ANNETTE MESSAGER GÉRARD PESSON Rubato ma glissando

GÉRARD PESSON Portrait en dix-sept œuvres

ORCHESTRE WDR | BRAD LUBMAN QUATUOR DIOTIMA | L’INSTANT DONNÉ NIEUW ENSEMBLE | YOICHI SUGIYAMA ACCENTUS | LAURENCE EQUILBEY

SEPTEMBRE–NOVEMBREEDDF Visuel © Annette Messager

11 Le programme consacré Maison de l’Architecture Théâtre du Châtelet aux œuvres de Gérard Pesson Jardin et Chapelle 5 octobre 2008 est réalisé avec le soutien de 25 – 28 septembre 2008 Mécénat Musical Société Générale, Sacem, Fondation Ernst von Siemens pour la musique Annette Messager Gérard Pesson Gérard Pesson B. A. Zimmermann Iannis Xenakis Rubato ma glissando Conçu et réalisé Gérard Pesson, Aggravations et final, par Annette Messager pour orchestre et Gérard Pesson Bernd Alois Zimmermann, Création. Commande du Festival Photoptosis, d’Automne à Paris prélude pour grand orchestre

Quatre séances par jour, Entracte à 20h, 20h45, 21h30, 22h15 Gérard Pesson, Wunderblock François Lazarevitch, (Nebenstück II) flûtes à bec/musette pour accordéon et orchestre Cité européenne des Récollets, Maison de Ivan Solano, clarinettes Iannis Xenakis, Antikthon l’Architecture, CROAIF et Centre international Nicolas Chedmail, cors pour grand orchestre d’accueil et d’échanges des Récollets Caroline Delume, guitares Teodoro Anzellotti, accordéon Sylvain Lemêtre, percussions Orchestre symphonique de la Radio Elena Andreyev, violoncelles de Cologne, WDR Eric Caillou, Brad Lubman, direction collaboration technique Gilles Gentner, lumières Viviana Mendez, coiffures, costumes Christophe Leflot, régie Coréalisation : Théâtre du Châtelet ; et Festival d’Automne à Paris Jérémy Martin, régisseur des Récollets Dans le cadre de la saison France– Nordrhein-Westfalen 2008/2009 Avec le soutien du Land de Rhénanie du Nord-Westphalie

Diffusion des concerts sur France Musique : Production Concert du 5 octobre, diffusion le lundi 13 octobre à 20h Festival d’Automne à Paris Concert du 13 octobre, Manifestation présentée dans le cadre de diffusion le lundi 27 octobre à 14h30 En collaboration avec la Cité Européenne la Saison culturelle européenne en France Concert du 3 novembre, des Récollets, la Maison de l’architecture, (1er juillet – 31 décembre 2008) diffusion le 16 novembre à 20h le CROAIF et Le Centre International d’Accueil et d’Échanges des Récollets Pages 13, 14, 15 Avec le soutien de Guy de Wouters Ce concert fera l’objet d’une publication indépendante Pages 4, 5, 6, 7, 8

France Musique, France Culture et Mezzo sont partenaires du Festival d’Automne à Paris Théâtre des Bouffes du Nord Opéra national de Paris Théâtre des Bouffes du Nord 13 octobre 2008 Bastille-Amphithéâtre 3 novembre 2008 21 octobre 2008

Gérard Pesson Toshio Hosokawa Gérard Pesson Chigake Imai Quatuor I (Respirez ne respirez plus) Misato Mochizuki Alexandre Scriabine Vignette I, quatuor à cordes et Brice Pauset timbales * Gérard Pesson Brice Pauset Fureur contre informe, trio à cordes Bitume, quatuor II * Brice Pauset, Vita nova Maurice Ravel / Gérard Pesson, pour violon et ensemble transcriptions pour chœur de Entracte Ronsard à son âme et de Shéhérazade Misato Mochizuki, Silent Circle La lumière n’a pas de bras pour nous pour flûte, koto et ensemble Alexandre Scriabine / Gérard Pesson porter, pour piano seul Preuve par la neige, transcriptions Cassation, pour trio à cordes, Chikage Imai, pour chœur de pièces pour piano clarinette, piano Vectorial Projection IV – Fireworks Cinq chansons, pour voix et pour violon et ensemble Gérard Pesson, solo pour cors ensemble Création. Commande de la Philippe Manoury, Inharmonies Instant Tonné, pour ensemble Fondation Rohm Création. Commande d’Accentus Vignette II, pour soprano et Toshio Hosokawa, In Ajimano ensemble * Brice Pauset, pour koto/voix, violoncelle et La lumière n’a pas de bras pour nous Zwei Studien über Dornröschen (Deux ensemble porter, pour ensemble ; version Études sur la Belle au bois dormant) instrumentée par Frédéric Pattar Gérard Pesson, Branle du Poitou Création. Commande d’Accentus pour ensemble Quatuor Diotima Gérard Pesson, solo pour musette Irvine Arditti, violon Melody Louledjian, soprano Maurice Ravel, Harrie Starreveld, flûte Ensemble L’Instant Donné Kyoko Kawamura, koto/voix Gérard Pesson, Chants populaires Makiko Goto, koto sur des poèmes de Philippe Beck Jeroen den Herder, violoncelle Création. Commande d’Accentus et Nieuw Ensemble du Festival d’Automne à Paris * Créations. Commandes du Festival Yoichi Sugiyama, direction d’Automne à Paris Nicolas Chedmail, cors François Lazarevitch, musette Coréalisation : Instant Pluriel ; Festival d’Automne à Paris Accentus Laurence Equilbey, direction Coréalisation : Opéra national de Paris ; La saison musicale produite par Festival d’Automne à Paris Instant Pluriel aux Bouffes du Nord reçoit le soutien de : Avec le soutien de Nomura, de la la Ville de Paris, Fondation Franco-Japonaise Sasakawa Coréalisation : Instant Pluriel ; Mécénat Musical Société Générale, la et de la Fondation pour l’étude de la Festival d’Automne à Paris Sacem, la Fondation Accenture, Mu- langue et de la civilisation japonaises Manifestation présentée dans le cadre de sique nouvelle en liberté ; Radio Clas- agissant sous l’égide de la Fondation de la Saison culturelle européenne en France sique et Télérama en sont les France (1er juillet – 31 décembre 2008) partenaires. Dans le cadre du 150e anniversaire des relations franco-japonaises Pages 19, 20 Pages 15, 16, 17, 18 Les œuvres de Philippe Manoury Page 18 et de Brice Pauset feront l’objet d’une Ce concert fera l’objet d’une publication publication complémentaire. indépendante

3 Biographies

Gérard Pesson Wagner pour Accentus. tout,leursrépertoiresdeformes.Jeme SesœuvressontpubliéesauxEditions moque de la sorcellerie et de l’alchi- Henry Lemoine depuis 2000. Un pre- mie quand bien même j’en utilise les mier disque monographique de ses signes. » « Faire de l’art, c’est truquer œuvres, interprétées par l’ensemble le réel. » Fa, est paru en 1996 chez Accord Una À travers des installations qui combi- corda.Mesbéatitudes,paruchezÆon nent photographies, dessins, brode- en 2001 et interprété par l’Ensemble ries, couture, animaux empaillés, Recherche,aétérécompenséparl’Aca- poupées, peluches, objets divers, démieCharlesCros.Unenregistrement AnnetteMessagerconstruitdepuisles de son opéra Forever Valley est paru années 1970 une autobiographie fic- enfévrier2003chezAssai.GérardPes- tive dont, telle une petite fille capri- son a reçu le Prix musique de l’Aka- cieuse et jalouse, elle s’approprie les demie der Künste de Berlin en mars éléments qui deviennent ses jouets : 2007. Il est professeur de composi- « Mes trophées »,« Mes petites effi- tion au Conservatoire National Supé- gies »,« Mes pensionnaires »,« Mes 2008. Photo © Benjamin Chelly rieurdeMusiquedeParisdepuis2006. jalousies »,« Ma collection de pro- Gérard Pesson est né en 1958 à Torte- Gérard Pesson vit et travaille à Paris. verbes », « Ma vie pratique ». ron(Cher). AprèsdesétudesdeLettres et de Musicologie à la Sorbonne, puis Au Festival d’Automne à Paris : Son travail a fait l’objet de présenta- au Conservatoire National Supérieur 1998 : Ecrit à Qinzhou tionsauMuséedePeintureetdeSculp- de Musique de Paris, il fonde en 1986 Sonate à quatre ture de Grenoble (1973), au larevuedemusiqueEntretemps.Ilest Culte des ancêtres, morts ou vifs ; Lenbachhaus à Munich (1973), Saint pensionnairedel’AcadémiedeFrance Vexierbilder, Rom ; La Ralentie LouisArtMuseum(1980),SanFrancisco à Rome (Villa Médicis) de 1990 à 1992. 2004 : Nebenstück Museum of Modern Art (1981), Van- Lauréat du Studium International de 2005 : Mes béatitudes, couver Art Gallery au Canada, Bonner composition de Toulouse (1986), de Rescousse (marginalia) Kunstverein (1990), aux Etats-Unis en Opéra Autrement (1989), de la Tribune 1995 au Museum of Modern Art et au Internationale de l’Unesco (1994), il Annette Messager LosAngelesCountyMuseumofModern obtient en mai 1996 le prix de la Fon- Art(LACMA),auMuseodeArteModerno dation Prince Pierre de Monaco. deBuenosAires(1999),PalaciodeVelas- quez à Madrid (1999), et Musée d’Art Les œuvres de Gérard Pesson ont été ModernedelaVilledeParis(1974,1984, jouéespardenombreuxensembleset 1995, 2004). orchestresenEurope.SonopéraFore- ver Valley, commande de T&M, sur un LeCentrePompidouluiaconsacréune livretdeMarieRedonnet,aétécrééen grande exposition rétrospective (6 avril 2000 au Théâtre des Amandiers à juin–17septembre2007),repriseàHel- Nanterre. Il a publié en 2004 aux Edi- sinki, Séoul, Tokyo en 2008. tion Van Dieren son journal Cran d’ar- AnnetteMessagerparticipeégalement rêtdubeautemps.Sontroisièmeopéra àdesexpositionscollectivestellesque Pastorale, d’après L’Astrée d’Honoré laBiennaledeParis(1977),Documenta d’Urfé,commandedel’OpéradeStutt- (1977 et 2002), la Biennale de Sydney gart a été créé en version de concert (1979, 1984 et 1990), la Biennale de enmai2006(créationfrançaiseenjuin Venise(1980,2003,2005) etlaBiennale 2009, au Théâtre du Châtelet à Paris, d’Art Contemporain de Lyon (2000). 2007. Photo © Marie Clérin mise en scène de Pierrick Sorin). En 2005, “Casino” est récompensé par 2007 a été l’année de la création de « L’art conceptuel m’intéresse autant le Lion d’Or de la Biennale de Venise. Ur-timonparlesPercussionsdeStras- que l’art des fous, l’astrologie et l’art AnnetteMessager,néeàBerck-sur-mer bourg ) et de la transcription pour religieux. Ce ne sont pas leurs idéolo- en 1943, vit et travaille à Malakoff. chœur de Siegfried Idyll de Richard gies qui m’attirent mais par dessus

4 Visuel pour Rubato ma glissando © Annette Messager

5 Rubato ma glissando * ses œuvres : une figure qui est main- sur une altérité, et pouvoir incorpo- “Par une petite porte, tenant presque d’ordre mythique – rer (comme en cuisine) la technique en passant par le jardin...” Pinocchio – l’homme et son double d’un autre. manipulé–c’estPygmalion,c’estFran- Entretiens kenstein. Elle m’a donné des pistes Pour Rubato ma glissando, Annette a avec Gérard Pesson dans le cinéma – les différents Pinoc- apportéleséléments,etmonrôleaété et avec Annette Messager chio, mais aussi A.I.(Artificial Intelli- de créer une sorte de livret, tout abs- gence), de Spielberg sur un scénario trait d’ailleurs, que diraient les sons, Gérard Pesson de Stanley Kubrick qui met en scène devenusinséparablesdel’imageetde Comment s’est déroulée votre colla- des robots, Lola Montès d’Ophüls qui la lumière. Je n’avais aucune idée pré- borationavecAnnetteMessagerpour l’a inspirée. Nous avons établi, autour conçueconcernantlaformemusicale, créer puis réaliser Rubato ma glis- de chacun des six musiciens, des si ce n’est que je ne voulais pas écrire sando ? familles d’instruments, suivant des unemusiquedeconcert,unemusique G. P.:Jeconnaissaisl’artd’AnnetteMes- considérations plastiques, aussi bien fermée. Il y a des manipulateurs, des sager depuis longtemps. Il m’attirait, au sens visuel que sonore : la musette techniciens, il fallait donc laisser une me troublait ; j’osais me trouver des (uninstrumentfrançaisduXVIIIesiècle, marge de manœuvre aux musiciens. affinités avec sa recherche, sa poé- quin’ajamaisétéutilisédansleréper- Même si elle est évidemment minu- sie: une certaine auto-dérision, un toire contemporain), la viole, le luth, tée, la partition est une alternance de humourunpeufroid,cedétournement lecornaturel,toutunjeud’instruments parties écrites et d’autres qui sont discret de l’objet visant à opérer un à percussions peu conventionnel… conçues, mais non écrites – données «écart », cet amour des objets recy- sous forme de consignes. C’est une clés,rejetés…unespritdesérieux,aussi. Ce qui me plaît dans l’écriture d’une musique assez abstraite, à la fois pré- Ce projet a mis du temps à se préci- partition pour la scène, c’est ce qui sente et discrète. On devrait ne pas la ser :jedoisdirequ’ilaétédifficile,pen- relèvedel’écritureduspectacle.Voilà dissocier des figures, de la lumière. dant longtemps, d’imaginer à quoi il une chose que la danse contempo- allait ressembler. Partir de rien est le rainenousavraimentapprise:onn’est plus excitant. Au départ, nous nous plusdutoutdanscettelogiquedefabri- attendions l’un l’autre. Nous avons cation de l’opéra du XIXe siècle où les * Volé mais glissant. Rubato en italien signi- décidé de travailler sur la figure de rôles de chacun étaient clairement fie« volé ».Enmusique,c’estuntempoflexible, Pinocchio, souvent récurrente dans définis et séparés. J’aime rebondir un peu retenu (« temps volé »).

