’ai reconstitué leur enchaînement (de 1. à 35.) en suivant grosso modo le déroulement habituel de l’histoire25, telle qu’elle se présente partout. Les numéros donnés entre parenthèses renvoient aux paragraphes traduits ci-dessus. 1. Rāb jouit de la royauté (§ 17) et règne sur Laṅkā (§ 61). 2. Braḥ Rām prend naissance pour sauver le monde d’en bas (§ 41). 3. Rāb s’introduit dans le palais de Braḥ Indr et abuse de la femme du dieu (§ 20, 42).

4. Pour se venger, celle-ci renaît dans le sein de l’épouse de Rāb, lequel abandonne le nouveau-né sur un radeau (§ 43). 5. Elle est recueillie par le Grand-ascète qui l’élève dans la grotte de l’ermitage (§ 21, 43). 6. Hanumān prend naissance. Braḥ Adity le brûle d’un coup d’œil mais le ressuscite.

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De ses mésaventures avec le soleil il acquiert une grande puissance (§ 29, 49). 7. Départ de Braḥ Rām, suivi de Braḥ Laks. Leur rencontre avec les dieux qui s’essayent à soulever l’arc magique (§ 50). 8. Braḥ Laks est envoyé en reconnaissance et aperçoit Nāṅ Setā dans la grotte (§ 13).

9. Braḥ Rām emporte la victoire et se marie avec Nāṅ Setā (§ 5, 6, 51). 10. Le sage Braḥ Laks pratique les observances (§ 14); il possède le pouvoir grâce à la voie correcte (§ 66). 11. La rencontre de Braḥ Rām avec Sūrpaṇakhā (§ 51). 12. Khar est roi et sa mère le protège (§ 44). Il va apprendre la divination (§ 45). Lorsqu’il combat Braḥ Laks il reçoit la flèche (§ 46) et perd la royauté (§ 47). 13. Bālī s’empare de Rāb à l’aide de sa queue (§ 16). 14. Rāb se métamorphose en crabe mais, découvert par Bālī, il est offert comme jouet à Sugrīb (§ 52). 15. Naissance de Setāyas, sa mère le protège (§ 53). Il s’éduque dans les sciences magiques auprès de Braḥ Isūr, Braḥ Narāy, Braḥ Dharaṇī et remplace les fils de sīmā afin que Braḥ Isūr les défasse (§ 54). Il devient l’ami de Braḥ Rām (§ 25, 57). 16. Épisode de la gazelle d’or (§ 7). 17. Rāb prend l’apparence d’un vieux brahmane et enlève Nāṅ Setā (§ 6, 22, 65). 18. Setāyas intercepte Rāb, étend les ailes, voile le soleil, provoque l’obscurité. Rāb lui brise l’articulation en lui jetant la bague de Nāṅ Setā (§ 34.55). Il est terrassé suite à l’imprudence de ses propres paroles (§ 26-28). 19. Braḥ Rām ne parvient pas à guérir les blessures de Setāyas (§ 56) qui renaît alors en roi des Garuda et l’aide à sauver le monde d’en bas (§ 29, 57). Rāb dépose Nāṅ Setā dans le Parc des Asok (§ 19, 23, 67). 22. Naissance secrète de Dūbhī qui terrasse (§ 9, 35) et obtient les richesses de son père (§ 10), puis s’en va orgueilleusement défier Bālī à l’intérieur d’une grotte, où il trouve la mort en vertu du savoir de son adversaire (§ 11, 12, 33, 38, 40, 71). 23. Braḥ Rām part à la recherche de Nāṅ Setā et en éprouve beaucoup de peine (§ 68). 24. Bibhek est vice-roi de Laṅkā (§1), ses pouvoirs sont merveilleux (§ 69). Il annonce une catastrophe si Rāb ne libère pas Nāṅ Setā et Rāb le bannit (§ 2). 25. Hanumān, au service de Braḥ Rām, est envoyé chez Mahājambū (§ 30). 26. Il s’envole ensuite à Laṅkā afin de remettre à Nāṅ Setā un anneau de la part de Braḥ Rām (§ 31, 32). 27. Braḥ Rām l’envoie se procurer une flèche au pied du Mont Sumer (§ 58). 27. Rāb ouvre le parasol de victoire mais Braḥ Rām le déchire d’une flèche (§ 59). 28. Braḥ Laks est blessé par la massue de Kumbhīkar (§ 60). 29. Braḥ Rām tue finalement Rāb à l’aide d’un trait (§ 20, 39, 61), il est sacré roi (§ 62) et retrouve Nāṅ Setā (§ 24, 36, 37). 30. Il fait de Nāṅ Setā sa première épouse, mais n’a pas confiance en elle (§ 63). 31. Nāṅ Setā dessine le portrait de Rāb (§ 62). 32. Les accusations de Braḥ Rām lui sont insuportables (§63), elle préfère mourir (§ 64). 33. Braḥ Rām fait régner Bibhek à Laṅkā (§ 4). 34. Bibhek et Braḥ Laks règnent en paix (§ 4, 16). 35. Braḥ Rām jouit des richesses de Laṅkā (§ 8, 61).

30 Dans la brochure que la « Commission du Ramker » a publiée à Phnom Penh en 1969, il est brièvement rapporté l’existence d’une histoire ésotérique des aventures de Braḥ Rām, gardée secrètement, sous une forme qui « rappelle la Bible, et offre, comme elle, des scènes allégoriques servant à prédire l’avenir »26. En réalité, l’histoire en question ne se réfère à aucune sorte d’enseignement occulte ; c’est justement ce qui la caractérise et par quoi elle se différencie.

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31 Il s’agit au contraire d’une version spéciale dédiée aux vaticinations des devins, dissimulée en tant que telle derrière leurs prophéties et disparue de la scène parce que l’imaginaire ne pouvait se la représenter que par bribes, jamais la saisir dans la continuité de ses parties. De ce fait, elle nous est parvenue émiettée mais sans doute inchangée, sa transmission au Cambodge par formules cloisonnées lui permettant d’échapper au risque de sa refonte dans le modèle unique. La composition se rapproche de celle du Rāmāyaṇa de Vālmīki27, et de ses variantes en Inde et en Asie28, alors même que le détail des scènes diverge assez peu de celles du Rāmaker29, sauf là où se concentrent les interpolations qui lui confèrent une portée gnostique.

32 Précisément, les astrologues nous disent que le seul vainqueur, le véritable héros, est resté comme en Inde celui qui tue Rāb, autrement dit Braḥ Rām, et non pas le Singe blanc Hanumān (« Fils du vent », i.e. le « souffle » du méditant) 30. Ainsi, quand le Rāmaker porte l’accent sur la grandeur de Braḥ Rām qui est d’ordre spirituel et sur sa « gloire » que symbolise l’union avec Setā, ceux-ci se contentent d’octroyer les biens terrestres au vainqueur et n’hésitent pas le moins du monde à faire disparaître Nāṅ Setā. Hanumān : son rôle s’achève à son retour de Laṅkā ; Setā : son destin est néfaste, elle décide de mourir ; Braḥ Rām : il vit seul au terme de son existence. Les deux époux ne se retrouvent donc pas et il n’est fait aucune mention à la cérémonie funèbre, alors que pour les Khmers la mort de Braḥ Rām est l’épisode obligé de la fin du récit, parce que c’est elle qui préfigure les rites de la dissolution du composé physique avant la jouissance de l’immortalité31.

33 Aucun échafaudage intellectuel ou religieux n’a donc eu prise sur cette composition rigide, intangible, dont le sort des protagonistes ne pouvait être que la préfiguration des destinées humaines. Quelle que soit la forme originale sous laquelle cette version fut introduite au Cambodge – je veux dire dans son rapport avec l’astrologie indienne –, les devins nous l’ont transmise telle quelle, avec ses deux procédés (les huit influences et les flèches de Rām), en prenant soin de ne pas la convertir au cycle chronographique des douze animaux inconnus en Inde, et encore moins de l’illustrer à l’aune de leurs propres idées. La culture indienne avait si parfaitement modelé la pensée qu’une référence à Rāb ou à Setāyas, non seulement suffisait à exprimer le sacré d’une situation donnée, mais encore l’idéalisait en la rendant exemplaire et fournissait la solution ou l’explication requise pour déchiffrer l’oracle.

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TK 480, feuillet A23.

TK 480, feuillet A33.

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NOTES

1. Bizot 1992 a : 46, 60. 2. Leclère 1909, Porée-Maspéro 1962, Hang Thun Hak 1969, Wales 1983. 3. Bizot 1992 a, 1993, 1998, 2000. 4. Guenzi 2010. 5. Bizot 1976. 6. Bizot 1989 : 33-35. Au Siam, les Thaïs connaissent la même version sous le nom de Rāmakīer, Nicolas 1928. 7. Martini 1978, Bizot 1973, 1981, 1989. 8. Bizot 1989 : 20-25. 9. Bizot 1992b.

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10. Bizot 1989 : 51, 57. 11. Cœdès 1935 : 316. 12. Finot 1917 : 76-83, Billard 1963 : 404. 13. Bizot 1996 : 54-55, 65, 231-232. 14. On trouve bien des listes où sont mis en correspondance les animaux du cycle avec les protagonistes de l’épopée indienne : 1. années du rat/race des dieux/siège Bibhek ; 2. année du bœuf/race des hommes/siège Braḥ Rām ; 3. année du tigre/race des yakhs/siège Khar ; 4. année du lièvre/race des hommes/siège Braḥ Lakh ; 5. année du dragon/race des dieux/siège Nāṅ Setā (ou Sedā, ou Sītā) ; 6. année du serpent/race des hommes/siège Hanumān ; 7. année du cheval/ race des dieux/siège Rāp ; 8. année de la chèvre/race des dieux/siège Bibhek ; 9. année du singe/ race des yakhs/siège Braḥ Rām ; 10. année du coq/race des yakhs siège Rāp ; 11. année du chien/ race des yakhs/siège Braḥ Lakh ; 12. année du porc/race des hommes/siège Nāṅ Setā. De telles tables sont toutefois incomplètes, dispersées, difficiles à utiliser, évidemment plus récentes et en tout cas postérieures à l’introduction des premières versions du Rāmāyaṇa à Angkor, mais au final assez peu employées par les devins eux-mêmes. Cf. Porée-Maspero 1962 : 320. 15. Pour la translittération du Cambodgien, cf. Tableau des signes diacritiques, in : Bizot 1996. 16. Je donne ici entre crochets le numéro du passage en référence dans le Rāmaker ; cf. traduction française in : Bizot 1989. 17. khmoc : le fantôme, l’esprit d’un mort. 18. bè : il s’agit d’un plateau fabriqué à l’aide d’une lanière de tronc de bananier maintenue par des baguettes de bambou ; la lanière est arrangée de façon à revenir sur elle-même en un nombre rituel de « tours » ou ruot. Les figurines sont modelées à l’aide d’argile ou de farine. 19. Le kandoṅ est un petit réceptacle en feuille de bananier destiné à recevoir de la nourriture, des chiques de bétel, des cigarettes, etc. 20. brāy : âme errante. 21. Dans le Rāmaker, comme dans le Rāmakīen‚ en thaï, il existe un Yaks nommé Khar, neveux de Rāb (Rmk 12). En revanche, « Ghar » est inconnu avec cette orthographe. Il s’agit peut-être d’un équivalent pour Dūbhī, puisqu’il est dit combattre Bālī. Mais cela n’explique pas que les deux noms soient employés simultanément. En tout cas, les présages sont tirés des aventures de Dūbhī et non pas de Khar ou Ghar. 22. Lacune dans le manuscrit (TK 307/B5 : « Lorsqu’il est touché par la massue de Kumbhīlkār » [Rmk ?]). 23. memat’ : dieu du sol, génie protecteur ou familial. 24. Braḥ groḥ : le « destin », ici le « siège » correspondant à l’âge du sujet, soit « Setā enfant ». 25. Cf. traduction française : Bizot 1989. 26. Hang Tung Hak 1969 : 26. 27. Cf. Roussel 1903. Hari Prasad Shastri 1957, 1959, 1962. 28. Raghavan 1975, 1980. Iyengar 1981. Bizot 1989 : 26-29. 29. Ou de manière peu significative : Khar est curieusement instruit dans les sciences divinatoires, il reçoit une flèche de Braḥ Laks et non de Braḥ Rām (8-9); Rāb métamorphosé en crabe est donné comme jouet à Sugrῑb et non comme esclave à Aṅgat (21); Setāyas est instruit dans les sciences magiques au cours de circonstances qu’on ne situe pas (23); Hanumān procure une flèche à Braḥ Rām qu’il va chercher au pied du Mont Sumer, à la suite d’événements qu’on ne connaît pas (50); Rāb ouvre le parasol de victoire sur le conseil de Bibhek (51) alors que celui-ci est déjà censé être passé à Braḥ Rām; Braḥ Laks est blessé par la massue de Kumbhīkār (52). 30. Bizot 1989 : 29. 31. Bizot 1989 : 42-61.

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RÉSUMÉS

Au Cambodge, le royaume est perçu comme un lieu sacré où le mont Meru se dresse au centre du zodiaque. Le monde n’est jamais qu’un vaste amphithéâtre ; le combat des forces du bien et du mal s’y exerce par le biais des planètes avec lesquelles ces forces se trouvent en relation. Dans ce scénario, les devins ont colporté jusqu’à nous les restes d’un horoscope qui se fonde sur des épisodes archétypes du Rāmāyaṇa indien, parce que les héros de la célèbre épopée, à la suite d’un transfert entre leurs exploits et les choses, sont censés influer sur le destin des hommes. Contrairement à ce qu’on pouvait attendre, je montre que le système des signes et des aphorismes utilisés ne restitue pas la version adaptée aux traditions du bouddhisme local, connue sous le nom de Rāmaker, mais qu’il se réfère au poème indien en partant de sa composition primitive, d’origine perdue, préservé en tant que système divinatoire.

In Cambodia, the kingdom is conceptualized as a sacred space where Mount Meru rises from the centre of the Zodiac. The world is but an enormous stage for the battle between the forces of good and evil, through the intermediary of the planets with which they are aligned. In this scenario, astrologers have handed down the vestiges of a horoscope based on the archetypical episodes of the Indian Rāmāya◊a. This is because the heroes of that celebrated epic, owing to the imprint of their exploits on the material world, are thought to influence the destiny of men. The present article shows that, unexpectedly, the system of signs and aphorism employed here does not derive from the adaptation of the epic by the local Buddhist tradition, known as Ræmaker ; rather, the original Indian poem, whose composition is lost in the mists of time, provided the frame of reference for this system of divination.

AUTEUR

FRANÇOIS BIZOT Directeur d’études émérite à l’École française d’Extrême-Orient, ancien directeur d’études à l’École pratique des Hautes Études, section des sciences religieuses, titulaire de la chaire de « Boudhisme de l’Asie du Sud-Est ». Il a publié notamment : - (2011). Le Silence du bourreau, Folio n° 5511 ; - (En préparation). Histoire du bouddhisme en Asie du Sud-Est.

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The Assimilation of Astrology in the Tibetan Bon Religion L’assimilation de l’astrologie dans la religion tibétaine Bon

Charles Ramble

Introduction

1 One of the earliest examples of Tibetan literature is the manuscript classified as “Pelliot tibétain 1288,” commonly referred to as the Annals. A few lines after the beginning of this work we find the following words: “Year of the Dog (650). The body of the great father, kept in the funerary chamber […]”1 Two things are to be noted from this, and subsequent, entries. The first is that the Tibetans of the time were using a twelve-year animal cycle for purposes of dating. The other is that they had not yet adopted the five elements to combine with these animals in order to produce a sexagenary cycle.

2 Together with the Dunhuang collection—to which the Annals belong—and other lesser manuscript collections from the Silk Road, the oldest Tibetan material available to us is that which is recorded on stone stelae. One of these pillars announces a peace treaty between Tibet and China that was concluded in 822, and the first of two oaths sworn in Chang’an. The text of the treaty opens as follows: “The tenth day of the first winter month of the female iron bull year; the name of the year in Great Tibet being the seventh year of Eternal Happiness, and the name of the year in Great China being the first Cang keng year […].”2 The date given here contains three features of particular note. First, the animal from the twelve-year cycle (bull) has been combined with an element (iron), enabling a precise dating within a sixty-year span. The second point concerns the identification of the year as “the seventh year of eternal happiness.” This is a highly unusual instance of Tibetans following the Chinese practice of identifying a year in terms of the reign of a new emperor (tsenpo; btsan po).3 822 was the first year of the reign of the Emperor Cang keng, and it was also the seventh year of the reign of Tibet’s penultimate emperor, Tri Detsugtsen (Khri lDe gtsug btsan), better known as Repacen (Ral pa can; r. 815-838). The Hungarian scholar Géza Uray has suggested that

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these two unusual features may have been adopted for dating purposes because of the special circumstances, “in order to emphasize the equal rank of the two states that was for the first time acknowledged by China precisely in the 821-822 treaty.”4

3 The third feature worth noting is the identification of the day and the month. The system adopted here is the one that is universally attested in Tibetan writing for the dynastic period (c. 627-846). The year was divided into four seasons, and each of these seasons into three parts: early (rawa; ra ba) , middle (dringwa;’bring ba) and late (thachung; tha chung). This practice would in time come to be superseded by three other systems, of which more will be said below.

4 From the earliest times, then, it is clear that the Tibetan calendrical system was a plural one, combining a number of different schemes. Another feature that becomes apparent from the outset is the intimate implication of time-reckoning and temporality with issues of identity and politics.

Outline of the article

5 There is nothing intrinsically Buddhist about the Tibetan calendrical or astrological systems. Indeed, a Tibetan conviction that Kālacakra astrology represented an immutable truth taught by the Buddha led to the preservation of dramatic inaccuracies. However, the discourse in which these systems are conveyed, and the narratives attached to them have a markedly Buddhist character. In the 17th century no less a figure than the Regent of the Fifth Dalai Lama, Desi Sangye Gyatso (sDe srid Sangs rgyas rgya mtsho), claimed that elemental divination was a legitimate path for the attainment of Buddhahood.5 The transformations that the calendar underwent over the course of time attest to its potential political capital, and its perception as a locus of religious or political identity—as prefigured in the examples from the imperial period cited above. In this article I shall be concerned less with the science and mathematics of the Tibetan astrological system than the way in which this system is modified in different cultural environments. The environment with which I shall be particularly concerned here is the Tibetan Bon religion. Although the appropriation of the calendrical and astrological schemes in a number of religious or regional Tibetan contexts has been discussed in a few studies (notably Schuh 1973 and Hobbs 2012), the assimilation of these systems within the Bon religion has never, as far as I am aware, been the subject of investigation.

6 The term “assimilation” will be used in this article to denote two different, but related, processes. On the one hand, it refers to the process whereby the Bonpos have adopted the Kālacakra complex and made it their own. Secondly, it describes the educational curriculum in the context of which trainee Bonpo monks learn the principles and techniques of astrology and divination.

The Kālacakra

7 The examples of dating given at the beginning of this article can leave us in no doubt about the importance of an early Chinese influence.6 Even more important for the development of the Tibetan astrological tradition was an Indian system known as the Kālacakra, the “Wheel of Time.” The end of the Tibetan Empire in 846—the year that

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saw the assassination of the last dynastic ruler—was followed by more than a century during which political power was fragmented, and Buddhism bereft of the royal and state patronage it had previously enjoyed. The emergence of a Buddhist monarchy in Western Tibet in the late tenth century brought with it a surge of activity during which Buddhist texts were rendered into Tibetan from Sanskrit. The translation of certain categories of works had been expressly banned during the dynastic period. The production of such works continued to proliferate in India, and literature from this late phase—the so-called yoginī tantras—were now especially favoured. The Kālacakra was a late example of this category of literature. Several translations of the cycle were made, but for the Tibetans the landmark date for the arrival of the system in their country was 1027. (In fact, the arrival date is probably a fiction; it coincides rather too conveniently with the first year of the system’s sixty-year cycle.) Buddhists regard the Kālacakra as an esoteric teaching of Shākyamuni himself, who preached it in the south- east Indian town of Dhānyakaṭaka. The main recipient was a certain Sucandra, king of the mythical land of Shambhala, where it passed though numerous generations of royalty before it was eventually transmitted to an Indian Buddhist master.

Structure of the Kālacakra7

8 The Kālacakra cycle consists of five chapters, of which the first—the “Outer Kālacakra”—contains the system of astrological reckoning. The original, full-length Kālacakratantra is believed to have been lost in India, and what came to Tibet was an abridged version known as the Laghu-Kālacakratantra (Tib. Dügyü; bsDus rgyud ), together with a commentary entitled Vimalaprabha. Although there is clear evidence that the Kālacakra system of calculation was in use in Tibet as early as the twelfth century—notably in a calendrical system developed by Dragpa Gyaltsen (Grags pa rgyal mtshan; 1147-1216), this adoption was partial,8 and it was not until the time of Phagpa (’Phags pa), the hierarch of the Sakya (Sa skya) school of Buddhism, that the calendar became binding for the entirety of Tibet. Phagpa (1235-1280), who was the imperial preceptor (Chinese ti-shih ) to Qubilai Khan, developed the so-called Sakya-Yuan calendar by adapting the Chinese sexegenary cycle to that of the Kālacakra so that the starting date of the cycle was not the Wood Rat year—as in the Chinese scheme—but the Fire Hare year, three years later. The name of this year, Rabjung (Rab’byung; Sk. Bṛhaspati) came to denote the cycle as a whole. Phagpa advanced the start of the year from the spring, when the Kālacakra’s year begins, to coincide with the , on the grounds that this was the beginning of the Mongolian year. Even today, Tibetan almanacs refer to the months in this sequence as “Mongolian months” (horda; hor zla). Like the Chinese calendar, the Sakya-Yuan calendar is luni-solar, which means that certain years require the intercalation of a thirteenth month. Unlike the Chinese system, however, the Tibetan calendar determines these intercalations on the basis of Kālacakra-based calculations, with the result that the Chinese and Tibetan New Year do not always coincide. Phags pa’s intention was undoubtedly a dual one. Namely, that on the one hand the common ground between Tibet and China regarding year-counting and year- beginning should be emphasised and made binding, while on the other he wants to make it clear that he is creating a non-Chinese calendrical system that follows the tradition of the Kālacakra. This distinction must doubtless be seen as a delicate political matter.9

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9 A further indication of the synthetic nature of the calendar is given by the official Tibetan almanacs, which begin not in the first but in the third month, in acknowledgement of their debt to the Kālacakra.

10 The tropical year is the length of time taken for the sun to return to the same point— such as the spring equinox—in the cycle of seasons. The sidereal year, by contrast, is the length of time it takes for the sun to complete its apparent cycle along the ecliptic and through the twelve constellations of the zodiac. The tropical year lags behind the sidereal year by approximately twenty minutes. According to the Kālacakra, at the beginning of the year (that is, the third month in the Sakya-Yuan calendar) the sun should enter the sign of Meṣa (Aries) and at the same time reach the spring equinox. However, because of the growing discrepancy between the sidereal and tropical years— the phenomenon known as the precession of the equinoxes—it was observed in the 15th century that the equinox occurred 23 days before the sun entered Aries. The Tibetans’conclusion was not that the Kālacakra reckoning system was wrong (it was, after all, the word of the Buddha), but that the discrepancy was caused by Tibet being located to the east of India. Nevertheless, different systems of calculation were developed after this time in order to correct the discrepancy.10 Although this is not our main concern here, there is some evidence—mentioned below—that certain Bonpo scholars also developed such corrective systems.

The Bon religion of Tibet—a brief introduction

11 In addition to the growing body of research on specific aspects of Bon, there are a number of works of a more general character, notably Karmay 1998 (1975), Snellgrove 1967 (Introduction), Kvaerne 1995 (Introduction) and the articles contained in Karmay and Watt (eds) 2007. From a historical point of view, Bon appears to be a confluence of religious and cultural currents from a range of periods and geographical provenances, notably India, China, Central Asia and Tibet itself. The effort to organise these different strands into a coherent system has been undertaken by several Bonpo scholars over the centuries, and though there are several classificatory schemes, the tradition as a whole is referred to as Yungdrung Bon, “Eternal Bon.” For followers of Bon—the Bonpos—the corpus of doctrines and practices that have been recognised as Yungdrung Bon is regarded as the teaching of Shenrab Miwo (gShen rab mi bo), the founder of the religion. Shenrab is believed by the Bonpos to have lived many thousands of years ago, while Shākyamuni, the historical Buddha, is regarded as a later incarnation of one of his disciples, whence—as we shall see below—the similarity in many aspects of the two religions. For Buddhists, by contrast, this similarity is due to the Bonpos’having copied and modified Buddhist works. While it is surely the case that much in Bon literature owes a debt to Indian Buddhism, there is incontrovertible evidence to show that Buddhist writers also borrowed from Bonpo sources.11

12 The concentration of Bonpo monasteries and communities in the eastern part of Tibet is attributed to the Buddhist persecution of the religion in Central Tibet during the imperial period. However, a number of important Bonpo families were represented in Central Tibet, among them the Dru (Bru). It was a scion of this family, Sherab Gyaltsen the Nonpareil (mNyam med Shes rab rgyal mtshan, 1356-1415) who, in 1405, founded the monastery of Menri (sMan ri) near the present-day town of Shigatse (gZhis ka rtse) and made it a centre for a systematised, monastic Bon tradition. The other Central

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Tibetan monastery that is of particular importance to us is Yungdrungling (gYung drung gling), which was founded in 1834 by Nangtön Dawa Gyaltsen (sNang ston Zla ba rgyal mtshan, 1796-?). Located six hours’walk away from Menri, Yungdrungling would become a centre for the study of dialectics and debate. Both were destroyed during the Cultural Revolution, but were re-established by Bonpo exiles as a single foundation in India during the 1960s. It is with the teaching of astrology and divination in these monasteries, both in Tibet and in India, that this article will be primarily concerned.

Transmission of the astrological tradition within the Bonpo system of monastic education

13 As in the case of the Gelugpa school, the highest academic rank among the Bonpos is that of geshe (dge bshes), which is generally considered to correspond to the degree of Doctor of Divinity in the Western scholarly hierarchy. The programme of training for this degree was very different in pre-1959 Tibet from its present form in exile. The range of materials that students were expected to master was more limited, and there was very little by way of an actual curriculum. To a great extent, monks dropped in and out of classes at liberty, and teachings on more esoteric subjects—such as the higher tantras and the systems of the “Great Perfection” (Dzogchen; rDzogs chen) could be obtained only by private arrangement with a senior monk or teacher.

14 The educational trajectory followed by Tenzin Namdak (bsTan’dzin rnam dag), the Senior Teacher (lopön; slob dpon) of the Bonpos, who is largely responsible for the modern curriculum, is illustrative of the haphazard nature of this education.12 Born in Eastern Tibet, he trained with his uncle as a mural painter and learned to read and write with an older monk who adopted him as a protégé. Spontaneous and haphazard generosity of this sort would have been a critical factor in the education of a novice from a poor background who had no means to pay for his own maintenance in a monastery. At the age of sixteen he accompanied a team of painters to west-central Tibet to decorate the walls of a newly-built hall at Yungdrungling monastery, and when the contract was completed at the end of three years he determined to pursue his real interest—the study of astrology and divination. Although he managed to obtain some basic training at the monastery itself, the individual generally acknowledged to be the expert in this domain had retired from Menri monastery a few years previously and was living the life of a hermit at a cave near a large lake, Namtso, several days’walk away.

