La victoire du rail

LES PIONNIERS

Dès le début du XIX• siècle l'usage du chemin rées. Il fallut les instances des pouvoirs publics de fer a été introduit dans l'industrie wallonne pour qu'il acceptât de reporter son projet à des pour assurer les transports intérieurs dans les temps plus propices. En janvier 1831, son entreprises. Prenant exemple sur l'Angleterre, chemin de fer était mis en service tandis qu'un certains exploitants avaient fait placer des corps armé de 230 hommes et une compagnie rails en fer au fond de leur charbonnage, sur d'artillerie de 30 hommes et 6 canons en lesquels des wagonnets chargés de houille assuraient la défense. Quatre ans plus tard la étaient traînés à main d'homme. Cette mé­ traction par locomotive se substituait à celle thode réduisait considérablement la main­ par chevaux. d'œuvre affectée à ce transport et elle fut Malgré ses déboires, l'expérience du Grand également utilisée dès 1804 dans la fonderie Hornu suscite des imitations. En 1833 des de canons à Liège et aux ateliers de Seraing à négociants de la région de obtiennent la partir de 1819. C'est à Degorge-Legrand que concession d'un chemin de fer pour le trans­ revint l'initiative de recourir au chemin de fer port du charbon des charbonnages du Haut et pour assurer le service extérieur de son char­ du Bas Flénu à Jemappes. Cette fois encore le bonnage du Grand Hornu. La nouvelle voie convoi d'inauguration est salué par les huées fut mise en activité en août 1830 à une époque des ouvriers. Lourdement endettés envers la où Je coût de la vie s'était élevé et le salaire des Société Générale, les fondateurs se voient mineurs borains avait subi des réductions obligés d'accepter en 1836 la transformation dues à la baisse des prix du charbon depuis de leur société en une société anonyme, la S.A. 1825. De 160, le nombre de chevaux utilisés du Chemin de Fer du Haut et du Bas Flénu. passait à 24. Aussi cette innovation fut-elle Celle-ci se livre immédiatement à de nouveaux très mal accueillie par la population qui re­ travaux. En effet, la mortalité est élevée parmi doutait toute mesure susceptible d'amener un les 241 chevaux loués puis achetés pour assu­ manque de travail. Excités par les charretiers rer la traction. De nouveaux aménagements de Jemappes, furieux de perdre leur gagne­ s'avèrent cependant indispensables pour faire pain, de nombreux mineurs venus des com­ circuler des locomotives dont les pr:emières munes des environs détruisirent le chemin de sont mises en service en 1837. fer le 20 octobre 1830 et se livrèrent au pillage Maîtresses d'une part importante de l'ex­ des ateliers, des magasins, des bureaux et des traction houillère dans le Hainaut, la So­ habitations de Degorge et son receveur. ciété Générale et ses filiales tentent à cette L'industriel ne trouva son salut qu'en se réfu­ époque de prendre le contrôle du transport giant dans son pigeonnier. Le lendemain de la houille. Non contentes de réaliser Charles Rogier, membre du gouvernement l'acheminement des produits par les voies na­ provisoire, se rendait sur les lieux. Cette visite vigables, en particulier par la ligne de la Sam­ impressionna-t-elle les ouvriers? Toujours bre, elles projettent la construction du chemin est-il que nombre d'entre eux restituèrent de fer de visant à détourner au· les objets volés. profit de la Sambre le transport du charbon du Cette émeute n'entama en rien l'esprit entre­ Couchant de Mons par le canal de Mons à prenant de Degorge. Dix jours plus tard, il Condé. Ce projet doit être abandonné à cause commençait à remplacer les ornières détério- de l'opposition de plusieurs instances admi-

75 nistratives et ne sera repris qu'en 1853. Par l'établissement d'un chemin de fer d'Anvers à contre dès 1840, le chemifi.de fer industriel de la frontière prussienne par Malines, Louvain, Saint-Ghislain d'une longueur de 11 km relie Liège et Verviers. Les arguments avancés en au canal de Mons les houillères du sud et du faveur de la construction par l'État étaient à la sud-ouest du bassin. fois d'ordre politique et économique. Indé­ Dans le Centre, le développement de l'ex­ pendamment de sa valeur commerciale l'en­ ploitation charbonnière a accru le besoin treprise servirait de ciment à l'unité natio­ de moyens de transport à bon marché. Lors­ nale; elle ne pouvait donc être confiée à qu'il fut question en 1824 d'un projet de ca­ l'intérêt privé ni courir le risque d'un échec. nal de Charleroi à Bruxelles, les exploitants Comme il s'agissait d'une voie de transit à bon de la région réclamèrent un embranchement marché, les tarifs devaient pouvoir être facile­ pour desservir leurs charbonnages. En 1832 ment modifiés en vue de favoriser le commerce seulement un projet de réseau de canaux avec les pays voisins, ce qui n'était guère combiné à deux voies ferrées reliant le Centre compatible avec le régime des concessions. Le au canal de Charleroi fut déposé. Le conces­ danger de voir le chemin de fer tomber en sionnaire du canal de Charleroi en devint mains étrangères en particulier dans celles des adjudicataire. Les travaux commencés en capitalistes orangistes jouait de manière déci­ avril 1836 durèrent trois ans. La voie ferrée sive dans l'initiative de Rogier. composée de deux branches qui se ra­ Soumis à l'examen de divers organes représen­ mifiaient chacune aux abords des différents tant les intérêts économiques du pays, le pro­ charbonnages pouvait porter des wagons de jet ne rallia pas tous les suffrages, loin de là. deux tonneaux de houille traînés par des Alors que les exploitants des charbonnages chevaux; les ouvrages d'art avaient néan­ liégeois et les industriels de Verviers l'ac­ moins été construits en prévision du passage cueillaient favorablement, dans le Hainaut futur de locomotives. il rencontra une vigoureuse opposition, en En résumé le développement de chemins de fer particulier à Charleroi et à Mons. La Cham­ industriels dans le Hainaut au début de bre de Commerce de Charleroi, la plus hostile, l'indépendance est lié au besoin de raccorder rejetait l'intervention de l'État pour trois rai­ par des moyens de transport plus efficaces les sons. À ses yeux le véritable but du projet gisements houillers aux voies navigables, qui visait à protéger et à favoriser les charbonna­ assurent à cette époque l'essentiel du trafic ges liégeois en faisant supporter la charge par intérieur et extérieur de la houille. l'ensemble des citoyens. D'autre part, si l'État entreprenait lui-même la construction, cha­ que localité se croirait en droit de réclamer un embranchement et la multiplication des re­ L'INTERVENTION DE L'ÉTAT vendications rendrait impossible l'exécution du projet. Enfin et c'était là un argument Si la Belgique s'est distinguée des autres pays avancé également par la Chambre de Com­ d'Europe en adoptant la première le principe merce de Mons, en matière de travaux publics, de la construction d'un réseau ferré par l'État, il y a lieu de se conformer au principe selon force nous est de reconnaître que cette déci­ lequel le commerce qui fait usage d'une com­ sion fut le fruit de longs débats. munication nouvelle doit la payer; si le chemin L'incertitude régnait alors sur les modalités de de fer est vraiment utile, qu'on laisse agir les l'exécution du chemin de fer. Fallait-il le intérêts particuliers. À , la Chambre confier à l'initiative privée? L'État devait-il en de Commerce s'exprimait de façon plus nuan­ assumer la responsabilité? Le 19 juin 1833, cée. Hostile au monopole de l'État elle propo­ Charles Rogier déposait un projet de loi auto­ sait l'exécution et l'exploitation de la ligne par risant un emprunt de l'État affecté à une société anonyme ouverte à tous mais à