Visuel © Annette Messager

6 Annette Messager Quandvousavezdécouvertlamusique domestiques, comme les étoffes par volontairement apparents, structu- de Gérard Pesson, quels points com- exemple.Ilsuffitdepeudechose,d’une rantleurcorps.Touslessixsontcomme muns avez-vous pu y découvrir avec ombre sur un tissu par exemple, pour desmarionnettesunpeumystérieuses, votretravail?Etpourquoiavoirchoisi quetoutàcouplequotidiendevienne de vraies personnes dont j’aurais fait deprolongeravecluiletravailamorcé étrange, menaçant… J’aime cet infime des pantins – des pantins humains, avec Casino, votre installation de la décalage, cette inquiétude, ce dan- puisquec’estcequenoussommestous. BiennaledeVeniseautourdelafigure ger du quotidien, ce que sans doute Nous croyons manipuler, mais en de Pinocchio ? Gérard Pesson et moi partageons. même temps nous sommes manipu- A. M.:J’aiproposécesujetàGérardPes- lés. Ce qui m’intéresse en fait dans la son, en laissant le propos complète- Commentavez-vousconçucette«ins- figure de Pinocchio, c’est le non-sens ment ouvert. Il ne s’agit pas d’illustrer tallation » – ou ce « spectacle » ? quireprésentebiennotremonded’au- lafiguredePinocchio;cettefigure,qui A. M. : Comme un parcours. On entre jourd’hui : alors, autant en jouer… estàpeinesuggérée,n’estqu’unpoint danslaChapelledesRécolletsparune de départ, un prétexte. Car ce person- petite porte, en passant par le jardin. Concernantlamusique,qu’avez-vous nage qui veut devenir humain, qui Dispersésdanscejardin,despanneaux évoqué avec Gérard Pesson? passe son temps à mentir, symbolise portant des mots amènent les « visi- A. M. : J’attends surtout de la musique latromperie,l’illusionetlemensonge, teurs»verslelieuduconcert.Lesmusi- qu’ellemesurprenne.Jeluiaidit mon et nourrit l’imaginaire. Je suis impres- ciens sont déjà installés à l’intérieur, souhait d’entendre des mots, des sionnée par la manière dont il a sur- ils portent des sortes de loups, des phraseschuchotéesousussurrées,des vécu et traversé toutes les cultures – masques découpés… Comme j’aime dialoguesentrelesmusiciens–j’aime onconnaîtPinocchioautantenCorée toujours à le faire, j’ai essayé de tra- aussilesouffle.Enoutre,beaucoupde qu’enAfrique.Ilestpourmoiuneimage vailler avec le lieu (qui est en l’occur- pièces que j’ai réalisées pour ce pro- de l’artiste : affabulateur, menteur, rence très beau, un peu décrépi, pas jetsesontrévéléesdessourcessonores: guère enclin à travailler dans un très grand, contraignant mais aussi des grappes de balles de ping-pong bureau… mystérieuxetassezmagique)nonpour suspendues à des fils, de petits venti- Je crois que ce qui nous rapproche, en transformer l’architecture, mais lateursdansl’hélicedesquelssontglis- Gérard Pesson et moi, c’est le goût plutôt pour la souligner. À cet égard, sésdesmorceauxdepapierévoquant d’une certaine « simplicité », pour le la lumière – qui est souvent le parent le bruissements d’ailes de papillons travail volontairement « pauvre » – ce pauvre des expositions – a fait l’objet denuit.Depuisuncertaintemps,dans quinesignifiepasqu’iln’estpassavant d’un vrai travail. mes expositions, les sons que produi- – pour l’élément autobiographique J’ai proposé à Gérard Pesson un sentmesinstallations–lessouffleries, également, mais une autobiographie ensemble de pièces, de sculptures, lesmécanismes–m’intriguentdeplus trompeuse, puisque tout est toujours de personnages,– un Pinocchio, une en plus. Toutes ces machines que j’ai faux:j’aimejoueraveclevrai,ledétour- Fée bleue (qui est un peu sa maman), commencé à utiliser il y a huit ou dix ner....Etpuisl’amourdesmots,desjeux un entonnoir qui évoque Pinocchio, anscréentdesperturbationssonores de mots ; dans la recherche du titre, et d’autres choses encore. Des listes : souffles, clapotis, frôlements, crisse- parexemple,avantdesedéciderpour aussi, dans lesquelles il piochait des ments. Il ne faut pas aller contre cela, « rubato ma glissando », il y a eu beau- éléments, au fur et à mesure. À partir mais aller plutôt dans le sens de la coup d’échanges par e-mail et par detoutcela,nousavonsélaboréladra- machine,verssonrythme.J’ysuissans téléphone,chacunserenvoyantl’ima- maturgie de cette drôle de fable. douteencoreplussensibledepuisque ginaire de l’autre. j’aicommencéàtravailleravecGérard Je voulais que des éléments appa- Quel rôle assignez-vous aux musi- Pesson.C’estaussicequejerecherche raissent et se perdent, évoquant des ciens– sont-ils des sculptures, des danscetypedecollaboration:lesheu- instantsdefragilité,deprécarité,créant marionnettes ? reux hasards qui vous amènent à desfrémissements,desbruissements A. M. : Beaucoup de leurs instruments d’autres idées, d’autres chemins, du temps dans la chapelle, un espace sontsuspendus.Ils’agissaitd’avoirune d’autres manières d’utiliser mes élé- de sons et d’ombres incertaines. sorte de machinerie de théâtre à l’an- mentsmêlantmusique,mots,images… cienne, avec des manipulations réali- Cetravailsurlesmatériaux«pauvres» sées par des régisseurs placés à On a l’impression que vos œuvres estuneconstantedevotredémarche… l’étage…Les six musiciens sont reliés ont une dimension musicale en ce A. M.:Plusquedesmatériauxpauvres, àlarégiepardesfilsdedifférentescou- qu’elles jouent elles aussi avec le je travaille surtout sur des matériaux leurs.Ilssonthabilléstrèssimplement, temps,onlesregardecommeonécou- du quotidien, souvent des matériaux maislessanglesquilesattachentsont terait une partition…

7 28 juin 2008. Rubato ma glissando. Premier test avec les musiciens dans la chapelle des Récollets. © Annette Messager

A. M. : « J’aime jouer avec le temps ; la musique est un art prodigieux en ce qu’elle rentre dans le corps – c’est à la fois sensuel et intellectuel, et vous L’œuvre d’Annette Messager nous renvoie à des expériences déjà vécues, pénètre. deshistoiresfamilières,desmotsindéfinimentprononcésdontnousavons Pour moi, Casino (ndlr : exposition à perdu le souvenir ou le sens. Si elle outrepasse le réel, c’est qu’elle le la Biennale de Venise 2005, récom- charge d’une mémoire qui le met en résonance avec un savoir reculé, sou- pensée par le Lion d’or de la Biennale) vent fabuleux. En imposant la réminiscence comme fondement et vecteur s’apparentait davantage à une cho- de la création, en identifiant le rôle de l’artiste à un colportage, elle régraphie,ouàuneréductiond’opéra, engage son œuvre dans ce chemin sinueux qui croise et recroise le cours plutôtqu’àuneinstallation.Jen’aiqua- del’histoire,auxfrontièresdel’inconscient.Ilyadesaccentsderitournelle simentjamaismontréuneseuleœuvre, dans son œuvre, dont les thèmes passent et repassent, toujours familiers maistoujoursdessériesfragmentées, même au travers des formes les plus déconcertantes. bribes plus ou moins énigmatiques Pour évoquer Edgar Poe, Emerson l’appelait familièrement the jingleman, quis’apparententdavantageaurécit, l’homme du refrain, de la ritournelle. On pourrait appliquer cette image à aucinéma:lasériedesChimèresétait Annette Messager : son œuvre a des accents lancinants, la qualité d’un une promenade, comme la traversée poème mélodique et entêtant, qualité paradoxale d’une œuvre qui ne d’une forêt… J’aime parvenir à ce che- s’imposepasmagistralement,maissegraveennous.Cettefamiliarité,tour minement dans le temps et la à tour agréable, touchante, énervante, inquiétante, ce qui renvoie la ques- mémoire. » tion esthétique dans la sphère de l’intime, de l’impondérable, c’est celle d’une petite chanson qui court de lèvre en lèvre, qu’on oublie, qui revient, dont les mots s’amplifient, puis s’éteignent sans rien perdre de leur pou- Propos recueillis par David Sanson voir, une voix devenue nôtre. DavidSansonestrédacteurenchefdelarevue Mouvement.Ilestl’auteurdeRavel(ActesSud, 2005). Catherine Grenier, Annette Messager, Paris, Flammarion, 2000

