Affairealstom, Saison2
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0123 14 | horizons MERCREDI 16 JANVIER 2019 AffaireAlstom, saison 2 Le témoignagedeFrédéricPierucci, anciencadre de l’entreprise, invite àréexaminer lescirconstancesdelavente,en2014, du champion français de l’énergieàl’américain General Electric affaireAlstom, véritable thriller infligéeàl’entreprisen’a, affirme-t-il, pas pré- pelleque,avant Alstom, GE arachetéquatre d’Etat, estrelancée. Outrépar le cipité sonarbitrageenfaveur de GE quiaété entreprises poursuivies par le DoJ pour des scénariodelavente en 2014 du approuvé àl’unanimité du conseild’adminis- faits de corruption (InVision Technologies, champion français de l’énergie tration. Pourtant, la procédureengagéeavait Amersham, Vetco Gray et Ionics). Et puis, «à àl’américain General Electric de quoi affoler n’importequelpatron: elle partir du momentoùAlstomest vendue àGE, (GE), un homme ne veut plus se s’inscrivait dans le cadredelaloi FCPA (Fo- tout s’arrange du pointdevue judiciaire», taire. FrédéricPierucci, 51ans, publie, mercredi reign Corrupt PracticesAct). constate Daniel Fasquelle. L’16 janvier, avec Matthieu Aron, journaliste à Cetteloi, rendue extraterritorialeen1998, La question du paiementdel’amende L’Obs, Le Piège américain.Cet anciencadre permet auxEtats-Unis de sanctionner les demeureégalementtroublante. En juin 2014, dirigeantd’A lstom, emprisonné auxEtats- entreprises quicorrompentdes agents pu- alorsque Siemens s’estlui aussi portécandi- Unis pendantplusdedeux ans pour «corrup- blicsétrangers. La justice américaine s’estime datàlareprisedelabranche énergie, GE s’en- tion»après le lancementd’une enquête du compétente dans le mondeentier, àlacondi- gageauprèsd’A lstomàprendreenchargela DepartmentofJustice (DoJ) sur sonentre- tion expresse (et souventremplie) queles futureamendeinfligéepar le DoJ dans le prise, aréservéau Monde sa premièreprise sociétés incriminées aientconcluuncontrat cadred’une procéduredeplaider coupable. de parolepublique.Alelire, sonhistoireper- en dollars ou queleurs courriels transitent via Fauted’enconnaîtrelemontant, Siemens ne sonnelle illustrerait la guerreéconomique desserveurs basés auxEtats-Unis. Pour réunir peut formuler la même promesse. Le DoJ ne queles Etats-Unis livrentàl’Europepour s’em- deséléments àcharge, lesprocureurs améri- réagitpas, alorsque,dans le cadred’une procé- parerdeses pépites industrielles «endétour- cains s’appuientsur lesagencesderenseigne- dure FCPA,une partietiercenepeut pas s’ac- nant le droit et la morale». ment, dont la National Security Agency (NSA). quitterdel’amended’une entreprisepoursui- FrédéricPierucci, Le sentimentque la cession d’Alstom aété Depuis lesrévélations, en 2015, de WikiLeaks, vie. Lors de l’assembléegénéraledes action- le 11janvier,àParis. une vastepartiedepoker menteur estpar- l’espionnageéconomique de la France par la naires d’Alstom réunieendécembre2014 pour PHILIPPE BRAULT/VUPOUR «LEMONDE» tagé àgauche comme àdroiteausein desan- NSAn’est plus un secret. «France:développe- approuverlacession, Patrick Kron annonce ciens membres de la commission d’enquête ments économiques»,une notede2012, que, àlademandeduDoJ,legroupedoitpren- parlementairecréée finoctobre2017pour témoigne de l’intérêtporté auxcontratssupé- drel’amendeàsacharge. Le prixdelavente examiner «les décisions de l’Etatenmatière rieurs à200 millions de dollars, notamment restenéanmoins identique. tembre2012 et juillet 2014, il dirigel’A gence de de politique industrielle». «Ilrestedes zones dans l’énergieouletransport. «Les services de PATRICK KRON, participations de l’Etat, quiacommandé d’ombre dans cetteaffaire»,estime Delphine renseignement américains chassent en meute L’ANCIEN PDG en 2012 au cabinet AT Kearneyune étude sur Batho,députée (non inscrite)des Deux-Sè- et laissenttraîner leurs filets. Dèsqu’ils trouvent Paris auxabonnésabsents? l’actionnariatd’A lstom. Il rejointBankofAme- vres et ancienne ministredel’écologie quelque chose, ils transmettent àlajustice de D’ALSTOM, AFFIRME Si l’appareild’Etataméricain estmobilisé rica en septembre2014, quiest,avecRoths- sous François Hollande. Convaincu pour sa leur pays»,analyse Olivier Marleix, député pour la guerreéconomique,laFrance, elle, child,l’une desbanquesconseild’A lstompour partqu’il s’agitd’un «scandale national»,Da- (LR) d’Eure-et-Loir et ex-présidentdelacom- AU «MONDE» semble démunie. L’affaireAlstomenest la cession àGE. A-t-iltravaillé sur le dossier? niel Fasquelle, député(LR) du Pas-de-Calais, mission d’enquête parlementaire. l’illustration. Déléguée interministérielle à Sonchoixdecarrièreinterrogeentout cas. confirme qu’«ilétait difficile de démêler le Le butin estsonnantettrébuchant: entre QUESADÉCISION l’intelligence économique de mai 2013à AlalettreG,Clara Gaymard. Ex-présidente vrai du fauxdans ce dossier très technique». 