76 laquelle l'État imposerait le maintien de tarifs 5 mai 1835, on célèbre solennellement son modérés. inauguration. Pour des raisons économiques et Influencée par la diversité des prises de posi­ techniques, le réseau se développe d'abord en tion, la section centrale de la Chambre pro­ basse et moyenne Belgique. En 1838, le chemin posa de donner une ampleur plus grande au de fer de l'État pénètre pour la première fois projet en créant les bases d'un système de en Wallonie par la construction du tronçon chemins de fer , autrement dit un réseau. Dans Tirlemont-Waremme-Ans long de 46 km. Il les débats passionnés qui se déroulèrent pen­ faudra attendre quatre ans pour que Liège soit dant 17 séances à la Chambre, l'opposition atteinte. Un obstacle technique majeur pro­ énergique des intérêts hennuyers fut orches­ longe les délais: la réalisation du plan incliné trée et représentée par sur le versant de la Meuse d'Ans à Liège dont dont la famille exerçait une influence notable la hauteur totale est de 110 mètres. Dans le dans les milieux industriels de Charleroi. Fina­ Hainaut, la première voie ferrée construite par lement à force d'amendements et de discus­ l'État est ouverte à l'exploitation en 1840 sur sions il fut décidé de créer un système de le tronçon Bruxelles-Tuoize . La frontière chemins de fer ayant pour point central Mali­ française sera atteinte deux ans plus tard, celle nes et composé de quatre branches se diri­ de l'Allemagne en 1843. Le 15 octobre 1843, geant à l'est vers la frontière prussienne, au c'est l'inauguration triomphale de toute la nord vers Anvers, à l'ouest vers Ostende et au ligne d'Anvers à Cologne. À la fin de cette sud vers Bruxelles et la frontière française. Le année le Gouvernement a réalisé entièrement vote des Chambres aboutit à la promulgation son programme. de la loi du 1er mai 1834 qui fut immédiate­ Sur les 559 km construits par ses soins, environ ment mise à exécution. la moitié sillonne la Wallonie, mais ne dessert La présence de Wallons au Gouvernement que trois provinces: Liège, Namur et le Hai­ n'influence nullement le déroulement de la naut. Une fois encore l'Ardenne est la parente construction du réseau. Confirmant le carac­ pauvre dans le développement des moyens de tère national de l'entreprise, celle-ci commen­ communication. Non pas qu'on l'ait oubliée. ça par ce qui dans la pensée des promoteurs Une loi du 26 mai 1837 avait prévu la cons­ devait être un complément du projet, le tron­ truction aux frais de l'État d'une ligne de çon Malines-Bruxelles. Un an plus tard, le Gand à la frontière française et à Tournai via

PAGE DE TITRE DE L' 'ATLAS PITTORES-

\l!'iE SOTif.f IIISTORIQUE ET SHTISTIQUE SUR u:s CIIEIUNS IlE FER, Al ;'iS l QUE U , DESCRII'TIOS DE TOUS LES LIEUX QU'ILS TII.AVEII.SENT, SOUS u: IU.I'PO~T IlE LA GtOGilAPIIIE PHYS IQUE ET POLITIQUE, DE L'lt!STOIRE, llf. LA S'fATISTJQUE, DU COM!JIERCf., DE L'INDUSTRIE, ETC .

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BRUXELLES. Ji TAUUSSDIE~T GLOGR.lPDIQUE DE PO. VANDER:tU.ELEN.

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-·--77 -4' TRONÇON DE LIÈGE À VERVrERS DE LA SECTION DU CHEMIN DE FER RELIANT ANS À LA FRONTIÈRE PRUSSIENNE, inaugurée jus­ qu 'à Verviers, le 17 juillet 1843. D'après Alphonse Wauters, 'Atlas pittoresque des chemins de fer de la Belgique ', troisième édition, Bruxelles, 1844, avant­ dernière planche.

Courtrai et une liaison ferroviaire entre le contre la région wallonne assure de loin le réseau décidé en 1834 et la ville de Namur trafic de marchandises le plus considérable. En ainsi que les provinces du Limbourg et de 1844 sur les dix stations les plus importantes Luxembourg. Or dans le nord du Luxem­ pour les expéditions de marchandises, toutes bourg l'opinion publique, soutenue par les à l'exception d'Anvers et de Louvain sont si­ industriels liégeois, manifestait sa préférence tuées en Wallonie. Liège vient en tête avec pour le creusement du canal de la Meuse à la 89 442 tonnes de grosses marchandises suivie Moselle, commencé en 1827 par une société d'Anvers avec 61026 tonnes. Pour un tonnage hollandaise mais qui était à peine entamé. Le total de 342 615 tonnes, 44 % des expéditions Gouvernement prenant prétexte des divisions se font au départ de stations de la province des Luxembourgeois, s'abstint de toute inter­ de Liège con.tre 30 % au départ de celles du vention, arguant même de l'impossibilité de Hainaut. Sur le plan politique et stratégique, construire un chemin de fer dans une région l'indépendance de la Belgique n'est plus mise aussi accidentée. À titre compensatoire, il en question tandis que l'essor économique alloua au Luxembourg un crédit de deux libère des êapitaux disponibles pour de nou­ millions de francs pour le développementde veaux investissements. Au Parlement lors des son réseau routier. débats sur les emprunts ferroviaires en 1840 Au terme de ces neuf années de construction et 1842, un courant majoritaire se dessine en du réseau par l'État, celui-ci s'est assuré faveur des concessions aux sociétés privées. l'exploitation des grandes artères; il touche les Le retournement de l'opinion s'explique par di­ principaux centres urbains du pays, domine verses raisons. Construits dans un esprit de les principales voies de transit et contrôle par stricte économie, les chemins de fer exigent des conséquent l'essentiel du trafic intérieur et réparations et des dépenses d'entretien dont le international. À cette époque le produit du coût paraît excessif, car l'exploitation est dé­ chemin de fer s'élève à plus de 11 millions de ficitaire et le restera après l'ouverture de francs par an. Le parcours des convois est l'Anvers-Cologne en octobre 1843. Le relève­ effectué à raison de 66 % par les voyageurs et ment des tarifs qu'on avait voulu éviter ap­ de 34 % par les marchandises. Si les stations paraît comme le seul moyen d'éponger les per­ des villes wallonnes ne comptent guère dans tes. On reproche d'autre part au Gouverne­ le trafic des voyageurs (Liège figure au cin­ ment de favoriser les usines Cockerill au détri­ quième rang et Mons au dixième rang des sta­ ment des autres entreprises métallurgiques. tions les plus importantes de Belgique) par Enfin d'aucuns estiment que l'intervention de

