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bbiibblliiootthhèèqquuee nnuumméérriiqquuee rroommaannddee eebbooookkss--bbnnrr..ccoomm Table des matières

LA MER D’EAU DOUCE ...... 4

XI LES ADIEUX ...... 4

XII ENTRE MER ET CIEL ...... 21

XIII LE « GOLFO DE LAS YEGUAS » ...... 38

XIV DIVERTISSEMENTS, FÊTES ET MERVEILLES ...... 55

XV TERRE ENCHANTÉE ...... 73

XVI RÉCITS CRUELS ...... 92

XVII LA VISION DE LA MER D’EAU DOUCE...... 110

XVIII LA PREMIÈRE TOMBE ...... 129

XIX TRAGÉDIE ...... 138

XX APRÈS ...... 144

POSTFACE ...... 157

NOTES DU TRADUCTEUR...... 160

TABLE DES ILLUSTRATIONS...... 187

EL MAR DULCE ...... 197

XI LOS ADIOSES ...... 197

XII ENTRE MAR Y CIELO ...... 212

XIII EL GOLFO DE LAS YEGUAS...... 227

XIV HOLGANZA, HOLGORIO Y MARAVILLAS ...... 243

XV TIERRA ENCANTADA ...... 260

XVI CUENTOS CRUELES ...... 277

XVII LA VISIÓN DEL MAR DULCE...... 294

XVIII LA PRIMERA TUMBA ...... 312

XIX TRAGEDIA ...... 321

XX DESPUÉS ...... 326 NOTAS DEL TRADUCTOR AL FRANCÉS...... 338

FUENTES DE LAS ILUSTRACIONES ...... 368

Ce livre numérique...... 377

– 3 – LA MER D’EAU DOUCE

XI

LES ADIEUX

Depuis qu’il avait levé l’ancre, perdant de vue la masse de l’Alcázar de Séville, où était hébergée la Casa de Contra- tación, depuis qu’il avait senti sous ses pieds le doux balan- cement du navire, Juan Díaz de Solís parut transformé. Dans ses yeux brillait le même feu, mais atténué par une grande sérénité. Qu’il fût debout sur le pont, surveillant plus que commandant la manœuvre, qu’il parcourût à pas lents ce même pont, qu’il visitât les mille recoins du navire, veillant à ce que tout fût en ordre, qu’il s’assît sur la dunette afin de se reposer un moment, son air de tranquille assurance inspirait du respect et de la confiance à l’équipage, qui ne l’avait ja- mais vu ainsi avant le départ, tant qu’il avait été en butte à des difficultés occasionnelles et suscitées par la malveillance. Le même vague sourire qui plissait ses lèvres affirmait son autorité. Il était désormais le maître, indépendant de toute influence, seigneur et maître de son bateau et de ses gens, comme il l’était des deux navires qui suivaient son étoile, pi- lotés par Francisco Torres et par Rodrigo Alvarez de Car-

– 4 – taya. Les ancres levées, la flottille en partance, plus personne ne pouvait l’arrêter et, avant de surgir en face de Sanlúcar de Barrameda, il avait failli passer au large, afin d’éviter le moindre risque de nouveaux retards. Deux raisons d’ordres distincts l’en avaient empêché : c’est là qu’il devait faire monter à son bord, comme chapelain, un frère dominicain qui avait accompagné aux Indes fray Bartolomé de las Ca- sas ; et c’est là aussi que pouvait l’attendre une lettre de don Ferdinand, à qui il avait écrit en partant, et qui daignerait peut être lui envoyer un mot d’adieu. Et, avant de s’éloigner des côtes espagnoles, il ferait encore une autre escale, dictée plus par les sentiments que déterminée par la nécessité : do- ña Ana et ses deux jeunes fils l’attendaient à Lepe, afin de lui donner un baiser d’adieu.

Mais plus rien de tout cela n’inquiétait le marin, entiè- rement maître de ses actions depuis qu’il avait perdu le con- tact avec « ces messieurs de Séville ». Plus rien ne le préoccu- pait, à part ses navires. Dorénavant, il allait être le capitaine imperturbable et silencieux qui garde jalousement toute son autorité en raison de la responsabilité dont on l’a chargé. Mais tout fonctionnait sans problème. Les navires étaient bien préparés et, à la place de la caravelle qui avait sombré et qui, tout compte fait, n’était que « un tas de bois », un vieux bateau peu véloce et à peine apte à naviguer, il en avait obtenu une autre, si pas neuve, solide et maniable. Il emmenait soixante hommes expérimentés comme membres d’équipage sur les trois navires, emportait des provisions de bouche pour plus de deux ans, des armes en suffisance et de l’artillerie. Avec cela, un homme comme lui pourrait aller loin et accomplir beaucoup de choses ; mais, aussi bien fon- dée, sa satisfaction ne diminuait pas sa vigilance.

– 5 – Il pouvait cependant être tranquille. Même si ses contrô- leurs présumés, le répartiteur Alarcón et le chargé de facto- rerie Marquina1, avaient été ses ennemis, au lieu d’être ses amis, il n’aurait pas eu à craindre d’eux la moindre atteinte à son autorité ; à peine le mouvement de la caravelle portu- gaise avait-elle commencé à les bercer doucement sur le Guadalquivir, les deux malheureux fonctionnaires avaient senti le monde tournoyer autour de leurs têtes et eu l’impression que leur corps voulait se retourner vers le bas, évacuant tout ce qui, jusqu’alors, avait été à l’intérieur ; et s’ils avaient le mal de mer en flottant sur des eaux calmes comme celles d’un lac, qu’allait-il advenir d’eux lorsqu’ils se trouveraient, bon Dieu, sur une mer agitée ?… Solis compa- tissait, sans cesser pour autant de sourire, parce que le mal de mer, forme d’ivresse involontaire et facétieuse, a toujours inspiré simultanément des rires et de la pitié.

La nuit s’était écoulée sans que cessât le va-et-vient des petites embarcations entre la côte et les navires. Dès que le jour se leva et que les premiers rayons du soleil commencè- rent à dissiper la légère brume qui flottait sur le fleuve et la

1 24 novembre 1514 + 6 août 1515 ; Toribio Medina, pp. CCXXXII-+ 133-+ 142-143 (N.d.T.)

– 6 – côte marécageuse, on put embrasser du regard tout ce que les ténèbres dissimulaient jusqu’alors. Il y avait, à droite, une sierra aux lignes capricieuses dont surgit, comme un arbre, la tour de Lebrija au pied de laquelle s’étendent les marécages inondés par les eaux de la mer, avec leurs petites montagnes de sel d’un blanc cendré et, là-bas en face, à un peu moins d’une lieue, se dressant sur le terrain plat avec des sablières et quelques fissures, les maisons grises et blanches de Sanlúcar, entourées de jardins verdoyants. La partie haute, la plus ancienne, était dominée par un château sombre2, quadrangulaire, du siècle précédent, avec une double enceinte, une barbacane, de lourds donjons aux coins et des tours rondes sur chaque pan de muraille, et par l’église de Nuestra Señora de la O, cent ans plus an- cienne. Dans la partie basse et plate apparaissaient le cou- vent de San Francisco et, un peu plus proche de la plage, ce- lui de Santo Domingo, que, probablement, à cette heure, fray Buenaventura, chapelain de la flottille s’apprêtait à quitter. Sur la plage fourmillaient déjà les vagabonds, infati- gables pour tout sauf le travail, en quête de distraction ou de profit, voire des deux à la fois, et il s’y ajoutait, peu à peu, quelques individus plus présentables mais qui pouvaient fort bien donner le change car ils différaient des aventuriers de bas étage, dépeints par un grand écrivain presque contempo- rain3, avec leurs longues moustaches, leurs chapeaux aux grands bords, leur col à la wallonne4, leurs rapières trop

2 De Santiago. (N.d.T.)

3 Miguel de Cervantes. (N.d.T.)

4 voir Notes du traducteur.

– 7 – longues pendant de la ceinture… De cette foule se détacha enfin un frère, de petite stature, pâle et au visage maigre, vê- tu de la tunique blanche et de la capuce noire de l’ordre de Saint-Dominique, les joues rasées et le haut du crâne tonsu- ré, avec une étroite couronne de cheveux. Solís le vit arriver depuis le pont de son navire et lui envoya Rodrigo avec le canot. Quelques minutes plus tard, on embarquait le frère, accueilli respectueusement et affectueusement à bord par le capitaine, qui s’était avancé pour le recevoir. — On n’attendait plus que vous, fray Buenaventura, car nous n’avons plus rien à faire ici. — J’ai pourtant fait diligence – dit le frère, en souriant d’une façon particulière : il souriait avec les yeux alors que le reste de son visage restait impassible. — Ce n’était pas un reproche car votre arrivée me ré- jouit beaucoup – répliqua Solís. Je l’ai seulement dit parce que j’espérais trouver ici… — Ce que vous trouverez à Lepe – l’interrompit fray Buenaventura. Le père prieur en a reçu des nouvelles hier ; vous savez qu’il a des yeux et des oreilles à la Cour. Vous m’êtes redevable de bonnes nouvelles, capitaine. — Mille mercis. Installez-vous à l’aise, mon père ; Ro- drigo vous guidera. Entretemps, je vais me préparer à appa- reiller, parce que la marée monte et il faut en profiter pour franchir la barre. Avez-vous apporté beaucoup de bagages ? Le petit frère, qui était loquace, s’empressa de dire : — Ce que je porte sur moi et, comme linge de rechange, une tunique en coton et deux paires de sandales, les affaires d’apothicaire que vous m’avez dites, puisque je dois faire of-

– 8 – fice de médecin et, bien sûr, le nécessaire pour célébrer la messe, qui a coûté pas moins de vingt-cinq mille maravédis. Notre saint père le Pape nous interdit malheureusement de dire la messe à bord, parce que nous pourrions renverser le sang divin du Sauveur mais il ne manquera pas de terres où nous débarquerons et où l’on pourra célébrer le saint sacri- fice, pour la consolation des chrétiens et l’enseignement d’infidèles. — Il en sera ainsi, mon père, comme vous dites – répon- dit le marin et, tournant les yeux vers un petit ermitage qui, sur la côte, dominait le mouillage, il ajouta : — J’espère que Nuestra Señora de Bonanza nous préservera en nous permet- tant de franchir la barre sans difficultés. — Elle nous protégera – dit le frère. Le capitaine monta sur le pont ; on adressa les signaux d’usage aux deux autres navires, on leva les ancres et la flot- tille, au gré du courant, se dirigea lentement vers la dange- reuse barre, banc de rochers par l’une des brèches duquel le Guadalquivir se jette à marée basse dans la mer, et par la- quelle, à marée haute, l’océan arrête et repousse le fleuve. La passe franchie sans encombre, la flottille navigua avec un vent favorable vers sa dernière escale sur la terre d’Europe. Le soleil déclinait déjà lorsqu’on jeta l’ancre dans l’em- bouchure du río Piedras. Les curieux, informés de la proximi- té des navires, ne manquaient certes pas sur la plage. Là se trouvaient également les notables de la ville, accompagnant doña Ana de Torres et ses deux petits garçons, Diego et Lui- sillo. Solís, en les apercevant depuis le pont, ressentit un lé- ger malaise, tandis que sa vue se voilait un instant. Phéno- mène étrange, attendrissement inhabituel qu’il attribua à la

– 9 – fatigue consécutive à une lutte aussi farouche aussi éner- vante…

Beaucoup de marins et quelques officiers avaient, comme Solís et Francisco de Torres, leur famille à Lepe, et ils espéraient que le capitaine les autoriserait à débarquer et à lui dire au revoir. Ils obtinrent cette permission sans la de- mander mais le premier à mettre pied à terre fut Solís, qui enlaça dans une seule étreinte son épouse et ses fils, aban- donnant toute réserve et ne se préoccupant pas des curieux qui l’entouraient.

— Des nouvelles vous attendent à la maison. Je prie Dieu qu’elles soient bonnes – lui dit doña Ana – Je n’ai pas voulu apporter un courrier arrivé ce matin, considérant que vous préféreriez le lire en étant seul.

— C’est le cas – répondit le marin. Surtout si les nou- velles avaient été mauvaises, mais elles ne le sont pas, d’après ce que je sais.

Francisco de Torres les avait rejoints et ils prirent en- semble le chemin de la ville, suivis par leurs amis et voisins. Une heure plus tard, ils se retrouvaient dans l’intimité, con- fortablement installés dans la vaste cuisine qui, à l’époque, faisait également office de salon et où l’on cuisinait rare- ment, utilisant pour ce faire la cuisine des domestiques. Solís ouvrit le pli, qui était de don Ferdinand, mais, tout en ne s’attendant à rien de désagréable, il ne put réprimer une ex- clamation de joie : le Roi se montrait fort satisfait que Solís ait fait diligence et, à titre de récompense, il le dispensait du

– 10 – remboursement des deniers que la Casa de Contratación de Séville lui avait avancés pour son ravitaillement5. — Que penses-tu de cela, Paco ? – demanda-t-il, réjoui, après avoir informé Torres. – Je voudrais voir la tête que ti- rent ceux de Séville ! – et ce fut la dernière allusion à ses en- nemis que fit alors le pilote.

— Et celle que doit tirer Vasconcelos ! – s’exclama Torres. Cela lui agacera davantage les dents que manger un coing acide.

Solís, qui avait continué à lire, ajouta avec allégresse :

— Il y a encore mieux !

— De quoi s’agit-il, dis ? – demanda son épouse qui, dans l’intimité, oubliait le vouvoiement.

Son Altesse disait que doña Ana de Torres, épouse de Solís, les fils de ce dernier, sa maison et mêmes ses frères se- raient favorisés par ordre royal, tant que durerait l’absence du pilote principal et que pendant la même période, obéis- sant à sa royale volonté, dans tous les monastères de Séville, on prierait le très-Haut pour le succès de l’expédition et pour la santé et la félicité de celui qui la dirigeait.

— Et les mauvaises langues diront encore que don Fer- dinand est parcimonieux ! – s’exclama Torres.

5 2 octobre 1515 ; Toribio Medina, p. 169. (N.d.T.)

– 11 – — Je ne dis pas qu’il ne le soit pas – répliqua Solís, de très bonne humeur. Il doit l’être, il l’est avec celui qui ne mé- rite pas autre chose ; il doit l’être, il l’est en ce qui concerne sa propre personne, parce que lui importent surtout les choses qui ne mettent pas à mal les finances du trésor royal… — Tant qu’il ne s’agit pas de la nouvelle Reine6… – murmura doña Ana – Pour elle, il n’y a pas de restrictions… — N’en dis pas plus, femme ! Quand l’amour tente un vieil homme7, il délie les cordons de la bourse et se dé- pouille… Mais on n’a pas à se mêler des affaires des grands de ce monde… Ce qui importe, c’est l’intérêt que prend et témoigne à notre voyage Son Altesse, la seule personne, peut-être à cette heure, qui comprenne ou devine, pour le présent et l’avenir, la grandeur de ce que nous tentons de faire. Il ne nous récompenserait pas d’avance si ce n’était pas le cas… — Tu as raison – répondit doña Ana. Grâce au Roi, nous ne manquons de rien, et cela sera également le cas durant ton absence, s’il plaît à Dieu8… — Cesse les apitoiements, qui ressemblent à des au- gures, femme ! – s’exclama Solís. Prie mais en remerciant avec foi et espoir… Avant un an, nous serons de retour et –

6 Germaine de Foix l’est tout de même depuis quelque 10 ans, depuis le 19 octobre 1505 ! (N.d.T.)

7 Le roi a 35 ans de plus que sa deuxième épouse. (N.d.T.)

8 Toribio Medina, e. o. pp. 119-120 + 126-128. (N.d.T.)

– 12 – Dieu le veuille ! – après avoir accompli un exploit qui sera célébré…

— Que le Ciel le permette ! – s’exclama doña Ana en soupirant, avec l’angoisse de la femme aimante qui craint toujours le pire.

— Allons ! Nous avons déjà effectué des voyages plus difficiles et plus dangereux, ma sœur – dit Torres.

— Et nous voici, élégants et en bonne santé – termina Solís en riant. Trêve de peine. Sers-nous à boire car nous de- vons fêter le départ en pensant au retour.

— Oui, buvons – déclara Francisco de Torres, en faisant un signe d’assentiment.

Doña Ana servit le meilleur vin qu’elle avait dans la mai- son et les deux beaux-frères burent pendant que Solís expli- quait ses projets de départ.

— Demain, dès le lever du soleil, on dira à Santo Do- mingo une messe solennelle pour demander à Dieu des vents favorables et la meilleure fortune possible. J’ai choisi l’église de Santo Domingo parce que notre chapelain, fray Buena- ventura, appartient à cet ordre et qu’il appréciera ce choix, la préférence que j’ai accordée, tout particulièrement par rap- port aux franciscains… même si Dieu se trouve partout, comme il dit… Ainsi, nous partirons saintement, doña Ana, et tu attendras patiemment l’heure où nous serons à nouveau réunis… peut-être pour ne plus jamais nous séparer, car je

– 13 – veux te voir comme épouse du gouverneur des terres que nous allons découvrir9… — Hein, moi, épouse de gouverneur ! Je suis peu ambi- tieuse, ô mon mari, et je préférerais mille fois… Mais, on le sait, toi tu ne te contentes pas de peu de choses. Tu étais pi- lote principal, tu pouvais vivre heureux dans ta petite mai- son, avec ton commandement, et honoré ; tu as deux fils, qui sont comme deux petits anges, des revenus au-dessus de la moyenne ; tu m’as moi, qui me mets en quatre pour te ser- vir… Eh bien : non, seigneur, rien de cela n’était suffisant, rien ne te satisfait et tu as besoin de plus et, pour ce plus, inutile, tu mets en péril ta vie et, avec elle, mon bonheur et mon repos… — Chacun naît avec son étoile et je suis né pour réaliser de grandes choses – dit Solís –. Je n’ai encore rien fait si on le compare à ce que j’entreprends aujourd’hui… C’est écrit là-haut. Ce n’est pas de l’ambition : c’est mon destin. Doña Ana se tut, s’essuyant discrètement les yeux, et la conversation aborda d’autres sujets…

… Peu avant l’aube, les gens de la ville s’entassaient dans la vieille église de Santo Domingo, dont le grand autel resplendissait de lumière, se détachant dans la nef encore plongée dans les ténèbres. Étaient déjà présents : Solís, ses officiers, l’équipage des trois caravelles, de nombreux no- tables ; et les fidèles continuaient à arriver au point que toute la population se trouvait dans l’église lorsque commença

9 « Adelantado », Toribio Medina, pages CLXXXI + 64. (N.d.T.)

– 14 – l’office divin. Doña Ana était au premier rang entre son époux et son frère ; de part et d’autre, il y avait, en compa- gnie de l’alcalde de la ville et des autres autorités, le réparti- teur Pedro de Alarcón et le chargé de factorerie Francisco Marquina, en bonne santé depuis qu’ils avaient remis le pied sur la terre ferme ; derrière eux se trouvaient : les pilotes, le quartier-maître Diego García de Moguer, l’enseigne Melchor Ramírez10, le cambusier Martín García et, répartis dans des groupes correspondant à leurs affinités – mais tous recueillis – Rodrigo au visage ingrat, Paquillo fier de son costume de marin – même s’il pouvait en contenir deux comme lui – Montes, le Portugais, enrôlé comme gabier et futur inter- prète ; et d’autres dont l’Histoire n’a conservé que le nom : Jorge Gómez y Arbolancha11, Alejo Ledesma, Diego de Córdoba, deux camarades inséparables – mais qui se cha- maillaient toujours, appelés Pedro Núñez et Santiago Cor- zuelo – en l’occurrence la quasi-totalité des soixante membres de l’expédition, à l’exception des rares marins qui avaient dû rester de garde à bord des navires… La popula- tion, matinale et croyante, entourait les familles des marins originaires des environs immédiats ou de la ville même, comme le pilote Juan de Lisboa, de Lepe, et le pilote Rodrigo Alvarez, de Cartaya. Fray Buenaventura célébra l’office et, la messe terminée, donna la bénédiction aux fidèles agenouillés, qui inclinèrent leur front presque jusqu’à toucher le sol.

10 Toribio Medina, p. CCXCI. (N.d.T.)

11 Toribio Medina, p. CCXCII. (N.d.T.)

– 15 – Ils sortirent tous en procession du temple, se dirigeant vers le débarcadère, qui était situé à un peu plus d’une lieue de là et, même s’il y eut plus d’une femme qui pleura et plus d’un trouble-fête qui fit de sinistres prédictions, cela ressem- bla plus à un gai cortège qu’à de douloureux adieux. Le soleil avait fait son apparition et inondait les collines et coteaux, couverts de figuiers, d’orangers, d’amandiers et de vignes dont l’automne dorait déjà les feuilles.

Rodrigo Rodríguez, Montes et Paquillo qui, absorbés par une conversation animée, avaient pris de l’avance sur le cor- tège, s’arrêtèrent pour l’attendre à proximité de la côte. Une vieille gitane, accroupie à deux pas d’eux, les observait à la dérobée et regardait avancer la procession.

Ses pupilles brillaient comme des morceaux de jais et ses lèvres minces et décolorées maugréaient dans sa langue barbare. Ils ne firent pas attention à elle jusqu’à ce que la vieille bougonne à plus haute voix, au moment où passaient Solís, en compagnie de Torres et de doña Ana :

— Ojola na limbidia…

— Que dit cette sorcière ? – demanda Rodrigo.

La gitane lui lança un regard meurtrier et continua à maugréer ou à bougonner.

— Elle dit : « Celui-ci ne reviendra pas » – expliqua Pa- quillo qui, à Cadix, avait un peu appris le jargon de la gitane, grâce à ses relations haut placées.

– 16 – — Et pour qui dis-tu cela, dégingandée ? – s’informa Ro- dríguez, à la fois alarmé et curieux – Pour celui à la barbe ou pour celui qui chemine à ses côtés ?

La vieille ne cessa pas de marmotter et ne daigna pas davantage lui répondre cette fois-ci mais, alors que passaient à sa hauteur Martín García12 et Rodrigo Alvarez, elle répéta ses paroles sibyllines : — Ojola na limbidia. — Elle a, à nouveau, dit : « Celui-ci ne reviendra pas » – expliqua Paquillo. — Et toi non plus – souffla la gitane, en regardant Pa- quillo dans les yeux, tout en se mettant difficilement debout. — Il ne reviendra pas… mais qui ? Ils sont quatre : le capitaine général et son beau-frère, le pilote et le cambu- sier… Lequel d’entre eux ne reviendra pas, dis-tu ? La vieille femme s’éloignait déjà, en traînant la jambe, comme pliée en deux, et disant d’une voix de crécelle : — ¡Perele yaque dor charo y a cangue marele! — La sournoise demande qu’un éclair nous foudroie et elle m’a dit que je ne reviendrai pas – s’exclama Paquillo, mort de rire. — Malédiction de vieille folle. Cela entre par une oreille et cela ressort par l’autre – dit Montes philosophiquement. Laissons-la à ses divagations, d’autres se chargeront d’elle.

12 Toribio Medina, p. CClXII. (N.d.T.)

– 17 – — Eh bien, avançons – proposa Rodrigo. Mais, à vrai dire – poursuivit ce dernier, alors que les autres appro- chaient, je donnerais cher pour savoir qui indiquait la mau- dite sorcière… Ces engeances s’y entendent, par artifice du diable, en choses malignes, à défaut de pouvoir s’y entendre en choses bienveillantes, parce que Dieu ne leur en donne pas la permission. — Bah ! – s’exclama Paquillo avec toute la joyeuse con- fiance de son jeune âge. Ne pas revenir ne veut pas dire mourir… — Tes paroles sont d’or – dit Montes. Et d’autant plus si l’on songe que là où nous allons nous pouvons nous retrou- ver tellement riches. — Nombreux sont ceux qui ne sont pas revenus et ne reviendront pas de la Española13, de Cuba et d’autres îles où ils sont de grands seigneurs ou pas beaucoup moins… Ce se- rait un moindre mal, et même plutôt bien, si ce devait être notre cas – dit Rodrigo Rodríguez en faisant un signe d’assentiment. Le cortège avait atteint la marina et l’animation alla croissant mais ce n’était plus aussi gai qu’avant ; on prenait congé et il y eut des embrassades, des exclamations, des larmes, des bénédictions, de la tendresse, avec tous les cha- leureux débordements des épanchements andalous. — Je n’ai rien à rajouter, ma chérie – s’exclama Solís – Que Dieu te garde et préserve les enfants… Tu me verras re- venir et il te semblera que le voyage n’aura duré que le

13 Ancien nom de Saint Domingue. (N.d.T.)

– 18 – temps d’un éclair… Allons, pas de larmes et viens dans bras… Doña Ana l’étreignit frénétiquement contre sa poitrine et les sanglots lui coupèrent la parole. Elle trouva seulement la force de pousser leurs fils contre Solís et tous quatre formè- rent pendant un instant un groupe très serré.

La brise était fraîche et projeta quelques grains de sable dans les yeux du marin qui, tout en les frottant, entra d’un bond dans le canot.

– 19 – On remonta les ancres en un instant et les navires com- mencèrent à s’écarter du mouillage, glissant à peine à la sur- face de l’eau… Un souffle plus fort accéléra leur marche. Les caravelles virèrent l’une derrière l’autre et, avant que quelqu’un eût quitté la marina, elles avaient déjà gagné la mer, direction sud-ouest, suivies par les yeux et les pensées de tous ceux qui restaient sur la côte.

– 20 – XII

ENTRE MER ET CIEL

La journée était très belle, le vent favorable, la mer un immense manteau vert foncé ondulé par de légères et longues vagues. La proue orientée vers les Canaries, vers le sud-ouest, naviguant au large, le vent presque en poupe, on devait peu manœuvrer sur les caravelles et l’équipage se re- posait en profitant de la vie. Solís était descendu dans sa ca- bine, confiant le pont à son second, le pilote Juan de Lis- boa14 ; dorénavant on allait peu le voir, si ce n’était à l’entrée et la sortie du port éventuel, lorsqu’il désirait prendre per- sonnellement la direction et dans un cas difficile. Mais, ma- tins et soirs, on allait l’entendre quotidiennement héler les capitaines des autres caravelles, commandées, l’une par Francisco de Torres, secondé par le quartier-maître Diego García de Moguer, et l’autre par le pilote Rodrigo Alvarez. Porte-voix à la main et, après avoir écouté ces capitaines, Juan Díaz de Solís donnait ses ordres : en général, ils consis- taient simplement à continuer de cingler en naviguant de

14 Alvarez de Cartaya : voir chapitre 10. (N.d.T.)

– 21 – conserve durant le jour et, la nuit, à suivre la lanterne de la caravelle portugaise, qui dirigeait la marche. Dieu leur avait procuré la sécurité – comme disaient les Musulmans, et les jours suivants furent semblables à ce 13 octobre 1515, premier jour de voyage en haute mer, avec du vent frais et des éclaircies telles que rien ne perturba ja- mais la tranquillité de la navigation. Si du vif-argent n’avait pas coulé dans ses veines, Pa- quillo aurait pu se croiser les bras, non parce que la vie des mousses à bord fût alors enviable – car on considérait qu’ils étaient les domestiques de tout le monde – mais bien parce qu’il avait comme protecteur principal Rodrigo Rodríguez, l’homme du capitaine général, et comme second protecteur le gabier Enrique Montes qui, dès le début, avait pris beau- coup d’ascendant sur les autres marins. On disait également que les deux García – le quartier-maître, qui avait embarqué sur une des caravelles à voiles latines, et le cambusier qui était à bord de la caravelle portugaise – s’intéressaient au jeune garçon. Mais à tous ces facteurs positifs venait s’ajouter la volonté active de Paquillo qui, lors du quart de lavage du pont, empoignait gaillardement le faubert, asti- quait ensuite les cuivres jusqu’à les faire briller comme l’or dont il rêvait, grimpait jusqu’aux vergues comme un singe, escaladait le mât de beaupré comme s’il le chevauchait, utili- sait le gréement comme un escalier, se laissait glisser le long des haubans, faisait de chaque hune un balcon… Il était dis- posé à faire face à toute nécessité qui se présenterait et, tous les deux jours, il aidait à la répartition des rations, à raison d’une gamelle pour quatre hommes. Avec tout cela, il lui res- tait encore du temps pour se joindre aux groupes de marins oisifs qui racontaient des histoires, entonnaient des chansons populaires ou tapaient subrepticement la carte, jouant leurs

– 22 – rares maravédis et, à défauts, jusqu’à leurs propres vête- ments et, durant ces si périlleux exercices, Paquillo leur ser- vait habituellement de guetteur afin qu’aucun supérieur ne les surprenne – et particulièrement fray Buenaventura, qui considérait le jeu comme une chose diabolique – ou, pire, le pilote Juan de Lisboa, qui confisquait les jeux de cartes et in- fligeait des sanctions aux joueurs. Ce qui passionnait surtout le jeune garçon c’étaient les récits des vieux marins et il les écoutait bouche grande ou- verte. Tout ce qu’ils disaient était pour lui la pure essence de la vérité ; mais, à la suite d’un accord tacite et appuyés par les autres, ceux qui se croyaient les plus farceurs se char- geaient de raconter en présence du petit mousse les choses les plus invraisemblables et tirées par les cheveux ou de grossir et défigurer démesurément la vérité, rendant la mon- naie de sa pièce à sa crédulité, ce qui n’était pas payer bien cher son apprentissage. Oh ! d’après eux, le garçon allait bientôt voir les merveilles les plus extraordinaires que l’on puisse imaginer : des poissons qui étaient des oiseaux et qui volaient comme les hirondelles, des oiseaux qui étaient des poissons et qui, au milieu de leur vol, pfuit ! s’enfonçaient dans la mer et que l’on ne revoyait plus ; des chevaux marins qui faisaient des compétitions, disputant des courses de sauts effrénées autour des navires et qui, après en avoir à de nombreuses reprises fait le tour, finissaient par les laisser derrière eux, même s’ils naviguaient en ayant le vent en poupe ; des mers qui étaient de véritables prairies vertes, couvertes de rameaux et de grappes, peuplées d’insectes et d’oiseaux ; chose plus prodigieuse encore : la mer, la mer elle-même, en feu d’un bout de l’horizon à l’autre et brûlant jusqu’à proximité des navires, sans qu’ils s’enflamment, mais elle ne s’éteignait pas ; des hommes et des femmes qui par- laient et riaient, tout en étant submergés dans la mer, et qui – 23 – n’étaient pas des sirènes, parce qu’on peut les toucher de la main (les sirènes, on en parle sans que personne les ait vues en réalité) ; des étincelles qui s’arrêtent en haut des mâts, y restent immobiles, sans tomber ni faire de mal à personne ; des villes ou des ruines de cités que l’on voit au fond de la mer, lorsque les eaux sont très calmes ; des baleines comme des montagnes, dont les jets d’eau se perdent dans les nuages ; des requins tellement grands que, d’une bouchée, ils peuvent avaler un navire de taille moyenne…

— À propos, mais cela te concerne encore peu – dit San- tiago Corzuelo à Paquillo, ce que personne ne faisait habi- tuellement, afin que le garçon ne commence pas à se méfier. Toi, cela ne t’intéresse pas encore beaucoup mais Balboa15, qui est un de nos meilleurs capitaines, a découvert16 récem-

15 Voir « Notes du traducteur. »

16 Ce serait Juan Ponce de León. (N.d.T.)

– 24 – ment une fontaine17, qui a la vertu de rajeunir tous ceux qui s’y baignent quotidiennement ou boivent de ses eaux, et c’est la plus grande des merveilles que l’on ait trouvées sur ces terres. Étant donné que la Reine est inconsolable de ne pas avoir d’enfants, on dit que le roi Ferdinand va venir s’y tremper un de ces jours afin de rajeunir, et nous aurons alors un jeune roi pour de nombreuses années… C’étaient là les récits les moins fantastiques, nombre d’entre eux étant basés sur la réalité ; les autres étaient monnaie courante même s’ils n’étaient pas tout à fait faux. Et Paquillo ne les mettait pas en doute un seul moment ni ne se lassait de les entendre. Mais il tendait également bien l’oreille pour écouter les nouvelles que Rodrigo, en tant que domestique du capitaine général, découvrait avant qui- conque et qu’il communiquait à ses compagnons avec une autorité que tous reconnaissaient. — Si nous continuons à naviguer comme jusqu’à présent – disait-il, par exemple – nous allons nous retrouver soudain devant les Canaries, tant nous avons avancé… Nous ne res- terons pas longtemps dans ces îles : juste le temps nécessaire pour nous ravitailler en eau et embarquer des vivres frais parce que, au-delà, ce sont de longues cures de thon fumé et de pois chiches secs qui nous attendent… Car nous ne ferons plus d’escales avant d’atteindre des terres inconnues, après avoir laissé derrière nous la Castille de l’Or ou, comme d’autres l’appellent, la Côte d’Or de Colomb18…

17 … de Jouvence. (N.d.T.)

18 Rappelons tout de même que l’on contesta certaines de ses découvertes entre, au moins, décembre 1512 et février 1513. Toribio Medina, pp. 101-106. (N.d.T.)

– 25 –

— Je connais ces terres – dit le Portugais – Il suffit de se baisser pour récolter les métaux précieux en abondance. — Si ce miracle est vrai – s’exclama Pedro Núñez avec des yeux brillant de convoitise – il vaut mieux aller vivre là- bas qu’en n’importe quelle autre partie du monde. — Bien sûr que ce miracle est vrai ! – répliquait Rodrigo – J’en veux pour preuve le fait que, quelques années plus tard, Don Diego de Nicuesa19 en a ramené avec lui et de nombreux autres ont regagné l’Espagne chargés d’or, en n’ayant eu rien d’autre à faire que de dire aux indiens des mines : « Passe-moi ça ! » ou de sacrifier quelques perles de verroterie afin d’en obtenir tout un sac de véritables.

19 Conquistador espagnol, fondateur en 1510 de la ville de Nombre de Dios dans l’isthme de Panama. (N.d.T.)

– 26 – En entendant de tels prodiges, les cheveux se dressaient sur la tête de Paquillo et un frisson le parcourait de la tête aux pieds.

— C’était sur les terres que gouverne aujourd’hui Pe- drarias Dávila20 – poursuivait tranquillement Rodrigo.

— Mais, et ceux qui ne sont pas revenus ? – objecta Ale- jo García, qui n’était pas l’un des plus optimistes.

— Balivernes ! Ceux qui ne sont pas revenus, ne sont pas revenus parce qu’ils sont morts, et ils ont trouvé ici la paix et connaîtront ensuite la gloire ; ou il y a les insatiables, comme les hydropiques, qui continueront à accumuler des richesses jusqu’à ce qu’ils en crèvent sans en avoir profité ; et ceux qui se trouvent bien parmi les Indiens et les In- diennes, comme le Grand Turc dans son sérail… Grand bien leur fasse ! Nous ne devons nous occuper des premiers que dans nos prières et peu nous importe que les autres en profi- tent à leur manière qui, sacrebleu, n’est pas mon choix… Bref, comme je vous disais, Pedrarias Dávila a mené là-bas un grand nombre de gens et il n’est pas un homme à qui il faut chercher des poux sur la tête ; si nous faisions une appa- rition sur ses terres, à l’improviste, sans lui demander sa permission, comme des mendiants à l’heure du repas, il se- rait capable de lâcher sur nous ses chiens et de nous recevoir à coups de bâton, si pas d’arquebuse… Mais peu nous im- porte ! Il y a assez de terres riches comme celle-là, ou plus riches que celle-là, qui nous disent « prends-moi » et où il n’y a pas d’épouvantail…

20 Pedro Arias Dávila. (N.d.T.)

– 27 – — Dis tout de suite lesquelles, c’est bon à savoir ! – s’exclama Pedro Núñez. — Par exemple, les terres où nous nous rendons – rétor- qua Rodrigo. — Et beaucoup d’autres – ajouta Montes, qui, pour le ti- tiller, demanda au curieux : — Ne serais-tu pas apparenté à Vasco Núñez (de Balboa) ? — Non, pas que je sache. — Vérifie-le bien, car cela pourrait te rapporter gros – déclara Rodrigo, en jouant le jeu –. De tels proches sont un bon soutien et cela ne devrait pas coûter trop de peine… Pendant deux ans, Vasco Núñez de Balboa, chevalier de Je- rez, celui de la fontaine qui rajeunit, a traversé l’isthme à proximité de la Castille de l’Or, car ce n’est ni une péninsule, ni une île, ni un continent, mais bel et bien un isthme et rela- tivement étroit… C’est ce qu’a constaté ton parent, après avoir triomphé de mille périls, lorsqu’il est soudain tombé sur une grande mer qui le baigne au couchant, s’étendant vers le Nord et vers le Sud, aussi loin que portent les yeux depuis une grande hauteur. — Mais même s’il était apparenté à moi, quel profit en tirerions-nous ? – demanda Núñez, prenant la mouche suite à la malice. — Tu verras bien. Vasco Núñez n’est pas revenu qu’avec la nouvelle de la découverte de cette mer où, dit-on, il s’est plongé jusqu’au cou, avec son habillement et ses armes, sans retirer ne fût-ce que ses bottes, en prenant possession au nom du Roi, notre seigneur. Il est revenu avec davantage d’or, de perles et de bijoux, mais, s’il y en avait beaucoup, il aurait pu mettre des années pour rassembler l’équivalent des

– 28 – richesses que l’on trouvait à son point de départ : on y foulait aux pieds des pierreries et des pépites grosses comme des courgettes, on y escaladait des dunes de sable aurifère, au point que l’on finit par dire : « Assez ! » et, à genoux, on sup- plie Dieu et les saints pour un lopin de terre où planter un chou…

L’ahurissement des auditeurs et, surtout de Paquillo, était indicible, car même si les plus âgés savaient combien il faut ramener à un niveau plus bas ce genre de narrations, d’autres, analogues, leur avaient percé les oreilles et avaient aiguisé leur convoitise. Nuñez insista pourtant : — Mais, seigneur, je le répète : à quoi cela nous avance- t-il ? Rodrigo baissa la voix en répliquant :

– 29 – — Comment cela : « à quoi cela nous avance-t-il » ? Eh bien cela nous avance à beaucoup, parce que, avec nos mains vierges de toute richesse, c’est à bord d’embarcations que nous nous rendons au même endroit que Vasco Nuñez et qu’il n’a pu, lui, gagner que par voie terrestre et au prix de mille dangers et de mille transpirations. Un ah ! étouffé s’échappa de plusieurs poitrines et Ro- drigo l’attribua à l’admiration qu’éveillait son éloquence. — Il existe un passage, cela ne fait pas de doute, plaise à Dieu ! Avec mes oreilles pécheresses, je l’ai entendu de la bouche de notre maître, qui en sait plus que l’enchanteur Merlin. Et c’est vers ce passage que nous cinglerons par une route, en laissant derrière nous les Canaries. La fièvre d’ambition des marins sembla monter d’un cran, même si elle était bien forte. Leurs yeux brillèrent mais ils restèrent un instant silencieux. Paquillo, hébété, ne par- venait pas à bouger et il sentait sa gorge nouée. Les mains de Pedro Nuñez, en proie à une agitation extrême, tremblaient. Et Rodrigo Rodríguez, jubilant de voir l’auditoire suspendu à ses lèvres, en rajouta une couche : — Il me semble déjà voir la caravelle portugaise et les deux autres navires, chargés à ras bords de tous ces trésors que cache la mer ou que recèle la terre et qui, là-bas, sont à portée de la main – dit-il. Et je ne dois pas être loin du compte car si Balboa, en se déplaçant à pieds – puisqu’il ne lui restait plus de chevaux – et accompagné seulement de quelques porteurs indiens, a ramené en Espagne ce qu’il y a ramené, que ne ferons-nous pas, nous qui sommes nombreux et qui disposons de trois navires tels que chacun d’eux peut charger plus que les dos bruns de mille Indiens, fussent-ils des colosses ?…

– 30 – — Mais avec quoi Balboa est-il revenu ? – demanda Nu- ñez. — Comment cela, « avec quoi Balboa est-il revenu » ? Il me suffit de te dire qu’à lui seul le cinquième du Roi était une véritable fortune, et le reste… c’était quatre fois autant. — Mais à combien cela équivalait-il ? — De fortes sommes en maravédis ou en doublons d’or, et contente-toi de cela, car je ne connais pas par cœur les chiffres arabes… Tu as donc une idée de notre bonne for- tune… — Le tiers de ce que nous ramènerons au terme de ce voyage nous reviendra – fit observer Fuentes. — Le tiers, oui, après avoir retiré le cinquième royal, que prélèveront en son nom les officiers royaux, ces infortunés Alarcón et Marquina, s’ils ne meurent pas avant, car c’est pour le prélever qu’ils sont venus avec nous, pour leur mal- heur,… Ce tiers sera réparti par le capitaine général en per- sonne et à sa convenance ; s’agissant d’un tel maître, il va sans dire que ce sera de façon juste, au prorata des mérites de chacun. Et ce, sans nous faire payer notre part dans les frais… — Quelles montagnes d’or on a dû dépenser ! – s’ex- clama Paquillo. — Des montagnes d’or, comme tu dis, gamin – affirma Rodrigo. Rien qu’en biscuits – et Martín García, le cambusier, présent, ne me démentira pas – nous en avons à bord pour pas moins de dix mille réaux, soit trois cents quarante mille maravédis, si je calcule bien. — Allons donc ! – murmura le garçon, soufflé. – 31 – — En vin, nous en avons pour trois mille arrobes21 ; comme cette année, il était bon marché, on l’a eu pour seu- lement cinq mille trois cents réaux, c’est-à-dire, plus de cent quatre-vingt mille maravédis… Même si les outres se dessè- chent – nous achèverons de les remplir aux Canaries – à rai- son de deux chopines quotidiennes par tête pour les soixante hommes embarqués sur les trois navires, nous aurions de quoi nous arroser le gosier pendant plus de trois ans. — Crois-tu – demanda Montes – que le voyage durera aussi longtemps ? — En aucun cas. Mais le capitaine est un homme pré- voyant que l’on ne prend pas de court, et il n’a pas pensé qu’à la soif, même si elle lui importe beaucoup – ajouta Ro- drigo en souriant avec son énorme bouche. Comme man- geaille, nous avons à bord : vingt vaches salées ; près de mille réaux de viandes fumées ; autant de fèves et de pois chiches ; pour huit mille maravédis de poisson séché ; dix mille de fromage ; outre des tonneaux de miel, trois mille quintaux d’huile et d’autres produits nécessaires pour la cui- sine. Paquillo avait le vertige en essayant d’imaginer les sommes fabuleuses investies et en se demandant où on avait pu arrimer un aussi colossal chargement de victuailles. Il avait la bouche tellement bée que plus aucune exclamation ne franchissait le seuil de sa gorge ; en revanche, les yeux lui sortaient des orbites. Et son admiration ne décrut certes pas en entendant les salaires respectifs : les pilotes gagnaient au moins deux mille maravédis mensuels, un peu plus que

21 Équivalant à 16 litres. (N.d.T.)

– 32 – l’enseigne Melchor Ramírez ; les quartiers-maîtres mille, les marins neuf cents, les charpentiers et artilleurs sept cents cinquante, les mousses – lui excepté – six cents, et les do- mestiques de Alarcón et Marquina quatre cents ; cela, sans compter la part de ce que l’on découvrirait et qui devait re- venir à chacun d’eux. — Et, au niveau des armes22, comment sommes-nous équipés ? – s’informa Alejo Garcia, imaginant et redoutant peut-être de possibles combats. — Aussi bien – répondit Rodrigo Rodríguez, fier de ses informations. Chacun des navires transporte deux des six couleuvrines que l’on a achetées à Juan García de Uribarri23 de Guipuzcoa ; et la caravelle portugaise, comme vous le voyez, est en outre équipée des deux bombardes vendues par le même à raison de vingt-cinq ducats chacune. Afin que ces bouches puissent cracher le feu jusqu’à ce que les In- diens demandent grâce, on a à bord huit barils de poudre d’un quintal chacun, achetés à Antón Cermeño24 pour vingt mille maravédis tout ronds, parce que cet usurier s’est fait payer les casques deux réaux pièce. À titre d’armes person- nelles, en-dehors des arquebuses, arbalètes, haches, épées et autres, nous emportons en outre soixante corselets et les armures de tête correspondantes. Ainsi, lorsque nous débar- querons, nous ressemblerons à des rois.

22 Voir « Notes du traducteur ».

23 8 septembre 1515 ; Toribio Medina, p. 167. (N.d.T.)

24 30 août 1515 ; Toribio Medina, p. 165. (N.d.T.)

– 33 – — J’ai entendu dire – objecta Montes – qu’il y avait quatre bombardes, et pas achetées mais prêtées par la Casa de Contratación25. — Tu vas comprendre ! – répliqua Rodrigo. À l’approche du départ, il est apparu qu’il ne restait plus de telles bom- bardes à la Casa26 – ou que ces messieurs de Séville, qui dé- testent le capitaine, n’ont pas voulu les lui prêter – et il a fal- lu les acheter à Uribarri, de Guipuzcoa. — Mais qui va jamais réunir autant d’argent ! – s’ex- clama Paquillo, le nœud d’étonnement qui étranglait sa gorge étant défait. — Chuuut ! – dit dédaigneusement le domestique du ca- pitaine. Même si nous ne trouvions pas de mines, ce que nous récupérerons suffirait à nous dédommager. Songe que pour un simple hameçon ou un petit couteau de rien du tout, les Indiens donnent volontiers six poules ; pour un petit mi- roir en mauvais état ou une paire de ciseaux, ils donnent un poisson suffisamment grand pour nourrir à satiété dix per- sonnes ; pour un grelot, ce qu’on leur demandera… Pedro Antúnez, lors de l’un de ses voyages, a obtenu six poules pour le roi de denier27 de cartes dépareillées qu’il avait… Nous, pour le troc, nous apportons des petites haches, des couteaux, des machettes, pour lesquels ils donneront leur

25 27 mars 1512 + 24 novembre 1514 + 27 juillet 1515 ; Toribio Medina, pp. CCXXXVIII + 116 + 136 + 139 + 151-152. (N.d.T.)

26 8 septembre 1515 ; Toribio Medina, pp. CCXLII + CCXLIV. (N.d.T.)

27 Jeu de Tarot. (N.d.T.)

– 34 – poids en or de bas aloi ou en or extrêmement pur, car pour eux c’est la même chose ; et que dire des aiguilles, des ha- meçons, des peignes, des miroirs, babioles qui ne valent pas un sou mais qui sont de véritables bijoux pour ces innocents. Ils sont pris de folie à la vue de grelots ordinaires et des ron- delles de laiton ; les verroteries sont pour eux mieux que des diamants, les petits miroirs des objets magiques ; pour les trompes turques ou les simples cornes, ils sont capables de donner leur femme, leurs enfants et tout ce qu’ils possèdent en prime… Et ne parlons pas des bonnets rouges, ni des toques à plumes, car seuls les rois très puissants peuvent songer à en posséder… Mais cela n’est pour nous qu’un lot de consolation, si nous ne rencontrons pas les montagnes d’or qu’il y a de tous côtés et que seule une malchance très noire s’acharne sur nous. Les marins rêvaient et, sous le charme de la vision de la fortune, ils n’avaient pas remarqué le chapelain qui les écou- tait depuis un bon moment, presque intégré au groupe. D’un autre côté, sa présence ne les aurait pas fait taire, parce que fray Buenaventura avait su gagner leur bonne volonté et leur confiance. Son visage maigre, son teint jaunâtre à cause des fièvres contractées à la Española, lui donnaient, c’est vrai, une ex- pression ascétique, presque sombre ; mais cette sévère aus- térité disparaissait dès que s’ajoutaient, à l’éclat de ses yeux passionnés, sa parole chaleureuse, son sourire, sa familiarité affable. La vie à bord devait lui être plus agréable que le con- traire car il était, sur le navire comme chez lui et la compa- gnie des humbles était fort de son goût au point que, ayant une place à la table du capitaine général, à plus d’une re- prise, il descendait au pont inférieur afin de partager la pi- tance des marins ; disons au passage qu’il n’y perdait pas

– 35 – beaucoup, parce que l’ordinaire de Solís était loin d’être digne de Lucullus. Ces hommes craignaient au début ses « sermons », mais fray Buenaventura était un vétéran des Indes, il avait longtemps accompagné son maître et amigo, le grand fray Bartolomé de las Casas, et il savait leur parler de choses qui les intéressaient, parsemées d’anecdotes pitto- resques qui étaient reçues avec un véritable plaisir dans la monotonie de la navigation où, si souvent, une seule heure pèse autant que quatre, et plus… Mais ce jour-là, il voulut prêcher un peu :

— Grands enfants, hommes candides mais cupides ! – dit-il. Vous ne savez voir que l’or et les richesses. Il vous dé- vore et provoque la terrible soif des choses matérielles… Je ne veux pas vous réprimander parce que vous le faites sans penser au péché… Mais rappelez-vous que l’homme ne vit pas seulement de pain et donc ne recherchez pas que le pain… La main de Dieu, mes fils, sachez-le une bonne fois pour toutes, vous amène à réaliser des exploits encore plus grands que ceux dont vous rêvez dans votre fièvre, c’est-à- dire de gagner de nouvelles âmes pour le Ciel…

— Nous avons droit à un petit sermon – murmura Rodri- go.