15 Gangri Pönlob Tshultrim Gyaltsen (Gangs ri dpon slob Tshul khrims rgyal mtshan) refused at first to accept Tenzin Namdak as his disciple on the grounds that he had devoted the previous eighteen years of his life to full-time teaching and administration, and wanted now to dedicate the remainder of his life to solitary . But Tenzin Namdak’s persistence prevailed—Gangri Pönlob agreed to teach him in exchange for carrying out certain painting tasks—and he began his apprenticeship in earnest with a close study of a recently-compiled treatise on Sino-Tibetan divination by Khedrub Lungtog Gyatso (mKhas grub Lung rtogs rgya mtsho). This was followed by a study of Indian astrology, for which the manual he used was a work by Khenchen Nyima Tenzin (mKhan chen Nyi ma bstan’dzin), the twenty-third abbot of Menri Monastery who had lived in the nineteenth century. We shall have more to say about these two works and their authors in due course.

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16 Tenzin Namdak received no material support from his master, but he was able to keep himself thanks to painting commissions from a wealthy Bon monastery a relatively short distance (two days’walk) from his cave. After four years of training, Gangri Pönlob sent his young ward to Menri monastery, where he embarked on a study of other subjects—particularly philosophy and dialectics—while at the same time carrying out a wide variety of administrative and pedagogical duties.

17 When Tenzin Namdak and a few properly-educated Bonpo lamas found themselves in India amid the general exodus that had followed the Dalai Lama into exile in 1959, the annihilation of the Bonpo monastic system was a very real possibility. If the Bonpos had been a minority in Tibet, their proportion of the exile community was even smaller, at an estimated one per cent of the refugees. A substantial part of these early years was spent in trying to assemble a corpus of Bonpo scriptural works, most of which had remained behind in Tibet. The majority of these would not survive the coming Cultural Revolution. Manuscripts were borrowed from the Bonpo monasteries of highland Nepal and reproduced in India. The publication of these works was made possible thanks to a programme implemented by the US Library of Congress, which resulted in the production of small print-runs of endangered works under the direction of the late scholar Ellis Gene Smith. Tenzin Namdak was engaged on this project for several years, and one of the works he selected for reproduction was a two-volume treatise on Indo-Tibetan astrology by the Bonpo polymath Khyungtrul Jigme Namkhai Dorje (Khyung sprul’Jigs med nam mkha’i rdo rje; 1897-1956), a work of remarkable density and sophistication written when the author was only 28.

18 The Bonpo leaders’efforts to prevent the dispersal of their coreligionists into the primarily Buddhist refugee camps of South India were successful, and 1967 saw the establishment of the main Bonpo centre in exile—and, shortly thereafter, the first Bonpo monastery. This flourishing monastery, located at Dolanji, near Shimla in Himachal Pradesh, is regarded as a translocated conflation of the Tibetan establishments of Menri and Yungdrungling. The current abbot is the thirty-third throne-holder of the Menri abbatial succession.

19 The geshe curriculum that Tenzin Namdak and his peers devised was envisaged as a nine-year course of study. The proposal was submitted to the Central Tibetan Administration (sometimes referred to as the Tibetan Government-in-Exile) in 1977, and duly approved. For the first group of monks to complete this course in 1986 the period of study lasted the proposed nine years. However, new components were added over time and the course at it stands now takes a full thirteen years to complete.

20 Philosophy and dialectics comprise the backbone of the curriculum, as indeed they do in the geshe training system of the Gelugpa school. In contrast with the latter, however, the Bonpo scheme accords a very important place to the sciences.

21 In spite of the vast literary output of the Tibetans, the production of literature was the province of a relatively small proportion of scholarly monks. Education was a substantially oral , with a great deal of emphasis on the memorisation of scriptures and the oral formulation of sophisticated arguments based on this ingested knowledge. Some of the most highly educated monks were quite unable to write, and urgent steps were taken to rectify this situation in the early years of exile in India, where the inability to write was misconstrued as educational or intellectual deficiency. In fact, in Tibet, too obvious an interest in literacy and numeracy for their own sake were looked on askance by the most refined intellects as indicative of an aspiration to

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be a tsedrung ( rtse drung), one of the group of monkish clerics who served the government in various capacities, including the army. Literacy had little to do with scholarship; indeed, good handwriting was rather associated with the worldly skills (along with administrative capability and numeracy) that qualified individuals for government service.

22 While this is not the place to undertake a detailed presentation of the modern curriculum for the Bonpos’geshe degree,13 it is worth at least examining the place that astrology and divination have in their higher educational system.14

23 The category of “cultural sciences” or, more simply “sciences” (rigne; rig gnas) is a long- established notion in Tibet that is derived from Indian Buddhist literature. The original set of five, elaborated in the fifth-century Sanskrit Mahāyānasūtralaṃkara, comprised language, medicine, technology, logic and epistemology, and “inner science” (that is, Buddhism).15

24 In Tibet, this original set was refracted into five major and five minor sciences. These were, respectively, language, syllogisms, medicine, technology and Buddhism; and, for the five minor branches, grammar, poetics, metrics, drama and lexicography. This set of ten, which was formulated by the scholar Sakya Paṇḍita (Sa skya Paṇḍita; 1182-1251), 16 found numerous variants, and in a number of these we find the science of astrology. The corresponding list in the Bon tradition comprises the following five major sciences: technology, grammar, “outer sciences,” “inner sciences,” and medicine. The minor sciences are: poetics, lexicography, astrology, drama and metrics. Sino-Tibetan divination or elemental divination (nagtsi; nag rtsis) does not feature separately, but it is included among the so-called “outer sciences.” While astrology is also regarded as being one of these “outer sciences,” it is accorded a special place among the minor sciences. It should be noted that the Bonpos are by no means unique in according to astrology the status of a science: a more widespread scheme than that formulated by Sakya Paṇḍita has, for the major sciences, technology, medicine, grammar (sic; here a major science as in the case of the Bonpos), logic and “inner science”; and for the minor five, poetics, lexicography, metrics, drama and astrology.17

25 The memorisation of vast quantities of scripture still plays a significant part in the education of Tibetan monks, but the first year of the exile geshe curriculum begins by establishing a solid foundation in grammar and spelling. Tibetan orthography is complex, because the combinations of letters bear little resemblance to their pronunciation, and most Tibetans are terrible spellers. The course book that is used is yet another pedagogical work by Khyungtrul, the “Lamp of the Phenomenal World” (Srid pa’i sgron me) and competence in spelling and handwriting is ensured by weekly tests in dictation. This introductory year is known as the “elementary class,” düdra (Tib. bsdus grwa), a term that literally means “collected topics.” The second year sees the introduction of syllogism (tagrig; rtags rigs ) and grammar. This establishes the fundamental pattern up to the tenth year of the course: the morning teaching session is dedicated to the “core,” broadly philosophical topics, while the afternoons are devoted to the sciences. Grammar (as one of the major sciences) is taught in the afternoon. In the third year, morning classes consist of teaching in epistemology (tshema; tshad ma) and those of the afternoon to poetics—again, one of the major sciences. The Tibetan tradition of poetics (nyen-ngag; snyan ngag) was developed in the thirteenth century in emulation of the Indian kavya tradition of ornate poetry, but the textbook used by the

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Bonpos was one compiled by Gangri Lobpön Tshultrim Gyaltsen, the very hermit who had taught Tenzin Namdak in his formative years in the cave.

26 It is in the fourth and fifth years of their curriculum that Bonpos broach the topics of elemental divination and astrology, and we shall return to this period after a brief overview of the remainder of the course. The sixth and seventh years cover the study of the Perfections (Prajñāpāramitā), while the afternoon science period is devoted to iconometry. Insofar as it deals with the design of mandalas and stupas, the course belongs to the science of technology or construction (zowa; bzo ba). As in the case of astrology and divination, examination of this course component is based on the production of elaborate—usually coloured—drawings of ritual constructions according to textual prescriptions. In the eighth year the students embark on Madhyamaka philosophy—regarded by many as the most prestigious part of the course, not least because it equips the Bonpos to compete with the Gelugpas on their preferred scholarly terrain—and, for the scientific component, techniques for the consecration of stupas. The two main components of the ninth year are cosmology and grammar—specifically, Sanskrit grammar.

27 The domain of cosmology is intimately related to astrology, and we shall return to it presently. The tenth year is devoted to the study of monastic disciplinary code, while the accompanying science is medicine. As stated above, Tibetan medical training is a lengthy process that is traditionally combined with the study of astrology, and this one-year course is designed to familiarise monks with the principles and the associated literature, not to produce practising doctors. The tenth year is the last in which sciences are studied, and the remaining three years are devoted to the study and practice of the higher tantras and, finally, the systems of the “Supreme Way” or “Great Completion,” Dzogchen.

28 Let us return now to the fourth and fifth years of the course. The main morning sessions consist of a study of the Nine Ways of Bon, a system of classification in which all the Bonpo teachings are organised in a ninefold hierarchy; and the fifth year entails a study of the “Stages and the Paths [to Enlightenment]” (salam; sa lam). The following section will examine more closely what it is that students in these two years actually study by way of science.

29 The subject of elemental divination—Nagtsi—has formed the subject of a number of fine studies,18 and since the fundamental principles and techniques used by Bonpos do not differ significantly from those used by the Buddhists, they can be passed over briefly. The following paragraphs will offer a summary of the main treatise on Nagtsi divination studied by aspiring geshes, with particular emphasis on the distinctively Bonpo features of the work. The text is entitled “A Treatise on Elemental Divination according to the ‘Mirror of the Phenomenal World: the Science of Calculation’” (gTsug lag rtsis kyi rig pa snang srid me long las nag rtsis kyi rab tu byed pa).19 The author, Khedrub Lungtog Gyatso Chogle Namgyal, was born in Zalmogang (Zal sgang), in Eastern Tibet, in 1874. The only information I have been able to find concerning this figure is derived from the four-page biographical introduction that precedes the 2005 Indian edition of his work.20 The rather formulaic nature of this preface suggests that little is known about the author. What is at least known is that he served for a time as the Senior Teacher of Yungdrungling Monastery, and the titles of his numerous publications suggest that he was a prolific writer who mastered a wide range of scholarly subjects.

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30 This was the text from which Tenzin Namdak had studied Nagtsi in Tibet. However, it was not among the texts that the Bonpos brought with them into exile, and for many years the geshe curriculum made use of a different manual. In the course of his first return visit to Tibet in 1986 Tenzin Namdak was able to locate a manuscript of this work, and had it printed first in Chengdu and, subsequently, in India.

31 For our present purposes, one of the most interesting aspects of this work is what it tells us about Bonpo beliefs concerning the origins and transmissions of Nagtsi elemental divination. As we have seen, Nagtsi is a Tibetan adaptation of Chinese divination, while Kartsi ultimately derives from the Indian Kālacakra system. According to the Bonpos, however, both traditions come from the Kālacakra, and the Chinese features of Nagtsi are to be understood as a consequence of the roundabout trajectory by which one of the transmissions found its way to Tibet. The Bonpo version of the Kālacakra constitutes the final chapter of the fourth volume (the twentieth chapter overall) of the Ziji (gZi brjid), the twelve-volume biography of Shenrab that dates from the fourteenth century. The sutra—for this is how it is classified—bears little resemblance to the Buddhist tantra, and in certain versions of the Ziji it does not even have the title “Kālacakra.”21

32 The introduction to mKhas grub opens with a few words of homage to the divinity Mawe Senge (sMra ba’i seng ge) before going on to summarise the canonical account of the events preceding the first preaching of the Kālacakra by Shenrab. That episode will be discussed in more detail in the context of the Bonpo Kartsi, to be dealt with below, but for now let us see what Lungtog Gyatso says about the reception and subsequent transmission of the teachings.

33 “Then the Great Dungsob (gDung sob) and the Victorious One Shākya Senge relayed [the teaching].”22 This is a reference to the Ziji’s account of Shenrab’s preaching of the Kālacakra. According to this account, the main recipients of the teaching were four of the Master’s most important disciples, who included two of his own eleven sons. One of these was his eighth son, the Great Dungsob, who is better known by the name Mucho Demdrug (Mu cho ldem drug). Of the other two, one was named Lhabu Dampa Togkar (lHa bu dam pa tog dkar). Shenrab instructed this disciple to promulgate these teachings in India in his next incarnation; and indeed Lhabu Dampa Togkar is regarded by Bonpos as a previous incarnation of the historical Buddha Shakyamuni, one of whose epithets is the “Lion of the Shākyas”—Shākya Senge.

34 The account continues: Some argue that there is no connection [between the Buddha Shākya Senge] and [Shenrab] on the grounds that [the former] did not actually meet [the latter], but there is no real objection: the Enlightened One (i.e. Shenrab) gave his authorisation, and through the higher perception of exhaustion of defilement, it had the inherent force of faultless transmission: this is something that cannot be contested.23

35 “Authorisation” in this excerpt is a technical expression denoting the authority to practise and transmit an esoteric teaching that one has received. Thus the Kālacakra was transmitted by Shenrab to the previous incarnation of Shākyamuni in the course of a legitimate initiation, and he carried it with him into his ultimate life on earth. In the next passage the author elaborates on the transmission lines, and emphasises his point that the apparent diversity of the end-points should not obscure their common origin and essence.

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The [disciples of Shenrab] who are known as the Six Ornaments [later] spread the Kālacakra teaching through all realms. But prior to that time, in the land of Greater China, the Wise King Kongtse (Kong tse) taught the 360 “calculations of transformation” (’gyur rtsis) on the basis of the teachings of the Man ngag Dus’khor. This was transmitted to the Scholar Legtang Mangpo (mKhas pa Legs tang rmang po), who promulgated it in Tibet. The Four Sons of the Sciences translated it, but did so into a variety of languages. Nonetheless, however you alter a golden image, its essential material remains nothing other than gold. And so one tradition is not in contradiction with another.24

36 According to Bon tradition, the Four Sons of the Sciences were responsible respectively for the promulgation of Shenrab’s teachings on sortilege (mo), calculation (in its broadest sense, tsi; rtsis), religious law (chö; chos, i.e. the Buddhist doctrine) and medicine. It is unfortunate, the author is implying, that the babel of languages into which the teachings were rendered should conceal their essential identity as the teaching of Shenrab Miwo. According to this account, then, Shenrab’s teaching of the Kālacakra was the basis for the system of “360 calculations of transformation” promulgated by the Wise King Kongtse. The figure of Kongtse plays an important role in Tibetan accounts concerning divination and certain categories of rituals. As a number of authors have shown, there is little doubt that Kongtse is a Tibetan adaptation of Confucius.25

The cosmic tortoise

37 One motif that has as much importance in the Bonpo divinatory tradition as it does in Buddhist accounts is the well-known figure of the cosmic tortoise.26 The tortoise is central to both certain cosmogonic myths and also to divinatory schemes, and it is worth spending some time to examine the Bonpo assimilation of this motif. In the Buddhist account (which itself has clear Hindu antecedents) Mañjuśrī kills the giant tortoise (in this case, probably a turtle) with a golden arrow so that the flat surface of its upturned carapace can provide a firm foundation for the nascent world. The corresponding account given in Lungtog Gyatso’s treatise is as follows: Then Mawe Senge (sMra ba’i seng ge) in his yellow form embraced the world in his compassion, and emanated a golden tortoise as a foundation, and it lay spreadeagled on its back. Its head pointed to the south and its tail to the north, and its four limbs pointed to the four interstices. It is said to have been the foundation on which Mt Sumeru came into being. From the flesh, the blood, the bodily warmth and the breath of the tortoise there appeared the four great elements; from its twelve outer and inner faculties27 there arose the basic cycle of twelve years. From its eight consciousnesses came the eight trigrams, and from its nine orifices the nine magic numbers. Its eight major joints became the eight great planets and its twenty-eight lesser joints became the twenty-eight constellations. There were further manifestations still: from the subtle constitution of its liver, to the east, there appeared the element wood, to which belong the [calendrical animals the] tiger and the hare, the hexagram Zin, and the planet Jupiter; the Pleiades, the lunar mansions Mindruk, Narma, Go, Lag, Nabso, and Gyal, and the six eastern stars.28 The element of all these is wood. From the subtle constitution of its heart there came the element fire, to which belong the horse and the snake…29

38 The text goes on to list the corresponding manifestations of the tortoise’s organs to the west (lungs) and the north (kidneys), and those in the interstices, along with the associated elements, animals, trigrams and so forth. The section concludes with a list of

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the “magical numbers” (mewa; sme ba) and the values associated with them, as these associations must be recalled without hesitation during the performance of divinatory calculations. The introduction closes with summary formulations of such things as the nature of the relationships (friendly, antagonistic, mother/son) between the various elements and closes with the statement that “this is the foundation for all kinds of divination.”30

39 The entire work is composed in seven-syllable verse, and sections such as this introductory chapter are intended for memorisation so that the student can have the fundamentals of divination at his fingertips—literally: as part of their training, monks are required to draw coloured diagrams of the tortoise as it is described in the text. The essential features of this tortoise are mentally projected onto the hand, with different numbers, elements and directions and the like being accorded fixed positions on the palm and along either side of each digit, so that the diviner’s hand becomes an ever- accessible “memory palace” or calculating device of considerable sophistication and accuracy.

40 As stated earlier, the Bon religion is a complex amalgam of components that probably have very diverse origins in India, China, Central Asia and within Tibet itself. For the Bonpos themselves, the unity of these strands is provided by the belief that they all form part of the teaching of the founder of the religion, Shenrab Mibo, and several canonical works—among the most important of these being the master’s twelve-volume biography, the Ziji—are structured in such a way as to reinforce this doctrine of a common provenance. The domain of cosmogony is especially diverse. The best-known Bonpo cosmological work, the Dzöphug (mDzod phug),31 comprises seventeen chapters, each of which is prefaced with an account of the origins of the universe; but no two accounts are identical. However, the Bonpo canon contains cosmological works other than the Dzöphug, and the versions given by some of these are more markedly different, suggesting the incorporation of quite different traditions. A rough analogy from the Judaeo-Christian tradition would be the book of Genesis, in which two quite different anthropogonic accounts are presented in close proximity without being a cause of consternation for the majority of believers.

41 Lungtog Gyatso’s work opens with an invocation to the divinity Mawe Senge, and a short way into the introduction we find the same divinity emanating the tortoise that is to become the foundation of the world. Mawe Senge, the “Lion of Speech,” corresponds very closely in iconography and function with the Buddhist Mañjuśrī, and there can be no doubt about the Buddhist influence upon the composition of this Bon divinity. The author’s attribution of the tortoise to the activity of Mawe Senge may be a conscious attempt to align the Bonpo version with the Buddhist account, while at the same time maintaining a nominal Bonpo distinctiveness. The Bon canon contains a much older work, the Kun’bum khra bo—of which Lungtog Gyatso was surely aware—in which the cosmic tortoise is framed in a narrative that is much more characteristic of indigenous Tibetan cosmogonic myths.32 This account is especially interesting for our purposes insofar as it combines the relatively abstract numerical schemes that characterise the Indian astrological models with a more Tibetan idiom in which every quantity, from the vastest spans of time or the planets down to the minutest second is intimately associated with an elemental being or divinity. The ubiquitous presence of divine agency is especially apparent—and even alarming—in the implication that karma, the law of cause and effect, does not operate by its own intrinsic dynamic but through the

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activity of divinities whose task it is to ensure that the results of past deeds come to fruition.

42 The point of departure in this account is not Mawe Senge but an obscure divinity named Künbum Goje (Kun’bum go’byed). The name is not easily translatable, but may be glossed as “the One who Apportions Spaces for All the Hundreds of Thousands.” In other words, he is named in terms of his function as a primordial divinity who brings order to the undifferentiated vastness of the universe. Although he is described in Buddhist terms as a sugāta, the entire cosmogonic process is expressed in an idiom that is far more characteristic of indigenous Tibetan myths. At that time, the sugāta Künbum Goje (Kun’bum go’byed) brought together the sheen of one of his hairs, the spittle of his mouth and the metallic gleam of his fingernails, the warmth of his body and the breath of his mouth, the impurities upon the surface of his body and the radiance of his mind. With them he wrote the Nine Heroic Syllables of the elements on a precious golden tablet. Then he cast the tablet to the ground. In the centre of the golden earth there came into being the foundation for the lives of the world: a yellow tortoise of gold. Its heart was a wish- fulfilling gem, eight-sided and blazing yellow-green. Künbum Goje’s son, the emanation of his compassion, named All-Pervading Essence of the Earth, came down to earth from heaven as the lord of that heart. From him there emerged the nine Earth-Pervaders: Sipa Drangyug (Srid pa’brang yag), the General Pervader; Saje Hulu Jamkhyab (Sa rje Hu lu’byams khyab); the Earth-lord (sa bdag) Bumje Trhikhyab (’Bum rje khri khyab); Sangwa Agchen Khyabpa (gSang ba ag chen khyab pa); the Earth-lord Tsangkün Khyabchen (Tsang kun khyab chen); the Earth-lord Wangkhyabje (dBang khyab byed); Sister Lhamo Tenma (Sring mo lHa mo brtan ma); Brother Sala Gönbu (Ming po Sa la mgon bu); and as the manifestation of Samo Thangdeng (Sa mo thang deng) there appeared the one called Nambön Karpo (gNam bon dkar po). He took as his wife Sakhen Mamo (Sa mkhan ma mo), who bore their offspring, the Six Brothers and Sisters. The eight Lords of the Earth, the parents [and their six offspring] held power over the elements of the earth, and they exercised their dominion over the elements of the created universe. From them there manifested kings who held sway over the circle of the world—the twelve rulers of the phenomenal world, who put forth sixty manifestations, and the 360 further emanations. To carry out their commands there were the Twelve Queens of the Four Times, who put forth 144 manifestations. These were put out as the 360 Gods of the Days (zhag lha), who produced the 720 Gods of the Times (i.e. days and nights); they manifested as the 990 Gods of the Periods (thang lha), who produced the 90,900 gods of the Moments (yud lha), who produced the ten-million- times-one-hundred-million Gods of the Seconds (skad lha),33 and these put forth a hundred million million34 Instants (skad tsam). Without error or confusion they performed their tasks without transgressing [the limits of] their mansions. And furthermore, the twelve gods who ruled the earth, Sala Gönbu and his ministers, along with their outer circle, the Great Kings who were the Gods of the Law, and their inner circle, the Gods of the Essential Life-force, as well as their four protector divinities: Tiger-skin Quiver Great Man (Tagral Miwoche; sTag ral mi bo che) in the east; Red Bird Lord of the Flock (Bya dmar khyu la rje) in the North; Wild Yak Lord Yagpa Warrior Demon (’Brong rje Yag pa btsan) in the west, and Dragon God King of the Secrets (’Brug lha Gab pa rgyal) in the south. Tsangtsang (Tsang tsang) and his hosts keep watch over our households. Black Sky- dog guards the palace door; Black Hal-dog prevents the movement of corpses; Black Belly-Crawler (Toche Nagpo; lTo’phye nag po) seals the charnel grounds (to prevent vampires from rising); the forty protectors of the elements, and the protectors of the times keep watch over the waxing and waning of the sixty Haughty Ones; the [eight] planets and the [twenty-eight] constellations, thirty-six in all, control the

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years; the forty protectors of the bodily elements and those who take care of birth- places. These and others in the host of the Lords of the Earth came into being in numbers that surpass comprehension, and provided the foundation for the inhabitants of the phenomenal world. They obeyed the word of Shenrab and performed virtuous actions for the enlightened ones. They brought the elements under their control; they maintained the aeons in an even balance; they acted as the protectors of living beings; they set the sky, the earth and time in order. They kept the transitions of living beings smooth. They maintained control over the high, the lowly and the mighty. They repelled the Dü-demons (bdud) and the Sin-demons (srin), dispatching them to their respective demonic realms. They protected the Eternal Bon doctrine; they made manifest the consequences of virtue and sin.35

43 This, then, is the orderly Bonpo universe, with all its spatial and temporal divisions, its processes of change, the heavenly bodies, the living and the dead, in their proper places, animated or kept in place by a pantheon of gods and elementals who assiduously discharge their allotted duties. This remarkable work, the Kun’bum khra bo, confronts us with a sort of Occasionalist universe distantly redolent of that conceived by Al-Ghazali or Malebranche, in which divine intervention is required to establish causal relations between otherwise impotent mundane phenomena – even to the point of operating the machinery of karma.36 But a closer investigation of this universe would take us far from the central concern of the present article, which is to examine Bonpo astrology from two perspectives: the pedagogical environment in which it is transmitted in exile, and the content of the works through which this education is conveyed; and it is to the teaching of astrology proper—Kartsi—that we now turn. The presentation will follow much the same scheme as in the case of Nagtsi, according to the principles set out in the introduction: that is to say, focusing less on actual techniques and performance and rather on the aspect of assimilation in both senses of the term: on the one hand, the distinctively Bonpo formulation of this science and, secondly, the process by which it is transmitted in the context of monastic education.

Kartsi: the Indo-Tibetan astrology of the Bonpos according to Khenchen Nyima Tenzin

44 Mention has been made above of the errors that crept into the Tibetan calendrical system and accumulated over the course of time to produce a marked discrepancy between textual prescription and empirical observation. The reason, as we has seen, was the phenomenon of the precession of the equinoxes and the cumulative disparity between the sidereal and solar years. The corrective techniques developed in India were not transmitted to Tibet with the rest of the Kālacakra, and it was left to a few innovative Tibetan scholars to formulate their own compensatory devices. Dieter Schuh’s remark that empirical observation of the skies probably played a very small part in the astrological activities of the Tibetans is surely true as a general observation (1973: 20). There were, however, certain notable exceptions, and there is some evidence that two eminent Bonpos were among them. The two in question were Shen Khedrub Tshultrim Gyaltsen (gShen mKhas grub tshul khrims rgyal mtshan, 1783-?) and Khyungtrul Jigme Namkhai Dorje (Khyung sprul’Jigs med nam mkha’i rdo rje, 1897-1956), who both wrote treatises on astrology. Biographical accounts of both these figures refer to their use of a gnomon in order to observe the angle of the shadow cast by the sun at different times of year, and their formulations of a set of calculations

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whereby to amend the errors in the Kālacakra. The treatise by Tshultrim Gyaltsen was widely used by Bonpos in Tibet, and it constituted the basic text from which Tenzin Namdak studied the subject in his cave retreat. It was not republished in India until 2004, and in the interim the geshe training programme made use of Khyungtrul’s treatise, that had been printed as early as 1972. It is now once again the standard training manual used in preference to Khyungtrul’s because the mathematical system is said to be more accessible to students. Another treatise that has often been used either as the main course-book or else as a supplement is a work by Khenchen Nyima Tenzin, the twenty-third abbot of Menri monastery.

45 The main differences between these works seems to lie in the “core” chapters that deal with astronomical computations, and although they clearly merit a proper study, their subject matter is beyond the scope of this article. The sections with which we are particularly concerned here are the introductory chapters that deal with the mythological background and the pedagogical principles, and these seem not to differ significantly from one to another. Since Tshultrim Gyaltsen’s work is currently unavailable to me, I shall instead base the following account on Nyima Tenzin’s treatise, which I use in preference to Khyungtrul for reason of its greater legibility and clarity of exposition.