8 Concasser, soustraire L’esthétique de Gérard Pesson Martin Kaltenecker

La singularité de la musique de Gé- Sciarrino. Chez Pesson, ces techniques bruitistes vont en même temps tenir en rard Pesson dans le paysage contem- échec ce qui serait une musique trop douce, peut-être trop marquée par une porain tient sans doute à un rapport généalogie française, qui venait hanter dans ses premières œuvres un style très intense à la culture. Culture litté- plutôt déduit de Webern. Si le compositeur écrit en 1996 qu’« il faut envisa- raire d’abord, frappante dans les ger d’admettre que Ravel soit mon refoulé1 », on a l’impression que les modes textes qui enveloppent chacune de de jeu sont chez lui une façon d’interrompre la « biensonnance » et d’effacer ses compositions et qui en fait da- le son plein. vantage qu’une explication ou un mode d’emploi, mais plutôt le journal Cet effacement représente sans doute un « fantasme » fondamental, exprimé d’un labeur difficile où l’on a recher- dans la préface des Nocturnes en quatuor (1987), une de ses premières parti- ché constamment le secours des tions importantes. Il y est question tout d’abord de la disposition formelle : poètes ou plasticiens. Comme la vi- quatre pièces rapides, quatre lentes, qui forment deux mouvements, et qu’on site guidée dans un atelier où se cô- peut entendre « soit comme une forme unitaire trouée de silence, soit comme toient les références, les fétiches et un ensemble de nombreux fragments extrêmement courts, chacun pouvant les objets trouvés : un accord de Mes- figurer une miniaturisation de la structure globale ». Et c’est ensuite l’image siaen, un rythme éthiopien, une so- qui a commandé toute l’écriture : « Le processus de composition consiste en nate de Scarlatti qui annoncerait déjà cribles successifs, qui doivent laisser induire qu’une musique aurait préexisté, Beethoven, tout cela sous le regard très dense, et sur laquelle se seraient déposés des caches qui l’éloignent et d’un portrait de Bruckner… Un rap- l’estompent. La métaphore d’une inondation, d’une submersion serait la plus port à la culture musicale qui se juste pour [en] rendre compte ». Ce qui est mis en œuvre, ce pour quoi il faut donne toujours sur le mode interro- inventer des techniques nouvelles, découle ainsi d’une vision d’ordre poé- gatif ; pas d’hommage sans réflexion, tique, celle d’une musique « derrière la musique », d’un envers, d’un ailleurs pas de musiques citationnelles, de faisant objet de filtrages ou de soustractions. parasitage ou de recyclage de tech- niques efficaces. D’ailleurs, la pente Cette intuition va être développée dans des directions très différentes – tra- de Pesson est de se méfier de tout ce vail avec la fragmentation des matériaux et des formes ; travail avec le rebut qui fonctionne trop bien, et sa car- et les objets trouvés ; avec la transcription comme tamis ; avec le son quoti- rière a été marquée dès le début par dien confronté au son instrumental ; avec la mise en scène du geste de l’ins- un certain écart, un « pas de côté » : il trumentiste qui indique un ailleurs inaudible. Cela implique par exemple une exprimait sa réticence vis-à-vis d’une manière particulière de raconter : Pesson est furieusement du côté du frag- maîtrise instrumentale classique, as- ment, ses formes sont faites d’à coups, de changements de direction et de sistée par ordinateur ou non, ce qu’il tempo incessants, d’une succession de moments. À propos de l’opéra com- appelait la « santé et la bien-son- posé en 2005, le compositeur note à nouveau, comme en écho à la forme nance ». Ni postmoderne, ni post-sé- « double » des Nocturnes de naguère : « Narratif dans le non narratif. C’est ce riel, ni spectral – mais profitant en que veut Susan Howe – et qu’il faut pour Pastorale2. » La mobilité formelle est même temps du rapport plus « dé- en revanche contrebalancée très souvent par l’idée du retour, de répétitions complexé » à la tradition qui était littérales ou non, refrains, variations ou blocages ; la hantise de la répétition celui de sa génération, Gérard Pesson ravélienne (Boléro) rejoint alors la « mécanique grinçante » et le « sillon a tenu à l’idée d’une écriture forte fermé » d’Aggravations et final. (déplacée sur le terrain du geste ins- trumental) et et au désir d’ « entrer » Construire et déconstruire en même temps signifie que toute structure est dans le son. un reste ou sera rendue comme tel. Le rapport au matériau est ainsi marqué par une distance qui ouvre un jeu avec les connotations plutôt qu’elle n’éla- Son point de départ a été une appro- bore des constructions ingénieuses en soi. Les hauteurs sont donc d’une part priation de ce que Helmut Lachen- gommées par les timbres instrumentaux, mais aussi, les « grilles » harmo- mann appelait la «musique concrète niques n’arrivent à la surface que lacunaires ; elles représentent un simple ré- instrumentale », faite de sons bruités servoir où l’on puisera ou non, une carrière de matériaux fragiles. Dans et de modes de jeu nouveaux sur les Récréations françaises par exemple, la pièce qui donnait le clef de la struc- instruments acoustiques tradition- ture des hauteurs, son « noyau harmonique », a été en définitive supprimée. nels, comme on les trouve aussi chez Et dans ces différentes échelles, déduites de l’accord de la guitare, l’écriture

9 va surtout mettre en lumière tel intervalle selon le contexte, si bien que toute trumental par de petits galets qui re- une pièce pourra thématiser la simple répétition d’une seconde majeure ou bondissent sur les cordes du piano, d’une tierce mineure. Cette tierce « pendulaire » est d’ailleurs une sorte de ta- d’accessoires comme les tuyaux d’air lisman chez Pesson – prélevé sans doute au début l’« Adagietto » de la 5e Sym- en plastique ou encore la perceuse phonie de Mahler, elle apparaît un peu partout, des Nocturnes en quatuor et dont le sforzato met un terme à la Les Chants Faëz jusqu’à Aggravations et final, où les musiciens semblent à un Gigue, et il oppose au puissant pou- moment la faire circuler entre eux comme un frisbee. mon de Bruckner ses serinettes en la, son piano jouet, son rossignol à vis. De même, dans Cassation, l’interaction entre un accord en tant qu’ensemble de hauteurs et en tant qu’objet de connotations littéraires et musicales est À travers ces sonorités cocasses, le particulièrement frappant : association à la guitare comme accessoire obligé son musical travaillé est déconstruit du séducteur sous la fenêtre de la belle ; association à une courte pièce noc- par le son quotidien. Parfois, les « si- turne de Wagner commençant sur un accord caractéristique, qui va par lences colorés » (dans Aggravations et exemple donner la manière d’accorder les instruments à cordes. On déduit final par exemple) font penser aux pe- donc de la petite sérénade wagnérienne à la fois un aspect technique et une tits “paysages sonores” captés dans idée poétique, qui verse d’ailleurs plutôt dans l’« anti-sérénade » : les cordes le journal du compositeur, ces « in- jouent le plus souvent avec un plectre, le piano ponctue, la clarinette semble terpolations du réel dans la musique s’étrangler, ne jamais accéder au chant amoureux, le tout marqué par une […], les téléphones portables dans verve rythmique presque méchante, avec une récurrence de rythmes de Boris, les oiseaux nocturnes pendant marche et de valse. Ces rythmes « typés » sont également des objets trouvés, l’Hermès de Sciarrino. Le bruit recon- comme ailleurs la valse dans Le Gel, par jeu ou La Lumière n’a pas de bras pour naît la musique, comme la Pucelle le nous porter, le branle du Poitou, la gigue, de façon générale le trois temps : gentil dauphin, et vient d’agenouiller j’étais fait, dira Pesson, pour diriger des « ateliers de scherzos ». Mais tout devant elle6. » Mais le son concret, comme les accords ou des mélodies récupérées (un adagio de Bruckner qui parfois dérisoire, indique aussi cette entre par la fenêtre de Mes béatitudes), ces objets sont ramassés pour être tension propre à la modernité entre aussitôt défaits ou broyés. C’est toujours l’idée de la musique comme reste : une définition philosophique de l’art « La musique est le squelette, et ces rares accords qui flottent, la fibule, la cein- et l’art comme ce qui frappe les sens, ture, l’épée, indices résiduels de la vie tombée en poussière3 ». entre l’œuvre comme structure abs- traite et comme intensité, entre L’image poétique du voile qui cache autre chose tout en le montrant un peu l’arche formelle et l’affiche lacérée, et, fait comprendre que la transcription comme « désécriture » communique en musique, la tension entre le maté- avec la composition même : dans les deux cas, il s’agit de filtrer, de gratter, de riau et la matière. tamiser. À propos de Nebenstück 1, un travail sur la Barcarolle de l’op.10 n°4 de Brahms, c’est à nouveau une image maritime qui vient au compositeur, qui a Enfin, l’idée d’une « musique derrière instrumentée la pièce comme si elle s’était « oxydée » dans la mémoire, la musique » se déclinera de plus en « comme un objet tombé dans la mer. Tâcher de la transcrire, c’était la repê- plus à travers un travail sur le geste cher, la retrouver assimilée à mes tentatives, chargée de ce que mon propre instrumental, montré parfois pour travail musical lui avait ajouté, jusqu’à la soustraire peut-être4 ». Ici, les ar- lui-même, comme allant vers le son chets qui appuient à peine sur les cordes en suivant les nervures de la mu- ou s’arrêtant tout juste avant sa pro- sique de Brahms proposent, dans le même geste, le surlignage et l’effacement. duction. Dans la 6e des Récréations françaises Pesson introduisait l’idée L’instrument tel que le conçoit Pesson est toujours contaminé par un autre. d’une Knochenmusik (« musique Et c’est là une des tendances de l’organologie depuis le 18e siècle, comme le d’os »), faite uniquement d’une épure remarquait André Schaeffner : le violon veut faire l’orgue, greffé d’une taba- fragile et trouée du texte musical, tière il imitait le chant chevrotant de religieuses, le clavecin puis le exécuté par des bruits de clefs ou les piano « s’approprient » d’autres timbres : « Chaque instrument risque de n’être doigts tambourinant sur les cordes plus lui-même, tant peuvent le hanter les ombres des autres instruments »5. ou le corps de l’instrument; dans Face à la tendance contraire qui veut le perfectionnement technologique ex- l’opéra de chambre Forever Valley, on trême pour accéder au « propre » d’un instrument (l’insurpassable modèle D trouve des gestes-son où l’œil doit de Steinway, une chimérique « Ur-clarinette »), Pesson est fidèle aux synthèses symboliquement suppléer à l’infor- instrumentales de Berlioz (le faux harmonium dans le « Sanctus » du Requiem) mation acoustique ; ailleurs, on solli- ou Debussy (les violons traités de guitares dans Ibéria). Il use du taping sur les cite l’instrumentiste pour des cordes, des bruits de clefs qui rendent des flûtes percussives, du frottements sifflotements, des bruit de pieds, ou des cordes avec la paume de la main ou le pulpe du doigt, narguant le son ins- des mains qui passent rapidement

10 sur les habits. Le compositeur pro- Toccatas et cantilènes pose ainsi le geste et sa condition, La musique vocale de Gérard Pesson l’avers et l’envers, en un jeu qui pro- Laurent Feneyrou blématise la relation entre l’œil et l’oreille pendant l’écoute, qui tantôt Si, dans l’œuvre de Gérard Pesson, l’instrument est animé par des techniques collaborent, tantôt se combattent. de jeu et des gestes instrumentaux peu usuels, l’écoute s’y révèle haptique, L’auditeur, toujours en quête de soucieuse de toucher, de sondage, d’auscultation. De ce tact, inactuel, d’une l’arche formelle et des «bonnes» «apesanteur historique» (selon l’expression d’André Boucourechliev que coupes, tantôt données par la tex- GérardPessonfaitsiennedansuneanalysedesThreeSongsfromWilliamSha- ture, tantôt indiquées par le jeu des kespeared’IgorStravinsky),lecorpussedéclineentreeffleurement,frôlement, musiciens, doit les observer avec at- grattement,frottement,pincement,tâtonnement,évitement,lissageetétreinte… tention ; cette théâtralisation produit À travers ce toucher, sens primordial qui incite à d’étranges caresses et grif- alors un niveau supplémentaire de furesdescordesoudespercussions,commeàd’inéditsmouvementsdeslèvres césures d’un discours où tout et autres impuretés du souffle dans la flûte, les objets déploient un champ, conspire à l’interruption. au sens quasi cinématographique : ils nous sont proches ou nous échappent dans le lointain, cette lontananza, entre écho des montagnes et éloignement Les gestes pessonniens seraient amoureux, que chante Panorama, particolari e licenza (2006), pour alto, voix donc : interrompre, soustraire et divi- d’alto et ensemble, d’après Harold en Italie de Berlioz. Une coalescence du ser. Diviser Ravel par Lachenmann, sujet et de l’objet en résulte. La main touche ce qu’elle anime et s’y découvre, l’instrument par l’ustensile, la forme le corps du musicien et l’instrument se constituent l’un et l’autre, tactile- pleine par le fragment, les sons du ment, et leur contact est contact de soi à l’autre, qui joue ou écoute. Mais si conservatoire par ceux qui passent toute œuvre instrumentale tient d’une toccata, qu’en est-il de la voix, que par la fenêtre ouverte. Mais c’est personne ne voit, ni n’atteint ? aussi une division qui soit suspendre – ne donner ni l’ici, ni l’ailleurs, ou un Deux œuvres scéniques ouvrent le catalogue des œuvres vocales de Gérard peu les deux, pour nous perturber Pesson : Beau soir (1988), opéra de chambre, et Ciel d’orage (1990), opéra parlé. avec grâce. Musique au fond d’une Sur une terrasse, un soir d’été, où l’obscurité n’est pas entière et laisse devi- porosité troublante, qui tient en ner quelques ombres, des individus, réunis par la menace d’un orage ou d’un échec l’idée d’une musique absolue, rôdeur, dialoguent, « comme pour s’éviter ». À ce théâtre nocturne s’ajoute abstraite ou autonome en ouvrant un interlude, Le Couchant (1990), pour trois voix et cinq instruments. Par la l’espace de l’œuvre aux ambiguïtés et suite, Gérard Pesson compose une quinzaine d’œuvres vocales, de la trans- aux intensités de la vie. cription chorale à la mélodie avec piano ou petit ensemble, dans la tradition française, mais non sans malice, non sans cette ironie que les Romantiques allemands tenaient pour le moment de la dissolution, de la négativité pure. Citons Écrit à Qinzhou (1994), pour voix et piano, où la musique, précise, sans vibrato, se veut l’empreinte de la concision poétique de Du Fu ; Purple Pro- gramme(1994),poursoprano,clarinettebasseetpercussions,surcinqpoèmes d’Emily Dickinson qui, en passe d’apprivoiser l’Éternité, « écrit comme si elle 1 Cran d’arrêt du beau temps, devait gagner du temps, pèse chaque mot, les séparant de ces fameux tirets, Paris : Van Dieren, 2008. p.247. comme si l’essence poétique la contraignait au télégramme » ; Butterfly le 2 « Jonas, Ninivé, Dieu. Journal 2004 », Bou- nom (1995), scène lyrique pour soprano, chœur d’hommes et petit orchestre, doir & autres 1 (2005), p.130. Susan Howe, poète, née à Boston en 1937 sur un texte de Marc Jaffeux, une Butterfly « confucéenne », de l’absente- 3 Cran d’arrêt du beau temps, p.183 ment ; Forever Valley (2000), opéra de chambre pour une comédienne, sept 4 Texte accompagnant l’enregistrement chanteurs et six instruments, sur un livret de Marie Redonnet, auteur des chez Æon. 5 Variations sur la musique, Paris : Fayard, poèmes des Cinq chansons (1999), pour mezzo-soprano, flûte, clarinette, alto, 1998, p.106. violoncelleetpiano.D’emblée,ilapparaîtquel’œuvredeGérardPessonoscille 6 « Désolé mais sans traîner. Journal 2005 », entre parlé et chanté, entre un lyrisme sec, ossifié, et le genre du mélodrame, Boudoir & autres 2 (2006) p.117. que pratiquèrent jadis Berlioz, Liszt ou Schumann, et qui renonce ici à l’em-