78 l'État peut nuire à l'économie dans la mesure Borinage. Tributaires de la navigabilité de où elle accélère soudainement la demande la Meuse, les métallurgistes d'Ougrée et de Se­ dans J'industrie lourde grâce à la facilité avec raing désirent améliorer le transport de leurs laquelle l'État réunit les capitaux pour les produits vers la région de Namur et de Char­ chemins de fer, mais cette intervention provo­ leroi comme vers le nord-est de la . que un arrêt d'autant plus brutal en fin de Aussi se montrent-ils vivement partisans de­ programme. puis 1836 de la construction d'une ligne de Sous la pression de ces changements le Gou­ Namur à Liège. vernement décide de laisser désormais à De leur côté les exploitants de houillères du l'initiative privée le soin de poursuivre et bassin de Charleroi, estimant que le réseau de de compléter la réalisation du réseau. l'État ne favorise guère leurs communications avec le sud du pays, réclament depuis plu­ sieurs années la construction de lignes dans J'Entre-Sambre-et-Meuse avec accès au nord LA PÉRIODE DES CONCESSIONS de la France. Pour les exploitants des bassins houillers du Jusqu'en 1840, la loi du 19 juillet 1832 qui Centre, l'achèvement du réseau de l'État a conférait au Gouvernement le· droit de bassins hennuyers. En effet, après la mise concéder des péages n'avait guère reçu rompu l'équilibre entre les facilités d'éva­ d'application en matière ferroviaire. Six voies cuation des produits charbonniers des trois ferrées exclusivement destinées au transport en service des lignes Bruxelles-Mons ( 1842) et des produits de grandes exploitations char­ Braine-le-Comte à Namur via Manage et bonnières ou industrielles avaient été données Charleroi (1843), les charbonnages du Bori­ en concession, nous y avons fait allusion précé­ nage et de Charleroi ayant accès à un point de demment. En avril 1843, Adolphe Dechamps, chargement situé sur ces nouvelles lignes ancien gouverneur du Luxembourg et repré­ bénéficient de transports pl~s rapides et moins sentant d'Ath devient ministre des Travaux chers. De longue date le Centre réclamait une Publics. Sous son ministère l'histoire des che­ liaison avec Mons desservant les gisements de mins de fer belges entre dans la période des la région afin d'acheminer plus aisément la concessions. Soucieux de promouvoir le ca­ houille vers le canal de Mons à Condé. Lors­ ractère international du chemin de fer, il ap­ que Dechamps dépose un projet de ligne de prouve également le premier tarif internatio­ Mons à Manage avec embranchement vers les nal, le tarif belgo-rhénan. charbonnages de la région de Haine-Saint­ Deux phases marquent l'ère des concessions: Pierre, de vives polémiques s'engagent dans la la période anglaise, qui commence en 1845, à presse. S'estimant lésés par l'établissement de laquelle succédera la période belge à partir de cette nouvelle ligne, les exploitants du Cou­ 1852. chant de Mons et de Charleroi attaquent avec Stimulés par la réussite des compagnies ferro­ virulence le projet. Leurs organes n'hésitent viaires en Angleterre, des capitalistes anglais pas à mettre Dechamps directement en cause débarquèrent sur le continent avec l'espoir de en l'accusant de défendre les intérêts de son réaliser de substantiels profits en exploitant les père, administrateur du charbonnage de Sart­ chemins de fer belges. Leur arrivée répondait Longchamp. aux besoins éprouvés par les milieux indus­ Enfin au Luxembourg, Victor Tesch, avocat triels de Wallonie d'améliorer les voies de et homme politique libéral, fondateur dujour­ communication pour J'acheminement des ma­ nall'Echo du Luxembourg et propriétaire de tières premières et de la production. Besoins terrains miniers dans la région de Differdange parfois contradictoires selon qu'on se trouve fait campagne depuis des années en faveur à Liège, à Charleroi, dans le Centre ou le d'un chemin de fer de Bruxelles à Arlon.

79 Dans ce climat de fièvre des chemins de fer, le lui avait valus au début l'idée propagée en Gouvernement accorde en 1845 et en 1846 Angleterre que la ligne Bruxelles-Arlon faisait neuf concession~ couvrant 855 km à des com­ partie du chemin de Londres vers les Indes via pagnies anglaises. Sept d'entre elles ont pour Trieste, avait succédé une période de profond objet la construction de lignes dans le sud du découragement. Les difficultés techniques pays, soit 600 km environ. Les principales sont dues au relief accidenté de l'Ardenne, le Chemin de Fer de l'Entre-Sambre-et-Meuse l'épuisement des ressources avaient incité la (1 05 km), la S.A. des Chemins de fer de Namur compagnie à chercher à réaliser ses engage­ à Liège et de Mons à Manage (1 07 km) et ments en intentant un procès à l'État, procès la Grande Compagnie du Luxembourg qu'elle perdit devant la cour d'appel. L'aide (232 km). accordée par l'État ne suffit pas à redresser la De toutes ces concessions, une seule fut exé­ situation. L'incertitude régnait encore quant à cutée dans les délais prévus par les contrats, la l'établissement du tracé, les actionnaires pri­ ligne de Tournai à Jurbise achevée en 1849 et vés de dividendes menaçaient de se retirer, dont l'exploitation fut remise à l'État. plusieurs administrateurs furent poursuivis et Quant aux autres compagnies, la précipitation condamnés par les tribunaux pour avoir com­ avec laquelle elles s'étaient engagées, aggravée mis des irrégularités de gestion et s'être enga­ par la crise économique et les événements gés dans des spéculations douteuses sur les politiques de 1848, ne leur permit pas de actions de la Compagnie. Le 10 mars 1855, la construire les lignes dans les conditions fixées Compagnie se donnait un nouveau conseil. par les contrats. Victor Tesch y entrait avec le titre de président À bout de ressources, elles demandent l'aide du comité local. Sous sa poigne énergique les du Gouvernement belge. Indépendamment travaux reprirent activement et en 1858 la des prorogations de délai, celui-ci intervient en ligne Bruxelles-Arlon était ouverte à l'ex­ leur faveur et par une loi du 20 décembre 1851, ploitation. Au cours des deux années sui­ il les exonère de certains engagements et ac­ vantes les frontières grand-ducale et française c.orde l(l garantie d'un minimum d'intérêt étaient atteintes, faisant du Grand Luxem­ pour quelques lignes secondaires ou de nou­ bourg une ligne internationale. velles lignes présentant peu d'avenir afin de les Les déboires des compagnies anglaises de mettre à même de réaliser plus facilement les même que le coût très élevé de la construction emprunts destinés à en financer l'achèvement et le faible rendement initial de l'exploitation ou la construction. avaient définitivement découragé nos voi­ Tandis que la plupart des compagnies anglai­ sins d'Outre-Manche. Non seulement ils ses achevaient péniblement la construction de s'abstinrent de demander des concessions leurs lignes ou l'abandonnaient à des tiers au nouvelles mais encore chercheront-ils à se début des années cinquante, la Grande Com­ débarrasser des lignes qu'ils avaient construi­ pagnie du Luxembourg connaissait de nom­ tes. De 1846 à 1852, aucune concession de breuses vicissitudes. Outre la ligne Bruxelles­ chemin de fer pour le transport des voyageurs Arlon, sa concession comportait son prolon­ ne fut accordée. C'est en 1852 que les premiers gement jusqu'aux frontières française et chemins de fer sont concédés à des compagnies grand-ducale, vers Longwy et Luxembourg, belges et que le réseau ferré entre dans une et la construction de deux embranchements, phase de développement anarchique. Désor­ l'un vers l'Ourthe, l'autre vers Bastogne. En mais l'État concède les lignes qui lui sont outre' la Compagnie était chargée de la canali­ demandées lorsque les moyens d'exécution sation de l'Ourthe, de Liège à La Roche, et paraissent exister, tout en se réservant d'ac­ jouissait du droit de recherche et d'ex­ corder ou de construire lui-même une li­ ploitation de mines et de carrières dans le gne concurrente. Les doubles voire les triples Luxembourg. Aux succès de souscription que emplois ne manquent pas. À la fin de 1865, les