46 Nyima Tenzin’s introduction begins with a more detailed account of the original sermon on the Kālacakra. Shenrab descends to earth through the various tiers of heaven: In the land of Olmo Lungring, in Tazig, on the full moon of the first spring month of a Wood Rat year, the year Gyal (rGyal), he was born as the princely son of Gyalshema (rGyal bzhad ma), a manifestation of the goddess Jamma (Byams ma).37

47 Several comments are in order at this point. The Bonpos celebrate the birthday of their founder in the twelfth Hor (Mongolian) month, usually corresponding to January, since in the Bonpo calendar this is when the year begins—a more archaic tradition known as the “agricultural new year” (sonam losar; so nam lo gsar) that is celebrated in many parts of Tibet in tandem with the modification introduced in the thirteenth century under the Mongols. We also note that the year in question, Wood Rat, is the first year in the Chinese sexagenary cycle and not that of the Kālacakra, which begins three years later. Other distinctive features of the Bonpo calendar will become apparent presently. When [Shenrab] was in his twelfth year, the Tenma (brTan ma), the goddess of the earth, offered him a golden vase full of nectar as an auspicious object, and invited him to the great palace of Wangchen (dBang chen), the king of the earth-lords, in Upper Sum in Mönyul, to the south of Olmo Lungring, in Tazig. Here, Tsangkun Wangchen (gTsang kun dBang chen) offered him a golden wheel with a thousand spokes, ornamented with a sun-and-moon jewel, and besought him to promulgate the doctrine. So in order to preach the doctrine he ordered that a citadel of the mighty Kālacakra should be built. The project was assisted by the gods, the serpent-spirits, and humans, and the king of crafts Garma Lisho (Gar ma li sho) and [craftsmen known as] the Six Ornaments who Bring Beauty to the World built: a square perimeter wall, each side of which measured 140 fathoms, and in the middle of it a palace named Barab Yongdu citadel (gsas mkhar ba rab yongs’dus). They brought together examples from the architectural styles of the gods, demi-gods, serpent-spirits, and the divinites of the sin, si, kö and cha (srin, srid, bskos, phya [sic]38) classes.39 In the centre was the mandala of the gods, which was the Buddha-field of the Kālacakra; the middle space was an enclosure containing a great variety of desirable things for offerings; the outer space was a garden with the hexagrams, the

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elements, the magic numbers; the cycle of twelve years and other such things; the seventy cosmic protectors, and the kings of the four quarters. But their wondrous beautiful palaces and realms, and the [realm of the] 33 gods, could not be compared to it. On the day of the full moon of a Water Pig year, in the month named Nag, that Protector of a Hundred Teachers (i.e. Shenrab), in response to the request from a circle [of eight shen priests including] Tshangpa Tsukphü (Tshangs pa gtsug phud) and a huge host of countless millions of other beings, represented by their chiefs, preached the Kālacakra, a Bon teaching belonging to the “Treasury” category.40 …The [Kālacakra] cycle was entrusted to Serthub (gSer thub; Kankamuni) and Ösung (’Od srung; Dīpaṃkara) as a treasure of the doctrine, and it spread thence vastly in Shambhala, in Tazig,41 and after that it was transmitted to Dungsob.42 He later started the “Doctrine of the Speech” of the Teacher Shenrab. He was one of thirteen to put together the teachings of the Teacher Shenrab and add commentaries. Then Dungsob systematised it and taught it to the six ornaments of scholarship, the translators, with commentaries and supplementary texts. Those six great translators translated it into the languages of Zhangzhung, India and China, and caused the doctrine to flourish. Subsequently the great teacher Tsilu (Tsi lu)43 transformed it into a Buddhist system.44

48 The author then goes on to trace the transmission of the teaching along a succession of Bonpo masters, ending with his own teacher “from whom I received the teachings in full, like the contents of one vase being poured into another.”

49 Against this background of an uncompromisingly Bonpo formulation of the Kālacakra’s origins and transmission, we come to an introductory chapter entitled “A brief presentation of the essential preliminary steps.”45 A detailed summary of this chapter is worthwhile for two reasons. First, because it contains sections that feature distinctively Bonpo elements—such as a certain system for naming the years—and secondly because it sets out the fundamental concepts and techniques that monks are required to master during their astrological training. At the end of this article I shall offer some tentative conclusions concerning the devices that have been used in the Bonpo assimilation of astrology. To anticipate these conclusions, although the “Bonpo” aspect is obvious in this text it is by no means pervasive, and in certain cases seems to have been added, sometimes almost perfunctorily, to an essentially nondenominational scientific discourse. In most of following subsections it is quite likely that there is nothing specifically Bonpo that one would not find in a comparable Buddhist treatise, but this would need to be determined by a textual comparison of the sort that is beyond the scope of the present account. Nevertheless, since part of the object of this study is to outline the subject matter that prospective geshes study, whether distinctively Bonpo or not, the contents of the chapter will be described briefly.

50 As in the case of the manual of elemental divination, it is expected that monks will memorise the chapters (and others besides) in order to have ready access to the essential tools. The chapter contains no subdivisions, but may be broken down into its constituent parts for the sake of convenience.

Multiplication tables

51 These are known as the thagu (mtha’dgu), literally “bounded by nine,” and the form they take is quite different from that of the multiplication tables taught in the Western pedagogical traditions. The structure is as follows: “one nine or nine ones make nine; two nines or nine twos are eighteen; three nines…” and so forth, up to nine nines—the

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highest calculation in the section, whence the name of the series. After the nines have been exhausted, the series moves down to eight, with eight times eight being the highest in this table. Thus the entire sequence ends with: “one two or two ones are two; two twos are four; one one is one.”46

Direction of numbering

52 “When writing counting or adding numbers, one should do so from right to left.”47

53 The syllables jung, me and da (byung, me, zla) are “code-words” or epithets (on which more will be said below) corresponding respectively to the numbers 5, 3 and 1. Thus if we were to encounter the sequence of syllables jung me da in a formula we should understand them to signify not 531 but 135.

54 “When multiplying, dividing or subtracting, one should do so from left to right.”48

55 Then follows a series of basic procedural rules that are largely self-explanatory. The zero of the number that is multiplying [another] should be placed at the end of the row; the zero of a divisor should block the end of the lower row. If a number that is to be multiplied is empty there can be no multiplication. If the number that is multiplying is empty, then everything must be nil.49 If you multiply by one, there is no increase or diminution; if you multiply by two or other numbers, the increase amounts to adding the figure to itself that number of times. A zero that occupies a place in the middle or at the end of a divisor has no power to divide or do anything except occupy its position.50

56 The section then outlines the principles of single and multiple division before closing with the rule that “a zero may not be placed at the beginning of a row of numbers.”

57 This entire summary of the principles of arithmetic is covered in precisely eight lines of the book. Such a terse presentation is clearly unusable without extensive commentary, but it accords with the Tibetan pedagogical method whereby students memorise a text in such as way that it is always accessible as a mnemonic device that can itself evoke the necessary details.

Astronomical sets and time values

58 mKhan chen then goes on to set out certain basic units of time: The days (or planets) and the karaṇas comprise sevenfold cycles; there are twenty- seven of each of the two [kinds of] “stellar encounters;” there are sixty “hours” [in a day and sixty] “minutes” in an “hour;”51 there are six breaths in one “minute,” and a variety of lesser measure measurements (chashe; cha shas) in one breath.52

59 While the seven planets have considerable importance in astronomical reckoning, the corresponding period, the week (known as a “sevenfold” or a “planetary cycle”) does not feature significantly as a temporal measure outside a modern urban context. In rural Tibet, time is usually reckoned in days and months. As for the karaṇas, the Kālacakra lists eleven. However, four of these are “permanent” (tagpa; rtag pa) and seven “shifting” (phowa;’pho ba), and it is therefore likely that the above excerpt denotes the former category.

60 The twenty-seven “stellar encounters” (karjor; skar sbyor ) are divided into two categories: “major conjunctions” and “minor conjunctions” (tröchen, tröchung; phrod chen, phrod chung). A major conjunction denotes the coincidence of one of the twenty-

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seven lunar mansions with one of the nine planets. Each of the conjunctions has a name and certain characteristics. But there are only twenty-seven conjunctions, because the same effect may be produced by seven different combinations of mansions and planets. Thus the conjunction named “spear” is produced by the coincidence of planet Moon with the lunar mansion named Möndre (Mon gre), the planet Jupiter with the mansion Gyal (rGyal), and the planet Mercury with the mansion Narma (sNar mar), as well as four others. A minor conjunction, by contrast, is the outcome of the combination of the element that is linked with the planet, and the element linked with the lunar mansion. Thus the conjunctions of the elements of the components of the three pairs in the examples cited above would be different from the result of the conjunction produced by the pairs alone, and the nature of the relationship between these two kinds of conjunction is one of the many factors to be taken into consideration when producing almanacs and horoscopes.

61 As for the temporal subdivisions of the day, the word “hour” has been placed in inverted commas since it represents a sixtieth, not a twenty-fourth, part of the day, though it should be noted that the same term is used for the modern Western hour— chustö (chu tshod), literally “water measure,” since it derives from the use of the Chinese clepsydra. Similarly, although a “minute” in this extract is a sixtieth of an hour, it obviously does not have the same value as a Western minute.

Synonyms for arithmetical processes

62 A list of synonyms is given for the actions of multiplication, division, addition and substraction, with occasional helpful explanations for the terms. Thus one of the terms for “divide” is dor (’dor), to “throw away;” the reason for this, the author states, is that when we divide a number, the remainder is more pertinent to the astronomical calculation we are performing than the actual result of the sum—which we frequently discard, dor.53

Names of large numbers

63 Although there are various numbering schemes that do not agree with one another, our author says, this is the list that is given by the Omniscient Nyamme Sherab Gyaltsen, the fourteenth-century reformer of Bon and the founder of Menri monastery, in one of his treatises. There are sixty named numbers: one, ten, 100, and up to a million, ten million and a hundred million. (Indeed, as the author alerts us, the terms for a million and ten million (saya; sa ya and jewa; bye ba respectively) are often reversed. This sequence of nine numbers is followed by another twenty-five, after which we are told that “each of these has [a form called] ‘great’(che).” The “great” form is ten times larger than the simple form. Thus a therbum (ther’bum) is one American billion (a thousand million) and a therbumche (ther’bum che) is a British billion (a million million, the American trillion). The first two sequences therefore contain numbers with a total of 59 different values. “And finally there is the sixtieth one, which is the so- called ‘countless’ (drangme; grangs med),” a number that would be a digit followed by fifty-eight zeroes.54

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Names of small numbers

64 Whereas the high numbers given in the preceding list are largely academic, since they do not feature much in astrological literature, the next section gives “code names” of lower numbers that students must learn well, since they are used very extensively. Most of them probably derive from Indian conventions. Thus the terms “moon,” “hare,” “form,” “rhinoceros,” “the one with white light” are all epithets of the number one, in certain cases by extension of epithets for the moon, which is solitary. (“ Rhinoceros” is a synecdochic reference to the Indian one-horned rhinoceros). The list extends up to number thirty-two, but some of the intervening numbers higher than ten have no epithets at all. The relevance of these names will be illustrated presently.55

Classification of the years and months

65 The section on the year begins with a series of definitions and epithets for the year: The twelve signs of the zodiac, the two solar transits, the passage of the sun around the lunar mansions, the period covered by spring, summer, autumn and winter— this is what is meant by the term year. “Self-protecting,” “forsaker,” “basis of counting,” “the seasons” (lit. “time-joints”), “month-garland,” “that which is to be counted,” “time-component,” “never-ending”—these are names for the year.56

66 This is followed by the list of twelve animals and five elements, and the fact that they can be combined to produce a cycle of sixty. The author then goes on to cite a passage from a work entitled “the Sutra of the Purification of the Yen Heavens,” (gYen khams sel ba’i mdo),57 which gives a list of names for each of the years in the sexagenary cycle. While this is of course the same principle as that employed by the Kālacakra, the list differs in two significant respects. First, it follows the Chinese scheme insofar as the first year is identified with the Wood Rat year, rather than the Fire Hare of the thirteenth-century Sakya-Mongol adaptation; and more interestingly, the list of names is different from those of the Kālacakra. The following table, which lists the first sixteen “Bonpo” names beside those of the Kālacakra with the corresponding years from the Chinese sexagenary cycle, will serve as an illustration of the difference.58

Chinese sexagenary cycle Kālacakra name Bonpo name

1 Wood Rat Mig dmar Byung ldan

2 Wood Ox Khro bo rDzogs pa

3 Fire Tiger Zad pa Rab’bar

4 Fire Hare Rab’byung sByin’gyur

5 Earth Dragon rNam’byung dPa’bo

6 Earth Snake dKar po Myong ba

7 Iron Horse Rab smyos Kun rdzogs

8 Iron Sheep sKyes bdag ’Bras bdag

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9 Water Monkey Ang gi ra mThong ldan

10 Water Bird dPal ldong mChog can

11 Wood Dog dNgos po Phan bde

12 Wood Pig Na tshod ldan Kun dha

13 Fire Rat ’Dzin byed ’Bras skyed

14 Fire Ox dBang phyug Ru ldang

15 Earth Tiger ’Bru mang po Sa’dzin

16 Earth Hare Myos ldan Myos rgyal

67 Although the two sets of names are very obviously different, it is worth noting that one of the syllables in certain pairs—in this excerpt, numbers 8 and 16—is the same. The names from the “Sutra of the Purification of the Yen Heavens” are clearly not alternative translations from the original Sanskrit of the Kālacakra, and in the absence of further research there is little point in speculating on their provenance.

68 After a full listing of the Kālacakra names, the section goes on to deal with the definitions and various names of the seasons, before closing with an elaborate list in which each of the months in the year is identified by ten terms: 1. the Zhangzhung language name, 2. the Mongolian month number, 3. the Sanskrit name, 4. the sign of the zodiac, 5. the Chinese name, 6. the system of Chinese (i.e. elemental) divination, 7. the seasonal division into thirds, 8. the corresponding “link” in the twelve-fold nexus of dependent origination, 9. lunar mansion, 10. epithet (rtags ming, lit. “given name”). From the perspective of the Bonpos, perhaps the most significant thing about this sequence is the addition of a name in the Zhangzhung language. Whereas the authenticity of Buddhist works is considered to lie in their having been translated from a Sanskrit original, for the Bonpos the corresponding language is that of Zhangzhung, an area corresponding to western Tibet and parts of Central Asia that is seen as the heartland of the religion. The fact that the names are simply ordinal numbers in the Zhangzhung language does, however, suggest that the author has formulated them himself rather than drawn them from a more venerable source.

69 Thus the first month is identified as: 1. dari tigzhi (zla ri tig zhi: “first month”); 2. First Mongolian month; 3. Māgha; 4. the Vase (i.e. Aquarius); 5. yi yue (dbyi yol: “first month”); 6. Tiger month; 7. first spring month; 8. Formation;59 9. tapa (rta pa, the ninth mansion); 10. Illusory Austerity (cho’phrul dka’thub).60

70 After listing the association of the months with other quantities such as the elements and the senses, the chapter turns its attention to the seven planets as well as Rāhu and the comet Encke, and lists the numerous names and epithets by which each is known.61 Then follow the lunar mansions, along with the explanation that though there are 27, the mansions Drozhin (Gro bzhin) and Jizhin (Byi zhin), which both conventionally carry the number 21, may be treated separately (following the Chinese, rather than the Indian, convention) to give a total of 28.

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71 The chapter closes with a list of the 30 lunar days, drawing on the same text cited above (the “Sutra of the Purification of the Yen Heavens”) to name and briefly describe the “day-god” (tshela; tshes lha) associated with each, as well as the divinities of other units of time. It remains to be established whether these curious entities bear any resemblance to those of Tibetan Buddhist works such as the White Beryl, or whether they belong to an entirely independent Bonpo tradition.62

72 Although they certainly merit closer comparative study, the remaining chapters of mKhan chen will not be dealt with here, partly for reasons of space but also because they deal with the actual procedures for calendrical and astrological calculations, rather than the theoretical and pedagogical background that is our main concern.

Conclusion

73 The calendrical, astrological and divinatory systems of Tibet are a composite of influences from adjacent regions, notably India, Central Asia and China. The imported traditions were transformed in varying degrees and at different times, but generally in such a way as to represent some aspect of the authority, whether religious or political, that was controlling the science in question. The example of the ninth-century pillar treaty revealed the Tibetans’exceptional adoption of a Chinese scheme of dating in order to express the equal status of their nation; an international context in which the usual twelve-year cycle, probably borrowed from Central Asia, would have seemed too parochial. The thirteenth-century formulation of the Sakya-Yuan calendar was a delicate balancing act between highlighting areas of commonality between Tibet and China, and at the same time favouring aspects of the Kālacakra in order to emphasise Tibet’s distinctiveness. Later, the errors that resulted from an uncritical acceptance of the Kālacakra were tolerated because of the perceived inseparability of the system from the infallible Buddhist doctrine; and while the corrections that were subsequently made were effected for practical reasons, the modifications themselves came to be inextricably associated with particular religious or political entities, such as the Ganden Phodrang (dGa’ldan pho brang) government established by the Fifth Dalai Lama in the seventeenth century. Such investment of collective identity in a particular scientific model is something that has continued into recent times in Tibet: Jacqueline Hobbs gives the example of different Tibetan monasteries vying with one another over the relative accuracy of their respective calendars, a tension that is particularly marked in the case of the resistance shown by eastern Tibetan monasteries to the cultural and scientific hegemony of Lhasa.63

74 Adherence to a particular calendrical scheme need not be primarily a matter of accuracy. Elsewhere I have described the case of a Himalayan community that maintains its own unique system of measuring time. The scheme is clearly based on the standard Tibetan model that is prevalent in the general area, but the year starts two months earlier and each month has exactly thirty days, with no omissions or intercalations. The inevitable disparity is rectified each year in the course of a simple ceremony when the local date is readjusted to that of the official Tibetan calendar.64

75 Whereas our knowledge of Tibetan astrological sciences—and the sectarian issues surrounding them—is based on the study of works produced in a Buddhist environment, the field of Bonpo astrology remains largely unexplored. The very preliminary nature of the present study does not equip us sufficiently to give a

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comprehensive definition of Bonpo astrology, but it is nevertheless possible to make certain observations by way of a tentative conclusion. To begin with, the relationship between Bon and Buddhism in the arena of astrology is likely to exhibit much the same features as we find in other arenas: reciprocal borrowings, divergences in traditions that were once fully shared, substitution of names and so forth. If we are to look for anything distinctively and originally Bonpo in this domain it may be that it is to be found in the extraordinarily rich pantheon of divinities that govern every unit of time, space and activity in the universe. It is likely to have been from this rich source that Desi Sangye Gyatso recruited the “earth lords” who feature so prominently in his White Beryl, though on his own account there may have been other borrowings besides. This Bonpo stratum would therefore be at the level of cosmology rather than calculation, though the Buddhist avatars of these gods may not have inherited the same degree of agency attributed to them in Kun’bum.

76 As for the former, the geshe curriculum designed by Tenzin Namdak exhibits the eclecticism characteristic of Bon as a whole. In particular, the incorporation of sciences such as astrology in the programme stands in contrast to the corresponding curriculum of the Gelugpa school, which eschews the sciences in favour of a more scholastic orientation. As far as the textual tradition of Bonpo astrology is concerned, focusing on the textbooks of the geshe course allows us to see what exactly it is that the monks study, and the degree to which the knowledge they acquire can be said to be distinctively Bonpo. Reference was made above to Dieter Schuh’s observation that there is nothing intrinsically Buddhist about Sino-Tibetan elemental divination, and the assimilation of the practice entailed significant adaptation—reformulation of the rituals as tantric performances, insertion of Buddhist formulae and divinities, and so forth.65 Apart from the intriguing cosmological features mentioned above, the Bonpo features of the works are relatively superficial. Broadly, there are two ways in which the sciences of astrology and divination that have been touched on here may be said to be Bonpo: on the one hand, the system of calculation may have been developed by a Bonpo scholar. This appears to have been the case with certain works such as the astrological treatise Khyung sprul, though this would need to be determined by a systematic comparison of his mathematic procedures with those of better-known works by Buddhist scholars. The second strategy of assimilation is to adopt a nomenclature that is somehow emblematic of the tradition in question without affecting the underlying structures. This is common practice when Bonpos and Buddhists borrow from each other and change little except the names of the divinities. Examples of this procedure that we have seen in the texts examined include the list of Bonpo names for years in a sexegenary cycle attributed to a lost tantra (the “Sutra of the Purification of the Yen heavens”), and the straightforward translation of ordinal numbers of months into the Zhangzhung language.

77 The third, and most significant, method of assimilation noted above was the narrative of a charter myth that establishes the Bonpo antecedents of the science in question, whether Kartsi or Nagtsi. The two myths that were engaged for this purpose were the Bonpo versions of the Kālacakra and the story of the cosmic tortoise. Both the main textbooks considered here, Lung rtogs and mKhan chen, legitimise their subject matter by prefacing it with a summary account of the origin and transmission of the Kālacakra. Within the space of two pages we learn the essential: that the Kālacakra was originally taught by Shenrab; that both Kartsi and Nagtsi are ultimately derived from

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this teaching; and that if the Buddhist version bears similarities to the Bonpo one, that is because they have the same point of departure.

78 But what is most striking, perhaps, is the lightness of this indigenising touch. The evocation of Shenrab’s preaching of the Kālacakra is a rather perfunctory gesture of appropriation, since nothing else from the original text finds its way into the main chapters of either Lung rtogs or mKhan chen. (As noted earlier, the canonical work itself seems in some ways to be a token Bonpo appropriation of the institution of the Kālacakra, since its resemblance to the Buddhist work is little more than nominal.) The evocation of the tortoise in Lung rtogs also has something slightly dutiful about it. Kun’bum contains a version of the myth that is unquestionably distinctively Bonpo in its form and content. But Lung rtogs eschews this version in favour of an extremely brief allusion to an unremarkable, rather generic, account, in which the only Bonpo feature is the name of the divine protagonist, Mawe Senge, who corresponds most closely to the Buddhist Mañjuśrī. Neither of our two authors, Khedrub Lungtog Gyatso or Khenchen Nyima Tenzin, goes to a great deal of trouble to develop a hypertrophied Bonpo identity in these treatises; instead, the reader is left with the impression of two scholars who have little time for identity politics and are impatient to get on with the serious business of dispensing knowledge.

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NOTES

1. Bacot et al. 1940: 30. 2. Uray 1984: 347. 3. Tibetan terms and names will be presented throughout in roughly phonetic transcription. At their first appearance they will be followed by the orthographic form according to the Wylie system of transliteration. Titles and short excerpts from texts will be presented in footnotes in Wylie transliteration only. 4. Uray 1984: 348. 5. Schuh 1973a: 17. 6. It should be noted, however, that the origin of the twelve-year annual cycle may been Turkish or Uighur rather than Chinese (Uray 1984: 344; cf. Hobbs 2012: 132, fn. 52). 7. The following summary of the history of the Kālacakra is substantially drawn from Schuh 1973a: 16ff. 8. Schuh 1973a: 5. 9. Schuh 1973a: 6; my translation. 10. Schuh 1973: 21; Hobbs 2012: 147-157. 11. Blondeau 1984; He 2012.

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12. The following information concerning Tenzin Namdak’s educational trajectory and the development of the monastic curriculum is based on interviews conducted in July 2012. I am indebted to Tenzin Namdak Rinpoche for taking the time to relate these events. I would also like to express my sincere gratitude to Khenpo Tenpa Yungdrung for his patience in helping me with the numerous difficulties I encountered with the texts presented here. Finally, I am grateful to the anonymous reviewer of an earlier draft of this article for numerous helpful criticisms and suggestions. 13. For the dialectics component of the Bonpos’geshe curriculum, see Cech 1986. 14. The following summary of the geshe programme of study is based on dPal ldan. 15. Van der Kuijp 1996: 393. 16. The list follows that given in Cabezón and Jackson 1996: 18. 17. Dung dkar tshig mdzod: 1900. 18. Notably Schuh 1973b; Gyurme Dorje 2001; Tseng 2007. For a recent study of Bonpo pebble divination see Smith 2011. 19. Short title: mKhas grub. 20. Short title: mKhas grub 2005. 21. Whereas in the 1999 Chengdu edition of the Canon the title that appears on the first folio is “The Ritual of the Mighty Kālacakra” (dBang ldan dus’khor gyi cho ga) (dBang ldan: 591), the concluding line identifies the work as “The Chapter Concerning the Teacher’s Establishment of the Precious Doctrine on a Thoroughly Firm Footing,” (sTon pas bstan pa rin chen rab tu brten [recte brtan] pa mdzad pa’i le’u) (dBang ldan: 731); this is much the same as the title it carries in the 2000 Chengdu edition of the Ziji (bsTan pa rin chen: 450) and also in the sixteenth-century manuscript version studied by Snellgrove for the Nine Ways of Bon (Snellgrove 1966: 6). 22. mKhas grub: 438. 23. mKhas grub: 438. 24. mKhas grub: 438-439. 25. The most extensive work on the topic of Kongtse is probably Lin 2007, and references to most of the preceding studies featuring this figure can be found here. 26. For a discussion of a number of Tibetan Buddhist accounts, see Gyurme Dorje 2001: 46ff. 27. skye mched; properly speaking, its five sensory faculties with the five corresponding sensory objects, together with its mental faculty and mental objects. 28. Respectively smin drug, snar ma, mgo, lag, nabs so and rgyal. These are the third to the eighth lunar mansions, corresponding to numbers 2 to 7, since the first mansion is conventionally identified with a zero. 29. mKhas grub: 439. 30. mKhas grub: 440. 31. See Karmay 1998 [1975]: 126-132. For an insightful study of the probable Indian antecedents of parts of the Dzöphug see Martin 2000. 32. The Kun’bum was discovered by a certain Nyagtön Zhönnubum (gNyag ston gZhon nu’bum). Although I am unable to establish precise dates for this figure, he is known to have been a disciple of Guru Nöntse (Gu ru non rtse) who was born in 1136 (cf. Kvaerne 1971: 231). 33. The English translations given here for these terms are of course impressionistic, and are not intended to correspond to conventional Western units of time. 34. The Tibetan term is tragtrig (khrag khrig). In the section on “large numbers” below, the value of a tragtrig is one hundred million million. However, as the author of that particular section himself warns, the significance of these figures varies from one text to another, and in the present context it is clear that it should be greater than the preceding number of Gods of the Seconds. 35. Kun’bum: 24-26.