— Un petit sermon, oui, fripon ! – dit en souriant fray Buenaventura, qui l’avait entendu. Et il poursuivit : — Comme vous, vos fils, vos petits-fils, de nombreuses généra- tions peut-être, suivront vos traces vers des trésors trom- peurs ; ils vivront cette même aventure sans remarquer que, si le démon de la cupidité les entraîne, c’est avec la permis- sion de Dieu, instrument de ses hauts desseins, afin de réali- ser des choses mystérieuses que l’esprit humain n’ap-

– 36 – préhende pas encore mais qui serviront à la gloire du Sei- gneur… L’esprit matérialiste des marins ne comprenait pas bien les paroles de fray Buenaventura mais, par bonheur, au même instant, la cloche de poupe annonça sept heures. — Allons prier, mes fils, c’est l’heure ! – s’exclama le chapelain, interrompu au milieu de son discours. Il gagna l’échelle pour monter sur le pont-abri, les ma- rins de l’entrepont le suivant ; les autres se joignirent à eux. Les officiers occupèrent leurs places, derrière Solís, tous s’agenouillant. Fray Buenaventura entonna d’une voix cha- leureuse le salve vespéral et la prière se diffusa dans les airs, sous forme d’ondes sonores, sur la mer tranquille.

– 37 – XIII

LE « GOLFO DE LAS YEGUAS »

Tous les matins, au lever du jour et à la tombée de la nuit, les caravelles de Torres et d’Alvarez28 manœuvraient pour se rapprocher de la caravelle portugaise, lorsque le vent et la mer le permettaient, afin de pouvoir converser avec le capitaine général. Grâce au temps paisible, les navires pou- vaient approcher comme s’il s’était agi de passer à l’abor- dage ; et Paquillo, qui observait la manœuvre, ravi, s’ef- forçait de comprendre et d’apprendre le jeu combiné des

28 Juan de Lisboa ; voir chapitre 10. (N.d.T.)

– 38 – agrès et du gouvernail. Et lorsque les trois navires navi- guaient bord à bord, imitant les dauphins avant qu’ils entre- prennent leurs courses vertigineuses jalonnées de sauts, les pilotes sur le pont empoignaient les porte-voix, faisaient leur rapport à Solís puis évoquaient brièvement les événements mineurs à leur bord. Tous étaient fort satisfaits de la merveil- leuse tranquillité d’un voyage sans incidents, placide et pro- metteur comme on n’en avait jamais vu ; ce qu’ils ressen- taient, c’était non seulement de la confiance mais de l’assurance et cela les soulageait. Le seul point noir – le mal de mer du répartiteur et du chargé de factorerie – était plus comique que menaçant ; sournoisement, les pilotes deman- daient matin et soir à Solís : — Comment se portent vos malades ? — Aussi mal que hier. Mais ce n’est pas mortel. — Comment les soigne-t-on ? – demandait Torres. — Fray Buenaventura leur conseille de dormir à l’ombre d’un arbre. — Comme le mât d’artimon ! – et Torres éclatait de rire. Tous les auditeurs riaient également aux dépens des in- fortunés malades, dont la mésaventure constituait le sujet de plaisanterie du moment à bord. Paquillo se tordait littérale- ment de rire et ses convulsions ne prenaient fin que lorsque la caravelle portugaise se remettait à avancer gaillardement et que les deux autres navires réduisaient leur allure, jusqu’à reprendre leur place dans la file derrière la lanterne que ve- nait d’allumer en poupe la première, afin de naviguer ainsi au milieu des ténèbres de la nuit, en étant certaines de ne pas être séparées.

– 39 – Messieurs les officiers de Son Altesse n’étaient pas au courant de cela et ça ne les intéressait pas. Hommes de bu- reau et de la terre ferme, le premier tangage imperceptible de la caravelle portugaise sur le Guadalquivir avait déjà sapé toute leur énergie. Il va sans dire que, une fois en haute mer, ils avaient contracté le mal de mer : ils semblaient sur le point de rendre le dernier soupir, les yeux leur sortaient de la tête, qui faisait mine de se séparer de leur tronc, leurs os étaient moulus, leurs muscles endoloris, leur estomac en vio- lente rébellion, leur ventre sans frein ; leur bouche amère était seulement capable d’exprimer des « cela suffit » et des « aïe »… Étendus dans l’obscurité sur leurs grabats, voyant la mort proche et certaine, incapables de mouvoir un membre, leur tremblement et leur transpiration augmen- taient dès que quelqu’un s’approchait d’eux car, à leurs yeux, tout être vivant était un bourreau qui allait les torturer. Le gros Marquina, le maigre Alarcón, Marquina le bon vivant, Alarcón le taciturne, étaient logés à la même enseigne parce que – la mort rendant tous les êtres égaux – le contexte les avait remis au même niveau, pas en matière de poids – même si Marquina avait perdu en quelques jours de nom- breuses livres qu’Alarcón n’avait pas gagnées – mais au ni- veau du caractère et de la pensée, l’un étant renfrogné et l’autre affligé. Et le pire était que, lorsque fray Buenaventura – qui faisait office d’apothicaire, en utilisant quelques con- naissances pratiques acquises lors de ses voyages – allait leur rendre visite dans l’exercice de cette fonction et de celles de chapelain, en apercevant ses habits, les malades croyaient leur dernière heure venue et considéraient qu’il était résolu non seulement à les confesser mais à leur donner l’extrême-onction et à bénir leurs corps misérables, avant qu’on ne les jette à la mer par-dessus bord…

– 40 – — Mon père, je me meurs ! Je me meurs, mon père ! – murmurait Alarcón, défaillant – Mais, par la Sainte-Vierge, ne nous approchez pas !… Par les clous du Christ, ne me touchez pas !… Tout mon pauvre corps est une plaie ! Une telle plaie n’existait que dans l’imagination du ré- partiteur ; le dominicain riait pour lui donner du courage et, en voyant que tous ses efforts étaient complètement inutiles pour lui faire prendre l’air, il essayait de lui faire avaler une potion de sa composition, remède – selon lui – merveilleux et infaillible contre le mal de mer. Mais, avec cela, les transes s’aggravaient : parce que si le frère parvenait à ce que le ma- lade avalât un peu de son breuvage, la révolution immédia- tement provoquée mettait en péril la sainteté de ses habits, car il jaillissait aussitôt de la bouche de cet homme grave et rigide, comme de celle d’un ivrogne, outre quelque chose d’un peu plus liquide, des jurons et des blasphèmes, aux- quels succédaient, comme un acte de contrition, des sup- pliques, des prières, des râles et des sanglots, jusqu’à la dé- faillance et l’engourdissement finals. Alarcon, homme sobre, était épouvanté de voir tout ce qu’il avait gardé dans sa cage thoracique, et Marquina, qui avait toujours été glouton, se voyait irrémédiablement réduit à l’extrémité, phénomène inouï, où tout aliment lui répugnait et où il était en proie à une soif insatiable, mais la pire des soifs, la soif honteuse, le besoin d’eau pure… — Je suis un homme à l’eau – était-il parvenu à murmu- rer lors d’un intermède comique de son abêtissement. Et, pour tout potage, de temps à autres, il mordait dans des citrons que fray Buenaventura lui avait apportés, en der- nier recours, en le voyant réticent à l’encontre de ses prodi- gieux médicaments.

– 41 – Heureusement pour les deux « hors service », comme les appelait avec dédain Rodrigo Rodríguez – les officiers royaux n’avaient jamais été appréciés des équipages car ils les con- sidéraient pires que le chien du jardinier, sans doute parce que, au contraire de ce dernier, ils avaient l’habitude de « se repaître » –, leur mal ne tarderait pas à être apaisé, puisque les caravelles approchant à toute voile des Canaries, ils pourraient y bénéficier de la bienfaisante « ombre de l’arbre » conseillée par le dominicain.

— Ce ne sont pas des hommes mais des souches – ra- contait le même Rodrigo, qui allait les voir et s’informer de leur santé sur ordre du capitaine général. — Ce serait bien de leur appliquer ce que l’on fait habi- tuellement aux galériens et à certains mousses qui n’ont pas de cœur au ventre – disait la brute de Corzuelo. Leur passer un filin sous les aisselles, les plonger une demi-douzaine de fois dans la mer… et ce serait réglé. C’est prouvé…

– 42 – — Vous verrez – ajoutait Núñez – vous verrez que lors- qu’il s’agira de prélever le cinquième du Roi et de surveiller les trocs, pour nous retirer le pain de la bouche, ils seront frais comme des gardons et se distingueront plus que le Cid ! Que la peste les étouffe ! Les mâts crissaient délicatement, le vent sifflait en s’échappant des voiles gonflées, l’eau susurrait en glissant en légers jets d’écume le long des coques et les navires tan- guaient gaillardement en fendant les flots comme des pou- lains au galop. Il ne fallait presque pas se préoccuper de la manœuvre et quelques marins tuaient le temps à jouer en cachette au Lansquenet, au Triomphe à renvi ou au truque29, bien que le pilote Rodrigo Alvarez, chargé de la police à bord, leur eût déclaré une guerre ouverte et confisqué plus d’un jeu de cartes. Au fond du casier de l’un ou l’autre, il échappait toujours à ses perquisitions les misérables « cartes de figure ovale, car, à force de servir, leurs coins s’étaient usés, et, pour les faire durer davantage, on les avait écorniflées et mises en cet état », ancêtres de celles avec lesquelles, près d’un siècle plus tard, Rinconète et Cortadillo30 allaient plu- mer le muletier. Rodrigo Rodríguez, mettant à profit un mo- ment favorable, parla à Solís, la mine contrite de telles con- fiscations, et ce dernier, en bon maître, compatissant à la faiblesse humaine, tempéra sagement le zèle de son second. — C’est bien de faire respecter les ordonnances et d’empêcher le jeu – lui dit-il – mais toute attitude extrême

29 Jeu de cartes avec vades et envis. (N.d.T.)

30 Cervantes, dans Nouvelles exemplaires. Voir aussi « Notes du traducteur ». (N.d.T.)

– 43 – est à proscrire. Il faut pouvoir tolérer les inclinations qui ne causent pas de grand préjudice. L’homme est un grand en- fant et on doit lui permettre l’une ou l’autre distraction. Quel soldat, à terre, n’emporte pas de cartes sur lui ? Combien de fois n’a-t-il pas joué jusqu’à son épée ou ses vêtements ? Ce- la ne l’empêche pas d’accomplir son devoir, le moment venu. Je dis que c’est aussi valable pour les gens de mer. Allons ! Je ne vous en donne pas l’ordre mais vous conseille de fer- mer un peu les yeux tant que nos hommes ne manquent pas à leurs devoirs et qu’il n’y a pas de scandale. Fray Buenaventura assistait à la conversation et fit re- marquer que le jeu était un péché, même si ce n’était pas un péché mortel, et qu’il convenait de l’éviter. — L’éviter ? – s’exclama Solís – S’ils ne jouent pas aux cartes, ils joueront avec les poux sur leur chemise. C’est ce que l’expérience nous apprend, mon père ! Alvarez se le tint pour dit, ferma les yeux et alla jusqu’à oublier négligemment les cartes déjà confisquées à portée de leurs anciens propriétaires ; mais il avertit qu’il punirait avec rigueur toute négligence dans le service. Et tout se passa bien, avec un équipage joyeux, insouciant et en bonne santé – à l’exception des malheureux affectés par le mal de mer – sans autres péripéties que les continuelles disputes entre Pe- dro Núñez et son inséparable Santiago Corzuelo, faisant par- tie des divertissements et des festivités sacramentelles du bord. Et un matin où Paquillo passait comme d’habitude le faubert sur le pont récemment couvert à grande eau, il fut surpris de voir, là-bas en haut et au loin, côté proue, un nuage triangulaire, très blanc, qui restait immobile au milieu du ciel. Depuis la hune, la vigie avait, dès l’aube, déjà an-

– 44 – noncé le voir et ce qu’il signifiait, mais le mousse ne l’avait pas entendu parce qu’il n’était pas encore de quart. Il conti- nua donc à sécher le pont mais, à chaque instant, il tournait les yeux vers l’étrange nuage, régulier et fixe comme il n’en avait jamais vu. Et il se creusait la tête, cherchant une expli- cation à ce phénomène. — Ce doit être une de ces nombreuses choses épouvan- tables qui abondent sur ces mers – finit-il par se dire. Rodrigo Rodríguez était tout près, paressant, et le mousse l’interpella : — As-tu vu ce gros nuage ? Que nous annonce-t-il ? Rien de bon, n’est-ce pas ? — Bien sûr que je l’ai vu et cela fait un moment que je le regarde – répondit Rodríguez. Eh bien… il nous annonce que, d’ici peu, nous ne tanguerons plus ainsi… — Veux-tu dire que nous aurons du mauvais temps, qu’il faudra changer de direction en essuyant une tempête ? – demanda Paquillo fort intéressé car, depuis le départ de Lepe, il désirait et redoutait de voir la mer agitée, rompant le monotone calme plat qui accompagnait les caravelles comme une bénédiction de Dieu. Rodrigo dissimula un sourire et répondit : — Tu es un bon augure, il n’y a pas à dire ; le gros nuage en question est un présage, et de ceux qui ne trompent ja- mais. Sur ce, s’approchèrent Santiago Corzuelo et Pedro Núñez, qui venaient de monter du pont inférieur et qui navi- guaient pour la première fois sous ces latitudes. En regardant dans la même direction que lui, ils furent également stupé- – 45 – faits de voir ce nuage dense d’une forme aussi extraordi- naire. Comme ils avaient entendu le mot « présage », ils s’alarmèrent, bien sûr, et leur imagination superstitieuse les fit penser à des dangers proches et, avant tout, à une terrible tempête, qui leur venait droit dessus. Le pilote, qui passait près du groupe, les rappela à l’ordre : — Que faites-vous là à gober des mouches ? Avez-vous des domestiques qui vous servent et vous apportent tout cuit ? Allons ! Que chacun retourne à son travail car le navire ressemble à un dépôt d’ordures ! Il avait raison. À part les endroits très visibles, la négli- gence et la saleté régnaient à bord, menace pour les grandes chaleurs à venir, au-devant desquelles ils allaient : l’entrepont sentait mauvais ; au pont inférieur, l’atmosphère était lourde et nauséabonde, l’eau ayant suinté dans la sen- tine qui commençait à dégager des bouffées de mauvaise ha- leine lorsqu’on ouvrait les écoutilles ; et les ordures s’amon- celaient dans les recoins malgré les ordres d’Alvarez, exécu- tés en apparence : elles étaient balayées rapidement et su- perficiellement. Mais avant d’entamer un nouveau simulacre de nettoyage, les marins voulaient en avoir le cœur net en ce qui concernait le présage. — C’est que… nous regardions ce nuage… et il n’augure rien de bon, capitaine – dit Núñez. — Que me viens-tu avec ton nuage, triple buse ! N’as-tu pas les yeux en face des trous, requin de comédie ? Ne vois- tu pas que c’est une montagne ? Ne vois-tu pas que c’est le pic du Teide ? Et il s’en alla en criant : — Allons ! Remettez- moi le pont inférieur dans un état acceptable et que je ne re- voie plus cette porcherie !

– 46 – — Au travail, les lavettes ! – s’exclama en riant Rodrigo Rodríguez, qui était exempté de ces corvées. — Avant cela, je voudrais savoir ce que c’est pour un pic que ce Teide ! – dit Núñez, faisant sa mauvaise tête. — Le pic du Teide… Tu ne sais pas, tête de bois, ce qu’est le pic du Teide ? – demanda Corzuelo avec un air de supériorité. — Toi non plus ! — Comment cela, je ne le sais pas ? Je l’ai su. — Dis-le, alors, monsieur-je-sais-tout ! — Je n’ai pas envie. — Eh bien tu es un foutriquet et un hurluberlu, voilà ce que tu es !… — Me traiter d’hurluberlu, moi, pardieu ! Répète-le, si tu veux que je te fasse avaler ta langue. — Dis, d’abord toi, que tu ne sais pas ce qu’est ce pic, car si tu ne le dis pas c’est que tu parles à tort et à travers. — Du calme ! – dit Rodrigo – Le Teide est le pic de Te- nerife.

– 47 – — Je l’avais sur le bout de la langue ! – s’exclama Cor- zuelo. — Tu mens. Tu ne le savais pas ! – vociféra Núñez.

— Moi, je mens ? Enfer, oser dire que je mens ! Tu vas voir… Mais les autres s’interposèrent et il n’y eut pas de pugi- lat, cette fois non plus. — Si c’est le pic de Tenerife – dit Paquillo – je com- prends pourquoi tu me disais que nous cesserions bientôt de tanguer… Dans peu de temps, nous jetterons l’ancre et sau- terons à terre… — Dans peu de temps ?… Si nous arrivons avant trois jours, je m’estimerai bien chanceux. — Allons ! Comme si la « Portugaise » progressait à la vitesse d’une tortue ! — Même si elle était une galère royale avec les cent meilleurs rameurs sous le fouet du garde-chiourme, nous ar-

– 48 – riverions, au mieux, dans quarante-huit heures… – insista Rodrigo. — Il est si loin ? — Pardi ! À quelque deux cents milles. Le mont est tel- lement haut qu’il se perd dans les nuages et, comme vous le voyez d’ici avec sa couleur blanche et un peu cendrée, la neige est éternelle à son sommet, toute l’année ! — Ce Teide serait donc, aux montagnes, ce que la ca- thédrale de Séville est aux autres tours, mais moins effilé – observa Paquillo. — C’est une bonne comparaison – admit Rodrigo. Et Dieu nous y amène comme en nous tenant par la main, ce dont nous devons lui rendre grâce… Quel temps idéal ! — Ce n’est pas toujours le cas ? — Jamais ! Ces eaux qui nous bercent pour le moment, aussi inoffensives que celles du Guadalquivir, portent le nom maléfique de Golfo de las Yeguas parce que, dans le meilleur des cas, elles déferlent et bondissent comme des poulains s’emballant ; ou bien elles bouillonnent ; également parce que les navires, transportant aux Canaries des chevaux ou des vaches ont transformé en ossuaire le fond de la mer avec les animaux qui ont succombé à l’effroyable roulis et qu’il a fallu jeter par-dessus bord. — Et les chrétiens ? — Ceux-là ne meurent pas, même s’ils sont chargés de factorerie ou répartiteurs mais, comme des chargés de facto- rerie ou des répartiteurs, ils dégueulent au point de rester sans entrailles, desséchés, anéantis, et devenant comme des

– 49 – harengs saurs pour peu que la mer se moutonne et entame une danse mauresque… — Dieu m’en préserve ! – s’exclama Paquillo. Mais moi je ferais en sorte que rien ne ressorte, même si ne s’agissait que de pois chiches durs comme de la pierre et de thon sé- ché. — Qu’il en soit selon les vœux de son altesse, le prince du brouet et du pain sec… — La faim est une chose et le goût en est une autre – dit sentencieusement le mousse. — D’après les goûts de ce gamin – observa Montes – on dirait qu’il est fils de rois.

— Cela pourrait bien être le cas – répondit Rodrigo. On a vu des choses plus bizarres dans ce monde de picaros. Je connais mille histoires de véritables princes qui se prenaient eux-mêmes pour des mendiants, jusqu’à ce que l’on identi- fiait leurs parents… Il sera plus facile pour Paco de changer de condition que moi de changer de visage. — Mais il n’est pas si difficile que ton visage change…

— Comment cela ? — Avec seulement quelques balafres, il serait encore plus laid. — Ce n’est pas toi qui me les feras, monsieur le raseur – répliqua Rodrigo en riant, car il était une bonne nature. Quant au gamin, puisqu’il n’a pas de parents connus, ils peu- vent être tant rois que bergers… Et s’il faut en juger d’après

– 50 – son ingéniosité et ses talents, ce sera plutôt la première que la deuxième possibilité.

Paquillo haussa les épaules, comme s’il en faisait peu de cas, mais cette idée qu’il pouvait être fils de rois, ou ne fût-ce que de simples hidalgos, ne lui parut pas si loufoque…

Ce furent à bord deux jours fort animés. Même s’il s’en était écoulé bien peu depuis que les caravelles avaient levé l’ancre et quitté les côtes d’Espagne, les hommes voyaient joyeusement approcher le moment de débarquer et de se dé- lasser à terre, en sachant comme ils le savaient que, après les Canaries, c’étaient de longues semaines, voire de longs mois, qui les attendaient à ne pas voir autre chose que l’immensité de la mer, en grande partie inconnue, entre eau et ciel, tant que Dieu le déciderait. Lorsque vint la soirée de la seconde journée, on commença à entonner les couplets, les conversations allant bon train ; ce furent les gaudrioles, les éclats de rire enfantins, comme à l’heure de la récréation. Núñez chantait :

Malheur à moi, encore plus à vous car nous sommes nés sous le signe du destin, l’eau diluant le vin et le vin se répand sur nous. Mais il n’arrivera rien de tel ici Car, sur cette mer salée, le vin est rationné et l’eau on ne peut pas la boire31.

31 Poemas de Gómez Pérez Patiño dans le Cancionero de Baena. (N.d.T.)

– 51 – Et la réplique venait de Corzuelo, entrant en concur- rence avec son irréconciliable camarade, aidé par les cou- plets alors populaires de Pérez Patiño :

On ne peut superposer une couleur au noir et il n’y a pas de plus grand malheur que la mort ; nombreux sont ceux qui passent, fort affligés, qui, ensuite, connaissent grande réjouissance. Aucun ne désespère car, s’il vit longtemps, il connaîtra le bonheur.

— Cela s’applique bien à nous – dit Rodríguez – car si nous survivons, même pas de longues années, nous verrons notre sort changer et nous retournerons en Espagne, chargés de richesses. Poursuis, Corzuelo, poursuis, car ces couples semblent écrits pour nous. Et Santiago Corzuelo continua :

Si la roue de la fortune tourne, celui qui est triste devient joyeux, et bientôt se fait tirer l’oreille, sa réussite le changeant ; toutes les choses ont leur temps ; les bonnes et les funestes passeront à tour de rôle. Il y a un temps pour rire, un temps pour pleurer ; il en viendra un autre pour donner, et un autre pour demander : un temps chasse l’autre ; mais celui qui a du bon sens sait s’adapter à son temps.

– 52 – — Je ne crois pas, pauvre pêcheur que je suis, que c’est un bon précepte – objecta Núñez – parce que j’ai eu l’habi- tude de voir des situations funestes qui se transformaient, c’est vrai, mais pour le devenir encore davantage. — C’est vrai – répliqua Rodrigo – mais même si c’est le cas, cela ne fait pas de mal de dire le contraire pour consoler les hommes en leur donnant l’espoir. Allons, ne l’interromps plus. Continue Corzuelo. — J’ai presque fini – dit Corzuelo, et il poursuivit :

J’ai déjà vu beaucoup de plaisir, après beaucoup de tristesse et, passée, la nuit sombre, j’ai vu l’éclaircie du jour. Et, après un ciel couvert, voir revenir le jour serein, et j’ai vu le pauvre être riche. Par conséquent, aucun homme ne sera jamais défavorisé par la fortune s’il s’y prépare en étant par exemple tempéré quand vient le mal, et si, à l’instant, celui qui est acerbe devient doux et celui qui est fort se maîtrise.

Tous applaudirent sans plus soulever d’objections. Fray Buenaventura, qui s’était approché, applaudit également, et il fit son commentaire sur la bonté jamais démentie de Dieu, qui n’abandonne pas ses créatures et les console dans cette vie ou l’autre.

– 53 – Là-dessus, ceux qui n’étaient pas de quart allèrent dor- mir, la fête étant terminée, car elle risquait de se transformer en sermon… Le jour suivant se leva et, dès qu’il y eut un peu de lu- mière, depuis les caravelles, on put voir les côtes abruptes et désolées de la Grande Canarie. Quelques heures plus tard, elles surgissaient dans le mouillage de Las Palmas. Les der- nières voiles, qu’ils avaient utilisées pour la manœuvre, étant repliées, tous s’apprêtèrent à débarquer, car ils savaient qu’on allait leur en donner l’autorisation, et que les divertis- sements et la fête les attendaient.

– 54 – XIV

DIVERTISSEMENTS, FÊTES ET MERVEILLES

Solís débarqua du canot, accompagné par le chapelain et les officiers royaux, se sentant mieux comme par enchante- ment depuis que l’on avait jeté l’ancre. Au débarcadère l’at- tendaient : le gouverneur de l’île, don Fernando de Trujillo, lieutenant de l’Adelantado don Alfonso (Fernández) de Lugo ; le maire principal, les six conseillers et deux employés de la mairie ; le prêtre titulaire de l’église de la Concepción ; les autres autorités et toute la population de la ville, débordant de joie, car l’arrivée de bateaux était, là, l’occasion d’une fête plus grande que dans les ports d’Espagne.

Rodrigo Rodríguez avait, comme toujours, suivi son maître et Paquillo avait trouvé moyen d’être de la partie. À peine à terre, se déclencha le moulin à questions du mousse, qui avait l’habitude de mettre dans l’embarras son parrain ; sa première question fut :

— Pourquoi ces îles s’appellent-elles Canaries ?

– 55 – — Comment cela ? Ne le sais-tu pas ? Mais où as-tu donc étudié, amiral ? – s’exclama Rodrigo, se donnant du temps pour chercher la réponse. — Je te l’ai déjà dit : c’est à la almadraba de Cadix, où on apprend beaucoup de choses, mais pas celle que je te demande… — Tu dois alors savoir – dit l’écuyer –, que si ces îles s’appellent Canaries, c’est parce que, à une époque, il s’y trouvait tant de chiens32, qu’ils ont failli en devenir les uniques habitants… À première vue, c’est de là que viendrait leur nom… Et elles auraient été le royaume des chiens, s’il n’y avait eu les ânes… — Et, que diable, viennent faire les ânes là-dedans ? — Tu vas voir. À cette époque, ont également commen- cé à proliférer les ânes sauvages, qui erraient dans ces col- lines ; et ils devinrent si nombreux qu’ils dérangeaient les chiens. Ces derniers devinrent, naturellement, leurs enne- mis ; les bourriquots leur rendirent la monnaie de leur pièce. Les chiens attaquaient en mordant, les ânes se défendaient en ruant, et ce fut une guerre mémorable comme les exploits du Cid, par sa démesure, car chiens et bourriquots ont fini par s’exterminer, au point qu’il n’en est resté aucun pour ra- conter l’histoire. Ceux que l’on voit à présent, ânons ou ro- quets, ont été amenés plus tard, afin de compenser la dispa- rition des précédents… — Cette histoire de guerre ne colle pas – grommela Pa- quillo, haussant les épaules.

32 « Canis » en latin. (N.d.T.)

– 56 – Les conseils de son protecteur commençaient à lui sem- bler indignes d’un navigateur comme lui et juste bons à em- bobiner des mouflets. — Ne le crois pas, si tu ne veux pas – répondit grave- ment Rodrigo – mais s’il n’y avait pas eu cette guerre entre chiens et ânes, il n’y aurait pas eu ici un chrétien venu d’Espagne et nous n’irions de ce pas caresser une jarre de vieux vin dans une auberge de ma connaissance, dire deux mots à de savoureuses bananes et à des fromages de chèvre qui, de loin, nous disent déjà « mange-moi ». Car tu dois sa- voir, Paco mon fils, que c’est à présent le tour des chèvres et que si Son Altesse, sa seigneurie l’Adelantado ou le gouver- neur n’y mettent pas bon ordre, peu s’en faut pour que se ré- pète entre les chèvres et les chrétiens ce qui s’est produit entre les ânes et les chiens. Ils s’étaient installés à l’auberge la plus proche du port et, à l’ombre d’une treille, mangeaient et buvaient avec au- tant de soif que d’appétit. — Ainsi votre seigneurie se moque également des chèvres – dit le mousse, s’étranglant avec un gros morceau de fromage récalcitrant. — Arrose-le de vin, fiston, arrose-le de vin et cela passe- ra… — Le coup des chèvres ou le fromage ? — Les deux à la fois – répliqua l’autre en riant. Je ne me moque pas autant que tu supposes, mon garçon. Tu es ici sur une véritable terre promise pour tout ce qui concerne plantes et bêtes… Si tu sèmes aujourd’hui un gland, eh bien, reviens dans un an et tu trouveras un chêne pansu, qui pourrait ser- vir de mât principal à la caravelle portugaise. Si tu sèmes des

– 57 – tomates, en un clin d’œil, il en pousse, grosses comme des melons ; si tu sèmes des melons, tu en obtiendras en un éclair de la taille des potirons que, en Espagne, on donne aux porcs, et chaque haricot est comme un boulet de bom- barde… Mais il te suffit de regarder les grappes de cette treille, qui pèsent une demi-arrobe33 et chaque grain de raisin est comme un œuf…, mais il ne s’agit là que de raisin blanc normalement à petits grains… Donc, si tu veux devenir la- boureur sans te casser le dos, saisis ta chance et reste ici. — Je préfère la mer… Mais nous aurons de quoi nous régaler à bord… — Ne te fais pas d’illusions, innocent… Le miel n’est pas destiné à la bouche de l’âne… Et ne te fâche pas, car je suis logé à la même enseigne… Toutes ces merveilles vont se re- trouver sur la table du Roi et sur celles des seigneurs de la Cour, des évêques, des chanoines… C’est à peine si le gou- verneur de ces îles lui-même y goûte… Mais en te faisant la- boureur, comme elles t’appartiendront, tu pourras t’en em- piffrer. — Même si c’était le cas, ce qui ne sera pas – répliqua judicieusement Paquillo – je ne serais pas tenté de me rem- plir la panse avec ces fruits géants, alors que plusieurs pe- tites tomates équivalent à une grande, aussi grande soit-elle (je dis la même chose des haricots et du reste, qui, même pe- tits, n’en sont pas moins savoureux) et cela après avoir sué et avoir quasi rendu l’âme, plié en deux sur la terre noire, à défricher des lopins de terre, alors que, en me fatiguant

33 Quelque 6 kilos. (N.d.T.)

– 58 – moins, je peux faire gonfler ma bourse de bons doublons et que, avec l’or, on peut tout se procurer. — Tu parles comme Salomon, ayant au moins autant de sagesse… Mais bois encore un coup de ce vin. Ici, l’eau est claire, fraîche, pure, incomparable… mais nous aurons le temps d’en goûter à bord, car on en remplira nos citernes mais pas de ce vin… Sur ce, ils remarquèrent que quelques paysans, de ceux qui avaient assisté avec un vif intérêt à leur débarquement, s’étaient approchés d’eux et les regardaient en souriant avec complaisance. — Ces vaillants sont, sans doute, de la caravelle qui vient d’arriver – dit celui qui semblait être le plus respec- table. — Comme le dit votre grâce et pour vous servir – répon- dit poliment le marin. — Faites-moi l’honneur de venir avec moi à ma demeure où, même si elle est pauvre, vous trouverez bon accueil. Je ne veux pas être le seul membre de la population à ne pas accueillir des hôtes de votre classe. D’autres membres d’équipage avaient également rejoint l’auberge et d’autres habitants des Canaries les entouraient et s’empressaient auprès d’eux, sans doute avec les mêmes intentions que celui qui parlait avec Rodrigo et le mousse. — Pardieu, bien sûr que cela nous fait plaisir ! – s’ex- clama le marin – Je savais bien, moi, qu’il n’y avait pas de gens au monde plus hospitaliers et généreux que ceux de ce port bénit. Et nous ne devons pas dédaigner qui nous reçoit avec un tel empressement et veut nous faire l’honneur de sa

– 59 – propre maison… Mais, pour ma part, je n’accepterai pas votre invitation avant que votre grâce ait bu avec nous une coupe de ce petit vin qui a un goût exquis. — Vous en boirez un meilleur chez moi, où j’en ai un qui bonifie depuis des années dans la cave pour une telle occa- sion – dit l’habitant. Accompagnez-moi car, si la bonne vo- lonté peut être une compensation, vous n’aurez pas à vous plaindre de moi. Tout l’équipage bénéficia ainsi de l’hospitalité généreuse des habitants de Las Palmas, qui leur firent une fête conti- nuelle durant le séjour des caravelles. Personne ne fut exclu de ce bon accueil, car on montait la garde sur les navires à tour de rôle et ceux qui avaient passé quelques jours à bord en passaient ensuite autant à terre. C’était la coutume, non seulement là, mais également dans les autres ports des Ca- naries, escale obligée des navires espagnols qui se diri- geaient vers le nouveau monde, comme les îles du Cap Vert l’étaient pour les navires portugais. Solís avait accepté, mais seulement pour quelques jours, l’hospitalité du gouverneur don Fernando de Trujillo, le priant en revanche de mettre toutes les commodités pos- sibles à disposition des officiers Alarcón et Marquina, qui avaient tant besoin de se refaire une santé, même s’ils n’avaient navigué que quelques jours. De son côté, il préfé- rait se sentir libre, à bord de son navire, même s’il devait se rendre fréquemment à terre afin de surveiller le bon approvi- sionnement de la flottille et d’un peu se distraire. Fray Buenaventura logeait dans la maison paroissiale, sur les instances du prêtre de l’église de la Concepción, gros et nonchalant, aspirant à devenir chanoine et qui, sauf si les cloches sonnaient, passait du lit à la messe, de la messe à la

– 60 – table et de la table à la sieste, somnolant en raison de l’ardeur du climat. Il trouvait un imitateur en la personne du chargé de factorerie Marquina, qui, sautant la messe, passait également du lit à la table du gouverneur et, ensuite, trouvait moyen de prolonger un passe-temps aussi réconfortant ; et ainsi, avec l’intermède d’une promenade digestive, le petit déjeuner faisait la jonction avec le déjeuner, ce dernier – sui- vi d’une sieste – avec le goûter, le goûter avec le dîner et le dîner avec le souper… sans négliger quelques casse-croûte intermédiaires. Alarcón, plus fidèle à la sobriété espagnole proverbiale et d’une capacité stomacale moindre, effectuait leurs tâches à tous deux, intervenant dans les achats de vivres et autres produits, mais il jouissait autant que son compagnon du fait de sentir la terre ferme sous ses pieds, sans le roulis, le tangage, l’atmosphère dense et les mau- vaises odeurs du bord. Mais celui qui contrastait encore plus que lui avec le prêtre de l’église et avec Marquina, c’était l’infatigable fray Buenaventura, qui semblait avoir du vif- argent dans les veines, qui, dès le lendemain, tôt le matin, se fit plaisir en célébrant une messe et qui, en peu de temps, connaissait non seulement tous les habitants de la ville, mais également ses alentours pittoresques et accidentés. Aucun des marins, occupés à de fort différents loisirs, ne le suivait dans ces excursions. Tandis que les uns quittaient leurs chambre d’hôte afin de s’attabler pour toute la journée dans des auberges et tavernes, battant les cartes et empoi- gnant des jarres sans encourir ni observations ni châtiments, d’autres couraient la gueuse ; quelques-uns rendaient visite aux boutiques afin d’acheter des fruits ; mais pas un seul ne s’arrêtait pour contempler le paysage africain, s’émerveiller de la fertilité du sol, jouir, ne fût-ce qu’instinctivement, de la douceur de l’air, la limpidité du ciel, l’orgueilleuse placidité des montagnes, la verdeur des arbres… Mais tous sentaient, – 61 – sans tenter de se l’expliquer, la bénéfique influence de celles que les anciens avaient appelées « îles fortunées », et dont les maîtres – avant les Français, comme Béthencourt34, avant Herrera35, ou Lugo – furent les valeureux Guanches, exter- minés quelques années plus tôt par les conquérants espa- gnols selon l’habitude universelle à l’époque (et à d’autres époques si proches, comme volontairement oubliées)…

34 Jean de, 1402. (N.d.T.). voir aussi « Notes du traducteur. »

35 Diego García de Herrera y Ayala, 1454. (N.d.T.)

– 62 –

Les indigènes, hommes bien proportionnés, sveltes, ro- bustes, aux traits agréables si pas beaux, furent des types superbes de la race africaine et si intelligents que, quand les Européens arrivèrent sous prétexte de conquête, ils avaient déjà laissé derrière eux la vie sauvage, même si, pour échap- per aux intolérables ardeurs de l’été, ils habitaient des grottes ménagées dans la roche par d’anciennes convulsions volcaniques. Ces grottes étaient adroitement transformées en de spacieuses demeures, confortables et même décorées avec une certaine préoccupation artistique et esthétique36.

36 Gravures Guanches (photo Luc Viatour / https://Lucnix.be. Informations sur l’image : voir table des illustrations.)

– 63 – Et qu’ils étaient sensibles à l’art est prouvé par leur amour pour la musique et la poésie, et par les monuments qu’ils ont érigé en souvenir de grands événements civils et non pas de barbares exploits guerriers, parce que l’effusion de sang était pour eux le plus grand des crimes. Ils adoraient Dieu dans la Nature, les préceptes de leur religion étaient ba- sés sur la mansuétude et la bonté, leurs prêtres des vierges Maguadas37 leur espérance supérieure la résurrection ou, pour le moins, la réincarnation qu’attendaient pieusement leurs défunts embaumés et recouverts dans des peaux de chèvre.

Leur tempérament doux ne les empêcha pas de dé- fendre, les armes à la main, et au point d’y perdre la vie, la souveraineté de leur terre contre l’invasion des Espagnols, qui en finirent avec eux et occupaient ces lieux depuis un quart de siècle. Davantage que le ravitaillement en eau et en bois et re- nouveler les provisions de viande, de vin, de fromage, de

37 http://www.tenerife-guanches.com/fr/religion.aspx

– 64 – sucre et autres, les plaisirs retinrent l’équipage des caravelles beaucoup plus longtemps que nécessaire dans ce paradis re- gorgeant de mets, de fruits, de vins généreux, de femmes ai- mables et gracieuses, pas le moins du monde bigotes, de fêtes et de jeux, de guitares et de chants… Mais toutes les bonnes choses ont une fin et le capitaine général annonça le départ pour le 6 novembre38, un mois, plus ou moins, après avoir quitté Lepe.

Ils levèrent l’ancre à cette date sans nouveau retard et personne ne se réjouit d’abandonner les îles fortunées. Per- sonne, sinon Solís, qui désirait rattraper le temps perdu car son but était de réaliser un voyage remarquable par sa rapi- dité et pour lequel tout lui souriait jusqu’alors. Personne d’autre ne se réjouit, sinon le chapelain, fray Buenaventura, aspirant à entrer en contact avec les Indiens de nouvelles terres et de les rallier à sa foi.

— On parle beaucoup par ici de l’île de Saint Brendan, qui ne doit pas être très loin – dit Pedro Núñez, peu après qu’ils eurent levé l’ancre. Est-ce que le capitaine général nous y mènera, au moins afin de voir si ce que l’on dit est vrai ?

— Et que dit-on ? – demanda Paquillo.

— Eh bien, on dit que l’on peut voir ses côtes depuis l’île de Gomere ainsi que de l’île de Fer, avec une telle netteté que c’est comme si on est en train de la toucher, même si on ne l’a plus aperçue depuis longtemps.

38 1515. (N.d.T.)

– 65 –

— Et ne crois-tu pas, nigaud – répliqua Rodrigo – que si cette île existait l’Amiral Colomb l’aurait découverte au cours d’un des voyages qu’il a faits ? Le capitaine général dit que c’est une fable, une fumisterie comme beaucoup d’autres que l’on invente sur ces contrées. Allons, ne t’occupe pas d’elle, Núñez, et suivons notre chemin, s’il te plaît. Et c’est ce qui se fera, et pas autre chose, même si ta seigneurie or- donne le contraire.

— On ment beaucoup, en parlant de ces mers et de ces terres – dit fray Buenaventura, qui les entendait – même si la simple vérité suffit amplement pour s’émerveiller ; nombreux sont ceux qui ne veulent pas y croire. Ainsi moi, espagnol, je suis le conseil de Fernán Pérez de Guzmán, qui était un homme sage et un très grand poète.

— Eh bien, quel est ce conseil, mon père ? – demanda Rodrigo Rodríguez.

– 66 – — Il est repris dans des maximes39, que j’ai apprises étant enfant, enseignées par mon père ; elles méritent d’être connues par cœur et celle-ci dit :

La vérité étrange et nouvelle tenue pour mensongère, ne la dis jamais sans preuve, car, sans faute, elle est honteuse. Et si une vérité ressemble à un mensonge, il faut la taire car combien ne nuit-elle pas et le pur mensonge ne commence-t-il pas à se répandre !

Les caravelles avaient pris la direction sud-ouest afin de traverser l’Atlantique pour aller du côté du Cabo de Santo Agostinho, qui se trouve un peu plus bas que Pernambuco et, des jours plus tard, ils commencèrent à voir quelques branches flottantes, qui semblaient s’être récemment déta-

39 Setecientas coplas de bien vivir. (N.d.T.)

– 67 – chées de quelque côte et que les gens de mer appellent « hierba de peñas40 ». Malgré le vent frisquet, la mer était très calme et ils ne tardèrent pas à la voir comme couverte de ces herbes, avec des espaces libres, comme des lacs dans les- quels se réverbérait le soleil. Bien que quelques-uns fussent avertis, grande fut la stupéfaction de ceux qui traversaient l’océan pour la première fois, en se trouvant confrontés en pleine mer à d’immenses solitudes couvertes de verdure, comme un pâturage qui, de tous côtés, s’étendrait jusqu’à l’horizon. Les grandes bruyères qui, en certains points d’Europe, s’étendent à perte de vue, n’auraient pu en surface rivaliser avec ce champ flottant peuplé de crustacés, survolé par des oiseaux marins comme des sternes, frégates ou des mouettes grises et même par de petits oiseaux chanteurs ; entre ces herbes, les dauphins se faufilaient ou sautaient comme des veaux ou des animaux de montagne. Quelques marins recommandaient déjà leur âme à Dieu, considérant comme diabolique cette chose qu’ils n’avaient jamais vue et dont ils n’avaient jamais entendu parler, très funeste pré- sage, et leur terreur croissait en voyant la difficulté avec la- quelle on naviguait dans ces prairies trompeuses. Ils ne touchèrent heureusement qu’à peine les bords de la mer des sargasses, en bénéficiant d’un vent fort favorable pour en sortir le plus vite possible. Dès les premiers instants, Solís était resté sur le pont de commandement et la caravelle portugaise avait frayé un passage, laissant derrière elle une large brèche dans laquelle s’engouffrèrent facilement les deux autres caravelles. Tous poussèrent tout de même un

40 « Plantes de la nature de celles qui poussent dans les fentes des rochers » in Colomb, premier voyage, 17 septembre 1492. (N.d.T.)

– 68 – soupir de soulagement, comme après un danger, dès qu’ils revirent une mer dégagée.

À cette latitude et à l’immense surprise de Paquillo, qui n’avait jamais vu une chose pareille, des bancs de poissons volants commencèrent à surgir des vagues, à traverser l’air, parcourant comme la trajectoire d’une flèche avant de re- plonger dans la mer. Quelques-uns tombèrent avec un bruit sourd sur le pont, rebondissant et se tortillant, voulant rega- gner leur élément, mais on les tuait à coups de gaffes ou les

– 69 – prenait à la main, et ils se retrouvaient dans la poêle pour améliorer savoureusement l’ordinaire. Et, la nuit, autour du navire, dans le sillage qu’il laissait derrière lui, comme une large ceinture de soie ridée, et le long de ses flancs, à hau- teur de la ligne de flottaison, le mousse commença à voir de fantastiques petites lueurs, qui lui semblaient être magiques et qui lui rappelaient ce qu’il avait entendu dire de mers bi- tumineuses qui brûlent en embrasant les navires et en satu- rant l’atmosphère d’irrespirables émanations. Lors d’une nuit orageuse, il ne réussit pas à vaincre sa peur : la chaleur était suffocante, le ciel était lugubre et la mer, comme rouge jusqu’à ce moment, s’enflamma sur toute sa largeur, lançant des éclats de lumière livide jusqu’à la ligne d’horizon, pen- dant que, au sommet des mâts des caravelles, les transfor- mant en cierges colossaux, brûlaient de petites flammes qui oscillaient au vent41. Paquillo poussa un cri d’angoisse : il se trouvait, à n’en pas douter, au beau milieu de l’Enfer.

— Petit sot ! – lui dit Rodrigo, ému par sa terreur. Ce sont les illuminations de bienvenue avec lesquelles ces mers nous reçoivent. Ne t’effraie pas : ce feu est ardent mais il ne brûle pas…

Et remplissant dans la mer une coupe d’eau encore légè- rement lumineuse, il y plongea la main et fit en sorte que le mousse l’imite et se débarrasse de sa peur. Le phénomène ne dura pas longtemps cette nuit-là : il y eut extinction des feux, comme à la fin d’une fête, et il ne subsista que de petites lampes oubliées, quelques lueurs bleutées dans le sillage du

41 Feu de Saint-Elme. (N.d.T.)

– 70 – navire et, à fleur d’eau, sur toute sa longueur, de l’étambot à l’étrave.