MartinKaltenecker,musicologue,estmembre phase du chant, un recto tono, soliste ou choral, dans le souvenir de la psal- du Centre de Recherches sur les Arts et le modie, et visant à une voix intelligible, mais neutre, sinon banale : « La voix Langage (EHESS, Paris). Il est l’auteur de La parlée, sans effets détournés, surtout sans hystérie, sans presque de profé- Rumeurdesbatailles(Fayard,2000)etdeAvec ration pourrait faire renaître un contre-pathos. » Entre ces pôles, loin de HelmutLachenmann(VanDierenEditeur,2001). Il a collaboré avec Gérard Pesson pour les l’aporie du Sprechgesang, d’autres types de vocalité se font jour, du mur- livrets de Beau Soir (1987) et Pastorale (2005). mure au fredonné, du légèrement intoné à la cantillation, de la comptine au

11 choralàmi-voix,voireauchantpoursoi,«commepournedérangerpersonne». Il en est de même des chœurs a cap- Mais une seconde tension jaillit, plus importante encore, et qui ne recoupe pella,effectifséculaire,deChantspopu- que partiellement la précédente. Toujours, Gérard Pesson sait la duplicité de laires(2008),surdespoèmesdePhilippe la voix, et la percussion de l’air et l’articulation signifiante du mot. À l’une, ce Beck, qui collabora aussi au livret de que les Grecs regroupaient sous le mot de phonè, la voix comme son articulé, Pastorale(2006),dernieropéraendate, timbre des instruments et tout autre bruit de la nature, des animaux, de la d’après L’Astrée d’Honoré d’Urfé – « mer, de la pluie ou du feuillage des arbres – une nature dont Gérard Pesson épopée galante », « atlas des mœurs scrute les diverses imitations musicales chez Debussy, Mahler ou Sciarrino –; du temps », où les personnages, mas- à l’autre, le logos, ce qu’on dit, le langage, le dialogue, la discussion philoso- qués, mesurent les servitudes de la phique, la raison, l’intelligence du sens. La voix, non plus onomatopée et pas jouissance et du jeu. Dans les Chants encoresigne,estintentiondesignifier.Àcetteintentioncorrespondunintense populaires,Beckopèrecequ’ilnomme désir,fût-ilstagnant.DanslesCinqpoèmesdeSandroPenna(1991–1992),pour des«déductions»decontesdesfrères baryton, clarinette basse, cor, violon et violoncelle – il en existe une première Grimm, des continuations, des crois- version pour baryton et piano –, sous les vers de Penna, d’une « scandaleuse sances littéraires, et ici musicales, douceur », « entre le désespoir et la contemplation du calme ruissellement d’unesourceainsirenduedépendante de la vie », affleurent de petits riens. Comme des restes, arte povera en decequ’elleengendre,etinversement, écho aux brèves consonances, délicates ou triviales, et presque classiques car l’un dit ce que l’autre tait. À ces du poète. nouementsdelamémoire,dontFreud a mis en évidence les écrans et les Pourtant, en musicien d’après la modernité, Gérard Pesson sait la ruine du incessantes modifications, chacun signe, l’exigence de sa déconstruction. En témoignent les lacérations du dis- d’entre nous puise : « C’est la poésie cours, ses mosaïques volontiers déduites de Bruckner et de Messiaen, musi- ajoutée par l’usage qui donne à ces ciens de l’apposition et du jointoiement. Ce qui se donne, en deçà des mots, fragments leur surcroît de valeur le plus souvent aisément perceptibles, en deçà du respect des auteurs mis en humaine, leur timbre sentimental », musique et de leur prosodie, c’est une signification difficile, un sens qui se écrit Gérard Pesson de la chanson détruit sitôt connu, qui ne transparaît que dans les décombres, creusements populaire chez Debussy. Une aura en ouérosionsdulangage,etquidoncbégaie.Alors,l’écritureblanche,defiltrage somme, le limon, patiemment sédi- et d’effacement, où domine une instance de découpe, se double d’un goût menté et toujours vivant, de lieux, de pour l’entêtement mat d’objets trouvés ou inventés, pour l’obstination qui paysages et d’époques, la capacité les encercle et les dynamise, qui connote la lenteur et suspend le temps, de la musique à faire surgir des rémi- sinon l’oblitère, jusque dans la frénésie de certains tempos. Comme dans niscences de sensations et de senti- Contra me (Miserere) (2002), pour ensemble vocal et instrumental (on y dis- ments.Entrelesimulacre,chimérique tingue le ’oud, luth du monde arabe), une réduction des œuvres littéraires, un réenchantement des rumeurs du évidement, la rature de phrases et de vers, que le chant rend à l’état de ves- monde, et le dévoilement de la vérité, tigesetressasse,enestletraitsaillant.«C’estlatyranniehabituellementsous- oulavéritécommedévoilement,éphé- tractive que la musique fait peser sur le texte d’où il résulte que les poètes, mère, d’un air, d’une rengaine, d’une non sans raison, se méfient des musiciens », écrit Gérard Pesson de Sur le mélodie d’ordinaire enfouie, recou- champ (1994), elliptique et léger opéra à numéros pour quatre chanteurs et verte, l’œuvre de Gérard Pesson est huit instruments, sur des fragments de Pierre Alferi. La voix y est le lieu du une terre de biographie, une écriture retrait. de la vie, et traduit l’interstice entre le réel, fui, et d’imaginaires contrées À l’instrument, la toccata ; à la voix, la cantilène, linéaire, et « pour aller au que réinvente ou rêve l’écoute. plus simple ». Étymologiquement la cantilena latine désigne le chant, la chanson et ses refrains, dont Gérard Pesson est si friand, partant l’air rebattu, et même la satire. Là, tout autant, mais autrement que dans les transcrip- tions, traces et écarts d’autres voix, anciennes, abstraitement transformées ou transposées, chœurs de vivants et de morts, dans Kein deutscher Himmel

(1997), d’après l’Adagietto de la Cinquième Symphonie de Mahler, dans Musicologue, chargé de recherches au CNRS, Preuve par la neige (2004), d’après quatre pièces pour piano de Scriabine qui, Laurent Feneyrou est éditeur des écrits de si près du langage, appellent chant et texte, ou dans les Trois mélodies de Jean Barraqué, Luigi Nono et Giacomo Man- Maurice Ravel (2008), polyphonies d’après deux des trois poèmes de Schéhé- zoni.Auteurd’articlessurlamusiquecontem- poraine, il a dirigé des ouvrages sur l’opéra, razade et la miniature Ronsard à son âme, importent moins un exercice sur les relations musique/politique et sur les d’écriture, toutefois rigoureux, que des affects et une mémoire oublieuse et théories de la composition au XXe siècle.. créatrice.

12 Textes de Gérard Pesson sur ses œuvres Les notices qui suivent sont rassemblées pour la première fois. Écrites par le com- positeur à l’occasion de la création de ses œuvres, elles constituent une source d’in- formation littéraire sur leur genèse et sur le projet qui les anime.

Les œuvres sont éditées par les Editions Henry Lemoine, www.henry-lemoine.com

Aggravations et final pour orchestre symphonique Composition : 2002. Commande WDR Création 25 octobre 2002, Cologne, parl’OrchestredelaradiodeCologne,WDR, Lucas Vis (direction) Dédicace : à Elena Andreyev Durée : 13’30

Ce que j’ai cherché dans toute ex- pression musicale par la sublimation du geste instrumental (et son envers) setrouve,àl’orchestre,portéàsonex- trêmepoétiquedecontradiction:l’or- chestre est à la fois la mer traversée et la salle des machines. Quand le compositeur aborde l’écri- ture de l’orchestre, il doit accepter defonderunefamille.L’orchestration combine le métier, la stratégie, la dé- pense,laparcimonie,l’astuceetlapuis- sance. Orchestrer a souvent donc été, ici, désorchestrer, dans la crainte de cette mécanique qui peut à tout mo- ment, par l’effort de tous, cingler à plein gaz vers le grand large philhar- monique, et faire entendre le rugis- sement sacré. Considérer les formules les plus nues de l’expression musicale, les idiomes les plus touchants, les plus éculés, les prélever à vif, comme pour une vi- visection, les retourner, les prendre à contre-emploi, les déconstruire puis les faire palpiter à nouveau un court instant, comme en les réhydratant. Comment exprimer, ne serait-ce que dans un titre préparatoire, la mise en danger de la tentative même : néces-

2008. Photo © Benjamin Chelly saire travail de déclivité, aggravation

13 certaine de l’obstination à s’y tenir lementlemotifdelachevauchéepuis d’un objet tombé à la mer, qui, oxydé, malgré tout, appliquée à une matiè- une sorte de mécanique grinçante et recouvert de corail, se trouve à la fois re que l’on veut mettre à plat, éluci- sèchequimarquelesdernièresforces souligné par l’usure additive et sous- der. Lorsqu’on avance un diagnostic, du ressort. trait au regard. Dans cette apparition uneaggravationestlittéralementune Danscelacéréd’affiches,onpeutvoir paradoxale de ce qui est escamoté «complication».Vertigoétaitdéjàpris réapparaître, effilochées, des figures résideuntraitdecertainesdenosten- (Hitchcock),Machinations,aussi(Aper- très anciennes auxquelles une ten- tativesquidémontrentqu’ilyaparfois ghis). dresseprofonde,remontantparfoisà une terrible concomitance entre nos L’idéemiseendangers’estrévéléeêtre l’enfance, nous lie. On reconnaîtra idées(oucequ’oncroitnaïvementêtre uneconstructionparlacérationssuc- Bruckner, qui a procédé souvent lui- tel) et toute idée préexistante. cessives, avancée obsessionnelle, lés même par panneaux successifs, Mes- Cette désécriture, pratiquée dans ma misboutàboutpuisdéchirés,d’oùun siaen, et ses émaux cloisonnés, mais propre musique, utilisée également résultat affichiste où tout est efflo- aussi, Scarlatti (le fils) dont Aggrava- en indexant des idées trouvées (l’ef- rescence, nuance tronquée, extrême tions a pris, par réflexe, ce couper-col- fet marginalia dans Rescousse), je fragmentation.DansAggravations,j’ai ler de la pensée, la façon fébrile, le jeu l’applique, dans Wunderblock, à une voulu avancer sans retour en arrière, crueletdélicat–folieautravail–fouet- des musiques qui a le plus compté ce qui est intellectuellement impos- tant, déchirant, agrégeant la matière pour moi ces dernières années : celle sible(etenmusiqueplusquedanstout dans une fuite en avant, manière deBruckner(quejecitaisdéjàen«hors- autre art) utilisant, en les concassant, presquedédaigneusedemettreàmal texte » dans Mes béatitudes). marches,rythmesdechevauchée,val- l’idée même et son intégrité, comme Certain aspect de la désécriture vien- se, ritournelles, échos familiers, non s’ils’agissait,enfait,desemerlespour- drait de ce que Lachenmann pascitations,puisquequ’ils’agitd’ar- suivants. stigmatisait dans ma musique com- chétypes, mais plutôt prélèvements me « magie par le vide ». Magie qui comme pour un autovaccin. génère sa propre perte : on est alors entre miel et venin. C’est ce danger- Lavitesse,l’aspirationparlevide,l’im- là qui est dit dans l’orchestration de pression de vertige, une sorte d’épui- Wunderblock ; la lutte entre l’attirail sement progressif de la matière par dumerveilleuxenfantin(lesserinettes, accélérationramèneàl’idéedefrayeur, le piano jouet, les glockenspiele, cé- de mécanique inexorable, de pente Wunderblock (Nebenstück II) lesta, et même des verres accordés, (dans le sens aussi d’inclination, de Tentatived’effacementduMajestoso comme pour une table de fête) ; mais propension). Je pensais bien parfois de la Sixième Symphonie d’autre part, la noblesse, la transcen- qu’écrivant Aggravations, j’avais cap- d’Anton Bruckner dance, la résistance du matériau té la musique trop tard, quand elle pour accordéon et orchestre brucknérien. était déjà dans sa phase d’essorage. Composition : 2005. Commande WDR. Cette lutte se retrouve d’ailleurs sym- Leprincipequiprécipite,relieetcontre- Création le 12 novembre 2005 par l’Or- boliquement entre l’harmonium, dit cette règle est la boucle, la répéti- chestre de la radio de Cologne, WDR déclinaison pauvre du sacré, et l’ac- tion pure, l’itération par blocage, le Johannes Kalitzke (direction), Teodoro cordéon profane qui endosse des sillon fermé. Cet effet rondo, par re- Anzellotti (accordéon) mélodies ou des accords écrits pour frains en boucle, incruste une certai- Dédicace : à Mathieu Bonilla Dieu et improvisés parfois à l’orgue ne lenteur structurelle dans un tem- Durée : 21’ de Saint-Florian, sonnant ici comme pofrénétique.Lesujetfaitdusur-place un limonaire de foire. (Roland Barthes). Robert Rauschenberg, en 1953, a ef- La fragmentation timbrique de Wun- facé un dessin de Willem de Kooning derblockparticipedecescintillement, L’aggravation, chemin faisant, est de- puis l’a exposé comme tel. Mais De decettevibrationsémantiquequipor- venue, dans cette œuvre, une entité Kooning, était consentant. tent jusqu’à la désintégration la formelle et poétique, comme les béa- Dans l’entreprise de mes Nebenstüc- manièredontBrucknercomposaitses titudeschezCésarFranck.Chaqueag- ke – ce que j’ai appelé «mon grandesformesparpetitesunitésjoin- gravationestdoncsuivied’uneboucle archéologie propédeutique » – il toyées. (on pourrait dire un double), précipi- s’agissait de procéder à une sorte Le“Wunderblock”aétédécritparSig- té de la matière précédente. Deux « d’autopsieduréférent».Aproposde mund Freud en 1924 comme un conducti – silences colorés – ponc- la Quatrième Ballade opus 10 de système d’écriture permettant, par tuent la forme avant le final plus ra- Brahms qui faisait la matière du Ne- une feuille de celluloïd dite « pare- massé et unitaire, où l’on repère faci- benstückI,j’avaisutilisélamétaphore stimulus»etunefeuilledepapierciré