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36. A fascinating article by François Chenet (1985) traces the history of Indian beliefs concerning the influence of astrological factors on the operation of karma. 37. mKhan chen: 309. The Bonpo goddess Jamma corresponds in certain respects to the Buddhist Tārā. 38. The word cha, when denoting a category of divinities, is properly spelt phywa. 39. An illustration of the Bonpo version of the Kālacakra mandala is given in Namdak et al. 2000: 4. 40. mTho thog spyi rgyug mdzod kyi bon. This is the highest of a five-fold scheme of classification known as the “Four Portals and the Treasury, Five in All” (Bon sgo bzhi mdzod lnga). 41. For the Bonpos, the mythical land of Shambhala that is associated with the Kālacakra in Buddhist literature is identical with their own sacred land of Olmo Lungring (Ol mo lung ring), located in Tazig (broadly, Central Asia). 42. That is, Mucho Demdrug (Mu cho ldem drug), the eighth of the eleven sons of Shenrab. 43. “Tsilu” is a reference to the tenth-century Indian paṇḍit Cilupa. Cilupa’s role in the transmission of the Kālacakra is championed by one of the two main Kālacakra traditions, the Ra (Rwa lugs). The other tradition, the Dro (’Bro lugs), accords this status to a figure named Kālacakrapāda the Elder. 44. mKhan chen: 309-310. 45. Nyer mkho sngon’gro’i rim pa mdo tsam bshad pa. 46. mKhan chen: 311-312. 47. mKhan chen: 312. 48. mKhan chen: 312. 49. dpyi, literally “wiped out.” 50. mKhan chen: 312. 51. As above, the translations in inverted commas are not meant to correspond to the conventional understanding of these terms. 52. mKhan chen: 312. 53. mKhan chen: 312. 54. mKhan chen: 312-313. 55. mKhan chen: 313. 56. mKhan chen: 313. 57. Although it is frequently cited by Bonpo authors, this work has apparently been lost (Tenzin Namdak, personal communication). 58. mKhan chen: 314. The transliterated forms of the names alone are given here, since the phonetic renderings would add little to the comparison. 59. In the twelvefold cycle of interdependent origination, Formation (Tib.’du byed; Sk. saṃskāra) is the second in sequence, following Ignorance. 60. mKhan chen: 315. 61. mKhan chen: 316-317. 62. It may be noted that Desi Sangye Gyatso acknowledges his debt to Bonpo astrological treatises in his compilation of the White Beryl (Gyurme Dorje 2001: 17). 63. Hobbs 2012: 157. 64. Ramble 2002: 80-81. 65. Schuh 1973a: 17.

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ABSTRACTS

The sciences subsumed within the Tibetan category tsi (rtsis), « calculation, » include calendrical reckoning and astrology (kartsi ; dkar rtsis) and, secondly, elemental divination (naktsi ; nag rtsis). The former is essentially based on the Kālacakra, a late tantra that was introduced from India in the twelfth century, and the latter on Chinese precedents. Although scholarly literature concerning the Tibetans’assimilation of these sciences is steadily growing, there has so far been almost no discussion of the way in which they have been adopted into the Bon religion. Using the example of the educational curriculum of a Bonpo monastery in India, this article explores the pedagogical context within which astrology and (to a lesser extent) elemental divination are taught to young monks. A number of didactic works are then examined with a view to discerning their distinctively Bonpo features.

Les sciences englobées dans la catégorie tibétaine tsi (rtsis), « le calcul », comprennent la lecture du calendrier et l’astrologie et, de façon secondaire, la divination. La première est essentiellement basée sur le Kālacakra, un tantra tardif qui, venant de l’Inde, fut introduit au xiie siècle, et la seconde repose sur des précédents chinois. Bien que la littérature savante concernant l’assimilation par les Tibétains de ces sciences se soit beaucoup développée, il n’y a pas encore eu d’étude sur la façon dont elles ont été intégrées à la religion Bon. En utilisant l’exemple du curriculum en usage dans un monastère bonpo en Inde, cet article explore le contexte pédagogique dans lequel l’astrologie et (dans une moindre mesure) la divination selon les éléments sont enseignés aux jeunes moines. Un certain nombre de travaux didactiques sont examinés dans le but d’identifier leurs caractéristiques clairement bonpo.

AUTHOR

CHARLES RAMBLE Directeur d’études dans la Section des Sciences Historiques et Philologiques de l’École Pratique des Hautes Études. Sa recherche et son enseignement actuels concernent principalement la langue rituelle dans la religion Bon et les archives légales et administratives de communautés tibétaines dans l’Himalaya. Il a publié notamment : - (2013). Tibetan Sources for a Social History of Mustang, Nepal. Volume 2 : The Archives of the Tantric Lamas of Tshognam. Halle (Saale), International Institute for Tibetan and Buddhist Studies ; - (2010). « The good, the bad and the ugly : the circumscription of saintly evil in Tibetan biography ». In Linda Covill, Ulrike Roesler et Sarah Shaw (dir.), Lives Lived, Lives Imagined. Boston, Wisdom Publications.

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By the Power of Eternal Heaven: The Meaning of Tenggeri to the Government of the Pre-Buddhist Mongols Par la force du Ciel éternel : la signification de Tenggeri pour le gouvernement chez les Mongols pré-bouddhistes

Brian Baumann

1 In the days of the Mongol Empire edicts were prefaced with the phrase möngke tngri-yin küčün-dür “by the power of eternal heaven.” One can imagine how this phrase struck fear and awe into those who encountered it. It reflected symbolically the potency of the Mongolian khans and reminded all of the power and ruthlessness of their armies. As a symbol of earthly power what could be more evocative than the omnipresent sky? What could be more ominous and foreboding?

2 Today, the fearsome, roving armies are no more. Even so, first-time travelers in the Mongolian countryside are often left awestruck by the sky and especially by the sky at night. Here in the dry, clear air where the land is dark, the stars appear more dazzling, numerous, lower to the ground, and brighter, than they do in urban settings. Standing in its midst, innately we feel the power of heaven as it looms above us. But what is this power exactly?

3 Our purpose in this essay is to pursue the question of what “the power of heaven” means to the Mongols in the early years of their empire. We are not the first to do so. Nor is it the most thorough.1 The uniqueness and value of the essay we submit is in its approach to the problem. We address the question of heaven in a scientific way. That is, we do not go about gathering up all the references to heaven in the sources and then interpret them according to what we think. Nor do we simply parrot back what the sources tell us for our readers to interpret on their own. These straightforward and standard methods have been tried but leave us wanting for two important reasons: first, modern perceptions of heaven are not necessarily the same as those of the 13th

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century Mongols. Second, the rhetoric of heaven in the sources does not for some reason lend itself to literal interpretation. Rather, then, our method is to study the sources in light of the first principles of science. We want to establish aspects of heaven that are first, universal, just as true today as they were during the Mongol Empire, and, importantly, that reflect science prevalent at the time. In doing so we can be much more confident that, apart from whatever else heaven might involve, what we understand about the power of heaven in the Mongol Empire is historically valid.

4 How we treat these first principles is dictated by the constraints of our medium. Though our discussion might be as brief or lengthy as we choose, we hope that it neither leaves readers lacking essential information nor taxes them unduly. Should our discussion of first principles not suffice herein, it is to be noted that we have discussed these first principles before and will again in contexts that allow for more careful elaboration.2

First Principles

5 A basic power of heaven lies in its facility to provide orientation and order over chaos. This power is essential to government. One cannot rule without understanding and in some way harnessing the power of heaven to the benefit of one’s people. Even as we sense heaven’s majesty in some aesthetic way, for those left to navigate the open expanses of the earth, as those who travel the Mongolian steppe and Gobi Desert, the reality of the power of heaven makes its presence felt as a matter of dire consequence. For without a star to guide us a trackless earth is void. Because nature is in truth or apparently void, order depends upon fixing in space an arbitrary point of orientation. From that point of orientation, time and space can be meted out in conventional systems.3

6 When it comes to the observation of natural phenomena, time, irrespective of duration, concerns occasions or events. That is, systems of time derive their regularity from the observation of heavenly bodies. Yet, as there seems to be no exact interval between successive occurrences of celestial events, the rising of the sun, for instance, there appears to be an absolute distinction between the perception of time as an event and the perception of time as duration.4

7 Hosts of celestial systems have been used throughout history to derive order. We know the spheres of the sun and moon, the five visible “wandering stars” or planets, and the sphere of the fixed stars. We know ancient observers used their morning and evening risings and settings, their transits or culminations, and so on. They divided the stars into constellations and bands. We recall the Egyptian decan system, the Western and Chinese zodiacs, the Indian nakshatra system, and so on. The ancients used the celestial bodies to navigate, to count units of time, and to fix the seasons on earth. From year to year these seasons were forecasted in calendars.

8 Because over long duration the positions of celestial bodies lose their efficacy as signs of seasons on earth, from time to time systems would have to be adjusted. These adjustments, as in calculating an intercalary month, were sometimes made on a regular basis. Sometimes they were epochal.

9 In creating and adjusting celestial systems, sages relied on the firmament. Unwavering, the firmament is comprised of metaphysical but otherwise perceptible things: the

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celestial poles (especially the North Pole for those in the Northern Hemisphere), the celestial equator, the ecliptic and its tropics, the seasonal nodes marking the solstices and equinoxes, the four cardinal directions, the colures, the horizon, and so on.

10 Order derived from observable celestial phenomena depends on the location of the observer. From different locations observable phenomena differ. With latitude observable stars and gnomon shadow lengths differ.

11 Here it is important to note that given this relativity, order to the universe was known to be topocentric. That is, the center of the universe was taken to be a political center, Babylon for Babylonians, Jerusalem for Jews, Rome for Christians, Mecca for Muslims, and so on.

12 From a topical center, locations on earth were marked by stars relative to a fixed point in space. Geography was thus defined according to astral orientation.5 In this system the horizons that limited one’s realm nest. By the stars, one can orient oneself. By the same stars one can orient one’s domicile, one’s town, one’s region, one’s nation, all nations, and the earth itself.

13 Celestial systems allow the observer to know what is seen and what is unseen. When a star culminates in the sky, one knows that its counterpart is in inferior culmination, unseen below the earth’s horizon seemingly underneath the earth. One knows the position of the sun by the position of the moon. When one knows the relative positions of all the celestial bodies used to govern, from any one sign one knows when and where every other sign will occur. As events and knowledge thereof was marked by heavenly signs, to know the full scope of celestial systems was to possess what was considered to be “perfect knowledge.”6

14 It was widely held that when celestial bodies are seen they were deemed to exist and said to be “alive,” residing in heaven. When unseen they no longer exist and were considered to be “dead,” residing in hell from whence they are resurrected and return to life in heaven. Though we tend to associate it solely with death and punishment after death, hell, we must remember, is first and foremost a scientific term. It refers to that in heaven unseen or hidden.7 When the sun is up and the stars are shrouded by daylight, the sun is in heaven, the stars, in hell, and vice versa. When the celestial bodies are hidden by clouds, they reside in hell; and so on. Thus, for instance, in the Turkish Kül Tigin Inscription, when we read that east is defined by sunrise; south by noon; west by sunset; and north by midnight, north is being defined in Turkish tradition by the position of the sun in hell.8

15 In a universe so wrought, order changes from place to place, realm to realm. There are many worlds and just as many heavens. Nations did not all have the same stars to work with; they did not share the same seasons; nor would they necessarily mark a given season, the season for sowing, for instance, in the same way. By the same token, ancient peoples did not live in their own respective vacuums either, but, rather, shared much of the same sky. Moreover they had to rely on a shared version of the sky in their interactions with each other.9

16 Government derived from the observation of celestial bodies imparts a symmetrical relationship to heaven and earth. Events on earth are tied to their season in heaven. The configuration of heaven reflects the order on earth. This symmetry is easy enough to understand, but its implications are less so.

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17 Import to realize is that the symmetry between heaven and earth needs be expressed through figurative language whereby physical action plays out through allegory. Allegory is precisely that which reflects an event’s simultaneous tie to heaven and earth. The fixed background that rules the movements of the stars was known figuratively as “the firmament.” The firmament was likened to a dome, vault, cup, or cauldron and said to be made of stone, lapis, crystal, gold, silver, or the like. The celestial poles were likened to a “pole.” Peoples marked the celestial North Pole with a star. That star marks the pole constantly, that is, every day, and was likened to a peg, spike, or nail. A line from the celestial pole to the point of observation forms an axis likened to the axle of a cart, or to a staff or tree. The heavens turn round this axis like wheels of a cart or a mill wheel grinding. The seasonal nodes, that is, the solstices and equinoxes, are fixed in the firmament. They come to be “guarded” by stars or asterisms. The seasonal nodes make up the foundation of heaven and are likened to cornerstones, mountains, or other geographic features. The seasonal nodes are linked through colures. The solstitial and equinoctial colures intersect at right angles at the celestial North Pole and divide the heavens into four equal spheres. These four spheres when reflected onto the earth in geography are known as islands, continents, or four separate oceans. The colures form the brace-work of the heavenly vault and are oft likened to pillars of stone or sycamore or cedar trees. The ecliptic is likened to the meandering course of a river. The horizon that limits one’s realm is likened to a world- encompassing ocean.

18 In symmetry between heaven and earth every term has a hidden meaning. It has a heavenly antecedent and an earthly antecedent. For instance, a place name such as Ethiopia refers not only to a location on earth but to a point in space by which that location is known. As heaven takes precedence over earth, the astral denotation has priority over the mundane denotation. A term such as “Ethiopia” refers principally to a point in space and only secondarily refers to an earthly location. Thus as given by the relativity of orientation, it is possible for each individual realm to have its own “Ethiopia.”10

19 The stars assume the guise of virtually everything under the sun. At the same time, they are, individually and in systems, oft likened to animals.11

20 The full embrace of everything contained within the heavenly vault was widely conceived of as a tightly woven matrix. This matrix filled the void in nature with an all- embracing, fatal order. It served as the backdrop to all events on earth. It was colored by the times for every purpose. It governed the government on earth and was made in and reflected the government’s image. Important to note is that in signifying a time for every purpose, heaven is amoral. It reflects both good and ill. And its auspices, awesome and eternal, inspire fear.

21 For nations of Eurasia, the literature of heavenly allegory constitutes fundamentally the language of order over chaos. It is central to government and the language of science and religion. The disciplines of learning, be they geography, music, or what have you, derive from heavenly allegory like spokes from the hub of a wheel. One who governs does so by way of heaven. The emperor is said to possess heaven’s favor. He who possesses heaven’s favor relies on heaven to control and shape the destinies of others.

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Beyond the Dome of Heaven

22 Government based on reliance on the observable heavens, characterized as it is by symmetry between heaven and earth, relativity and subjectivity, allegory and esotericism, contradictory systems and much complexity, has its limitations. One overarching set of heavenly signs does not effectively govern vast tracts of earth. Importantly, ruling the world by reliance on stars observable to one in the Northern Hemisphere leaves the Southern Hemisphere ungovernable. (Peoples were left to describe the Southern Hemisphere as a chaotic expanse of water).

23 In history the idea arose of governing the whole world, that is, the entire sphere of the Earth, under one system.12 To overcome the fact that observation is relative to a fixed location, this idea depended on mathematical abstraction. Time and space were rationalized according to mean averages. These measures do not perfectly reflect natural phenomena but neither do they vary. Whereas in nature the duration of an hour is variable from day to day and place to place, as a mean average, an hour remains constant wherever one goes. Thus we speak of “mean time” versus “true time.”13 In this way the “zodiac” may refer to a band of constellations along the ecliptic but likewise to the rationalization of space into twelve “houses” each of 30 degrees.14

24 We find the reliance on numerical systems capable of predicting the positions and movements of celestial bodies develop in ancient Mesopotamia. These mathematical systems transcend the power of mere observation for ordering the heavens and ruling the earth. O. Neugebauer rightly recognizes the significance of this development when he distinguishes the treatment of celestial phenomena in terms of mathematics from other aspects of astral science. He dubs this computational approach “astronomy.”15

25 This distinction between observation and computation is important to emphasize. Although the terms are often conflated, celestial orientation and mathematical “astronomy” make for two separate approaches to reckoning. Although only certain civilizations relied on mathematical astronomy, peoples in general relied on observation systems carried out by means of a gnomon. So too we must distinguish from celestial orientation proper divination methods that derive from (often abstract) representations of the stars. Although it too conflates, that which we frequently dub “astrology” has a definable history.16 Conversely, although conventional systems of celestial orientation are amenable to history to some degree, the science itself is not.

26 To imagine governing the sphere of the earth with one system entails seeing the world in an entirely different mode. By abstracting time and space away from observation the subjective world relative to one’s point of observation becomes an objective world fixed in space irrespective of any one observer. In this transformation the center of the earth goes from an arbitrary topical center within a given realm to the very core of the earth itself. The worldview thus shifts from that which is “topocentric” to the “geocentric.”

27 It is worth noting that a casualty of this change in worldview is hell. Hell, we remember, refers to that in heaven which is “unseen” or “hidden.” The concept implies a subjective, topocentric worldview. From an objective, geocentric worldview whereby we conceive of the existence of the entire sphere of the earth in the midst of the heavens irrespective of the view of any one observer, nothing is unseen or hidden. Hell ceases to exist. Champion of the objective, geocentric worldview, Ptolemy dismisses hell in his Syntaxis (1.3.12), when he writes: “But to suppose that [the stars] are kindled

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as they rise out of the earth and are extinguished again as they fall to earth is a completely absurd hypothesis.”17

28 In keeping with the objective mode of viewing nature, the rhetoric of knowledge changes as well. The idea of governing the entire sphere of the earth in one system engendered a faith that through close observation and numerical computation perfect constants could be found that would eliminate the irrational remainders that make any one phenomenon incommensurate with any other. The successful determination of celestial phenomena would bring everlasting order. It was a matter of faith in determinism that the apparent contradictions that exist in Nature’s logos could be coherently explained. In this faith in determinism, the rhetoric of knowledge shifts from allegory to explanation.

29 Allegory and explanation, we must realize, are antithetical modes of discourse. As modes of scientific discourse, they represent two distinctly different worldviews. It is not that science from the subjective, observation-based, topocentric worldview could or could not explain phenomena. In relying on allegory to represent symmetry between heaven and earth, this mode of scientific discourse simply does not explain. In this allegory does not show a poor understanding of nature. It shows, rather, (by and large) a perfect (or true) understanding of nature.

30 Explanation, on the other hand, tends to be imperfect. In shifting to an objective, explanation-based rhetoric, in order to avoid obvious contradictions, peoples had to settle on conventions, simplifications, and abstract and imperfect definitions of terms. For instance, although in truth or apparently a semblance of order can be derived from any point, in order to explain an objectively determinate universe a one center had to be chosen. Ultimately most would settle on the core of the earth as the center of the universe. Some peoples, however, preferred the sun.18 Likewise the earth appears to be ever-moving and yet at the same time still.19 To render each concept in allegory, whether we understand the world in stillness as a mountain or in motion as a turning wheel, presents no problem whatsoever. However, in order to represent the world through explanation peoples were forced to choose one state or the other.20 In the same way, any given celestial event, be it the day, month, year or what have you, can be defined in any number of discrete ways. The day, for instance, can be defined relative to the sun, moon, or stars, from noon, midnight, sunrise, sunset, dawn, dusk, and so on. To represent the day without contradiction peoples simplified the concept into an imperfect abstraction of 24 hours duration.21

31 If these imperfections may be seen as drawbacks, the objective, geocentric worldview has a tremendous upside in comparison with the subjective, topocentric view. Whereas the subjective, topocentric worldview, limited as it is to what one perceives through the senses, is relatively static, the faith-based, objective, geocentric worldview, on the other hand, is exceedingly dynamic. In striving for a singular, abiding, perfect world order, the objective, geocentric worldview pits the full power of the mind against the power of the feeble senses. Thus it employs logic, argument, dialectic, experiment, numerical computation, observation over long duration, technology, and so on in the effort to ever better rule the world. When it comes to practical knowledge, understanding and predicting phenomena, the objective worldview quickly outmodes the subjective.22

32 Faith in an inherent order in nature and hope for a single system to govern it engendered political change as well. People envisioned one government to rule the

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earth. The propaganda of this new political movement led to a new conception of heaven and hell. In it the heavenly dome itself was transcended by a higher heaven. This higher heaven would be given by everlasting moral order. Here no dichotomy exists between good and evil. Only good is to be found. No error or sin is known. Life goes on in joyfulness, and death is no more. We will discuss this transcendence of the vault of heaven in more detail below.

33 Yet, it is important to remember that even though the vault of heaven comes to be transcended by a higher heaven, even though explanation gains preference over allegory as the rhetoric of science, and even though the dynamic faith-based system far outstrips the static observation-based system in terms of practical applications, the subjective, observation-based system and its heavenly vault retains its relevance in terms of simple, basic science. This in part is because to this very day we have not found the constants that explain natural phenomena without contradiction. It continues to be allegory that truly and perfectly renders “the thing itself.” At any rate, the rhetoric of heavenly allegory was maintained in literature and as a means of political propaganda even among traditions that adopted the objective, geocentric worldview.

34 As it relates to how we understand heaven today, we note that the interplay between the rhetoric of allegory and explanation, true science and faith-based science, has characterized much of the history of Western Civilization. We see this interplay in the rise of Christianity out of ‘pagan’tradition, in the rise of Protestantism out of the Reformation, in the re-emphasis on pagan tradition during the Renaissance, and so on. With the Enlightenment in the 18th century, however, renewed faith in determinism fosters an out and out rejection of allegory as the language of science. The heavenly vault is all but annihilated by Galileo’s Solar System and Newton’s Laws. In the perfection of Geography, the symmetry between heaven and earth comes to be all but forgotten. With the world mapped in full, there is now no point in resorting to relative orientation and celestial allegories such as the ‘four oceans’or ‘four continents’to describe it. Stemming from this cultural transformation, scholars of the Academy, firmly grounded in Enlightenment rhetoric, come to take the ancient allegories literally and write them off as imaginary.

35 Approaching the 20th century, with the coming of modernity, this trend towards determinism only intensifies. During the Enlightenment, the Bible, which throughout Christian tradition has been reinterpreted over and over again according to the politics of the time, was again reinterpreted.23 Still, the Bible and the various churches, Catholic and Protestant, retained their authority in governing people’s lives. With modernity, however, the biblical writings are treated in the same way as other “mythologies.” Not only is the Bible taken literally, it too comes to be written off as imaginary, nonsense. The result of so doing has created a yawning chasm between “science” and “religion,” “us” and “them”. It makes a clean cut separating ourselves from the pre-Enlightenment past.

The Misapprehension of Heaven

36 Yet, although that which is taken for science is deemed the epitome of science, this, we must remember, makes for propaganda. Modern Science is actually a counter-science of the type the ancients employed to vanquish less potent governments ordered merely

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according to that which is given by feeble senses. Science, after all, concerns perception. But “Modern Science” intentionally ignores perception. The Western scientific method concerns not what any one person perceives to be true but, rather, the objective proof of what one perceives to be true. One might argue that it is this fundamental rejection of the primacy of science that gives “Modern Science” its tremendous potency. But making such an argument is not our purpose here. Nor by pointing out the paradox of “Modern Science” do we express our political views. Our point is merely that in seeing the scientific tradition of recent centuries as a watershed between all that had come before Western Civilization has undergone anything but a return to allegory as the language of science and government.

37 As a result of these political developments, a misapprehension of the science of the pre- Modern world abides as an almost universal characteristic of modern scholarship. It exists even, and often especially, among historians of science, who ought to know better. Although the problem is complex, in essence, the misapprehension of pre- Modern science comes from understanding pre-Modern science simply as an inferior form of our own tradition. In so doing we fail to recognize that pre-Modern science belongs to a distinctly different mode. When it comes to this incongruity, we assume that because in our tradition the role of science is to explain nature, pre-Modern science must function in the same way. To this end it appears to us that it does so very poorly. We forget that pre-Modern tradition does not explain nature. It governs nature. It orders chaos. It does so through figurative language, allegory. Thus in equating pre- Modern science with our own tradition, we tend to take literally what in fact is figurative and write it off as imaginary. This bent towards literalism obscures traditional science and makes the rhetoric of the non-Modern world all but impossible to understand.

38 Specifically, this misapprehension of science and religion casts a pall over heaven, what it is, how it functions, and its history. For modern people the power of heaven has in many ways been lost. The inroads of civilization being pervasive as they are we seldom face head-on the void in nature. Artificial light makes the stars difficult to view. More than this, our semblance of time and space, standardized of system, has been abstracted away from observable phenomena. To us, the day, month, and year no longer appear to depend upon the positions of the sun, moon, and stars (though ultimately, of course, they do). Still, in English the word ‘heaven’retains its empirical denotation.24 We are free to refer to it in this sense. In “Brothers in Arms” the artist Mark Knopfler does so when he sings: Now the sun’s gone to hell, And the moon’s riding high. Let me bid you farewell, Every man has to die.25

39 Yet ideologies and institutions – sacred and secular – bound by political struggle muddle our perception of heaven and its power. Christian churches de-emphasize empirical heaven and its allegories in favor of a literal interpretation of the Bible. Given the conflicting views of what heaven entails, scholars are wary to presuppose any empirical reality to heaven whatsoever. Yet, ironically, as a result of doing so, the empirical reality of heaven is left out of their discourse, and they too promote an abstract understanding of heaven.26 In elevating an abstract notion of heaven to the exclusion of its empirical reality, intellectuals often give a false sense of religion as being based on nothing more than spirituality or that which is imaginary.

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40 Though heaven was once the foundation of government on earth, it is no more. Though heaven was once known through multifarious systems, these systems by and large have been forgotten. Though aspects of heaven were known through allegory, we want to take these aspects literally. In the modern world heaven has been fragmented into parts. Today “heaven,” “astronomy,” and “astrology” are taken for three separate subjects belonging to three disparate disciplines. “Heaven,” which can no longer be uniformly defined, we conceive of as belonging to Religion; “Astronomy” belongs to Physics; “Astrology,” Anthropology. Not only do these subjects have little or nothing to do with each other, none are understood principally in terms of orientation; none is held to form the basis of government; and none is deemed essential to one’s education.

41 The profound misapprehension of the science and religion and the commensurate misapprehension of heaven negatively influence how we understand the traditions of the peoples of the non-modern world and the heavens they relied on in government. In particular these misapprehensions have negatively influenced how we understand the pre-Buddhist Mongols and their tenggeri “heaven.” In general terms, misapprehension has led to a tendency to view the pre-Buddhist Mongols as wholly alien of culture. Though it is admitted their tradition bears great affinity with that of the ancient Turks, the Mongols are held to be in their own way unique. A singularly primitive people, the Mongols were primitive not only in material culture but intellectually. They were simple-minded and superstitious. Nature weighed heavily upon them. In their failure to understand nature their natural response to what they experienced was one of fear. Though they lived on the open steppe and practiced animal husbandry, their primitive culture reflects a hoary antiquity when they lived in the forests of the taiga and subsisted as hunters and gatherers. In their barbarism occasionally they would take advantage of their skills on horseback and with a bow and arrow to raid their civilized neighbors. These raids, we are given to assume, were ad hoc. To mitigate their fear of nature they relied on shamans. These shamans, however, were nothing more than quacks. Their claims to secret knowledge masked more of the same ignorance and fear of nature. They maintained their grip on people’s lives through the use of divination to give the weight of authority to random action and through the use of ecstatic trance to journey to imaginary worlds above and below. They practiced animism. Apart from the worship of animals they also practiced something we know as “Tenggerism.” Their word tenggeri, written tngri, was not merely the sky but “heaven.” With “religious and mystical overtones” we cannot pretend to know what it means. We equate it with “God.”27

42 From this perspective, the Mongols appear to have been unwitting observers to the rise of their own world empire. In an article dedicated to Ilkhanid patronage of astronomers, the eminent scholar George Saliba describes Hülegü’s interest in astrology as one of naïve bemusement over the sophistry of its cunning Islamic sorcerers. “The position of astrology in Hülegü’s mind was probably very simple,” he says.28

43 But why would we assume so except for the deep-seated, longstanding stereotype of the Mongols as a simple people? After all, Hülegü relied on heaven every step of the way on his campaign from the Mongolian homeland to the heart of Baghdad. He relied on heaven for basic logistics, for the organization and discipline of the people under his protection, and for the sophisticated propaganda it would take to rule the subjects of his realm.29

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44 The equally eminent scholar Nathan Sivin goes so far as to exclude the Mongols from their own world empire when in his many-ways masterful study of the Shoushili 授時曆 he describes the Yuan dynasty (1264-1368) calendar project as “The Chinese Astronomical Reform of 1280.”30 As Sivin would have it, Qubilai Khan (r. 1260-1294), wise in the knowledge of his own limitations, sits idly by and lets his trusted advisor Liu Bingzhong 劉秉忠 (1216-1274) build an empire around him. In addition to the completion of the Shoushili calendar reform, Sivin has Liu Bingzhong single-handedly conceive of, propose, and lead, the organization of the government of China and the building of two great cities, Shangdu and Dadu.31 Here, as throughout his publications, Sivin goes out his way to promote the learning and culture of the Chinese people against stereotypes of barbarism, superstition, and ignorance fostered by apologists for the supremacy of the West. One might note that Sivin’s polemics are less pertinent now that China has become the rising intellectual, cultural, and economic leader of the world. At any rate, in Granting the Seasons Sivin’s apologies for Chinese learning at times come at the expense of the Mongols’and their learning.