Et c’est ainsi que, guidée par sa bonne étoile, l’expé- dition de Solís se poursuivit, placide et chanceuse, jusqu’à ce que, en naviguant au Sud un quart Sud-est et en se croyant à quelque nonante lieues au vent du cap de San Antonio, un jour, alors qu’il s’y attendait le moins, le grand pilote vit les dunes inhospitalières de sable blanc, couvertes de cistes et de ronceraies, qui caractérisent le cap de Sâo Roque, ex- trême nord-est de l’Amérique du sud. Entraînées sans s’en rendre compte par les vents de l’Est et par le courant équato- rial qui traverse l’Atlantique de l’Est-sud-est à l’Ouest-nord- ouest, les navires se trouvaient à deux cents milles de l’endroit où ils croyaient être… Solís ordonna de s’écarter aussitôt de cette côte, parse- mée de bancs de sable et de récifs, et mettant à profit la bi-

– 71 – furcation du courant qui, à hauteur de ce cap, se subdivise, il cingla sur celui de Santo Agostinho, dont il connaissait très bien les falaises rougeâtres. Il ne le trouva pas non plus faci- lement car, quand il crut être à sa hauteur, il déduisit de ses observations que le courant l’avait entraîné deux degrés plus au Sud… Il rectifia leur position le plus exactement possible, étant donné l’imperfection des instruments astronomiques de l’époque ; en modifiant la route, il ne tarda pas à reconnaître les dangereux îlots et récifs de « Ouvre l’œil », actuellement Abrolhos42. Par expérience, il savait où il était mais, après avoir franchi le cap de Santo Tomé43 il ne put pas recon- naître le cabo Frío44. Il recourut à nouveau à l’astrolabe et, prenant la hauteur des astres, il se dirigea vers la baie de Rio de Janeiro, où il entra à la tête de sa flottille sans avoir subi d’autres dommages que ces insignifiants contretemps45. — C’est, pardieu, un bon marin ! – commenta le quar- tier-maître Diego García de Moguer – Mais, pour naviguer, l’œil est plus fiable que l’estrulogie…

42 Archipel volcanique situé au large de l’État de Bahia (Brésil) dans l’Océan Atlantique. (BNR.)

43 Péninsule sur la côte sud-est du Brésil (État de Rio de Janei- ro). (BNR.)

44 Aujourd’hui une ville de l’État de Rio de Janeiro). (BNR.)

45 Toribio Medina, pp. CCL-CCLIII + 217-218. (N.d.T.)

– 72 – XV

TERRE ENCHANTÉE

Sans perturber la manœuvre, tous les membres d’équi- page s’entassaient sur le pont des navires aux endroits d’où l’on pouvait le mieux voir l’entrée dans la baie46. Ils n’étaient pas des artistes, c’est à peine si leur culte instinctif de la na- ture était embryonnaire, mais ils abordaient pour la première fois des lieux inconnus et cet extraordinaire paysage s’em- parait de leur âme, mystérieusement, comme une nouvelle sensation indéfinissable. La mer y ressemblait à un lac en- touré de montagnes, çà et là, couvertes de végétation ; l’air chaud poussait doucement les navires et l’entrée fut telle- ment facile et sans complications qu’il ne fallut même pas utiliser les lignes de sonde. On voyait là un haut rocher gra- nitique, pelé, semblable dans sa forme à un casque germa- nique démesuré ou à un immense pain de sucre, qui se dres- sait à bâbord, et un autre sommet, aigu et élevé, dont la pointe tordue menaçait de tomber sur l’obscure végétation à ses pieds, tous ces monts étant verts jusqu’à une même alti- tude, en pierre brune à partir de cette ligne presque horizon-

46 De Guanabara, de río de Genero ou río de Janeiro. (N.d.T.)

– 73 – tale, spectacle qui captiva un moment les âmes. Mais, aussi- tôt après, leurs yeux parcoururent avidement le vaste pano- rama environnant : les hautes rives tapissées de verdure va- riée et vibrante, peuplées d’arbres magnifiques des plus di- verses essences, arrosées par des courants d’eaux vives, or- nées de fleurs aux couleurs criardes ; les îlots, soit constitués de roche brune et stérile, soit couverts d’herbe, de plantes et de fleurs, qui émergeaient du lac diaphane comme de grands cétacés endormis ou comme des massifs de roseaux d’un merveilleux jardin flottant ; et, surplombait toute cette splendeur, le ciel en mouvement continuel, changeant perpé- tuellement, tantôt pur et bleu, tantôt envahi par des nuages lourds ou vaporeux qui, jouant avec le soleil, dotaient le pay- sage d’une vie palpitante et surnaturelle. Les caravelles fen- daient les eaux avec un léger bruit de feuillage agité et, outre le ruban ondulant du sillage, il passait à la surface de la baie des frémissements fugaces, des sourires de la mer ; et les courbes ouvertes de la côte, avec leur mince liseré d’écume, emmurées par des buttes et des collines ceintes par la forêt, se découvrant ou s’emmitouflant dans les vapeurs flottant dans l’atmosphère saturée d’humidité, s’évanouissaient de part et d’autre, et là-bas en face, comme si elles étaient sur le point de se dissoudre dans l’air. La chaleur était étouffante et ne parvenaient à l’atténuer ni la brise de mer ni les grains continuels qui criblaient l’eau, l’obscurcissant, et qui redoublaient sur la voilure et sur le pont sonore des navires. Ces derniers surgirent bien avant d’atteindre le fond de la baie, située à quelque neuf lieues de son entrée. Une partie de l’équipage, empruntant les canots, débarqua au point le plus proche, avec l’autorisation du capi- taine général ainsi que d’Alarcón et de Marquina, car, puisqu’il n’y avait pas d’Indiens en vue, il ne fallait pas

– 74 – craindre qu’ils commettent des écarts ou mènent des négo- ciations, interdites par le contrat.

Une multitude d’oiseaux et de bestioles, abrités sur les branches et parmi le feuillage, qui les protégeait du soleil, prit peureusement son envol ou la fuite, tandis que quelques vipères et autres serpents zigzaguaient sur l’herbe sèche, à la recherche d’un nouveau refuge. En apercevant les reptiles, les uns de taille démesurée et brunâtres, les autres aux cou- leurs vives et aussi minces qu’une baguette, les marins s’arrêtèrent à l’orée de la forêt, craignant une piqûre mortelle et, seule, une poignée d’entre eux poursuivirent leur chemin, avec beaucoup de précautions, faisant attention où ils met- taient les pieds. Du gibier curieux s’approchait pour les épier entre les branches et, aussitôt, s’enfuyait, plus par étonne- ment que par peur ; l’un ou l’autre macaque barbu, qui se ba- lançait à la cime des arbres, sifflait comme le vent, signal d’alarme, imitant leur curiosité et leur timidité ; et les aras blancs, au panache comme le cimier d’un roi, les perroquets bigarrés et jasant, les toucans au formidable bec incurvé et beaucoup plus grand que leur propre tête, fuyaient à leur ap- proche, d’un vol bruyant et pesant.

— Il y a ici des chrétiens – pensa plus d’un, en entendant un martelage métallique, suivi par un âpre grincement de lime mordant le métal.

C’était l’araponga barbu. Et mille autres oiseaux incon- nus, brillants et effarouchés, s’approchaient et s’éloignaient, voltigeant, dans une rumeur incessante de chants, de batte- ments d’ailes, de froissements de feuillage, qu’accompagnait le bourdonnement lancinant de milliers d’insectes. La forêt entière vivait et palpitait.

– 75 – — Regarde, regarde le drôle d’oiseau ! – s’exclama sou- dain le mousse, en extase. — Que viens-tu avec ton « drôle d’oiseau » ! C’est un bourdon et rien d’autre – répliqua Fuentes, qui marchait de concert avec Paquillo.

— Comment cela ? Ne vois-tu pas ses petites plumes ? Où as-tu les yeux ? Laisse-lui le temps de se poser sur cette fleur qui semble l’effrayer et tu verras… Il a plus de couleurs qu’une guirlande en verre ! — Tu vois bien qu’il ne se pose pas et reste en l’air, comme un frelon et, davantage qu’un oiseau, on dirait un pe- tit nuage ou une boule d’aigrettes d’un pissenlit. — Mais, et ses couleurs ? Es-tu aveugle ?… Je n’ai ja- mais rien vu de pareil47. Ils furent également entourés de bandes de papillons de toutes les tailles et de toutes les nuances. Mais l’admiration de Paquillo frisa l’extase lorsque, à la tombée de la nuit, pendant qu’il entendait l’interminable concert des grillons et

47 Il s’agit vraisemblablement d’un oiseau-mouche ou d’un coli- bri. (N.d.T.)

– 76 – des grenouilles musicales, il commença à voir, traçant dans l’air des courbes capricieuses ou le traversant comme une flèche, des essaims d’étincelles, de braises, de petites flammes verdâtres, des yeux de lumière d’êtres fantastiques qui volaient en le regardant, peut-être de façon amicale, peut-être de façon menaçante…

— Sur la mer, il y avait du feu ardent et qui ne brûle pas ; ici, il y a des feux qui volent dans les airs… ! Que Dieu nous tienne dans sa main ! – se dit Paquillo, en se signant. Solís n’avait pas débarqué. Marquina et Alarcón – qui respiraient pour la première fois depuis le départ des Cana- ries – Francisco de Torres, les autres pilotes, le quartier- maître Diego García et fray Buenaventura – qui assistait ha- bituellement aux conseils – se trouvaient avec le capitaine général, réunis sur le château de poupe, sous la dunette, pro-

– 77 – fitant du repos, de la fraîcheur relative et de l’agréable con- versation. — Nous ne devons pas nous plaindre, plutôt rendre grâce à Dieu – disait Solís – car nous avons bénéficié d’une traversée idéale, si rapide et telle que je n’osais pas en rêver.

— Et le temps reste au beau fixe ! – s’exclama le quar- tier-maître.

— Tellement beau que nous devrions le mettre à profit pour aller de l’avant – fit observer Torres – C’est avec un temps pareil que l’on arrive au bout du monde.

— Nous ne nous endormirons pas, mon frère – répliqua Solís. Dès que les citernes seront remplies et que nous nous serons approvisionnés, nous repartirons. L’eau des récipients commence à avoir une mauvaise saveur et, pour la santé de l’équipage, on doit avoir quelque chose de plus frais que la viande salée et le thon séché, que le fromage et les biscuits, que les fèves et les pois chiches secs.

— C’était une proposition – précisa Torres.

— Grâce à la bonté divine, notre santé ne peut pas être meilleure, même pour vos seigneuries, le mal de mer mis à part, mais il est passager – dit fray Buenaventura d’un air qui ne semblait pas ironique, tout en penchant vers Alarcón et Marquina sa tête à nouveau couverte d’une épaisse cheve- lure, rude et grisonnante. Mais, dites-moi, monseigneur le capitaine général, si je ne suis pas indiscret : pourquoi ne nous sommes-nous pas empressés de débarquer, comme nos gens ? Votre excellence ne s’intéresse-t-elle pas à ces pa- rages ?…

– 78 – — Je pourrais vous répondre, mon père, que je les con- nais… – déclara Solís. Mais je dirai seulement que mon seul but est de me ravitailler en eau, comme je l’ai déjà signalé… Je ne peux pas toucher à ces terres48 et il y a ici le chargé en factorerie Marquina et le répartiteur Alarcón pour me l’interdire. Nous ne sommes pas non plus les premiers à ve- nir ici car, il y a près de dix-sept ans49, Juan de la Cosa50 et Alonso de Ojeda51 ont navigué à partir de ce point jusqu’à un autre que l’on appelle Bahía, reconnaissant sur le chemin un grand fleuve, dit « el dulce », et remontant ensuite le long de la côte jusqu’au golfe de Paría52. Diego de Lepe53 a, lui aussi, vers la même époque, touché au cabo de San Agustín54 et l’a baptisé « Rostro Hermoso », sans que personne n’eût encore rivalisé avec lui. Mais en l’an 1500, les choses se sont em- brouillées avec les Portugais et, depuis, tout va à vau-l’eau…

48 Traité de Tordesillas. (N.d.T.)

49 1499. (N.d.T.)

50 Toribio Medina, pp. LII + LVIII + LXVI + LXXVI + LXXXIII- LXXXV + XCVIII + CIX + CXI + CXIII + CXCIX + CCXVI + 213. (N.d.T.)

51 Navigateur et explorateur espagnol, l’un des pionnier dans la conquête des Amériques. (BNR.)

52 Entre Trinidad et le Venezuela. (N.d.T.)

53 Toribio Medina, pp. LXXIV-LXXV + LXXXIX + CCIX-CCXIII + 100. (N.d.T.)

54 Situé à l’Est de l’embouchure du ria de Navia. (BNR.)

– 79 – — On ferait bien d’en finir une fois pour toutes avec ces histoires et cela nous serait facile, par le Christ, s’il n’y avait ce maudit lien de parenté – dit Torres. — Tu m’en diras tant – continua Solís – parce que déjà Vicente Yáñez Pinzón, à l’embouchure de l’Amazone, a pris possession de ces terres au nom des Rois Catholiques55… — Et pourquoi ne s’y maintiennent-ils pas, morbleu ? – s’exclama Diego García. — Allez savoir… Des raisons d’État, de famille… Bref, à la même époque, Pedro Alvarez Cabral56, envoyé avec des instructions secrètes par le roi don Manuel, aborda à Porto Seguro. Après avoir dit et répété qu’il ne l’avait pas fait vo- lontairement mais que les vents et les courants l’avaient poussé où il ne voulait pas.

55 Toribio Medina, pp. XLIV + LXXIII + XCI. (N.d.T.)

56 Toribio Medina, pp. XC-XCIII. (N.d.T.)

– 80 – — Par Saint Diego, quel faux-jeton et quel menteur ! — C’est ainsi. L’histoire de l’escale forcée était, de noto- riété publique, fausse, comme on n’a pas tardé à le décou- vrir, et Cabral n’a fait que se conformer scrupuleusement à ses instructions. Le fait est qu’il a pris possession au nom du Portugal de ce Porto Seguro, que, d’après ce qu’il a dit, il avait cru être une île et qu’il a appelé Vera Cruz.

— Et ce Cabral est de ceux qui font route en se fiant à l’estrulogie ! – s’exclama le quartier-maître, répétant son re- frain en ne dissimulant pas son dédain, sans réfléchir au fait que Solís et Torres, au moins, étaient des pilotes d’enver- gure.

Solís se mit à rire, sans tenir compte du reproche voilé, car il estimait en García le marin-né, chez qui l’instinct sup- pléait à la science depuis qu’il était au berceau.

– 81 – — Le roi don Manuel et Cabral lui-même – poursuivit- il – ont feint d’accorder très peu d’importance à la décou- verte et à la prise de possession, mais toujours est-il que, l’année suivante – et cela achève de prouver la duplicité –, Juan Coelho57 et Diego Ribeiro58 revinrent pour le compte du roi du Portugal afin de reconnaître plus à l’aise ces côtes, les parcourant depuis le cabo de San Roque jusqu’au Marañón. De notre côté, nous n’avons pas non plus abandonné la par- tie et sommes venus ici, l’un après l’autre, Vicente Yáñez et moi, Rodrigo de Bastidas59, Antonio de Ojeda… — Et Amerigo Vespucci ? – demanda fray Buenaventu- ra – Il me semble avoir lu… — Oui, il figure dans les papiers… mais… – répondit avec réticence Solís. Peut-être est-il venu lorsqu’il était au service du Portugal, avec la flotte d’Andrés Gonçalves, qui est allée du cabo de San Roque à la Cananea et ensuite a poursuivi, au large, sa route vers le Sud… Ces reconnais- sances se sont faites et continuent à se faire tellement en se- cret, de part et d’autre, que souvent on ne sait qui ou quoi croire… Il a pu également venir avec ce Gonzalo Coelho, qui, dans le coin, a construit un fort que, à ce qu’il dit, il a ensuite abandonné et que les indigènes ont rasé. Ce que nous ne tarderons pas à constater, même si cela nous im- porte bien peu.

57 Gonzalo ; juin 1503 ; Toribio Medina, p. XCVI. (N.d.T.)

58 Toribio Medina, pp. CXXXIX + CLIX + CCLXV. (N.d.T.)

59 Toribio Medina, pp. LII + LXXVII + XC + CXV + CXLVIII + 101 + 103. (N.d.T.)

– 82 – — Ce Vespucci, que Dieu lui ait pardonné… – dit García – (je ne lui veux pas de mal parce que, le chien étant mort, morte est la rage), ce Vespucci, dis-je, était tel, ou je me trompe, qu’il en a enjôlé plus d’un avec ses histoires de grandeur, en salissant des mains avec des papiers de marque… On traite les Andalous de fanfarons mais, par Saint Diego, s’il faut en juger à cet Amerigo, ceux de Florence n’ont rien à envier à ceux d’Andalousie… Il vivait de vent et je le lui pardonne parce que, à moi, il ne m’a rien pris, car je ne vis pas de cela ; mais ce que l’on ne peut pas lui pardon- ner, c’est que, moyennant des astuces et des subterfuges, il soit parvenu à donner son nom à ce qui revenait de droit au vieil Amiral Colomb60. Et le quartier-maître indigné aurait poursuivi dans cette voie si fray Buenaventura n’avait réorienté la conversation en demandant à Solís : — Pourquoi dites-vous que nous devons accorder peu d’importance à ces terres ? — Eh bien parce que, je le répète, nous ne devons pas y toucher mais aller plus loin, où je sais, et mon père vous ne tarderez pas à voir avec émerveillement… — Si ce sont les Moluques, comme on nous a dit… — Chaque chose en son temps, car il ne faudra pas être trop patient… Donc, comme j’allais le dire, peu avant, un marin français (Paulmier de Gonneville) aurait, lui aussi, na-

60 Toribio Medina, pp. 101-106. (N.d.T.)

– 83 – vigué dans ces eaux et touché à ces terres61… ainsi que, se- crètement, peut-être quelques autres Portugais… — Et vous-même en 1512… — Taratata, mon père ! Il vaut mieux ne pas l’évoquer62… — Quand nous arriverons à bon port, on verra où nous arriverons… – conclut Diego García de Moguer en faisant un clin d’œil. Tout le monde avait regagné le bord à la tombée de la nuit. L’enseigne Ramírez, grand chasseur, revint avec deux pièces de gros gibier et d’autres rapportèrent aux navires plusieurs pièces de petit gibier, qui relevèrent fort agréable- ment le repas de ce soir-là. Ils avaient également vu, mais sans les abattre, les uns des sortes d’énormes cochons ou d’éléphants nains, les autres une sorte de lièvres, des bêtes que par la suite on identifia, respectivement, sous les noms de tapirs et d’agoutis.

61 6 janvier 1504. (N.d.T.)

62 Expédition annulée. (N.d.T.)

– 84 – Les marins avaient commencé à vider les citernes afin d’assurer le ravitaillement en eau le lendemain. Et, dans la tranquillité de la baie, tous ceux qui n’étaient pas de garde, sans excepter Marquina et Alarcón, dormirent cette nuit-là à poings fermés. Mais, lors du quart de la deuxième veille, avant la relève, ceux qui étaient de faction remarquèrent que, apparemment, des gens étaient accourus sur la côte. Et, aux premières lueurs de l’aube, on vit en effet que quelques hommes, des Indiens indubitablement, faisaient signes depuis la plage la plus proche. À peine le jour se leva-t-il que l’on constatait effectivement qu’il s’agissait d’indigènes tendant les bras comme pour offrir ce qu’ils apportaient, en gage d’amitié et de bienvenue. Averti, Solís sauta à bas de son lit et quitta sa cabine. Il observa le petit groupe d’Indiens et, appelant le répartiteur et le chargé de factorerie, les invita à aller faire du troc avec les indigènes afin d’obtenir ce qu’il fallait pour les navires, en l’occurrence de la viande, des cé- réales, des fruits et tout ce qu’ils pourraient fournir. Ils dé- barquèrent confiants, parce que Solís n’éprouvait habituel- lement pas le besoin de prendre à terre les précautions d’usage, erreur que souligna dans son Historia son grand ami Fernández de Oviedo y Valdés63 en l’appelant « remarquable marin mais mauvais capitaine », erreur qui, peu après, devait lui coûter si cher. Ils étaient accompagnés d’Enrique Montes, qui allait faire ses premières armes en tant qu’interprète, et emportaient pour les Indiens, à titre d’échange pour leurs victuailles, des bonnets colorés, de la verroterie tout aussi colorée, des rondelles en laiton, des grelots et autres ba-

63 Historien et chroniqueur des « Indes ». Également adminis- trateur espagnol. (BNR.)

– 85 – bioles. Paquillo avait trouvé le moyen de se joindre à la délé- gation et disait au gabier-interprète : — Tu me montreras comment tu leur parles car je veux, moi aussi, apprendre à le faire. — Si ce n’est pas toi qui me l’enseignes… – pensa Montes. Quant à moi, Dieu permette que je m’en tire bien ! Dès qu’ils débarquèrent, Montes tenta de communiquer avec les Indiens, recourant à des gestes s’inspirant des leurs et leur montrant une partie des verroteries et colifichets qu’il apportait ; Solís et les autres procédaient plus ou moins de la même manière et, sans être des spécialistes, se firent com- prendre autant que le polyglotte Montes. Les babioles furent plus éloquentes et efficaces. Ces hommes et ces femmes, à la peau cuivrée, de taille moyenne, agiles et ne tenant pas en place, étaient presque entièrement nus, ne portant qu’un pagne, faisant plus office de décoration que de vêtement. Quelques dignitaires arboraient à la ceinture, comme un ha- bit de grand gala, un court cache-sexe ressemblant à une jupe en éponge, tressé avec des plumes aux couleurs très brillantes. D’étranges peintures et tatouages dissimulaient également la nudité de leur corps glabre. Ils portaient leur chevelure laineuse coupée presque à ras et se défiguraient le visage – qui, autrement, aurait pu être qualifié d’agréable – avec des cylindres en pierre, en os ou en bois, dont ils perfo- raient leurs lèvres. À ce que l’on vit plus tard – en recher- chant vainement ce qui pouvait subsister du fort de Gonzalo Coelho – ils vivaient non loin de là, dans de vastes huttes faites de bois et de feuilles, et ils dormaient dans des filets en coton, pendant dans leur abri. Quelques-uns arrivèrent par la voie des eaux, à bord de grands canoës fabriqués en évidant un tronc d’arbre par le feu, et mus par des rames ressem-

– 86 – blant à ce que le boulanger utilise pour enfourner le pain. Pour montrer leur joie et souhaiter amicalement la bienve- nue, ils dansaient et gigotaient en poussant d’étranges cris ; ils se mêlaient aux Espagnols, en ne manifestant pas la moindre crainte mais une telle curiosité que ces derniers se fâchaient et il était difficile de les contenir sans violence, obéissant aux ordres sévères du capitaine général stipulant qu’on ne leur fît pas le moindre mal, sauf cas extrême et si on ne pouvait pas procéder autrement. Le groupe des sauvages grossissait peu à peu car les moins audacieux, cachés parmi les arbres, s’enhardissaient peu à peu et finissaient par s’approcher également. Quelques femmes venaient avec leurs nourrissons sur le dos. Tout cela ne tarda pas à devenir une sorte de fête foraine, brouhaha mêlé de sauts et de cabrioles, simulacres de combat et d’amour, danses folles qui inondaient de transpiration les vi- sages peinturlurés et les torses bronzés… Quelques Indiens, comprenant ce que les Espagnols voulaient, commençaient à leur apporter de quoi manger et ils leur adressaient des signes, indubitablement significatifs, que, plus tard ou un autre jour, ils allaient mieux les satis- faire. Attendant, à l’encontre de son désir et sur ordre du capi- taine général, qui ne prenait des précautions que pour lui, fray Buenaventura n’avait pas débarqué ; mais Solís, désor- mais convaincu de la mansuétude des indigènes, lui fit signe qu’il pouvait se rendre à terre. — Que craint votre excellence pour moi ? – avait de- mandé le prêtre. Si c’est le martyre, je suis venu subir le mar- tyre, quand l’ordonnera Notre Seigneur, et non pour faire de

– 87 – la figuration car, question sécurité, j’aurais pu rester confor- tablement dans mon couvent. — Se résigner au martyre est une chose et le rechercher inutilement en est une autre – répliqua Solís. Lorsqu’ils le virent débarquer du canot, la bure tombant jusqu’aux chevilles, les sauvages abandonnèrent en quelque sorte les autres, et ils l’entourèrent, l’examinant sous toutes les coutures : par devant, par derrière et à partir du crâne – à moitié recouvert déjà, comme un marron, de cheveux héris- sés comme des piquants – jusqu’aux sandales. Les plus au- dacieux le touchaient et le palpaient afin de vérifier s’il était de chair et d’os ou si, sous la bure, se dissimulait un corps comme celui des autres hommes. — Je me trouve ici dans une situation pire que la guenon du montreur de marionnettes – pensait le bon frère, pendant qu’il distribuait des bénédictions, à gauche et à droite, sou- riait, priait, laissant faire ces grands enfants. — On vous souhaite la bienvenue, mon père – lui cria Juan de Solís, se moquant affectueusement. — Plus que je voudrais… Mais tout va bien ; ce serait mieux si je connaissais deux mots de leur maudite… de leur bénite langue… Quelle occasion pour les endoctriner ! À défaut de les connaître, il leur parla en castillan et les Indiens l’écoutaient, bouche bée, et semblaient le com- prendre, tant ils étaient tombés sous le charme, dont ils ne s’échappaient qu’afin de se faire des gestes et se tordre comme des damnés. Soit les signes de Montes, soit la perspicacité des In- diens, soit leur désir de se montrer amicaux, ou tout cela en-

– 88 – semble, firent donc en sorte que, le jour même et les jours suivants, les indigènes arrivèrent sur la plage avec des pa- niers de maïs, de cassaves, de patates, de noix de coco, de bananes, d’abondants et très savoureux fruits sylvestres, en grande partie si pas totalement inconnus des Espagnols, et avec quelque chose qui devait davantage leur plaire et leur sembler plus consistant : de nombreux oiseaux analogues à des poules, d’autres à des faisans et à des canards, quelques- uns semblables à la perdrix d’Europe ; du gibier, des tapirs et d’autres quadrupèdes, parce que cette forêt devait être une immense ferme naturelle avec des greniers démesurés et toute l’arche de Noé pour assouvir la faim humaine. Fray Buenaventura avait, entretemps, satisfait son grand désir de célébrer une messe et, durant le séjour dans la baie, il la dit tous les matins, ayant pour fidèles Solís, les pilotes, les officiers et l’équipage qui n’était pas de quart sur les na- vires. À la ferveur religieuse s’ajoutait chez eux l’émotion du souvenir de l’Espagne, de leurs familles, des amis, évoqués par la cérémonie dans ces terres sauvages. Les quarante ou cinquante hommes qui, avec Solís et les officiers, s’agenouil- laient sur l’herbe, sous d’énormes arbres aux luxuriantes frondaisons, n’étaient qu’une poignée mais, à leurs yeux, dans leur imagination exaltée, ils étaient tout un peuple, tout un pays… Fray Buenaventura, qui avait improvisé un autel avec quatre tables assemblées par le charpentier du bord, la couvrit d’une nappe blanche à dentelles et la décora avec les vases et ornements sacrés qu’il avait apportés à la demande du capitaine général. Et cette première messe de campagne fut solennelle, émouvante pour tous. Elle fut célébrée avec l’aide du grand Alarcón qui, enfant, avait appris ces matines et il fallait le voir porter fièrement, majestueusement, le mis- sel d’un côté à l’autre, faire tinter la clochette, fournir les ré- ponses liturgiques d’une voix sonore, prendre avec onction – 89 – l’extrémité de la chasuble lorsque l’officiant se prosternait, verser dans le calice le contenu des burettes pour la consé- cration et, sur les doigts du prêtre, le petit filet d’eau pour l’ablution… Mais les navigateurs ne pouvaient pas entendre la messe avec tout le recueillement souhaitable, à cause des spectateurs. Les Indiens, curieux et admiratifs, rendaient peu à peu plus étroit le cercle qu’ils formaient au pourtour et, bien que timides, ils se rapprochaient le plus possible et il fallait les refouler afin qu’ils ne se mêlent pas de façon pro- fane aux fidèles et ne perturbent leur attention. C’était un spectacle prodigieux pour eux que celui de cet homme, mer- veilleusement vêtu de blanc, rouge et or, qui murmurait des paroles ressemblant à des conjurations et faisait de grands gestes mystérieux. Ils ne reconnurent certes pas en lui le personnage brun qu’ils avaient tâté la veille. Il devait être un magicien d’un ordre très supérieur, plus riche et plus puis- sant que ceux de leur terre, et ce qu’il exécutait était, sans doute, une danse, très étrange, mais suffisamment lente et si- lencieuse à leur goût. Au bout du compte, ils ne perturbèrent pas outre mesure la solennité et ne parvinrent pas davantage à l’interrompre parce que, dans l’ignorance et la candeur de leurs esprits, la curiosité et la crainte suppléaient au respect qu’ils ne pouvaient pas encore éprouver. Et, halluciné par les apparences, le bon frère pensait : — Comme il sera facile de les amener dans le giron du Christ ! Les hommes de Solís se croyaient au beau milieu du pa- radis : ils fraternisaient – et même plus, si le sexe le permet- tait – avec les indigènes, candides, bienveillants et enchantés jusqu’à l’extase par quelques verroteries, un béret rouge, de la menue monnaie de deux maravédis, qu’ils considéraient comme autant de trésors, et ils seraient volontiers restés là à

– 90 – jamais. Montes, qu’une jeune fille avait pris pour disciple, connaissait déjà quelques mots de la langue qui, à ce que l’on constata ultérieurement, était parlée jusqu’à très loin de là. Mais, alors qu’ils s’habituaient aux douceurs de cette vie, au point de ne presque plus être conscients de la chaleur qui les oppressait, le capitaine général, ayant ses cales rem- plies et ses citernes pleines d’eau fraîche et cristalline, donna l’ordre de lever l’ancre et, par une journée torride, vers fin décembre 1515, les trois navires sortirent, l’un après l’autre, de la prodigieuse baie.

– 91 – XVI

RÉCITS CRUELS

Fray Buenaventura n’était pas resté à terre durant tout le séjour des navires dans la baie de Rio de Janeiro. En voyant que Solís préférait rester à bord et, après lui avoir demandé si sa présence ne le dérangerait pas, il s’installa à nouveau sur la caravelle portugaise. Leur mutuelle inclination avait crû durant le court voyage. Le frère avait déjà toute la con- fiance du marin, qui voyait en lui un confident, peut-être un conseiller, bienveillant à l’égard de sa bonne fortune. Ayant adopté à bord une sereine et, parfois, rude gravité, en bon capitaine soucieux que les familiarités ne sapent ni n’amoindrissent son autorité, et étant séparé de Francisco de Torres qui n’abandonnait pas sa caravelle, fray Buenaventu- ra était le seul interlocuteur dont la conversation lui était agréable. Quand le dominicain n’était pas assis au chevet de Mar- quina ou d’Alarcón – à nouveau sujets au mal de mer dès qu’ils avaient remis le pied sur le bateau et qui, haïssant l’humanité entière, auraient préféré, sans le lui dire, qu’il les laissât en paix – et quand il ne parcourait pas le navire jusque dans ses recoins les plus sales et les plus pestilentiels afin d’endoctriner l’équipage, il passait de longs moments

– 92 – avec le capitaine général, qui aimait sa conversation et, obéissant à son caractère expansif, faisait de lui le déposi- taire de ses pensées. Au bout de quelques jours de naviga- tion – tant les heures à bord sont longues – le dominicain était au courant, dans presque tous leurs détails, de la formi- dable lutte soutenue par Solís contre l’ambassadeur du Por- tugal, d’un côté, et contre les officiers de Séville de l’autre… Le triomphe enivrait le navigateur et il s’attribuait presque tous les mérites de la victoire. La protection décidée de don Ferdinand en raison de l’intérêt qu’il témoignait à son projet, ainsi que l’efficace collaboration de l’évêque de Palencia et du secrétaire Lope Conchillos, pas tout à fait désintéressée en fait, étaient pour lui de simples contingences favorables dont son adresse et son intelligence avaient su se servir effi- cacement. Il était effectivement – comme Vasconcelos l’avait écrit au roi Manuel – « plein de brumes et d’espoirs ». Fray Buenaventura l’écoutait sans le contredire et même encen- sait ses mérites, car il éprouvait pour lui une grande et can- dide admiration, et il espérait faire sa conquête à des fins très élevées. Ce missionnaire exceptionnel s’était proposé de mener à bien une grande entreprise librement consentie en embarquant avec Solís : imitant son frère en religion fray Bartolomé de las Casas64, il voulait mettre tout en œuvre pour que les Espagnols des Indes traitent les indigènes comme des frères inférieurs et non comme des bêtes sau- vages65. Généreuse candeur ! Les hommes de cette époque, aussi barbares entre eux, tant dans leur pays qu’à l’étranger,

64 1484-1566. (N.d.T.)

65 Très brève relation de la destruction des Indes, écrite à partir de 1532 ; controverse de Valladolid, 1550. (N.d.T.)

– 93 – tant en terre connue qu’en terre à découvrir, y prenant plai- sir, détruisaient sans pitié ; se disputant pour des intérêts mesquins, ils n’étaient pas disposés à obéir, même si avec ferveur – comme les Italiens, trois siècles plus tôt écoutaient la parole du pauvre François d’Assise66 – ils écoutaient la prédication chrétiennement humanitaire du bon dominicain. Et les discours ardents ou attendris de fray Buenaventura en- traient par une oreille de l’équipage de la caravelle portu- gaise pour ressortir immédiatement par l’autre même si, pendant le trajet, ils auraient pu leur changer les idées et les étonner alors que, en général, ils n’éveillaient que leur esprit railleur. Lui, cependant, espérait convaincre ces aventuriers, croyait leur inculquer la pitié et les préparer à la bonté, en leur dépeignant de façon imagée les tourments des malheu- reux Indiens de Cuba et de la Española et la féroce barbarie des conquistadores ou conquérants. — Ce sont des brutes – avait-il l’habitude de dire, lors- qu’il faisait allusion à eux – qui ne semblent pas avoir reçu l’eau du baptême. — Nous sommes entre hommes et on peut parler sans réserves. Eh bien, il y en a qui, comme pour s’amuser, vio- lent des femmes mariées, des pucelles et même des fillettes pas encore pubères, leur ouvrant ensuite la panse d’un coup de couteau – comme vous l’entendez ! – je suppose en proie à la démence parce que, autrement, je ne m’explique pas une telle horreur… D’autres, également pour s’amuser, parient que, d’un seul coup d’épée, ils vont faire jaillir les entrailles d’un Indien ou le fendre de haut en bas ou lui trancher la tête

66 1182-1226. (N.d.T.)

– 94 – d’un revers… Que le parieur gagne ou pas, le malheureux Indien se retrouve toujours mort, et bien mort.

— Racontars d’ivrognes ! – dit Rodrigo Rodríguez. — D’ivrognes ! – s’exclama fray Buenaventura – Même sous l’effet de la boisson, les bêtes fauves ne font pas des choses pareilles ! Crois-tu que le vin est une bonne excuse ? — Les fauves n’en boivent pas, mon père. — Tu as raison, mon fils, et l’exemple est mal choisi mais l’intention était bonne… Néanmoins, les fauves, pour tuer, doivent avoir faim ou se sentir traqués, alors que ce genre d’hommes le font par jeu, péché horrible dont le Sei- gneur leur demandera des comptes en temps utiles. — Même s’il s’agit d’Indiens ?

– 95 – — Même s’il s’agit d’Indiens, comme tu dis. Les pauvres ! Au fur et à mesure que passaient ces bourreaux, ils étaient moins nombreux… Vous savez bien qu’ils disposent d’armes légères peu offensives ; les guerres qu’ils mènent les uns contre les autres ressemblent plus à des joutes entre en- fants avec des bâtons ; eh bien, ces énergumènes – que Dieu me pardonne de parler ainsi de chrétiens même s’ils le sont fort peu – prétextaient de fausses rébellions67 pour mettre tout à feu et à sang chez eux et se livrer à d’horribles bou- cheries…

— Et vous ne tentiez pas de les en empêcher, mon père ? — Que pouvions-nous faire, pauvres de nous ! Le grand fray Bartolomé, mon maître et compagnon, et moi, avec moins d’autorité mais un zèle égal, nous condamnions publi- quement de tels crimes, menaçant les coupables de la justice et de la colère de Dieu mais, bah ! c’était prêcher dans le dé-

67 e. o. Puerto Rico, 1511. (N.d.T.)

– 96 – sert ! Le démon revenait les habiter et, lors de leurs crises de folie, ils en arrivaient à arracher les nourrissons des bras de leur mère et, les saisissant par un pied, à les fracasser sur les rochers. Dieu les punira, dans l’autre vie, et on ne devrait pas tarder à y mettre ordre ici-bas, car fray Bartolomé a informé notre roi don Ferdinand de tout cela68 et, comme il est un bon chrétien et si puissant, il saura mettre un terme à tant d’atrocités.

— N’exagérez-vous pas les choses, mon père, poussé par votre zèle et votre amour des indigènes ? – demanda Ro- drigo en ayant une idée derrière la tête. Je connais beaucoup de Castillans qui sont passés par la Española et d’autres îles et je suis sûr que c’étaient de braves gens, incapables de faire du mal à une mouche si ce n’est en cas de légitime dé- fense.

— Je n’exagère pas, non : que le soleil leur ait tapé sur le crâne ou que le diable leur ait perdre la tête, toujours est-il qu’ils prennent plaisir aux bains de sang et que l’on dirait que peu leur importe le ciel ou l’enfer… Oh ! Et comme ils savent varier leurs abominables plaisirs ! Ils dressent, par exemple, des potences, pas très hautes mais fort larges, et ils pendent les Indiens par séries de treize en disant – les blas- phémateurs ! – qu’ils le font en l’honneur de notre Sauveur et de ses douze apôtres… Ensuite, ils boutent le feu en-dessous et, lentement, les brûlent vifs… D’autres les enveloppent de paille bien tassées et liée, des pieds à la tête, comme des

68 Les lois de Burgos du 27 décembre 1512, à l’instigation de Montesinos. (N.d.T.)

– 97 – saucisses, et ils mettent le feu comme pour Judas, fils de Sa- riphée69…

D’autres leur coupent les mains et les pendent à leur cou, par dérision… Ceux qui s’échappent vers les montagnes – il y en a beaucoup et ils ont bien raison de fuir de tels maîtres – on leur donne la chasse comme à des cerfs ou des sangliers, à l’aide de chiens dressés et féroces qui les déchi- rent à belles dents… — Mais notre seigneur le Roi sait-il tout cela ? – deman- da le gabier avec un accent étrange, peut-être d’admiration.

69 Flavius Josèphe, Histoire des Juifs, VI ; Antiquités judaïques, XVII. (N.d.T.)

– 98 –

— Comme je vous l’ai déjà dit, fray Bartolomé a porté tout cela et beaucoup d’autres choses à la connaissance de Son Altesse. Cela figure dans un mémorial70 que mes yeux de pécheurs ont vu et lu. Il y raconte comment, lorsqu’ils veu- lent détruire un village pour quelque motif que ce soit, loin de là, ils rédigent un simulacre de ce qu’ils requièrent et, aussitôt, prétendant que les Indiens ne s’y sont pas soumis, ils l’incendiaient et brûlaient dans leurs huttes tous ceux qui s’y trouvaient ; et ils procédaient toujours de nuit afin que personne n’en réchappe. Et ce que l’on voit lors des expédi- tions ! Les Indiens portent chacun une charge de plus de trente kilos et sont enchaînés afin qu’ils ne puissent pas la déposer et fuir ; en raison de la fatigue, nombre d’entre eux meurent en chemin, au point que dix sur quatre mille en re- viennent… Ne parlons pas des mines ! Je connais un officier qui, ayant reçu trois cents Indiens, n’en avait plus que trente au bout de quelques mois ; on lui en donna trois cents autres et, en un clin d’œil, il les avait également épuisés71. Un cer-

70 1542. (N.d.T.)

71 Capitaine Pánfilo de Narváez. (N.d.T.)

– 99 – tain Alonso Sánchez72 – fray Bartolomé écrit son nom afin que son opprobre soit public – a rencontré un jour un groupe de femmes chargées de victuailles ; elles lui en offrirent ; Sánchez les prit comme si c’était un dû. Et que fit-il ensuite ? Eh bien, il leur ôta purement et simplement la vie… — Sans autre motif que lui avoir donné à manger ? – s’enquit Montes.

— Lui et d’autres du même acabit qui n’ont pas besoin de motif ni de prétexte, et ils n’y regardent pas à deux fois pour tuer du bétail ou du gibier, alors, tant qu’à faire, pour- quoi pas des hommes, a fortiori si ce sont des Indiens… Lors des marches forcées – et les marches sont toujours forcées,

72 De Carvajal. Fray Bartolomé de las Casas, Histoire des Indes, chapitre CLII. (N.d.T.)

– 100 – comme si le temps manquait pour s’enrichir et se condamner – si un Indien tombe d’épuisement, pour qu’il se relève et poursuive sa marche, on lui casse habituellement les dents avec le pommeau d’une épée. C’est pourquoi, et je l’ai déjà dit, ceux qui sont destinés aux mines – ils y meurent comme des mouches – préfèrent souvent se donner la mort plutôt que d’y aller. Et les mères étouffent leurs nourrissons afin que, plus tard, ils ne doivent pas servir de tels maîtres et su- bir de tels tourments73… On dit que Dieu aveugle ceux qu’il veut perdre, mais c’est un concept païen, parce que – Dieu veut, au contraire, tous nous sauver… C’est le diable qui aveugle les chrétiens dans ces circonstances, parce qu’il veut les perdre, non seulement dans l’autre vie mais encore dans celle-ci… Car, qu’espèrent-ils en dépeuplant de la sorte ? Qui va labourer leurs champs et travailler dans leurs mines quand ils auront exterminé les Indiens ? À plus d’une reprise, lors de ces discussions destinées à semer dans l’esprit des découvreurs la graine de la mansué- tude à l’encontre des Indiens, la langue de fray Buenaventura dérapa en parlant des franciscains de la Española, même s’il tentait de la refréner afin de ne pas scandaliser ces âmes de croyants simplets, respectant la bure ou la soutane. Mais c’était plus fort lui, une parole de critique ou de réprobation lui échappait toujours même si, par la suite, leur curiosité étant éveillée, les marins l’interrogeant à ce sujet, il s’em- pressait de filer par la tangente, laissant planer les choses, comme s’il n’avait rien dit. Il sortait davantage de son mu- tisme avec Solís, lui révélant les raisons de son animosité à

73 Histoire des Indes, op. cit., livre III, chapitre VI) . (N.d.T.)

– 101 – l’encontre des missionnaires franciscains qui, en fait, n’était pas personnelle.

Ils étaient arrivés à la Española plus ou moins à la même époque que les dominicains mais, ni eux ni leur prélat, fray Antonio de Espinal74, ne dirent un mot pour condamner la conduite des plus cruels conquérants et colonisateurs. Ils semblaient estimer que les Indiens, étant idolâtres, étaient des esclaves du démon et, dans cette vie, pouvaient l’être des Espagnols qui, même en les tuant, ne changeaient pas leur destin car, pour eux, il n’y avait pas de salut. Ils parais- saient également approuver le concept selon lequel les In- diens étaient des choses, peut-être des êtres irrationnels ou, pire, des suppôts de Satan.

— À noter – disait le frère – que le fait d’être des suppôts de Satan suppose que, comme nous, ils ont une âme…

Tandis que les franciscains considéraient avec indiffé- rence le sort des Indiens – poursuivait fray Buenaventura –, ceux de son ordre75 assuraient la défense de la race persécu- tée et exterminée, déclaraient que les « partages des terres conquises »76 étaient contraires à l’esprit et même à la lettre du christianisme et prédisaient aux Espagnols leur propre perte car ils détruisaient précisément les instruments de leur bien-être et de leur richesse.

74 Fray Alonso de Espinar. (N.d.T.)

75 Les dominicains. (N.d.T.)

76 1512 ; Las Casas en bénéficiera personnellement. (N.d.T.)

– 102 – — Notre admirable provincial, le père Montesinos77, en arriva à refuser l’absolution78 devant le saint tribunal de la pénitence aux chrétiens qui avaient eu des esclaves. Mais savez-vous, capitaine, ce qui s’est passé ? Vous ne pourrez pas le croire !

À l’époque, l’excommunication était le plus grand des châtiments pour le véritable croyant mais, dans ce cas-ci, elle ne servit à rien. Ceux qui étaient excommuniés par les dominicains allèrent simplement se confesser auprès des franciscains, qui leur donnaient l’absolution et la commu- nion. Ce seul souvenir avait le don d’irriter jusqu’au pa- roxysme fray Buenaventura, qui multipliait ses exclamations, faisant sourire Solís, qui l’écoutait avec un certain étonne- ment.

— À vous entendre – lui dit-il un soir – on penserait que le diable est franciscain.

— Oh ! – s’exclama le frère. Si le Malin se déguise un jour en prêtre, je suis sûr qu’il se sentira fort à l’aise dans les habits de cet ordre.

— Cependant, le grand Saint François d’Assise…

— Malheureusement – l’interrompit fray Buenaventura – tous les enfants ne ressemblent pas à leurs parents !

77 Fray Antonio ou Moisés Montesinos. (N.d.T.)

78 Bulletin Hispanique ; 1958, Volume 60, Numéro 1, pp. 5-29 (negación de absolución y medidas de prevención: pp. 16,19,22,24) (BNR.)

– 103 – Une autre fois que le dominicain parlait des Indiens à l’équipage, ce fut Rodrigo qui l’interrompit – depuis quelques soirs, cela le démangeait de lui tirer les vers du nez – avec l’ex abrupto suivant :

— J’ai un doute et je voudrais, mon père, que vous le dissipiez, si possible. Le brave chapelain rangea l’homélie79 qu’il pensait pro- noncer et dit : — Parle, parle. Si c’est possible, je le dissiperai. — Eh bien, en parlant des indiens, mon père, vous faites toujours comme s’il s’agissait d’hommes – commença Rodri- go – et je voudrais que vous me disiez ce qu’il en est car, de l’avis de beaucoup, et pas des moindres ni des plus igno- rants, ils sont en réalité un peu moins que des bêtes irration- nelles. Si ces derniers avaient raison, mon père, le fait de les persécuter et de les tuer ne pourrait être qu’autant de péchés

79 Ecclésiaste 34, 18. (N.d.T.)

– 104 – véniels que l’on efface simplement en se signant avec de l’eau bénite… — Ce sont des péchés mortels ! – s’exclama le frère. Le fait de tuer les Indiens, qui sont des hommes, des créatures de Dieu, constitue un péché mortel80 et des plus graves à ce qu’a déclaré abondamment notre très Saint Père le Pape !… Et ce serait un péché, même s’ils étaient des bêtes, parce que c’en est un de tourmenter n’importe quel être vivant par simple cruauté en étant sans cœur. Cela ne figure pas dans le Décalogue, mais cela n’empêche ; le Seigneur a ordonné qu’on laisse en paix le bœuf et l’âne, c’est-à-dire, que l’on soit doux et bienveillant envers eux, et beaucoup plus envers les Indiens… – Et fray Buenaventura, considérant que l’intérêt est l’un des mobiles les plus puissants de l’homme, insista sur la raison matérielle, déjà exposée en d’autres cir- constances : — Par ailleurs, les bouchers sans âme qui les exterminent ne comprennent-ils pas – ne fût-ce qu’en pre- nant en compte les intérêts terrestres, sans se préoccuper du ciel ni de l’enfer – qu’un Indien vivant et en bonne santé tra- vaille plus et produit plus qu’un indien mutilé ou mort ?… Même si la vie humaine valait bien peu ou rien aux yeux de ces hommes, qui la risquaient à tout moment sans sourcil- ler, les paroles ardentes de fray Buenaventura, à la tombée de la nuit, accompagnée par le ressac incessant de la mer, les crissements du navire, la lueur moribonde de la lanterne et les ombres que le tangage faisait danser autour d’eux, leur causaient une profonde impression. À bord et sous l’emprise

80 Histoire des Indes, op. cit, livre III, chapitre IV ; fray Antón Montesino, Ego vox clamantis in deserto. (N.d.T.)

– 105 – d’une influence si salutaire, horrifiés, ils se juraient en cet instant de ne pas imiter leurs prédécesseurs et compagnons ; une fois sur la terre ferme, à la lumière du jour et en ayant les Indiens à leur merci, il pouvait en être autrement… — Quelle barbarie ! – ajoutait fray Buenaventura. Je ne vous ai pas encore raconté, me semble-t-il, le crime de ce Castillan qui a arraché un petit enfant des bras de sa mère pour le donner en pâture à sa meute affamée81… — Ni celui d’un autre qui ayant, un soir, perdu son poi- gnard dans un marais qu’il traversait avec ses esclaves, prit un autre enfant à sa mère et lui enfonça toute la tête sous l’eau, afin qu’il indique où il faudrait chercher à la lumière du jour… De tels bourreaux finissent par rendre odieuse notre sainte religion, et Dieu ne peut pas leur pardonner un si grand péché… Et fray Bartolomé lui- même témoigne d’un événement où ils l’ont fait prendre en horreur. Pressentant un récit, tous se re- dressèrent ou avancèrent la tête afin de mieux entendre, et fray Buena- ventura le raconta, au milieu d’un si- lence que l’on peut qualifier de « re- ligieux » : — Vous devez savoir que le ca- cique Hatuey82 est passé de la Espa-

81 Très brève relation de la destruction des Indes, « De l’île Es- pañola ». (N.d.T.)

82 chef Taïno. (N.d.T.)