14 translucide appliquées toutes deux se d’entrée de la lumière permet une surunetablettederésine,d’écrireavec profondeurdechamppresqueinfinie. un stylet et d’effacer dans le même Elle nécessite, ou plutôt autorise, des geste. Freud, qui se méfiait de la mé- tempsdeposetrèslongs.Nondescen- moire,essayaitdetrouver,parcepetit tièmesde seconde,mais des minutes, appareilimparfait,uneanalogieavec des heures, des semaines, voire des le système à double-fond de la per- Lepremiermouvement,Allegro(études années. ception qui ne garde pas de façon 1et2)estdestructureternairedetype durable le stimulus, tout en l’enre- A B A+B. Y alternent jeu virtuel – ta- Ce temps de pose extrême, l’épingle gistrant.Autremanièrededécrire,par ping, valse balancée en pizzicato, bat- de la lumière, sont une écriture du cetteinscriptioncryptée,l’inconscient. tuto con legno, puis trio d’harmo- temps. Ils parlent de l’invention. Ils Dans Wunderblock, le déroulement niques en trilles murmurando. sont le sujet de cette musique à la- de la partition originale du Majesto- Lesecond,Adagiettotenebroso(études quellejesongedepuispresquedixans sode la Sixième Symphonie de 3 et 4), est une sorte d’élégie au bord – temps minimum si l’on veut encou- Bruckner (seconde édition Leopold dusilence.Lesquatreinstrumentistes rager les bougés et être bien sûr que Nowak ; Vienne, Eulenburg, 1990) est confondent leur propre respiration les figures se déposeront toutes sur strictement respecté, numéro de me- avec celles des archets qui vont cher- le bitume de Judée. sure par numéro de mesure. Certains cher le son là où il est peu. C’est une Ainsi toute « impression » pourra mu- passages répétitifs de l’original sont traversée tous moteurs éteints. Des ter vers sa complication. Selon la loi iciparfoisétirés(l’itérationétantaus- cantilènesparviennentparfoisdeloin, optique,dehorsdevientdedans,mais si une forme d’effacement, de mais pas de terre en vue. à l’envers. La musique glisse vers une suspensiontemporelle).Toutefoisdeux Le troisième, Finale precipitoso (étu- sérénade accélérée, indéfiniment re- objets étrangers s’invitent : le deuxiè- de 5) est le plus bref. Sauf à la fin, qui prise,secouéeparuntraitement«bru- me thème du second mouvement de fait sonner des “accords venins” for- taliste », lancée à marches forcées à lamêmesymphonie(àlaplacedesme- tissimoarrachés,répartissurunample traverslepanorama,révéléeenfinsur sures 340 à 351) puis un motif sériel registre, les quatre instruments sont desnuditésdecantilènequidessinent et un accord, déduits du nom du dé- traités dans ce mouvement comme le point de fuite de ce galop. dicataire, le compositeur Mathieu s’ils avaient le même ambitus, les fi- Bonilla, grand admirateur, lui aussi, gures rayonnant à partir d’un canon La lenteur de la « chercherie », com- d’Helmut Lachenmann. à l’unisson. me dit Philippe Beck, fait que le cher- La musique se termine abruptement cheurestlui-mêmecherché.Ildevient avant que l’œuvre soit achevée, selon à son tour photosensible et se voit unedernière“incoïncidence”entrear- contraint,sansorgueil,maisnonsans ticulationformelle,énergieetdiscours. présomption, de s’appliquer le prin- cipe connu : Chevauchée bien ordon- Bitume née commence par soi-même. (Sérénade chevauchée) Quatuor à cordes n°1 Composition : 2008 (Respirez ne respirez plus) Commande : Festival d’Automne à Paris Composition : 1993 Création : 13 octobre 2008 par le Quatuor Commande:RadioFrance/Présences1994 Diotima, Théâtre des Bouffes du Nord Création le 26 janvier 1994 Effectif : 2 violons, alto et violoncelle par le Quatuor Parisii Dédicace : à Philippe Beck Effectif : 2 violons, alto et violoncelle Durée : 17’ Dédicace : à Jean-Philippe Delavault Durée : 9’ Le sténopé est l’appareil photogra- phique le plus élémentaire. Une boî- Soit cinq études enchaînées formant te bien fermée, faisant office de ca- trois mouvements qui s’appliquent à mera oscura, un trou d’épingle pour traiter de la vitesse, de l’effacement, laisser passer la lumière. L’image in- del’essoufflement,delasoustraction versée du réel, du fait de l’absence de opéréeparlegesteinstrumental.C’est focalisation,sedéposerasurlepapier larecherched’unprécipité,ainsiqu’on photosensible, reproduisant ainsi le l’appelle en chimie. système même de la vue. La petites-

15 Fureur contre informe acte poétique fondé en l’inachève- Vignette 1 et Vignette 2 (pour un tombeau d’Anatole) ment. Le suspendu, l’inaffirmé sont Composition : 2008 Composition : 1998 souvent évoqués par Mallarmé dans Création : 13 octobre 2008, Théâtre des Commande : WDR Cologne ces feuillets comme la registration Bouffes du Nord, par le Quatuor Diotima Création le 6 février 1999 à Cologne par le d’une musique intérieure qu’on ne et l’Instant Donné. Trio Recherche. Effectif : trio à cordes peut faire entendre à quiconque – Commande : Festival d’Automne à Paris Durée : 9’ “Manquerlebutsublime”(feuillet105). Leprojetestlaisséensanudité.Labri- Vignette 1 On a trouvé dans les papiers de Sté- sure,lenon-résolurévèlentalorsàMal- pour quatuor à cordes et timbales phane Mallarmé, après sa mort, une larmé que l’actualité de la pensée, le durée : 3’ enveloppedecartonrougecontenant noyauirréductibledelatentativepoé- 210feuilletsdepetitformat(12,5x7,5) tique, ce qui est absolument moder- L’intuition saisie sur le vif peut faire couvertsd’uneécritureaucrayon,très ne, est néant de chagrin, veille, rien une idée en musique. Admettons que légère, rapide et presque effacée au- d’affirmé donné à entendre. ce soit une idée simple et carrée qui jourd’hui. Au verso du feuillet 6, sen- détermineraleformat.Admettonsque siblementpluspetitquelesautres,on la vignette soit une forme non seule- lit,difficilement,troismotsqu’onaura mentbrèvemaisaussiprovisoire.Une misplusdetrenteansàdéchiffrer:fu- « trouvaille » lyophilisée que d’autres reur contre informe. temps,d’autresformespourrontréhy- Cette œuvre inachevée, à la fois pro- Feuillet 61 : drater. duite et empêchée par la douleur, a or parti, et Dans la vignette 1 est mis en jeu ce étéécriteaprèslamortd’AnatoleMal- quepeuvent avoirdecommununqua- larmé(16juillet1871–8octobre1879), vent de rien tuoràcordesetdestimbales:leglissé lefilsdupoète.C’estuntombeau,une qui souffle – droit ou pulsé. Faire fusionner en consolation poétique, brûlante, laco- méta instrument deux entités irré- nique, exempte de toute préciosité. (là, le néant conciliables.Tentermêmeununisson, L’œuvre aura été comme asphyxiée ? moderne) sans fanfare, sans vibrato. Essayer par la charge autobiographique, par unroulementfonduquisoittantpour un JE pathétique et véhément qui la- laplacepubliquequepourlachambre. cèrelamatièrepoétiqueetfinalement condamne l’essai de résurrection. Feuillet 57 : Vignette 2 et III peut-être pour soprano et neuf instruments Letrioàcordesreprend,entreizefrag- durée : 3’ ments enchaînés, les trois ordres, les rien – trois temps non chronologiques ima- sur mort Cette vignette aurait à voir avec le ginés par Mallarmé pour ce théâtre jeu du furet. Les joueurs (dix en géné- abstrait à trois personnages (père, et ral – c’est bien le cas ici), disposés en mère, fils). donné à entendre cercle, font glisser un anneau le long simplement – en d’une ficelle sans le laisser voir au « I. Moment de la révolte et du cri, dé- piquet » central. De même, les musi- clenchement de la maladie, mort qui l’espace de “il est ciens se font passer, vite, et en se les frappe / tempo rapide, refrain, stri- mort de I II adressant, quelques notes dans le dences fugitives médium(c’estbienlecasdeledirecar II. Temps de la maladie, moment de la la séance de spiritisme n’est pas loin). mort du fils, de l’ensevelissement (as- Legesteinstrumentalprime, demême somption paternelle) / silence coloré l’expressivité de ce geste par rapport III. Résolution, projet poétique, essai àson«rendement»acoustique.Chaîne detriomphespirituel/cantilène,chant derespirations,desoupirs,deregards, funèbre de sursauts du corps. Quelques mots sur la dureté du travail. Comme sou- L’impossible à écrire est au centre du vent, la musique essaie de dire, fût-ce projet mallarméen, où le fragment, en bredouillant, « Esprit es-tu là ? ». l’esquisse deviennent moments d’un