45 Important to note, Sivin’s mistake of agency comes not only at the expense of the Mongols but at the expense of the history of science and the humanities in general. It does so because it continues on in the framing of the history of science as the product of race, blithely forgetting that science, essentially, and certainly in the case of Chinese and Asian traditions, concerns the means to, and product of, governance. It is in the history of science’s tradition of emphasis on race over government that puts good scholars such as Sivin on the defensive in the first place. The harm of this misguided approach to the history of science is grave. We would do well to stop it.

Heaven

46 We begin our study of the power of heaven among the pre-Buddhist Mongols by noting the primacy of heaven in their government. Pre-Buddhist Mongolian government (törü) is based on the auspices of heaven. As the Song dynasty envoys, Peng Daya and Su Ting, note, the Mongols all, from lord to commoner, speak of their reliance on heaven.32 In this reliance, there is no evidence whatsoever to assume that Mongolian tngri means anything beyond or other than heaven proper, that is, the totality of celestial systems culminating in what was described figuratively as the heavenly “vault” or “dome.” Neither a single Mongolian source nor any foreign commentary makes reference to breaking through or otherwise transcending the dome of heaven in the way Buddhism, Christianity, Islam, and other like traditions do. We do not find the abstraction of heaven into a moral, everlasting realm where good prevails and evil, sin, and death are no more. Nor does the Mongols’heaven stand for common humanity, as that of the monotheistic traditions does. Likewise, the Mongols’heaven does not afford the same freedom and protection to all people of all nations.

47 It goes without saying that the Mongols reckoned with hell. Yet, there is no evidence to suggest they had assimilated the propaganda of Hell as a place of everlasting punishment. It is an open question whether they used the term tamu “hell,” which derives from Sogdian by way of Uygur, to designate astral phenomena unseen or hidden. It is also an open question whether or to what extent that which is unseen in heaven was linked in some way with rites of death and/or forms of punishment.

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48 Should the Mongols have relied on empirical heaven, they would not have been alone. The Chinese dynastic tradition deifies the power of empirical heaven over government. So too do the Turks. Indo-Iranians do the same. So too, peoples of the Near East. Though Christians and Buddhists transcend this power, they rely on empirical heaven just the same. Indeed one is hard pressed to find one tradition in pre-modern times where this is not the case. Pliny describes the deification of empirical heaven as a commonplace when in his Natural History (2.1) he says, “The world and this – whatever other name men have chosen to designate the sky whose vaulted roof encircles the universe, is fitly believed to be a deity.”33

49 Furthermore, there is every reason to believe Mongolian tenggeri does indeed refer to the empirical heaven of natural history. Sources tell us so outright. In the Secret History (§254 ln. 10323) regarding the tumultuous chaos and strife prior to the time of the birth of Chinggis Khan’s son, Chaghadai, we read hodutai tenggeri horciju büle’e “the starry heavens were revolving.”34 In the Chinese subject-glossaries of Mongolian language, the Zhiyuan yiyu 至元譯語 (13th c.), compiled during the reign of Qubilai (r. 1260-1294), and the Ming dynasty Hongwu (r. 1368-1398) era Huayi yiyu 華夷譯語 (1389), under the category of tenggeri fall aspects of empirical heaven. These include sun (nara), moon (sara), star (hodun), Ursa Major (dolō ebügen “seven old men”), the Pleiades (ülger < Tu. ülker), the Milky Way (tngri-yin oyalar), air (kei), rain (qura), and so on.35

50 Epithets that describe the godly nature of tenggeri such as de’ere “above, supreme,” möngke “eternal,” and erketü “mighty” apply equally to the nature of empirical heaven. 36 Empirical heaven is both above us and supreme in governing our lives. Its auspices are indeed eternal and mighty. What is more, these epithets make for commonplaces throughout Eurasia where again they refer to empirical heaven. In Hebrew tradition, for instance, in the Book of Enoch (72.1) the term ḥezabihomu “their tribes, nations” refers to the hierarchical grouping of stars. The term šelṭānomu “their powers” refers to the power of heaven exercised by stars over the division of the year into its times, seasons.37

51 Likewise, in the functions attributed to tenggeri we see the functions of empirical heaven. As tenggeri is said to shape one’s destiny (jaya’a [n]) and offer one protection (ihe’el ~ ibegel), in ruling the seasons so too does the empirical heaven.38

52 When we know how to look we see the natural basis to Mongolian tradition in more subtle ways as well. For instance, it is well known from accounts such as that of William of Rubruck that the Mongols strewed milk offerings to the four directions.39 Although today the cardinal directions stand alone in our minds as comprising a thing unto itself, in antiquity they were inextricably linked with the full sweep of heaven. As we have seen, the four directions were defined relative to the solstices and equinoxes, the stars that “guarded” them, the prime meridian, the colures, and all within the dome of heaven. In symmetry the dome of heaven came to reflect all earthly events. Thus, as was also often true of the sun, the four directions stood for the perfection of knowledge. In Chinese tradition, for instance, the character 十 shi “ten” represents the four directions and the center, that is, it represents the all, whole or perfect. The character 士shi “gentleman, scholar” signifies one who possesses all knowledge. This pervasive scientific context strongly suggests that in making offerings to the four directions the Mongols acknowledge and revere the four directions for order over chaos and the totality of knowledge they afford. The ritual also strongly suggests that tenggeri, heaven itself, was known to them in these terms.

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53 The natural history of heaven is also suggested in Mongolian tradition by its rhetoric of symmetry between heaven and earth. We see symmetry in the common refrain tngri qajar-a “in heaven and on earth.” And we see it in allegorical passages throughout the Secret History of the Mongols. For instance, in Dei Sechen’s auspicious dream a heavenly sign in the form of a white falcon approaches clutching both the sun and moon. In this passage the white falcon symbolizes heaven. Precisely how the white falcon does so requires elaboration beyond our scope. However, the context of the passage, concerning as it does the boy Temüjin and the girl Börte, makes it perfectly clear that the sun and moon represent the emperor and empress.40

54 The nature of symmetry between heaven and earth is further characterized by what constitutes its absence. The high-priest Teb Tenggeri’s fall from heavenly grace comes through the breaking of his connection to heaven made manifest by the covering of the smoke-hole of his tent. The break from heaven results in his loss of earthly power and his eventual execution.41

55 Suggestive of its scientific function in signifying a time for every purpose, heaven to the Mongols is amoral. As John of Plano Carpini notes, the Mongols’heaven is “the giver of the good things of this world as well as the hardships.”42 Likewise, in governing the times for every purpose the Mongols’heaven sanctions all successful outcomes. If there was a battle to be fought, it was won or lost depending on heaven’s favor.

56 As victory or defeat in battle suggests, heaven’s auspices are eternal (möngke) – but not exactly everlasting. The difference between everlasting and eternal is import to understand. We see the distinction in Lewis Carroll’s rhyme Humpty Dumpty. Here an egg on a wall does not abide forever, but the breaking of the egg is eternal.43 In the difference between “everlasting” and “eternal” we have a distinction between that which belongs to time’s duration and the moment of time itself.44 These two inevitably conflate, yet the perception of one tends to hold primacy over that of the other. Those who understand nature in terms of observation of phenomena are wont to emphasize the instantaneousness of time over time’s duration and wont to emphasize the eternal over the everlasting as well.45 Emphasis on time as duration and on the everlasting comes through the abstraction of time. This emphasis on time as everlasting duration has a history in Zoroastrian Zurvanism, which in turn influences the soteriological movements and monotheistic faiths. Thus traditions in their propaganda referred to the notion of “everlasting life.”46 We do not want to draw any hard distinctions as to whether the term möngke refers to either the eternal or the everlasting. Rather, we observe that the notion of “everlasting life” appears not to be promoted in Mongolian sources.47 More importantly, we can say with certainty that the Mongols do in fact emphasize eternity over the everlasting by observing the deference they show divination as a heavenly medium. In scapulimancy, for instance, a particular fate mandated by heaven is made manifest in the sudden cracking of a sheep bone subjected to intense heat. With the momentary cracking of the bone the heavenly mandate is clearly eternal, not everlasting.48

57 The legitimacy of the institution of the khan comes from heaven. Heaven’s favor belongs to the khan. Heaven ordains the khan to rule. This is his destiny.49 The khan traces his origin from a heavenly genealogy.50 He is the Son of Heaven.51 Heaven affords the khan protection (ibegel) and charisma (sülde).52 His followers elevate him to the khanship. They raise him up on a felt carpet. The earthly carpet on which he sits symbolizes the heavenly firmament. Thus his investiture marks the union of heaven

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and earth under one government.53 To the khan the reins of the heavenly chariot are loosed. The way of rule is opened for him. He rules the lives of common people as heaven does. His rule is consubstantial with heaven itself. He possesses the power to bind. That is, he determines fates of others, and he and his descendants will continue to do so as long as they continue to succeed. His rule is affirmed by heavenly signs. Reliance on heavenly signs in government implies that the khan has the power to know and to predict celestial phenomena.54

58 Heaven gives authority not only to the khan over all other people but to the Great Mongol Nation (Yeke Mongγol ulus) over all other nations. To this end the khan and those in his immediate family purposely intermarry with those in his retinue and with his allies. Together united by the ethnonym, “Mongol,” they and their families comprise the ruling elite. The Mongols’practice of intermarriage shows deference to the power of heaven in that the act of intermarriage brings people of alien origins into the fold of the heavenly-originated genealogy. Known as the Golden Clan (altan uruγ), it is the substance of gold that sets them apart from all other nations as being heavenly originated, for gold was a widely recognized figure for heaven.55

59 Such a travesty has been made of the Mongols in scholarship it bears mentioning that the pre-Buddhist Mongols were neither merely a tribal people; nor were they merely nomadic-pastoralists and hunter-gatherers. In their heavenly origin the Mongols were, first and foremost, aristocrats. Their government was designed to rule not only themselves but others as well. Moreover, the Mongols’government was a martial government. The pre-Buddhist Mongols were, from birth to death, nomadic steppe warriors. Like the Scythians of yore, their first order of business was military. They were a permanent threat and source of constant fear to neighboring settled peoples. Animal husbandry provided the Mongols their sustenance. This was not, however, their calling. They lived and died to be heroes (ba’atur), not herders.

60 In The Headless State D. Sneath does much to mitigate misconceptions of the Mongols fostered by what he calls Anthropologists’“ colonial-era notions of tribalism.”56 Yet, his provocative study of Inner Asian aristocracy, kinship, and nomadism continues on in the Anthropological tradition of putting theory ahead of fact.57 Sneath’s notion that the state in Inner Asia was a “headless” configuration formed by horizontal relations between power holders is contravened by the wisdom of Chinggis Khan as told in Juvaini’s History of the World Conqueror.58 Here Chinggis Khan warns his sons that after his death they must work together so that, as a frail arrow when bundled with others becomes unbreakable, they can resist their enemies. But at the same time, he tells them, they must look to one as the leader of the rest. For a state without a leader, he tells them, is like a snake with many heads. When winter comes it knows not which hole to enter and perishes in the cold. Thus it is decided among them that authority over the empire as a whole would be invested in one man, the khan of khans or qa’an.59 In the Mongol Empire “a headless state” would describe a condition of discord between opposing factions. Such was often the case in fact, but it was not the ideal. Michal Biran rightly describes the Mongolian model for state formation as primus inter pares.60

61 Deference to the primacy of place characterized Mongolian society to such an extent that foreigners were astonished by it. In visiting the ordu of Batu Khan (d. 1255), William of Rubruck found it remarkable that every Mongol knows his place. This knowledge extends to the site where each pitches his tent as they move from camp to

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camp. It reminds him of how the people of Israel all know their place in the tabernacle. 61 To this day, when one enters a Mongolian ger his place awaits him.

62 The Mongols power over their subject peoples was deferred in rhetoric to the power of heaven. In conceiving of heaven in symmetry as the source of knowledge for governing the earth, we realize that this prescription is tantamount to saying that they ruled others by the power of superior knowledge. In their correspondences with foreigners they make this similitude overt when they write, should you not submit to us, heaven knows what will happen to you.62 The superiority of their knowledge was tangible. They were the masters of every situation. Not only did they vanquish their foes in battle – often when greatly outnumbered, they outstripped all others when it came to logistical knowledge, knowledge of geography and how to use the land to their advantage. They possessed superior technologies and gave much attention to research and development. They thrived economically. Their material prosperity entailed knowledge of commodities, goods and services, markets, and efficient transportation across vast expanses of land and sea. And they succeeded in their propaganda, which required knowledge of the humanities, literature and history.

Priests

63 Serving the Mongol khans as keepers and purveyors of knowledge were various traditions of priests. The central function of these priests was to deal in the ways of heaven. In the early years of the empire, priestly tradition was hereditary with the most prominent priests coming from the Qongqotan clan.63 Sometime after 1206 the power and influence of the priests of the Qongqotan clan was greatly diminished. By this time their role as keepers and purveyors of knowledge was already being appropriated by foreigners. Along with various pathic arts and forms of divination, the Mongols’priests studied the heavens.64 William of Rubruck notes carefully that some of their priests, especially those chief among them, were skilled in astronomy and foretold eclipses.65 Precisely what is meant by “astronomy,” however, is again an open question. Did their skill embrace mathematical astronomy (in Neugebauer’s sense of the term) or did they merely observe heaven with the aid of a gnomon? That they were able to predict eclipses does not necessarily indicate the use of mathematical astronomy.66 Either way, by all accounts their knowledge of astral science was rudimentary in comparison with that of their more civilized neighbors.67

64 Through the influence of the renowned anthropologist, M. Eliade, we know the Mongols’priests by the term “shaman.”68 A word of Tungusic origin, we associate it loosely with that which is indigenous to Siberia and utterly primitive.69 In addition to the Mongols’s priests, the term “shaman” has been used to designate priests of numerous peoples throughout the world. The general study of these priests has spawned a whole subsect of Anthropology known as “Shamanism.” Under this discipline Mongolian tradition is frequently compared with the practices of peoples, whose common heritage with the Mongols, if it exists at all, has been broken by an indeterminate period of several millennia. By the same token the discipline tends to downplay apparent connections to the various priestly traditions of the nations of Eurasia.70

65 Though the study of “Shamanism” is not without its merits, this view of the Mongols’priestly tradition is misleading. The pre-Buddhist Mongols did not know their

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priests as “shamans.” Nor did they associate their priests’knowledge with that which is primitive and indigenous to Siberia. The Mongols’priests were known by terms such as qam and böge. As Turkish was something of a lingua franca across the empire, qam, a Turkish word for “priest,” tended to be used by foreigners. The latter term tended to be used by the Mongols themselves. Mongolian böge too shows Turkish influence on Mongolian culture. Deriving from Old Turkish bögü, it means “sorcerer, wizard, soothsayer, or magician.”71 These terms conjure dramatically different connotations than does “shaman.” When we think of magicians, we think of the sophisticated priests of the ancient Near East (which to the Mongols was the West) who used their knowledge of heaven and its rhetoric to oversee the governance of large empires. Particularly, we think of the Magi proper, the priestly clan who figured so prominently in the establishment of the Achaemenid Empire (550-330 BC), which extended from the Mediterranean Sea deep into Central Asia.72

Ecumenism

66 Given the scope of this essay, to duly span the chasm separating these opposing views of the Mongols’priestly tradition proves a bridge too far. Rather, we would like to fit the subject within the greater question of the degree to which Mongolian practices derive from the observable heavens and conform to the traditions of other peoples. Here we want to be clear. In pursing the question of cross-cultural affinities we by no means deny the existence of a unique Turko-Mongolian tradition with Inner Asian roots tracing back to the Han dynasty-era empires of the Xiongnu. Nor do we discount the profound influence of Chinese culture on the Mongols’practices concerning heaven. Indeed we feel Chinese influence to be often underestimated. Neither do we deny the possibility that some semblance of continuity between the Mongols’traditions and those of Native Americans, Pacific Islanders, and such peoples with whom their practices are frequently compared might possibly exist.73 Rather, we want to say, first, that there is no greater affinity between the Mongols’traditions and those of Native American, Pacific Islanders and so on than there is between the traditions of these peoples and those of the peoples of Eurasia in general. More importantly, we want to stress that in the time of the Mongols, and, indeed, long before, an ecumene existed spanning the full sweep of Eurasia. The Mongols irrefutably belonged to it. The ecumene came with a depth of history. To this history belonged not only the ways and deeds of Turks and Chinese but those of the peoples of Western Asia as well. Long before the rise of the Xiongnu confederacy and the Han dynasty in China, the civilizations of Western Asia had established the prototypes of empire, how to govern multifarious peoples and vast tracts of earth by means of the natural symmetry with heaven. One would expect that the Mongols’tradition derives in some way from those that came before. After all, they build an imperial government, and they use the rhetoric of heaven to do so. Yet when we view the Mongols’tenggeri as ultimately “religious,” imaginary and unempirical, our tendency is to look at various aspects of their culture individually and take them at face value. From this point of view it does appear as if their culture is like no other and exceedingly primitive. However, when we view Mongolian practices as expressions of government in the context of symmetry with a scientific, empirical heaven, a very different view emerges.74

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67 It bears remembering that pre-Buddhist Mongolian culture shares much in common with that of the Turks. Turkish culture in turn is broadly influenced by Sogdians and the Persian world. In the comparative lexicon Dīwānü Luġāt it-Türk (c. 1007) of Maḥmūd al-Kāshgharī the close cultural affinity between the Turks and the traditions of the ancient Near East is clear in terms of language and intellectual and material culture. Specifically in terms of heaven, G. Clauson notes that we have no history of a time when the astral traditions of the Turks were not influenced by the traditions of their neighbors.75 The Turks’close affinity with Near Eastern traditions is evident in al- Biruni’s Chronology of Ancient Nations (A.D. 1000).76

68 As far as the Mongols’pre-Buddhist culture is concerned, though our knowledge of their astral systems is a separate, more complicated issue, a vast preponderance of rituals and themes in their tradition have antecedents in the greater ecumene. To thoroughly prove this point is beyond the scope of this essay. However, a brief list of examples might suffice to demonstrate it.

69 It is well known that the Mongols had a fire cult whereby all who came into the presence of the khan had to purify themselves by passing between two fires. So too in ancient Iranian tradition the innocent person underwent a trial by fire in which he passed successfully through two roaring fires.77

70 In the Secret History of the Mongols we have a number of examples of widely known divination techniques, which, though not unheard of in Chinese tradition, in their specific motifs are reminiscent of Near Eastern types. For instance, we have an example of dream divination or oneiromancy in Dei Sechen’s dream of a white gyrfalcon holding both sun and moon.78 Following the desecration of the severed head of the Kereyit leader, Ong Khan, at the hands of Dayang Khan and his Queen Gürbesü, the sound of barking dogs makes for a common omen protasis.79 And prophecy is the method used in Qorchi’s proclamation that “Together Heaven and Earth have agreed: Temüjin [Chinggis Khan] shall be lord of the people”!80

71 Mongolian people, especially soldiers, are known to have kept a number of traditions related to weather and the natural environment. For instance, they refrained from bathing in streams; recoiled in fear and covered their ears at the peal of thunder; and practiced weather magic by means of a certain stone called jada (Tu. yada).81 For these traditions one might assume the Mongols to have been fearful of nature and superstitious. Yet these traditions are just as well found in the Near East where the midsummer heliacal setting of Regulus, the star of the emperor, was accompanied by various signs. People were prohibited from bathing. Thunder foretold sedition and the deaths of great men.82 In this context to avoid bathing in a stream or to cover one’s ears at the sound of thunder shows loyalty to the emperor. We do not know what, if any, stars mattered to the Mongolian traditions, but we might assume that their traditions too were done out of loyalty to the khan and in symmetry with the ways of heaven. After all, as noted by Peng Daya and Su Ting, all Mongols’remember daily in all of their affairs the power of heaven and the protection of the khan.83 If so, in this context of symbolic, ritual symmetry between heaven and earth, as bathing and thunder mean something more than their literal denotation, there is no reason whatsoever to assume the Mongols were any more afraid of these things than were their Near Eastern predecessors or anyone else for that matter.

72 Likewise weather magic by means of the bezoar stone was just as well known in the Near East as it was in Inner Asia.84

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73 Consider the following: With Chinggis Khan’s Western Campaign (1219-1224) bogged down in and around India, the sighting of a supernatural animal with a deer’s body, horse’s tail, green, and with a single horn becomes a sign for the Mongols to return home. The meaning of the sign is interpreted by Yelü Chucai, the famed astronomer. Knowing both that Chucai was an astronomer and that such creatures are commonplace in the makeup of heaven (where they are by no means imaginary), it behooves us to seek a figurative solution, a common astral trope, in answer to the question of what was this creature. When we do, we find a figure, in Chinese a qilin 麒麟 that suits the description perfectly.85 Yet, against this very natural, allegorical explanation, scholars force a contrived, literal explanation of the creature when they propose that the beast may have been a rhinoceros. In taking what is in all likelihood an allegorical allusion for a literal creature our perception of the Mongols changes dramatically. As people who couch their decisions in complex, esoteric, astral allegory, the Mongols appear to us as erudite and worldly. As people who base major decisions involving hundreds of thousands of people on the random sighting of an exotic animal, they appear to us as superstitious and naïve.86

74 As another example, scholars often speculate on the reason the Mongols never returned to Europe after suddenly foregoing their successful campaign under Batu in 1241. Scholars present various arguments. Some argue that their enemy was too fierce; others argue the pastures had not enough green. In arguing against these rational, plausible explanations, scholars occasionally turn to passages in William of Rubruck and Juvaini stating that the Mongols would have returned to Europe if their diviners had allowed it.87 In these rebuttals we are allowed to assume that there may well have been no rational explanation for the Mongols’decision whatsoever; this, because their sorcerers were given to irrational, ecstatic, and random methods. The argument seems lock-tight except when we remember that the same sources also tell us that the Mongols used some form of divination before finalizing every single decision that they made.88 Are we to assume then that they conquered the world by random chance and dumb luck?

75 Forgotten in this line of thinking is the fact that Mongolian divination methods were carried out within a context of symmetry between heaven and earth. Take the practice of scapulimancy as an example. Zhao Gong, the Chinese envoy to Chinggis Khan’s camp in 1221, tells us that they make decisions by striking sheep scapulae with a red-hot implement and then reading the omens in the way the bone cracks. (Here we should point out that the Mongolian tradition reminds Zhao Gong of ancient Chinese divination technique).89 Zhao also tells us that they do so in the context of asking heavenly favor for their course of action. In other words, they make a plan of action and then offer that plan up to heaven. 90 In this, heaven, not the shoulder bone, sanctions the action. The scapula is merely the medium of divination. Thus, paradoxically, in context of symmetry between heaven and earth, it is the randomness of the divination method that proves the deterministic fatalism of heaven and so signifies that the final decision is perfectly well-ordered and reasonable.

Zoomorphism

76 Because of their prominence, special attention needs be paid the animals of the Mongols’pre-Buddhist tradition. The Mongol khans are often seen handling white

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gyrfalcons. They hunt with eagles, big cats, and mastiff dogs. They decorate their belongings with images of dragons and phoenixes. Their ethnogenetic myth begins with the union of a blue-grey wolf and a fallow doe. Together this ritual use of animals is taken by scholars to constitute a cult unto itself, a cult referred to as “animism.” This “animism” is held to originate in the Mongols’ancient, primitive shamanic heritage.91 Although those who hold this view do not necessarily share the implication, this view of the Mongols’ritual use of animals ties into a greater narrative of human evolution and the supremacy of Western Civilization and Modern Science. Thomas Kuhn (1957: 95), discussing the Aristotelian worldview in The Copernican Revolution: Planetary Astronomy in the Development of Western Thought notes that although today the educated and adult view of nature shows few important parallels to Aristotle’s, the opinions of children, members of primitive tribes, and of mentally regressive patients do parallel his with surprising frequency. These views, he says, tend to be animistic. They do not draw hard distinctions between organic and inorganic nature. Under this evolutionary rubric, discussing the Mongols’ritual use of animals from the point of view of primitiveness and shamanism makes us believe not only that the Turko-Mongolian animism is indigenous and uninfluenced by its neighbors but also that it is mutually exclusive of their cult of heaven.

77 Contrary to this view we note that many of the animals found in the Mongolian tradition are in some way foreign. Often, as in the case of lions and peacocks, the animals themselves are not indigenous to the Mongolian native lands. Sometimes, as in the case of dragons and phoenixes, the animals are not even incarnate. Frequently their names are loan words. And many of these names originate to the Mongols’West among Iranians and other peoples. For example, we have Mongolian toγus “peacock” from Persian ṭāus; Mongolian singqor from Persian sungqur “falcon.” Mongolian bars from Persian pars. Usually translated “tiger,” the term principally refers to a “panther” and then to any number of big cats including “tiger, lion, leopard, and cheetah.”