– 106 – ñola à Cuba, fuyant les chrétiens. À peine y apprit-il que cer- tains allaient arriver derrière lui, il réunit les Indiens et leur dit : « Vous savez que les chrétiens viennent par ici et vous avez entendu des exemples de ce qui est arrivé à nombre des nôtres… Ces gens d’Haïti (qui est la Española) viennent faire la même chose à Cuba. Savez-vous pourquoi ? Non seule- ment parce qu’ils sont cruels et mauvais de nature, mais aus- si parce qu’ils ont un dieu qu’ils adorent et aiment beaucoup, et ils nous assujettissent et nous tuent afin que nous le cher- chions ». Hatuey avait à côté de lui un panier rempli de bi- joux en or et il ajouta en les montrant : « Voici le dieu des chrétiens. Célébrons en son honneur des areitos (qui sont des danses et cérémonies) et peut-être ordonnera-t-il aux siens de ne pas nous faire de mal ». Ils dansèrent devant les bijoux jusqu’à tomber épuisés et le cacique Hatuey leur dit alors : « Tout bien considéré, si nous gardons ce dieu, ils fini- ront par nous tuer afin de nous le prendre. Il vaut mieux que nous l’ensevelissions dans la rivière ». Ils jetèrent l’or dans l’eau et Hatuey erra jusqu’à ce que les Espagnols s’emparent par surprise de lui et des siens83 et résolurent de le brûler vif. Hatuey était attaché à un poteau et un frère franciscain lui parlait de Dieu et de notre foi, que l’Indien ne connaissait pas, l’exhortant à y croire s’il voulait aller au ciel, où ré- gnaient une gloire un bonheur éternels ; dans le cas con- traire, il souffrirait perpétuellement dans les enfers. Hatuey, qui l’écoutait en silence, finit par lui demander : « Les chré- tiens vont-ils au ciel ? » — Sans aucun doute ! – répondit le frère. — Eh bien, je préfère aller aux enfers ! – s’exclama le cacique – afin de ne pas être où ils se trouvent et afin de ne

83 En 1512. (N.d.T.)

– 107 – pas revoir des hommes si cruels. L’enfer ne peut pas être pire que le ciel, s’ils y sont84. »

— C’est ainsi que ces faux chrétiens, dans leur aveugle- ment, contribuent à faire croire que nous sommes des ido- lâtres, des adorateurs du veau d’or, et ils écartent de Dieu nombre d’âmes qui se condamnent et dont ils seront respon- sables au jour du jugement dernier !… Lorsque fray Buenaventura eut conclu avec sa pérorai- son, beaucoup s’étaient déjà retirés pour dormir. Le chape- lain n’avait plus pour auditeurs que : Rodrigo qui avait susci- té son discours ; Núñez qui, bâillant, faisait des signes de croix sur son immense bouche ouverte ; et Paquillo, que te-

84 Très brève relation de la destruction des Indes, op. cit.,« De l’île de Cuba ». (N.d.T.)

– 108 – nait éveillé tout écho, tout ce qui avait la saveur, la couleur ou l’odeur de l’aventure. — Toi, au moins, gamin – lui dit le frère – tu suivras la bonne doctrine et tu traiteras ces malheureux comme s’ils étaient tes frères… J’attends cela de toi. — Je vous le promets, mon père, si c’est possible – ré- pondit Paquillo. Je ne leur voudrai pas de mal, tant qu’ils ne m’en feront pas… Et s’ils m’en faisaient, je ne leur en ferais pas non plus… tant que cela me serait possible… Fray Buenaventura rit de la candeur et de la franchise du jeune garçon, même si ses propos n’étaient pas conformes avec ce que le Christ nous enseigne ; lui mettant la main sur la tête avec une expression paternelle, il ajouta gravement : — Cela ne suffit pas, ce n’est pas suffisant, mon garçon. Dieu ordonne que nous pardonnions à nos ennemis. — Eh bien, pour le moment, ils sont pardonnés ! – con- clut Paquillo en courant vers son hamac.

– 109 – XVII

LA VISION DE LA MER D’EAU DOUCE

Les caravelles poursuivirent leur voyage avec du beau temps, en longeant la côte, basse, puis parfois plus haute, et qui s’étendait du Nord-est au Sud-ouest. L’équipage était beaucoup plus animé que d’ordinaire, pressentant Ia fin du voyage, et Paquillo bondissait de joie en pensant qu’il allait commencer vraiment sa vie d’aventures et se rapprocher du but de ses aspirations ingénues. Ce qui contribua à l’allégresse générale, ce fut la célébration de la fête de Noël, avec les éléments dont on pouvait disposer, en l’occurrence : danser seulement entre hommes ; se souvenir du foyer loin- tain pour ceux qui en avaient un ; pour les autres, se rappeler des fêtes de leur village ; chanter en chœur des villanelles, fray Buenaventura terminant en récitant, marquant les cé- sures, la vieille cántiga de Villasandino.

Généreuse, très belle immaculée sainte Vierge, vertueuse, puissante, dont Lucifer a peur ; si grande fut ton humilité que toute la Trinité

– 110 – en toi est inclue et se chante. C’est dans ton placenta que tu as ressenti le premier plaisir, dame, quand le vrai messager t’a saluée et que tu lui as répondu. Tu as porté dans ton sein virginal le Père Céleste, à qui tu as donné naissance sans douleur.

Mais il dut soudain s’interrompre. Des cris et des injures attirèrent l’attention de tous. Il venait de se produire une des altercations coutumières entre Pedro Núñez et Santiago Cor- zuelo qui, malgré les éternelles tensions entre eux, ne parve- naient jamais à se séparer, comme un ménage de râleurs qui ne laisse pas passer de jour sans querelle afin d’avoir ensuite le plaisir de conclure la paix. Entre menaces et insultes, ils se disputaient, cette fois, à propos d’un couteau pliant en corne que Núñez avait dérobé à Corzuelo et qui ne réapparaissait pas ni ne rentrait en possession de son légitime propriétaire. Habitués à ces bourrasques, où cela tonnait beaucoup sans qu’il y eut de retombées, les marins entourèrent les adver- saires, les excitant et riant aux éclats de la saynète qu’ils leur offraient pour clôturer la fête. Mais la dispute se révéla plus grave que d’habitude parce que l’enjeu était ce précieux cou- teau. Ils se traitèrent de voleur et d’effronté, de truand, de mauvais ami et de traître, pires que des femmes se crêpant le chignon, et ils en seraient sûrement venus aux mains si une bonne âme, caritative et bien inspirée, n’avait averti le capi- taine, qui arrivait en courant. Les champions disparurent, encore essoufflés de s’être égosillés, et la veillée de Noël prit

– 111 – fin sur cet incident, mais il n’en était pas de même du litige relatif au couteau… Le lendemain, 25 décembre, les caravelles passèrent en face d’un cap que Solís baptisa de Navidad (de Noël), et dont on ne connaît pas la localisation avec certitude, car il peut s’agir tant de la pointe de la Isla Grande, actuellement appe- lée Acaya, que du pic de Paraty, à quelque trente lieues de Río de Janeiro.

Le vent intermittent, qui soufflait depuis les terres, ten- dait à les éloigner de la côte mais, en trois cinglages, ils aperçurent un port naturel, formé par l’embouchure d’un pe- tit cours d’eau, que le capitaine général baptisa des Saints In- nocents, pour commémorer la fête du jour, le 28 décembre. Ils mouillèrent et restèrent quelque temps là, parce que le vent, faible, ne les favorisait pas. Mais, dès qu’un vent à nouveau favorable se mit à souffler, ils reprirent leur naviga- tion le long de la côte ; quelques trente-cinq lieues plus loin, ils aperçurent le cap de la Cananéia, qu’ils appelèrent ainsi

– 112 – en l’honneur de l’Épiphanie, et, avançant en direction du sud-ouest, ils découvrirent l’île de la Plata, connue au- jourd’hui sous le nom de San Francisco, à vingt-sept lieues plus ou moins de la Cananéia. De là, ils allèrent mouiller en face d’une terre à laquelle, plus tard, on a donné le nom de Baie des Perdus (ou de Paranaguá) et, de là, tout en conti- nuant toujours à longer la côte, ils passèrent en vue d’une île très vaste et belle, celle de Santa Catalina, couverte de hautes forêts dont, çà et là, émergeaient les panaches élé- gants de grands groupes de palmiers. Ils doublèrent ensuite le cap de las Corrientes, appelé maintenant de Santa Marta Grande, à quelque vingt-cinq lieues de Santa Catalina et, sans trop s’écarter de la côte, poursuivirent jusqu’à ce qu’ils aperçurent San Domingo de las Torres et, après plusieurs longues journées, aussi tranquilles que les précédentes, la ri- vière Chuy et los Castillos. — Ce voyage était visiblement bénit de Dieu ! – disait fray Buenaventura.

– 113 – Peu après, ils doublaient le cap de Santa María et, ayant en vue l’île de San Sebastián de Cádiz – aujourd’hui de Lobos (… de mer) –, ils pénétraient dans un port que l’on appela de Nuestra Señora de la Candelaria – Maldonado – le 20 février 1516, cent trente-cinq jours après avoir quitté Lepe. Bien heureux, ils touchaient au but, sans le plus léger contre- temps, au terme d’un voyage extrêmement rapide pour l’époque et ces latitudes, comme guidés par la main de la Fortune elle-même, atteignant les terres et les eaux que cherchait le grand Juan Diaz de Solís, perspicace découvreur de trésors. Les ancres jetées, le capitaine général ordonna que l’équipage des trois caravelles s’arme de la tête aux pieds, comme pour les grandes solennités ou comme s’il devait li- vrer bataille, et il prit d’autres dispositions, préparant ce qu’il envisageait de faire. L’un de ses ordres consista à arracher de leur lit de douleur les malheureux Alarcón et Marquina, qui y étaient retournés, redevenus des épaves humaines de- puis qu’ils avaient quitté Río de Janeiro. Mais en apprenant qu’on les secouait sur leur lieu de tourment pour qu’ils se rendent à terre, ils recouvrèrent dans la mesure du possible leur courage – pas très grand, étant donné leur faiblesse –, comme si on les invitait à passer de l’enfer au ciel. Les trois navires, immobiles, caressés par les eaux inof- fensives, parurent solitaires et abandonnés pendant que les marins s’apprêtaient dans l’entrepont. Quelques instants plus tard, ils commencèrent à apparaître, équipés et martiaux, harnachés comme ils l’étaient, grâce aux soixante corselets que, avec leur armure de tête, le Roi Ferdinand avait « prê- tés » à Solís. Quand tout le monde fut prêt, les canots furent mis à l’eau et Solís embarqua sur le sien avec Marquina, Alarcón, fray Buenaventura et quelques rameurs choisis.

– 114 – Francisco de Torres fit de même avec le quartier-maître Die- go García et d’autres officiers ; et Juan de Lisboa le suivit avec ceux de l’autre caravelle latine, à l’exception du cam- busier Martín García, qui venait de se sentir tellement ma- lade qu’il dut rester à bord. Les hommes indispensables à leur sécurité montaient la garde sur les navires et, sur la ca- ravelle portugaise, les servants des deux bombardes. Ceux qui descendaient à terre portaient, outre leurs armes habi- tuelles, des haches d’abordage ou des pioches et, l’un d’eux, une grande croix fabriquée à partir de deux petits mâts de réserve. Dès que les proues des canots touchèrent le sable du ri- vage, les hommes sautèrent à terre et allèrent se mettre en rang près du capitaine général, qui avait déjà à côté de lui : fray Buenaventura, en vêtement liturgique ; Alarcón et Mar- quina, une épée de cérémonie à la ceinture mais jaunes et les jambes flageolantes ; et, derrière eux : Francisco de Torres, Juan de Lisboa et Diego García de Moguer. L’enseigne Mel- chor Ramírez s’était placé à la tête des « gens qui avaient dé- barqué », en somme, quasi la totalité de l’équipage. Les marins faisaient face à la mer, les chefs face à la terre et tous gardaient un silence religieux quand Juan Díaz de Solís avança d’un pas, dégaina son épée, la brandit dans le soleil et coupa une branche de l’arbre qu’il avait à sa droite. Il donna un ordre bref, répété par l’enseigne, et ceux qui portaient une hache d’abordage imitèrent aussitôt l’action du capitaine général, abattant des branches d’autres arbres, tandis que ceux qui portaient des pioches commen- çaient à creuser une large tranchée et, avec la terre extraite, élevaient un simulacre de muraille. D’autres, entretemps, pratiquèrent deux trous dans cette terre que les outils labou-

– 115 – raient pour la première fois et, dans l’un d’eux, ils plantèrent l’arbre de la justice ; l’autre était destiné à la croix.

— À vous, s’il vous plaît, mon père ! – dit Solís à fray Buenaventura, lui faisant un signe avec son épée. Des trompettes sonnèrent, les bombardes tonnèrent de- puis le bord. Juan Díaz de Solís mit le genou en terre, ainsi que les autres ; et le dominicain, aidé par deux marins, plan- ta la croix dans le second trou et bénit du même large geste la nouvelle terre et ses conquérants qui courbaient humble- ment la tête devant le symbole chrétien : — In nomine Patris, et Filii et Spiritus Sanctus ! — Amen ! – répondirent-ils tous d’une seule voix. Solís leva l’étendard de Castille de la main gauche et, brandissant de la droite, son épée nue autour de lui, il cria à trois reprises : — Cette terre est pour le Roi d’Espagne ! Une acclamation vibra dans les airs et irradia dans l’immense solitude.

– 116 – Se remettant debout d’un bond, arborant leurs armes et les brandissant au-dessus de leur casque en acier, les rudes marins, enthousiastes, répétèrent leurs vivats jusqu’à ce que, sur une injonction du capitaine général, ils redevinrent silen- cieux, tout en étant encore palpitants. Solís s’assit sur le tronc d’un arbre abattu ; son état- major l’entoura ; la troupe rectifia sa formation. Sur un signe de l’enseigne, les marins Pedro Núñez et Santiago Corzuelo sortirent des rangs et avancèrent de trois ou quatre pas vers le capitaine général qui, pour la première fois sur ces terres, allait exercer la plus importante de ses fonctions, en rendant la justice85. Invité à exposer ses doléances, Santiago Corzuelo accu- sa Pedro Núñez de lui avoir dérobé un couteau qui lui était très utile et auquel il tenait beaucoup ; il exigeait la restitu- tion de l’objet et le châtiment du coupable. Pedro Núñez, s’exprimant à son tour, se défendit en alléguant que, s’il avait pris le couteau, c’était en raison de l’amitié qui, jus- qu’alors, le liait à Corzuelo, sans la moindre intention crimi- nelle et avec celle, ferme, de le lui rendre dès qu’il eut élagué un cordage qui s’effilochait. Malheureusement pour lui, le couteau, lui échappant des mains, tomba à la mer, où il était impossible de le récupérer. Corzuelo insista sur le fait que la perte de l’objet lui causait un grand préjudice et sur le fait que Núñez, en étant responsable pour l’avoir pris en cachette et sans le consentement de son propriétaire, lui en l’occurrence, devait le lui rendre et, en cas d’empêchement, le lui rembourser avec des intérêts, étant donné ce que cela

85 Capitanía del Rey, voir carte. (N.d.T.)

– 117 – coûterait de le remplacer, montant fixé par la justice. Les ayant entendus et n’estimant pas nécessaire de faire appel à des témoins, Juan Díaz de Solís rendit au nom de Son Al- tesse le Roi d’Espagne, don Ferdinand le Catholique, la sen- tence suivante : — Pedro Núñez restituera à Santiago Corzuelo le cou- teau qu’il lui a pris contre sa volonté et, à défaut, quelles que soient les raisons, qu’elles soient de force majeure ou pas, il lui paiera la somme nécessaire afin qu’il en acquière un autre, parmi les meilleurs destinés au troc, en bonne mon- naie sonnante et trébuchante, étant exempté des dépens s’il n’y a plus préjudice. C’est le jugement du Roi ! Les parties adverses, dûment rappelées à l’ordre au pré- alable, comme s’en était douté l’équipage, s’estimèrent satis- faites. Le répartiteur Alarcón, déroulant alors un grand do- cument qu’il tenait à la main, s’avança au milieu de l’assemblée ; de sa voix, faible et sans inflexions, il lut l’acte dans lequel était stipulée la localisation exacte de cette terre et la si solennelle prise de possession au nom du Roi, de cette « province en tout et en partie », conformément aux ins- tructions de Son Altesse. Le tronc, sur lequel s’était assis Solís pour administrer la justice, servit de bureau à Alarcón, exténué, qui mit l’acte le plus possible à plat et, plaçant tout près l’encrier en corne, il présenta la plume d’abord au capitaine général, comme c’est de rigueur et, successivement, aux autres afin que tous le si- gnent comme témoins. La majorité, sans exclure le quartier- maître Diego García, se borna à apposer une croix, à côté de laquelle le répartiteur écrivit le nom de chacun. La cérémonie était terminée. Les marins rompirent les rangs. Solís donna l’ordre qu’on leur distribuât une double

– 118 – ration de vin en l’honneur de l’événement et, entouré par Francisco de Torres, Juan de Lisboa, fray Buenaventura et Diego García, il se mit à marcher lentement, comme s’il se promenait, entre les broussailles et les arbres bas de cette côte qui, à partir de ce jour-là, appartenait désormais légiti- mement au Roi Ferdinand et à la couronne d’Espagne avec les terres qui la prolongeaient. Rodrigo Rodríguez et Paco del Puerto leur frayaient un passage, abattant avec leurs haches d’abordage les branches et les buissons lorsqu’ils l’obstruaient, traçant une sorte de sentier tortueux, nouveau mais effaçable signe de la prise de possession. La chaleur était étouffante mais, une fois au sommet d’une colline pas très haute qu’ils avaient à leur gauche, ils furent rafraîchis par la brise marine qui leur caressa le visage. Ils s’assirent pour la respirer à proximité d’un bosquet, qui les abritait du soleil grâce à sa frondaison verte, légèrement agitée alors par l’air ; les vents soufflant des pampas et ceux du sud-est devaient s’y en donner à cœur joie et le décoiffer très sou- vent, à en juger par les branches tordues et les troncs incli- nés. Du haut de la colline, ils voyaient à leurs pieds le port de Nuestra Señora de la Candelaria entre les deux pointes, de l’Est et de la Ballena, et les îles qui l’abritent et le défendent des vents de mer extérieurs. Et c’est de là, d’après ce que ra- content à l’unisson les chroniqueurs de l’époque et nombre d’historiens ultérieurs, que, ce mémorable soir, ils contem- plèrent ce que, ensuite, plus aucun œil humain n’a revu, à partir de ce même endroit. Mirage, vision prophétique, sug- gestion de Solís qui connaissait les parages ?… Qui sait et qu’importe ?… Le fait est que, au-delà, à leur gauche, ils vi- rent la mer immense et verte qu’ils venaient de sillonner, vaste et calme, mais, à leur droite, comme les appelant, une autre immense mer, brune, majestueuse et tranquille. – 119 – — Ma mer ! – pensa le grand marin. Et dans son dos, sommeillait comme une autre mer, la troisième, l’étendue couverte de bouquets d’arbres et d’herbe, que le soleil avait rendue dorée et empourprée, avec la silhouette du Pain de Sucre au lointain, et parsemée de pe- tites collines allongées et sinueuses, traversées par des cours d’eau dont la verdeur de la végétation, plus fraîche et plus in- tense, révélait le passage. Pas une seule silhouette humaine n’ôtait à ce moment la solennité à ce paysage grandiose qu’animaient uniquement la brise berçant les hautes herbes, les rapaces décrivant des cercles dans le ciel ou le déchirant comme une flèche, l’un ou l’autre petit oiseau chantant dans les branches, un plus gros gibier, signe de vie dans les ter- rains incultes et broussailleux. Le soleil déclinait et les nuages entamaient un merveilleux ballet fantasmagorique aux formes fugaces et aux couleurs changeantes. — Quel beau ciel, quel beau sol ! – s’exclama fray Bue- naventura – Si l’un me donne l’impression d’être en Anda- lousie, l’autre n’attend que l’homme pour se transformer en un verger. — Et l’homme viendra, il est déjà arrivé, mon père, avec l’aide de Dieu – dit Solís –. Mais vous devez admirer des choses encore meilleures et plus fertiles. — Dommage qu’il n’y ait pas ici quelques Indiens afin de voir quelle physionomie ils ont – soupira le dominicain. — Il y en a mais nous ne les voyons pas, parce qu’ils sont sûrement dissimulés dans l’épaisseur des fourrés et ils ne nous perdent pas de vue depuis qu’ils ont remarqué les caravelles. — Doit-on les craindre ?

– 120 – — Pour le moment, ils se méfient de nous, évitant le contact – dit Torres. Par ailleurs, vous n’auriez pas le temps de les endoctriner, mon père, parce que vous ne connaissez pas leur langue, que le vent du sud-ouest commence à rafraî- chir l’atmosphère et, qu’à toutes fins utiles, il vaut mieux s’empresser de regagner les navires, ce qui ne vous laissera pas le temps de l’apprendre.

— C’est aussi mon avis – renchérit Solís.

Pendant qu’ils redescendaient, empruntant le sentier improvisé, le capitaine général entendit que Rodríguez, en montrant la mer brune qu’ils croyaient voir d’en haut ou qu’ils voyaient réellement, informait Paquillo d’un ton magis- tral :

— Cette mer sombre que tu vois à ta droite est le pas- sage que nous cherchons vers l’autre mer qu’a vue Vasco Núñez de Balboa.

Solís sourit et, ne voulant pas répliquer directement à son domestique, il se plaça en face de fray Buenaventura et lui dit à bien haute voix :

— Admirez, mon père, une des plus grandes merveilles de Dieu dans ces terres. Les eaux que vous voyez, de couleur moins bleue et beaucoup plus trouble que celle des eaux pro- fondes, n’est pas un bras de mer, comme on dirait, étant donné que l’on n’en voit pas la fin même aux confins de l’horizon. Regardez là, où les couleurs se mélangent et se confondent dans un étroit espace aux teintes irrégulières. C’est là même que viennent mourir les eaux saumâtres de l’Océan et que commencent les eaux douces de l’autre mer inconnue…

– 121 – — Une mer d’eau douce ! ô prodige ! – s’exclama le frère admiratif, alors que Rodrigo et le mousse étaient bouche bée. — Oui – poursuivit Solís – Une mer d’eau douce, comme vous venez de le dire. Mer par son incomparable grandeur, douce en raison de la douceur de ses eaux. Ce n’est pas une mer mais bien un fleuve, un fleuve qui, par sa largeur que rien n’interrompt, est le plus prodigieux qu’aient vu, jusqu’ici, des yeux humains. Le frère leva les bras au ciel et resta un instant comme en pâmoison. — C’est un fleuve ! – finit-il par s’exclamer – Qu’en est-il alors du Guadalquivir, du Tage et de l’Èbre, dont nous étions si fiers ?… — Ceux-là et d’autres d’Europe, les plus grands, ne sont que de simples petits cours d’eau à côté de celui-ci, que nous ne tarderons pas à remonter, mon père… Sur ses rives, nous trouverons les choses matérielles pour lesquelles nous sommes venus et, vous, de nombreux infidèles idolâtres à ar- racher au démon… Et il se peut que, vaille que vaille, en amont et avec l’aide de Dieu, nous arrivions où j’espère… — Allons-y le plus tôt possible ! – s’exclama le frère en se mettant à marcher beaucoup plus vite, comme si les In- diens l’attendaient à quelques pas – Bénit soit Dieu qui m’a permis de voir tant de grandeur ! Et il continua à redescendre le sentier sans quitter des yeux l’extraordinaire fleuve qui, sans berges, allait, au loin, rejoindre le ciel. — Donc ce n’est qu’un fleuve ! – dit d’une voix insipide Rodríguez, qui était resté en arrière.

– 122 – — L’aurais-tu voulu plus petit ? – demanda le mousse d’un ton moqueur.

— Pour être grand, il est grand, je ne le nie pas – répli- qua Rodrigo. – Mais c’est de l’eau douce et je préférerais un bras de mer, même s’il ne fait que deux doigts de large…

— Mais, pourquoi ? – demanda le jeune garçon, surpris.

— Ne comprends-tu pas, sot, qu’un fleuve ne nous mè- nera nulle part mais qu’un détroit, fût-il celui de Gibraltar, pourrait nous donner l’accès à une autre mer, qui a sur ses rivages autant d’or que de perles et des richesses de toutes sortes ?

— Peut-être un fleuve peut-il nous en rapporter égale- ment ? Et qui nous dit que, sur ces terres, il n’y pas autant et plus de ce que tu dis ? – objecta avec bon sens le jeune gar- çon.

Une fois à bord, Solís se convainquit que les navires ne couraient aucun danger dans le port de Nuestra Señora de la Candelaria, et il différa le départ jusqu’au lendemain matin. Avec la double ration de vin et un supplément au repas habi- tuel, l’équipage fit un festin et passa une agréable veillée. Mais, au petit matin, les caravelles levèrent l’ancre, l’une après l’autre, se mettant lentement en route, avec peu de voilure, ne perdant pas de vue les dunes de la côte et une butte isolée et conique peu élevée, ainsi que plusieurs plis de terrain, plus élevés que le reste, auxquels on devait plus tard donner le nom de Cuchillas de las Animas ou de Cuchilla Grande. Entre les rochers escarpés et les terrains incultes et broussailleux de la rive, on voyait des gens qui se glissaient comme pour observer les navires. Des groupes de huttes mi-

– 123 – sérables se dressaient çà et là mais cela ne méritait pas d’être appelé un village, et il en sortait des hommes et des femmes, faisant de grands gestes, qui semblaient leur offrir diverses choses, les invitant à débarquer. Ils atteignirent alors l’embouchure du cours d’eau appelé aujourd’hui de Santa Lucía86 et Solís, pensant qu’elle pouvait offrir un bon abri, envoya le canot avec une ligne de sonde et il sut ainsi qu’il avait effectivement un lit profond et large, propice à un mouillage.

À la faveur de la marée, les navires franchirent la barre, la caravelle aux voiles latines de Rodrigo Alvarez de Car- taya87, qui était la plus petite, ouvrant la marche, suivie par celle de Torres et, en dernière position, la caravelle portu- gaise. Ils jetèrent l’ancre et Solís débarqua – c’était obligé – flanqué de ses inséparables Alarcón et Marquina, pour qui chaque escale devenait comme une résurrection.

Le site était accueillant, la viande d’animaux sauvages abondante, suffisant à elle seule pour assurer le ravitaille- ment de l’équipage, et Solís décida d’y faire halte afin de vé- rifier et caréner ses navires, qui en avaient bien besoin après une si longue navigation. Des milliers de canards et d’autres oiseaux aquatiques peuplaient le fleuve et, à la tombée de la nuit, ils étaient si prodigieusement nombreux qu’ils for- maient, d’une rive à l’autre, un tapis vivant de plumes.

86 Le rio Santa Lucia constitue la limite naturelle entre les dé- partements de Florida y Canelones, de Canelones y San José, plus au sud, et de San José y (BNR.)

87 Juan de Lisboa. (N.d.T.)

– 124 – — Ce fleuve ne charrie pas de l’eau mais des canards – fit observer, un soir, Rodrigo Rodríguez, qui, ce faisant, de- vint son parrain en le baptisant car, à partir de ce moment- là, tous l’appelèrent le fleuve des canards.

La présence de l’homme ne leur faisait pas peur et ils ne la fuyaient pas, sans doute parce que les Indiens, préférant sans doute la chasse au plus gros gibier, passaient peu ou pas du tout dans ces parages où il était rare. Les hommes de Solís en tuèrent, autant qu’ils voulaient, soit à l’arbalète, soit à coups de bâtons et de pierres, rarement à l’aide d’une ar- quebuse afin d’économiser la poudre. Un jour, bien qu’il continuât à être malade, le cambusier Martín García inspecta les soutes des caravelles afin de pro- céder à l’inventaire des vivres encore disponibles et, en fin d’après-midi, Solís le voyant approcher, pâle et tremblant, lui dit : — Mets-toi au lit, Martín, tu as très mauvaise mine. — Il ne s’agit pas de cela, monsieur ! – balbutia le cam- busier – Il m’est difficile de l’annoncer mais le devoir me

– 125 – l’ordonne !… Aujourd’hui, en ouvrant une barrique de salai- sons, j’en ai trouvé le contenu entièrement pourri… — J’étais déjà étonné – s’exclama Solís – qu’il n’y avait pas encore eu de plainte à propos de ce qu’ont fait embar- quer ces messieurs de Séville. Bah ! Le dommage n’est pas si grand… Fais jeter la barrique à l’eau et ouvre-en une autre. — C’est ce que je viens de faire monsieur. Mais c’est le cas pour la deuxième et la troisième barriques qui se sont ré- vélées en aussi mauvais état que la première, si pas pire… Nous risquons de nous retrouver sans vivres… Les brouil- lards, les grandes chaleurs, le suintement ont dû humidifier la viande… — Mais, est-ce que tout est pourri ? — Tout, oui, monsieur – répondit avec regret le cambu- sier. La viande nage au sein des barriques dans un liquide épais, noir et fétide ; même les chiens n’en voudraient pas. — Quelle poisse ! — Ce n’est pas ma faute, monsieur !… — Je le sais bien. Mais, est-ce le cas sur les trois na- vires ? — Sur les trois navires, oui monsieur. La colère du capitaine général avait été croissant : il tré- pignait, il jurait et lançait des imprécations à l’encontre des officiers de la Casa de Contratación, qui ne seraient jamais assez maudits, coupables de ce grave manquement qui, en haute mer, aurait pu être catastrophique. Comment leur par- donner que des salaisons, préparées pour durer deux ans au moins soient avariées, sans cause connue, quelques mois

– 126 – après avoir quitté l’Espagne ? N’était-ce pas un acte de cri- minelle malveillance ? L’accès de colère de Solís fut tellement violent qu’aucun des témoins de la scène n’osa s’approcher ; tous, néanmoins, comprirent la gravité de ce qui le mettait dans une si grande fureur et ils ne furent pas peu surpris en voyant que le fou- gueux capitaine se calmait aussi soudainement qu’il s’était irrité, ceux qui méritaient sa colère étant loin… — Allons évaluer les dégâts – dit-il à Martín García. Il ne restait, effectivement, qu’une seule barrique de viande que l’on pouvait consommer. — Fais jeter à l’eau toute cette pourriture, mais garde les barriques – ordonna Solís –. Elles vont nous servir car ces terrains broussailleux ne doivent pas manquer de gibier ; nous en salerons et sécherons la viande. Un pied-de-nez pour ces messieurs de la Casa ! Tranquillisé comme lui, l’équipage, ayant instantané- ment été mis au courant, passa cet après-midi-là et le matin suivant à pêcher, voire à retirer de l’eau à mains nues les poissons qui affluèrent par bancs pour participer au banquet somptueux qu’on leur offrait. Les chefs et les officiers, que Solís convia pour la forme à un conseil, se montrèrent tout aussi tranquilles : Dieu et ces terres allaient pourvoir… — Dès que je reviendrai de la rade que je pense exami- ner de plus près ces jours-ci, nous veillerons à réparer le pré- judice et nous aurons davantage et de meilleurs vivres qu’avant – dit le capitaine général, considérant déjà terminée la réunion. Et la très désagréable aventure passa au second plan, comme une chose de peu d’importance…

– 127 – Un mois durant, résonnèrent dans cette magnifique soli- tude les coups de marteaux des charpentiers et des calfats, les cris et les chants des marins, que se délassaient sur la rive, les appels ou cris de triomphe des chasseurs lorsque, très exceptionnellement, ils découvraient ou ramenaient une pièce de gros gibier : avoir tué un daim ou un cerf élaphe était célébré comme un acte glorieux et relevait l’humble pi- tance du bord, se muant en table seigneuriale. De temps à autres seulement, parmi les broussailles, à l’aube ou au crépuscule, dans les environs immédiats du dé- barcadère improvisé ou un peu plus loin, sous les arbres, on observait des mouvements insolites, des glissements d’ani- maux intimidés, se disposant à fuir mais, lorsque les chas- seurs accouraient à toute vitesse, ils ne trouvaient rien, ne découvraient rien : pas une trace, pas la moindre empreinte, rien si ce n’est quelques tiges brisées et, alentour, les feuilles des plantes basses débarrassées de la poussière qui les cou- vrait habituellement…

– 128 – XVIII

LA PREMIÈRE TOMBE

— Comment pensez-vous appeler cela, que l’on pourrait bien nommer mer d’eau douce, comme on a déjà commencé à le faire ? – demanda fray Buenaventura à Solís pendant que la caravelle aux voiles latines de Rodrigo Alvarez de Cartaya, sur laquelle ils avaient embarqué, longeait lentement les es- carpements de San Gregorio, en remontant le grand fleuve. Ils naviguaient à un peu plus d’une lieue du port de los Patos, où étaient restés les deux plus grands navires. Souhai- tant être le premier, si pas le seul, à reconnaître ces parages, le capitaine général avait laissé Torres pour le remplacer à bord de la caravelle portugaise et Diego García de Moguer pour commander l’autre caravelle, embarquant sur celle aux voiles latines déplaçant le moindre tirant d’eau et disposant d’une excellente voilure. Le hasard avait fait que l’indis- position du cambusier Martín García, ayant débuté à la Can- delaria, avait exigé, en s’aggravant, la présence à bord de fray Buenaventura, qui prodigua au malade le peu de soins corporels que son expérience lui permettait d’offrir, et les aides spirituelles que lui imposait sa fonction de prêtre. Sui- vant les préceptes de la médecine usuelle parmi les décou- vreurs des Indes, le brave frère commença par le saigner et

– 129 – lui administrer une potion composée de gousses d’ail pilées et cuites dans du vin, veillant ensuite à ce qu’il s’habille afin de transpirer le plus possible. Mais les douleurs ne prirent pas fin, le patient frissonnait de plus en plus et sa fièvre augmentait au point qu’on le donnait déjà pour mort. Le do- minicain regrettant de ne pas avoir sous la main quelques grillons – ou, à défaut, ne fût-ce que des cigales – afin de les griller, les moudre et les ajouter dans du vin – remède mer- veilleux –, essaya alors une autre décoction composée de bouillon d’olives conservées dans de l’huile, bien chaud, dont Martín García but d’abondantes quantités, sans autre résultat que de lui retourner les entrailles et augmenter sa fièvre et sa prostration. Lorsque la caravelle aux voiles latines leva l’ancre, craignant qu’il mourût d’un moment à l’autre, le frère ne voulut pas le délaisser et c’est ainsi qu’il se trouva enrôlé dans l’expédition du capitaine général. En faisaient également partie, mais sans beaucoup d’enthousiasme, ses sentinelles obligées, les officiers Alarcón et Marquina qui trouvaient si agréable le port de los Patos, ainsi que Rodrigo Rodríguez, en sa qualité de domestique, et Paquillo, en tant que page extra-officiel de Rodríguez.

— Eh bien, à moins d’un fait notable qui infléchisse ma décision – dit Solís, répondant à la question du dominicain – j’ai pensé l’appeler Río de Santa María, en l’honneur de Notre Sainte Vierge qui, visiblement, nous a protégés en écartant de nous jusqu’ici dangers et difficultés.

— « Oh Marie, porte et voie de salut et de repos » – réci- ta le frère, se référant une nouvelle fois à Villasandino – Le voyage, en vérité, a été miraculeux et je ne peux qu’ap- plaudir à une si pieuse intention…

– 130 – Accourant, un marin l’interrompit à cet instant, pour l’avertir que Martín García était à l’article de la mort et ré- clamait une confession. Le frère se précipita à la soupente où le cambusier ago- nisait effectivement ; s’asseyant à côté de lui comme il put, il ne quitta plus son chevet jusqu’à ce que, après s’être confes- sé, divaguant dans le délire de son agonie, il rendît le dernier soupir. La nouvelle du décès du cambusier se répandit dans le navire et l’équipage s’apitoya mais s’atterra également. — Un naufrage au départ, un défunt à peine arrivés… des vents mauvais soufflent sur nous – commenta gravement Rodrigo, oubliant toutes les réussites du voyage. — Dis ! – s’exclama le mousse, se penchant à son oreille : — Te souviens-tu de la gitane de Lepe ? Eh bien, elle a signalé le mort parmi ceux qui ne devaient pas revenir ?… — Mais c’est vrai. Malédiction !… — Et le glas de Velilla88 n’a pas sonné ? – s’enquit le mousse. — Oublie cela, sot. Il sonne pour les rois et non pour un pauvre cambusier comme Martín García… Si le glas de Velil- la avait sonné, cela aurait été pour don Ferdinand, que nous avons laissé en bien mauvaise santé, même si je lui souhaite

88 Se réfère à un glas réel qui se trouve dans l’ermitage de Saint Nicolas de Bari de Velilla de l’Èbre et qui aurait eu la propriété de sonner sans intervention humaine. (BNR.) Voir « Notes du Traduc- teur . »

– 131 – mille ans de vie… Mais, à présent que j’y pense, n’ouvre pas la bouche… Ces mauvais augures saperaient le moral de l’équipage… — Tu as bien évoqué, toi, la caravelle qui a coulé ! Même si, pour moi, ce fut une chance car, sans cela, je ne se- rais pas ici… – dit le jeune garçon – Mais ne t’inquiète pas, je ne desserrerai pas les lèvres. — Tous connaissaient l’accident de la caravelle et il était difficile de le passer sous silence, alors que l’histoire de la gi- tane – Dieu nous en préserve – nous seuls sommes au cou- rant. Bénéficiant d’un temps paisible que « la mort du cambu- sier n’avait pas perturbé, comme ne le perturbent jamais les affaires humaines », à ce qu’observa le philosophe Rodrigo, la caravelle aux voiles latines continuait à naviguer très dou- cement. Elle doubla la pointe de Santa Bárbara où, aujourd’hui prospère la Colonia del Sacramento, laissa derrière elle la pe- tite île, pas encore baptisée – mais, plus tard, si souvent mentionnée – de San Gabriel, les îlots immédiats, et suivit aussi près que possible la côte, dominée çà et là par des col- lines et des rochers escarpés et couverte d’une végétation qui reverdissait, passées les rigueurs de l’été. À la tombée de la nuit, après de longues prières pour le repos de l’âme du défunt, fray Buenaventura sortit sur le pont pour prendre un bol d’air au moment où Solís, pré- voyant une nuit sombre, ordonnait de mouiller au milieu du fleuve, à l’abri de toute attaque possible depuis la terre – il avait cru remarquer, sans les craindre, plus de mouvements de gens sur la côte – et à titre de précaution afin de ne pas

– 132 – s’échouer sur l’un des nombreux bancs de sable qui ren- daient la navigation plus difficile. Pendant que les marins repliaient les voiles et jetaient l’ancre, Solís les surveillait depuis la dunette. Fray Buena- ventura et les officiers royaux se réunirent avec lui. — Le malheureux est mort comme un juste – dit le frère, faisant allusion à Martín García. Il me semble qu’il ira droit au ciel. — Tout cambusier ne doit-il pas d’abord passer par le Purgatoire, mon père ? – demanda le chargé de factorerie Marquina. — Vous connaissez bien la question… – répliqua gra- cieusement fray Buenaventura. Mais il y a cambusier et cambusier. Parmi les cambusiers, comme parmi les chargés de factorerie et les répartiteurs, il faut de tout, comme dans la vigne du Seigneur, et du meilleur en l’occurrence. De Martín García, il n’y a rien de mal à dire mais beaucoup de bien, et Dieu saura le distinguer. — Il était un loyal sujet et serviteur de Son Altesse – renchérit Solís. Et, afin d’honorer sa mémoire, on doit lui donner une sépulture chrétienne sur la première terre où nous accosterons et elle portera désormais son nom. — Cela me paraît très judicieux – dit Alarcón. — Les humbles seront glorifiés – ajouta le dominicain – et cet homme, qui l’était tellement, a mérité cette commé- moration. Je serai honoré de pouvoir moi-même le déposer dans un coin de terre bénite. — La tombe du marin doit être au fond de la mer, où il servira de pâture aux poissons et s’incorporera dans son – 133 – élément à la vie universelle – déclara Solís. Mais Martín García n’était pas un marin et ce n’est pas l’espace qui fait défaut ici pour qu’il repose en terre…

Fray Buenaventura se racla la gorge, manifestant son dégoût en entendant parler du ventre des poissons comme tombe pour les marins et, surtout, de cette incorporation à la vie universelle, ce qui avait des relents d’hérésie.

— Pour parler d’autre chose – dit l’ex-gros Marquina, à qui les conversations funèbres n’étaient pas agréables – je voudrais savoir comment doit s’appeler le grand fleuve sur lequel nous avons navigué et que nous sommes les premiers à sillonner… Je sais que l’on en a parlé mais que rien n’a été décidé. Il me semble que le moment est venu… Je serais d’avis, si on me le demandait, considérant l’habileté et l’as- surance avec laquelle notre grand capitaine nous a conduits jusqu’ici, comme guidé par la main de Dieu, je serais d’avis, dis-je, qu’on lui donne son nom ; cela sonne si bien : Río de Solís…

— J’ai pris d’autres dispositions afin de remercier d’évi- dentes et très hautes faveurs – répondit Solís – vous le savez, et fray Buenaventura l’approuve : je pense l’appeler Río de Santa María.

— Devant ce nom disparaissent et s’agenouillent hum- blement tous les autres – dit Alarcón.

— C’est vrai – dit Marquina en signe d’assentiment. Mais vous devez me concéder que, malgré la modestie de notre capitaine, cela n’aurait pas été mal de l’appeler Río de Solís, voire Mar Dulce de Solís, comme la nomme nos gens dans leurs conversations.

– 134 – — Si je ne lui donne pas mon nom – dit Solís – ce n’est pas par modestie, qualité que je n’ai pas, mais par orgueil, mon grand péché, n’est-ce pas, mon père ? Je dois, en priori- té le baptiser du nom de la Sainte Vierge. Par ailleurs, com- ment pourrais-je satisfaire mon orgueil si je donnais moi- même mon nom à ces eaux et à ces terres ? Ce serait de la sotte vanité, pas de l’orgueil. Si mes contemporains ou ceux à venir l’appelaient ainsi, ce serait une gloire accordée par les seuls qui peuvent le faire et ce serait autre chose… Si je suis orgueilleux, messieurs, je ne suis pas vain, et notre cha- pelain me donnera l’absolution pour ce péché en remercie- ment de ma franchise. Tous éclatèrent de rire, tant le capitaine général avait dit cela sans façons et discrètement, et la conversation aborda d’autres sujets laissant, finalement, le baptême du fleuve en suspens. Ayant recouvré l’usage de leurs facultés physiques et mentales, sapées jusqu’alors par le mal de mer, Alarcón et Marquina étaient désireux d’assumer le plus tôt possible leurs fonctions car, pour le moment, ils restaient les mains vides et sans rien à consigner dans les livres comme tiers du roi. On n’avait rien obtenu, rien troqué, à part de la nourri- ture pour l’équipage sur des terres du Brésil et c’étaient là des pertes pas des bénéfices. Les terres qu’ils venaient de découvrir et qu’ils avaient sous les yeux étaient de toute évi- dence peuplées car de nombreux indigènes se montraient sur la côte et les navigateurs avaient signalé quelques huttes, qui ressemblaient à tout sauf à des habitations humaines. Les premiers trocs ne pouvaient pas tarder. Que leur réservaient ces terres ? De l’or ? De l’argent ? Des pierres précieuses ? Des choses de petit volume et de grande valeur, ou le con- traire ? Il y avait de tout aux Indes, selon les régions, et

– 135 – l’imagination du chargé de factorerie et du répartiteur se plaisait à leur faire croire qu’elles regorgeaient de tout cela et de beaucoup plus… Autrement, pourquoi étaient-ils venus ? Le voyage proprement dit était terminé : ils se trouvaient où ils pouvaient et devaient commencer à engranger des résul- tats dans l’intérêt de Son Altesse et dans le leur… Plus discrètement, Solís abonda dans le même sens : s’ils ne trouvaient pas ce qu’il croyait et espérait – et qui vaudrait plus que de l’or, parce que ce serait la porte ouverte pour se rendre ensuite où les richesses débordaient – ils ne devaient pas s’en retourner de là les mains vides sans quoi, en rega- gnant l’Espagne, ils ne feraient pas envie aux autres naviga- teurs, espagnols ou portugais. Fray Buenaventura, qui bâil- lait depuis un certain temps, se leva soudain et se retira en disant qu’il allait prier auprès de la dépouille de Martín García avant d’aller dormir. Ce fut le signal de la fin de la ré- union. Et tous dormirent tranquillement et pleins d’espoirs, bercés par le grand fleuve et le murmure du courant qui lé- chait les flancs du navire. Le lendemain, tôt le matin, la caravelle aux voiles latines leva l’ancre et poursuivit sa navigation vers l’amont. Elle avait peu progressé quand elle arriva près d’une île, ou plutôt un îlot, de roche granitique, couvert de terre fertile, légère- ment accidenté et faisant plus ou moins une lieue de péri- mètre. Il se trouvait à courte distance de la rive du levant, sur laquelle quelques indigènes avaient, à l’abri des arbres et des buissons, suivi la lente marche du navire. Solís, ne voyant pas sur la terre ferme d’endroit adéquat pour débarquer ou désireux que son cambusier reposât dans la terre jusqu’à l’éternité, à l’abri de profanations, signala l’îlot afin d’y creuser la tombe ; il fit une nouvelle fois mouil-

– 136 – ler la caravelle dans le courant, fort, fit descendre un canot, y fit déposer une caisse mal dégrossie qui était le cercueil de Martín García et, les marins ayant embarqué et tenant les rames verticales, Solís empoignant le gouvernail, fray Bue- naventura et les officiers du roi allèrent s’asseoir à la poupe. En quelques coups de rames, ils atteignirent une étroite plage de sable. Un peu plus loin, sur une petite colline, on creusa une fosse. Le chapelain la bénit, on descendit le cer- cueil au fond et, après les répons, exécutés et répétés avec une véritable ferveur si pas avec une douleur profonde, la terre retomba à grandes pelletées, jusqu’au niveau du sol que l’herbe ne tarderait pas à recouvrir. Une croix, fabriquée à l’aide de deux piquets en bois, indiqua ensuite la première tombe de chrétiens et d’Espagnols sur des terres du Rio de la Plata, sur l’île qui, depuis lors, porte le nom de Martín García.

– 137 – XIX

TRAGÉDIE

Après leur retour à bord, la caravelle aux voiles latines, même si elles étaient peu déployées, continua à vaincre le courant et finit par s’approcher de la côte orientale à un en- droit entouré d’îlots, qui, aux yeux de Solís, parut être le lieu de débarquement le plus propice. Il ordonna donc que l’on mouillât à proximité d’une petite île qui semblait partagée en deux et fit préparer la grande barque. Certain qu’il y avait là des Indiens, il désirait s’emparer de quelques-uns d’entre eux ou d’obtenir d’eux des vivres dont la flottille allait avoir be- soin à court terme ; il voulait, par la même occasion, vérifier s’il y avait là ou près de là des métaux ou d’autres choses précieuses. Marquina, Alarcón et fray Buenaventura étaient tout disposés à débarquer avec lui mais, comme au Brésil, il s’opposa à ce que le chapelain l’accompagne.

— Je ne ferai qu’un aller-retour afin de préparer le ter- rain – lui dit Solís. Je préfère que vous restiez à bord. Rodri- go Alvarez est peu énergique avec ses hommes qui, eu égard à vos habits, n’oseront pas dépasser les bornes… Vous dé- barquerez dès que nous aurons vu quel accueil nous réser- vent les indigènes.