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SOCIÉTÉ ANONYME DES MINES ET FONDERIES DE ZINC DE LA VIEILLE-MONT AGNE À ANGLEUR. Lithographie d 'Ed. Toovey, d'après un dessin du même, imprimée par Simonau et Toovey, publiée dans 'Belgique In ­ dustrielle. Vues des établissements industriels de la Belgique', Bruxelles, J. Géru­ zet, 2• série, (1854 ) , planche 150 (Bruxelles , Bibliothèque Royale Albert r', Imprimés) . LA GARE DE TOURNAI. LA SALLE DES PAS PERDUS À LA FIN DU XIX < SIÈCLE. D'après 'L 'Illustration Nationale des Fêtes et Cérémonies du Cinquantième Anniversaire de l'indépendance de la \ . Belgique', N° 2, Janvier 1880, première page. VICTOR TESCH (Messancy 1813-1892). Avocat et journaliste, Victor Tesch ~ se lança dans une brillante carrière industrielle en prenant en main la construction du chemin de fer du Grand Luxembourg. Ministre de la Justice dans le grand cabi­ net libéral de 1857 à 1870, il abandonna sa carrière ministérielle en 1865 pour se consacrer aux affaires. Directeur de la Société Générale en 1868, il en devint le gouverneur dix ans plus tard et le resta jusqu'à sa mort en 1892. De 1848 à 1892, il siégea à la Chambre en qualité de représentant libéra( de l'arrondissement d'Arlon. D'après une photographie ( Arlon, Archives de l'Etat) .

81 chemins de fer belges parcourent 2395 km alors que l'État belge faisait aboutir son ré­ dont 559 km ont été construits par l'État; 1589 seau à la frontière française, le gouvernement km sont en construction ou à construire dont français accorda en septembre 1845 à la Com­ 179 par l'État. Mais ce réseau est morcelé en pagnie des Chemins de Fer du Nord patronnée 47 concessions dont 32 sont exploitées en tout par James de Rothschild la ligne de à. la ou en partie, quelques-unes ayant été regrou­ frontière belge. Dès le début du second Empi­ pées en une seule exploitation. Dans la région re qui se révèle particulièrement faste pour les wallonne, les petites lignes de chemins de fer se compagnies ferroviaires, la Compagnie du multiplient dans la zone des bassins hennuyers Nord, soucieuse de compléter son réseau en de même qu'à l'ouest de la province de Na­ prenant le contrôle des importations de houil­ mur, région qui sépare Charleroi du nord de le belge en France, profite des embarras la France. Mais les capitalistes belges ne sont financiers de deux compagnies anglaises pour pas seuls à s'intéresser aux chemins de feL reprendre leur concession. En 1853, pour Alliée aux Rothschild pour la réalisation des éviter des discussions qu'un rachat soulèverait canaux de la Sambre, la Société Générale au Parlement belge elle prend en location la s'était préoccupée dès 1835 de la construction ligne Charleroi-Erquelinnes. L'année suivante d'un chemin de fer de Bruxelles à Paris en vue la S.A. des Chemins de Fer Namur-Liège et de trouver de nouveaux débouchés pour son de Mons à Manage lui cède l'exploitation de la industrie sidérurgique. La concurrence de section Namur-Liège ouverte au trafic depuis Cockerill de même que l'échec de ses négocia­ deux ans. Lorsqu'en 1856 la compagnie an­ tions avec le Gouvernement français et les glaise conclut avec le Nord un contrat pour la Rothschild lui firent renoncer à ce projet. cession du chemin de fer de Mons à Manage, Après plusieurs années d'atermoiements, elle se heurte au refus formel du Gouverne-

CHEMIN DE FER MONS À MANAGE, STATION DE LA LOUVIÈRE. Dessin et lithographie de Cane/le, imprimée par Simonau et Toovey, publiée dans 'Belgique Industrielle. Vue des établissements industriels de la Belgique', Bruxelles, J. Géruzet, 2e série, (1 854), planche 130 (Bruxelles, Bibliothèque Royale Albert 1"', Imprimés) . ment belge. Trois raisons d'ordre à la fois Parlement à propos de l'exploitation des che­ politique et économique motivaient ce refus. mins de fer par l'État, des relations de ce En premier lieu le Gouvernement voulait em­ dernier avec les compagnies et l'établissement pêcher une extension excessive du réseau des tarifs. L'enchevêtrement des lignes, la d'une puissante compagnie étrangère. D'autre concurrence acharnée entre les exploitations part il devait éviter la possibilité de fusion ou firent prendre conscience de la nécessité de de coalition de sociétés concessionnaires sus­ regrouper les concessions en réseaux à la fois ceptibles de contrôler une ligne concurrente de plus compétitifs et plus rentables. C'est au la ligne Bruxelles-Mons par Nivelles. Enfin la cours des années soixante que ce mouvement ligne, qui était enclavée dans le réseau de s'amorça. l'État, produisait de bons résultats. Pour dé­ dommager la Compagnie, le Gouvernement obtient du Parlement l'autorisation de rache­ ter la ligne en 1858. Cet échec n'avait pas LE REGROUPEMENT DES RÉSEAUX empêché les Rothschild d'améliorer leur accès aux bassins houillers belges. En 1854, la ligne Deux groupes ont joué un rôle fondamental de Hautmont à Mons convoitée de longue dans la fusion des exploitations de chemins de date par la Société Générale est concédée à fer: la Société Générale et la Compagnie des une société dont les principaux actionnaires Chemins de fer des Bassins Houillers du Hai­ sont James de Rothschild et la banque belge. naut animée par Simon Philippart. La Compagnie du Nord la reprend aussitôt à Le mouvement commence dans le sud du pays bail. Lorsqu'un décret impérial lui concède en lorsqu 'en 1859 la Société Générale fusionne 1857 un chemin de fer de Charleville à la son chemin de fer industriel de Morialmé à frontière belge par Givet, la compagnie s'em­ Châtelineau avec les lignes de la Société ano­ presse de construire la section Namur-Givet nyme du Chemin de Fer de Charleroi à Lou­ comme le prévoyait le cahier des charges vain pour former une compagnie nouvelle la de la société anglaise. 'Il importait, en effet, S.A. de l'Est belge. Le but de la fusion est de de ne pas laisser passer cette ligne en d'autres fournir à l'entreprise nouvelle les ressources mains', constate le conseil d'administration en nécessaires à la construction du prolongement sa séance du 22janvier 1858. En 1865, le Nord de ses voies jusqu'à Givet où elle rejoignait le exploite en Belgique 199 km de chemins de fer réseau français des Ardennes, assurant ainsi qui lui réservent un accès direct à trois centres une liaison rapide entre le bassin industriel de industriels vitaux: Mons, Charleroi et Liège et Charleroi et les centres métallurgiques de les relient à la fois au nord-ouest et au nord-est Lorraine et du nord de la France. de la France ainsi qu'à Paris. Poursuivant sa politique de fusion, l'Est belge Bien que les premiers concessionnaires eus­ réussit à constituer une grande ligne interna­ sent obtenu une aide financière de l'État belge, tionale entre la France et la Hollande, en la Compagnie du Nord acheva et améliora son obtenant l'exploitation des lignes de Louvain réseau au moyen de ses propres ressources. à Herenthals et de Turnhout à Tilburg. Le Par contre, les autres compagnies ne s'étaient 28 septembre 1863, elle conclut avec la Société pas privées de faire appel aux deniers publics. du Chemin de Fer Anvers-Rotterdam une De 1853 à 1865, sur 10814106 F payés aux convention en vue de la fusion de leurs exploi­ sociétés auxquelles l'État avait accordé le tations à partir du 1er janvier 1866. Quelques minimum de la garantie d'intérêt, 4879706 F mois plus tard, le 30 mars 1864, les deux com­ étaient versés à des concessionnaires de lignes pagnies négocient avec succès la fusion de l'ex­ situées dans la région wallonne. Pendant toute ploitation de leurs lignes avec celle de la so­ la période des concessions de vives controver­ ciété anglaise des Chemins de Fer de l'Entre­ ses agitèrent l'opinion publique, la presse, le Sambre-et-Meuse pour former un syndicat