78 In addition to the very foreign makeup of the Mongols’cult of animals, the animals themselves transcend their own individual species. That is, their representations are not literal but figurative. They belong with, and represent aspects of, heaven. To make an easy example, the term bars “tiger” occurs twice in the Secret History, but it does not refer to an actual tiger in either case. In both instances it refers to a figurative tiger, a constellation in the Chinese zodiac used to mark chronology.92

79 In antiquity the Egyptians were famous for elevating their cults of animals to the sky. In doing so they did not abandon their animism.93 We find the same trend across the known world. Though everything under the sun was posited to it, the sky became principally known through animals. The Western and Chinese zodiacs are but modest examples of this trend. When one studies the star lore of various traditions, Egyptian, Mesopotamian, Indian, Iranian, Greek, Hebrew, Chinese, or what have you, one finds that peoples had multiple star systems and that their signs were signified by a great plurality of animals. Hebrew prophetic literature appears to be animistic in its references to owls, ostriches, jackals, and kites haunting the deserts of forsaken peoples. However study of Mesopotamian astral science makes it clear that these animals have their place in the sky, as well.94 The peacock designated various stars, including stars of Aquarius and Gemini. It symbolized various deities, including Hera and Indra. Its blue color and the array of “eyes” covering its outspread tail-feathers were a symbol of heaven itself.95 The falcon for the Egyptians represented numerous

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manifestations of the god Horus as various celestial bodies, the sun, Jupiter, Saturn, and Mars.96 The Iranian’s symbol of the sun as a falcon is held to be influenced by Egyptian tradition, which was widely disseminated throughout the Near East during the second millennium BC.97 As a potent symbol of the power of heaven, heavy trade in Saker falcons, known for their white color, originated in the Iranian homeland in the Badakhshan Mountains.98

80 A characteristic of the Mongols’animism is a preference for white or albino animals. Yet, the same preference is found across Eurasia where animals of a white color were prized as the purest forms of the astral antecedents they represented. The Egyptians designated their zodiac through metonymy as the sacred White Ibis.99 For the Greeks, snowy white in color are Pegasus the Horse and Taurus the Bull.100 In China the stars of Aries, Taurus, and Gemini, which in that tradition comprise heaven’s western sphere, were known as the White Tiger.101 In India the Four Heavenly Kings or Mahārājas ride white elephants.102 In the Book of Enoch stars led by a white bull, symbol of Adam, descend from heaven to mate with snow-white cows.103 For Iranians heaven is personified as having a white body.104 The chariot of Jupiter is drawn by white horses.105 The sign of Tistrya, the star Sirius, is a beautiful white horse with golden ears and a golden caparison.106 White stallions are yoked to Mithra’s heavenly chariot drawing it on a golden wheel with a full shining axle.107

81 In this way, across Eurasia animals types were used in government as zoomorphic representations of heaven. There can be no mistaking this. The Near Eastern tradition, which coalesced during Achaemenid and Hellenistic times but embraces a wealth of types that are very diverse of origin and very old, set a precedent for imperial government. It clearly influenced the Turks. How can it not have influenced the Mongols as well? The star Regulus (alpha Leonis) embodied a symbiosis between the emperor and the lion, the king of beasts. Could one who bore the familiar Turko- Mongolian title Arslan Khan ‘Lion King’have been ignorant of this?

82 The symbiosis between heaven, animals, and earthly rule is made manifest through the tradition of a ritual hunt carried out by the nobility of different nations across Eurasia. The phenomenon is discussed in Thomas Allsen’s The Royal Hunt in Eurasian History. Allsen’s book dispels the notion that hunting needs always be merely hunting. The royal hunt across Eurasia, he carefully shows, served as a means of sovereign legitimation. As such, its practice was imbued with cosmological motifs the authority and provenance to which was recognized internationally as a tradition of the great governments of the ancient Near East. Even though one might associate the Mongols’hunting practices with a timeless indigenous culture, Allsen demonstrates that the Mongols’royal-hunt clearly belongs to this ancient Near Eastern tradition.

83 Unfortunately, however, the long-held view of the Mongols’culture as primitive and isolated does not fall by the wayside so easily. In a review of Allsen’s book in Mongolia Studies, Paul Buell, after praising Allsen’s thoroughness, discounts the book’s reason for being as follows: The biggest problem that the undersigned had with the book is that it views Eurasian royal hunts too much through Iranian-colored glasses and ignores the substantial differences that existed from culture to culture. The Mongols, for example, did not view the natural world in the same terms as the Iranians or others from the Middle East and their royal hunts took place often on an entirely different basis than did Iranian per se. For example, contrary to what Allsen seems to suggest, the Mongol court in China did not go hunting for the sake of staging a royal hunt,

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although the result might have been the same, but went on the trek as Mongols had always done…. In this connection, there is a significant difference between a sedentary court going out in the field for fun and to prove manhood and Mongols doing what Mongols had done since time immemorial. And if Mongol treks seem to have more characteristics of an Iranian royal hunt tha[n] [sic] they should have, we should remember that we see Mongols on the trek usually through the eyes of others, not their own, and this includes Iranian eyes. (84)

84 To say nothing of Buell’s rather ludicrous demand that a comparative study treat individual cultures individually, note how Buell resorts to the Latin qualifier “per se” to make an absolute distinction between the Mongols and all others. To this we should add that Buell’s assertion that nomads hold some special affinity for hunting that sedentary peoples lack is baseless. Sedentary peoples have been hunting “since time immemorial” too. As for by whose eyes we understand Mongolian hunting, although the question of method is one thing (and Allsen’s is most sound), the effect of insisting that a Mongolist such as Allsen sees the Mongols’hunt through Iranian eyes but simply cannot see it through the Mongols’eyes implies that the Mongols’view of the natural world must be uniquely Mongolian. As such, the Mongols’tradition of hunting must be fundamentally different from the tradition of the royal hunt known to all other sovereign peoples across Eurasia. In insisting that the Mongols’view of hunting must be uniquely Mongolian, Buell’s rhetoric again raises the specter of race. The Mongols’ignorance of the Eurasian royal hunt, Buell would have us believe, is due to the Mongols’predisposition for understanding nature in a way that is beyond the memory of time. Allsen’s book does not concern race. It concerns history, the history of government, culture, language, and so on. Yet, sadly, note how viewing the Mongols’culture in racial terms as unique unto itself precludes the Mongols from these discussions. It is as if they are not of this world.

85 Left out of Buell’s discussion altogether is the distinction between hunting for food and hunting as a means of political legitimation. Because hunting is especially vital to Mongolian culture does this mean that they must be ignorant of its use for political legitimation? To suggest that the type of hunting Allsen describes, whereby an overweight and gout-ridden Qubilai Khan rides out on an elephant-born palanquin leading myriads of people and unleashing a panoply of exotic predators imported from parts West to hunt prey confined within artificially constructed game preserves, constitutes an example of the way in which the Mongols have traditionally hunted for food is absurd. As it was, the Mongols expressly forbade others to hunt. They did so not because of scarcity of game but because it posed a threat to their legitimacy. (They had to rescind the law when people began to go hungry).108 Thus we have two aspects to hunting, one of heaven, the other of earth. The two may well dovetail into one and the same thing, but the hunting that we read about in our sources expresses yet another manifestation of the power of heaven.

Continuity and Change

86 Against the notion of the Mongols’culture as primitive and impervious to time is the fact that our sources show it to be changing very rapidly. The Mongolian plateau of Chinggis Khan’s time was a very worldly place. Some fifty nations of Turkish and Mongolian ancestry dwelt there. These nations were interconnected with Chinese and western peoples through trade, that is, through tributary relations, and through

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religion. In addition to the nameless priestly tradition (which we wrongly dub “Shamanism”), Syriac-rite Christianity (or Nestorianism), Zoroastrianism, Manichaeism, Islam, the Brahman tradition, various Buddhist Orders, and the Chinese Three Teachings, , Buddhism, and Daoism were all known to them.109 When Temüjin was elevated to the title Chinggis Khan in 1206, his fold of Mongols comprised a nation of nations. By this time they had adopted the Uygur writing system. This Aramaic-based system came to them not merely as a utilitarian means to an end but as a part of a longstanding tradition of learning with origins going back to the Achaemenids. It was yet another expression of the power of heaven.110

87 Within his lifetime Chinggis Khan would come to be served by priests of every fold within the purview of his realm. Especially important were Uygur scribes who from their native land at the nexus of the Silk Road kept multiple traditions as their own. Over time the prominence of foreign sages would increase. After the conquest of the Jurchen Jin dynasty in 1215, Chinggis Khan enrolled the Khitan polymath, Yelü Chucai (1190-1244). Master of the Three Teachings, Yelü Chucai possessed a wealth of Chinese and Inner Asian learning. Through his participation in Chinggis Khan’s campaign in the West beginning in 1219 Chucai learned the Western tradition as well from his station in Samarkand, then an important intellectual center. Two generations later the Mongols gained another renowned polymath when Chinggis Khan’s grandson, Hülegü (r. 1256-1265), took from among the Ismā‘īlīs Naṣīr al-Dīn Ṭūṣī (1201-1274).

88 We mention these two well-known personages to raise the issue of –what to the Mongols was– Western influence on their culture. As Chinggis Khan moves west, we see him using correctly, and to his desired end, tropes familiar to, and originating in, the West. The question we ask is to what extent were the Mongols utilizing tropes from within a common heritage versus the extent to which they were simply assimilating new rhetoric? Islamic sources such as Juvaini’s History of the World Conqueror show Chinggis Khan referring to himself as the “Scourge of God.” In 1220 he tells the people of Bukhara that they have committed great sins. The proof of that sin is his very existence, for if they had not committed great sins, God would never have sent a punishment such as him upon them.111 The words seem contrived and anachronistic in Chinggis Khan’s speech, but can we be certain the concept was unfamiliar to him? The “Scourge of God” trope, after all, a commonplace in the Near East from at least as early as Isaiah (10.1-19), was applied again and again to marauding steppe warriors from Chinggis khan’s precursor, Attila the Hun, to Chinggis’successor, Timür (1336-1405).112

89 In another example, at the time of Chinggis Khan’s death, his empire was divided up among four children of his principle wife, Börte. It just so happens that this act suits perfectly a common trope whereby the four directions are said to be guarded by four warrior kings and/or princes. The four directions, we remember, are consubstantial with the solstices and equinoxes, the colures; they function as foundational points to the heavenly order and world governments; and so are oft likened to pillars; they divide the world into four spheres; and so are oft likened to continents.113 Did Chinggis Khan know the trope, and did its majesty influence his decision to so divide his empire? Certainly Juvaini understood the connection for he writes that Chinggis Khan had four sons who were “to the throne as its four pedestals and to the palace as its four pillars.” 114 In Old Turkic we find a number of examples of the trope. In the Küli Chor Inscription (KC E12) located in Mongolia’s Central Province (Töv ayimagh) we find reference to tört tigin “four princes” in attendance at the hero’s funeral. 115 In the Manichaean text

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fragments found at Qocho and studied by A. A. v. Le Coq we find reference to the tört ilig tngri “four heavenly sovereigns.”116 And in the Kül Tigin Inscription (KT N13) we find attested as a personal name the term Maqarač for the Indian Mahārāja, the famous warrior kings who guard the four directions.117 These evidences strongly suggest Chinggis Khan had propaganda foremost on his mind when he divided his empire.

90 Another commonly known western trope widely used by the Mongols is that of world dominion under one king. Scholars note that although tentative attestations of the trope are cited in the Secret History of the Mongols and Turkish sources, the trope is firmly attested in Mongolian sources only from the reign of Ögedei (r. 1229-1241) forward. Throughout Eurasia the trope takes numerous variations that would be lengthy and difficult to explain. We find it in Daniel (8.27). We know one variation on the theme in the figure of the Buddhist cakravartin. In Christian tradition (Matthew 4.1-11) the idea of one earthly king ruling all the nations of the world is repudiated as a fool’s game. Given its Western heritage, Peter Jackson follows David Morgan in questioning whether or not the goal of world domination existed during Chinggis Khan’s time.118

91 We do not intend to pursue the question here except to raise two points. First, given the lacuna, how we speculate is determined by our first principles. If we see the Mongols’culture as primitive and indigenous, this leads us to a negative conclusion. We might be tempted to assume otherwise, however, if we were to see their culture as sophisticated and integrated with other cultures of the known world.119 Second, although the notion of one world rule is as at least as old as the age of Herodotus, we tend to forget that the notion’s realization in practice does not come until modern times.120 Whereas modern people think that to rule the world means to rule the entire extent of the spherical earth, to the medieval mind world rule was relative. To rule the world meant simply to hold a kingdom. We see this relativity to world rule, for instance, in the Kül Tigin Inscription where, when it comes to world-wide dominion, we read: Eastwards to the sunrise, southwards to the midday, westwards as far as the sunset, and northwards to the midnight – all the peoples within these boundaries (are subject to me).121

92 And we read: (All the peoples living in) the four quarters of the world were hostile (to [my ancestors]). Having marched with the armies, they conquered all the peoples in the four quarters of the world and subjugated them.122

93 Yet at the same time the Turkish realm is just as well defined according to earthly limits. If the Turkish kagan rules from the Ötükän Mountains there will be no trouble in the realm. I went on campaigns eastwards up to the Shantung plain; I almost reached the ocean. I went on campaigns southwards up to Tokuz-Ärsin; I almost reached Tibet. Westwards I went on campaigns up to the Iron Gate beyond the Pearl River, and northwards I went on campaigns up to the soil of Yir Bayïrqu. A land better than the Ötükän Mountains does not exist!123

94 Thus the extent of any given government was couched in the rhetoric of world dominion. Certainly Chinggis Khan held this relative notion of world dominion. Otherwise he could never have held the reins of power. This notion existed long before Chinggis’time and does not suddenly crop up after his death. After all, the Mongols were from the outset a martial people ordained by heaven with a charge to rule the

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world. As to whether Chinggis Khan intended to extend his world dominion to include the Franks, Japanese, and other nations his descendants would eventually seek to pacify, this is purely speculation into the mind of a man.124

95 These examples demonstrate that the Mongols’pre-Buddhist culture maintains more internal continuity and, yet, at the same time, shows closer affinity to West Asian traditions, than scholars tend to assume.

96 As a telling example of the pervasiveness of the rhetoric of heavenly allegory in Mongolia tradition, consider the very common term dalai, familiar to people the world over in the title Dalai Lama. Though defined as “ocean” or “sea,” scholars note that in sources, especially pre-classical sources, the term usually refers to something more abstract, that which is “all-encompassing” or “world-wide” like unto the ocean. Thus on the seal of Güyük Khan’s famous letter to Innocent IV in 1246 scholars do not translate the title dalay-in qan in a literal way as “Ruler of the Ocean” but in some manner of “Ruler of All.”

97 To this we add that in celestial orientation the term “ocean,” among its many meanings, refers to the horizon whereby stars rise and set. As the stars define any given realm, from the realm of one’s own body to the realm of the spherical earth itself, supernaturally the “ocean,” as a figure for the horizon that limits a given realm, expands and contracts depending on one’s point of view.125 One might say that it expands from one’s finger tips all the way to the celestial equator. This heavenly denotation is attested in Old Turkic in the terms taluy “ocean,” tört taluy “four oceans” (in reference to the four quarters of the sky), and taluy ögüz “ocean stream.” 126 The heavenly denotation is clearly attested in Mongolian as well in Sultan Öljeitü’s 1305 letter to Philip the Fair of France.127 Knowing that the heavenly figure is attested in Turko-Mongolian letters, when we apply this definition to instances of the term in literature we find time and again that it brings clarity of meaning to what was once opaque.

98 For instance, in the Secret History of the Mongols the term dalai “ocean” occurs four times. In one of these (§253, ln. 10218), the term seems to refer to a literal body of water.128 In its three other occurrences, however, dalai seems to refer to a figure of celestial orientation.129 To take one example, in § 245 (ln. 9806) we have an occasion for hyperbole when Mönglik, father of the deposed Teb Tenggeri, reminds Chinggis Khan of their long . I have been your companion, he says: dayir etügen-i danglasun-u tedüi büküy-ece dalai müren-i qoroqan-u tedüi büküy-ece [Since the brown earth was no more than a clod of dirt Since the ocean river was no more than a creek.]

99 Igor de Rachewiltz, who follows Antoine Mostaert in both his explication and translation of the passage, translates the phrase dalai müren (literally ‘ocean river’) as “ sea and rivers,” and he renders the line dalai müren-i qoroqan-u tedüi büküy-ece “Since the sea and rivers were only the size of a rivulet.”130 However, in taking the phrase dalai müren to refer to literal, disparate bodies of water, he overlooks the fact that dalai müren merely stands as the Mongolian version of Old Turkic taluy ögüz “Ocean River,” a figure for the World Ocean or the horizon that limits a given realm.

100 How then do the two different readings of the phrase dalai müren affect the overall meaning of the passage? In its literal sense as “sea and rivers” (which is not a literal translation of the terms themselves) the phrase elicits an intellectual response. To

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think of a literal body or bodies of water makes the passage seem to concern an objective, remote reality; a reality of timeless antiquity; a reality detached from the interlocutors themselves; a fanciful reality, which can only be imagined. However, in its allegorical sense (together with the literal meaning of the words themselves) the phrase evokes a visceral affect. To think of the horizon the passage now concerns the interlocutors directly. The Ocean River is ever-present. They are immersed in it as they speak. Its extent defines who they are. The Ocean River is consubstantial with the limits of their realm. It has changed dramatically over the course of their lives. Father Mönglik is telling Chinggis Khan, I have been your friend since the time when we were very poor and our world was but nothing to now when our realm has become expansive unto the horizon itself.

101 Note carefully here the change in modality from one reading to the next. To read the passage in a literal way, the world it represents appears to be objective, intellectual, impersonal, and imaginary. However, to read the passage as allegory, the world it represents appears to be subjective, visceral, personal, and true. And please remember that this change of modality mirrors exactly the change in perception that occurs as we shift from the modern scientific tradition to the pre-modern. In reading the phrase literally we read after the science of the Enlightenment in Europe and the world we live in now. This reading does not conform to the science of the day, however, and, consequently, makes no sense. This passage thus demonstrates something fundament to the humanities: Only through knowledge of the first principles of science and familiarity with the science of the time can we read in the manner of the sages of yore.

102 All told, these examples show that not only did the Mongols know the rhetoric of celestial orientation but that it took precedence in their culture. When one studies carefully the allegory of celestial orientation trope by trope, one sees how it thoroughly pervades their rhetoric, governs their lives, and compels them to act as they do.

Astronomy and Technology

103 Because they staked their legitimacy as rulers on their affinity with heaven, it was incumbent upon the Mongols to possess superior knowledge of its ways. This meant that they know the rhetoric of heaven, its literature, its use in propaganda, its methods of divination. And it meant too that they possess superior knowledge of astronomy and calendrical science as well.

104 Though in the early years of the empire the Mongols’knowledge of astronomy paled in comparison with that of their more civilized neighbors, from the time of Chinggis Khan through to the end of the Mongol Empire, the pursuit of state-of-the-art astronomy became a top priority. Indeed the pursuit continued to be a vital aspect of statecraft among their successor states, the Timurids and Mughals. In their unprecedented wealth and influence, the Mongols became exceedingly aggressive patrons of astral sciences. Under Chinggis Khan Yelü Chucai brought Mongolian calendrical science up to the world’s standard. Ögedei saw to having a state-of-the-art observatory.131 This interest in observatories carried over to his successors. Ögedei’s nephew Möngke (r. 1251-1259) hoped to bring in Islamic astronomers to build an observatory at the Mongolian capital, Qaraqorum, but his untimely death forestalled it.132 Möngke’s younger brother, Hülegü took over Möngke’s initiative and charged Naṣīr al-Dīn Ṭūṣī to build the world’s finest observatory at Marāgha.133 And Möngke and Hülegü’s middle

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brother, Qubilai, furthered the effort by ordering Liu Bingzhong to organize a grand project dedicated to the astral sciences. The project included not only the making of the Shoushili calendar, but the building of observatories in China and the taking of celestial readings from points across the Mongol Empire.134 Following the death of Qubilai in 1294 subsequent emperors continued to fund astral sciences. Among the achievements of these latter years was the building of elaborate water-clocks.135 In the Ilkhanate, among Naṣīr al-Dīn Ṭūṣī’s accomplishments, he completed a recension of Ptolemy’s Almagest in 1247 and ca. 1250 produced a Persian translation of al-Sufi’s Description of the Fixed Stars.136 P. Kunitzsch has discovered that when Ulugh Beg made his star catalogue in Samarkand in 1437, he relied upon Naṣīr al-Dīn al-Ṭūṣī’s Persian translation of al-Ṣūfī.137 As for al-Ṣūfī, the Mongols of the Ilkhanate funded multiple editions of his classic work.138 These are but a few prominent examples of the Mongols’patronage of astral sciences.

105 The Mongols did not themselves keep the traditions and technologies through which these achievements were made. Neither did they themselves come up with the innovations or carry out the work that went into them. Rather, they used existing traditions in China and the Islamic world to procure what they desired for themselves just as they relied on existing foreign traditions to procure other things they desired such as textiles, glass, or what have you. In going about achieving their desired end, they did not merely ask the astronomers in their service to carry on as usual. They integrated Chinese and Islamic traditions, reorganized, and revitalized them.139 The results were unprecedented in scope and quality. It was in the Mongols’own interest that they ordered these projects be carried out. For these works manifested the Mongols’power and glory. It is wrong to suggest that the Mongol khans sat by passively while to their pleasant surprise their Islamic and Chinese slaves went about aggrandizing them. Decision-making under the Mongols, especially when it concerned important matters of the state, was limited to the family and to a very close circle of Mongols around the khan with the khan himself rendering a final decision, (which was then reified through some form of divination).

Syncretism

106 We have seen a number of factors that hide the Mongols’ learning. Their knowledge was expressed in esoteric language through allegory. The agency of their decision- making process was blurred by divination and other forms of propaganda. And their priests, sages, and technicians were often foreigners. In addition to these, another factor that hides the Mongols’learning is their syncretism. Syncretism, that is, the keeping as one a mix of multifarious, often contradictory systems, was an intentional approach to learning. It has a basis in nature in that, as nature does not lend itself to a uniform explanation, systems of reflecting natural phenomena are inevitably contradictory. Politically, syncretism was a way to govern far-flung nations whose traditions are diverse. The tradition was known and used in Inner Asia. In Chinese history, where it is spoken of as hunheshuo 混合說 “the doctrine of mixing together,” syncretism was an especially prominent feature of governance during the Tang dynasty (618-907). The Mongols’predecessors, the Khitans of the Liao dynasty (907-1125, 1124-1211) also relied on syncretism in maintaining indigenous, Buddhist, Chinese, Christian, Islamic, and other traditions within their government. To the West

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syncretism was used by a host of governments, but the prototype belonged to the Achaemenids (550-330 BC). By compiling in encyclopedic fashion discreet systems, syncretism shows deference to that which is universal. It preserves original sources and lineages of learning. Although syncretism offers its adherents breadth of learning, at the same time it effaces learning, for it leaves a people with little they can claim for their own national heritage. Yet, out of deference to the original, layers to the dissemination of systems peel away like the skin of an onion.140

107 As for the Mongols, their astral tradition is made up almost exclusively of foreign systems. With the founding of the empire in the 13th century, the pre-Buddhist Mongols adopted the Uygur calendar, which in turn was an adaptation of the Chinese. The trace of Uygur influence on the Mongols is preserved in orthography showing Uygur versions of Middle Chinese. For instance, one Mongolian term for the 9th Heavenly Stem, šim, retains Middle Chinese final -m by way of Uygur šim.141

108 In converting to Buddhism the Mongols adopted the Tibetan Buddhist calendrical tradition. Again in syncretistic fashion, Tibetan Buddhist tradition is comprised of two traditions, Chinese and Indian.142 Chinese tradition includes indigenous Chinese systems such as the sexagenary cycle of ten Heavenly Stems (Ch. tiangan 天干) and twelve Earthly Branches (Ch. dizhi 地支), the Chinese Zodiac, the four Sky Animals, and so on. But it also includes Western systems such as the Western Zodiac and the seven day week. These came in varying forms through Indian Buddhism and through Central Asian traditions. The seven day week, for instance, begins on Sunday according to Indian tradition, and on Saturday according to Central Asian tradition. Indian tradition likewise has indigenous systems but also is heavily influenced by the West, especially by Greek and Mesopotamian traditions.143

109 The Mongols’sky, so clear and so bright, is filled with foreign stars. What in Mongolian is called naγsidar shows the conflation of two distinct systems of asterisms, the Indian nakshatra, from which the Mongolian term derives, and the Chinese xiu 宿. These two systems appear to be organized along the same guiding principles. Both share the same number of asterisms with many of the individual asterisms being either identical or similar. That Central Asian peoples tend to refer to both the Indian and Chinese systems after the Indian nakshatra suggests that the Chinese xiu derive from Indian tradition. But this is far from certain. The Chinese xiu were standardized during the Han dynasty and show little variation over the centuries. The nakshatra on the other hand, used as they were by numerous nations in India and Central and Inner Asia over many centuries, show much variability. Being sometimes 27 but usually 28 in number, the first of them is traditionally and most frequently Kṛttikā (Mong. Kerteg), the Pleiades. The system is sometimes true, that is, defined by the asterisms themselves. Sometimes it is rationalized into numerical degrees. The naγsidar asterisms in Mongolian tradition show great variability in terms of the stars comprising the individual asterisms. Between 1683 and 1685 the Tibetan nakshatra were standardized in Gelugpa tradition in the Vaidūrya dkar po “White Beryl” treatise issued under Sang rgyas Rgya mtsho (1653-1705). This standardization is reflected in Gelugpa sources in Mongolian. In 1711 the Chinese xiu along with the rest of the Chinese stars were translated into Mongolian in Tngri-yin udqa [The Way of Heaven], a sophisticated work of Chinese astronomy influenced by Jesuits trained in the Western tradition of Tycho Brahe (1546-1601). This standardization is also frequently followed in Mongolian sources. Apart from these two standardizations, numerous variations on the naγsidar

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can be found in Mongolian sources. These tend to come from heterodox syncretistic sources that preserve (or purport to preserve) the old ways. These systems are similar to Indian sources and the Indian-based Uygur astral tradition of the Yuan time. The orthography of the Mongolian naγsidar asterisms changes as much as do the naγsidar stars. Still, orthography shows that the Mongolian naγsidar system comes to the Mongols from Sanskrit nakshatra through Uygur by way of Tocharian.144

The Rise of Buddhism and the Fall of Heaven

110 We conclude our discussion of the power of heaven among the Mongols with an extraneous factor that hides that power from us, namely, their conversion to Buddhism. We have seen the Mongols scorned by their contemporaries as backward. We have seen too how scholars often interpret this backwardness to be a result of their rustic, even primitive, “shamanism.” We have tried to demonstrate that the Mongols’culture is by no means as unsophisticated and isolated as it seems. Theirs was an imperial government, an aristocracy endowed with a mandate to rule a world apportioned to them by heaven. They lived under the vault of heaven, patterning their lives and ruling according to its auspices. Their rhetoric was framed as celestial allegory. It reflects symmetry between heaven and earth. In this it is not unlike literature in general. The Mongols rely on their own variations of tropes attested throughout the known world for millennia.

111 In their rhetoric, in reflecting the times for every purpose, heaven is amoral. It sanctions both good and ill. In ordering the status of men, the Mongols’heaven treats people unequally. It binds them to their lot in life. No two lots are the same. The khan and those close to him possess heaven’s share. To change one’s lot in life entailed strife. Otherwise, one kept to one’s regimen and knew who, from the khan to the lowest slave, followed whom. Among the times for specific purposes, there was a time for war, and theirs was a martial culture. Heaven’s auspices were unforgiving and fearsome. They ruled by instilling fear in their subjects. Infamously, in conquering new lands they often resorted to mass executions. The Mongolian seal on Güyük’s letter to the Pope reads: mönke tngri-yin küčüntür yeke Mongγol ulus-un dalay-in qan-u jrlγ il bulγa irgen-tür kürbesü büsiretügüi ayutuγai [By the power of eternal heaven, should this edict of the World-wide Khan of the Great Mongol Nation reach any person among the pacified or combatant peoples, let it be heeded; let it be feared!]145

112 The Mongols’form of government was not unknown to the known world. Governments of warriors, nomads, and priests typify what has been called the Heroic Era, going back to the Bronze Age, the second millennium BC.146 Numerous aspects of the Mongols’government can be found in the governments of their predecessors. In these aspects the Mongols’government follows the model for a World Empire, the prototype for which was established by the Achaemenid Empire.