– 138 – Comme si les événements voulaient donner tort à Solís, quelques sauvages – des hommes, des femmes et même des enfants – commencèrent à apparaître entre les arbres de la rive, sur la terre ferme : ils levaient les bras, montrant qu’ils étaient désarmés, se livraient à d’insistantes démonstrations d’amitié et offraient, comme ceux du Brésil, divers produits comestibles – des céréales, des racines et des légumes – les déposant sur le sol et s’éloignant pour signifier qu’il s’agis- sait de présents. À la grande déception de la majorité des marins, ils ne proposaient aucun objet en métal et ne sem- blaient pas en posséder. Ils étaient de haute taille et bien proportionnés, d’un teint olivâtre, plus foncé chez certains ; les hommes portaient les cheveux attachés sur la nuque et des plumes multicolores au sommet du crâne, un bâtonnet dans la lèvre et un pagne atténuant à peine leur complète nudité ; les femmes avaient leur chevelure flottante, des ta- touages sur les seins, le front et le nez, certaines portaient leurs jeunes enfants sur le dos. C’est ce que les Espagnols vi- rent depuis le bateau et, en remarquant les obséquieuses démonstrations des Indiens et des Indiennes, fray Buenaven- tura insista, enthousiasmé : — Ce sont des gens inoffensifs et généreux ! Ils donnent ce qu’ils possèdent, offrent leur amitié !… Permettez que je débarque avec vous afin de les évangéliser ! — Pas maintenant, mon père – répondit Solís. Plus tard, si Dieu le veut. Cinq marins, parmi lesquels le mousse Francisco del Puerto, attendaient déjà sur les bancs de l’embarcation. Solís avait ordonné à Rodrigo Rodríguez de rester au service de fray Buenaventura ; il restait donc à bord, en plus d’eux, le pilote et huit hommes, onze en tout. Accompagnaient le ca-

– 139 – pitaine général : Marquina, Alarcón, quatre rameurs et le mousse, qui voguaient vigoureusement vers la côte.

Afin de prouver aux Espagnols qu’ils pouvaient appro- cher sans danger, les indigènes se tenaient à distance des présents déposés sur le sol, les montrant avec insistance. Le pilote, fray Buenaventura, Rodrigo et les marins de la cara- velle, suivaient avec intérêt le déroulement de la scène, les uns appuyés au bastingage, les autres juchés sur les haubans. Tant ceux de la barque que ceux du navire attendaient, dans la plus complète confiance et tranquillité, la première ren- contre avec les habitants de la terre qu’ils venaient de dé- couvrir.

— Fray Buenaventura a raison – dit Solís en se levant pour débarquer en sautant à terre. Ce sont des gens paisibles et, apparemment, pas bêtes du tout.

— Un peu de bêtes ne seraient pas malvenues – s’exclama Alarcón en pensant au troc.

Ils jetèrent une petite ancre, amarrèrent pour plus de sé- curité la barque à une pierre qui servit de bitte, et Paquillo, de très mauvaise humeur, reçut l’ordre d’y monter la garde.

Prenant la tête du groupe et levant, lui aussi, les bras en signe d’amitié, Solís avança vers les Indiens, gravissant la petite côte recouverte d’herbe qui le séparait d’eux. Le pay- sage était beau et paisible, avec de légères ondulations, des arbres bas et, au-delà des dunes de sable doré, il y avait des terrains couverts de chaumes ou de buissons, le tout baigné dans une atmosphère diaphane, sous le soleil radieux et un ciel de soie bleue… La Nature était en fête pour accueillir les Espagnols.

– 140 – Solís et ses hommes allaient rejoindre le petit groupe des indigènes, qui brillaient au soleil comme des statues de bronze, lorsque ces derniers, réagissant de manière inatten- due et incompréhensible, firent quelques pas en arrière, comme s’ils avaient peur, tournèrent le dos et se débandè- rent… Au même moment éclatait un cri sauvage, des dards et des flèches se mettaient à pleuvoir et, des broussailles, surgissaient, vociférant et gesticulant, une multitude d’Indiens qui, brandissant des piques, des lances et des mas- sues, se précipitèrent sur les marins surpris, les renversa sans leur laisser le temps d’empoigner leurs armes, les cribla de coups de lances, les écrasa sous le nombre… Il n’y eut pas de défense possible. Ce fut un tumulte, un entassement, une masse informe et convulsive dont s’échappaient des hur- lements infernaux… Un instant plus tard, tout était fini…

La stupeur paralysait leurs compagnons de la caravelle. Réagissant ensuite, ils se précipitèrent vers les mousquets, les couleuvrines, prêts à ouvrir le feu… Mais, comment tirer sur cette masse, où Indiens et chrétiens entrelacés deve- naient un seul être aux membres innombrables ? Comment

– 141 – ne pas blesser simultanément frères et ennemis ?… Ils tirè- rent plusieurs salves pour intimider les sauvages mais, dans l’ivresse du massacre, ces derniers ne se préoccupèrent pas du tonnerre… Par après… ils n’osèrent pas non plus tirer sur eux pendant qu’ils dénudaient les morts et se disputaient leurs dépouilles… Fray Buenaventura, épouvanté, criait à ceux de la cara- velle de tirer, puis de ne plus tirer, qu’ils éperonnent la côte avec le navire, qu’ils se jettent à l’eau et nagent afin de sau- ver au moins le capitaine, qu’ils mettent un canot à sa dispo- sition afin qu’il aille en personne lui porter secours ; et entre tous ces conseils et ordres désespérés et incohérents, il gé- missait, pleurait, levait les bras, bénissait, clamait : — Mes fils ! Mes fils ! Je vous absous au nom de Dieu ! Je vous bénis au nom de Dieu ! Les autres, également bouleversés, couraient çà et là, ayant perdu la tête. Les uns tentaient de préparer le canot, d’autres chargeaient et pointaient les couleuvrines, d’autres encore s’apprêtaient à appareiller. Et les onze hommes don- naient l’impression d’être cent par le désordre et le tumulte qui régnaient parmi eux… Les cadavres de Solís et de ses compagnons mis à nu, quelques Indiens se chargèrent d’eux et s’enfoncèrent dans l’épaisseur des fourrés. Les couleuvrines et les arquebuses avaient commencé à les prendre pour cibles quand les hommes du bord se convainquirent que, pour châtier les sauvages, de leur horrible traîtrise, ils ne pouvaient plus que les blesser car aucun ne tomba. Les Indiens ne devaient pas aller très loin puisque, dès qu’ils furent hors de portée des projectiles, d’entre les fourrés s’élevèrent des petites co- lonnes de fumée qui grossirent peu à peu…

– 142 – Un peu plus tôt, alors que l’essentiel du combat avait dé- jà eu lieu et que le triomphe des Indiens était déjà évident, un groupe de sauvages – que les hommes de la caravelle cru- rent identifier comme étant des femmes – s’empara de Pa- quillo, détruisit la barque et y mit le feu. Comme les autres l’avaient fait avec les cadavres, ce nouveau groupe emporta le mousse, sans se préoccuper de sa rageuse défense sous forme de coups de pieds, de coups de poings, de morsures, et s’enfonça à son tour dans les fourrés. Quelques instants plus tard, le théâtre du combat et du massacre était désert, silencieux, paisible, sans aucune trace de la tragédie…

– 143 – XX

APRÈS

À la première impression d’horreur, de colère et d’im- puissant désespoir succéda un profond découragement à bord de la caravelle. Le pilote était indécis, fray Buenaventu- ra pleurait comme un enfant, Rodrigo Rodríguez qui, peu avant, ressemblait à un dément, blasphémait en s’arrachant les cheveux, effondré sur un rouleau de câbles ; les autres échangeaient des phrases entrecoupées, révélatrices de leur désir de prendre la fuite en direction du Puerto de los Patos, de rejoindre leurs compagnons, de se libérer de l’horrible cauchemar… Solís mort, ils se retrouvaient sans chef capable de les commander, de leur communiquer de la confiance, car Alvarez s’était révélé sans autorité ni énergie durant tout le voyage et il ne réagissait pas non plus dans une situation si difficile. Repensant aux très mauvais présages du départ et de l’arrivée, qui s’étaient confirmés par l’horrible boucherie à laquelle ils venaient d’assister, craignant de tomber de dé- sastre en désastre, quelques-uns prenaient déjà l’initiative d’appareiller quand, voyant cela et comprenant qu’il ne lui restait pas d’autre choix, le pilote donna l’ordre du départ.

– 144 – — Il ne faut pas risquer sa peau pour pleurer les morts – dit un marin qui mollissait un câble pour baisser la voilure près de Rodrigo. Le domestique sortit de sa torpeur et, avec un accent tragique, où vibraient la colère et l’horreur : — Morts, et c’est tout ? – s’exclama-t-il. Espérons que ces foyers, dont nous voyons la fumée, ne signifient pas autre chose !… — À quoi penses-tu ? Tu ne supposes pas ?… — Il y a beaucoup de cannibales par ici et il se pourrait bien que… — Des cannibales, dis-tu ! – bégaya l’autre. — Oui – s’exclama Rodrigo. Ce doivent être des canni- bales… ! Nombre d’Indiens sont cannibales ! Ils dévorent leurs ennemis, par le Diable qui les a engendrés ! Et ensuite, sourdement, les sourcils froncés et les poings serrés, il continua, en rappelant : — Dans toutes ces Indes maudites, que Dieu nous en préserve, s’étendant du golfe de Paria vers le sud, sur les îles, sur la terre ferme, les hommes mangent les hommes, et au- cun rayon de Dieu ne les éclaire !… Ils les mangent, te dis-je, et ceux-là… ceux-là ne vont pas faire de différence parce qu’il s’agit de nous ! Fray Buenaventura les avait écoutés, silencieux et épou- vanté. — Ah, Seigneur ! – s’exclama-t-il. Est-il possible que tu admettes de semblables monstres sur la terre ?… Mon Dieu !

– 145 – Mon Dieu ! Ta sainte colère est terrible, Seigneur ! Le mal- heureux capitaine a fait preuve d’hérésie et a blasphémé hier soir… Le ventre des poissons, la vie universelle… Et voilà que… Non, je ne le crois pas, je ne peux pas le croire !… Un homme aussi accompli, un si bon chrétien. Rodrigo délire ! Et les infortunés compagnons du capitaine… Alarcón, Mar- quina…

— Paquillo ! – ajouta sombrement Rodríguez.

— De braves gens ! Le capitaine l’a dit sans arrière- pensées… sans intention de péché… Oui ! Il est un martyr ! Un martyr de la foi… Ah, Seigneur ! Pourquoi n’as-tu pas permis que ton humble serviteur partage son martyre ?

Et s’humiliant, se frappant la poitrine, fray Buenaventu- ra, les yeux pleins de larmes, murmura à plusieurs reprises :

— « Domine, non sum dignus »…

La caravelle, après avoir viré lentement, naviguait déjà vers l’aval, s’éloignant rapidement du théâtre du massacre, sans que personne n’ait songé à marquer d’une croix les lieux de la catastrophe. Et lorsqu’ils repassèrent à hauteur de l’îlot où reposait Martín García, personne n’eut un regard ni une pensée pour lui.

Rodrigo continuait à maudire son sort, l’ordre qui l’avait empêché de débarquer avec son maître – comme si sa pré- sence avait pu le sauver – et, soudain, obéissant à une réac- tion impulsive de rage, il se mit à crier à ses compagnons qu’ils étaient des lâches, qu’ils ne devaient pas fuir, qu’il fal- lait débarquer et passer au fil de l’épée cette infâme bande de traîtres.

– 146 – Fray Buenaventura tenta de le calmer, lui conseillant la résignation devant les mystérieux desseins de la Providence, et le domestique de Solís sembla l’écouter, rasséréné, et se soumettre à la volonté de Dieu. Mais, brusquement, il s’exclama d’un ton sarcastique :

— Mon Père ! Ne disiez-vous pas que les Indiens sont paisibles et bienveillants et qu’ils ne font pas de mal à leurs bourreaux ? Ne nous invitiez-vous pas à les traiter comme des frères inférieurs ? Je désavoue cela. Au diable de telles humilités et mansuétudes, ainsi que les poltrons qui défen- dent ces bêtes féroces !

— Du calme, mon fils, du calme, par les clous du Sei- gneur ! – balbutia le frère, étourdi. Ne jure pas, ne blasphème pas ! Dieu permet parfois des choses qui dépassent notre en- tendement et il a lui-même été crucifié… Par ailleurs, ces In- diens-là ne sont pas comme les autres…

— Ils mangent les chrétiens, mon père !… S’ils étaient à ma portée, malheur à eux car je ne pardonnerais pas à un seul !… Mais écoutez, votre seigneurie. Il y a quelque chose que je veux vous dire et qui importe beaucoup… Le capi- taine et ses compagnons ont été assassinés, cela ne fait au- cun doute… Mais il y en a un autre, mon père, il y en a un, qui est vivant et aux mains de ces barbares… J’ai vu de mes propres yeux que ce n’étaient pas des hommes armés qui s’emparaient du pauvre Paquillo mais des femmes ; elles l’ont arraché à la barque et l’ont emmené à l’intérieur des terres, sans lui faire de mal, bien que le malheureux gamin se défendît comme un possédé et leur plantât les dents dans la peau.

– 147 – — Oui ; il m’a semblé voir qu’elles l’emmenaient – dit le chapelain. Elles l’emmenaient vivant, ce qui signifie qu’elles ne pensaient pas à ce que tu dis. — Pas maintenant mais on va l’engraisser, comme ils le font souvent… — L’engraisser ? Doux Jésus ! — Mais il est encore temps, mon père, il n’est pas trop tard ! Que votre seigneurie dise au pilote de détacher un ca- not et, aussi vrai que je m’appelle Rodrigo, avec ceux qui voudront m’accompagner, ou seul s’il le faut, j’irai sauver le gamin… Nous ne pouvons pas l’abandonner ! Levant les paumes de ses mains et les tournant vers Ro- drigo, la tête penchée sur sa poitrine, fray Buenaventura le fit taire et médita un instant. — En conscience, Rodrigo, mon fils – finit-il par dire – je ne peux ni le conseiller ni le demander… La vie du plus grand nombre pèse plus dans la balance que la survie d’un seul… Moi, comme toi, je donnerais sans hésiter ma vie pour sauver celle du gamin… Mais ce serait sacrifier les autres… Et, qui sait ? Dieu veut peut-être faire de Paquillo son ins- trument pour convertir ces sauvages !… — Taisez-vous, mon père ; ce n’est pas le moment de plaisanter… Je ne peux pas, un instant, m’imaginer Paquillo en train d’évangéliser… Il ne comprenait pas grand-chose à la religion. Encore faudrait-il sauver son corps afin de pou- voir sauver son âme… Le frère soupira, écrasa de son index une larme qui per- lait à ses yeux, et murmura :

– 148 – — Il est trop tard !… Nous sommes déjà loin… Même si ce n’était pas le cas, ce serait la perte de tous… Et regarde la terreur des autres… Ils ne te suivraient pas, mon fils… Maugréant entre ses dents, convaincu mais furieux, Ro- drigo s’éloigna et fray Buenaventura, appuyant son front au bastingage, pleura et pria. Le vent, le courant, la tranquillité des eaux, le jour dia- phane, tout était favorable au tragique retour et la caravelle redescendait gaillardement et rapidement le fleuve jusqu’au Río de los Patos… Quand elle franchit la barre et s’approcha des autres na- vires, encore désarmés, elle fut reçue par des vivats qui se transformèrent bientôt en exclamations de stupeur et de consternation. Francisco de Torres, surmontant très vite son affliction, assuma définitivement le commandement de la flottille et ordonna que Rodrigo Alvarez fût mis aux arrêts à bord de la caravelle portugaise jusqu’à plus ample enquête et un conseil de guerre, si cela s’imposait. Étant donné qu’il devenait capi- taine général, il confia au gabier Montes le commandement provisoire de la plus petite caravelle aux voiles latines. Les officiers s’étant réunis en conseil, le malheureux pi- lote de cette dernière exposa tant bien que mal l’épouvan- table catastrophe, impossible à imaginer ni à empêcher… Personne n’osa dire mot avant que Francisco de Torres ne déclare : — Pleurons et prions Dieu pour le repos de leurs âmes, c’est la meilleure décision… Aucun d’entre nous n’ignore qui était et ce que valait Juan Díaz de Solís, ni que c’est à lui que

– 149 – revient toute la gloire de ce que nous venons d’accomplir… Ce n’est pas à moi, son frère et son ami de cœur, de faire son éloge… Ce que j’ai à dire, c’est que sans lui nous n’avons plus rien à faire en ces terres. Il faut regagner l’Espagne… Nous y arriverons peu nombreux, apparemment vaincus, les mains vides, malgré l’exploit accompli… Peu importe… Une fois là-bas, notre seule pensée sera de revenir pour venger impitoyablement notre capitaine, forts de notre expérience avec ces infidèles. — Vive saint Diego ! – s’exclama celui de Moguer qui, plus heureux que Torres dans ce domaine, devait, quelques années plus tard, jouer un grand rôle dans la conquête du Río de La Plata – Pourquoi ne pas leur donner une bonne le- çon dès à présent ? En usant d’un peu de ruse et en étant moins confiants que notre capitaine général – qui, il faut le dire, n’a pas pris de précautions –, nous sommes assez nom- breux pour faire irruption dans leur camp et ne pas laisser un Indien vivant. Sus à eux ! Tel est mon avis. L’enseigne Ramírez, alors jeune et fougueux, appuya chaleureusement Diego García. Les autres analysaient la si- tuation avec plus de sang-froid. — C’est fort risqué… – finit par murmurer Juan de Lis- boa. — Dans l’accord, Son Altesse n’a pas prévu la mort de Solís… – ajouta Torres – Il avait des instructions secrètes auxquelles lui seul pouvait se conformer, que lui seul pouvait exécuter. Nous ne sommes actuellement responsables que de ce qui se trouve dans nos mains, mais nous devons en ré- pondre devant Son Altesse. Plus que quiconque, je désire venger mon frère en châtiant sans pitié ses assassins. Mais je crois que nous devons maintenant repartir pour l’Espagne…

– 150 – — D’autant plus que nous manquons de vivres et que la faim nous menacera dès que nous partirons d’ici – dit Juan de Lisboa –. Nous ne pouvons nous nourrir que de canards… — C’est la décision la plus sage – fit remarquer le domi- nicain. D’ailleurs, les indigènes ont déjà dû s’échapper, comme ils en ont l’habitude après un coup de main… On ne les trouverait pas ou les nôtres pourraient tomber dans une de leurs embuscades. Nous devons, tous, rendre compte de nos vies, d’abord à Dieu, qui condamne le suicide, ensuite au Roi, qui a besoin de ses vassaux et de ses navires… Laissons la vengeance aux soins du Seigneur… Rien n’ôtera à notre grand capitaine la gloire d’avoir découvert cette Mer d’eau douce qui, s’il y a une justice sur terre, s’appellera Río de Solís. Tous se turent ; même Diego García et l’enseigne Ramírez n’insistèrent plus sur leur proposition antérieure. — Qu’ordonne notre capitaine ? – finit par demander ce- lui de Moguer. On fera ce qu’il dira. Torres se leva, dissimulant mal sa profonde émotion, mais il dit fermement : — J’ordonne que, dès que ce sera matériellement pos- sible, nous appareillions pour regagner l’Espagne. Personne ne dit mot, quelques-uns acquiescèrent d’un signe de tête, celui de Moguer s’agita sur son siège comme s’il lui en coûtait de se soumettre à un cas, évidemment, de force majeure. — Je prendrai le commandement de la flottille, embar- quant à bord de la caravelle portugaise et Diego García me remplacera comme capitaine de ma caravelle. Juan de Lis-

– 151 – boa sera mon second, comme il le fut pour Solís89, et Montes commandera momentanément l’autre caravelle aux voiles la- tines. Si nous devions rester ici, l’hiver serait encore relati- vement loin ; mais, pour regagner l’Espagne, il est plus proche et nous devrons nous presser… L’automne frappe dé- jà à nos portes et, à ce qu’a dit Juan de Lisboa, nous n’avons pas de vivres… Il faut donc nous ravitailler ; il faut, aussi, franchir la ligne avant l’hiver, qui nous serait fatal. Nous re- ferons notre réserve de vivres où et comme nous pourrons, dans ces eaux ou sur la côte du Brésil, s’il n’y a pas d’autre solution… Levons l’ancre le plus tôt possible…

* * *

Le voyage avait été joyeux et facile à l’aller ; le retour fut triste et ardu. On leva l’ancre dans les premiers jours de mars. Les trois caravelles descendirent le fleuve de conserve et mouillèrent à la Isla de Lobos. Ils allaient renouveler leurs provisions avec la seule nourriture que le destin leur accor- dait. L’équipage débarqua sans bruit, armé de pics. Tandis que les uns avançaient par la plage afin de couper la retraite vers le fleuve, les autres s’enfoncèrent à l’intérieur de l’île, décrivant un demi-cercle, et ils commencèrent à rabattre les loups de mer qui, ne connaissant pas encore leur terrible en- nemi, l’homme, dormaient nonchalamment ou paressaient au soleil sur les rochers et le long du rivage. Pris par sur- prise, les amphibies tentèrent de se précipiter dans l’eau, sautillant comme des élastiques et se livrant à de grotesques

89 C’était Rodrigo Álvarez de Cartaya. (N.d.T.)

– 152 – contorsions ; mais ceux qui leur coupaient la retraite les re- çurent à coups de pic en pleine tête, sans qu’ils pussent op- poser d’autre défense que leurs rugissements horrifiés et des coups de dents donnés dans le vide. Soixante-six tombèrent, les autres s’échappèrent en dodelinant et, une fois dans le fleuve, disparurent pour ne plus revenir. Cette chair huileuse et sentant le poisson, que personne ne mange sinon pressé par la faim, fut découpée en longues tranches, étendue au soleil pour en faire quelque chose à mi- chemin entre viande séchée et thon fumé, mais qui présen- tait tous les inconvénients de ces deux types de conserves. Les peaux furent soigneusement séchées en les fixant avec des pieux afin de les emporter en Espagne, en qualité de bu- tin… Cette chasse de plusieurs jours étant terminée, les na- vires levèrent l’ancre pour gagner l’île de Santa Catalina où, au Puerto de los Patos, ils firent halte dans l’espoir d’augmenter et d’améliorer des provisions de bouche aussi peu ragoûtantes. Ils parvinrent à en faire un peu et Francisco de Torres y embarqua une petite Indienne, pauvre trophée vivant, afin de l’exhiber en Espagne. Il mit les voiles, suivi par le navire de Diego García, lui laissant celui que comman- dait précédemment Rodrigo Alvarez90, laissant la troisième caravelle les rejoindre ultérieurement ; à bord de cette der- nière se trouvaient l’interprète-gabier, à présent capitaine, Enrique Montes, l’enseigne Melchor Ramírez et l’affligé Ro- drigo Rodríguez. Mais le malheur voulut que, en levant

90 Celui que commandait précédemment Francisco de Torres lui-même. (N.d.T.)

– 153 – l’ancre, celle-ci échoua sur un haut-fond et coula avec tout ce qu’elle contenait, à l’exception des onze hommes qui étaient à bord et qui furent à grand-peine sauvés du nau- frage. — C’était la volonté de Dieu que je me retrouve dans une situation semblable à celle de Paquillo ! – s’exclama Ro- dríguez – Je crois, maintenant, que je le reverrai… Les habi- tants de Santa Catalina ne disent-ils pas que les indigènes ne tuent pas les femmes ni les enfants ?… Francisco de Torres et Diego García, ignorant le sort de la troisième caravelle, firent escale au Cabo de San Agustín. Ils ne voulaient pas revenir les mains vides et avaient conve- nu de se moquer des Portugais en emportant une cargaison de bois du Brésil. L’équipage ne tarda pas à en avoir coupé cinquante quintaux, qu’il arrima dans les cales. La troisième caravelle n’arrivait pas, un navire du roi don Manuel pouvait les surprendre, ce qui engendrait un conflit, les brouillerait avec don Ferdinand qui leur avait recommandé tellement de prudence… Et ils se mirent en route, emportant comme seul butin ce bois du Brésil, les soixante-six peaux de loups de mer et la petite Indienne de Francisco de Torres… C’est ain- si qu’ils regagnaient l’Espagne – désormais gouvernée par le futur empereur Charles-Quint91 – plus pauvres qu’ils n’en étaient partis, ces audacieux navigateurs dont l’espoir s’était évanoui comme les légères brumes matinales de la Mer d’eau douce de Solís, espoir de revenir chargés de trésors, décu- plant au moins ce qui avait été risqué dans l’expédition et ayant ouvert la porte vers la Mer du Sud.

91 Don Ferdinand était décédé le 23 janvier 1516. (N.d.T.)

– 154 – Leur retour prit six mois. Quatorze mois92 après leur dé- part, le 3 septembre 1516, ils jetaient l’ancre dans des eaux espagnoles. Là-bas en terre américaine, reposaient du sommeil éter- nel Juan Díaz de Solís, Francisco Marquina, Pedro Alarcón et six marins93 assassinés par les Indiens. Sur un îlot du grand fleuve se trouvaient la dépouille de Martín García. Rodrigo Rodríguez, Enrique Montes et Melchor Ramírez – dont l’Histoire s’occupera à nouveau en narrant les expéditions de Sebastian Cabot et de Diego García – et les huit marins ayant, avec eux, survécu au naufrage s’essayaient, malgré eux, à la vie sauvage sur Santa Catalina… Mais, symbole ou présage, l’adolescent, la tendre pousse de l’arbre séculaire, Francisco del Puerto, captif des Indiens, restait sur les rives de la Mer d’eau douce, où il devait mûrir et croître, pour devenir un tronc rappelant à peine la pre- mière branche anonyme de créoles du Río de la Plata. Con- crétisation d’un rêve d’une façon non rêvée, ses descendants devaient voir que les pauvres terres de la déception rece- laient en réalité des trésors inépuisables, plus pérennes que l’or et l’argent. Des années d’oubli et d’abandon suivirent. Plus tard, d’autres navigateurs sur d’autres caravelles péné- trèrent dans le noble fleuve et Paquillo les vit arriver ; il les vit arriver et les vit s’en aller, leurs espoirs également déçus, malgré leur intrépidité. Et les tentatives, parfois tragiques, se répétèrent et il y eut de nouveaux échecs dans ces régions hostiles, tant que l’on n’en trouva pas les clés : le travail, la

92 Onze mois depuis le 8 octobre 1515. (N.d.T.)

93 On parle au chapitre 19 de « quatre rameurs » . (N.d.T.)

– 155 – ténacité et la foi. Le premier exploit ne suffit pas pour que le fleuve perpétuât le nom du héros, parce que le succès et la mort furent simultanés et l’exploit manqua de durée… Mais les grands peuples qui, sur ses rives, ont su insuffler une réa- lité durable aux trésors chimériques du découvreur, ne peu- vent pas être oubliés. On n’oubliera pas Juan Díaz de Solís, dont l’esprit vagabonde encore parmi nous.

Roberto J. PAYRÓ Lomas de Zamora, 9 décembre 1927

– 156 – POSTFACE

Roberto J. Payró a terminé d’écrire son roman histo- rique El mar dulce le 9 décembre 1927. Il décède le 5 avril 1928, moins de quatre mois plus tard, à l’âge de 61 ans. Malade, l’auteur ne s’était jamais remis de la mort de son fils aîné le 2 avril 1922, en Belgique, à l’âge de 27 ans. Si nous soulignons ces informations biographiques, c’est parce qu’elles ont influé sur certaines erreurs de construc- tion, présentes dans le roman. Cela n’enlève rien au mérite de Roberto J. Payró qui nous régale avec ce roman d’une ri- chesse extraordinaire. Pédagogue, il y aborde de nombreux thèmes, se livrant à des digressions, même brèves, d’un intérêt que nous avons tenté de mettre en valeur, les illustrant de cartes géogra- phiques ou historiques et d’extraits biographiques. On y trouve aussi des anachronismes dont surtout ses éditeurs argentins auraient dû se rendre compte, comme nous l’avons signalé. Roberto J. Payró, qui a probablement consulté Juan Díaz de Solís (Estudio histórico) de José Toribio Medina, a trouvé

– 157 – dans la biographie de ce navigateur, personnage shakespea- rien ou cornélien, matière à un roman. Roberto J. Payró, homme de théâtre, a mis tout son ta- lent au service de dialogues mémorables. Nous retrouverons certains des personnages de ce ro- man dans El capitán Vergara écrit antérieurement par l’au- teur (terminé en 1925) mais situé, chronologiquement, plus tard. Bernard GOORDEN

traducteur des œuvres historiques de Roberto J. Payró dont tout son Diario94

P.S. Je voulais traduire ce roman depuis 1982. Je remer- cie toutes celles / tous ceux qui, le dédaignant, m’en ont ré- servé la primeur pendant que je créais le système REDISTI à la Bibliothèque royale Albert 1er entre 1984 et 1988 ; que je jetais les fondations d’INTERNET au journal LE SOIR entre 1988 et 1996 ; que je réalisais des outils linguistiques pour les « primo-arrivants » (couronnés en 2005 et 2008 des deux plus hautes distinctions pédagogiques) entre 1997 et 2015 pour l’enseignement francophone belge.

94 Voir : https://www.idesetautres.be/?p=ides&mod=iea&smod=ieaFi ctions&part=belgique100. La version espagnole figurant aussi sur le site www.idesetautres.be .

– 158 – Il est certain que les nouvelles ressources de 2016, no- tamment sur INTERNET (hyperliens), ont rendu possible une traduction, fort différente de ce qu’elle aurait pu être plus tôt.

– 159 – NOTES DU TRADUCTEUR

Des informations et des notes plus détaillées, avec repro- duction de passages d’ouvrages cités peuvent être con- sultés dans l’édition d’Ides et Autres : https://www.idesetautres.be/upload/PAYRO%20MAR%2 0DULCE%20INDICE%20CON%20ENLACES%20INTERNET %2020%20CAPITULOS.pdf (index).

Chapitre 11 Toribio Medina, José ; Juan Díaz de Solís. Estudio histórico ; Santiago de Chile, impreso en casa del autor ; 1897, CCCLII + 252 p. (segundo libro : documentos y biblio- grafía) Col à la wallonne :

(Portrait de Pieter van den Broecke, huile sur toile, Franck Halls 1633, Kenwood House) :

– 160 – https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Frans_Hals_037.jpg

Chapitre 12 Toribio Medina, José ; Juan Díaz de Solís. Estudio histórico ; op. cit., CCCLII, 252 p. (segundo libro : documentos y bibliografía) Une biographie de Vasco Nuñez de BALBOA a été transpo- sée par Fred FUNCKEN au niveau d’une BD en 4 planches aux illustrations attrayantes ; elle est parue en Belgique, dans le n° 38 de l’hebdomadaire « TINTIN » du 17 septembre 1958 et n’aurait pas été publiée dans l’édition française. https://www.idesetautres.be/upload/BALBOA%20FUNCKEN. pdf Explications, détails et illustrations des armes évoquées dans ce chapitre. Voir le même chapitre dans l’édition « Ides et Autres ». https://www.idesetautres.be/upload/PAYRO%20MAR%20DU LCE%20INDICE%20CON%20ENLACES%20INTERNET%2020% 20CAPITULOS.pdf (index).

Chapitre 13 Golfo de las Yeguas : Voir Alexander von Humboldt ; Examen critique de l’histoire de la géographie du Nouveau Continent et des progrès de l’astronomie nautique aux XVe et XVIe siècles ; Paris, Librairie de Gide ; 1837, tome troi- sième, page 85 : « … en opposant la mer orageuse et hou-

– 161 – leuse au nord du parallèle de 35° (el Golfo de las Yeguas) à la mer calme et unie des tropiques (el Golfo de las Damas). Originairement, à la fin du quinzième et au commencement du seizième siècle, l'expression du Golfe de las Yeguas ne fut adaptée qu’à la partie de l’océan Atlantique, entre les côtes d'Espagne et les Canaries, à cause du grand nombre de ca- vales (yeguas) qui périrent dans la traversée des ports d’Andalousie aux Antilles, et que l’on jeta à la mer avant d’atteindre les Canaries. Au sud de ces îles, les animaux souffraient moins du roulis … » « Rinconète et Cortadillo (L’illustre laveuse de vaisselle) » est une nouvelle de Miguel de Cervantes Saavedra qui fait partie du recueil des Nouvelles exemplaires (1613). https://fr.wikipedia.org/wiki/Nouvelles_exemplaires Traduction par Louis Viardot. J.J. Dubochet et cie., 1838 Cancionero de Baena composée de 56 poèmes (1426-1430 ?), de plusieurs auteurs dont Gómez Pérez Patiño. Voir : http://www.spanisharts.com/books/literature/cancionero.htm

Chapitre 14 « Jean de Béthencourt roi des Canaries » : http://www.patrimoine-normand.com/index-fiche-44378.html Voir aussi Jean de Béthencourt dans Jules VERNE ; Dé- couverte de la Terre ; Paris ; Hetzel ; première partie, chapitre VI : http://passerellesdutemps.free.fr/edition_numerique/IGCD/9 _GEOGRAPHIE_%20HISTOIRE_SCIENCES_AUXILIAIRES_DE

– 162 – _L_HISTOIRE/91_Geographie_explorations_voyages/910.9_D ecouverte_de_la_terre.pdf Fernán Pérez de Guzmán (1376-1460), « señor de Batres, (…) reclama la atención de la crítica bajo el triple carácter de historiador, moralista y pœta. » (Obras completas de Me- néndez Pelayo, ANTOLOGÍA DE LOS POETAS LÍRICOS CASTELLANOS. II : PARTE PRIMERA : LA POESÍA EN LA EDAD MEDIA. II. CAPÍTULO X. – FERNÁN PÉREZ DE GUZMÁN) : http://www.larramendi.es/menendezpelayo/i18n/corpus/uni dad.cmd?idUnidad=100275&idCorpus=1000&posicion=1 Voir aussi: Obras digitalizadas de Fernán Pérez de Guz- mán en la Biblioteca Digital Hispánica de la Biblioteca Nacional de España Las setecientas del docto y noble cavallero Fernan Perez de Guzman, las quales son bien scientificadas y de gran- des y diversas materias y muy provechosas : [coplas] por las quales qualquier hombre puede tomar regra y doctri- na y exemplo de bien bivir (coplas 7-8) « 5. Del home malo e malvado que alcanza grande poder si es sabio e esforzado ¿quién se podrá defender? 6. Poder, saber, fortaleza, si cayeren en mal vaso, non vale humana sabieza á resistir un tal caso. 7. La verdat estraña e nueva auida por mentirosa nunca la digas sin prueba, pues sin culpa es vergonzosa. 8. Si la verdat que paresce mentira, es de callar, ¡quánto non daña e empesce pura mentira fablar! 9. Non puede mucho alcanzar ninguno, es mi creencia, sin el cuerpo trabajar ó cargar la consçiencia. 14. Es virtut e muy loable la justicia executar; más de natura ami- gable non menos el perdonar.

– 163 – 15. La justicia fasta el cabo todo el mundo asolaría; luengo perdón non alabo que da del mal osadía. 16. Entre aquestos dos extremos si la discreción alcança, ¿quién du- bda que fallaremos, si la buscamos, templança? 31. El que nunca fue regido nunca bien sabrá regir; el que supo bien servir él se sabrá ser servido. 32. Como de flores e rosas es ventaja conoscida, en las obras virtuo- sas, la justicia es escogida. Île de Saint Brendan (de Clonfert). Voir, e. a. : D’Avezac ; A. Thomas ; Gaffarel ; « Les îles fantastiques : Les îles de saint-Brandan ». Voir : http://www.cosmovisions.com/$Saint-Brandan.htm Une carte de 1891, certifiée par la NOAA, présente les ré- gions à forte et faible concentrations en sargasses dans l’Atlantique Nord et les Caraïbes Source de l’image = Les enseignants en mer : https://teacheratsea.wordpress.com/tag/north-atlantic/ Les algues brunes venues de la mer des Sargasses s’échouent massivement sur les côtes atlantiques des Antilles (Guadeloupe, Martinique, Ste Lucie, La Domi- nique…), entraînées par des courants marins inhabi- tuels : « Le feu de Saint-Elme est un phénomène physique, ne se produi- sant que dans certaines conditions météorologiques, qui se manifeste par des lueurs apparaissant surtout aux extrémités des mâts des navires ». + Illustration du Feu de Saint-Elme sur un bateau (G. Hartwig) dans The Aerial World (1886) : https://fr.wikipedia.org/wiki/Feu_de_Saint-Elme Cabo de San Agustín = Cabo de Santo Agostinho, cabo de Consolación, ou cabo de Santa María de la Consolación

– 164 – https://es.wikipedia.org/wiki/Cabo_de_Consolaci%C3%B3n Cabo de San Antonio, récifs d’« Ouvre l’œil », actuellement Abrolhos, cabo Frío (carte 21060), cabo de Santo Tomé. Voir: D.A. Albert ; Derrotero de las costas de la América Meridional (comprehendidas entre la isla de Santa Catalina y el Maranhao y entre la misma y el río de la Plata) ; 1844,265 pages (page 91). Toribio Medina, José ; Juan Díaz de Solís. Estudio histórico ; op. cit. (segundo libro : documentos y bibliografía)

Chapitre 15 Araponga barbu https://campanero1967.wordpress.com/2008/05/29/el- pajaro-campanero-de-san-esteban/ « Procnias averano », illustration de Nicolas Huet le Jeune et Prêtre, in Nouveau recueil de planches coloriées d’oiseaux (1838) http://archive.org/stream/Nouveaurecueild3Temm#page/n85 /mode/2up Oiseaux-mouches : Peinture de Ernst Haeckel parue dans Kunstformen der Natur den 1904 (planche 99). Cabo de San Agustín (8º de latitude Sud) : Cabo de Santo Agostinho, cabo de Consolación, o cabo de Santa María de la Consolación Toribio Medina, José ; Juan Díaz de Solís. Estudio histórico ; op. cit. (segundo libro : documentos y bibliografía)

– 165 – Rappelons que Bob De Moor (1925-1992) était un dessina- teur de la mer et, notamment, de caravelles dans « Cori, le moussaillon », série de 5 BD se déroulant au 16ème siècle. Afin de lui rendre hommage, nous ne pouvions omettre son talent, extrayant du tome 2 de « L’invincible Armada » (« Le dragon des mers », page 6) les vignettes extraites (copyright BD Must, 2013), illustrent, entre autres, la manœuvre du cabestan . Intégrale « Cori, le moussaillon » : www.bdmust.be Débarquement de Pedro Álvares Cabral sur Vera Cruz (22 avril 1500). Voir aussi la carte incluant, e. a., Cabral et Vespucci : Lobato, Mirta Zaida ; Juan Suriano ; Nueva Historia . Atlas histórico ; , Sud- americana ; 2010. https://historiasocialyeconomicaargentina.wordpress.com/201 4/03/29/america-siglo-xvi-descubrimiento-y-conquista-de- espanoles-y-portugueses/ Carte des voyages de Alonso de Ojeda : https://commons.wikimedia.org/wiki/File%3AViajes_de_Alon so_de_Ojeda.PNG Gonzalo Fernández de Oviedo y Valdés (1478 – 1557), auteur De l’histoire naturelle des Indes (General y Natural Historia de las Indias), voir : https://www.wdl.org/fr/item/7331/ Vasco Nuñez de BALBOA par Fred FUNCKEN : https://www.idesetautres.be/upload/BALBOA%20FUNCKEN. pdf Christophe COLOMB par Fred FUNCKEN :

– 166 – https://www.idesetautres.be/upload/CHRISTOPHE%20COLO MB%20FUNCKEN.pdf Illustration par Fred FUNCKEN in « L’Histoire du monde : la course aux épices » (in TINTIN N° 29,16071958) https://www.idesetautres.be/upload/19580716%20COURSE% 20AUX%20EPICES%20HISTOIRE%20MONDE%20144%20TIN TIN%2029.pdf

Chapitre 16 C’est à notre avis, sciemment, que Roberto J. Payró em- prunte des passages de deux œuvres de Fray Bartolomé de las Casas écrites après l’action se déroulant fin 1515 dans ce chapitre. Il voulait comparer la barbarie des Al- lemands en Belgique, au moins à partir du 4 août 1914, à celle de certains Espagnols, quatre siècles plus tôt. Ces anachronismes sont voulus. Voir : Roberto J. Payró ; « La Pastoral de Monseñor Mercier » ; in La Nación ; 11/03/1915 : https://www.idesetautres.be/upload/19141225%20PAYRO%2 0PASTORAL%20MONSENOR%20MERCIER%20FR.pdf Roberto J. Payró ; Les massacres de Dinant en août 1914 (illus- tré). Extrait de « Deux représentants argentins tués dans la guerre. » : https://www.idesetautres.be/upload/19141020%20PAYRO%2 0MASSACRES%20DINANT%20DEUX%20REPRESENTANTS%2 0ARGENTINS%20TUES%20DANS%20LA%20GUERRE%20ILL USTRE.pdf

– 167 – Traduction (partielle) de « Dos representantes argentinos muertos en la guerra », in La Nación ; 17/11/1914. http://www.idesetautres.be/upload/19141020%20PAYRO%20 DOS%20REPRESENTANTES%20ARGENTINOS%20MUERTOS %20EN%20LA%20GUERRA.pdf https://www.idesetautres.be/?p=ides&mod=iea&smod=ieaFic tions&part=belgique100 Articles de Roberto J. Payró (1867-1928) relatifs à la guerre 1914-1918 et la Belgique (ainsi que légendes belges) : https://www.idesetautres.be/upload/PAYRO%20ARTICLES% 20BELGIQUE%20GUERRE%201914- 1918%20AVEC%20LIENS%20INTERNET.pdf Fray Bartolomé de las Casas et Johannes Gysius ; Brevísima relación de la destrucción de las Indias (colegida por el obispo don fray Bartolomé de las Casas o Casaus, de la orden de Santo Domingo. Sebastian Trugillo) ; écrite à partir de 1539 et publiée à Séville en 1552 : http://aix1.uottawa.ca/~jmruano/relacion.pdf https://www.youtube.com/watch?v=q0jZjtx7e-0 http://www.cervantesvirtual.com/servlet/SirveObras/128172 91026719384321435/index.htm Bartolomé de Las Casas, La vraye Enarration De la des- truction des Indes Occidentales Traduction illustrée en français de 1620 de Historia de las Indias, écrite après 1532 Fray Bartolomé de las Casas ; Historia de las Indias (1527-; Selección, edición y notas de José Miguel Martínez To-

– 168 – rrejón), Libro III, Capítulo III : « Del mal tratamiento que hacían los españoles a los indios » : http://www.cervantesvirtual.com/obra-visor/historia-de-las- indias--0/html/d31cc52d-acd9-4776-a069- ee37b963f399_14.html Libro III, Capítulo VI De los frailes que vinieron a dar cuenta al rey de lo que pa- saba en Santo Domingo : « (…) de cómo las mujeres que se sentían preñadas tomaban hierbas para echar muertas las criaturas, por no vellas o de- jallas en aquellos infernales trabajos » Libro III, Capítulo IV De las predicaciones de los frailes sobre el buen tratamiento de los indios : fray Antón Montesino, Ego vox clamantis in deserto. « Para os los dar a conocer me he sobido aquí, yo que soy voz de Cristo en el desierto desta isla (…) Esta voz, dijo él (fray Antón Montesino), dice que todos estáis en pecado mortal y en él vivís y morís, por la crueldad y ti- ranía que usáis con estas inocentes gentes. Decid, ¿con qué derecho y con qué justicia tenéis en tan cruel y ho- rrible servidumbre aquestos indios ? ¿Con qué autoridad habéis hecho tan detestables guerras a estas gentes que estaban en sus tierras mansas y pacíficas ; donde tan in- finitas dellas, con muertes y estragos nunca oídos, ha- béis consumido ? ¿Cómo los tenéis tan opresos y fatiga- dos, sin dalles de comer ni curallos en sus enfermeda- des, que de los excesivos trabajos que les dais incurren y se os mueren, y por mejor decir, los matáis, por sacar y

– 169 – adquirir oro cada día ? ¿Y qué cuidado tenéis de quien los doctrine, y conozcan a su Dios y criador, sean bati- zados, oigan misa, guarden las fiestas y domingos ? ¿Es- tos, no son hombres ? ¿No tienen ánimas racionales ? ¿No sois obligados a amallos como a vosotros mismos ? ¿Esto no entendéis ? ¿Esto no sentís ? ¿Cómo estáis en tanta profundidad de sueño tan letárgico dormidos ? Te- ned por cierto que en el estado que estáis no os podéis más salvar que los moros o turcos que carecen y no quieren la fe de Jesucristo ». Alfonso Maestre Sánchez ; “Todas las gentes del mundo son hombres” (“All the people in the world are human beings”). El gran debate entre Fray Bartolomé de las Casas (1474- 1566) y Juan Ginés de Sepúlveda (1490-1573), in Anales del Seminario de Historia de la Filosofía ; Universidad Complutense de ; Vol 21 (2004) , pp. 91-134. ISSN 0211-2337 ISSN-e 1988-2564 http://revistas.ucm.es/index.php/ASHF/article/view/ASHF0 404110091A/4728 Extracto del resumen : « (…) Bartolomé de Las Casas y Juan Ginés de Sepúlve- da, se reunieron en Valladolid en 1550 para discutir un gran problema nacional que concernía tanto a los indios americanos como a Aristóteles. Entonces, por primera vez y quizá por última, un imperio organizó oficialmente una encuesta sobre la justicia de los métodos empleados para extender su dominio. La disputa de Valladolid ha de interpretarse claramente como el testimonio apasio- nado de un hecho decisivo en la historia de la humani- dad : por no haber triunfado las ideas de Juan Ginés de Sepúlveda se dio un paso más, penoso e inseguro toda-

– 170 – vía, en el camino de la justicia para “todas las razas en un mundo de múltiples razas” ; por hablar con tanta vehemencia Fray Bartolomé de las Casas en Valladolid en favor de los indios americanos, su larga y complicada argumentación tuvo también otra utilidad : fortaleció a todos aquellos que en su tiempo, y en los siglos que si- guieron, trabajaron con la creencia de que “todas las gentes del mundo son hombres”. No bestias, ni esclavos por naturaleza, no como niños con un entendimiento li- mitado o estático, sino hombres que son capaces de lle- gar a ser cristianos, que tienen pleno derecho a gozar de sus bienes, su libertad política y su dignidad humana, y que en su creencia deberían ser incorporados a la civili- zación española y cristiana en vez de ser esclavizados o destruidos. » http://revistas.ucm.es/index.php/ASHF/article/view/5571 Fray Alonso de Espinar. Ver : Espinar o Espinal, Alonso de (¿-1513). Religioso franciscano español, nacido en fecha desconocida en España y muerto en 1513 en un naufra- gio en el océano Atlántico. Dirigió el primer grupo de misioneros de su orden que fueron a América. Se esta- blecieron en Concepción, en la isla Española, donde se fundo el primer convento de esta orden. Espinar fue en- viado a España a raíz del sermón de Montesinos y murió en el océano al naufragar la embarcación en la que re- gresaba a Indias con nuevos frailes. Fray Alonso del Espinar, a quien Las Casas llama Espi- nal, llegó a Santo Domingo en 1502 con la flota de frey Nicolás de Ovando con objeto de establecer la orden franciscana en América, descubierta diez años antes. El padre Espinar fue como prelado del primer grupo de ta- les franciscanos, compuesto de doce de ellos. El gober- – 171 – nador ordenó que se les construyera un convento en la población de Concepción de la Vega, que no se constru- yó en firme hasta 1545 ; allí se colocó la cruz que levan- tó Colón a su llegada en 1492.

En 1511 Espinar era el superior del convento erigido en la ciudad de Santo Domingo, a donde fueron a quejarse los encomenderos cuando el dominico Montesinos pro- nunció su famosa homilía en la que les acusó de explo- tadores y de estar condenados al infierno y a la corona de haber tergiversando la donación papal de las Indias. Los encomenderos suplicaron a Espinar que viajara a España y se entrevistara con el rey para explicarle la verdadera situación de la Española, lo que hizo el fran- ciscano. Se entrevistó con Fernando el Católico y le dio su punto de vista sobre la crisis moral indiana. De sus in- formes y de los de Montesinos vinieron a resultar las famosas Leyes de Burgos de 1512. Se convocó entonces el Capítulo General de la Orden en Segovia al que asistió Espinar y donde se acordó enviar más misioneros fran- ciscanos a Indias. Se mandaron a Sevilla catorce, que debían viajar a Indias con el padre. Espinar. Sólo hubo pasaje para doce de ellos, que embarcaron de inmediato en 1513, los otros dos se quedaron con Espinar en espe- ra de otra nave. Al fin ésta estuvo lista y en ella viajó Espinar, emprendiendo una violenta travesía en la que naufragó la nave y se ahogaron los religiosos.