83 MAISON NATALE DE SIMON PHILIPPART, située LES ATELIERS TEXTILES DE SIMON PHILIPPART, rue des 51, rue Saint-Brice , à Tournai. Moulins à Tournai. Phi/ippart céda son entreprise à un cousin pour se lancer dans les affaires ferroviaires.

d'exploitation qui sera bien connu sous le nom Banque de Belgique, principale concurrente de Grand Central Belge. La reprise des lignes de la Société Générale. En rachetant des lignes de l'Entre-Sambre-et-Meuse, outre qu'elle à de petites sociétés ou en obtenant la conces­ permettait d'acheminer le charbon de Charle­ sion de lignes nouvelles, la nouvelle compa­ roi vers les usines de la Sambre et de la Meuse gnie s'attache à développer un réseau destiné de même que vers les Ardennes françaises, sup­ au transport des marchandises, et à unifier primait une sérieuse concurrence pour l'Est l'exploitation des lignes secondaires non seu­ belge dans le sud du pays. Sur 478 km exploités lement dans le Hainaut mais encore dans les par le syndicat au 1er janvier 1886, près de la provinces limitrophes. En un peu plus d'un an moitié sont situés dans la région wallonne. La la nouvelle compagnie acquiert le contrôle de présidence du Grand Central fut confiée à 381 km de lignes dans le Hainaut. Uniquement qui était alors directeur à la 143 km sont alors en exploitation. Déjà Phi­ Société Générale. lippart nourrit des projets plus ambitieux. En Tandis que la Société Générale acquérait le 1867, un an après la fondation des Bassins contrôle d'une ligne continue reliant les che­ Houillers, ceux-ci s'allient à la Société anony­ mins de fer hollandais, les ports de Rotterdam me d'Exploitation de Chemins de Fer, patron­ et d'An vers aux chemins de fer de 1'Est français née par la Banque de l'Union, pour fonder la par Louvain, Charleroi, Givet et Vireux, un Société Générale d'Exploitation de Chemins autre regroupement était entrepris dans le Hai­ de Fer. La nouvelle société reprend à sa charge naut à l'initiative d'un personnage aussi fasci­ l'exploitation de toutes les lignes de ses deux nant que controversé, Simon Philippart. fqndatrices moyennant paiement d'une rede­ Génie selon les uns, vil intrigant selon les vance annuelle aux compagniès concession­ autres, Philippart, industriel prospère de Tour­ naires. En peu de temps Philippart s'assure nai, vend à son cousin ses usines textiles pour se une mainmise complète sur ces sociétés et lancer dans les chemins de fer avec la fonda­ parvient à contrôler un réseau de concessions tion de la Société anonyme des Chemins de fer de 19 compagnies, capable de rivaliser avec des Bassins Houillers du Hainaut. L'affaire celui de l'État et du Grand Central. En 1870, est montée sur un grand pied, au capital de 30 950 km de chemins de fer sont exploités millions de francs, sous le patronage de la principalement dans le Hainaut, le Centre et le

84 Borinage en particulier, ainsi que dans les ports par l'itinéraire le plus court. Autrement Flandres. Grisé par ses succès, Philippart dit, il avait admis le transit des marchandises s'aventure à l'étranger. Dès 1869, il obtient du par les lignes concédées s'il donnait lieu à un Gouvernement du Grand-Duché de Luxem­ raccourcissement sur le trajet emprunté par la bourg la concession du chemin de fer de ligne de l'État. En échange, les compagnies ceinture appelé réseau Prince Henri ainsi acceptaient d'adopter un tarif commun pour que des terrains et concessions minières. Il les prix du transport qui supprimait le 'rebon­ s'empresse de proclamer son intention d'ob­ dissement des taxes' aux points de jonction tenir du Gouvernement belge le prolonge­ des réseaux. Jusqu'alors, en effet, chaque fois ment de sa concession vers Charleroi par qu'une marchandise changeait de réseau, elle Athus. Vers la même époque il pénètre en perdait le bénéfice de la réduction de prix France où de concert avec les notables du accordée aux transports à longue distance. Ce département duN ord, il se flatte de concurren­ compromis n'empêchait pas les compagnies cer la puissante Compagnie du Nord à l'in­ de pratiquer des tarifs concurrentiels à l'in­ térieur de son réseau. térieur de leur propre réseau ni de chercher Le Gouvernement belge a accueilli avec faveur par tous les moyens à détourner le trafic à leur les premières fusions de concessions qui, au profit. Telles étaient les pratiques du groupe dire du ministre des Travaux Publics Vander­ Philippart qui se livrait à une véritable guerre stichelen auront 'pour résultat d'assurer plus . de tarifs avec l'exploitation de l'État. de régularité et de célérité dans les transports, En 1870, sur 3348 km de chemins de fer ex­ comme d'amener vraisemblablement des ploités en Belgique, 869 km étaient confiés à abaissements de taxes par l'abandon de dou­ l'État tandis que 2479 km étaient aux mains bles frais fixes'. Après des années de contro­ des sociétés concessionnaires. La prospérité verses sur les principes de la tarification et du de ces divers réseaux était très variable ainsi partage du trafic avec les compagnies, l'État qu'en témoignent les données suivantes pour en était arrivé à un compromis en 1866. Son l'État et quelques compagnies exploitant en désir d'uniformiser les tarifs était tel qu'il Wallonie. avait finalement cédé sur le principe des trans-