113 This form of government came to be threatened by a new form of government, made manifest in a new concept of heaven. This new form of government transcends the empirical reality of heaven with a heaven that exists beyond the lines of separation that apportion time and space. The reality of such a heaven depends on faith. Rather than times for every purpose, heaven is known through an abiding moral order. Rather

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than that which is evil and imperfect, heaven reflects only that which is good and perfect. Rather than apportioning different lots, everyone receives a full share. Rather than solemnly eternal, a transcendent heaven is characterized by everlasting joy. Under such a heaven, people were known not by their nation but by their faith. To bring this newfound heavenly order to bear on earth, those joined in faith conduct their lives after the heaven that they seek to make manifest. They act in deference to that which is everlasting over that which is transient. They do so out of a sense of morality with kindness and justice for all. And in so doing they set out to create a universal government that will endure in perpetuity regardless of any one person and endure in peace even without an army.

114 During the formation of this new world order believers spread their propaganda of common humanity against the government of kings and nations calling upon “all the nations” to rise up against the rule of kings.147 When these movements first arose, it was enough to leave the coming of the new heavenly order for the future. We find such traditions in the world dominated by the rule of the Achaemenid Empire (550-330 BC), an Aramaic world with influence over, and drawn from, numerous peoples including the Egyptians, Greeks, Indians, and Iranians. We might think of this new world order as “monotheism” but its teachings are expounded in diverse traditions as in the teachings of Zoroastrianism, Judaism, and Plato. During the Hellenistic era (323-31 BC), various movements, including the Buddhist and Christian, set out to bring the newfound heavenly order to bear on earth in the present time. Although we often take Buddhism to have been influenced by the Greeks and Christianity by the Hebrews, in reality the manifold Buddhist and Christian movements were influenced by all of the early traditions, by Zoroastrianism, Judaism, Plato and the Greeks, and more, and influenced by each other as well. Eventually, around the turn of the 7th c. AD, Islam was born as a continuation of monotheism out of Judaism and Christianity (though Islam too embraced other influences, especially Indian and Greek traditions and that of the Arabs’own pagan heritage). In China too, along with Buddhism, Confucianism and Daoism emphasized morality and abiding peace and justice over militarism and amoral times for every purpose.

115 The propaganda for this new world order was a genre of literature dedicated to “salvation.” This literature of salvation shares a common heritage among numerous faiths. We find it in Zoroastrianism, Judaism, Platonism, Buddhism, Christianity, Manichaeism, Islam, and more. In this literature, heaven is transformed in a systematic way. In this transformation the tropes that make up the fabric of the heavenly dome are changed to reflect the new world order. It is by changing the makeup of heaven that the government of earth is changed in kind.

116 In this transformation, it is important to realize that the dome of heaven itself does not disappear, nor are its figures erased. The vault of heaven continues to govern the earth. Its solemn, indifferent nature is merely covered over. For instance, the Ocean Stream figure for the horizon that limits a given realm in the Turkish text of the Manichaean Great Hymn to Mani (ln. 163) is said to be buyanlïγ taluy ögüz “the Ocean Stream of Meritorious Deeds.”148 In the Turkish version of the Buddhist Suvarṇaprabhāsottamasūtra (V47) the Buddha is known as sansar-lïγ taluy ögüzüg yuγurγuluq tar kimi “the vessel by which one navigates Saṃsāra’s Ocean Stream.”149 In the same way the heavenly configuration that marks the time when the days become appreciably longer following the winter solstice, a time formerly given to the birth of the likes of Horus, Apollo, and

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Mithra, in Christian tradition is appropriated for the birth of Jesus Christ. The seasonal nodes and the various stars that mark the four directions, which once had been personified by four warrior kings, come to be personified by the Four Evangelists, common men who conquer the world with nothing but their Good News.150

117 In addition to refashioning the figures of heaven, the heavenly dome itself is transcended by a higher heaven. Beyond the times for every purpose, this higher heaven is given by everlasting moral order. Here no dichotomy exists between good and evil. Only good is to be found. No error or sin is known. Life goes on in joyfulness, and death is no more. In this propaganda heaven and hell are cleft. The sole domain of kings and nobles no longer, heaven’s share is apportioned equally to all who would be righteous. No more merely the place of the dead, hell becomes a realm of everlasting punishment for those who sin.

118 By Chinggis Khan’s time the apocalypse of these new forms of government had long since swept across Eurasia, liberating peoples from the confines of heaven’s vault. But this change had not come to the Mongols. To speculate on possible reason for this state of affairs, in A History of Zoroastrianism M. Boyce and F. Grenet show that during the Hellenistic era when the transformation of heaven and earth in a new world order was being carried out in the Near East, the Seleucids were defeated by nomadic steppe warriors in eastern Iran. This defeat had the effect of cutting off Central Asia and the Far East from the rapidly changing world of the Near East.151 With this break of continuity, the nomadic steppe warriors who came to rule Central Asia, the Sakas (or Scythians), the Yuezhi, and Xiongnu, patterned their governments after the old imperial model. The Mongols followed suit in the manner of the Turks.

119 It is not that the Mongols did not know of these new-age religions and their teachings. Many Mongols themselves, especially Mongol women, belonged to a particular religious tradition. In the early years of their empire, Syriac-rite Christianity (or Nestorianism) was most prominent among them. However, rather than submitting to any one of these faiths, the Mongols as a people maintained their tradition ultimately as “Mongol.” Their destiny belonged to Eternal Heaven and Eternal Heaven alone.152 With freedom from Eternal Heaven now commonplace throughout the rest of the world, epithets leveled against the Mongols were made to them as pagan throwbacks. And throwbacks they were, but not – in spite of the rhetoric – simply on account of their being pastoral nomads. The Mongols of Chinggis Khan were throwbacks, just as well, to the likes of Alexander and the Greeks, Cyrus and the Persians, to the Pharaohs of Egypt, and Huangdi in China.

120 This aloofness from catholic religion ended under the reign of Qubilai Khan (r. 1260-1294) when in 1264 he took up Buddhism for his realm. In particular Qubilai favored the Buddhist schools of the regions of Tibet and especially the Sakyapa Order. In taking up Buddhism, Qubilai formed a union of Church and State. In the process he abrogated the Great Mongol Nation (Yeke Mongγol Ulus) and proclaimed in Chinese tradition, the Yuan dynasty (1271-1368). Reactionaries no longer, the Mongols now liberally championed the most progressive government the world had known to date. Their legacy would continue to influence statecraft for centuries to come as world empires combining a dual regency of Church and State became the norm for governments across Eurasia.153

121 No matter how necessary Qubilai’s actions may have been, his transformation of the Mongolian government was not universally accepted by the members of his family.

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Upon his ascension to the throne civil broke out. In the propaganda of the Mongols’civil war, Qubilai’s enemies consistently accuse him of betraying Mongol tradition. Scholars often cynically write off the Mongols’ideological rhetoric as a pretense to more base grudges over power and wealth.154 These cynical dismissals make for one of the greatest red herrings in all of World History, for they overlook the means by which this profoundly consequential transformation took place.

122 Accepting Buddhism meant the end of the Mongol Empire as Chinggis Khan had forged it. Buddhist dharma flies directly in the face of everything he stood for. Its literature of salvation transforms the Mongols’government first and foremost by transcending and transforming the allegory of the vault of heaven. We see an example of this transformation in a pre-classical verse treatise on salvation, Oyin-i geyigülügči neretü šastir [Illumination of the Mind Treatise], where we read: aγulas-un qaγan-u orgil deger-e: amuγulang-du töröl-tür töröjü: asuru qanul ügei jirγaγsan jirγalang: aγui örgen dalai ber ünen üjügülügdekü temečeldüküi bulγalduqui dayisun bolulčaju: terigüben esergü tesergü čabčilalduγsan: tegüni γutuγalabasu degedü Širu-a-yin: tere yirtinčü-deče maγad aldaraqu:: On the summit of the king of mountains Being born to a life of quietude Pleasures enjoyed greatly without surfeit Unto a vast wide ocean should be seen. [But] struggling vying enemies conflict Tit for tat hacking off each other’s heads And when so they dishonor themselves All is lost from the supreme Zurvan’s world.155

123 The king of mountains here refers a heavenly mountain, the mountain by which order is created over chaos, the mountain that reaches from the center of government to the celestial pole, the North Pole for peoples living in the Northern Hemisphere. There ought to be but one such mountain in the world, but in reality each realm has its own. 156 The phrase aγui örgen dalai “vast wide ocean” refers to the World Ocean, a metaphor for the horizon that circles the world from a given point of observation, and so means “to the ends of the earth.” It was the goal of any great hero who would be king to reach the summit of this mountain and pacify the world. Chinggis Khan climbs higher up this mountain than any other man before or since. Yet Buddhist soteriology repudiates the entire endeavor as folly. In another faction of the greater movement, we find the same transcendence of the old trope in Christian tradition where the Tempter, Satan, magically transports Jesus to the peak of a different version of this same mountain. Here (Mt. 4.8-10) Satan shows Jesus all the kingdoms of the world and the glory of them. “All these I will give you, if you will fall down and worship me,” he says. Jesus sees the illusion for what it is and sends the Devil away. But Chinggis Khan has taken this vision as his charge to rule the world.

124 In this contrast of views we see the radical change Buddhism brought to the Mongols. The literature of Buddhist soteriology opposed the government of the Mongol Empire in every way imaginable. It opposed their militaristic order, their hoarding economic system, their fine clothing and sumptuous food, their marriage and death rites, their hunting rituals, their bloody sacrifices, and on and on. From the outset Mongolian

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traditions were altered by Buddhism. Over time the allegory of the power of heaven was eroded away. After the fall of the empire the Dalay-yin qan was replaced by the Dalai Lama. Eventually, under Communism the rhetoric of “the power of eternal heaven” was all but forgotten, so that now all that is left of the Mongols’ancient government is the eternal sky itself.

BIBLIOGRAPHY

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NOTES

1. See de Rachewiltz (2007); I would like to thank Prof. de Rachewiltz for making his article known to me. See also Bira (2004); Beffa (1993); and Fletcher (1986: 30-32). 2. See Baumann, Divine Knowledge (2008) and Fearful Symmetry (forthcoming). 3. Baumann 2008: 35-41. 4. Baumann 2008: 42-59. 5. Berggren and Jones 2000: 8. 6. The concept of the all-knowing (Mong. qamuγ medegči) makes for an important topos in Eurasian history. Originally a term deriving from celestial orientation, under the influence of soteriological movements, it comes to evolve into something more. In the New Testament Paul mocks the old notion when he says, “If I have… all knowledge… but have not , I am nothing” (I Cor. 13.2). In terms of celestial orientation, the topos was often represented in terms of the relative position of the sun and likened to an “all-seeing eye.” The trope was a commonplace, known in Egypt, throughout the Near East, in India, Central Asia, and China. We will discuss the notion in terms of the four directions infra. 7. See the OED. 8. Tekin 1968: 261. 9. To interact in Inner Asia, Turks and Mongols relied on Chinese celestial systems, in particular the Twelve Animal Cycle. See Bazin (1991: 117-227). 10. In the Odyssey (I.22-25) the term “Ethiopia,” meaning “Land of burnt faces,” describes a race of people of swarthy complexion. At the same time it represents an astronomical phenomenon in that it marks the Southern limits of the known world and thus divides the world into Eastern and Western Hemispheres. For “Ethiopia” as a region of the sky, see also “Andromeda” and “Perseus” in Allen (1963). 11. For a survey of some of the various tropes by which celestial phenomena were known, see Allen (1963: passim). 12. See Geus’brief discussion of the history of the oikoumene (2011: 554) in his review of Roller (2009). 13. For the distinction between “true” and “mean” time, see for instance al-Biruni’s discussion of the beginning of the Hebrew month in his Chronology (Sachau 1879: 68). See also Baumann (2008: 42). 14. For the history of the zodiac, see Neugebauer (168: 187). 15. Neugebauer 1945: 2. 16. Baumann 2008: 16-24. 17. Toomer 1998: 39. 18. Barker and Ariew 1991: 2-5. 19. Zeno noted this paradox. See Baumann (2008: 93). 20. In the Āryabhaṭīya of Āryabhaṭa, for instance, W. Clark notes a fascinating discrepancy. In Indian astronomy the earth is generally held to be stationary as the heavenly bodies revolve around it. However, in this text one stanza maintains that the stars are stationary and that the earth revolves on its axis. Then in the next stanza the roles are reversed. The earth is seen as stationary and the stars revolve around it (Āryabhaṭa 1930: xiv). 21. Baumann 2008: 64-66. 22. In world history the triumph over the subjective, topocentric worldview is epitomized by the fall of Babylon. See, for instance, Isaiah 47.10-13. 23. See, for instance, Whiston (1755). 24. OED s.v. ‘heaven’. 25. Knopfler 1985.

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26. Beffa (1993: 217-218) cautions that translating tenggeri as “heaven” leads to false associations with Judeo-Christian “God.” Then Beffa distinguishes Mongolian tenggeri from Western “heaven” by suggesting that, as singular and plural cannot be determined in Mongolian, the term, based on references to 33 and 99 tngri-ner in later Buddhist sources, probably means “gods” in the plural. However, singular and plural can be and are differentiated in Mongolian, especially in the 13th century, when the language and a wealth of sources all tell us tenggeri is singular. References to 33 and 99 tngri-ner in later Buddhist sources are just that, later Buddhist sources. This is not to say the pre-Buddhist Mongols did not know of them. We simply have no evidence. Even so, it is not unlikely these gods have some antecedent in nature. More importantly, the discussion shows that Beffa thinks of tenggeri primarily in terms of god or gods and not in terms of heaven proper, where the difference between singular and plural dissolves like snow. 27. Clauson 1964: 359. We have constructed in this paragraph a straw man, to be taken for what it is worth. Specific criticisms will follow. Clauson (1964: 350 ff.) describes Turkish astral tradition in terms of evolution from ignorant, primitive beginings. 28. Saliba (2006: 362). 29. For Hülegü, see Thackston (1998: 471 ff.). 30. We quote the subtitle of his book. 31. Sivin (2009: 24, 153-156). 32. Olbricht and Pinks (1980: 141). 33. Rackham 1949: 171. For Chinese tradition, see Schafer (1977). For the Turkic, see the Qutudqu bilig as discussed in Clauson (1964: 355-356). For Indo-Iranian tradition, see Darmesteter (1974: LVIII) who tells us that the god that establishes the laws in nature is heaven, the all-embracing sky. See also DDD (s.v. “Heaven”). 34. de Racwiltz 1972: 150; 2006: 183. 35. Ligeti 1990: 259-262; Kara 1990: passim; Haenisch 1957: 9. 36. These attributes of heaven have been noted by de Rachewiltz (2007: 113ff.). 37. Black 1985: 393. See also Enoch 79.2 (Black 1985: 410-411). For a more general discussion of the concept in the Near East, see DDD (s.v. “Almighty”). 38. See the discussion of “The Roles of Heaven” in de Rachewiltz (2007: 117-123). 39. Dawson (1955: 96). 40. de Rachewiltz (2006: 14). 41. de Rachewiltz (2006: 173). 42. Dawson (1955: 9) 43. Carroll (1946: 231). 44. For the significance of the distinction between instant and duration, see Baumann (2008: 42-59). 45. For insight into historical representations of eternity and everlasting and how they interrelate, see M. Clagett’s study of Egyptial astral science. Here eternity is defined as the “eternal past.” Once an egg is broken it will never be remade. Everlastingness, on the other hand, is defined as the “eternal future.” The egg is broken, and it always will be (Clagett 1989: v.1, x, 369-370). The deity Shu is associated with eternity; Tefenet, everlastingness (Clagett 1989: v.1, 438). The day (when the sun is seen) is associated with eternity; the night (with the sun in hell), everlastingness (Clagett 1989: v.1, 462). The sun god, Amon-Re, is said to be “enduring in all things” (Clagett 1989: v.1, 556). Amon-Re is said to be the Lord of Eternity who makes Everlastingness (Clagett1989: v.1, 557). The Egyptian tradition offers but one example. A thorough study of question as it relates to Mongolian tradition is beyond our scope. Beffa (1993: 218) rightly notes that the translation of möngke as “eternal” can be misleading. 46. For Zoroastrian Zurvanism, see Boyce (1982: 231-262). See also DDD (s.v. “Aion”). 47. An interesting scene between Chinggis Khan and his Daoist master, Changchun 長春, gives some insight into this question. Changchun is famed among the Mongols as “Tängri Möngkä Kün”

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(lit. “heaven eternal man”). A. Waley speculates that this epithet likely translates Chinese shenxianren神仙人 “divine immortal.” Given this reputation, Chinggis Khan asks Changchun of his medicine to which Changchun replies, “I have means of protecting life, but no elixir that will prolong it.” Chinggis Khan is said to have been pleased with his candor (Waley 1979: 101). The Mongol khans regularly asked the priests in their service to pray for their longevity, and they remembered their ancestors and fallen heroes after death. The extent to which Chinggis Khan was held to live and reign forever after death is an open question. 48. For the practice of scapulimancy in Mongolian tradition, see, for instance, Juvaini (1958: 137-138); Rockhill (1900: 187-88); and Olbricht and Pinks (1980: 77, 140); 49. See Secret History § 1, § 21 (de Rachwiltz 2006: 1, 4, 225). According to Beffa (1993: 218) there is no mention of predestination in relation to the ascension of Chinggis Khan in the Secret History. Becoming khan is strictly a human affair. This view misses the forest for the trees. The Secret History concerns the origin of Chinggis Khan. Every word of it leading up to the fact itself shows that he is predestined by heaven to rule. Beffa is correct in the sense that his right to rule depends on right action, action legitimized by heavenly charge. 50. de Rachewiltz (2006: 1, 221-226). 51. See Secret History § 21 (de Rachwiltz 2006: 4, 225). The epithet “Son of Heaven” (Ch. tianzi天子) is given to the emperor in Chinese dynastic tradition. The epithet is also known in the West. See DDD (s.v. “Son of God”; “Sons of (the) God(s)”). 52. de Rachewiltz 2006: 229. 53. Olschki (1949: 30-34); Sela (2003). 54. See references to “heaven” in de Rachewiltz (2006: passim, 1275). 55. If people drive a common wagon, the heavenly Wagon (Boötes) is a Golden Wain. If people eat ordinary apples, the apples of heaven are golden apples. The heavenly dome of the firmament was said to be made of gold. Such examples are endless. See Allen (1963: passim). 56. Sneath 2007: 1. 57. See also Golden (2009); Sneath (2010); and Golden (2010). 58. Sneath 2007: 1. 59. Juvaini 1958: 41-42. 60. Biran 1997: 7ff. 61. Rockhill 1900: 122. 62. We find this rhetoric, for instance, in the famous 1246 letter of Güyük Khan (r. 1246-1248) to Pope Innocent IV (r. 1243-1254) in Dawson (1955: 85-86). Juvaini (1958: 25-26) tells us that rather than threatening others with the size of his territory or the power of his army, he says merely, “If ye submit not, nor surrender, what know we thereof? The Ancient God, He knoweth.” See also the enigmatic speech of Bodonchar in the Secret History of the Mongols (de Rachewiltz 2006: 7). 63. De Rachewiltz 2006: 878, 887-888. 64. Juvaini 1958: 59. 65. Dawson 1955: 197. 66. For the predicting of eclipses in antiquity, see Needham (1959: 420-421); and Baumann (2008: 140). 67. Su Tianjue’s biography of Yelü Chucai in the Yuan chao ming chen shi lue (5) says that at the beginning of the empire the Mongols lacked astronomical knowledge altogether. This should be taken with a grain of salt. From Tianjue’s account we infer that it is not that they did not pursue astral science, but, rather, that their knowledge was poor. As Tianjue notes, they predicted eclipses – but not accurately. See also Juvaini’s statement that the Mongols once upon a time had no science or knowledge (1958: 59). Even so, he mentions that they used astrology to settle upon an auspicious moment for the inaugurations of Ögedei in 1229 and Güyük in 1246 (Juvaini 1958: 187, 258). 68. Eliade 1964.

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69. Facile associations of “shamanism” with techniques of ecstacy and that which is primitive and indigenous to Siberia have developed from Eliade’s influential work. However, Eliade’s Shamanism itself is thorough and nuanced. Though the discussion of Eliade’s contribution is beyond the scope of this essay, we do not want our comments concerning general perceptions to be taken as a judgment on his work. 70. Though we look critically on the conceptual underpinnings of the discipline, we do not question its value. Priestly traditions did and do exist. Individual studies on “Shamanism” have their own merits. We believe that grounding in the first principles of science and a working knowledge of the ways of heaven would benefit the discipline immensely. Again, we do not want our comments to be taken as a judgment on individual works. 71. Clauson (1972: 324); Doerfer (1965: 233-234); and Boyle (1977: XXII, 178). 72. For the magi, see Boyce (1982: passim). Note, for instance, their hereditary standing (9, 19-20, 85-87); their respect for the color white (21, 107, 147); their function as propagandists for the emperor (43, 46-48, 154-155); their traditions of interpreting dreams (67, 165) and taking omens (167-168, 180, 183, 215); how they would accompany the armies (165ff.); and how they held their own army (288); their practice of the rite of exposure to the elements (182); their responsibilities for cosmogony and cosmology; and their work in the fields of astral science (33, 234-235, 241, 260). 73. See, for instance, Pedersen (2001: 411-427). 74. For an antithetical approach, see Beffa (1993). 75. Clauson 1964: 351. 76. See also Ginzel (1906: passim); SETF II 290-411; and Bazin (1991). 77. For the Mongols’fire cult, see Poppe (1925); Mostaert (1962); Heissig (1980: 69-76); Ratchnevsky (1970: 417-443); Rockhill (1900: XXX-XXXII, 34-36); Boyle (1977: XIII, 560); Amitai- Preiss (1991: 355 ff.); and Titzherbert (2006: 399). For the Iranian fire cult, see Boyce (1989: 35; 1982: 222-223). 78. de Rachewiltz (2006: 14). Compare this falcon to the sun and moon bearing, good fortune bringing, khvarenah of the Iranians (Boyce 1982: passim). 79. de Rachewiltz (2006: 110-111). For omina in general and the dog’s call as an omen protasis in particular, see Baumann (2008: 184-190). 80. de Rachewiltz (2006: 28). 81. Concerning the summertime prohibition on bathing and its tie to their rituals of thunder, see Juvaini (1958: 205-206); for their rituals of thunder and lightning see the accounts of the Song envoys Zhao Gong and Peng Daya and Su Ting (Olbricht and Pinks 1980: passim). Note in Waley (1979: 115) how the Daoist priest emphasizes ethical devotion to one’s parents over rites concerning thunder, bathing in rivers, and so on. This protestation belongs to a greater trend emphasizing morality over amoral ritual. For the tradition of “thunderstorm stars” in Arab tradition, see “Zur Tradition der ‘Unwetterssterne’” in Kunitzsch (1989: XVI). 82. Allen 1963: 252-253. Vahman 1986: 209. See also the legend in the Bhāgavata-purāṇa (5.8) of Bharata being reborn as a deer (BhP 669ff.). See also Keith (1981: 452); and Jones 1949: 5. 83. Olbricht and Pinks 1980: 141. 84. For weather magic, see de Gubernatis (1978: 421-23); Utz (1998); de Rachewiltz (2006: 525); and Molnár (1994). 85. For the lin in Chinese traditions, see, for instance, Shijing (1.11) in Legge (1985: 19). 86. There is nothing wrong in speculating on an historical antecedent to a heavenly sign. The question is one of emphasis. Do we emphasize the literal account or the astral allegory? To insist upon the literal account to the exclusion of astral allegory shows a fundamental problem. See de Rachewiltz (1993: 141-142); and Baumann (2008: 292). 87. Dawson (1955: 197); Boyle (1977: I, 15; V, 340); and Halperin (2000: 230). 88. Dawson (1955: 197); Juvaini (1958: 59); Boyle (1977: XIX, 208).

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89. Eno (1996: 41-42). See also the views of later Song envoys, Peng Daya and Su Ting (Olbricht and Pinks 1980: 140). 90. Olbricht and Pinks (1980: 77). 91. See, for instance, Pedersen (2001), who broadly surveys the notion of “animism” in differentiating it from “totemism.” 92. De Rachewiltz (2006: passim). 93. See Plutarch’s Isis and Osiris. 94. Study the pre-Ptolemaic Arab tradition, best discussed by P. Kunitzsch (1961). For the more ancient Mesopotamian tradition, see Hunger and Pingree (1999). 95. Allen (1963: 46, 225, 320-321); de Gubernatis (1978: 126, 251). 96. Pritchard (1954: 189; 1969: 367-368); Clagett (1989, v.1: 281-282; v.2: 245-246); Neugebauer and Parker (1960: 44-45) 97. Boyce (1982: 37-38, 104, 287-288; 1989: 88-89, 10). 98. Yule (1929: v.1, 158). 99. Allen (1963: 2-3). 100. Allen (1963: 321-322, 379). 101. Allen (1963: 78). 102. Beal (1970: 54). 103. Black (1985: 19-20, 73); Bernstein (1996: 189). 104. Darmesteter (1974: lviii-lix). 105. Boyce (1982: 287). 106. Darmesteter (1975: 98, 233). 107. Darmesteter (1975: 155). 108. See the discussion of hunting in Yule (1929: v. 1, 396-410). 109. For an overview of Inner Asian life and culture at the time of Chinggis Khan, see Di Cosmo et al. (2009: 9 ff.). 110. Boyce 1982: 179, 279; Boyce and Grenet 1991: 57-58; Baumann 2008: 276. 111. Juvaini (1958: 105). 112. Battenhouse 1941. 113. The trope of the Four Warrior Kings who have conquered the Four Directions is attributed to the Magi priests who served the Persian kings. In the astronomical chapter of the Sassanid era Bundahishn, Ahuramazda appoints four stars or asterism as Generals to conquer the Four Directions and makes the Pole-star General of Generals over them (Henning 1942: 231-232). In Indian tradition these four warrior kings are well-known as the Mahārāja. 114. Juvaini 1958: 40. 115. Tekin 1968: 258, 295. See also MNTSD (213). 116. SETF I 460. 117. Tekin 1968: 237, 272. 118. Jackson (2006: 3-22). 119. Simply to add to the discussion of the issue we note that in Su Tianjue’s biography of Yelü Chucai, Chucai also makes the claim that Chinggis Khan desired to conquer the whole world. See his Yuan chao ming chen shi lue [Sketches of the Yuan dynasty’s eminent ministers] (5). 120. For the scientific underpinnings to the historical notion of “One World Rule,” see Roller’s (2009) study of Eratosthenes and Geus’(2011) review. 121. Tekin 1968: 261. 122. Tekin 1968: 263. 123. Tekin 1968: 261. 124. See also Turan (1955); Fletcher (1986: 31); and de Rachewiltz (2007: 127-130). 125. Aratus 1997: 115; Burgess 1860: 390-391.