Del padre Espinar dijo Las Casas que era “celoso y vir- tuoso religioso, pero no letrado, mas de saber lo que muchos religiosos saben, y todo su estudio era leer en la Suma angélica para confesar”.

– 172 – CASTRO SEOANE, J. “Aviamiento y catálogo de las misio- nes que en el siglo XVI pasaron de España a Indias, se- gún los libros de Contratación”, en Missionalis Hispánica, núm. 37, Madrid, 1956. LOPEZ, FR. A. Fr. “Alonso del Espinar, misionero en las In- dias”, en Archivo Ibero Americano, Madrid, 1916. http://www.mcnbiografias.com/app- bio/do/show?key=espinar-alonso-de Le Décalogue – littéralement les dix paroles, généralement traduit par les Dix Commandements – est un court en- semble écrit d’instructions morales et religieuses reçues, selon les traditions bibliques, de Dieu par Moïse au mont Sinaï. https://fr.wikipedia.org/wiki/D%C3%A9calogue El INDIO HATUEY Hatuey, le premier résistant anti- impérialiste. Dans Le système colonial dévoilé, le baron de Vastey consacre un long développement aux indiens Taïnos et à ce chef légendaire, Hatuey, qui, le premier, s’opposa à l’impérialisme et l’esclavage. Il reste au- jourd’hui un symbole… Baron de Vastey ; Le système colonial dévoilé (1814). Notes à M. le baron de V. P. Malouet, en réfutation du IVe Volume de son ouvrage, intitulé Collection de Mé- moires sur les Colonies, et particulièrement sur Saint- Domingue. (1814). Le combat d’Hatuey est évoqué dans le film d’Icíar Bol- laín, “Même la pluie”, réalisé en 2011. C’est l’histoire d’un tournage en Bolivie. Juan F. Pérez Home Page / Historia de Cuba :

– 173 – http://www.juanperez.com/historia/hatuey.html Hatuey : “si al cielo van los españoles yo prefiero el in- fierno” Ne pas confondre avec Alonso Sánchez (e. a. sta- tue à Huelva) : https://historiadelaprovinciadehuelva.blogspot.com/2012/02/ la-leyenda-de-alonso-sanchez-de-huelva.html André Saint-Lu ; « La légende du pilote précurseur de Chris- tophe Colomb dans l’historiographie du Guatemala » in Bul- letin Hispanique, Année 1959, Volume 61 (Numéro 1), pp. 74-81 : https://www.persee.fr/doc/hispa_0007- 4640_1959_num_61_1_3615 Responsables de cruautés : Gonzalo Hernández de Oviedo. « Y que Oviedo haya sido partícipe de las crueles tira- nías que en aquel reino de Tierra Firme que llamaron Castilla del Oro, desde el año de 14 que fue, no a gober- nallo, sino a destruillo (…) » Fray Bartolomé de las Casas ; Historia de las Indias, capí- tulo CXLII) Hablando de cómo se saca el oro, en el libro de su Histo- ria, capítulo 8.°, refiere Oviedo : « Yo he hecho sacar el oro para mí con mis indios y esclavos en la Tierra Firme, en la provincia y gobernación de Castilla del Oro, etc. ». Alonso Sánchez de Carvajal y Francisco Roldán in Juan de Velasco (1727-1792) ; Historia del reino de Quito en la América meridional ; Caracas, Fundación Biblioteca Aya- cucho (N° 82) ; 1981, XLIX-669 pages. (page 243) : « Falsas rebeliones » de indios. Ver, e. o. :

– 174 – https://fr.slideshare.net/Elenamohr/rebeliones-indgenas-en- amrica-colonial Kintto Lucas ; Rebeliones indigenas y negras en América la- tina : http://www.rebelion.org/docs/18966.pdf « No nacimos indios, nos hicieron indios » : http://www.rebelion.org/docs/18966.pdf Alexandre Cœllo de la Rosa ; “¿Indios buenos?”, “¿Indios ma- los?”, “¿Buenos cristianos ?” : La cara oscura de las Indias en Gonzalo Fernández de Oviedo y Valdés » (*) in Scripta Nova (Re- vista electrónica de geografía y ciencias sociales) ; Universidad de Barcelona ; Vol V, nº 101,15 de noviembre de 2001 (ISSN : 1138-9788. Depósito Legal : B. 21.741-98) : http://www.ub.edu/geocrit/sn-101.htm (*) Fernández de Oviedo y Valdés, Gonzalo ; Historia General y Natural de las Indias, Islas y Tierra Firme del Mar Océano ; Ma- drid, Real Academia de la Historia ; 1854,770 p. : https://ia801408.us.archive.org/6/items/historiageneraly01fer n/historiageneraly01fern.pdf Juan Friede ; « Los Franciscanos en el Nuevo Reino de Granada y el movimiento indigenista del siglo XVI » in Bulletin His- panique ; 1958, Volume 60, Numéro 1, pp. 5-29 (refus d’absolution et mesures de prévention : pp. 16,19,22,24) : https://www.persee.fr/doc/hispa_0007- 4640_1958_num_60_1_3561 José Fernando Ramírez ; Obras históricas (Volume 2) ; UNAM ; 2001,289 p. (p. 46) :

– 175 – Bartolomé de Las Casas, obispo de Chiapas, niega la ab- solución a los españoles que poseen esclavos (en 1545). http://moines.mayas.free.fr/frailes.mayas/index_pages/Las% 20Casas%20en%20contra%20de%20los%20conquistadores(17). htm (Fray Antonio de Remesal, Historia de la provincia de San Vicente de Chiapa y Guatemala, libro 6, capítulo 2 ; 1619, p. 287) https://ia902705.us.archive.org/4/items/historiadelaprov00re me/historiadelaprov00reme.pdf

Chapitre 17 ALFONSO ÁLVAREZ de VILLASANDINO(1340-1350 – c 1424) CANTIGA (composition poétique destinée à être chantée). « TROVADORES CASTELLANOS / CANTIGAS DE AMOR Y RELIGIOSAS » (SELECCIÓN, INTRODUCCIÓN Y NOTAS DE ROBERTO F. GIUSTI) : http://www.dim.uchile.cl/~anmoreir/escritos/siglo_oro/trova .html

Generosa, muy hermosa, sin mancilla Virgen Santa, virtuosa, poderosa, de quien Lucifer se espanta tanta fué la tu grand omildat, que toda la Trenidat en ti se encierra, se canta.

– 176 – Placentero fué el primero gozo, Señora, que hobiste; cuando el vero mensajero te saluó, tú respondiste. Trojiste en tu seno virginal al Padre celestial, al cual sin dolor pariste.

Quien sabría nin diría cuánta fué tu omildanza, o María, puerta e vía de salud e de holganza. Fianza tengo en ti, muy dulce flor, que por ser tu servidor habré de Dios perdonanza.

Noble rosa, hija e esposa de Dios, e su madre dina, amorosa es la tu prosa, Ave, estela matutina. Enclina tus orejas de dulzor oyendo a mí, pecador, ayudándome festina.

Quien te apela maristela, flor del ángel saludada, sin cabtela non recela la tenebrosa morada. Criada fuste limpia, sin error, porqu’el alto Emperador te nos dió por abogada.

Que parrías al Mexías

– 177 – dijeron gentes discretas, Jeremías e Isaías, Daniel e otros profetas. Poetas te loan e loarán, e los santos cantarán por ti en gloria chanzonetas.

O beata inmaculata, sin error desde abenicio, bien barata quien te cata mansamente sin bollicio. Servicio hace a Dios, nuestro Señor, quien te sirve por amor non dando a sus carnes vicio.

« Armamento naval. La artillería en los siglos XV-XVI – XVII ». Illustration de bombarde utilisée sur les caravelles. Voir : http://www.armada15001900.net/artillerianaval.htm Vasco Nuñez de BALBOA par Fred FUNCKEN : https://www.idesetautres.be/upload/BALBOA%20FUNCKEN. pdf Río de Santa Lucía (Cuenca del Plata). Images : https://www.youtube.com/watch?v=DiAvdXBHUw0 https://commons.wikimedia.org/wiki/Category:R%C3%ADo_S anta_Luc%C3%ADa

– 178 – Chapitre 18 ALFONSO ÁLVAREZ de VILLASANDINO (1340-1350 – c 1424) CANTIGA: voir le chapitre 17. El Río de Solís = El Río de Quilmes : images. http://fr.slideshare.net/sirincho/el-ro-de-sols Carte du bassin du Río de la Plata :

https://es.wikipedia.org/wiki/Categor%C3%ADa:Afluentes_de l_R%C3%ADo_de_la_Plata#/media/File:Plata_buenos_aires_m ontevideo_map.svg Voir aussi: Plata_buenos_aires_montevideo_map.PNG REITANO, Emir ; « El Río de La Plata y la cartografía portu- guesa de los siglos XVI y XVII », in Anuario del Instituto de Historia Argentina N° 3 ; Universidad Nacional de La Pla- ta ; 2003, pp. 159-186 (“Memoria Académica”) :

– 179 – http://www.memoria.fahce.unlp.edu.ar/art_revistas/pr.3101/ pr.3101.pdf Gobernación del Río de la Plata, carte datant des alentours de 1600. (Jodocus Hondius : 1563-1612). https://es.wikipedia.org/wiki/Gobernaci%C3%B3n_del_R%C3 %ADo_de_la_Plata_y_del_Paraguay#/media/File:Paraguay_- _O_Prov_de_Rio_de_la_Plata_- _cum_regionibus_adiacentibus_Tvcvman_et_Sta._Cruz_de_la_S ierra_-_ca_1600.jpg

« Glas de Vellila » (« campana de Velilla ») : http://www.enciclopedia- aragonesa.com/voz.asp?voz_id=2948 Les cloches magiques de Velilla de Ebro : https://www.youtube.com/watch?v=-izxdosNvDQ « Île de San Gabriel, si souvent mentionnée » : https://es.wikipedia.org/wiki/Isla_San_Gabriel

– 180 – Île Martín García. Voir, e. a. : https://es.wikipedia.org/wiki/Isla_Mart%C3%ADn_Garc%C3 %ADa Travail propre basé sur le travail de “pruxo” de Licencia de Documentación Libre GNU https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Isla_martin_garcia- timoteo_dominguez_1.png https://fr.wikipedia.org/wiki/Mart%C3%ADn_Garc%C3%ADa _(%C3%AEle)

– 181 – L’île se trouve à droite sur la carte qui figure supra dans le texte (carte publiée par la professeur Luciana Aguiar ) : http://histoestudiantes2000.blogspot.com/2010_08_01_archiv e.html

Chapitre 19 LUIS PRATS ; « Los misterios que dejó Solís : ¿Hizo viajes secre- tos ? ¿Había sido pirata ? ¿Quiénes lo mataron ? Una histo- ria que cumple 500 años » in El País (domingo), Montevi- deo, 14/02/1916 : http://www.elpais.com.uy/domingo/misterios-que-dejo- solis.html Expédition de Solís au Río de la Plata https://es.wikipedia.org/wiki/Expedici%C3%B3n_de_Sol%C3 %ADs_al_R%C3%ADo_de_la_Plata Mort de Solís : « Viendo indígenas en la costa oriental, Díaz de Solís in- tentó desembarcar en un bote con 7 de sus tripulantes (entre ellos Alarcón y Marquina, 4 marineros y el grume- te Francisco del Puerto), en un paraje entre Carmelo y Punta Gorda, o en alguna isla situada frente a esa costa. Solís y sus compañeros fueron sorpresivamente ataca- dos por un grupo de indígenas que los mataron y des- cuartizaron ante la mirada del resto de los marinos, que observaron impotentes desde el buque, fondeado a tiro de piedra de la costa. Los cadáveres fueron asados y de- vorados por los indígenas, que fueron identificados co-

– 182 – mo charrúas, sin embargo de que estos no eran caníba- les, pero sí sus vecinos guaraníes (los chandules) que vi- vían en las islas situadas en la cercana costa opuesta. Relation de Herrera de la mort de Solís. (notez la S larga uti- lisée dans la calligraphie de l’époque, représentée par le symbole “ſ”) : « Siempre que fueron coſteando la Tierra, haſta ponerſe en el altura ſobredicha, deſcubrian algunas veces Mon- tañas, i otros grandes Riſcos, viendo Gente en las Ribe- ras : i en eſta del Rio de la Plata deſcubrian muchas Ca- ſas de Indios, i Gente, que con mucha atencion eſtaba mirando paſar el Navio, i con ſeñas ofrecían lo que te- nian, poniendolo en el ſuelo. Juan Díaz de Solis, quiſo en todo caſo vèr, què Gente era eſta, i tomar algun Hombre para traer à Caſtilla. Saliò à Tierra con los que podian caber en la Barca : los Indios, que tenian emboſcados muchos Flecheros, quando vieron à los Caſtellanos algo deviados de la Mar, dieron en ellos, i rodeando, los ma- taron, fin que aprovechaſe el ſocorro de la Artilleria de la Caravela : i tomando acueſtas los muertos, i apartando- los de la Ribera, haſta donde los del Navio los podian vèr, cortando las cabeças, braços, i pies, aſaban los cuerpos enteros, i ſe los comian. Con eſta eſpantoſa viſta, la Caravela fue à buſcar el otro Navio, i ambos ſe bolvie- ron al Cabo de S. Aguſtin, adonde cargaron de Braſil, i ſe tornaron à Caſtilla. Eſte fin tuvo Juan Diaz de Solis, mas famoſo Piloto, que Capitan. » (HERRERA) « El grumete Francisco del Puerto no fue asesinado, pero sus compañeros confundidos al haber perdido a su líder, no intentan rescatarlo y retornan junto a los otros dos barcos. Tomando el mando Francisco de Torres (cuñado

– 183 – de Díaz de Solís), regresaron inmediatamente al mar, reaprovisionándose de la carne de 66 lobos marinos en la isla de Lobos. Salaron la carne y llevaron los cueros que luego vendieron en Sevilla. Del Puerto permaneció en Martín García hasta el arribo de la expedición de Sebas- tián Caboto, cuando fue recogido. » HERRERA y Tordesillas, Antonio de ; Barcía Carballido y Zúñiga, Andrés González ; Historia general de los hechos de los castellanos en las islas i tierra firme del mar océano (Ilustrado por Matías Irala) ; Imprenta Real de Nicolas Rodriguez Franco ; 1726,2 tomos, 292 (Decada primera) + 288 páginas (Decada segunda, page 12 : “Muerte de So- lís” ; transcription ci-dessus) : https://ia801409.us.archive.org/14/items/generaldehechosd0 1herr/generaldehechosd01herr.pdf

Chapitre 20

Guillaume CANDELA ; « De Cannibale à Général : Représenta- tions singulières des indiens du Rio de la Plata » : https://www.academia.edu/6244557/De_Cannibale_%C3%A0 _G%C3%A9n%C3%A9ral_Repr%C3%A9sentations_singuli%C3 %A8res_des_indiens_du_Rio_de_la_Plata Cabo de San Agustín (8º de latitude Sud) : Cabo de Santo Agostinho, cabo de Consolación, ou cabo de Santa María de la Consolación « (…) embarqua une petite Indienne (…) ». Voir, dans le livre suivant, à la page CCXCIV.

– 184 – « Enrique Montes y Melchor Ramírez dont l’Histoire s’occupera à nouveau en narrant les expéditions de Sebastian Cabot et de Diego García ». Voir, e. a. : pages CCLV, CCXC-CCXCII, CCCXVII-CCCXXIII, CCCXXVIII-CCCXXXI. Dans le li- vre suivant : José Toribio Medina ; Juan Díaz de Solís. Estudio histórico ; Santiago de Chile, impreso en casa del autor ; 1897, CCCLII + 252 p. (segundo libro : documentos y biblio- grafía). https://ia800502.us.archive.org/10/items/juandazdesol00med i/juandazdesol00medi.pdf « Francisco del Puerto, captif des Indiens, restait sur les rives de la Mer d’eau douce, » Voir, e. a. : pages CCCXXXII- CCCXXXIII du livre précédent. José Toribio Medina ; Los viajes de Diego García de Moguer al Río de la Plata, estudio histórico ; Santiago de Chile, Im- prenta Elzeviriana ; 1908, 309 p. : https://ia601402.us.archive.org/28/items/losviajesde00mediri ch/losviajesde00medirich.pdf Expedición de Solís al Río de la Plata https://es.wikipedia.org/wiki/Expedici%C3%B3n_de_Sol%C3 %ADs_al_R%C3%ADo_de_la_Plata “El grumete Francisco del Puerto (…) permaneció en Martín García hasta el arribo de la expedición de Sebastián Cabo- to, cuando fue recogido.” (traduction : Le mousse Francisco del Puerto (…) resta sur l’île Martín García jusqu’à l’arrivée de l’expédition de Sebastian Cabot, quand il fut recueilli.) José Toribio Medina ; El veneciano Sebastián Caboto al servi- cio de España (…) ; Santiago de Chile, Imprenta y En- – 185 – cuadernación Universitaria ; 1908, IX-634 p. (tomo I ; índice alfabético del texto ; documentos y bibliografía) https://ia801407.us.archive.org/35/items/elvenecianosebas01 medirich/elvenecianosebas01medirich.pdf

– 186 – TABLE DES ILLUSTRATIONS

Chapitre 11 Vue de Sanlúcar en 1567, dessinée par Antonio de las Viñas https://commons.wikimedia.org/wiki/Category:Anthonis_van _den_Wijngaerde#/media/File:Sanlucar_barrameda_vista_pan oramica_1567_Wijngaerde.jpg Marins à la manœuvre du cabestan, Anonyme, Original Print, 19e siècle (Wikipédia). La Santa Maria en mouillage (détail), Andries Van Eertvelt, c. 1628 (The Society for Nautical Research)

Chapitre 12 Illustration de monstres provenant du Musée Vivant du Roman d'Aventures, Muséum d'Histoire Naturelle de Lausanne in Monstres marins, mythes et légendes, dossier thématique Médiathèque de La Cité de la Mer (Cherbourg), Sep- tembre 2013. https://www.pedagogie.ac- nantes.fr/medias/fichier/monstresmarins_1392553930390.pdf Carte situant la Castille d’Or par « Santos30 » (Creative Commons Attribution-ShareAlike3.0Unported li- cense) : https://commons.wikimedia.org/wiki/File :Tierra_Firme_Coq uivacoa.PNG

– 187 – Vasco Núñez de Balboa prend possession de l'océan Pacifique au nom des souverains de Castille, gravure, anonyme, 19e siècle (Wikipédia). https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Balboa_s%C3%BCd see.jpg

Chapitre 13

Îles Canaries et Golfo de Yegas, Cartographie Abraham Ortelius, 16e siècle in Juan Tous Meliá ; Las Islas Canarias a través de la Cartografía : Una selección de los mapas más emble- máticos levantados entre 1507 y 1898 ; Islas Canarias [Ga- viño de Franchy] ; 2014, 264 p. (172 illustrations). Mapa con Plano y Vistas de la Yslas de Canaria, Première car- te imprimée aux Îles Canaries, 1786, levée par Josef Tri- nidad de Herrera et gravée par Antonio Hemández Ber- mejo. Pico del Teide (Tenerife) et navires au premier plan, gravure an- cienne. Teide, Siruis Enobs, 26.02.2011 (Wikimédia). licence Creative Commons Attribution – Partage dans les Mêmes Conditions 3.0 (non transposée). https://web.archive.org/web/20161016220014/http://www.p anoramio.com/photo/49132016

– 188 – Chapitre 14 Pueblo Chico hier : Guanchen, photographie R. Liebau, 05.04.2006 Licence : Attribution – Partage dans les Mêmes Conditions 3.0 (non transposée) https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Pueblo_Chico_Gua nchen2.jpg?uselang=fr Costumes des Guanches, écrasant des céréales et faisant cuire leur repas à l’abri d’une caverne. Carreaux de faïence au Parque García Sanabria in Santa Cruz de Tenerife photo retouchée par Koppchen, 31.07. 2012 Licence Creative Commons Attribution 3.0 Unported https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Parque_03.jpg Llegada de los Conquistadores Représentation de Guanches. Carreaux de faïence au Parque García Sanabria in Santa Cruz de Tenerife, photo retouchée par Koppchen, 31.07. 2012 Licence Creative Commons Attribution 3.0 Unported https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Parque_08.jpg Gravures Guanches/Guanche engravings, Canary Islands : Luc Viatour: Licence : GNU Free Documentation License www.lucnix.be Momie Guanche dans le Museo de la Naturaleza y el Hombre (Santa Cruz de Tenerife) : par Cardenasg – Travail per- sonnel, CC BY 2.5,

– 189 – https://commons.wikimedia.org/w/index.php ?curid=1089781 Détail d’une carte du nord-ouest de l’Afrique par Guillaume De- lisle (1707). L’île de Saint-Brendan (« St. Borondon ») est en le parage à gauche en dessous du mot « quelques ». https://etiennefd.com/lile-de-saint-brendan/ https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Guillaume_Delisle_ North_West_Africa_1707.jpg?uselang=fr Emplacement de Cabo de Santo Agostinho, aujourd’hui une ville du Brésil : https://fr.wikipedia.org/wiki/Cabo_de_Santo_Agostinho La mer des Sargasses dans l'Atlantique nord, Cartographiée d'après Otto Krümmel (1854-1912).- Die nordatlantische Sargasso See (1891), Petermanns geographische Mitteilung- en (1891), Dr. A. Petermann's Mitteilungen aus Justus Perthes' geographischer Anstalt (1891), Justus Perthes Ed- iteur, Gotha, 1891. https://commons.wikimedia.org/wiki/File:1891_SargassoSee_ Krummel_Petermanns_lores.jpg?uselang=fr Ligne de sargasse dans la mer du même nom. Ces lignes peu- vent s'étirer sur plusieurs kilomètres. Les amas d'algues flottantes sont concentrés par les vents forts et l'action des vagues associées au Gulf Stream, anonyme, 09.08.2002, Ocean Explorer/NOAA. https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Lines_of_sargassum _Sargasso_Sea.jpg?uselang=fr Feux de Saint Elme à la pointe du mat d’un navire in The Aerial World, by Dr. G. Hartwig, London, 1886

– 190 – https://commons.wikimedia.org/wiki/St._Elmo%27s_Fire?usel ang=fr

Chapitre 15 Araponga barbu (Procnias averano) empaillé au Muséum d'Histoire naturelle de Genève, photographié par Totodu le 20.06.2009 https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Araponga_barbu.JP G?uselang=fr Trochilidae, peinture de Ernst Haeckel parue dans Kunstfor- men der Natur de 1904, planche 99. https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Haeckel_Trochilida e.jpg 1. Trochilus colubris (Linné) = Archilochus colubris (Linnaeus, 1758) 2. Heliactin cornutus (Bonaparte) = Heliactin bilophus (Tem- minck, 1820)

– 191 – 3. Topaza pella (Gray) = Topaza pella (Linnaeus, 1758) 4. Sparganura sappho (Cabanis) = Sappho sparganura (Shaw, 1812) 5. Lophornis ornata (Lesson) = Lophornis ornatus (Boddaert, 1783) 6. Docimastes ensifer (Gould) = Ensifera ensifera (Boissonneau, 1840) 7. Eutoxeres condamini (Reichenbach) = Eutoxeres condamini (Bourcier, 1851) 8. Lophornis gouldii (Gray) = Lophornis gouldii (Lesson, 1833) 9. Ornismya petasphora (Lesson) = Colibri serrirostris (Vieillot, 1816) 10. Augastes lumachellus (Gould) = Augastes lumachella (Les- son, 1838) 11. Hylocharis Stokesii (King) = Sephanoides fernandensis (King, 1831) 12. Steganura underwoodi (Gould) = Ocreatus underwoodii (Lesson, 1832) Voyages de Cabral au Brésil et à Calicut (Khozhikode, Kerala), retouchée par Odysseus1479 le 22.10.2010. (En rouge, la route suivie par Cabral du Portugal vers l'Inde en 1500, et la route retour en bleu.) Licence : Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Un- ported https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Cabral_voyage_150 0.svg Peinture romantique du premier débarquement de Pedro Álvares Cabral sur l’île Vera Cruz (22 avril 1500). On peut l’apercevoir sur le rivage au centre debout devant les soldats en armes qui déploie une bannière de l’ordre du Christ :

– 192 – https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Desembarque_de_P edro_%C3 %81lvares_Cabral_em_Porto_Seguro_em_1500_by_ Oscar_Pereira_da_Silva_(1865 %E2 %80 %931939).jpg Carte incluant, e. a., Cabral et Vespucci : Lobato, Mirta Zai- da ; Juan Suriano ; Nueva Historia Argentina. Atlas históri- co ; Buenos Aires, Sudamericana ; 2010. https://historiasocialyeconomicaargentina.wordpress.com/201 4/03/29/america-siglo-xvi-descubrimiento-y-conquista-de- espanoles-y-portugueses/ Illustration tirée de : L’Histoire du monde : la course aux épices », Fred Funken in Tintin, n° 29, 16071958 (courtoisie de M. et Mme Fred Funken, selon autorisation donnée à Bernard Goorden) https://www.idesetautres.be/upload/19580716%20COURSE% 20AUX%20EPICES%20HISTOIRE%20MONDE%20144%20TIN TIN%2029.pdf

Chapitre 16 Depiction (Théodore de Bry) of Spanish atrocities in the New World, as recounted by Bartolomé de las Casas in Narra- tio Regionum indicarum per Hispanos Quosdam devastata- rum verissima : https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Narratio_Regionum _indicarum_per_Hispanos_Quosdam_devastatarum_verissima_ Theodore_de_Bry.jpg Nous avons également reproduit 4 illustrations provenant respectivement des pages 225 (« Indiens brûlés vifs », page 17 de Las Casas), 168 (« Mines d’or de Cuba », en couleurs, Th. de Bry, Grands voyages, Americae, pars. V,

– 193 – planche I), 232 (« Indiens dévorés par des chiens », en cou- leurs, Th. de Bry, Grands voyages, Americae, pars. IV, planche XXII), 257 (« Les Espagnols attisaient le feu au- dessous du gril »), de VERNE, Jules ; Découverte de la Terre ; Paris ; Hetzel ; première partie (chapitre V) et deuxième partie, chapitre VI : http://passerellesdutemps.free.fr/edition_numerique/IGCD/9 _GEOGRAPHIE_%20HISTOIRE_SCIENCES_AUXILIAIRES_DE _L_HISTOIRE/91_Geographie_explorations_voyages/910.9_D ecouverte_de_la_terre.pdf Illustration (« Treize pendus brûlés », voir aussi infra) de Théodore de Bry (1528 – 1598) inspirée d’un passage de la Brevísima, décrivant des massacres supposés d’enfants amérindiens par les Espagnols. Probablement extraite de la traduction latine de 1598 : https://commons.wikimedia.org/wiki/File:De_Bry_1c.JPG La Minerìa : Trabajada principalmente por indìgenas, donde luego es obrada por los negros, quienes fueron traidos a Amèrica para hacer trabajos forzosos. Los conquistado- res tenìan el pleno control de la producciòn y los terre- nos. https://nataechev.wixsite.com/unregaloparati/single- post/2016/10/28/Actividades-productivas-en-la-colonia Buste d'Hatuey à Baracoa. http://laurent.quevilly.pagesperso-orange.fr/Hatuey.html

– 194 – Chapitre 17 Cartes de la Province du Río de la Plata (…) extraites de DUVIOLS, Jean-Paul ; L’Amérique espagnole vue et rêvée. Les livres de Christophe Colomb à L. A. de Bougainville (1492-1768) ; (Paris), Éditions Promodis (Collection diri- gée par Jean Viardot) ; 1985, p. 260 (1602), p. 380 (e. a. Capitanía del Rey ; 17ème siècle). Page 12 de Travels in Buenos Ayres, and the adjacent provinces of the Rio de la Plata. With observations, for the use of per- sons who contemplate emigrating to that country; or, em- barking capital in its affairs, BEAUMONT, J. A. B, Lon- dres, 1828. https://commons.wikimedia.org/wiki/File:(1828)_PLATE_OF_ THE_PROVINCES_OF_BUENOS_AYRES,_BANDA_ORIENTAL _%26_ENTRE_RIOS.jpg Desembarco de Juan Díaz de Solís en las costas de la Banda Oriental (actual ), acechado por indios Charrúas que lo matarían poco después, Ulpiano Checa, in "Historia Argentina" de Abad de Santillán, 19e siècle. https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Descubrimiento_del _R%C3%ADo_de_la_Plata.jpg Cinnamon Teal Anas cyanoptera, Los Osos (Cuesta by the Sea Inlet), Morro Bay, CA, March 29, 2007, "Mike" Michael L. Baird. Licence Creative Commons Attribution 2.0 Generic https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Sarcelle_cannelle.jp g

– 195 – Chapitre 19 LUIS PRATS ; « Los misterios que dejó Solís : ¿Hizo viajes secretos? ¿Había sido pirata? ¿Quiénes lo mataron? Una historia que cumple 500 años » in El País (domingo), Montevideo, 14/02/1916 : http://www.elpais.com.uy/domingo/misterios-que-dejo- solis.html

– 196 – EL MAR DULCE

XI

LOS ADIOSES

Desde que zarpó, perdiendo de vista la mole del Alcázar donde se cobijaba la Contratación, desde que sintió bajo su planta el suave balance del navío, Juan Díaz de Solís apare- ció transformado. Brillaba en sus ojos el mismo fuego, pero atenuado por una gran serenidad. Ya estuviera de pie en el puente, vigilando más que mandando la maniobra, ya reco- rriera a paso lento la cubierta, ya visitara los mil recovecos de la nave, cuidando de que todo estuviese en orden, ya se sentara en la toldilla para reposar un momento, su aire de tranquila seguridad inspiraba respeto y confianza a la tripu- lación, que nunca le había visto así antes de la partida, mien- tras estuvo en lucha con dificultades ocasionales y suscita- das por la malevolencia. La misma vaga sonrisa que plegaba sus labios afirmaba su autoridad. Ya era el amo, indepen- diente de toda influencia, dueño y señor de su barco y de su gente, como lo era de las dos naos que seguían su estela, guiadas por Francisco Torres y por Rodrigo Álvarez de Car- taya. Levadas las anclas, puesta en franquía la escuadrilla,

– 197 – nadie podía detenerlo, y antes de surgir frente a Sanlúcar, había estado a punto de pasar de largo, para evitar hasta la más remota posibilidad de nuevos entorpecimientos. Dos motivos de distinto orden se lo impidieron: allí debía tomar a su bordo, como capellán, a un fraile dominico que había es- tado en Indias con fray Bartolomé de las Casas, y allí tam- bién podía esperarle una carta de don Fernando, a quien ha- bía escrito despidiéndose, y que quizá se dignara enviarle una palabra de adiós. Y aún haría otra escala, determinada más por el sentimiento que por la necesidad, antes de alejar- se de las costas españolas: doña Ana y sus dos hijitos le aguardaban en Lepe, para darle el abrazo de despedida. Pero nada de esto inquietaba ya al marino, enteramente dueño de sus acciones desde que perdió el contacto con “esos señores de Sevilla”. Ni le inquietaba cosa alguna, fuera de sus navíos. De allí en adelante iba a ser el capitán impá- vido y silencioso que guarda toda su autoridad celosamente en razón de la responsabilidad con que ha cargado. Pero to- do marchaba sin tropiezo. Las naos iban bien pertrechadas, y en cambio de la carabela zozobrada que, al fin y al cabo, no era más que “un montón de leña”, un viejo barco poco velero y apenas apto para navegar, había conseguido otra, si no nueva, sólida y manejable. Llevaba sesenta hombres aveza- dos como tripulantes de los tres navíos, provisiones de boca para más de dos años, armas suficientes y alguna artillería. Con esto, un hombre como él podría ir lejos y hacer mucho; pero su satisfacción, por lo tanto bien fundada, no adormecía su vigilancia previsora. Podía estar tranquilo, sin embargo. Aun en el caso de que sus presuntos fiscales, el contador Alarcón y el factor

– 198 – Marquina95 fueran enemigos suyos, en vez de amigos, no hu- biese tenido que temer de ellos el menor avance sobre su au- toridad; los dos desdichados funcionarios, apenas iniciado el dulce movimiento de mecedora de la Portuguesa en el Gua- dalquivir, sintieron que el mundo giraba alrededor de sus ca- bezas y que el cuerpo quería volvérsele del revés, echando fuera lo que hasta entonces había estado dentro; y si se ma- reaban flotando en aguas mansas como las de un lago, ¿qué no sería, vive Dios, cuando se vieran zarandeados en alta mar?… Solís los compadecía, sin dejar por eso de sonreírse, porque el mareo, involuntaria y chusca borrachera, ha inspi- rado siempre risas y lástimas al propio tiempo. La noche había pasado sin que cesara el ir y venir de las pequeñas embarcaciones de la costa a los navíos, y en cuan- to amaneció y los primeros rayos solares comenzaron a di- solver la ligera niebla que flotaba sobre el río y la costa pan- tanosa, pudo abarcarse en su conjunto lo que las sombras ocultaban hasta entonces.

A la derecha, una sierra de líneas caprichosas, de la que surge como un árbol la torre de Lebrija y a cuyo pie se ex- tienden las marismas con sus montañitas de sal de un blanco

95 24 de noviembre de 1514 + 6 de agosto de 1515; Toribio Me- dina, pp. CCXXXII-+ 133-+ 142-143. (N.d.T.a.F.)

– 199 – ceniciento, y allá enfrente, a poco menos de una legua, al- zándose sobre el terreno llano con arenales y algunas que- bradas, las casas grises y blancas de Sanlúcar, rodeadas de huertos verdegueantes. Dominaban la parte alta, la más an- tigua, un pardo castillo96 cuadrangular del pasado siglo, con doble recinto, barbacana, pesados torreones en las esquinas y cubos cilíndricos en cada lienzo de muralla, y la iglesia, cien años más vieja, de Nuestra Señora de la O. En la parte baja y llana aparecía el convento de San Francisco y, algo más próximo a la playa el de Santo Domingo, del que, pro- bablemente a esa hora, aprestábase a salir fray Buenaventu- ra, capellán de la escuadrilla. En la playa hormigueaban ya los vagabundos, infatiga- bles para todo menos para el trabajo, a la husma de diver- sión o granjería, si no de ambas cosas a la vez, y poco a poco iban agregándoseles algunos mejor puestos, pero que bien podían ser otros que tales, pues poco diferían de los aventu- reros de baja ralea, pintados por un gran escritor casi con- temporáneo97, con sus largos bigotes, sombreros de grande falda, cuello a la valona98, espadas de más de marca y bro- queles pendientes de la pretina… Entre esta muchedumbre asomó por fin un frailecillo, pequeño de estatura, pálido y enjuto de rostro, vistiendo el hábito blanco y la capilla negra del orden de Santo Domingo, rasuradas las mejillas y el crá- neo que un estrecho cerquillo ceñía como una cinta. Solís le vio llegar desde el puente y envió en su busca a Rodrigo con

96 De Santiago. (N.d.T.a.F.)

97 Miguel de Cervantes. (N.d.T.a.F.)

98 Ver Notas del traductor al Francés

– 200 – el chinchorro. Pocos minutos después se embarcaba el fraile, acogido respetuosa y afectuosamente a bordo por el capitán que se había adelantado a recibirle. — Sólo por vos aguardaba, fray Buenaventura, pues ya nada tenemos que hacer aquí. — He hecho diligencia, sin embargo – dijo el fraile, son- riendo de un modo particular: sonriendo con los ojos, mien- tras el resto de la cara se mantenía impasible. — No era queja, que harto me complace vuestra llegada – replicó Solís –. Lo dije sólo porque esperaba encontrar aquí… — Algo que encontraréis en Lepe – interrumpió fray Buenaventura –. Al padre prior llegáronle ayer noticias de ello; ya sabéis que tiene ojos y oídos en la Corte. Albricias. Me debéis albricias, capitán. — De mil amores. Buscad vuestro acomodo, padre; Ro- drigo os guiará. Entretanto, voy a prepararme para aparejar, porque la marea crece y ha de aprovecharse para pasar la barra. ¿Traéis mucho equipaje? El frailecito, que era locuaz, apresuróse a decir: — La que llevo encima, y como repuesto alguna ropa, una túnica de algodón y dos pares de sandalias, las cosas de botica que me dijisteis, puesto que he de hacer de físico y, ¡naturalmente! el aderezo para decir misa, que ha costado no menos de veinticinco mil maravedís. Desgraciadamente, nuestro santo padre el Papa nos tiene prohibido que digamos misa a bordo, por lo de que podría verterse la divina sangre del Salvador, pero no faltará tierra donde desembarquemos y

– 201 – se pueda celebrar el santo sacrificio, para consuelo de cris- tianos y enseñanza de infieles. — Así será, padre, como decís – contestó el marino, y dirigiendo los ojos hacia una pequeña ermita que, sobre la costa, dominaba el surgidero, agregó –: Espero en Nuestra Señora de Bonanza que salvaremos el mal paso de la barra sin dificultad. — Ella irá con nosotros – dijo el fraile. Subió al puente el capitán; hiciéronse las señales de práctica a las otras dos naos, leváronse anclas y la escuadri- lla, al son de la corriente, fué arrumbando con lentitud hacia la peligrosa barra, restinga de roca por uno de cuyos resqui- cios, en marea baja, se echa al mar el Guadalquivir, y por la que, en pleamar, el océano detiene y empuja al río. Salvado el paso sin accidente, la escuadrilla navegó con viento favo- rable hacia su última escala en tierra europea. Caía ya el sol cuando se fondeó en la boca del río Pie- dras. Por cierto que en la playa no faltaban curiosos, infor- mados ya de la proximidad de las naos. Allí estaban también los notables de la villa, acompañando a doña Ana de Torres y a sus dos hijitos, Diego y Luisillo. Solís, al divisarlos desde el puente, sintió ligera congoja mientras que la vista se le nublaba un instante. Cosa extraña, enternecimiento inusita- do que atribuyó a la fatiga de tanta lucha enfadosa y ener- vante… Muchos de los marineros y algunos oficiales tenían, co- mo Solís y Francisco de Torres, sus familias en Lepe, y con- fiaban en que el capitán les daría licencia para desembarcar y decirles adiós. La obtuvieron sin pedirla, pero el primero en poner pie en tierra fué Solís, que estrechó en un solo

– 202 – abrazo a su mujer y a sus hijos, dejando de lado toda reser- va, sin ocuparse de los curiosos que lo rodeaban. — En casa os aguardan nuevas, que pido a Dios que sean buenas – dijole doña Ana. – No quise traer un pliego llegado esta mañana, considerando que preferiréis leerlo a solas. — Así es – contestó el marino –. Sobre todo si las nuevas fueran malas, que no han de serlo, según mis noticias. Francisco de Torres se había reunido con ellos y juntos se encaminaron a la villa, seguidos por sus amigos y vecinos. Una hora después hallábanse a solas cómodamente instala- dos en la vasta cocina, que en aquellos tiempos era también sala de confianza y donde rara vez se guisaba, utilizándose para este la cocina de los criados. Abrió Solís el pliego, que era de don Fernando, pero aunque no esperaba nada des- agradable no pudo, al reprimir una exclamación de alegría: el Rey se manifestaba muy satisfecho de su diligencia y, como galardón, dispensábalo del pago de los dineros que la Casa de Sevilla le había adelantado para su abastecimiento99. — ¿Qué piensas de esto, Paco? – preguntó regocijada- mente, después de informar a Torres. – ¡De ver será, la cara de vinagre de los de Sevilla! – y esta fué la última alusión a sus enemigos que hizo por entonces el piloto. — ¡Y la cara de Vasconcelos! – exclamó Torres –. Le da- rá más dentera que comer membrillo acedo.

99 2 de octubre de 1515; Toribio Medina, p. 169. (N.d.T.a.F.)

– 203 – Solís, que había continuado leyendo, agregó con regoci- jo: — ¡Pues aún faltaba lo mejor! — ¿Qué es ello, di? – preguntó su mujer, que en la inti- midad olvidaba el tratamiento. Su Alteza decía que doña Ana de Torres, esposa de So- lís, los hijos de éste, su casa y sus mismos hermanos serían favorecidos por orden suya, mientras durara la ausencia del piloto mayor, y al propio tiempo, que, obedeciendo a su real voluntad, en todos los monasterios de Sevilla se rogaría al Altísimo por el buen éxito de la jornada y por la salud y la fe- licidad de quien la capitaneaba. — ¡Y todavía dirán las malas lenguas que don Fernando es cicatero! – exclamó Torres. — No digo que no lo sea – replicó Solís, de muy buen humor –. Lo será, lo es con quien no merece otra cosa; lo se- rá, lo es con su propia persona, porque le importa sobre to- das las cosas que no se malgasten los dineros del tesoro real… — Cuando no se trata de la nueva Reina… – murmuró doña Ana – Para ella no hay cortapisas… — ¡No digas más, mujer! Cuando el amor tienta al viejo, éste deja la bolsa y el pellejo… Pero no hay que entrometer- se en cosas de grandes… Lo que importa es el interés que en nuestro viaje pone y demuestra Su Alteza, el único quizá que a estas horas comprende o adivina, para el presente y el fu- turo, la grandeza de lo que intentamos hacer. No nos recom- pensaría de antemano si así no fuera…

– 204 – — Dices bien – contestó doña Ana –. Gracias al Rey no nos falta nada, ni nos faltará durante tu ausencia, que plegue a Dios… — ¡Deja las plegarias, que suenan a agüero, mujer! – ex- clamó Solís –. Reza, pero agradeciendo con fe y con espe- ranza… Antes de un año estaremos de vuelta, y ¡vive Dios! después de una hazaña que será sonada… — ¡Permítalo el cielo! – exclamó doña Ana suspirando, con la angustia de la mujer amante que teme siempre lo peor. — ¡Vamos! Viajes más difíciles y peligrosos hemos he- cho, hermana – dijo Torres. — Y aquí nos tienes, tan guapos y campantes – terminó Solís riendo –. Fuera pena y danos un vaso, que hemos de beber a la partida, pensando en la vuelta. — Sí, bebamos – asintió Francisco de Torres. Escanció doña Ana del más rancio que en la casa había, y ambos cuñados bebieron mientras Solís explicaba sus pla- nes para la partida. — Mañana, en cuanto asome el sol, ha de decirse en Santo Domingo una misa solemne para pedir a Dios buenos vientos y mejor fortuna. He elegido la de Santo Domingo porque nuestro capellán fray Buenaventura es de ese orden y le sabrá muy bien la preferencia, muy particularmente sobre les franciscanos… aunque Dios esté en todas partes, como él dice… Así nos despediremos santamente, doña Ana, y ten- drás paciencia para aguardar la hora de vernos reunidos otra vez… quizá, para no separarnos ya, pues he de verte gober- nadora de las tierras que vamos a descubrir…

– 205 – — ¡Ay! ¡gobernadora yo! Poco ambiciosa soy, marido, y preferiría mil veces… Pero ¡ya se ve!, tú no te contentas con nada. Eras piloto mayor, podías vivir dichoso en tu casita, con mando y honores; tienes dos hijos como dos angelillos, hacienda más que mediana; me tienes a mí, que me desvivo por servirte… pues ¡no, señor! nada de eso era bastante, na- da te satisface y necesitas más, y por ese más inútil, te jue- gas la vida y con tu vida mi dicha y mi reposo… — Cada cual nace con su estrella, y yo nací para realizar grandes cosas – dijo Solís –. Nada hice todavía si se compara con lo que hoy emprendo… Está escrito allá arriba. No es ambición: es mi destino. Calló doña Ana enjugándose disimuladamente los ojos, y la plática tomó otros rumbos…

… Poco antes de amanecer la gente de la villa se ape- ñuscaba en la vieja iglesia de Santo Domingo, cuyo altar ma- yor resplandecía de luces, destacándose en la nave todavía envuelta en sombras. Allí estaban ya sus oficiales, la tripula- ción de las tres carabelas, muchos notables, y los fieles se- guían llegando, de modo que al comenzar el oficio divino, en la iglesia estaba el pueblo entero; en primera fila doña Ana entre su esposo y su hermano; a ambos lados, con el alcalde de la villa y demás autoridades, el contador Pedro de Alar- cón y el factor Francisco Marquina, sanos desde que pusie- ron el pie en tierra; tras ellos los pilotos, el maestre Diego García de Moguer, el alférez Melchor Ramírez100, el despen- sero Martín García y en grupos que obedecían a sus aficio-

100 Toribio Medina, p. CCXCI. (N.d.T.a.F.)

– 206 – nes, pero todos con igual recogimiento, el mal encarado Ro- drigo, Paquillo orgulloso con su traje de marinero, aunque cupiesen en él dos de su porte, Montes, el portugués, engan- chado como gaviero y futuro lengua, y otros de quienes la historia sólo ha conservado el nombre: Jorge Gómez y Arbo- lancha101, Alejo Ledesma, Diego de Córdoba, dos camaradas inseparables, pero que siempre andaban a la greña, llamados Pedro Núñez y Santiago Corzuelo, y la totalidad de los se- senta miembros de la expedición, quitados los pocos que ha- bían debido quedar de guardia en los navíos… El pueblo ma- drugador y creyente, rodeaba a las familias de los marinos que la tenían en las inmediaciones o en la misma villa, como el piloto Juan de Lisboa, de Lepe, y el piloto Rodrigo Álva- rez, de Cartaya. Ofició fray Buenaventura, y terminada la misa dió la bendición a los fieles arrodillados, que inclinaron la frente casi hasta tocar el suelo. Salieron todos procesionalmente del templo, dirigiéndo- se al desembarcadero, que estaba a poco más de una legua de allí, y aunque no faltaron mujeres que lloraron ni agua- fiestas que hiciesen siniestros vaticinios, aquello tuvo más de romería regocijada que de dolorosa despedida. El sol había salido e inundaba las colinas y ribazos, cubiertos de higue- ras, naranjos, almendros y viñas cuyos pámpanos doraba ya el otoño. Rodrigo Rodríguez, Montes y Paquillo, que en amena charla se habían adelantado al cortejo, detuviéronse a aguardarlo ya cerca de la costa. A dos pasos de ellos una gi-

101 Toribio Medina, p. CCXCII (N.d.T.a.F.)

– 207 – tana vieja, en cuclillas, observábalos de reojo y miraba avan- zar la procesión. Brillábanle las pupilas como cuentas de azabache y sus labios delgados y descoloridos mascullaban rezongos en su bárbara lengua. No hicieron caso de ello hasta que, al pasar Solís con Torres y doña Ana, la vieja refunfuñó, más alto: — Ojola na limbidia… — ¿Qué dice esa bruja? – preguntó Rodrigo. La gitana le lanzó una mirada como una saeta y siguió en su rezo o rezongo. — Dice “ese no güerve” – explicó Paquillo, que en Cádiz había aprendido algo de la jerga gitana, merced a sus altas relaciones. — Y ¿por quién lo dices, estantigua? – inquirió Rodrí- guez, al mismo tiempo alarmado y curioso –. ¿Por el de las barbas o por el que va a su lado? La vieja no dejó de musitar ni se dignó contestarle esta vez tampoco, pero mientras pasaban frente a ella Martín García102 y Rodrigo Álvarez repitió sus palabras sibilinas: — Ojola na limbidia. — Ha vuelto a decir “ese no güerve” – explicó Paquillo. — Ni tú – sopló la gitana, encarándose con Paquillo y poniéndose difícilmente de pie.

102 Toribio Medina, p. CCIXII. (N.d.T.a.F.)

– 208 – — No volverá… pero ¿quién? Son cuatro; el general y su cuñado, el piloto y el despensero… ¿Cuál de ellos dices que no volverá? La vieja se alejaba ya, renqueando, como doblada en dos, y diciendo con voz de carraca: — ¡Perele yaqué dor charo y a cangue marele! — La muy bellaca pide que nos parta un rayo del cielo, y a mí me ha dicho que no volveré – exclamó Paquillo, muerto de risa. — Maldición de loca vieja, por do sale, por allí entra – dijo Montes filosóficamente –. Hay que dejarla, que otros la emplumarán. — Pues andando – agregó Rodrigo –. Pero, a decir ver- dad – continuó éste mientras se acercaban a los demás –, diera un ochavo por saber a quién o a quiénes señalaba la maldecida bruja… Esas tales suelen acertar en las cosas ma- las, por arte del diablo, si nunca aciertan en lo bueno, porque Dios no les da licencia. — ¡Bah! – exclamó Paquillo con toda la alegre confianza que dan los pocos años –. No volver no quiere decir morir- se… — Hablas de perlas – dijo Montes –. Y más si se piensa que do vamos puede uno encontrarse tan ricamente. — Muchos hay que no han vuelto ni volverán de la Es- pañola, de Cuba y de otras ínsulas donde son grandes seño- res o poco menos… Si así fuere no habría mal, antes muchí- simo bien en ello – asintió Rodrigo Rodríguez.