16 La lumière n’a pas de bras Dominique Troncin et Dominique My offerte aux complices du moment ou pour nous porter avaientinventéunsobriquet pourme de la solennité. Version A pour piano amplifié désigner : Peu d’son. Lorsque j’essaie Composition : 1994. Création le 5 février de restituer en moi la voix de Domi- Dans Cassation, un équipement pour 1995 par Dominique My, Radio France niqueTroncin,c’estcenom,Peud’son lanudité–un“nécessaireàsérénade” À la mémoire de Dominique Troncin que je l’entends prononcer au télé- – équivaut à l’attirail pour s’adapter Durée : 3’30 phone. Je ne voulais donc pas faillir, à la pénombre. Les musiciens du trio Version B pour ensemble avec harpe lui rendant hommage, à cette répu- jouent le plus souvent quasi chitarra instrumentée par Frédéric Pattar tation qu’il m’avait faite et qu’il dif- (avec ou sans plectre), ne prenant Création : le 10 avril 2007 à L’Allan – Scène fusait avec humour. l’archet (le plus souvent con legno) Nationale de Montbéliard, par L’Instant Pierre-AlbertJourdanterminesescar- que pour les dernières minutes de la Donné. nets, quelque temps avant de mou- musique. Le piano semble en travaux Effectif : flûte, hautbois, clarinette, piano, rir, par ces deux phrases : “Au fond, (bienquelamusiquecontinue).Lacla- percussion, harpe, trio à cordes on a beaucoup marché. Déjà heureux rinette, elle, fait souvent ce geste de (La version avec guitare a été créée de ne pas s’être perdu plus vite”. réparation, chassant par un souffle par l’Ensemble Cairn le 25 mars 2006, En 2006, pour un programme de trans- blanc les impuretés qui pourraient Festival Archipel, Genève) criptions réalisé à l’initiative de l’en- compromettre le chant. Même si le sembleCairn,FrédéricPattaraécritune chant, très embusqué, tarde en effet Cette pièce fait partie d’un ensemble version instrumentale de La lumière…, à venir. dedouzeœuvresquiavaientétéécrites impossible à faire, a priori, et pourtant en hommage au compositeur Domi- magistrale. Cette version me semble Traversée haptique, où l’avancée se nique Troncin, disparu à 33 ans en bien supérieure à l’originale. fait plus souvent à tâtons. Dans cette novembre1994.Parmiceshommages, sérénade-toccataoùlavérificationpar des créations de Gérard Grisey, Tris- Cassation le toucher est simultanée au lancer, tan Murail, Philippe Manoury, Betsy Composition : 2003. j’ai voulu évoquer la vivacité tactile Jolas,FrédéricDurieux,JacquesLenot. Commande de l’Etat et de l’ Ensemble comme art suprême de la perception “La lumière n’a pas de bras pour nous Accroche-Note tellequeDiderotledécrivaitchezMéla- porter” est un poème monostiche de Création le 10 octobre 2003, Strasbourg, nie de Salignac (la plus belle “aveugle Pierre-Albert Jourdan extrait des San- festival Musica par Accroche Note des Lumières”) dans son Addition à la dalesdepaille.Celivreétaitauchevet Effectif : trio à cordes, clarinette et piano Lettreauxaveugles.Unbrailleauditif, deDominiqueTroncin,ladernièrefois Dédicace : à Nicolas Monty non surtitré. quejesuisalléchezlui,rueSaint-Sébas- Durée : 16’30 tien. Il se trouve que je le lisais aussi Le geste instrumental prenant appui à ce moment, sans que nous nous en peut-on apprendre à être nu ? sur ses propres vides reconstruit une soyons parlé. La deuxième partie du il faut du matériel énergie en cherchant son équilibre livre est constituée par le journal de Dominique Fourcade parlavitesse,oudansl’empreinted’un la dernière année de Jourdan qui se sonrévoquéparlegestemême.Ceque savait condamné. Leterme“cassation”n’aguèreétéuti- Simon Hantaï a appelé la mutilation Cette page est un portrait croisé: le liséenmusiquequ’auXVIIIe siècledans qualifiante. Cependant, cette course son est mien, mais le caractère, qui le sens assez vague de divertimento. haletantedoitgarder,par-delàlesaut ne va pas sans paradoxe, est celui de Sonétymologieesttrèscontroversée. d’obstacles,lecaractèredesongenre Dominique Troncin, allègre et mysté- La cassation est souvent donnée d’origine, le divertimento, même s’il rieux, allant et contenu. comme sérénade des adieux ou mor- confine ici, souvent furioso, à la séré- Seules les touches blanches du piano ceau qui devait achever un moment nade-poursuite, par griffures, itéra- (leblancestcouleurdedeuilauJapon) demusique–venantencelapeut-être tions, effacements, retournement du sont sollicitées. Une harmonie d’ut du mot italien cassazione. Mais on le gestequivachercherlaconséquence flotte,accrochéeparfoisparlerefrain fait dériver aussi de l’expression alle- en son envers. danséprisdansunprestissimoméca- mande gassatim gehen, avec un sens Pasicideréminiscence,maiscequ’on nique, implacable. Le rythme à trois depromenadenocturneetamoureuse pourraitappelerleréférentauradoub temps (presque une valse d’adieu), (du mot Gasse : chemin, voie, ruelle). (unpremiertitredel’œuvreétaitWrack obsessif, est produit par le bruit des Lemot,etlegenrequiendécoule,com- – “épave” en allemand). ongles ou des doigts en glissando sur binentainsiladédicace,lanotiond’en- Il se trouve cependant que certains leclaviersansque,leplussouvent,les voi(aspectsérénade),maisaussil’idée éléments du matériau de Cassation marteaux soient activés. de promenade nocturne, de surprise croisent le beau thème-accord écrit

17 parWagneràl’époquedeTristanpuis chanson épique où la musique et la Branle du Poitou retouché à Palerme trente ans plus mélodie sont dissociées. La dernière, Composition : 1997. Commande de l’En- tard. C’est un fragment de quelques pôlefroid,estunechansonstrophique semble Fa pour son 10e anniversaire mesures, la dernière musique notée traversée du courant d’air dont parle Création : 23 novembre 1997, Maison de la par lui, sérénade immobile offerte à le poème. Radio, salle Olivier Messiaen par Cosimaaucoursdel’hiver1882(etuti- Les chansons sont souvent des l’Ensemble Fa, Dominique My (direction), liséeparViscontipourpendantlegéné- sagesses qui se fredonnent. Elles ont Jean-Pierre Collot (piano) rique de fin de son film Ludwig). en commun avec le fonds immémo- Effectif : piano, flûte, hautbois, clarinette, rial des fables, le rôle d’instruire et cor, violon, alto, violoncelle, contrebasse Cinq Chansons d’éclairer, qu’elles y parviennent par Durée : 7 ’ Sur des poèmes de Marie Redonnet le sourire ou l’effroi. Composition : 1999. Une phrase de Michau de l’Egouthail Commande du Théâtre du Châtelet (1492?–1547)m’avait“interpelé”com- Création le 2 janvier 2000, me on ne dit plus : “Bransle est deslié Théâtre du Châtelet par Katarina Karnéus et effroyable : il ne tient et ne regar- et l’ Ensemble Fa. de qu’a soy ny ne peult estre imité de Effectif : mezzo-soprano, flûte, clarinette, null’aultre chanson”. Il n’y a donc pas alto, violoncelle et piano de pastiche possible d’un branle (un Dédicace : à Malik Prince branle est un branle est un branle est Durée : 8’30 un branle...). Un branle est toujours brusquementd’aujourd’hui.Dansedé- Les Cinq Chansons ont été comman- licate et effrayante, au caractère à la dées par le Théâtre du Châtelet pour Instant tonné foispeudessinéetimpératif ;ellefleu- un concert traitant de folklore ima- (Licenza sur les touches blanches) re l’oxymoron. ginaireintemporel,detraditionrêvée Composition : 2006 Contrairementàcequ’onpourraitpen- ou réinventée – programme où figu- Création :23 février 2006, Théâtre L’Échan- ser, on la danse en groupe et c’est raient, entre autres, les Chansons geur,Bagnolet.L’EnsembleL’InstantDonné même une affaire de pieds (“pied en Madécasses de Ravel. Effectif : flûte, hautbois, clarinette (sib), l’air droict, pied en l’air gaulche, pied deux plaques de tonnerre, timbale, piano, largydroicte,greuegaulche,souspir”). La chanson est, par excellence, ratta- violon, alto, violoncelle Thoinot Arbeau (alias Jean Tabourot chée à une tradition supposée com- durée : 2’ des Accords (1520 – 1595) note, dans munequifaitdelaressouvenanceune sa fameuse Orchesographie de 1589, convention si appuyée qu’elle peut Instanttonnéestcequ’onappelaitau que “les Poictevines le découpent & facilementmimersonproprethéâtre XVIIIesiècleunelicenza–pièceenhom- en font un bruit gracieux de leurs sa- etdevenirépuredistancéedesapropre mage à un personnage, une fonction, bots”–sabotsternairesdanslebranle mémoire. C’est ce qui est mis en jeu ou un corps constitué (voir K. 36 et 70 du Poitou connu pour être le plus dans ces Cinq Chansons pour les- deMozart).L’EnsembleL’InstantDonné rustique. Le branle se danse en cercle quellesj’avaisdemandéàMarieRedon- est tout cela à la fois, et plus encore. ou en ligne. Il est rangé dans la caté- net d’écrire des textes originaux. Par plus vieille tradition, on invoque gorie des basses danses et se le tonnerre, se plaçant sous sa pro- caractérise par le pas de côté – celui À travers différents climats géogra- tection pour traverser joyeusement que l’on préfère. phiques et quelques « emplois » fémi- les orages à venir qui ne seront plus Une forme primitive du branle – la nins,lerecueilexploreplusieursformes alorsquedebeauxmomentstravaillés carole – a été recueillie par Jean- dugenre.Lapremièrechansonestune ensemble. Les bons nuages, ceux qui Jacques Rousseau – « J’avois pris mes complaintedesrues.Danslaseconde, recyclent les lacrimosa, ce sont les pantouflettes » – et publiée de façon rhapsodique, qui évoque une Afrique touches blanches. Elles permettent posthume (1781) dans le recueil où je sub-saharienne,lepiano,clavierfermé, dereprendreunbonvieuxlapouravan- l’ai trouvée : Consolation des misères l’alto et le violoncelle sont utilisés cer toujours en art & compagnie. de ma vie. comme des tambours de bois, le flû- CeBranleduPoitouestréutilisé,trans- tistenejouantqu’aveclatêtedel’ins- crit pour orchestre en 2006 , dans la trument. La troisième chanson (avec scène36,demonopéraPastorale.C’est piccolo)estunesorted’épigrammeoù alors Céladon (le berger créé par Ho- le strip-tease est la métaphore du noré d’Urfé) travesti en fille qui est dépouillement. La quatrième est une contraint de le danser sous les risées.

18 MauriceRavel/GérardPesson Alexandre Scriabine/ de quatre pièces pour piano de Scria- Transcriptions pour chœur Gérard Pesson bine couvrant ses manières Composition : 2005. Création le 31 août Transcriptions pour chœur successives. Elle s’est tournée vers 2005 à Salvador de Bahia (Brésil) par Mise en texte : Elena Andreyev ConstantinBalmont(1867–1942),chef Accentus, Laurence Equilbey (direction) Composition : 2004. Commande du Festi- du mouvement moscovite symbolis- Effectif : chœur mixte val de Noirlac et d’Accentus te. Il était un ami personnel de Durée : 8’ Création:10juillet2004àl’AbbayedeNoir- Scriabine qui lui a souvent lu ses pre- lac par Accentus, Laurence Equilbey miers essais de poème pour L’Acte Ronsard à son âme (direction) Préalable. 1924, sur un poème de Pierre de Ronsard Effectif : chœur mixte Afindemettrelatranscriptionaucœur commandedeRevueMusicale,àl’occasion Durée : 7’ de la transcription, Elena Andreyev a du numéro Ronsard et la musique choisi deux traductions en russe par Création : 26.04.1924, Londres Preuve par la neige* Balmont de poèmes anciens, grecs et 1. Si j’étais la lune japonais. Un autre poème de Balmont Shéhérazade pour voix et piano Tanka japonais de Minamoto no parle du Nom de Dieu, tellement sous- 1. La Flûte enchantée Tameyosi (XIe siècle), entendu dans la théurgie musicale de 2. L’Indifférent traduit en russe par Constantin Balmont. Scriabine. Terminant le cycle, un poè- 1903, poèmes de Tristan Klingsor Prélude opus 11, nº13. (1895). 2’30 me d’Ossip Mandelstam, génie 3. La Lune paraît fulgurant qui allait ouvrir à la poésie Sionpostulequ’uncompositeurn’est Poème de Sappho (VI – Ve siècle avant JC), russe des horizons radicalement nou- jamais né sous X., et s’il doit se décla- traduit en russe par Constantin Balmont. veaux,toutcommeledernierScriabine, rer un père, alors pour moi Maurice Feuillet d’album, opus 45, nº1. (1904). 1’20 visionnaire, annonçait les couleurs de Ravelseraitcepère(bienqu’ilsoittout 4. Ton image NicolasObouhovoud’OlivierMessiaen. sauf la figure du père – un frère plu- Poème d’Ossip Mandelstam (1912). Dans ces mélodies pour chœur, le tôt : frêle, mystérieux, pudique et Désir, opus 57, nº1. (1908). 2’15 temps, la lune, les pléiades, l’oiseau, grinçant). Maître en distance, en iro- l’abeille (qui annonce la mouche char- nie, en Orient rêvé, en ambiguïté, en Alexandre Scriabine a écrit la majeu- bonneusedontScriabineallaitmourir), enfantillages sublimés. re partie de son œuvre pour le piano, la nuit ou la neige, le nom de dieu re- Transcrire Ravel est donc acte sacré. mais, tout comme son grand autre, viennent et tournent, créant comme FrédéricChopin,iln’acesséd’appeler uneapesanteurduverbe,prochedece J’avais toujours pensé transcrire la lecantabile,d’écrirelechant,detendre tempshallucinéinventéparScriabine. plus pure page ravélienne, ces vers la parole (notamment dans ses quelquesmesuresquiportentsagrif- fameusesdidascaliesenflamméesqui *Le second élément de Preuve par la neige, Ver- be divin (sur un poème de Constantin Balmont, fe,parfaite,économe:mélodiesouple fontdesesœuvres,souventtrèsbrèves, (Etudeopus42,nº4,1903,deScriabine)n’apuêtre soutenue seulement par des quintes de petites dramaturgie incandes- intégré dans le programme de ce concert. à vide. C’est dans l’inspiration mélan- centes). À part quelques lignes pour colique du poète que Ravel est allé chœur dans Prométhée, ce que Scria- puiser : Ronsard à son âme. bineprojetaitpourlavoix(notamment L’OrientrêvédeRavelfaitaimerl’Orient dans son grand Mystère, L’Acte Préa- véritable avant qu’on le connaisse et lable) n’a pas été réalisé. La voix, le qu’on y vive : L’Indifférent, tiré du re- verbe,étaientpourluicommeunetan- cueil Shéhérazade. Texte ambigu, gentielle, un but sacré qui ne pouvait musique lascive, mais retenue. Autre se joindre à la musique qu’au bout énigme musicale. d’une quête, l’option la plus haute, Laurence Equilbey m’a demandé de dont ses recherches sur la couleur transcrire La Flûte enchantée, tiré du étaient comme le pôle visuel. même recueil, ce que je n’aurais ja- mais osé faire si elle n’avait insisté en C’estdoncnaturellementques’estim- me disant que c’était « très possible » posée à moi la nécessité d’entendre – ce sont ses mots. Il fallait traduire des mots sous cette musique qui, la nuit frémissante, pendant que le quoiqueabstraite,semblesouventles « maître dort ». appeler. Transcrire c’est cela : « être éveillé LamusicienneetpoèteElenaAndreyev encore pendant que le maître dort ». a réalisé la mise en texte de ce choix