RÉSULTATS D'EXPLOITATION DES CHEMINS DE FER DE L'ÉTAT ET DE QUELQUES GRANDES COMPAGNIES EN 1870

RECETTE RECETTE BÉNÉFICE COEFFI C,: IENT LONGUEUR GÉN ÉRALE MOYENN E D' EXPLOITATION CHEMINS DE FER D'EXPLOITATION EXPLOITÉE PAR KM PAR KM F F F %

État belge 869 45306479 52136 22960 55,96

Grand Central belge 605 12425421 20538 9949 1 51,56 i Société Générale d'Exploitation 946 13 388648 14153 5 375 62,11 Nord-Belge 172 7850423 45642 26059 42,91 Grande Compagnie du Luxembourg 313 10625630 33979 16 553 51,28 Total du réseau belge 3348 92396067 29463 13255 55,01

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BASTOGNE 1 1 /' \ \ 1 r \ Lignes de l'Etat construites en 1844 1__ - \ \ \ \ Lignes de t•Etat établies depuis 1844 1_,

Lignes des compagnies

- ·-• - Frontière belge avant 1919

L ONGWY

LE RÉSEAU FERROVIAIRE EN 1870.

Si de tous les réseaux exploités en Belgique, part se trouvaient dans une situation nette­ celui de l'État percevait les recettes kilométri­ ment moins prospère, en particulier le second. ques les plus élevées, les lignes du Nord-Belge À défaut d'être rentable, le réseau Philippart contrôlées par les Rothschild étaient sans n'en était pas moins gênant. La concurren­ conteste les plus rentables, suivies de celles de ce qu'il suscitait à l'État ne manquait pas l'État. d'exercer des effets désastreux sur le trafic, La Qrande Compagnie du Luxembourg con­ mais il ne réussissait pas pour autant à pren­ naissait elle aussi un trafic intense et se plaçait dre le dessus. Aussi les Bassins Houillers au troisième rang par le niveau des recettes prennent-ils l'initiative d'offrir à l'État l'ex­ kilométriques et celui de la rentabilité. ploitation des chemins de fer qu'ils ont Par contre les deux grands réseaux unifiés à encore à construire ainsi qu'une partie des l'initiative de la Société Générale et de Philip- lignes du réseau de la Société Générale d'Ex-

86 ploitation. En acceptant de négocier cette conclut en 1869 une convention par laquelle reprise, l'État inaugurait une phase nouvelle elle cédait son exploitation à la Compagnie de l'histoire des chemins de fer belges. des Chemins de Fer de l'Est français dans laquelle Napoléon III possédait d'importants intérêts. Redoutant les visées annexionnistes de l'Empereur, le cabinet Frère-Orban rallia LES RACHATS DE LIGNES PAR L'ÉTAT autour de lui la majorité du Parlement et fit voter en hâte une loi qui interdisait aux com­ Ce serait faire grand honneur à l'État de lui pagnies de céder une ligne de chemin de fer prêter une véritable politique de rachat des sans autorisation du Gouvernement. Mais la chemins de fer. Non pas que les rachats suc­ compagnie se montrait incapable d'assurer le cessifs aient été de purs fruits du hasard mais trafic entre les bassins houillers de Liège et de J'examen des conditions de reprise de plu­ Charleroi et les gisements miniers du Grand­ sieurs réseaux donnent à penser que l'État, loin Duché de Luxembourg. d'être maître du jeu, a dû céder à des pressions C'est alors que Philippart entre en scène. Pour externes diverses d'ordre à la fois politique et des raisons différentes de l'État, il souhaite lui économique, national et international. aussi assurer la liaison ferroviaire entre Char­ Ce furent indéniablement les menées du grou­ leroi et le bassin minier luxembourgeois. Ses pe Philippart qui firent entrer l'État de maniè­ intérêts multiples dans Je sud de la Belgique, Je re décisive dans la voie des rachats. Le 25 Grand-Duché de Luxembourg et le nord de la avri11870, cédant au désir de mettre fin à une France vont lui permettre de jouer un rôle clé concurrence désastreuse, le cabinet Frère­ dans cette affaire. À la fin de 1872, il réussit Orban répondait aux offres de Philippart en à mettre sur pied un consortium belgo­ signant une première convention. Aux termes allemand pour la création d'une Société des de celle-ci, l'État reprenait à la Société Géné­ Chemins de Fer belgo-luxembourgeois en y rale d'Exploitation, l'exploitation de 601 km intéressant notamment le banquier Bleichro­ de chemins de fer moyennant paiement d'une der, ami de Bismarck, la Berliner Handels rente annuelle. Il chargeait par contre la So­ Gesellschaft ainsi que la Banque de Belgi­ ciété des Bassins Houillers de construire quel­ que. Le 21 décembre 1872Je nouveau consor­ ques lignes nquvelles étant entendu que la tium conclut avec la Grande Compagnie du compagnie céderait à l'État l'exploitation du Luxembourg une convention par laquelle la réseau de 550 km qu'il lui restait à construire. compagnie anglaise cédait à la Société des La convention provoqua au Parlement un Chemins de Fer belgo-luxembourgeois l'ex­ débat de caractère général sur l'opportunité ploitation de son réseau. Il restait à faire de faire exploiter les chemins de fer par l'État approuver par le Gouvernement belge les sta­ et fut approuvée sans difficulté. Son exécution tuts de la nouvelle société belgo-allemande et ne tarda pas d'ailleurs à susciter des litiges la cession du Grand-Luxembourg. En réalité entre l'État et la compagnie. le projet, qui avait les faveurs du Premier Les circonstances du rachat du Grand-Luxem­ ministre catholique J. Malou, heurtait d'im­ bourg témoignèrent à l'envi de l'incapacité portants intérêts économiques tant dans de l'État de mettre en œuvre une politique le Luxembourg qu'à Liège et à Charleroi où délibérée de rachat des chemins de fer. l'on réclama à cor et à cri la reprise du Grand­ On se souviendra de la fameuse affaire du Luxembourg par l'État. Vivement critiqué par Grand-Luxembourg qui mit la Belgique au ses collègues au sein du cabinet, J. Malou fut bord d'un conflit avec la France. La compa­ obligé de battre en retraite et de trouver une gnie anglaise concessionnaire désireuse de se autre solution. C'est alors que par une ma­ débarrasser de cette entrepriseet après avoir nœuvre aussi habile que rapide, Philippart se approché sans succès le Gouvernement belge, présenta en sauveur de la situation. Ayant