– 209 – El cortejo había llegado a la marina y la animación cre- ció, pero ya no tan regocijada como antes; era la despedida, y hubo abrazos, exclamaciones, lágrimas, bendiciones, ter- nos, con toda la calurosa y desbordante expansión andaluza. — Nada tengo que decirte, hija – exclamó Solís – Que Dios te guarde y guarde a los niños… Ya me verás volver y te parecerá que el viaje ha durado lo que un relámpago… ¡Ea! Nada de lágrimas y venga un abrazo… Doña Ana lo estrechó frenética contra su pecho y los so- llozos le cortaron la palabra. Sólo acertó a empujar a los ni- ños contra Solís, y todos cuatro formaron por un instante apretadísimo grupo. La brisa era fresca y arrojó un poco de arenilla a los ojos del marino, que restregándose para quitarla entró de un salto en el batel.

– 210 – Cobráronse las anclas en un momento y las naos co- menzaron a apartarse del fondeadero deslizándose apenas… Un soplo más fuerte aceleró su marcha, viraron una tras otra, y antes de que nadie se hubiera alejado de la marina ya iban mar afuera, rumbo sudoeste, seguidas por los ojos y el pensamiento de cuantos quedaban en la costa.

– 211 – XII

ENTRE MAR Y CIELO

El día era hermosísimo, el viento favorable, el mar in- menso manto verde obscuro ondulado por leves y largas arrugas. Proa a las Canarias, al Sudoeste, navegando a un largo, casi viento en popa, poca maniobra había que hacer en las carabelas y la tripulación holgaba gozando de la vida. So- lís había bajado a su cámara, dejando en el puente a su se- gundo, el piloto Juan de Lisboa103; de allí en adelante poco iba a vérsele, si no es a la entrada y salida de puerto, cuando deseaba tomar personalmente la altura y en algún caso difí- cil. Pero por las mañanas y las tardes se le oiría diariamente ponerse al habla con los capitanes de las otras carabelas, mandada la una por Francisco de Torres, secundado por el maestre Diego García de Moguer, y la otra por el piloto Ro- drigo Álvarez. Bocina en mano y después de escuchar el par- te de los capitanes, Juan Díaz de Solís daba sus órdenes para la siguiente singladura, órdenes que, por lo general, consis- tían sencillamente en continuar navegando de conserva du-

103 Álvarez de Cartaya; ver capítulo 10. (N.d.T.a.F.)

– 212 – rante el día y por la noche seguir el farol de la Portuguesa, que dirigía la marcha. Dios – como decían los muslimes – habíales escrito la seguridad, y semejantes a aquel primer día de viaje en alta mar – 13 de octubre de 1515 – fueron los siguientes, con viento fresco, claros, apacibles y tales que nada turbó nunca la tranquilidad de la navegación. Si por sus venas no corriera azogue, Paquillo hubiera podido estarse mano sobre mano, y no porque la vida de los grumetes a bordo fuera entonces muy regalada – pues se les consideraba criados de todo el mundo –, sino porque tenía como protector principal a Rodrigo Rodríguez, el hombre del capitán general, y como segundo al gaviero Enrique Montes, que desde un principio conquistó mucho ascendiente entre los marineros. Decíase también que los dos García, el maes- tre, que había embarcado en una de las latinas, y el despen- sero que iba en la Portuguesa, se interesaban por el mance- bo. Pero a todo esto venía a agregarse la voluntad activa de Paquillo, que en el cuarto de baldeo empuñaba gallardamen- te el lampazo, fregaba después las bronces hasta hacerlos parecerse al oro con que soñaba, trepábase a las vergas co- mo un mono, cabalgaba en el bauprés, hacía escalera de las jarcias, deslizadero de los obenques, balcón de las cofas, es- taba dispuesto a desempeñar cualquier menester que ocu- rriese, y ayudaba cada dos días en el reparto de las raciones, que se hacía por rancho de a cuatro hombres cada uno. Con esta aún le quedaba tiempo para agregarse a los corros de los marineros desocupados que contaban historias, contaban coplas populares o subrepticiamente sobaban el naipe, ju- gando sus escasos maravedís y, a falta de estos, sus mismas prendas, y durante tan graves ejercicios Paquillo solía servir- les de atalaya para que no les sorprendiera algún superior y

– 213 – particularmente fray Buenaventura, que consideraba el juego como cosa diabólica, o, lo que era peor, el piloto Juan de Lisboa, que secuestraba las barajas e imponía castigos a los jugadores. Apasionaban al chiquillo, sobre todo, los relatos de los viejos marineros y los escuchaba con tamaña boca abierta. Cuanto decían era para él la pura esencia de la verdad; pero, por tácito convenio y apoyados por los otros, los que se creían más chuscos encargábanse de contar en presencia del grumetillo las cosas más inverosímiles y descabelladas o de abultar y desfigurar desmesuradamente lo verdadero, co- brándole en la moneda de su credulidad el barato del apren- dizaje. ¡Oh! A poco andar ya vería el muchacho las maravi- llas más estupendas que puedan imaginarse: peces que eran aves y que volaban como las golondrinas, aves que eran pe- ces y que en mitad de su vuelo, ¡pruff!, se zambullían en el mar y ya no volvían a verse; caballos marinos que competían entre sí en desenfrenadas carreras de saltos alrededor de los navíos y después de rodearlos muchas veces acababan por dejarlos atrás, aunque navegasen viento en popa; mares que eran verdaderos prados verdes, cubiertos de ramos y de ra- cimos y poblados de insectos y pájaros, y, cosa más prodi- giosa aún, el mar, el mismo mar, incendiado desde el uno al otro horizonte y ardiendo hasta junto a las naos, sin quemar- las, pero también sin apagarse; hombres y mujeres que ha- blaban y reían, siempre sumergidos en el mar, y que no eran sirenas, porque éstas puedan tocarse con la mano y de las si- renas se habla sin que nadie las haya visto en realidad; cen- tellas que se detienen en la perilla de los mástiles y allí se quedan fijas, sin caer ni hacer daño a nadie; ciudades o rui- nas de ciudades que, cuando las aguas están muy apacibles, se ven en el fondo del mar; ballenas como montes, cuyos chorros de agua se pierden en las nubes; tiburones tan des- – 214 – comunales que de un bocado pueden tragarse una nao me- diana…

— A tí todavía poco te interesa, a la verdad – decía San- tiago Corzuelo a Paquillo, cosa que nadie hacía, por regular, para que el muchacho no entrase en desconfianza –. A tí no te interesa mucho todavía, pero Balboa104, que es uno de nuestros mejores capitanes, ha descubierto105 hace poco una fuente que tiene la virtud de remozar a cuantos se bañan en día o beben de sus aguas y es la mayor de las maravillas que se hayan encontrado en estas tierras. Diz que el rey Fernan- do, por de la Reina que no se consuela de no tener hijos, va a venir a remojarse y remozarse cualquier día de estos, y en- tonces tendremos Rey mozo y para muchos años…

104 Ver Notas del traductor al Francés.

105 sería Juan Ponce de León. (N.d.T.a.F.)

– 215 – Estos eran los relatos menos fantásticos, basados mu- chos de ellos en la realidad, corrientes los otros, aunque del todo falsos, y Paquillo no los ponía un momento en duda ni se hartaba de oírlos. Pero también se le estiraban las orejas para escuchar las noticias que Rodrigo, como criado del ca- pitán general, descubría antes que nadie y daba a sus com- pañeros con autoridad por todos reconocida. — Si seguimos navegando como hasta aquí – decía, por ejemplo – nos vamos a encontrar de repente de manos a bo- ca con las Canarias, tanto llevamos andado… No quedare- mos mucho en las islas: lo necesario para hacer aguada y embarcar víveres frescos, porque más allá nos esperan largas cuaresmas de mojama y garbanzo seco… Como que no he- mos de parar hasta tierras desconocidas, a espaldas de Casti- lla del Oro o, como otros le dicen, Costa de Oro de Colón…

— Sé de esas tierras – dijo el portugués –. No hay sino bajarse para recoger a espuertas los metales.

– 216 – — Si el milagro es cierto – exclamó Pedro Núñez con grandes ojos de codicia –, mejor vivir allí que en cualquier otra parte del mundo. — ¡Que si el milagro es cierto! – replicaba Rodrigo. — ¡Pues vaya si es cierto! Como que de los que pocos años ha llevó consigo Don Diego de Nicuesa106 muchos vol- vieron a España cargados de oro, sin más trabajo que el de haber dicho a los indios de las minas:” ¡Daca eso!” o el gasto de unas pocas perlas de vidrio para tener todo un saco de las verdaderas. A Paquillo se le erizaba el pelo de la nuca y un escalofrío le corría de los pies a la cabeza al oír tales prodigios. — Allí gobierna hoy Pedrarias Dávila107 – seguía reposa- damente Rodrigo. — Pero ¿y los que no han vuelto? – saltó Alejo García, que no era de los magnánimos. — ¡Camará! Los que no han vuelto no han vuelto porque se murieron, y aquí paz y después gloria, o los que no se sa- cian, como los hidrópicos, y seguirán acumulando riquezas hasta que revienten sin haberlas gozado, y los que se en- cuentran bien entre indios e indias, como el gran turco en su serrallo… ¡Buena pro les haga! De los unos sólo hemos de ocuparnos en nuestras oraciones, y poco nos importa de que

106 Conquistador español, fundador en 1510 de la ciudad de Nombre de Dios en el istmo de Panamá. (N.d.T.a.F.)

107 Pedro Arias Dávila. (N.d.T.a.F.)

– 217 – los otros gocen a su manera, que ¡voto al chápiro! no es la mía… Pues, como os iba diciendo, Pedrarias Dávila ha lleva- do allí gran golpe de gente y es hombre de malísimas pulgas; si nos apareciésemos por sus tierras sin decir agua va y sin pedirle permiso, como pordioseros a la hora de yantar, capaz sería de soltarnos el perro y de acudir con el garrote, si no con el arcabuz… Pero ¡qué más nos da! Tierras hay de sobra ricas como aquélla, o más que aquélla, que están diciendo comedme, y en las que no hay espantajo… — Di en seguida cuáles, que bueno es saberlo – exclamó Pedro Núñez. — Las tierras do vamos, verbigracia – replicó Rodrigo. — Y otras muchas – agregó Montes, que, por chuscada, preguntó al curioso –: ¿No es deudo tuyo Vasco Núñez? — No, que yo sepa. — Averígualo bien, por lo mucho que podría irte en ello – dijo Rodrigo, siguiendo la broma –. Deudos así son buen arrimo y no te habría de pesar… Como que, va para dos años, Vasco Núñez de Balboa, caballero jerezano, el mismo de la fuente que remoza, atravesó el istmo en que se asienta Castilla del Oro, pues no es península, ni ínsula, ni continen- te, sino istmo y bastante estrecho… Así lo vió tu deudo cuando, después de mil trabajos, topó de pronto con un gran mar que le baña por el poniente y que se tiende hacia el Nor- te y hacia el mediodía, hasta más allá de donde pueden al- canzar los ojos desde una gran altura. — Pero aunque fuese mi deudo, ¿qué sacaríamos con eso? – preguntó Núñez, amoscado con la socarronería.

– 218 – — Ya verás. Vasco Núñez no volvió únicamente con la noticia de ese mar, donde diz que se metió hasta el cuello, con sus ropas y sus armas, sin quitarse siquiera las botas, pa- ra declararlo por el Rey nuestro señor. Volvió con más oro, más perlas y más aljófar, amén de otras menudencias por el estilo, que cuando, con ser mucho, hubiera podido coger en años enteros por la parte de acá, pues de la otra banda se va pisando pedrería, y pepitas como calabacines, y arenas de oro como en los médanos, tanto que se acaba por decir:” ¡Basta!” y se suplica de rodillas a Dios y a los santos por un terrón de tierra donde plantar una col…

El pasmo de los oyentes y sobre todo de Paquillo era in- decible, pues aunque los viejos supieran lo mucho que debe rebajarse en este orden de narraciones, ya otras análogas les habían taladrado los oídos y aguzado la codicia. Núñez, sin embargo, insistió:

– 219 – — Pero, señor, y le repito: a nosotros ¿qué? Rodrigo bajó la voz, replicando: — ¿Que a nosotros qué? Pues a nosotros mucho, porque con nuestras manos lavadas, es un decir, vamos muy embar- cados y tan ricamente a do Vasco Núñez sólo pudo llegar por tierra a costa de mil peligros y trasudores. Un ¡ah! sofocado partió de varios pechos y Rodrigo lo atribuyó a la admiración que despertaba su elocuencia. — Paso hay, no cabe duda, ¡vive Dios! Con estos oídos pecadores yo lo escuché de labios de nuestro amo, que sabe más que Merlín. Y hacia ese paso enderezaremos por un ca- mino, en dejando atrás las Canarias. La fiebre de ambición de los marinos pareció subir de punto aunque ya fuese bien alta. Brilláronles los ojos, pero callaron un instante. Paquillo, alelado, no atinaba a moverse y sentía un nudo en la garganta. Las manos de Pedro Núñez temblaban como las de un azogado. Y Rodrigo Rodríguez, gozándose en ver al auditorio pendiente de sus labios, rema- tó la suerte: — Ya me parece estar viendo – dijo – a la Portuguesa y a las otras dos naves cargadas de la quilla a la perilla, con to- dos esos tesoros que oculta el mar o guarda la tierra y que allí se ofrecen al alcance de la mano. Y no he de engañarme, porque si Balboa, andando a pie, pues ya ni caballos le que- daban, y con unos pocos indios de carga llevó a España lo que llevó, ¿qué no haremos nosotros que somos muchos y que contamos con tres naos tales que cada una de ellas car- ga más que sobre sus negros lomos mil indios, aunque sean gigantones?…

– 220 – — Pero, ¿con qué volvió Balboa? – preguntó Núñez. — ¿Que con qué volvió? Básteme decirte que el quinto del Rey, sólo el quinto del Rey, era un verdadero caudal, y el resto… cuatro veces tanto. — Pero ¿como cuánto sería? — Muchos cuentos de maravedises o de doblones de a ocho, y conténtate con esto, que no me sé de coro los gua- rismos… Conque, ya ves nuestra suerte… — Porque de lo que alcancemos en este viaje, el tercio será para nosotros – hizo observar Fuentes. — El tercio, sí, después de quitado el quinto del Rey, que tomarán en su nombre los oficiales reales, esos desventura- dos de Alarcón y Marquina, si es que no se mueren antes, pues para llevárselo han venido, por su desgracia, con noso- tros… Ese tercio será repartido por el capitán general en persona y como él quisiere; vale decir, tratándose de tal amo, en razón y justicia, a rata por cantidad de los mereci- mientos de cada uno. Y eso sin hacernos pagar nuestra parte en los gastos… — ¡Los montes de oro que se habrán gastado! – exclamó Paquillo. — Montes de oro, como dices, Chaval – afirmó Rodrigo –. Piensa que sólo en bizcocho – y allí está, Martín García, el despensero, que no me dejará mentir – llevamos a bordo no menos de diez mil reales, o sea trescientos cuarenta mil ma- ravedises, si no cuento mal. — ¡Atiza! – murmuró el chiquillo, azorado.

– 221 – — En vino tres mil arrobas, que como este año iba bara- to se tuvieron por sólo cinco mil trescientos reales, vale de- cir, más de ciento ochenta mil maravedises… Aunque se se- caran las vasijas, que acabaremos de henchir en las Cana- rias, y a dos cuartillos diarios por cabeza entre los sesenta hombres que vamos en las tres naos, tendríamos para remo- jar más de tres años. — ¿Crees tú – preguntó Montes – que durará tanto el viaje? — De ninguna manera. Pero el capitán es hombre pre- venido a quien no se coge sin perros, y no ha pensado sola- mente en la sed, aunque la sed le importe tanto – agregó Ro- drigo sonriendo con su enorme boca –. Para la manducatoria llevamos a bordo veinte vacas en sal, cerca de mil reales de cecina, otro tanto de habas y garbanzos, ocho mil maravedís de pescado seco, diez mil de queso, amén de unas barricas de miel, tres mil quintales de aceite y otras cosas necesarias para guisar. A Paquillo se le iba la cabeza tratando de imaginar lo que serían aquellas sumas fabulosas y preguntándose dónde diablos se había podido arrimar tan colosal cargamento de vituallas. Tal era su pasmo que ya ni una exclamación le pa- saba de la garganta afuera; en cambio, los ojos sí que se le salían de las órbitas. Y su admiración no decreció, por cierto, al oír que los pilotos de respeto iban ganando lo menos dos mil maravedís mensuales, poco más que el alférez Melchor Ramírez; los maestres mil, los marineros novecientos, los ca- lafates y lombarderos setecientos cincuenta, los grumetes – menos él – seiscientos, y los pajes o criados de Alarcón y Marquina cuatrocientos, esto sin contar la parte de lo que se alcanzara y que debía corresponder a cada uno.

– 222 – — ¿Y de armas108 cómo vamos? – inquirió Alejo Garcia, imaginando y quizá, temiendo posibles combates. — Tal cual – contestó Rodrigo Rodríguez, orgulloso de sus informaciones –. Cada una de las naos trae dos de los seis pasavolantes que se compraron al guipuzcoano Juan García de Uribarri109, y la Portuguesa, ya lo estáis viendo, tiene además las dos lombardas vendidas por el mismo a ra- zón de veinticinco ducados cada una. Para que esas bocas puedan escupir fuego hasta que los indios digan basta, a bordo vienen ocho barriles de pólvora de un quintal cada uno, comprados al polvorista Antón Cermeño110 por veinte mil maravedís redondos, porque el muy logrero se hizo pagar los cascos a razón de dos reales. Por añadidura, y como ar- mas personales, fuera de los arcabuces, ballestas, hachas, espadas y demás, traemos sesenta coseletes y sus corres- pondientes armaduras de cabeza, con los que, en los desem- barcos, pareceremos unos reyes. — Yo había oído decir – objetó Montes – que las lom- bardas eran cuatro, y no compradas, sino prestadas por la Casa de Contratación111.

108 Ver Notas del traductor al Francés.

109 8 de setiembre de 1515; Toribio Medina, p. 167. (N.d.T.a.F.)

110 30 de agosto de 1515; Toribio Medina, p. 165. (N.d.T.a.F.)

111 27 de marzo de 1512 + 24 de noviembre de 1514 + 27 de ju- lio de 1515; Toribio Medina, pp. CCXXXVIII + 116 + 136 + 139 + 151-152. (N.d.T.a.F.)

– 223 – — ¡Ahí verás! – replicó Rodrigo –. A última hora resultó que no quedaban tales lombardas en la Casa112 – o esos se- ñores de Sevilla, que detestan al capitán, no quisieron pres- társelas – y hubo que comprarlas al guipuzcoano Uribarri. — ¡Pero quién va a alcanzar nunca tanto dinero! – ex- clamó Paquillo, desatado ya el nudo de asombro que estran- gulaba. — ¡Psh! – dijo desdeñoso el asistente del capitán –. Aun- que no encontráramos minas bastarían los rescates para re- sarcirnos con las setenas. No; y sino piensa que por un sim- ple anzuelo o un cuchillejo de mala muerte los indios dan muy gustosos seis gallinas, por un mal espejillo o un par de tijeras un pescado lo bastante grande para que se ahíten diez personas, por un cascabel lo que se les pida… Pero Antúnez, en uno de sus viajes, logró seis gallinas por el rey de oros de unos naipes desparejados que llevaba… Nosotros, para los rescates, traemos hachuelas, cuchillos, machetes, por los que darán su peso en guanín, que es oro bajo, o en oro purísimo, pues para ellos es igual; y luego agujas, anzuelos, peines, es- pejos, baratijas que no valen un ochavo, pero que son verda- deras alhajas para aquellos inocentes. Se enloquecen por los cascabeles ordinarios y los de pie de gavilán, y por las sona- jas de latón; las contezuelas de vidrio son para ellos mejor que diamantes, los espejillos cosa de magia; por las trompas turquí o los simples cuernos son capaces de dar la mujer, los hijos y cuanto tienen por añadidura… Y no hablemos de los bonetes rojos, ni de las gorras emplumadas, pues solamente

112 8 de setiembre de 1515; Toribio Medina, pp. CCXLII + CCXLIV. (N.d.T.a.F.)

– 224 – los reyes muy poderosos pueden pensar en poseerlos… Pero esto para nosotros nada vale sino como consuelo, en caso de no dar con los montes de oro que hay por todos lados y que sólo una suerte muy negra puede hacer que no encontremos. Los marinos soñaban, y embelesados por la visión de la fortuna no habían advertido al capellán que rato hacía los escuchaba, casi incorporado al corro. Por otra parte, su pre- sencia no les hubiera hecho callar, porque fray Buenaventura había sabido granjearse su voluntad y su confianza. Su rostro enjuto, su tez amarillenta a causa de las fiebres contraídas en la Española, dábanle, es cierto, una expresión ascética, sombría casi; pero esta severa austeridad desapare- cía en cuanto al brillo de sus ojos apasionados se agregaban su palabra cálida, su sonrisa, su afable familiaridad. La vida a bordo debía serle más grata que molesta, pues estaba en la nao como en su casa y la compañía de los humildes era muy de su gusto, tanto que, teniendo plato en la mesa del capitán general, más de una vez bajaba al sollado a compartir la pi- tanza de los marineros; digamos de paso que no perdía mu- cho, porque el ordinario de Solís estaba lejos de ser lucu- liano. Aquellos mozos temían en un principio sus “sermones”, pero fray Buenaventura era viejo veterano de Indias, había acompañado largo tiempo a su maestro y amigo, el gran fray Bartolomé de las Casas, y sabía hablarles de cosas que les in- teresaban, matizadas con anécdotas pintorescas que eran re- cibidas con verdadero placer en la monotonía de la navega- ción, donde tan a menudo una sola hora pesa tanto como cuatro y más… Pero aquel día quiso predicarles un poco: — ¡Niños grandes, hombres cándidos pero codiciosos! – dijo –. No sabéis ver sino el oro y las riquezas. Os devora y trastorna la terrible sed de las cosas materiales… No quiero

– 225 – reñiros, porque lo hacéis sin pensar en el pecado… Pero re- cordad que no sólo de pan vive el hombre, y que no corréis únicamente en busca de pan… La mano de Dios, hijos míos, sabedlo de una vez, os conduce a realizar hechos aún más grandes de lo que soñáis en vuestra fiebre, es decir, a ganar nuevas almas para el cielo… — Sermoncillo tenemos – musitó Rodrigo. — ¡Sermoncillo, sí, tunante! – dijo sonriendo fray Bue- naventura que lo había oído, y prosiguió –: Como vosotros, vuestros hijos, vuestros nietos, muchas generaciones quizá, seguirán vuestro rumbo tras de tesoros engañosos, correrán esta misma aventura sin advertir que, si el demonio de la co- dicia los arrastra es con permiso de Dios, como instrumento de sus altos designios, para realizar cosas arcanas que el humano magín no alcanza todavía, pero que servirán a la gloria del Señor… El espíritu materialote de los marineros no comprendía bien las palabras de fray Buenaventura; pero por fortuna en ese mismo instante la campana de popa picó las siete. — ¡A rezar, hijos, que es hora! – exclamó el capellán, in- terrumpido en mitad de su discurso. Encaminóse a la escala para subir a cubierta siguiéndole los marineros del entrepuente, agregáronse los demás, ocu- paron sus puestos los oficiales, de Solís abajo, arrodillándose todos, fray Buenaventura entonó con voz cálida la salve ves- pertina, y la oración, en ondas sonoras, se difundió por los aires en el mar tranquilo.

– 226 – XIII

EL GOLFO DE LAS YEGUAS

Todos los días, al amanecer y al caer la tarde, las cara- belas de Torres y Álvarez113 maniobraban aproximándose a la Portuguesa, cuando el viento y el mar le permitían, para ponerse al habla con el capitán general. Gracias al tiempo bonancible las naos podían acercarse tanto como si fueran a tomarse al abordaje, y Paquillo, que observaba embobado la maniobra, esforzábase por comprender y aprender el juego combinado del aparejo y el gobernalle. Y cuando los tres na-

113 Juan de Lisboa; ver capítulo 10. (N.d.T.a.F.)

– 227 – víos navegaban ya borda a borda, imitando a los delfines an- tes de emprender sus vertiginosas carreras de saltos, los pi- lotos en el puente empuñaban las bocinas, daban su parte a Solís y luego departían brevemente sobre las menudencias de a bordo. Todos estaban muy satisfechos por la maravillo- sa tranquilidad de un viaje sin incidentes, tan plácido y pro- metedor como jamás se había visto; ya no era confianza sino seguridad lo que sentían y les alentaba. La única nube – la dolencia del contador y el factor – era más bien cómica que amenazante, y con sus dejos de sorna los pilotos pregunta- ban mañana y noche a Solís: — ¿Cómo van vuestros enfermos? — Tan malejos como ayer. Pero es mal que no mata. — ¿Qué se les da? – solía preguntar Torres. — Fray Buenaventura les aconseja que duerman a la sombra de un árbol. — ¡Como no sea el de mesana! – y Torres rompía a reír. Cuantos escuchaban reían también a costa de los infeli- ces mareados, que eran por el momento la comedia de a bordo, y Paquillo sentíase presa de verdaderas convulsiones que sólo tenían fin cuando la Portuguesa comenzaba gallar- damente a adelantarse y las otras dos naos a disminuir su andadura, hasta tomar el orden de fila tras de la farola que a popa acababa de encender la capitana, para navegar así, se- guras de no separarse, en medio de las sombras de la noche. Nada de esto era advertido por los señores oficiales de S.A., ni les interesaba. Hombres de bufete y de tierra firme, el primer imperceptible cabeceo de la Portuguesa en el Gua- dalquivir había, dada al traste con todas sus energías. Decir

– 228 – que, una vez en alta mar, estaban mareados no es bastante: parecían a punto de dar las últimas boqueadas, saltábanseles los ojos, partíaseles la cabeza, los huesos tenían quebranta- dos, los músculos doloridos, el estómago en violenta rebe- lión, el vientre sin freno, la boca amarga sólo capaz de bas- cas y de ayes… A obscuras, tendidos en sus camastros, viendo la muerte próxima y cierta, incapaces de mover un miembro, su temblor y trasudores crecían en cuanto alguien se les acercaba, pues todo ser viviente les era sayón que iba a torturarlos. Marquina gordo, Alarcón flaco, Marquina rego- cijado, Alarcón taciturno, estaban a la sazón de la misma guisa, porque – como la muerte que todo lo iguala – el marco les había emparejado, no en el peso – aunque Marquina per- dió en pocos días muchas libras que Alarcón no ganó – sino en el carácter y en el pensamiento, hosco el uno y desconso- lado el otro. Y es lo peor del caso que, cuando fray Buena- ventura – que hacía de físico utilizando algunos conocimien- tos prácticos adquiridos en sus viajes –, iba a visitarles en ejercicio de ésa y sus funciones de capellán, al ver los hábi- tos los enfermos creían sonada su última hora y le conside- raban resuelto no sólo a confesarlos sino a darles la extre- maunción y a bendecir sus cuerpos miserables, mientras se les arrojaba al mar por encima de la borda… — ¡Padre que me muero! ¡Que me muero, padre! – mur- muraba Alarcón desfallecido – ¡Pero no os acerquéis, por la Santa Virgen!… ¡No me toquéis, por los clavos de Cristo!… ¡Mi pobre cuerpo es todo una llaga! No había tal llaga sino en la imaginación del escribano; el dominico reía para darle aliento, y al ver que eran comple- tamente inútiles todos sus esfuerzos por sacarle al aire libre, trataba de hacerle tragar alguna pócima de su composición, remedio – según él – maravilloso e infalible contra el mareo.

– 229 – Pero con esto agravábanse los trances, porque si el fraile lo- graba que el enfermo sorbiera algo de su brebaje, la revolu- ción inmediatamente provocada ponía en peligro la santidad de sus hábitos, pues, como de la de un borracho, de la boca de aquel varón grave y adusto, amén de algo más líquido, brotaban juramentos y reniegos, a los que sucedían, como acto de contrición, súplicas, rezos, estertores y sollozos, has- ta el desfallecimiento y la modorra finales. A Alarcón, hom- bre sobrio, espantábalo ver lo mucho que había guardado dentro de la caja del cuerpo, y Marquina, que siempre fué glotón, veíase irremediablemente en las últimas, ante el inaudito fenómeno de que le repugnara todo lo comestible y de que le devorara una sed insaciable, pero la sed peor, la sed vergonzosa, la sed de agua pura… — Soy hombre al agua – había acertado a murmurar en un chusco paréntesis de su atontamiento. Y, por todo potaje, de vez en cuando mordía limones que fray Buenaventura le llevó, como último recurso, al verle hacer asco a sus prodigiosas medicinas.

– 230 – Afortunadamente para los dos averiados, como les lla- maba con desdén Rodrigo Rodríguez – los oficiales reales no fueron nunca de la devoción de las tripulaciones, pues les consideraban peores que el perro del hortelano, sin duda porque, al revés de éste, solían “comer” – su mal no tardaría en verse remediado, como que las carabelas se acercaban a todo trapo a las Canarias, donde podrían procurarse la posi- tivamente bienhechora “sombra del árbol” aconsejada por el dominico. — No son hombres, sino leños – contaba el mismo Ro- drigo, que iba a verles e informarse de su estado por orden del capitán general. — Buena sería ensayar en ellos lo que suele hacerse con los galeotes y con ciertos grumetes que no tienen estómago – decía el bruto de Corzuelo –. Pasarles un cabo por los so- bacos, darles media docena de chapuzones en la mar… y santo remedio. Es probado… — ¡Ya veréis – agregaba Núñez – ya veréis que en cuan- to se trate de coger el quinto del Rey y de poner el ojo en truecos y rescates, para quitarnos el bocado de la boca esta- rán más frescos que una lechuga y más campantes que el Cid! ¡Mala landre les coma! Crujían blandamente los mástiles, zumbaba el viento al escapar de las henchidas velas, susurraba el agua deslizán- dose con ligeros espumarajos a lo largo de las bordas, y las naos cabeceaban gallardas hendiendo el mar como potros al galope. Casi no era preciso atender a la maniobra, y algunos marineros mataban el tiempo jugando disimuladamente al parar, al triunfo envidado o a las trucos, aunque el piloto Ro- drigo Álvarez, encargado de la policía de a bordo, les hubiese jurado guerra abierta y confiscado ya más de un juego de ba-

– 231 – raja. Siempre, en el fondo de la caja de alguno, escapaban a sus pesquisas los astrosos “naipes de figura ovada, porque de ejercitarlos se les habían gastado las puntas y porque durasen más se las cercenaron y los dejaron de aquel talle”, ascendien- tes de aquellos otros con que, cerca de un siglo después, Rinconete y Cortadillo114 desplumaron al arriero. Rodrigo Rodríguez, aprovechando un momento favorable, habló compungidamente de tales despojos a Solís, y éste, como buen amo, compasivo para con la humana flaqueza, entibió sesudamente el celo de su segundo.

— Bien está cumplir las ordenanzas e impedir el juego – le dijo – pero todo extremo es vicioso. Hay que saber tolerar las inclinaciones que no causan gran daño. El hombre es un niño grande y debe permitírsele algún esparcimiento. ¿Qué soldado, en tierra, no trae los naipes en la capilla? ¿Cuántas veces no ha jugado hasta la espada y los vestidos? No empe- cé que cumpla como bueno, llegado el caso. Lo mismo digo para la gente de mar. ¡Ea!, no os ordeno, pero sí os aconsejo que hagáis un tanto la vista gorda mientras nuestros hom- bres no falten ni lleguen al escándalo.

Fray Buenaventura asistía a la conversación y observó que el juego era pecado, aunque no mortal, y convenía evi- tarlo.

— ¿Evitarlo? – exclamó Solís – Si no juegan con los nai- pes jugarán con los piojos de la camisa. La experiencia lo enseña, padrecito.

114 Cervantes, en Novelas ejemplares. (N.d.T.a.F.)

– 232 – Álvarez se dió por avisado, cerró los ojos y hasta se hizo olvidadizo de los naipes ya secuestrados, dejándolos al al- cance de sus antiguos dueños; pero sí advirtió que castigaría con rigor cualquier negligencia en el servicio. Y todo anduvo bien, con la tripulación alegre, despreocupada y sana – salvo los infelices mareados – sin más episodios que las continuas disputas de Pedro Núñez con su inseparable Santiago Cor- zuelo, dispuestas que eran los divertidos y festejadísimos au- tos sacramentales de a bordo. Y una mañana, que Paquillo pasaba como de costumbre el lampazo sobre la recién baldeada cubierta, sorprendióse de ver, allá en lo alto y a lo lejos, hacia proa, una nube trian- gular, muy blanca, que se mantenía inmóvil en mitad del cie- lo. Desde la cofa, el vigía había anunciado ya, al amanecer, aquella visión y lo que significaba, pero el grumete no lo oyó porque aún no estaba de cuarto. Siguió, pues, enjugando la cubierta, pero cada instante dirigía los ojos a la extraña nu- be, tan regular y tan fija como nunca había visto otra. Y daba vueltas al magín tratando de explicarse aquel fenómeno. — Será una de tantas cosas de espanto como abundan por estos mares – díjose al fin. Rodrigo Rodríguez se hallaba cerca, holgazaneando, y el grumete le interpeló: — ¿Has visto ese nubajo? ¿Qué nos anuncia? ¿Nada bueno, verdad? — Sí que lo he visto, y ha rato que lo estoy mirando – contestó Rodríguez –. Pues… nos anuncia que dentro de po- co ya no cabecearemos así, como haciéndole reverencias… — ¿Quieres decir que tendremos mal tiempo, que habrá que cambiar de rumbo corriendo algún temporal? – preguntó

– 233 – Paquillo muy interesado, pues desde la salida de Lepe deseaba y temía ver el mar alborotado, y salir de la monóto- na bonanza que acompañaba a las carabelas como una ben- dición de Dios. Rodrigo disimuló una sonrisa y contestó: — Como agüero, no hay que decir; el tal nubarrón es un agüero, y de los que nunca fallan. Acercáronse en esta Santiago Corzuelo y Pedro Núñez, que acababan de subir del sollado y navegaban por primera vez en aquellas alturas. Mirando hacia donde tenía clavados los ojos, pasmáronse también de ver aquel denso celaje de forma tan extraordinaria. Como habían oído lo del agüero alarmáronse, naturalmente, y su imaginación supersticiosa les hizo pensar en peligros próximos, y antes que nada en al- guna terrible tempestad que se les venía encima. El piloto que pasaba junto al grupo los llamó al orden: — ¿Qué hacéis ahí, papando moscas? ¿Tenéis criados que os sirven y os lo den todo salgado y cocho?! Ea!, cada cual a su faena, que la nao está hecha un muladar! Así era la verdad. Salvo las partes muy visibles, el des- cuido y el desaseo reinaban a bordo, como una amenaza pa- ra cuando viniesen los grandes calores, a cuyo encuentro iban; el entrepuente olía mal, en el sollado la atmósfera era espesa y nauseabunda, el agua rezumada en la sentina co- menzaba a lanzar a bocanadas su mal aliento cuando se abrían las escotillas, y en los recovecos amontonábase la ba- sura, pese a las órdenes de Álvarez, obedecidas en aparien- cia y con una rápida y superficial barrida. Pero antes de co- menzar un nuevo simulacro de limpieza, los marinos querían salir de dudas en cuanto al agüero.

– 234 – — Es que… mirábamos esa nube… y nada bueno ha de anunciarnos, capitán – dijo Núñez. — ¡Quita allá con tu nube, cernícalo! ¿Dónde tienes los ojos, tiburón de albañal? ¿No estás viendo que es una mon- taña? ¿No estás viendo que es el pico del Teide? – Y se mar- chó gritando: – ¡Ea! ¡A poner el sollado como Dios manda, y que no lo vuelva yo a ver hecho una pocilga! — ¡A lavar, fregones! – exclamó riendo Rodrigo Rodrí- guez, que estaba exento de estos servicios. — ¡Antes quisiera saber yo qué pico es ése del Teide! – dijo Núñez, mal engestado. — El pico del Teide… ¿No sabes, alcornoque, lo que es el pico del Teide? – preguntó Corzuelo con aire de superiori- dad. — ¡Ni tú! — ¿Que yo no lo sé? Olvidado le tengo de sabido. — ¡Dilo, pues, recorcho! — No se me da la gana. — ¡Pues eres un chisgarabís y un botarate, eso es lo que eres!… — ¡Botarate a mí, cuerpo de Dios! Repítelo, si quieres que te haga tragar la lengua. — Dí tú primero que no sabes qué es ese pico, pues si no lo dices es que hablas a tontas y a locas. — ¡Haya paz! – dijo Rodrigo – El Teide es el pico de Te- nerife.

– 235 – — ¡Me o has quitado de la punta de la lengua! – exclamó Corzuelo.

— ¡Mientes, que no lo sabías! – vociferó Núñez.

— ¡Que miento, rayos, que miento! Ahora verás cómo… Pero se interpusieron los demás, y no hubo batalla esta vez tampoco. — Si es el pico de Tenerife – dijo Paquillo –, ya com- prendo por qué me decías que pronto dejaremos de cabe- cear… En un periquete echaremos anclas y saltaremos a tie- rra… — ¿En un periquete?… Si llegáramos antes de tres días me daría yo por bien servido.

– 236 – — ¡Vaya! ¡Ni que la Portuguesa fuera una tortuga! — ¡Ni aun cuando fuera una galera real con los cien me- jores bogas que hayan remado bajo el corbacho, no llegaría- mos, a todo tirar, hasta dentro de cuarenta y ocho horas…! – insistió Rodrigo. — ¿Tan lejos está? — ¡Psche! Unas doscientas millas, más bien más que menos. ¡Tan chico es el mojoncillo, que se pierde en las nu- bes, y como veis desde aquí por la color blanca y algo ceni- cienta, en todo el año no se quita la montera de nieve! — Entre los montes el tal Teide será, pues, como entre las torres la de la Catedral de Sevilla, desmochada y todo – observó Paquillo. — Es mucha verdad – asintió Rodrigo –. Y Dios nos lleva hacia allá como por la mano, de lo que debemos darle gra- cias… ¡Vaya un tiempo de bendición! — ¿No lo es siempre? — ¡Quita allá! Estas aguas que ahora nos mecen, tan mansas como las del mismo Guadalquivir, llevan por mal nombre el de Golfo de las Yeguas, porque a la mejor corren y brincan como potros que se espantan o retozan, y también porque las naos que a las Canarias llevan caballos o vacas tienen ya hecho osario del fondo da mar con las que se mue- ren aporreadas por el tremendo rolido y hay que arrojar por la borda. — ¿Y los cristianos? — Esos no mueren, aunque sean factores o escribanos, pero como factores y escribanos suelen echar los bofes por

– 237 – esa boca, y quedarse sin entrañas, secos, aplastados y amari- llos a manera de bacalao, por poco que la mar se pique y empiece la zambra… — ¡Válgame Dios! – exclamó Paquillo. – Pero ya haría yo de modo que nada saliera de adentro, aunque sólo fuesen garbanzos de piedra y mojama de estopa. — Quéjese su alteza, el príncipe de la sopa boba y el pan seco… — Una cosa es la hambre y otra el gusto – sentenció el grumete. — Según las aficiones de este chavalillo – observó Mon- tes –, diríase que es hijo de reyes. — Bien pudiera ser – contestó Rodrigo –. Cosas más ra- ras se han visto en este pícaro mundo. Mil historias sé yo de príncipes verdaderos que ellos mismos se tenían por mendi- gos, hasta que se les descubrían los padres… Más fácil es que a Paco se le cambie la condición que a mí la cara. — Pues no es tan difícil que cambie tu cara… — ¿Cómo así? — Con sólo un par de cuchilladas te quedaría aún más fea. — No serás tú quien me las dé, so desaborío – replicó Rodrigo riendo, pues era de muy buen natural –. En cuanto al chico, no teniendo, como no tiene, padres conocidos, tanto pueden ser éstos reyes como pastores… Y si se ha de juzgar por su ingenio y buen talante, más bien será, aquéllo que és- to.

– 238 – Paquillo se encogió de hombros, como no haciendo caso de la ocurrencia, pero aquella idea de que podía ser hijo de reyes, o siquiera de simples hidalgos, no le pareció tan desa- certada… Aquellos dos días fueron a bordo de gran animación. Aunque habían pasado bien pocos desde que zarparon las carabelas y dejaron las costas de España, los hombres veían con júbilo acercarse el momento de desembarcar y solazarse en tierra, sabiendo como sabían que después de las Canarias les aguardaban largas semanas, quizá, largos meses, de no ver otra cosa que la inmensidad del mar, para la mayoría desconocido, entre agua y cielo hasta que Dios quisiese. Y cuando cayó la tarde del segundo día comenzaron las coplas, las conversaciones, los dicharachos, las carcajadas infantiles, como de chiquillo a la hora del recreo. Núñez cantaba:

Ay de mí, más ay de vos que nacimos en un sino, que el agua derrama al vino y el vino derrama a nos. Pero aquí tal no ha de ser, pues en esta mar salada, de vino hay ración menguada y el agua no es de beber.

Y replicaba Corzuelo, entrando en competencia con su irreconciliable camarada, ayudado por las entonces popula- res coplas de Pérez Patiño115.

115 Poemas de Gómez Pérez Patiño en el Cancionero de Baena. (N.d.T.a.F.)

– 239 –

Sobre negro no hay tintura ni mayor daño que muerte; muchos pasan pesar fuerte que después han gran folgura. Pues ningún no desespere que si gran tiempo viviere verá mudarse ventura.

— Eso viene muy a cuento con nosotros – dijo Rodrí- guez – pues si vivimos, aunque no sea tanto, hemos de ver cómo cambia nuestra suerte y volvemos a España cargados de riquezas. Sigue, Corzuelo, sigue, que esas coplas parecen hechas para nosotros. Y Santiago Corzuelo continuó:

Si fortuna faz mudanza el triste se torna ledo, y de pronto o quedo a quedo, tórnalo su bienandanza; tiempo han todas las cosas; las buenas y las dañosas pasarán por su ordenanza. Tiempo viene de reir, tiempo viene de llorar; otro viene para dar, e otro para pedir: tras un tiempo otro viene; mas el que buen seso tiene sabe los tiempos seguir.

— No creo yo, pecador de mí, en tan ajustada ordenanza – objetó Núñez –, porque he solido ver cosas dañosas que se mudaban, es cierto, pero para hacerse más dañosas todavía.

– 240 – — Verdad es – replicó Rodrigo –, pero aunque así sea, no está mal decir lo contrario para consolar a los hombres con la esperanza. Vaya, no interrumpas más. Sigue Corzuelo.

— Poco falta – dijo Corzuelo, y continuó:

Yo ya ví mucho placer, después de mucha tristura e pasada noche obscura yo ví el día esclarecer. E después de gran nublado tornar día serenado, e ví al pobre rico ser. Por ende mal espantado de fortuna nunca sea ningún hombre, antes provea como sepa ser templado cuando viene el mal, y cedo tornará dulce lo acedo e lo fuerte muy domado.

Aplaudieron todos sin más objeciones. Fray Buenaven- tura que se había acercado, aplaudió también, e hizo su co- mentario sobre la bondad nunca desmentida de Dios, que no abandona sus criaturas y las consuela en ésta o la otra vida.

Con esto los que no estaban de cuarto fuéronse a dor- mir, dando por terminada la fiesta, pues amenazaba conver- tirse en sermón…

Amaneció el día siguiente, y apenas hubo un poco de luz las carabelas se hallaron frente a las costas abruptas y des-

– 241 – nudas de la Gran Canaria. Horas más tarde surgían en el fo- deadero de Las Palmas, y recogidas las últimas velas con que habían maniobrado, todos se aprestaron a desembarcar, pues sabían que había de dárseles licencia, y que les aguar- daban la holganza y el holgorio.

– 242 – XIV

HOLGANZA, HOLGORIO Y MARAVILLAS

Solís desembarcó en el batel, acompañado por el cape- llán y por los oficiales reales, mejorados como por ensalmo desde que se echó el ancla. En el desembarcadero aguardá- banlo el gobernador de la isla, don Fernando de Trujillo, lu- garteniente del Adelantado don Alfonso (Fernández) de Lu- go, el alcalde mayor, los seis regidores y los dos jurados del Ayuntamiento, el párroco de la Concepción, las demás auto- ridades y el pueblo entero de la villa, mostrando gran albo- rozo, pues la llegada de barcos era allí una fiesta mayor que en los puertos de España. Rodrigo Rodríguez había seguido, como siempre, a su señor, y Paquillo halló manera de agregarse a la partida. Apenas en tierra despertó el preguntadero del grumete, que solía poner en graves aprietos a su padrino, y su primera pregunta fué: — ¿Por qué llaman Canarias a estas ínsulas? — ¿Cómo es eso? ¿No lo sabes? ¿Pues dónde has estu- diado, almirante? – exclamó Rodrigo, dándose tiempo para buscar la contestación.

– 243 – — Ya te he dicho que en la almadraba de Cádiz, donde se aprenden muchas cosas, pero no ésa que te pregunto… — Has de saber, entonces – dijo el escudero –, que si es- tas islas se llaman Canarias, es porque hubo tiempo en que eran tantos los canes, que estuvieron a pique de hacerse sus únicos señores… De ahí les vino el nombre, como puede verse a primera vista… Y aun fuera reino de los canes, a no ser por los asnos… — Y, ¿qué demonche hicieron los asnos? — Verás. Por aquel entonces empezaron también a mul- tiplicarse los asnos salvajes que andaban por esos cerros, y llegaron a ser tan abundantes que molestaban a los canes. Estos se hicieron, naturalmente, sus enemigos, pagáronles los borricos en la misma moneda, atacaban los canes a den- telladas, defendíanse los asnos a coces, y aquello fué una guerra que anda en romances como las hazañas del Cid, y que le merece por desaforada, como que canes y borricos acabaron por exterminarse los unos a los otros, hasta que no quedó ninguno para contar el cuento. Los que ahora se ven, pollinos o gozquejos, han sido traídos más tarde, para reme- diar la falta de los antiguos… — Eso de la guerra no cuela – refunfuñó Paquillo, enco- giéndose de hombros. Las consejas de su protector comenzaban a parecerle indignas de todo un señor mareante como él, y sólo propias para embobar a niños de teta. — No lo creas, si no quieres – repuso gravemente Rodri- go –, pero a no ser por esa guerra perruna y asnal, ni aquí hubiera cristiano, ni ésto fuera de España, y no iríamos de este paso a acariciar un jarro de lo añejo en mi ventorrillo

– 244 – que yo me sé, y a decir dos palabrejas a unos sabrosos plá- tanos y a unos requesones de cabra que ya desde lejos están diciéndonos comedme. Porque has de saber, hijo Paco, que ahora les toca el turno a las cabras, y que si Su Alteza, y el señor Adelantado o el gobernador no aciertan a ponerle re- medio, poco falta para que con las cabras y los cristianos se repita lo de los burros y los perros.

Habíanse instalado ya en el ventorrillo que más cerca del puerto estaba, y a la sombra de un parral comían y be- bían con tanta sed como apetito.

— Usía se burla también con eso de las cabras – dijo el grumete, ahogándose con un gran pedazo de requesón en rebeldía.

— Echale vino, hijo, échale vino y pasará…

— ¿Lo de las cabras o el requesón?