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126. SETF I 355, ln. 1986; II 56-57, 68, 172; Clauson 1972: 502; Tekin 1968: 150; 1993: 8 n. 3; Sinor 1972: 117-118; Röhrborn 1971: 42, 45; Zieme 1996: 194, 200. 127. Mostaert and Cleaves 1962: 55 ff. Sinor 1972. 128. Here Chinggis Khan sends his younger brother, Qasar, on campaign along the Bohai seacoast (dalai gijin) with the left wing of the army (de Rachewiltz 2006: 181, 920-921). 129. § 199 (ln. 7409); § 245 (ln. 9806); and § 280 (ln. 11902). 130. De Rachewiltz (2006: 173, 885); Mostaert (1952: 290-292). 131. See Ögedei’s biography in the Yuanshi 2.33, 34; see also Wangchug (2008: 142-143). 132. Baumann (2008: 296-297). 133. See Sayili (1960); and Ragep (1993). 134. Sivin (2009; 2005). 135. Needham (1959:313 ff.); Needham et al. (1960: pl. XIII, fig. 51). 136. See Kunitzsch (1989: I, 114, 116). 137. Kunitzsch (1989: I, 115-16; XI, 60-62). 138. See Upton (1933: 180). 139. For a tangible sense of the Mongols’cultural influence, see Komaroff and Carboni (2002); and Komaroff (2006). 140. We have discussed the Mongols’syncretism elsewhere (Baumann 2008: 246-251, 276-282). 141. Baumann 2008: 62-63. 142. Baumann 2008: 15, passim. 143. Baumann 2008: passim. 144. Baumann (2008: 99-114). 145. See Kara (2005: 20, 157). We have altered his translation modestly. 146. Boyce (1982: 1). 147. For the monotheistic rhetoric of the end of nations and kings, in addition to the Old and New Testament writings, see also the less familiar apocalyptic literature of the Hellenistic era. In the Book of Enoch (54.1-2) we read, “And I turned and looked to another part of the earth, and saw there a deep valley with burning fire. And they brought the kings and the potentates, and cast them into this deep valley.” (Black 1985: 53) 148. SETF II 68-69. 149. Zieme 1996: 194. 150. John in Revelation (4.4-6) cites not the four warrior kings per se but their totems, man, ox, lion, eagle, as taken from Ezekiel 1.4-6. These totems signify nations, as in Daniel (7.2-10) and Enoch (89), the kings of which guard the four directions. For the Four Evangelists as conquerors of the Four Directions in Christian tradition, see Dante’s Purgatory (Purg. 29.79-145); Kohler (1923: 2); and Werner (1981). 151. Boyce and Grenet (1991: 152-155). 152. For the genius of Mongolian tradition as “Mongol” and no other, see the account of William of Rubruck, where in his meetings with Sartaq (d. 1256), Batu (d. 1255) and Möngke (d. 1259), he is assured he must never make the mistake of associating a Mongol with any religion other than “Mongol” (Dawson 1955: passim). See also Juvaini (1958: 26). 153. For the spread of Buddhism among the Mongols and Qubilai Khan’s conversion, see Heissig (1980: 24-25). 154. Robinson (2009: 17). 155. Lokesh Chandra (1982: 438). 156. See the term taγlar xan “King of the Montains” in reference to the Old Turkic epithet of Mt. Meru in Röhrborn (1971: 18 ln. 32).

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ABSTRACTS

This essay discusses the meaning of heaven (tenggeri) to the government of the Mongol Empire prior to Qubilai khan’s conversion to Buddhism in 1264. It is not the first to do so. However, unlike previous works, which treat Mongolian tenggeri as an abstract religious or political concept, this essay approaches the question from the empirical reality of heaven as given by the science of the day. The essay falls into two parts. The first part discusses primary principles of celestial orientation and the history of heaven’s role in government. The second part applies these principles to the case of the Mongols. The discussion describes the fundamental nature of heaven to the government of the Mongols and demonstrates this nature through a number of examples. It is not intended to be a comprehensive study. The essay shows that reliance on the vault of heaven to govern earth begets symmetry between heaven and earth that needs be expressed through figurative language, allegory. This symmetry between heaven and earth makes heavenly allegory central to the Mongols’government and pervasive in all aspects of their culture.

Cet essai porte sur la signification du ciel (tenggeri) pour le gouvernement de l’empire Mongol avant la conversion de Qubilai au bouddhisme en 1264. Ce n’est pas le premier article à traiter ce sujet. Cependant, à la différence des travaux précédents, qui traitent le tenggeri mongol comme un concept religieux ou politique, cet essai envisage la question à partir de la réalité empirique telle qu’elle est donnée par la science du moment. L’essai se compose de deux parties. La première traite des premiers principes de l’orientation céleste et de l’histoire du rôle du ciel dans le gouvernement. La seconde applique ces principes au cas des Mongols. La réflexion décrit la nature fondamentale du ciel pour le gouvernement des Mongols et démontre cette nature en s’appuyant sur un bon nombre d’exemples. Cette étude ne se prétend pas exhaustive. Elle montre que le fait d’invoquer la voûte céleste pour gouverner la terre engendre une symétrie entre le ciel et la terre qui doit être exprimée par un langage figuré, celui de l’allégorie. Cette symétrie entre le ciel et la terre confère à l’allégorie céleste une place centrale dans le gouvernement mongol et retentit sur tous les aspects de sa culture.

AUTHOR

BRIAN BAUMANN Visiting Scholar, Indiana University. Spécialiste de langue, d’histoire et de culture mongoles, et plus particulièrement d’histoire des sciences. Il a publié notamment : - (2009). «Тамын Ороны Зурхайн Тооны Язгуур [The Mathematical Roots of Hell]. » Acta Mongolica, n° 9 : 217-226 ; -(2008). Divine Knowledge : Buddhist Mathematics According to the Anonymous Manual of Mongolian Astrology and Divination. Leyde, Brill.

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Regard extérieur

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East (and South) Asian Traditions in Astrology and Divination as Viewed from the West Les traditions astrologiques et divinatoires en Asie de l’Est (et du Sud) vues de l’Ouest

Charles Burnett

1 The articles in this book offer a fascinating panorama of the status and practice of astrology and divination in several Asian societies, including Mongolia, Tibet, India, Taiwan, Korea, Vietnam, Japan and Cambodia. In most of these cultures there is an interplay between native traditions and imported Indian or Chinese traditions. In some periods and in some places, astrology is part of the curriculum of universities, or the remit of an official bureau, at other times astrology, along with other “superstitious” arts is rigorously proscribed by the state. Some of the traditions are written, others are oral; some are state-sponsored and centred on capital cities, others are popular and rural. Sometimes numerical correspondences are at the forefront, at other times it is the symbolic forms that predominate. For all traditions (even when, as in the case of Japan, Korea and Taiwan, only a section of the tradition is studied) one gets the impression of an inheritance stretching back into the mists of time. From the point of view of someone more familiar with the Western tradition of astrology, what is interesting are the similarities and differences.

2 The mainstream Western tradition is remarkably consistent. It achieved canonical form in Hellenistic and Late Greek antiquity, epitomised in the works of Dorotheos, Ptolemy, Rhetorios and Theophilos. It reached an acme in ninth-century Islamic Baghdad, with the works of Masha’allah, Umar ibn al-Farrukhan, al-Kindi and Abu Ma‘shar. It was introduced into Western Christian culture through translations from Arabic, and became the backbone of the European tradition, from Guido Bonatti, through Pierre d’Ailly, Marsilio Ficino, and Johannes Schoener, to William Lilly, and survives among practising contemporary astrologers as “Traditional Astrology.” But this imposing tradition cannot be isolated from currents from further East. Even if one leaves aside

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the Mesopotamian sources for the tradition itself, one finds continuous input of Eastern origin. Indian and Iranian elements (as well as surviving Mesopotamian vestiges) were incorporated into the Arabic texts. The Indians and Iranians had already assimilated Greek astrology, through translations from Greek made into India in the second century AD and into Persian, under the Sassanian empire, from the early third century onwards. But there can be no doubt that distinctively Eastern elements or an Eastern colouring (recognizable in these essays) was added. Thus, to put it very broadly, just as the Indians bequeathed the war game of chess to their Western neighbours, so they contributed a distinctive ‘military astrology’ to the Arabs. And both the Persians and the Indians, for whom periods of enormous numbers of years were significant, contributed to the articulation of the history of mankind through cycles and divisions of cycles, whether they were the periodic returns of conjunctions of the slowest moving planets (Jupiter and Saturn), or periods of 1000 years, or the divisions of the kaliyuga of 432,000 years. The twelve signs of the zodiac, which mapped out the annual course of the Sun through the constellations, passed from Babylonia through Greece to India, and thence, through Buddhism, to all the countries on which Buddhism impinged. But, in the other direction, the divisions which mapped out the Moon’s passage through the sky—the 27 or 28 lunar mansions—originating in the Chinese xiu and the Indian naksatras (with the Mongol nagsidars in between), travelled through the Islamic world to Western Europe, along with Rahu and Ketu, the Head and the Tail of the Dragon, which marked the points where the lunar orbit crossed the Sun’s. And, while the mainstream tradition of Western astrology can be traced in detail through texts and translations, there are other traditions which sometimes bear more similarity to those described in these articles.1

3 Western astrology is founded primarily on a written tradition. Astrologers were expected not only to draw up in written form their horoscopic charts and astrological consilia, but also to consult books. And these books were not written in verse in order to memorise them. Far from the Western ethic is the Bon tradition described by Ramble in which oral teaching is on a higher plane than written, or the composition of verse for memorizing in Taiwan described by Homola, so that even the blind man can be an expert diviner. Secondly, the teaching of this written tradition brings astrology within the realm of the physical and mathematical sciences, central to Western education. Whether in the Tetrabiblos of Ptolemy (2nd century AD), the Great Introduction to Astrology of Abu Ma‘shar (late ninth century), or the De essentiis of Hermann of Carinthia (1143 AD), astrology’s dynamic foundations are grounded on physical speculation, and its mathematical foundations on astronomy. The laws of causation that astrology relies on follow Aristotelian principles, and the tables used for determining the positions of the planets in the horoscopic chart have been drawn up by Ptolemy and his successors. Hence, astrology was included in university education as part of the course in astronomy (or sometimes medicine) within the seven liberal arts of the philosophy curriculum.2 This official teaching of astrology, which survived into the sixteenth century, bears comparison with the place of astrology in the treaching curriculum of the Buddhist university of Nālanda, and the Banaras Hindu University described by Guenzi.

4 But a note of caution should be sounded, since Western university education focused on a theoretical understanding of a subject, rather than on vocational training. Moreover, in the West there were no official institutes of astrology (or specifically devoted to the teaching of astrology), such as the onmyôryô which had existed in Japan since the eighth

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century, the Office of the Redaction of the Observation of the Clouds in Koryo Korea, the Pavilion of Paying Tribute to Heaven in Vietnam, and the Tibetan Buddhist institutes of medicine and astrology in Lhasa and Dharamsala. The modern students of Banaras Hindu University clearly wanted to learn astrology so that they could make a living from practising it. A medieval Western university student would have had to resort to extra-curricula manuals on how to draw up horoscopes, and learn his technique from a practising astrologer. These manuals proliferated. Their production reached a peak in the fifteenth century in Western Europe, and they were among the first books to be printed, while in the Islamic world they continued to be copied in manuscripts until recent times. This proliferation of astrological textbooks bears comparison with the spread of manuals of divination in Japan in the seventeenth century described by Hayek; if one can press the comparison further, a similar progression can be traced from translations (from Arabic into Latin; from Chinese into Japanese), through adaptations, to original compositions and commentaries (first in Latin and but then increasingly in the European vernaculars; in Japanese, but with increasing use of the syllabic script). Common to both traditions is the use of tables and diagrams to make the subject matter easier to assimilate. A more recent example of this phenomena is traced by Homola for Taiwan.

5 But alongside accounts of diffusion and state support of astrology and divination the articles in this book document their prohibition, from the early fifteenth-century destruction of divinatory books ordered by the Korean king, T’aejong (Bruneton), through the dropping by the colonial British of the science of the stars from the curriculum of Benares Sanskrit College (the predecessor of Banaras Hindu University) in 1791 (Guenzi), and the quashing of culture of Chinese origin by the French in Vietnam in the mid-nineteenth century (Volkov), to the forbidding of astrology and the superstitious arts by the Communists in China (Homola). The state suppression of divination is parallelled in the West in the ordenances of the French kings Charles VIII and Louis XIV (the ‘Sun’ king) against promulgating political predictions (particularly those of Nostradamus) which led eventually (1682) to the command for diviners to be expelled from the kingdom.3

6 As a practical science, in divisions of science drawn up by Arabic and Latin scholars, astrology is ranged alongside medicine, physiognomy, dream-interpretation, talismans, magic and alchemy, as the practical branch of physics (the physical works of Aristotle being the theoretical branch). Whether the same idea underlies the Bon division of sciences in which astrology is one of the ‘external sciences’is not clear. In astrological practice, to the extent that the West and East are heirs to the same traditions, one can identify common elements; e.g., in the drawing up of birth horoscopes. The Tibetan Bonpo horoscope is similar to a western horoscope except that, in common with Buddhist beliefs, it includes past and future lives, as well as the current life of the new- born.

7 The canonization of astrology by Arabic and Latin philosophers, as a respectable science alongside astronomy, is concomitant upon separating it from other forms of divination. To start off with, practising astrologers are castigated for not knowing the science properly—and perhaps never being able to gain sufficient knowledge, since no one can expect to experience the full range of effects of the stars within one lifetime, or even over several lifetimes. But, more seriously, scientific or mathematical astrology is divided off from other forms of divination, and from magic in which the stars are

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employed. For example, in the mid-thirteenth-century text called the Speculum astronomiae (“The mirror of the science of the stars”), in which the author separates those books which are licit in astronomy and astrology from those which are illicit, talismans which engage the purely natural forces of the stars are allowed, but those which employ mysterious symbols and incomprehensible words, and suffumigations and the invocations of spirits, are disallowed.

8 A whole subterranean tradition of Western divination and magic draws on these “spiritual” forces in the universe, and it is perhaps these that are closer in character to, if not linked directly, with several of the traditions described in this book.4 One corpus of texts, which purports to be Aristotle’s advice to his pupil, Alexander the Great, taking the form of the teaching of the ancient sage Hermes (hence called the “Pseudo- Aristotelian Hermetica”),5 includes the analogy of the parts of the universe with the body of man (as in Pan Gu, the first creature in ),6 and lists the many names of the spirits that should be invoked when making talismans, and the suffumigations and magic symbols that should be used, alongside the prayers to the spirits. It is significant that this corpus also favours the lunar mansions over the signs of the zodiac. Lunar mansions appear as the major object of celestial observation in Islamic and Christian works on weather forecasting, but also, tellingly, in these texts of magic.7 They have no role in Western mainstream astrology.

9 Another Western current is that of the “correspondences” between talismans, stars, stones and plants, as detailed in the Book of Hermes about the 15 Stars, the 15 Stones, the 15 Herbs and the 15 Images (Talismans) translated from Arabic into Latin in the twelfth or thirteenth century, and the Cyranides, of which Greek, Arabic and Latin versions are extant, which continue a Babylonian genre of “stone, plant and tree” (assigned to a particular month), but which also reflect the association of animals with constellations in Mongol and Chinese astrology.

10 Another very characteristic phenomenon of Chinese cosmology is the belief that the events in the sky reflect the actions of the emperor. Bruneton refers to the importance of this belief in Koryo Korea, in which the behaviour of the heavenly bodies corresponds to the degree of goodness of the politics of the ruler (the theory of “the resonance between heaven and man”); hence, the astrologers were obliged to observe any irregularities or strange phenomena in the sky. Their observations are comparable in procedure and purpose to the omen-watching of the ancient Babylonians. But even in the West, outside mainstream astrology, a similar idea can be found. In her medical work, Cause et cure (“Causes and Cures”), the mid-twelfth century mystic and nun, Hildegard of Bingen, asserted that human activity is reflected in the heavens: “The stars from time to time show forth many signs responding to the conditions of men in their actions at the time. But they do not show future things or the thoughts of men, but only what man is doing now, when he manifests his will in speech or action. For the air takes up these (words and actions) and, in turn, passes them on to the stars which immediately show forth the actions of men correspondingly… So, when he transgresses justice through his bad actions, he distresses the Sun and the Moon and obscures them with clouds, with the result that, responding to him, they react with storms, heavy rain or drought.”8

11 One element that is striking about Western magic is its syncretism. The magical handbook drawn up in Arabic in al-Andalus in the early eleventh century, called Ghayat al-Hakim (“The Aim of the Wise Man”) in Arabic, and Picatrix in its Latin translation,

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lists the Greek, Sanskrit, Persian, Arabic and Roman names of the planets, and combines magical recipes of both Egyptian and Babylonian (“Chaldean”) origin.9 Similarly, as Ramble shows in the dating of events in Bonpo texts, we find combinations of the Zhangzhung language name, the Mongolian month number, the Sanskrit name, the sign of the zodiac, the Chinese name, the system of Chinese divination, the seasonal division into thirds, the corresponding link in the twelve-fold nexus of dependent origination, the lunar mansion, and the “epithet.” Japanese books, in turn, bring together Chinese, Indian and native Japanese divination, and no contradiction is implied by using different systems concurrently.

12 Another common line between Eastern practices and Western magic is the prominence of the master-pupil transmission, in which the master must only pass on his knowledge to a worthy pupil, who will not broadcast the knowledge to a general public (as in Japan before the 17th century, exemplified by the Hoki naiden of the fourteenth century). A continuous succession of masters to pupils (in Islam referred to as the isnad) can account for the antiquity and authenticity of the doctrine, though in the Buddhist context, this succession has the added advantage of being possible through .

13 It is in these magical-astrological texts in the West that the animation of the universe, which Baumann recognizes as being part of ancient Egyptian, Mesopotamian and Iranian traditions, survives. There may not be a god for each minute and each second as in the Bon tradition, but the planets have their days and their hours (even thirds of hours), and in performing magic, at least, it is necessary to observe the precise time of the action. And if colours were secondary in the practice of Western magic, the shapes of the magical symbols (whether magic squares, or “characteres” of the planets, or the mandala-like symbols in the ars notoria) were important.10

14 Parallels too can be drawn between the Yi Ching hexagrams, and Western geomancy (not to be confused with Chinese geomancy), in which tetragrams (rather than trigrams or hexagrams) of four layers in a binary system of one or two points in each layer, are arranged on a “geomantic horoscope” of 16 compartments.11 Numbers, in themselves, have symbolic values which are shared in the East and West. Two numbers appear prominently in this book, four and nine. The concomitant of the number four is the four-sided square. As Baumann suggests, because man conceives the world in which he is placed as having four sides (and for the Chinese, man was placed on a rectangular earth), it was natural for Chinggis Khan to think that world domination consisted of ruling the four directions, and should be divided amongst four sons. The “number square” (or “magic square”) in which the numbers in each row and along the diagonals all add up to the same value, appears in China, and then in traceable traditions between Arabic, Greek and Latin. The Western tradition places in parallel the four seasons with the four elements, the four humours, the four ages of man etc. This universal fourness is challenged by a three-humour system in Ayurvedic medicine, and the five agents of the Chinese, but a division into four would seem to be natural to the human mind. The significance of nine is less intuitive, but, as Ramble shows, all the Bonpo teachings are organised in a ninefold hierarchy, and from the nine orifices of the Cosmic Turtle derive the nine magic numbers. These are not the nine numerals of the Indian system, but rather the first 9 powers of 10. The powers of ten also appear in the columns of the Western abacus table, from the late tenth century onwards, but this time the columns are marked with the “new” nine Indian numerals.12 The symbolic power of nine is

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described in a later Latin account of the Indian numerals—“the Toledan regulae” of the mid-twelfth century—in which it is stated that “in both celestial and earthly things, both bodies and spirits seem to have been formed and put in order according to the model of the nine: for nine are the spheres of celestial bodies, nine are the orders of celestial spirits and nine are the temperaments of all bodies.”13 Both the East and the West list “nine” planets in that they add to the Moon, Mercury, Venus, the Sun, Mars, Jupiter and Saturn, the Head and the Tail of the Dragon (Rahu and Ketu) as the lunar nodes that travel round the ecliptic in the same way as the other planets. It is not by chance that the simplest and most powerful of the number squares also has nine compartments (3 x 3).

15 The sortilege described by Bizot which leads to a figure in the Ramayana, which warns of a certain misfortune that can be warded off by making a talisman of the figure concerned, placed in a certain compass direction, is a more complex version of the genre of fortune-telling in the West whereby one is led, by a series of tables to the figure of a Biblical patriarch, or a bird, or a lunar mansion, which would then tell one what the future held in store.14

16 Not all mantic crafts in the West involved numinous elements. Whereas, for the Mongols and Chinese, the shoulder blade of a grazing animal cracked at a time and in a direction directly mandated by God (Baumann), the same blade in the West revealed the future simply by natural signs in specific places on the blade. Also, the “underground” traditions and mainstream Western astrology overlapped and impinged on one another. In connection with Western medical writings it is common to find a figure representing the “melothesia”—the picturing of each of the signs of the zodiac on the human body, from Aries on the head to Pisces on the feet. Its avowed purpose is to prevent the doctor from cutting the body (phlebotomy) when the Moon is in the sign of the zodiac representing that part of the body—a very practical and scientific procedure.15 But the analogy between the microcosm and macrocosm cannot be lost in this figure (after all, purely textual instructions for phlebotomy could be given), and it may not be coincidental that the same microcosm-macrocosm analogy is used in indicating the acupuncture points in Chinese medicine. Just as the Moon is observed passing through each of the signs of the zodiac in the Western “zodiac man” so, in the East, the lunar cycle directs the vital force which flows round the body. The assignation of the seven openings of the head to the seven planets, is common to the mainstream works of Abu Ma‘shar and al-Qabisi (10th century) and to the Pseudo-Aristotelian Hermetica. Moreover, the Speculum astronomiae classifies talisman-making as part of the astrological genre of “elections” or catarchic astrology. The choosing of the right time for an activity, to ensure success, is the most magical part of astrology, and it is no coincidence that this has close parallels in the practices described in this volume.

17 So, the connections, both in spirit and in practice, of Western and Oriental astrology and divination may be stronger than one might initially suspect. The main impression given by this book is of the spread of ideas over long periods of time and from one culture to another, whether of Middle Eastern symbols shared by Mongols, along with their use of a language written in an Aramaic script (Baumann), the migration of the “invisible stars” Rahu and Ketu from India to China and Korea (Bruneton), or the passage of a Hindu epic to Cambodia (Bizot). Sometimes the streams flow together, as in the examples of Bon culture; at other times they are kept apart, as in the case of the Ramayana in Cambodia, which was not adapted to the Chinese animal years. These

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essays offer a challenge to extend the scope of these lines of transmission to include the West, and to follow streams such as the sexagenarian system, the symbolism of the number 9, and the lunar mansions. They invite us to explore what social and political contexts led to the support or rejection of astrology and divination in general.

NOTES

1. The most complete summary of this Western tradition is David Pingree’s (1997) From Astral Omens to Astrology: From Babylon to Bikaner. Rome. 2. Olaf Pedersen (1975). “The Corpus Astronomicum and the Traditions of Mediaeval Latin Astronomy.” Colloquia Copernicana, III, Wroclaw: 57-96. 3. The sequence of ordenances is summarised in Jean-Patrice Boudet, Le “Recueil des plus celebres astrologues” de Simon de Phares, 2 vols, Paris, 1991-9, II, p. 308. 4. A synthetic account of all the varieties of astrology, divination and magic in the European Middle Ages is provided by Jean-Patrice Boudet (2008) Entre science et nigromance: astrologie, divination et magie dans l’Occident médiévale (XIIe-XVe siècle). Paris. 5. Kevin van Bladel (2009). The Arabic Hermes: from Pagan Sage to Prophet of Science. Oxford. 6. Compare the Chinese analogy described in Vivienne Lo (2008). “Heavenly Bodies in Early China: Astro-Physiology in Context,” in Anna Akasoy, Charles Burnett and Ronit Yoeli-Tlalim (eds.), Astro-Medicine: Astrology and Medicine, East and West. Florence: 143-188 (especially: 144-145), with the Arabic (and hence Latin) analogy described in Charles Burnett, “The Kitab al-Istamatis and a Barcelona Manuscript,” in Charles Burnett (1996), Magic and Divination in the Middle Ages: Texts and Techniques in the Islamic and Christian Worlds. Aldershot, article VII, especially: 9-10. 7. See Charles Burnett (2004). “Lunar Astrology,” Micrologus, 12: 43-133. 8. Laurence Moulinier (2003). Hildegard of Bingen, Cause et Cure. Berlin: 38. 9. David Pingree (1980). “Some of the Sources of Picatrix,” Journal of the Warburg and Courtauld Institutes, 43: 1-15. 10. Colours, along with significant thirds of hours, and the 27 lunar mansions, feature in the Alchandreana, a popular tradition of Arabic and Western astrology, independent of mainstream traditional astrology: see David Juste (2007). Les Alchandreana primitifs: étude sur les plus anciens traités astrologiques latins d’origine arabe (xe siècle) . Leiden. The Ars notoria and the Western “mandala” tradition have both been dealt with by Julien Véronèse (2007). L’Ars notoria au Moyen Âge: introduction et édition critique. Florence and (2012) L’Almandal et l’Almadel latins au Moyen Âge: introduction et éditions critiques. Florence. 11. Thérèse Charmasson (1980), Recherches sur une technique divinatoire: la géomancie dans l’occident médiéval. Geneva. 12. For examples, see Menso Folkerts (1996). “Frühe Darstellungen des Gerbertischen Abakus.” In R. Franci, P. Pagli and L. Toti Rigatelli (eds), Itinera mathematica. Studi in onore di Gino Arrighi per il suo 90a compleanno. Siena: 23-43. 13. Charles Burnett, Ji-Wei Zhao and Kurt Lampe (2007). “The Toledan Regule (Liber Alchorismi, Part II): A Twelfth-Century Arithmetical Miscellany.” Sciamus, 8: 141-231 (see 209). 14. J. Bolte (1903). Zur Geschichte der Losbücher, appendix to G. Wickram, Werke, IV. Stuttgart: 276-348.

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15. See Hilary M. Carey, “Medieval Latin Astrology and the Cycles of Life,” in Astro-Medicine: Astrology and Medicine, East and West (n. 4 above): 33-74 (especially: 37-41).

AUTHOR

CHARLES BURNETT Professeur d’histoire des influences islamiques en Europe (Warburg Institute, School for Advanced Studies, Université de Londres). Il a publié notamment : - (1996). « Magic and Divination in the Middle Ages: Texts and Techniques in the Islamic and Christian Worlds ». Variorum Collected Studies Series, CS557. Aldershot. - Avec Keiji Yamamoto (2000). Abū Ma’šar on Historical Astrology. The Book of Religions and Dynasties (On the Great Conjunctions). Brill. Avec Anna Akasoy et Ronit Yoeli-Tlalim (2011). Islam and Tibet. Interactions along the Musk Routes. Ashgate Publishing Limited. New Encyclopedia of Islam : entrées « Arabic astrology », « Abū Ma’šar ».

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