19 Maurice Ravel Chants populaires couvert d’amadouer les harmonies, Trois Chansons Cinq pièces pour chœur mixte de fouetter les tempi et les rythmes, 1. Nicolette sur des poèmes de Philippe Beck sondent, détourent un impossible à 2. Trois beaux oiseaux du paradis 1. La force de l’homme est le point dire qui est au travail dans l’œuvre 3. Ronde 2. Il y a un temps du Pays de Philippe Beck. Texte : Maurice Ravel. 3. Des bêtes rajeunissent Composition : 1914/15 pour chœur mixte. dans la musique Création : 1917. Éditeur : Durand, Paris 4. Une peau est seule Durée : 8’ 5. Forêt de dureté Composition : 2008. Commande : Accen- Alors que la Première Guerre mondia- tus et Festival d’Automne à Paris le fait rage, Ravel s’astreint, dans ses Création : 3 novembre 2008, Théâtre des Trois chansons, à un pastiche littérai- Bouffes du Nord, par Accentus,Laurence re et musical, faisant appel à la veine Equilbey (direction) Soli pour musette et pour cors populairedescomptinesetdescontes, Dédicace : à Katell Herbert Composition : 2008 dontletempsseraitàl’abridudésastre. Durée : 12’ Commande : Festival d’Automne à Paris Enquatrestrophes–lestroisdernières Création : 3 novembre 2008 y sont autant de variations sur le thè- Les poèmes du livre de Philippe Beck, Durée : 4’ et 4’30 me du Loup, du beau Page et du riche Chantspopulaires,seprésententcom- Barbon –, Nicolette évoque le souve- medesdéductionsdecontesdesfrères Ces deux soli sont une amplification nirduChaperonrouge,surdesrythmes Grimm.Écrituresophistiquée,vibrante, d’éléments de Rubato ma glissando, réguliers et de sages harmonies. Les penséesur-intelligentequiinstallent, réaliséavecAnnetteMessageretcréé voixd’hommesentonnentbientôtdes à travers les paysages, les figures, les le25septembre2008àlaChapelledes onomatopées chromatiques intro- topoï de ces contes (forêts, animaux, Récollets à Paris. duisant l’inquiétude, avant que, dans princesses, châteaux, menaces, la dernière strophe, le Seigneur « laid, épreuves, sortilèges), un univers de Lamuse,oumusette,sontsynonymes puant et ventru », mais riche, soit tra- jeux maléfiques, de cruautés, de sua- en France de cornemuse. C’est tout duitenaccentuations,voixdefausset vitésinquiétantes.Lamusiqueesttrès naturellement que je suis allé à cet et dissonances. Dans Trois beaux oi- présente, comme figure, comme ciel, instrumentaprèsmesannéesde«ber- seauxdeParadis,balladedédiéeàPaul comme protagoniste, dans les geries » passées à écrire l’opéra Painlevé, alors président du Conseil, constructionsdePhilippeBeck,etc’est Pastorale d’après Honoré d’Urfé. Le quatre voix solistes se détachent unpontdécisifverslechant,lechœur sondelamusetteestévidemmenttrès du chœur. Sous la transparence mé- quia,luiaussi,seslégendes,sonthéâtre lié à son répertoire, qui s’éteint au lodique, précise, et l’harmonie de mémoire. XVIIIe siècle. La beauté de ce timbre, « impondérable »,gîtlaseuleallusion, de ses bourdons, de son grand et pe- dansl’œuvredeRavel,àlaguerre–une Ladifficultéd’écrirepourchœur–qui tit chalumeaux incitent à rêver allusion , mais distanciée, les plumes est tout dans la bien-sonnance im- l’instrument plus loin, bien que son cocardières,azur,neigeetvermeil,des médiate de la voix, dans ce filé pedigree résiste. oiselets.DédiéeàSophieClémenceau, onctueux, presque hypnotique, de l’a Le corniste Nicolas Chedmail, laRonde,pétulante,gorgéedejeuxde capella, dans le souffle domestiqué – ainsi que Philippe Bord et Olivier mots et d’ornements érudits, déploie est de réinterroger les séductions de Germain-Noureux, ont inventé une trois chœurs successifs, les vieilles, cet instrument et, pour ainsi dire, de «multiplication»del’instrumentqu’ils puis les vieux, les filles et les garçons le confronter aux stéréotypes de son ont appelé spat’ sonore – dispositif enfin.Autraversdetraditionsantiques, propre jeu. Ainsi la musique pourrait, qui mérite d’être connu. Il allie ingé- médiévales, sinon orientales, des fi- par ces Chants populaires, involuer niosité facétieuse et poésie ludique, gures diaboliques conjurent, en une vers ses sourires fondateurs, ses re- tient autant de l’installation que de allègreronde,d’abordcontrapuntique, frains,sesonomatopées,sesfanfares, l’attraction foraine. C’est une sorte puis martelée, le naufrage d’une civi- orphéons et cymbales, ses bourdons, d’orphéon de voyage que n’auraient lisation, en soumettant satyres, et même son pas de marche. pasdésavouélespoèteszutistes.Sans kobolds,etautresnécromans,comme Lamusiquereviendraitalorsàsescau- oser l’imaginer, j’avais rêvé de cet jadis Goya, aux images des horreurs chemarsd’enfance(onsongeauxTrois instrument résolument post-techno- de la guerre. Chansons de Ravel sur des textes re- logique qui fait du pavillon un levantduconte),àsespeursoriginelles, haut-parleur et de l’invention un re- Ce texte est de Laurent Feneyrou à sa mission consolatrice qui, sous cyclage.

20 Biographies l’Opéra de / Haute-Norman- aux projets d’Annette Messager, des interprètes die, Accentus est subventionné par notamment à la Documenta XI (2002), laVilledeParis,laRégionIledeFrance, à la Biennale de Venise (2005), et à la Accentus et est soutenu par la SACEM. rétrospectiveauCentreGeorgesPom- Fondé par Laurence Equilbey pour le Accentusestmembreduréseaueuro- pidou (2007) puis Helsinki, Seoul et répertoireacappellaetlacréationd’un péentenso.L’Ensemble estéquipéde Tokyo (2008). répertoirecontemporain,Accentusest diapasons électroniques “e-tuner” En parallèle, il poursuit son travail de un ensemble professionnel se pro- grâce au soutien de la Fondation maîtrised’œuvrespourdesprojetsde duisant dans les grandes salles de Orange. Le cercle des mécènes d’Ac- commandepubliques(ErnstCaramelle, concertetlesfestivalsinternationaux. centus accompagne son développe- Cirqued’Amiens)etdeproducteurdélé- L’ensemblecollaboreavec PierreBou- ment. Mécénat Musical Société gué(HubertDuprat,Vassivières2008). lez, , Christoph Eschen- Générale est le mécène principal bach, l’, l’Ensemble d’Accentus. Nicolas Chedmail intercontemporain, Concerto Köln, www.accentus.asso.fr Corniste,NicolasChedmailobtienten l’Akademie für Alte Musik. Il participe 2003lePrixdecormoderneauCNSMD à des productions lyriques, tant pour Elena Andreyev de Lyon dans la classe de M. Garcin- des créations, (Perelà, l’Homme de Violoncelliste, diplômée du conser- Marrou et intègre peu après la for- Fumée de Pascal Dusapin et L’Espace vatoireTchaïkovskideMoscouettitu- mation supérieure au métier DernierdeMatthiasPintscheràl’Opéra laire d’un premier prix au CNSM de d’orchestresurinstrumentsd’époque de Paris) que dans des ouvrages de ParisdanslaclassedeChristopheCoin, desAcadémiesmusicaldeSaintesqu’il répertoire (Le Barbier de Séville ElenaAndreyevpratiquelevioloncelle termine en Janvier 2006. Depuis Jan- de G. Rossini au Festival d’Aix-en- baroque et le violoncelle moderne. vier 2004, il participe aux projets de Provence). L’ensemble est un parte- Membre des Arts Florissants, elle se l’ensemble Philidor et aux concerts naireprivilégiédelaCitédelamusique. produit aussi en soliste et en forma- des ensembles spécialisés dans l’in- Ilpoursuitaussisarésidenceàl’Opéra tion de chambre. Elle a fondé en 2002 terprétationsurinstrumentsd’époque. de Rouen/ Haute Normandie. le Trio AnPaPié avec Alice Pierot et Curieux de toutes les musiques et Tous ses enregistrements discogra- Fanny Pacoud. Elle a participé à plu- improvisateur expérimenté, Nicolas phiquesobtiennentdesrécompenses sieurs réalisations de Georges Aper- invente en 2002 le “Spat”, instrument delapressemusicale(Transcriptions, ghis , (Sextuor, Commentaires, Entre issu de la famille des cuivres qui per- GrammyAwards,Disqued’Or,Schoen- Chien et Loup) , et à la création de met de spatialiser le son. Un collectif berg,MidemClassicalAward,Septder- l’opéra Forever Valley de Gérard Pes- de spatistes se constitue en 2003 : nières paroles du Christ en Croix, son ainsi qu ’à des projets du groupe Spat’sonore. Il crée en août 2005 un Diapason d’Or , Choc du Monde de la Wandelweiser de Berlin, de Giovanna Festival des bruits-Parc d’attractions Musique). En janvier 2008 est paru en Marini (La Bague magique) ou de Fred sonores dans la région de Guérande. DVDlepremierfilmd’Accentus,Trans- Frith (Landing, Setaccio). Dédicataire criptions, réalisé par Andy Sommer de pièces pour violoncelle seul (Aper- Caroline Delume et en mars 2008 celui du ghis, Pesson), elle vient d’en réaliser Diplômée en guitare et en analyse du de Dvorak. En novembre 2008 paraî- unenregistrementquiparaîtraen2009. CNSMD de Paris, Caroline Delume y tra l’enregistrement du Requiem de est professeur de lecture à vue ; elle Fauré. Accentus enregistre en exclu- Eric Caillou est aussi professeur de guitare de la sivité pour Naïve. Après une formation scientifique et Ville de Paris. Accentus reçoit en 1995 le prix Liliane technique, Eric Caillou travaille dans Elle joue un vaste répertoire sur Bettencourt décerné par l’Académie un premier temps pour le théâtre des instruments de différentes desBeaux-ArtspuisleGrandPrixRadio (décors et lumières) puis s’oriente en époques(guitares,théorbe),avecune Classique de la Découverte en 2001 1992 vers les arts plastiques, comme prédilectionpourlamusiquecontem- etaétéconsacréEnsembledel’année régisseur du Chateau d’ Oiron sous la poraine. Elle a notamment créé au par les Victoires de la Musique Clas- direction de Jean-Hubert Martin. En Festivald’AutomnedesœuvresdeGé- sique en 2002, en 2005 et en 2008. 1999,iltravailleàlaréalisationdupro- rard Pesson, Brice Pauset, Philippe Accentus est le premier utilisateur jetdeYanPei-MingauPanthéon.Dans Fénelon. Invitée pour des concerts et du diapason électronique e-tuner. le cadre de célébration de l’an 2000, il enregistrements par Les Jeunes So- AccentusestaidéparlaDirectionrégio- est le codirecteur technique de “La listes,l’EnsembleIntercontemporain, nale des affaires culturelles d’Ile-de- Beauté” à Avignon sous la direction Contrechamps, Le Concert spirituel, France, Ministère de la culture et de de Jean de Loisy. S.I.C. , elle a joué sous la direction de la communication. En résidence à Depuis 2001, il collabore étroitement , Peter Eötvös, Susanna