87 réussi à obtenir les pleins pouvoirs de la ATELIERS DE CONSTRUCTION POUR MATÉ­ RIEL DE CHEMINS DE FER BRISON FRÈRES À Grande Compagnie du Luxembourg sous le MORLANWELZ. Dessin et lithographie de Cane/le, prétexte de l'acquisition, au moins apparente, imprimée par Simonau et Toovey, publiée dans 'Belgique Industrielle. Vue des principaux établissements industriels d'un important lot d'actions, Philippart de la Belgique', Bruxelles, J. Géruzet, 2e série, (1854) , signait le 31 janvier 1873 avec Malou une planche 173 ( Bruxelles, Bibliothèque Royale Albert !"', Imprimés ) . convention aux termes de laquelle l'État re­ prenait les lignes du Grand-Luxembourg moyennant le paiement aux actions d'un divi­ dende annuel de 22 F pendant la durée de la rieur par eau des charbons des bassins wal­ concession ou le remboursement des titres pen­ lons atteignait à peine 725 898 tonnes contre dant le premier semestre au cours de 550 F. 11 483 705 tonnes transportées par rail par les En échange le Gouvernement concédait aux soins de l'État dans tous les coins de la Belgi­ Bassins Houillers la construction à forfait d'un que. D'autre part l'instauration des abonne­ réseau de 225 km à exploiter par l'État. ments ouvriers en 1870 sur le réseau de l'État a Lorsque cette convention fut soumise au Par­ permis, à mesure que celui-ci s'étendait, de lement elle provoqua un véritable tollé parmi favoriser une grande mobilité de la main­ les libéraux qui accusèrent Malou de s'être d'œuvre tout en évitant de fortes concentra­ laissé manœuvrer par Philippart. Mais le mi­ tions de la population ouvrière dans les villes. nistre ayant placé les parlementaires devant Le centre de la Belgique se révèle au début de l'alternative du vote du projet dans son en­ ce siècle le foyer d'une circulation intense de semble ou du retrait de celui-ci, rallia en main-d'œuvre, en particulier dans les arron­ dehors de ses partisans, tous ceux qui plaçaient dissements de Nivelles, Charleroi et Namur. les intérêts industriels régionaux au-dessus des Si Bruxelles est le principal foyer d'attrac­ rivalités de parti. tion, la région industrielle du Hainaut emploie En ce qui concerne la Wallonie, après avoir beaucoup d'ouvriers habitant d'autres ré­ cédé aux pressions nées des manœuvres du gions, tels ces mineurs résidant dans les envi­ groupe Philippart, l'État suspendit ses rachats rons de Grammont qui travaillent quotidien­ pendant une bonne vingtaine d'années. En nement dans les charbonnages du Centre et de 1897, après plusieurs tentatives sans lende­ Charleroi. De même le bassin liégeois recrute main, la conclusion du rachat des lignes du sa main-d'œuvre dans un rayon de 50 km, les Grand Central Belge mettait fin elle aussi à gros effectifs venant de la Campine et de la une concurrence néfaste. Cette fois encore la Hesbaye. conclusion de la convention ne résultait pas À l'origine les promoteurs de cette innovation d'une politique mûrement réfléchie mais bien furent accusés de défendre l'ordre social en plus de raisons d'opportunité. maintenant la population ouvrière à la cam­ JI n'en demeure pas moins qu'à la veille de la pagne tout en facilitant l'acheminement d'une Première Guerre mondiale, l'État avait repris main-d'œuvre peu exigeante vers les centres l'exploitation de toutes les lignes exploitées industriels. Bien des années plus tard Emile par les sociétés privées dans la région wallonne Vandervelde devait pourtant saluer en laper­ à l'exception du Nord-Belge et de la Com­ sonne du ministre catholique Vandenpeere- pagnie du Chemin de Fer de Chimay. De par sa politique tarifaire, la multiplication des voies, le raccourcissement des distances et sa capacité d'amener les matières premières à LOCOMOTIVE TYPE 4 CONSTRUITE À TUBIZE pied d'œuvre sans manutention, le réseau EN 1880. D'après une photo S.N.C.B. publiée dans Paul Vanbel/ingen, 'Haine-Saint-Pierre, nœud ferroviaire du ferroviaire supplantait de manière écrasante Centre', t. 1. 1824-1918, Haine-Saim-Pierre, 1969 ( Pu­ celui des voies navigables pour le transport blications du Cercle d'Histoire et de Folklore de Haine­ Saint-Pierre et Haine-Saint-Paul, n° 4) , p. 57, première des marchandises. En 1906, le trafic inté- illustration.

88 g 1

89 SUPPLÉMENT AU JOURNAL L~ÉCtJ~ l~UU UAEB

HEURESf' A PAR'fJR JANVIER 1875 Charleroi t;,30 Dru~~ll u _(Midi) D 6.00 1.30 7.47 !0. $.!0 '-09 6,08 7.45 . 8.32 nhmk!·SJ i nt:Gcnèsc 6.'26 8.13 H. U6 4.3~ 1) . ~6 8.11 Wnt.cl'loo. n.aa 8.20 H. L5il 4 .42 6.0:J. 8.18 S.ZG Drnino·I'AIIcud 6.39 8.26 11.1' j 59 4.48 ~ 8 . ~4 9.02 Lillois. 6.18 it/ · ~.08 4.S7 8.33 6.1)(\ a35. 43 H . 2.ili:'-' 5 .0~; ~ 8.41 9.!6 Baulers !AD.. IU$9 8.46 H. 2.Hl 5.08 j!. 9.·19 5.t3 6,47 9.!4 Nivcllos (Est) 7.04 S.tH lt.l 2.24 ~ LuUre u 7.2~ 9.!0 Hl 2.43 .5.'3-i 9.43 " ·- 9.5~ Gossclics~Courcclles 7.30 8)5 ,9.~!.) lt. 2.rhl . tl.41!, ~ 7.!1 Rous: uiî 8.30 9.2!1 H 2JJ9• 5.48 g 7.11 9.il7 MtlrclûHnnl'$ li!. 3.06. 5.55;. ,.. u• 10.0.\ ~:~&;~::: , ~1~ H a.l~ . ~ ·9~:... 1'~ IO.H ...f'!J·~·"""' · . ,.f'! Chilrleroi_, · Bruxelles f>; . . 'li C harlrrol D .; 6.\1''7.2! 9.3!\ 9.40;!2.38 2.'5 O.it; 7.45 Marchiùl~ncs 6.1 1.3! !}.4!i 9. .fl)';;.t2,•l7 2.iH us 7.1.4 noux. o.l3 7.37 9.48 9.55 12.5'1 3.01 6.33 8.01 Gossclics-Courcclh.. >s D. 1 6.!9 7.42 9.53 to.oo· 12.58 3 07 6.40 8.o7 IJuUre i5 6.38 10.12 !.09 :!.17 6.5,, . 8.16 ~ivo llos (Est) .e 6 . ~7 8.04 0.14 10 31 .. .. ~ ~5 3.36 7.!2 IJ.3S 7.01 i0r85 7.16 8.39 ""qJèn ~~ t.M m , !0'.40 ' !::~ ::!~ 5.,6 7.19 8.44 Lillohs 7.13 9.23 10A9 L4~ . 5.55 8.53 DNdne~l'Aileud 5.30 7.22 9.32 t0.58 i.M !J.58 6.04 7.00 7,34 9.6! Waterloo. ~JJ6 7.28 9,38 .,..,C.,•cji.Ql Ui1 4.0! 6.10 7.00 9.08 ~' - g.15 'Rbode..Saint.'ccnèsc 1L43 1$) ~.4!; ..:....+>tLH 2.04 - G.l7 7.13 llruxeU~Illl .;. (Yidî) A o:us uo 8.43 10.10 0,49 H.30 U9 4.27 6.4~ 7.38 7,Jl1 9.40 ~-