2010et2014, trois entreprises du CAC40(To- DE VENDRE LA juillet2015, Claude Revelreconnaîtcette de l’Agence françaisepour lesinvestissements QuantàArnaud Montebourg,àl’époque mi- tal, TechnipetAlcatel) ontété condamnées à impuissance. Lorsqu’elleprend ses fonctions, internationaux, elle estnomméeàlatêtede nistredel’économie, il s’énerveencore «des payeruntotal de 873 millions de dollars. Dans BRANCHE ÉNERGIE la DGSE (lerenseignementextérieur) ne GE France en juin 2006. Elle en sera l’ambassa- histoires àdormir deboutracontées par les di- le cas d’Alstom, l’amendeattendue étaitesti- l’avertitpas de l’arrestation de Frédéric drice «diplomatique»auprèsdes pouvoirs rigeants d’Alstom». méeàprèsde1milliarddedollars (elle sera in N’ÉTAIT «ENRIEN Pierucci, survenue un mois plus tôt. Elle ne publics français. L’époused’HervéGaymard, La crisefinancière de 2008 conduiteneffet fine de 772 millions), ce quiauraitlourdement LIÉE AUX l’apprendraqu’en 2015. «Ilyaune grande dé- plusieurs fois ministresous JacquesChirac, le PDGd’A lstom, Patrick Kron, àchercher,au pesé sur la trésoreriedugroupe, alorsendiffi- fiance entre les différents services de l’Etat,qui quitte ce postefin janvier 2016, quelques jours début desannées 2010, desalliancesenChine culté. «S’ilyaune chose dont je suis sûr, c’est POURSUITES travaillentensilos»,regrette-t-elle.Adeux aprèsavoir étéconvoquée àl’Elysée pour s’ex- pour la branche énergieetenRussiepour la que cette menace financière ainfluencé la déci- reprises,Claude RevelalerteraMatignon et pliquersur lessuppressions de postes chez partie transports. La situationsecomplique sion de Patrick Kron de choisir GE,affirme JUDICIAIRES l’Elysée desdangers quiguettentAlstom: ses Alstom. «Les hautsfonctionnaires, hypnotisés quand, en 2012, desrumeurs persistantes M. Marleix. L’arrestation, en avril 2013, de notesrestent sans réponse. «Cesilence estla parleurboulot de demain, oublientleurboulot font étatdusouhaitdugroupeBouyguesde Frédéric Pierucci luiafaitpasser l’envie de finas- AMÉRICAINES» preuve du dysfonctionnementdel’Etat régula- d’aujourd’hui», ironiseunproche du dossier, cédersaparticipation de 29,4 %dans l’entre- ser trop longtemps.» Autrementdit,ceder- teur.»Al’A ssembléenationale, desdéputés de quiconsidèreque «lepantouflage estl’un des prise–unconglomérat basésur trois activi- nier,comme il l’affirme dans sonouvrage, l’opposition s’alarmentduprojet de cession leviersdelaguerreéconomique». tés: énergie, réseau électrique et transport. aurait été «l’otage d’une incroyable opération de la branche énergiedès sa médiatisationpar Il faut aussi compter avec Jérôme Pécresse, En 2014, la gouvernance d’Alstom choisit de déstabilisation économique». l’agence de presse économique Bloomberg, vice-présidentexécutif d’Alstom (2011-2015) et l’américain GE plutôt quel’allemand Sie- Patrick Kron n’en avaitpas fini avec le DoJ.Le en avril2014. Quelques jours plus tard, le mari de ValériePécresse,figure de la droite, mens pour le rachatdesabranche énergie. 23 avril2014, alorsqu’il rencontrelePDG de 7mai, JacquesMyard,député(UMP) desYveli- ancienne ministredeNicolas Sarkozy.Le Ainsi, l’entretien et le renouvellementdes General Electric, Jeffrey Immelt, pour poursui- nes, demandelaconstitution d’une commis- cadredirigeaujourd’huilabranche énergies turboalternateurs des58réacteurs nucléaires vreles négociations, un autrecadredirigeant sion d’enquête,sans succès. «Notre groupe renouvelables de GE. français, la production desturbinesArabelle d’Alstom, Lawrence Hoskins, estarrêtédans étaitdivisé surlesujet, se souvient Daniel Sollicitépar Le Monde,General Electric «ne destinées auxréacteurs EPR, la fourniture lesîlesVierges américaines. Dèslafin de leur Fasquelle. Certains députésavaientdes entités souhaite ni commenterlaprocédure judiciaire desturbinesdepropulsion desquatresous- entrevue,l’agence Bloomberg révèle queGE d’Alstom dans leur circonscription.» qui futengagée contre Alstom, ni le livre de marins nucléaires lanceurs d’engins et du tientlacordepour le rachatdelabranche Il estun«ni vu ni connu» encore plus fla- M. Pierucci et les théories et allégations éven- porte-avions Charles-de-Gaulle relèvent dé- énergied’A lstom. Hasardouremarquable grant. Arnaud Montebourg diteneffet avoir tuellementcontenues dans celui-ci». sormais desEtats-Unis. sens du timing desAméricains?Pour Eric appris le projet de cession entreAlstometGE Allégations?Théorieducomplot?Les mots Commentenest-on arrivé là?Aujourd’hui Denécé, directeur du Centre français de re- parBloomberg. Or Alstom, acteur majeur du font sourireFrédéricPierucci, désormais àla encore,trois questions restentensuspens. cherche sur le renseignement, cettechronolo- nucléairefrançais, n’aurait-ilpas dû,selon tête d’Ikarian, un cabinet spécialisédans le gieindique quelavente de la branche