21 Mälkki,François-XavierRoth.Elledon- re de la Culture au titre de l’aide aux ciens en tant que régisseur plateau, nedesrécitalsenEurope,enAmérique ensemblesconventionnés,duConseil son ou lumière.Il rencontre Olivier Py latine et au Japon. Elle a enregistré Général de Seine-Saint-Denis, de la en1992etcollaboreàtroisdesesspec- L’art de la guitare contemporaine SPEDIDAM et de la SACEM. taclescommeassistantdePatriceTrot- (Arion), Multifonia 95 (L’Empreinte di- www.instantdonne.net tier. En 1995, il rencontre Laurent gitale). Gutmann et crée les lumières de tous Laurence Equilbey sesspectacles.Iltravailleensuiteavec Ensemble L’Instant Donné Après des études à Paris, Vienne, de nombreux chorégraphes et met- Elsa Balas, alto LondresetStockholm.LaurenceEquil- teurs en scène. En 2000 il participe à Nicolas Carpentier, violoncelle bey fonde, à 29 ans, Accentus en 1991. laréalisationd’uneinstallationdeLau- Caroline Cren, piano Onze ans plus tard, elle crée le Jeune rentP.BergeràlaVillaMédicisàRome Esther Davoust, harpe Chœur de Paris, département du et réalise les éclairages d’expositions Maxime Echardour, percussion Conservatoire National de Région de pour l’Assemblée Nationale, La Cité Saori Fukurawa, violon Paris. En 2004, elle initie avec Accen- desSciencesetdel’Industrie,LeGrand Cédric Jullion, flûtes tus le programme tenso réunissant Palais. À partir de 2007, il développe Philippe Régana, hautbois, cor anglais des ensembles vocaux européens sesprojetsd’installationslumineuses Mathieu Steffanus, clarinettes concernésparlarechercheetledéve- avec le soutien de Lelabo. L’Instant Donné se consacre à l’inter- loppementdel’artvocal.Enfin,en2007, prétation de la musique de chambre elleconçoitundiapasonélectronique, François Lazarevitch d’aujourd’hui.Enchoisissantunfonc- le e-tuner, permettant d’accéder à Joueur de flûtes et de cornemuses, tionnementcollégial,l’ensembletable l’aveugleàn’importequellenoteainsi FrançoisLazarevitchaétéforméaupès autant sur un état d’esprit que sur un qu’aux micro-intervalles. demaîtresdemusiqueancienneetde travail d’équipe qui privilégie les pro- Laurence Equilbey est souvent invi- musiquetraditionnelle;ilestdiplômé jets de musique de chambre non tée à diriger différents orchestres de plusieurs conservatoires (dont les dirigée . Chaque membre – neufs mu- (Orchestre de l’Opéra de Rouen, Sin- CNR et CNSM à Paris). En 2004, il a siciens et un coordinateur – participe foniaVarsovia,AkademiefüralteMusik, remporté le Premier Prix de trois aux décisions artistiques et organise OrchestraoftheageofEnlightenment, concours de cornemuses à Paris et les activités de l’ensemble. L’Instant l’OrchestreNationaldeLyon,Brussels Saint-Chartier. Donné travaille dans ses propres lo- Philharmonic, etc). En 2007/08, elle Avec son ensemble, Les Musiciens de caux à Aubervilliers. dirige les musiciens de l’Orchestre Saint-Julien, François Lazarevitch se Le répertoire s’étend des œuvres de National de France dans le Requiem produit dans des programmes de la fin du XIXe siècle à nos jours. La de Fauré (cd Naïve) et dans Dona eis musiquesanciennesoutraditionnelles programmation est consacrée aux de Dusapin. et réalise une série de disques, Mille compositeursaveclesquelsl’ensemble LaurenceEquilbeyestaussi présente ans de cornemuse en France (Alpha), collabore étroitement (Frédéric Pat- dans le répertoire lyrique (Ceneren- avec le soutien de Mécénat Musical tar, Gérard Pesson, Johannes Schöll- toladeRossini,MedeamaterialdeDusa- Société Générale. Sa polyvalence ins- horn, Stefano Gervasoni...). En 2008, pin, Les Tréteaux de Maître Pierre de trumentale lui permet de participer une collaboration s’est établie entre de Falla, Albert Herring de Britten à àdesprojetsvariés:répertoiremédié- l’ensembleetlaclassedecomposition l’OpéraComiqueetàl’OpéradeRouen val, Renaissance, baroque, classique du conservatoire de Hanovre. en 2009. Elle collabore avec Sandrine et romantique. S’y ajoutent les créa- Piau,SoniaWieder-Atherton,BorisBere- tionsd’œuvresdeGérardPesson,John L’Instant Donné se produit en France zovsky, Brigitte Engerer et Alain Pla- Tavener et Vincent Bouchot. dans des festivals ou des salles tels nès. Elle est artiste associée au Grand www.lesmusiciensdesaintjulien.fr que:Festivald’AutomneàParis,Amphi- Théâtred’AixenProvence.Elleestélue théâtredel’OpéraBastille,Auditorium PersonnalitéMusicaledel’année2000 Sylvain Lemêtre duMuséeduLouvre,CitédelaMusique, parleSyndicatprofessionneldelacri- Sylvain Lemêtre, percussionniste, a IRCAM–FestivalAgora,MUSICA(Stras- tique dramatique et musicale. Elle faitsesétudesauConservatoireNatio- bourg), Biennale Musiques en scène est Lauréate 2003 du Grand prix de la nal de Région de Rueil-Malmaison (Lyon)... et à l’étranger. Ses concerts presse musicale internationale. auprès de Gaston Sylvestre et Fran- sontrégulièrementenregistrésetdif- çoisBedeloùilobtientunpremierprix fusés par Radio-France. Gilles Gentner de percussion et un premier prix de L’ensemble reçoit le soutien de la Di- Gilles Gentner est né à Colmar, Haut- musique de chambre. Il étudie égale- rection Régionale des Affaires Rhin.En1985,ilcommenceàtravailler ment les percussions traditionnelles Culturelles d’Ile de France – Ministè- auprès d’organismes culturels alsa- mandingues et afro-cubaines avec

22 Christian Nicolas à l’Ecole Nationale Ivan Solano Lesbiographiesdesinterprètesci-des- de Musique d’Argenteuil, d’où il sor- Clarinettiste et compositeur, Ivan sous (programme des 5 et 21 octobre) tira avec un 1er prix. Sa pratique du Solano s’est formé à Madrid (Conser- figurent dans les publications consa- zarb iranien, liée à la découverte du vatoire national) et à Budapest (Aca- crées à ces concerts. théâtre musical, lui a été enseignée démie ) où il a obtenu les TeodoroAnzellotti,accordéon par François Bedel. Il a enseigné à diplômes supérieurs d’interprète et Irvine Arditti, violon l’Ecole des Arts de Marcoussis et au de professeur de clarinette avec des Makiko Goto, koto Conservatoire de Juvisy-sur-Orges. maîtres comme Ferenc Meizl, Béla JeroendenHerder,violoncelle Curieuxdetouslesrépertoires,ilprend Kovacs et György Kurtag. KyokoKawamura,koto/chant part à de nombreuses créations de Il enrichit à présent cette formation Brad Lubman, direction spectacles et de concerts, en collabo- en France : il a réalisé une maîtrise en OrchestreSymphoniqueWDR ration avec les compositeurs. Il a pris musicologie, la formation doctorale Nieuw Ensemble la direction musicale de la pièce (D.E.A.) d’Horacio Vaggione à l’Uni- Harrie Starreveld, flûte « Meurtre de la Princesse Juive » de versitéParisVIII.Ilparticipeàde nom- Yoichi Sugiyama, direction ArmandoLlamas,miseenscènedePhi- breuses manifestations autour de la lippe Adrien, ainsi que la création et recherche instrumentale et de l’in- lacompositionde« CimesetRacines » teraction informatique, instrument pour la Compagnie Déviation. en temps réel. www.ivansolano.com Melody Louledjian Néeen1982,MélodyLouledjian,après Quatuor Diotima Journal de Gérard Pesson. un Premier Prix de piano au Conser- Naaman Sluchin, Yun-Peng Zhao, violon Cran d’arrêt du beau temps vatoire de Nice, entre au Conserva- Franck Chevalier, alto Van Dieren Editeur, Paris. 2004 www.vandieren.com toireNationalSupérieur deLyondans Pierre Morlet, violoncelle la classe de chant de Françoise Pol- Lenomduquatuorrendhommageau let,puisseperfectionneauprèsd’Edith quatuor de Luigi Nono, Fragmente CD. Cinq œuvres de Gérard Pesson Mathis à Vienne. Parallèlement à un Stille,anDiotima,affirmantainsil’en- Aggravations et final, Wunderblock, cursuslyrique,MélodyLouledjiancom- gagement des quatre musiciens en Vexierbilder II, Cassation, Rescousse. mence sa carrière dans le répertoire faveur de la musique de notre temps, Orchestre de la Radio de Cologne, WDR contemporain. Elle crée et interprète qu’ils souhaitent présenter dans le Ensemble Modern les œuvres de Yves Prin, Gérard contexte du répertoire classique et Æon. Novembre 2008. Pesson,JohannesSchöllhorn,Stefano romantique du quatuor à cordes. Gérard Pesson sur France Musique, Gervasoni...Elleparticipeauxconcerts Depuis sa création, Diotima s’est pro- tous les dimanches à minuit : des ensembles Contrechamps duit sur la scène internationale dans “Boudoir & autres” (Genève), L’Instant Donné (Paris), de nombreux festivals et salles de Assonances, (Paris), Tippett (Dublin). concerts. En 2007, Diotima est en rési- InvitéeàlaRadioSuisseRomandepar dence à la Casa da Música de Porto, l’ensemble Contrechamps, elle inter- donnant des cours de musique de prèteennovembredernier,enretrans- chambre, collaborant avec des étu- mission directe, les Kafka-Fragmente diants en composition sous forme de György Kurtag. d’ateliers, et offrant un panorama de lamusiquedu18e ànosjours.En2008, Viviana Mendez Moya lequatuor participe auxfestivalsEclat Artistechilienne,VivianaMendezMoya de Stuttgart, d’Aix-en-Provence, a créé et dirigé des ateliers d’art-thé- d’Athènes, de Strasbourg, ainsi qu’au rapie, de théâtre et de poésie. Elle a Queen’s Hall d’Edimbourg. participé à la production de festivals LeurCD,ReigenseligerGeisterdeHel- de cinéma et régulièrement, se voit mut Lachenmann couplé avec Frag- confiéelaconceptiongraphiqued’ou- mente-Stille,anDiotimadeLuigiNono, Président: Pierre Richard vrages de poésie ainsi que la réalisa- a reçu le ‘Coup de coeur’ de l’Acadé- Directeur général : Alain Crombecque tiondecostumespourdescompagnies mie Charles Cros ainsi qu’un “Diapa- Directrice artistique théâtre et danse : Marie Collin de danse contemporaine. son découverte”. Alpha a publié en Directrice artistique musique : 2008lesenregistrementsdesquatuors Joséphine Markovits de Durosoir et de Janacek. www.festival-automne.com

23 © Marie-Noëlle Robert, Richard Overstreet, Philippe Zamora, Michel Labelle, Getty.

Depuis 1987, Mécénat Musical Société Générale développe une politique de soutien, en constante évolution, qui répond aux besoins actuels des acteurs de la musique classique et qui s’organise selon quatre domaines d'intervention : Jeunes Musique de chambre Création, musique du XXe siècle et d’aujourd’hui Promotion et diffusion. www.socgen.com/mecenat-musical

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