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HORAIRE DE CHEMINS DE FER. LIGNE BRUXELLES À CHARLEROI. 1875. D'après le supplé­ ment au Journal 'L'écho du Hain', publié à Braine-l'Aileud ( Braine-l'Alleud, Association du Musée, Don de Maître Ul André Glibert, bourgmestre). < .cz: 1 0: ::z: 0 wl <:> c:....::> M

TICKETS DE CHEMINS DE FER UTILISÉS AVANT 1914: Grand Central belge (1878) et Chemin de {er de Chimay (1910) (Documents S.N.C.B.). ·

90 boom, promoteur en 1896 de réformes éten­ d'ouvriers mineurs, conséquence imprévue dant le système des abonnements, le premier des abonnements. Ainsi à la veille de la Pre­ propagandiste socialiste. Le train était devenu mière Guerre mondiale, l'État belge contrô• un lieu de propagande idéal, où se tenaient des lant l'exploitation d'un réseau global de 4786 meetings quotidiens qui diffusèrent les idées km, alors que les compagnies exploitaient 275 socialistes dans les régions agricoles du pays, km seulement, détenait déjà un quasi-mono­ devenues des réservoirs de main-d'œuvre pole dont la gestion sera confiée en 1926 à la industrielle. Aussi n'est-il guère étonnant de Société Nationale des Chemins de Fer Belges. constater l'apparition à Grammont, à 50 km de tout charbonnage, d'un syndicat socialiste Ginette KURGAN-VAN HENTENRYK

ORIENTATION BIBLIOGRAPHIQUE

Une histoire complète des chemins de fer belges reste à d'Histoire el de Folklore de Haine-Saint-Pierre et faire. En effet, pour couvrir la période qui précède la Haine-Saint-Paul, n° 4), Haine-Saint-Pierre, 1969; M. Première Guerre mondiale deux synthèses sont au­ BOURGUIGNON, Les origines des chemins de fèr luxem­ jourd'hui disponibles, celles de u . LAMALLE, Histoire bourgeois (Bulletin de l'Institut archéologique du des Chemins de fer Belges, 2e éd. Bruxelles, 1953 et de Luxembourg, t. XLII; 1966); E. MERENNE Les chemins L. AVAKIAN, Le rythme de développement des voies fer­ de fer dans l'Entre-Sambre-et-Meuse. Aspects géogra­ rées en Belgique de 1835 à 1935 (Bulletin de l'Institut phiques (Le Guetteur wallon, 1969). L'affaire du des Sciences Economiques de l'Université Catholique Grand Luxembourg a fait l'objet de plusieurs études en de Louvain, août 1936). raison de ses répercussions internationales. Outre les En dehors des publications statistiques officielles, souvenirs d' E. OLLIVIER, L'Empire Libéral, t XI, Paris l'Annuaire spécial des chemins de fer belges publié par 1907 chap. XV, pp. 358 s., on se référera aux travaux de F. LOISEL en 15 vol., Bruxelles 1869-1890, constitue une P. HYMANS, Frère-Orban, Bruxelles, s.d., t. II, p. 151 s. ; source de tout premier plan pour les cinquante premiè­ E. REVENS, Le second Empire vu par un diplomate belge, res années de notre réseau ferroviaire. Une littérature Bruges-Paris, t. Tl, 1926, p. 326 s. ; D.H. THOMAS, English relativement abondante ayant notamment pour au­ investors and the Franco- (sic) Railway Crisis of teurs des contemporains s'est intéressée aux débuts du 1869, (The Historian, février 1964) et The European chemin de fer. Citons entre autres J. MALOU, Étude sur press on the Belgian Railway Ajj{ûr of1869, Diplomacy les chemins de fer, Bruxelles, 1860; A. DE LA VELEYE, in an Age of Nationalism. Essays in honor of Lynn Histoire des vingt-cinq premières années des chemins de Marshall Case, sous la direction de N.N. BAR KER et M.L. fer belges, Bruxelles, 1862; E. NICOLA!, Les chemins de BROWN Jr. La Haye, 1971; MILLMAN Richard, British fer de l'État en Belgique ( 1834-1884). Étude historique Foreign Policy and the Coming of the Franco-Prussian économique et statistique, Bruxelles, 1885, et parmi des War, Londres, 1969, pp. 123 s. études plus récentes J. STENGERS, Léopold fer et le Quant aux rachats, deux études particulières y ont été chemin de fer d'Anvers au Rhin, Mélanges offerts à consacrées. notre article Une étape mouvementée de la G. Jacquemyns, Bruxelles, 1968; J. PAUL Y, Le chemin de réorganisation des chemins de jèr belges: le rachat du jèr et le Parlement 1835-1860, Bruxelles, 1935 et D. DE Grand-Luxembourg par l'État ( 1872-1873) (Revue BRULLE, Les chemins de jèr belges. Charles Rogier et belge de philologie et d'histoire., t. L, 1972) et un l'État (Annales de l'Économie collective, t 55, 1967). mémoire de licence inédit présenté à l'Université Libre Les monographies sur les réseaux régionaux ou les de Bruxelles par A.M. JAMAR, Contribution à l'Étude des lignes concédées sont peu nombreuses. On trouvera Chemins de Fer Belges. Le Rachat du Grand Central une série de notices sur les sociétés concessionnaires Belge par l'État, Bruxelles, 1972. avant 1857 dans la thèse de J. LAUREYSSENS citée au N'oublions pas enfin les travaux consacrés à des chapitre précédent et des renseignements dans M. LEVY­ aspects économiques du problème ferroviaire comme LEBOYER, Les banques européennes et l'industrialisation ceux de G . DE LEENER, La politique des transports en internationale dans la première moitié du XJXe siècle, Belgique, Bruxelles, 1913 et Les transports des charbons Paris, 1964 et F. CARON, Histoire de l'exploitation d'un en Belgique (Annales des travaux publics de Belgique, grand réseau. La Compagnie du Chemin de fer du Nord 1908, 2e série, XII) ainsi que E. MAHAIM, Les abonne­ 1846-1937, Paris 1973. Sur le plan régional, on retien­ ments d'ouvriers sur les lignes de chemins de jèr belges el dra. P. VAN BELLINGEN, Haine-Saint-Pierre,nœudferro• leurs effèts sociaux, Bruxelles, 1910. viaire du Centre, tI 1824-1918 (Publications du Cercle

91 ZÉNOBE GRAMME (1826-1901), d'origine liégeoise, travaille à Parisoû il présente, en 1871, la première dynamo. Il conserve des allaches en Wallonie, oû son brevet fut ap­ pliqué rapidement. Sculpture en bronze due à A. Salle ( 1884-1952). 1930 ( Liège, Hôtel de Ville, Salle des pas perdus. Photo A.C.L.).

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