— Ambas cosas a la vez – replicó el otro riendo – No me burlo tanto como supones, muchacho. Aquí estás en una verdadera tierra de promisión para todo lo que es de plantas y de bestias… ¿Siembras hoy una bellota? Pues vente a la vuelta de un año y te encontrarás con una oronda encina, que podría servir de palo mayor a la Portuguesa. ¿Siembras tomates?, pues en un soplo nacen y crecen como melones; si melones, los tendrás en un credo como las calabazotas que en España damos a los puercos, y cada alubia es como pelo- ta de lombarda… Pero no tienes sino que mirar los racimos de este parral, que pesan media arroba y cada grano es como un huevo…, pues se trata sólo de la uva torrontés, que en nuestra tierra es pequeñita y aquí resulta mayor que la be- rrocal… Conque, si quieres hacerte labrador y te dan los ri-

– 245 – ñones para majagranzas, no tienes sino coger y quedarte aquí.

— Prefiero la mar… Pero ya tendremos cómo regalarnos tan ricamente a bordo…

— No lo esperes, inocente… No se ha hecho la miel para la boca del asno… y no te enfades, porque también reza conmigo… Todas esas maravillas van a parar a la mesa del Rey y a la de los señores de la Corte, de los obispos, de los canónigos… El mismísimo gobernador de estas ínsulas ape- nas si las cata cuando repican fuerte… Pero, eso sí, en ha- ciéndote labrador, ya podrás, como en cosa propia, darte un hartazgo de todo ello.

— Aunque sea cierto, que no la será – replicó juiciosa- mente Paquillo –, no me desviviría yo por llenar la andorga con esas frutas tamañas, cuando muchos tomates chicos va- len uno grande, por mayor que sea (lo mismo digo de las alubias y demás, que no por pequeñas son menos sabrosas) y eso después de sudar y echar el alma doblado en dos sobre la negra tierra, destripando terrones, cuando con menos fati- gas puedo henchir la cica de buenas doblas, y cuando el oro sabe a todo, como que todo la procura.

— Hablas como Salomón, y con tanta cordura por lo menos… Pero echa otro taco del vinejo ese. Aquí el agua es clara, fresca, pura, incomparable… pero ya tendremos tiem- po de gustarla a bordo, que nuestros aljibes se llenarán con ella y no con vino…

En eso notaron que algunos paisanos de los que asistie- ron con vivo interés a su desembarco habían ido acercándo- se a ellos y los miraban sonriendo complacidos.

– 246 – — Estos valientes son, sin duda, de la carabela que aca- ba de surgir – dijo el que parecía más respetable. — Como vuestra merced lo dice, y para servirla en todo – contestó cortésmente el marinero. — Pues han de hacerme el favor de venirse conmigo a mi casa, que, aunque pobre, en ella encontrarán agasajo y buena amistad. No quiero ser el único del pueblo que no agasaje a tales huéspedes. Algunos de la tripulación habían ido llegando también al ventorrillo, y otros honrados canarios les rodeaban y aten- dían solícitos, sin duda con las mismas intenciones del que hablaba con Rodrigo y el grumete. — ¡Vive Dios, que nos place! – exclamó el marinero – Bien sabía yo que no había gente en el mundo más hospitala- ria y generosa, que la de este bendito puerto. Y no hemos de desdeñar a quien nos recibe con tal agasajo y quiere honrar- nos en su misma casa… Pero no será, por mi nombre, antes de que vuestra merced haya bebido con nosotros una copa de este vinillo que sabe a gloria. — Mejor lo beberéis en mi casa, donde tengo uno que madura desde hace muchos años en la cueva para estas oca- siones – dijo el canario –. Venid conmigo, que si la buena vo- luntad puede suplir la falta, no os quejaréis de mí. Toda la tripulación fue así hospedada generosamente por los vecinos de Las Palmas, que hicieron continua fiesta durante la estadía de las carabelas. No hubo quien quedara excluído de estos agasajos, porque las guardias de las naos se turnaban, y los que habían pasado unos días a bordo pa- saban luego otros tantos en tierra. Era la costumbre, no sólo allí, sino también en los demás puertos de las Canarias, esca-

– 247 – la obligada de las naves españolas que se dirigían al nuevo mundo, como las islas del Cabo Verde la eran para los navíos portugueses. Solís había aceptado, pero solamente por algunos días, la hospitalidad del gobernador don Fernando de Trujillo, ro- gándole en cambio que proporcionara todas las posibles co- modidades a los oficiales Alarcón y Marquina, que tanto ne- cesitaban reponerse, aunque sólo hubieran navegado pocos días. El, por su parte, prefería sentirse libre, a bordo de su nao, aunque no dejara de saltar frecuentemente a tierra para vigilar el buen aprovisionamiento de la escuadrilla y darse un poco de solaz. Fray Buenaventura se alojó en la casa parroquial, a ins- tancias del cura de la Concepción, gordo y cachazudo sacer- dote, con trazas, si no con aspiraciones de canónigo, y que, salvo cuando repican fuerte, pasaba del lecho a la misa, de la misa a la mesa y de la mesa a la siesta, amodorrado por los ardores del clima. Gran imitador encontró en el factor Mar- quina, que, saltando la misa, también pasaba de la cama a la mesa en casa del gobernador, y luego hallaba medio de pro- longar tan reconfortante entretenimiento; y así, con el parén- tesis de algún paseíto de digestión, el desayuno daba la mano al almuerzo, éste – por sobre la siesta – a la merienda, la merienda a la comida y la comida a la cena… con algunos tentempiés intermediarios. Alarcón, más fiel a la característi- ca sobriedad española y con menor capacidad estomacal, cumplía con los deberes de ambos, interviniendo en las compras de víveres y demás, pero gozaba tanto como su compañero con sólo sentir firme el suelo que pisaba, sin el rolido, el cabeceo, la atmósfera densa y los malos olores de a bordo. Pero aún más que él contrastaba con el párroco y con Marquina el infatigable fray Buenaventura, que parecía de

– 248 – azogue, que desde el día siguiente muy de mañana se dió la satisfacción de decir misa, y que a poco no sólo conocía a todos los habitantes de la villa, sino también sus pintorescos y accidentados alrededores. Ninguno de los marineros ocupados en muy distintos pasatiempos le seguía en estas excursiones. Mientras unos salían de sus regalados hospedajes para instalarse por todo el día en ventorrillos y tabernas, barajando los naipes y em- puñando el jarro sin tener observaciones ni castigos, otros corrían la moza, algunos visitaban las menguadas tiendas pa- ra comprar fruterías, y ni uno solo se detenía a contemplar el paisaje africano, a maravillarse de la feracidad del suelo, a gozar, sino instintivamente de la suavidad del aire, la limpi- dez del cielo, la orgullosa placidez de las montañas, el verdor de los árboles… Pero todos sentían, sin tratar de explicárse- lo, el gratísimo influjo de aquellas que los antiguos llamaron islas Afortunadas, y cuyos señores – antes que los franceses, que los Béthencourt116, que Herrera117, que Lugo – fueron los valerosos guanches, exterminados pocos años atrás por el conquistador español según la universal costumbre de la época, y de otras tan cercanas como voluntariamente olvi- dadas… Los naturales, hombres bien proporcionados, esbel- tos, robustos, de facciones agradables si no hermosas, fueron tipos soberbios de la raza africana y tan inteligentes que, cuando llegaron los europeos en son de conquista, ya ellos habían dejado atrás la vida salvaje, aunque, para escapar a los intolerables ardores del estío, habitaran cuevas abiertas

116 Jean de; 1402.

117 Diego García de Herrera y Ayala; 1454.

– 249 – en la roca por antiguas convulsiones volcánicas. Estas grutas estaban convertidas industriosamente en moradas espacio- sas, cómodas y aun adornadas con cierta preocupación de arte y de belleza. Y que eran sensibles al arte está probado por su amor a la música y la poesía, y por los monumentos que erigieron rememorando grandes hechos civiles y no bár- baras hazañas guerreras, porque la efusión de sangre era pa- ra ellos el mayor de los crímenes. Adoraban a Dios en la na- turaleza, los preceptos de su religión eran de mansedumbre y de bondad, sus sacerdotes las vírgenes Maguadas118, su es- peranza superior la resurrección, o por lo menos la reencar- nación que aguardaban sus muertos piadosamente embal- samados y amortajados en pieles de cabra.

118 http://www.tenerife-guanches.com/fr/religion.aspx

– 250 –

119

119 Guanche engravings, Canary Islands: Luc Viatour ver www.Lucnix.be . Ver Fuentes de las Ilustraciones.

– 251 – Su mansa condición no les impidió defender arma en mano, y hasta perder la vida, el señorío de su tierra contra la invasión de los españoles, que acabaron con ellos y ocupa- ban su lugar desde un cuarto de siglo. Los placeres, más que el trabajo de hacer aguada y leña y refrescar las provisiones de carne, vino, queso, azúcar y demás, detuvieron a la tripulación de las carabelas mucho mayor tiempo del necesario en aquel paraíso rebosante de manjares, frutas, vinos generosos, amables y graciosas muje- res sin asomo de mojigatería, zambra y juego, guitarreo y ja- carandaina… Pero todo ha de tener un término, y el capitán general, señaló la partida para el 6 de noviembre120, al mes, o poco menos, de la salida de Lepe. Zarparon ese día sin más demora, y nadie se alegró de abandonar la Islas Afortunadas, nadie, sino Solís, que desea- ba ganar el tiempo perdido pues era su propósito realizar un viaje notable por lo rápido y para el cual todo le sonreía has- ta entonces, y también el capellán, fray Buenaventura, gano- so de entrar en contacto con los indios de nuevas tierras y atraerlos a su fe. — Mucho se habla por aquí de la isla de San Borondón, que no debe de estar muy lejos – dijo Pedro Núñez, poco después de zarpar – ¿No nos llevará a ella el capitán general, para ver por lo menos si es cierto lo que se dice? — ¿Y qué se dice? – preguntó Paquillo. — Pues diz que sus costas pueden verse desde la Gome- ra, y también de la isla del Hierro, con tanta claridad que es

120 1515. (N.d.T.a.F.)

– 252 – como estar tocándola, aunque después no se la vuelva a vis- lumbrar por mucho tiempo.

— ¿Y crees tú, gaznápiro – replicó Rodrigo –, que si esa ínsula existiera no la hubiese descubierto el Almirante, en tantos viajes como hizo? El capitán general dice que es una conseja, una patraña como muchas otras que se inventan sobre estos parajes. ¡Ea! no te ocupes de ella, Núñez, y siga- mos nuestra vía, si te place. Y eso se hará, y no otra cosa, aunque tu señoría mande lo contrario. — Mucho se miente, hablando de estos mares y estas tierras – dijo fray Buenaventura, que los oía –, aunque con la simple verdad basta y sobra para maravillarse y muchos hay que no quieren creerla. Así yo, en España, sigo el consejo de Fernán Pérez de Guzmán, que era hombre sabio y muy gran- de poeta. — Pues, ¿qué consejo era ese, padre? – preguntó Rodri- go Rodríguez.

– 253 – — Está en unas coplas121, que aprendí cuando niño, en- señadas por mi señor padre, que merecen saberse de coro, y que dicen:

La verdad extraña y nueva habida por mentirosa, nunca la digas sin prueba, pues, sin culpa, es vergonzosa. Y si verdad que parece mentira es tan de callar ¡cuánto no daña y empece pura mentira fablar!

Las carabelas habían tomado rumbo sudoeste para cru- zar el Atlántico por la parte del cabo de San Agustín, que es- tá algo más debajo de Pernambuco, y días después comenza- ron a verse algunas ramas flotantes que parecían desprendi- das hacía poco de alguna costa y que la gente de mar llama “hierba de peñas”. A pesar del viento frescachón, el mar esta-

121 Setecientas coplas de bien vivir. (N.d.T.a.F.)

– 254 – ba muy llano y no tardaron en verlo como cuajado de esas hierbas, con espacios libres, como lagos en que reverberaba el sol. Aunque algunos estuviesen advertidos, grande fué el pasmo de los que por primera vez atravesaban la charca, al encontrarse en pleno océano con inmensas soledades cubier- tas de verdura, como una dehesa que, por todos lados, llega- ra hasta el horizonte. Los grandes brezales que en ciertos puntos de Europa se extienden hasta perderse de vista, no hubieran podido competir en cuanto superficie con este campo flotante poblado de crustáceos, cruzado por el vuelo de los garjaos, rabiforcados, pardelas y hasta pajarillos can- tores, y entre cuyas hierbas se deslizaban o saltaban como terneros o animales monteses los delfines. Algunos marine- ros encomendaban ya su alma tomando por diabólica y de funestísimo agüero aquella cosa jamás vista ni oída, y su te- rror crecía de punto al ver la dificultad con que se navegaba en aquellos prados engañosos.

Afortunadamente tocaron apenas los bordes del mar de sargazo, con viento muy favorable para salir cuanto antes de

– 255 – él. Solís había permanecido desde el primer momento en el puente de mando, y la Portuguesa abrió paso dejando detrás ancha estela despejada, por la que la siguieron las otras dos carabelas, con toda facilidad. Sin embargo, todos respiraron como después de un peligro, apenas se vieron nuevamente en mar abierto.

En estas alturas y con inmensa sorpresa de Paquillo, que jamás había visto cosa parecida, comenzaron a surgir de las olas, cruzar el aire y volver a sumergirse en el mar, bandos de peces-golondrinas que volaban como saetas trazando un arco muy tendido antes de zambullir de nuevo. Algunos ca- yeron con ruido sordo sobre cubierta, saltando y retorcién- dose en las ansias de volver a su elemento, pero a golpes de espeque se les remataba o con la mano se les cogía, e iban a parar a la sartén y a variar luego el rancho con un bocado sabroso. Y por la noche, en torno de la nao, en la estela que, como ancha y arrugada cinta de seda iba dejando atrás, y a lo largo de las bandas, a la altura de la línea de flotación, el grumete comenzó a ver fantásticas lucecillas que le parecían cosa de magia y le recordaban lo que había oído decir de mares bituminosos que arden abrasando los navíos y satu-

– 256 – rando la atmósfera de irrespirables emanaciones. En una no- che tormentosa no logró vencer su espanto: el calor era so- focante, el cielo estaba lóbrego y el mar, como tinta hasta ese momento, incendióse en toda su extensión lanzando ful- gores lívidos hasta la línea del horizonte, mientras que en la punta de los mástiles de las carabelas, convirtiéndolos en ci- rios colosales, ardían llamitas que oscilaban al viento122. Pa- quillo lanzó un grito de angustia: estaba, a no dudarlo, en pleno infierno.

— ¡Tontuelo! – le dijo Rodrigo, compadecido de su te- rror –. Esas son las luminarias de regocijo con que nos reci- ben estos mares. No te asustes, porque este fuego arde, pero no quema…

122 Fuego de San Telmo. (N.d.T.a.F.)

– 257 – Y sacando del mar un cubo de agua ligeramente lumino- sa todavía, metió en ella la mano e hizo que el grumete lo imitara y perdiese el miedo. El fenómeno duró poco aquella noche: la iluminación se apagó como al terminar una fiesta, y sólo persistieron, olvidadas lamparillas, algunos fulgores azulados en la estela del navío y en la rompiente de la eslora.

Y así seguía, guiada por su buena estrella, la expedición de Solís, y así continuó, plácida y dichosa, hasta que, nave- gando al Sur un cuarto Sudeste, y creyéndose a unas noventa leguas a barlovento del cabo de San Antonio, cierto día, y cuando menos lo esperaba, el gran piloto vió los inhospitala- rios médanos de arena blanca, cubiertos de jaras y zarzales, que caracterizan al cabo de San Roque, extremo nordeste de la América meridional. Arrastradas sin sentirlo por los vien- tos del Este y por la corriente ecuatorial que cruza el Atlánti- co del Este-sudeste al Oeste-noroeste, las naves se hallaban, a doscientas millas de donde creían estar…

Solís mandó apartarse en seguida de aquella costa, sem- brada de bancos y arrecifes, y aprovechando la bifurcación de la corriente que en el cabo se divide, enderezó su rumbo al de San Agustín, cuyos barrancos rojizos conocía muy bien. No lo encontró, tampoco, fácilmente, pues cuando ya creía demorar a su altura, vió por sus observaciones que la co- rriente le había arrastrado dos grados más al Sur…

Rectificó su situación con la mayor exactitud posible en aquellos tiempos, dada lo imperfecto de los instrumentos as- tronómicos, y modificando la ruta no tardó en reconocer los peligrosos islotes y arrecifes de Abre el Ojo, actualmente

– 258 – Abrolhos123. Sabía ya a ciencia cierta dónde estaba, pero después de pasar el cabo de Santo Tomé124 tampoco pudo reconocer el (cabo) Frío125. Apeló nuevamente al astrolabio y, tomada la altura, hizo rumbo a la bahía de Río de Janeiro, en la que entró a la cabeza de su escuadrilla sin haber sufrido más que aquellos insignificantes contratiempos126. — ¡Buen marino lo es, vive Dios! – comentaba el maes- tre Diego García de Moguer – Pero, para navegar, más vale el ojo que la estrulugía…

123 Archipiélago volcánico situado en el Océano Atlántico, per- teneciente al estado brasileño de Bahía. (BNR.)

124 Pequeña península localizada en el estado de Río de Janei- ro, en la costa del sureste de Brasil. (BNR.)

125 Actualmente ciudad del estado de Río de Janeiro. (BNR.)

126 Toribio Medina, pp. CCL-CCLIII + 217-218. (N.d.T.a.F.)

– 259 – XV

TIERRA ENCANTADA

Cuantos venían a bordo de las naos estaban apiñados sobre cubierta en los sitios donde, sin estorbar la maniobra, podían ver mejor la entrada de la bahía127. No eran artistas, apenas si tenían el embrionario e instintivo culto de la natu- raleza, pero llegaban por primera vez a sitios desconocidos y aquel extraordinario paisaje se les adentraba en el alma, mis- teriosamente, como una nueva e intraducible sensación. El mar parecía un lago rodeado de montes aquí y allá cubiertos de verdura, el aire cálido impelía suavemente a los navíos, y la entrada fué tan fácil y sin tropiezos que ni aun hubo de echarse la sondaleza. Una alta roca granítica, pelada, seme- jante en su forma a desmesurado gorro alemán o a inmenso pilón de azúcar, que se alzaba a babor, y otra cumbre, aguda y elevada, cuya punta se tuerce amenazando caer sobre la obscura vegetación de sus faldas, todos los montes, verdes hasta una misma altura, de parda piedra desde esa línea casi horizontal, suspendieron un momento los ánimos, pero en

127 de Guanabara, de río de Genero o río de Janeiro. (N.d.T.a.F.)

– 260 – seguida nadie tuvo ojos sino para recorrer con avidez el vas- to panorama circundante, las altas riberas alfombradas de variada y vibrante verdura, pobladas de árboles magníficos de diversísimas esencias, regadas por corrientes de aguas vi- vas, esmaltadas de flores violentas de color; los islotes, ora de parda roca estéril, ora tendidos de hierba, plantas y flores, que surgían del lago especular como grandes cetáceos dor- midos o como arriates de un maravilloso jardín flotante y, sobre todo este esplendor, el cielo en movimiento continuo, en cambio perpetuo, tan pronto terso y azul, tan pronto in- vadido por pesadas o vaporosas nubes que, jugando con el sol, dotaban al paisaje de una vida palpitante y sobrenatural. Las carabelas hendían las aguas con un leve rumor de follaje agitado y, además de la rizada cinta de la estela, por la su- perficie de la bahía pasaban estremecimientos fugaces, son- risas del mar, y las abiertas curvas de la costa, con su delga- do ribete de espumas, amuralladas por cerros y colinas ceñi- dos por la selva, descubriéndose o arrebujándose en los flo- tantes vapores de la atmósfera saturada de humedad, se es- fumaban a uno y otro lado, y allá al frente, como si estuvie- ran a punto de disolverse en el aire. El calor era bochornoso y no alcanzaban a templarlo ni la virazón del mar ni los continuos chubascos que acribilla- ban el agua, obscureciéndola, y redoblaban en el velamen y sobre la sonora cubierta de las naos. Estas surgieron mucho antes de llegar al fondo de la bahía, que está, como a nueve leguas de su entrada, y parte de la tripulación, tomando los bateles, fué a desembarcar en el punto más cercano, con la venia del general y de Alarcón y Marquina, pues no habiendo indios a la vista no era de temer que hicieran rescates ni otras negociaciones prohibidas por la capitulación.

– 261 – Multitud de pájaros y bestezuelas, guarecidos en las ra- mas y entre el follaje, que los abrigaba del sol, alzó el vuelo o se escurrió medrosa, mientras algunas víboras y serpientes se deslizaban sobre la hierba seca, buscando nuevo refugio. Al advertir los reptiles, algunos desmesurados y parduscos, otros de vivos colores y tan delgados como una varilla, los marineros se detuvieron en la linde del bosque, temerosos de una picada mortal, y sólo avanzaron los menos, con mucha cautela, cuidándose de dónde ponían los pies. Algún venado curioso se acercaba a atisbarlos por entre el ramaje y en se- guida escapaba, más de extrañeza que de temor; algún ma- caco barbudo que se balanceaba en la copa de los árboles silbaba como el viento, en señal de alarma, imitando su cu- riosidad y su timidez; y los aras blancos y empenachados como la cimera de un rey, y los papagayos abigarrados y gá- rrulos, y los tucanes de encorvado y formidable pico, mucho mayor que su propia cabeza, huían al sentirlos con ruidoso y pesado vuelo. — Aquí hay gente cristiana – pensó más de uno, al oir metálico martilleo, seguido por áspero chirrido de lima mor- diendo el metal. Era el pájaro herrero. Y otras mil aves desconocidas, bri- llantes y ariscas, se acercaban y se alejaban, revoloteando, entre un inacabable rumor de cantos, aletazos, rozamientos del follaje, al que servía de acordado acompañamiento el zu- rrido incesante de millares de insectos. La selva entera vivía y palpitaba. — ¡Mira, mira el pajaruco! – exclamó de pronto el gru- mete muy admirado. — ¡Bueno estás tú con tus pajarucos! Es un abejorro y nada más – replicó Fuentes, que andaba con Paquillo.

– 262 –

— ¡Pues qué! ¿No le ves tú las plumillas? ¿Dónde tienes los ojos? Deja que se pose en esa flor que parece asustarle, y ya verás… ¡Tiene más colores que una girándula de vidrios! — Vaya, que no se posa y se está en el aire, igual que un moscardón, y más que pájaro u otra cosa se diría una nube- cilla o una pelusa. — Pero ¿y sus colores? ¿Estás ciego?… Yo nunca había visto nada igual.

– 263 – Envolviéronlos también bandadas de mariposas de todos los tamaños y todos los matices, pero la admiración de Pa- quillo rayó en pasmo cuando, al caer la noche, mientras oía el interminable concierto de los grillos y las ranas musicales, comenzó a ver, trazando en el aire curvas caprichosas o cru- zándolo como una saeta, enjambres de chispas, de brasas, de llamitas verdosas, ojos de luz de seres fantásticos que vola- ban mirándolo, quizá amistosos, quizá amenazadores… — En la mar, fuego que arde y no quema; aquí, fuegos que vuelan por los aires…! Dios nos tenga de su mano! – se dijo Paquillo, persignándose. Solís no había desembarcado. Marquina y Alarcón, que respiraban por primera vez desde la salida de Canarias, Francisco de Torres, los demás pilotos, el maestre Diego García y fray Buenaventura, que solía asistir a los consejos, hallábanse con el capitán general, reunidos en el castillo de popa, bajo la toldilla, gozando del descanso, el fresco relati- vo y la agradable plática. — No debemos quejarnos, antes bien dar gracias a Dios – decía Solís – pues nos ha deparado una travesía a pedir de boca y tan rápida y tal como yo no me atrevía a soñarlo. — ¡Y el tiempo sigue para bueno! – exclamó el maestre. — Tan para bueno que deberíamos aprovecharlo e ir adelante – observó Torres –. Con tiempos así se llega al cabo del mundo. — No nos dormiremos, hermano – replicó Solís – En cuanto se llenen los aljibes y se coja algún bastimen- to, hemos de ponernos en franquía. El agua de las vasijas comienza a tomar mal sabor y por la salud de la tripulación

– 264 – se necesita ya algo más fresco que la cecina y la mojama, el queso y el bizcocho, las habas y los garbanzos secos. — Era un decir – aclaró Torres. — Gracias a la merced divina, nuestra salud no puede ser mejor, aun para vuestras mercedes, salvo el mareo, que pronto pasa – dijo fray Buenaventura con aire que no parecía de broma, inclinando hacia Alarcón y Marquina la cabeza cubierta ya de cabello espeso, rudo y entrecano –. Pero, dí- game el señor capitán general, si no soy indiscreto: ¿por qué no nos hemos apresurado a desembarcar, como nuestra gen- te? ¿No se interesa vuestra merced por estos parajes?… — Bien podría responder a Su Paternidad que los conoz- co… – dijo Solís –. Pero sólo diré que mi propósito único es hacer aguaje, como ya he dicho… Tierras son éstas que no puedo tocar128, y aquí están para defenderlo el factor Mar- quina y el contador Alarcón. Tampoco somos los primeros que surgimos aquí, porque hace cerca de dieciséis años129, Juan de la Cosa130 y Alonso de Ojeda131 navegaron desde es- te punto hasta otro que llaman Bahía, reconociendo en el

128 Tratado de Tordesillas. (N.d.T.a.F.)

129 1499. (N.d.T.a.F.)

130 Toribio Medina, pp. LII + LVIII + LXVI + LXXVI + LXXXIII- LXXXV + XCVIII + CIX + CXI + CXIII + CXCIX + CCXVI + 213 . (N.d.T.a.F.)

131 Navegante y explorador español, uno de los pioneros en la empresa de conquista que siguió al descubrimiento de América. (BNR.)

– 265 – camino un gran río, que dicen el dulce, y subiendo luego a lo largo de la costa hasta el golfo de Paria132. También Diego de Lepe133 tocó, por el mismo tiempo, en el cabo de San Agus- tín134 y lo llamó de Rostro Hermoso, sin que nadie alzara el gallo todavía. Pero luego, el año de 500, las cosas hubieron de enredarse muy bravamente con los portugueses, y desde entonces se anda con que si tú y que si yo… — Bueno sería acabar de una vez con tales historias y fácil nos sería, vive Cristo, a no ser por esa maldecida paren- tela – dijo Torres. — No lo piensas mal – continuó Solís – porque ya Vicen- te Yáñez Pinzón, en la desembocadura del Amazonas, tomó posesión de estas tierras en nombre de los Reyes Católi- cos135… — Y ¿cómo no se mantienen, voto al chápiro? – exclamó Diego García. — Ahí veréis… Razones de Estado, de familia… Pues por ese mismo tiempo, Pedro Alvarez Cabral136, mandado con instrucciones secretas por el rey don Manuel, abordó en

132 Entre Trinidad y Venezuela. (N.d.T.a.F.)

133 Toribio Medina, pp. LXXIV-LXXV + LXXXIX + CCIX- CCXIII + 100. (N.d.T.a.F.)

134 Situado al oeste de la desembocadura de la ria de Navia (BNR.)

135 Nota: Toribio Medina, pp. XLIV + LXXIII + XCI. (N.d.T.a.F.)

136 Toribio Medina, pp. XC-XCIII. (N.d.T.a.F.)

– 266 – Puerto Seguro. Después ha dicho y repetido que no lo hizo por su voluntad, sino que los vientos y las corrientes lo ha- bían empujado adonde él no quería.

— ¡Voto a Diego con el embaidor, embustero!

— Así es. Lo de la recalada forzosa fué notoria falsedad, como no ha tardado en descubrirse, y Cabral no hizo sino obedecer puntualmente sus instrucciones. El hecho es que tomó posesión en nombre de Portugal de ese Puerto Seguro, que, según dijo, había creído isla, y al que llamó de Vera Cruz. – 267 – — ¡Y ese Cabral es de los que toman su derrota por es- trulugía! – exclamó el maestre, repitiendo su estribillo con no disimulado desdén, sin reparar en que Solís y Torres, por lo menos, eran pilotos de altura. Solís se echó a reír no tomando en cuenta la pulla, por- que estimaba en García al mareante nato, en quien el instin- to suplía a la ciencia aun en pañales. — El rey don Manuel y el mismo Cabral – prosiguió – fingieron atribuir muy poca importancia al descubrimiento y a la toma de posesión, pero es el caso que al año siguiente – y esto acaba de demostrar la falsedad – Juan Coelho137 y Diego Ribeiro138 volvieron por el de Portugal, a reconocer más despacio estas costas, corriéndolas desde el cabo de San Roque hasta el Marañón. Por nuestro lado no abandonamos tampoco la partida, y aquí hemos venido, uno tras otro, Vi- cente Yáñez y yo, Rodrigo de Bastidas139, Antonio de Oje- da… — ¿Y Américo Vespuche? – dijo fray Buenaventura – Me parece haber leído… — Sí, en los papeles anda… pero… – contestó con reti- cencia Solís – Quizá viniera cuando estaba al servicio de Por- tugal, con la armada de Andrés Gonçalves, que corrió del

137 Gonzalo; junio de 1503; TORIBIO MEDINA, p. XCVI. (N.d.T.a.F.)

138 Toribio Medina, pp. CXXXIX + CLIX + CCLXV. (N.d.T.a.F.)

139 Toribio Medina pp. LII + LXXVII + XC + CXV + CXLVIII + 101 + 103. (N.d.T.a.F.)

– 268 – cabo de San Roque a la Cananea y luego siguió, mar adentro, su vía al Sur… Tan en secreto se han hecho y se siguen ha- ciendo estos reconocimientos, por una y otra parte, que mu- chas veces no se sabe a quién ni qué creer… Pudo también haber venido con aquel Gonzalo Coelho, quien, por estos al- rededores, construyó un fuerte que, según se dice, abandonó luego y los naturales arrasaron. Cosa es que no tardaremos en averiguar, aunque importe bien poco.

— Ese Vespuche, que Dios haya perdonado… – dijo García – (no le quiero mal porque, muerto el perro se acabó la rabia), ese Vespuche, digo, era, otro que tal, y, o mucho me equivoco o embaucó a más de uno del extranjero con sus cuentos de grandezas, emporcando manos de papel de mar- ca… Ponen a los andaluces de fanfarrones que no hay por dónde cogerles, pero vive Diego que si se ha de juzgar por ese Américo que Dios haya, a los de Florencia les sobra con qué dar y prestar a los de Andalucía… Vivía de viento, y yo se lo perdono, porque a mí nada me quitó, que de eso no vi- vo; pero lo que no puede perdonársele es que con astucias y triquiñuelas acabase por dar su nombre a lo que era del viejo Almirante140.

Y el indignado maestre hubiera seguido por este camino, a no desviar fray Buenaventura la conversación preguntando a Solís:

— ¿Por qué, decid, ha de importarnos tan poco lo de es- tas tierras?

140 Toribio Medina, pp. 101-106. (N.d.T.a.F.)

– 269 – — Pues porque, repito, no debemos tocarlas, sino ir más lejos, do yo me sé y Su Paternidad no tardará en ver con ma- ravilla… — Si es a Malaca, como se nos ha dicho… — Tiempo al tiempo, que no será menester mucha pa- ciencia… Pues, como iba diciendo, poco antes había andado también por estas aguas y estas tierras un mareante fran- cés… (Paulmier de Gonneville) y puede que, secretamente, algunos otros de Portugal… — Y vos mismo el año 12… — ¡Tata, tate, padrecico! mejor es que no se toque ese punto… — Cuando lleguemos ya se verá do llegamos… – con- cluyó el de Moguer guiñando el ojo.

Todo el mundo había vuelto a bordo al caer la noche. El alférez Ramírez, gran cazador, regresó con dos venados, y algunos otros llevaron a las naos varias piezas menores, que reforzaron muy agradablemente la cena de aquel día. Habían visto, también, pero no cobrado, unos a modo de enormes cerdos o de elefantes enanos, y una suerte de liebres, bestias

– 270 – que luego conocieron, respectivamente, con los nombres de tapires y agutís. Los marineros habían comenzado a vaciar los aljibes pa- ra hacer aguada a la mañana siguiente, y en la tranquilidad de la bahía, todos cuantos no estaban de guardia, sin excep- tuar a Marquina y Alarcón, durmieron aquella noche a pierna suelta. Pero, en el cuarto de la modorra, antes del relevo, los que estaban de vela observaron que a la costa parecía haber acudido gente. Y con las primeras luces del día vióse que, en efecto, algunos hombres, indios sin duda, hacían señales desde la playa más próxima. Apenas amaneció pudo verse que eran, efectivamente, naturales que les tendían los brazos como ofreciéndoles lo que en las manos llevaban, en prenda de amistad y bienvenida. Avisado Solís saltó del lecho y salió de su cámara. Observó el pequeño grupo de indios y llaman- do al contador y al factor, les invitó a ir a rescatar con los naturales lo que para las naos era preciso, o sea carne, grano, fruta y cuanto pudieran proveer. Desembarcaron con- fiadamente, porque Solís no solía tomar en tierra las debidas precauciones, falta que en su Historia hizo constar su grande amigo Fernández de Oviedo y Valdés141 llamándole “notable marino pero mal capitán”, y que bien poco después había de costarle tan caro. Acompañábalos Enrique Montes, que iba a hacer sus primeras armas como lengua, y llevaban, para dar a los indios a cambio de sus vituallas, bonetes colorados, contezuelas de vidrio de colores, sonajas de latón, cascabe- les y otras fruslerías. Paquillo había encontrado manera de agregarse a la comitiva y decía al gaviero-lengua:

141 Historiador, cronista de Indias y administrador español. (BNR.)

– 271 – — Me mostrarás cómo les hablas, que yo también quiero deprenderlo. — Si no te enseñas tú mismo… – pensó Montes. – En cuanto a mí ¡quiera Dios sacarme con bien! Desde que desembarcaron, Montes trató de comunicarse con los indios, valiéndose de ademanes y gestos imitados de los que ellos hacían, y mostrándoles parte de los abalorios y chucherías que llevaban; Solís y los otros hacían poco más o menos lo mismo y, sin ser especialistas, entendieron tanto como el ladino Montes. Las baratijas fueron más elocuentes y eficaces. Aquellos hombres y aquellas mujeres, color de cobre, de mediana estatura, movedizos y ágiles, iban casi en- teramente desnudos, con sólo una pampanilla, más bien adorno que vestimenta. Algunos principales ostentaban en la cintura, como traje de gran gala, un corto taparrabo a modo de falda esponjada, tejido con plumas de brillantísimos colo- res. Disimulaban, además, la desnudez de su cuerpo limpio de vello, extrañas pinturas y tatuajes. Llevaban casi al rape el lanudo pelo y desfigurábanse el rostro – que si no hubiera podido pasar por agradable – con cilindros de piedra, de hueso o de madera que embutían en sus labios perforados. Según se vió después – cuando se buscaba en vano lo que podía quedar del fuerte de Gonzalo Coelho – vivían no lejos de allí, en vastas cabañas de palos y hojas, y dormían en re- des de algodón colgadas a su abrigo. Algunos llegaron por agua, en grandes canoas hechas ahuecando con fuego un tronco de árbol, e impulsadas por remos a modo de palas de hornear. Como señal de alegre y amistoso agasajo danzaban y perneaban lanzando extraños gritos, y se mezclaban a los españoles, sin temor alguno pero con tanta curiosidad que resultaban enfadosos y era difícil contenerlos sin violencia, obedeciendo a las severas órdenes del general de que no se

– 272 – les hiciera el menor daño, sino en caso extremo y a más no poder. El grupo salvaje iba engrosando poco a poco, pues los menos atrevidos, ocultos entre los árboles, perdían paulati- namente el miedo y acababan por acercarse también. Algu- nas mujeres acudían con sus pequeñuelos a la espalda y aquello no tardó en convertirse en una especie de feria, es- truendosa algarabía mezclada con saltos y zapatetas, simu- lacros de combate y de amor, danzas locas que inundaban de transpiración los pintarrajeados rostros y los bronceados bustos… Algunos indios, comprendiendo lo que los españoles querían, comenzaban a llevarles cosas de comer, y les hacían señas, sin duda significativas de que más tarde u otro día ha- bían de darles mejor satisfacción. Entretanto, contra sus deseos y por orden del capitán general, que sólo para con él tomaba precauciones, fray Buenaventura no había desembarcado; pero Solís, convenci- do ya de la mansedumbre de los naturales, hízole señas de que bajase a tierra. — ¿Qué teme por mí vuestra merced? – había dicho el fraile – Si es el martirio, al martirio he venido, cuando le mande el Señor, y no a hartar la botarga, pues para seguri- dad me hubiera quedado tan ricamente en mi convento. — Una cosa es resignarse al martirio y otra buscarlo inú- tilmente – replicó Solís. Cuando le vieron desembarcar del batel, con el hábito hasta los tobillos, los salvajes abandonaron o poco menos a los otros, y lo rodearon, examinándolo por delante, por de- trás y desde la corona, semicubierta ya, como una castaña,

– 273 – de cabellos como púas, hasta la sandalia. Los más osados le tocaban y palmeaban para saber si era de carne maciza o si bajo el sayal se disimulaba un cuerpo como el del resto de los hombres.

— Aquí estoy peor que mona de titiritero – pensaba el buen fraile, mientras distribuía bendiciones, a diestra y si- niestra, sonreía, rezaba, dejando hacer su gusto a aquellos niños grandes.

— Se os agasaja, padre – le gritó con afectuosa burla Juan de Solís.

— Más de lo que yo quisiera… Pero bien va, y mejor iría si supiese dos palabras de su maldita… de su bendita len- gua… ¡Qué ocasión para doctrinarlos!

A falta de saberlas les habló en castellano, y los indios le escuchaban boquiabiertos y parecían comprenderle, tal era su embelesamiento, del que sólo salían para hacerse gestos y retorcerse como unos condenados.

O las señas de Montes, o la perspicacia de los indios, o su deseo de mostrarse amigos, o todo esto junto, hicieron, pues, que ese día y los siguientes los naturales fueran llegan- do a la playa con cestillas de maíz, cazabe, patatas, cocos, bananas, abundante y sabrosísima fruta silvestre, en gran parte sino toda ella desconocida para los españoles, y algo que debía agradarles más y parecerles de mayor substancia: muchas aves como gallinas, otras como faisanes y patos, al- gunas semejantes a la perdiz de Europa, venados, antas y otros cuadrúpedos, porque aquella selva debía ser una in- mensa granja natural con graneros y trojes desmesurados y toda el arca de Noé brindándose al hambre humana.

– 274 – Fray Buenaventura, entretanto, había satisfecho su gran deseo de decir misa, y durante la permanencia en la bahía la dijo todas las mañanas, escuchándola Solís, los pilotos, los oficiales y la tripulación que no estaba de cuarto en los na- víos. Al fervor religioso agregábase en ellos la emoción del recuerdo de España, de sus familias, de los amigos, evocados por la ceremonia en aquellas tierras salvajes. Los cuarenta o cincuenta hombres que, con Solís y los oficiales, se arrodilla- ban sobre la hierba, bajo enormes y frondosos árboles, eran un puñado casi imperceptible, pero, para ellos mismos, en su imaginación exaltada, todo un pueblo, todo un país… Fray Buenaventura, que había improvisado un altar con cuatro ta- blas ensambladas por el carpintero de a bordo, la cubrió con blanco mantel de encajes y la adornó con los vasos y orna- mentos sagrados que llevaba por encargo del general. Y esa primera misa de campaña fué solemne, conmovedora para todos. Ayudó el gran Alarcón, que cuando niño había apren- dido esos latines, y era de verlo llevar orgullosa, majestuo- samente, el misal del uno al otro lado, tañer la campanilla, decir las respuestas litúrgicas con voz sonora, tomar con un- ción el extremo de la casulla cuando el celebrante se pros- ternaba, verter en el cáliz el contenido de las vinajeras para la consagración, y sobre los dedos del padre el chorrito de agua de la ablución… Pero los mareantes no podían oír misa con todo el recogimiento deseable, a causa de sus especta- dores. Los indios, curiosos y admirados, iban estrechando poco a poco el cerco que formaban a su alrededor, y aunque algo medrosos, acercábanse cuanto podían, y era preciso ahuyentarlos para que no se mezclaran profanamente con los fieles y turbaran su atención. Espectáculo prodigioso pa- ra ellos era el de aquel hombre maravillosamente vestido de blanco, rojo y oro, que musitaba palabras como conjuros y hacía amplios y misteriosos ademanes. No reconocieron por

– 275 – cierto en él al pardo personaje que la víspera habían pal- meado y manoseado. Debía de ser un mago de orden muy superior, más rico y más poderoso que los de aquellas tie- rras, y lo que ejecutaba era, sin duda, una danza, muy extra- ña, pero harto pausada y silenciosa para su gusto. Con todo, no turbaron mayormente la solemnidad, ni menos llegaron a interrumpirla, porque en la ignorancia y la candidez de sus espíritus la curiosidad y el recelo suplían al respeto que aún no podían sentir. Y, alucinado por las apariencias, el buen fraile pensaba: — ¡Cuán fácil será traerlos al rebaño de Cristo! Creíanse los de Solís en pleno paraíso; fraternizaban – y aún más, si lo permitía el sexo – con los naturales, cándidos, bondadosos y encantados hasta el éxtasis por algunas cuen- tas de vidrio, algún birrete rojo, alguna baratija de dos mara- vedís, que consideraban otros tantos tesoros, y hubieran querido quedarse allí para siempre. Montes, a quien una jo- venzuela había tomado gustosa por discípulo, sabía ya algu- nas palabras de la lengua que, según se tuvo luego ocasión de observar, se hablaba hasta muy lejos de allí. Pero, cuando ya iban acostumbrándose a las dulzuras de aquella vida, hasta el punto de no percatarse casi del calor que los achicharraba, el capitán general, sabiendo sus bode- gas colmadas y sus aljibes llenos de agua fresca y cristalina, dió la orden de zarpar, y, con un día de fuego, a fines de di- ciembre de 1515, las tres naos salieron una tras otra de la prodigiosa bahía.

– 276 – XVI CUENTOS CRUELES

Fray Buenaventura no había permanecido en tierra du- rante toda la estadía de las naos. Viendo que Solís se queda- ba, preferentemente a bordo, y después de preguntarle si su presencia no le molestaría, instaló se de nuevo en la Portu- guesa. La mutua inclinación había crecido en ambos durante el corto viaje. El fraile tenía ya toda la confianza del marino, que veía en él un confidente, quizá un consejero, proporcio- nado por su buena suerte. En la serena y a veces ruda grave- dad por él adoptada a bordo, como buen capitán celoso de que las familiaridades no amenguasen ni debilitasen su auto- ridad, apartado de Francisco de Torres que no abandonaba su carabela, fray Buenaventura era el único interlocutor con cuya plática se complacía.

Cuando el dominico no se sentaba a la cabecera de Marquina o de Alarcón – vueltos a caer en el mareo apenas echó a andar la nao, y que, odiando a la humanidad entera, hubieran preferido, sin decírselo, que les dejara en paz – y cuando no recorría el navío hasta en sus más sucios y pesti- lentes rincones adoctrinando a la tripulación, pasaba largos ratos con el capitán general, quien se complacía con sus plá- ticas y, obedeciendo a su carácter expansivo, le hacía depo- sitario de sus pensamientos. Y a los pocos días de navega-

– 277 – ción – tan largas son las horas a bordo – el dominico estaba al tanto, casi con todos sus detalles, de la formidable lucha sostenida por Solís contra el embajador de Portugal por un lado y contra los oficiales de Sevilla por otro… El triunfo embriagaba al mareante y le hacía atribuirse todos, o poco menos, los méritos de la victoria. La decidida protección de don Fernando por el interés que le iba en ello, y la eficaz co- laboración del obispo de Palencia y del secretario Lope Con- chillos, no muy desinteresada a la verdad, eran para él sim- ples contingencias favorables de que su destreza e inteligen- cia había sabido servirse con eficacia. Estaba efectivamente – como Vasconcelos había escrito al rey Manuel – “lleno de humos y de esperanzas”. Fray Buenaventura le escuchaba sin contradecirle y aun encareciendo sus merecimientos, pues sentía hacia él grande y candorosa admiración, y esperaba conquistarlo para fines muy altos: habíase propuesto este misionero excepcional realizar una gran empresa libremente acometida al embarcar con Solís. Imitador de su hermano en religión fray Bartolomé de las Casas142, cifrábalo todo en lo- grar que los españoles de las Indias trataran a los naturales como a hermanos menores y no como a bestias salvajes143. ¡Generosa candidez! Los hombres de aquellos tiempos, tan bárbaros para con ellos mismos que en su país y en el ex- tranjero, en la tierra conocida y en la tierra por conocer, se agredían y destrozaban sin piedad, disputándose mezquinos intereses, no estaban preparados para obedecer, aunque es- cucharan con unción – como los italianos tres siglos antes la

142 1484-1566. (N.d.T.a.F.)

143 Brevísima relación de la destrucción de las Indias, escrita a par- tir de 1532; disputa de Valladolid, 1550. (N.d.T.a.F.)

– 278 – palabra del Pobrecillo de Asís144 – la prédica cristianamente humanitaria del buen dominico. Y los discursos ardientes o enternecidos de fray Buenaventura entraban por un oído a la tripulación de la Portuguesa para salir inmediatamente por el otro, aunque en el trayecto tuvieran alguna vez la virtud de entretenerlos y suspenderlos mientras que, en general, sólo despertaban su espíritu zumbón. El, sin embargo, esperaba convencer a sus aventureros, y creía apiadarlos y prepararlos a la bondad, pintándoles a lo vivo los tormentos de los infeli- ces indios de Cuba y la Española145 y la fiera barbarie de los conquistadores.

— Son brutos – solía decir aludiendo a éstos – que no parecen haber recibido el agua del bautismo. Aquí estamos entre hombres solos y se puede hablar sin tapujos. Pues hay entre – esos tales quienes, como por diversión, violan casa- das y doncellas y hasta tiernas chiquillas, y luego las despan- zurran de una cuchillada – ¡como lo estáis oyendo! – supon- go yo que atacados de demencia, porque de otro modo no me explico semejante horror… Otros, también por diversión, apuestan a que de un solo golpe echarán al aire las entrañas de un indio o que lo abrirán en canal de un fendiente o le re- banarán la cabeza de un revés… Gane o no gane el aposta- dor, el indio infeliz queda siempre muerto, y bien muerto.

— ¡Cosas de borrachos! – dijo Rodrigo Rodríguez.

144 1182-1226. (N.d.T.a.F.)

145 Actual Santo Domingo. (N.d.T.a.F.)

– 279 –

— ¡Borrachos! – exclamó fray Buenaventura – ¡Ni borra- chas las fieras hacen cosa semejante! ¿Crees tú que el vino es buena disculpa?

— Las fieras no la catan, padrecito.

— Razón tienes, hijo, y el ejemplo es malo pero la inten- ción era buena… Sin embargo, las fieras, para matar, han de tener hambre o verse acosadas, mientras que esa clase de hombres lo hacen por juego, pecado horroroso de que el Se- ñor les pedirá cuentas en su día.

— ¿Aunque sólo se trate de indios?

— Aunque sólo se trate de indios, como dices. ¡Pobreci- llos! al paso que iban esos sayones, ya quedaría muy pocos…

– 280 – Bien sabéis que sus armas son flacas y de poca ofensiva; las guerras que mueven unos contra otros, más que guerra pare- ce juego de cañas entre chiquillos; pues esos energúmenos – y perdóneme Dios que hable así de cristianos aunque lo sean tan poco – pretextaban falsas rebeliones para dar en ellos a sangre y fuego y hacer horribles carnicerías…

— ¿Y no tratabais de impedirlo, padre? — ¡Qué habíamos de hacer, pobres de nosotros! Mi maestro y compañero, el gran fray Bartolomé, y yo, con me- nos autoridad pero con igual celo, condenábamos pública- mente tales crímenes, amenazando a los culpables con la justicia y la cólera de Dios, pero, ¡quiá! ¡sermón perdido! Volvía el demonio a entrárseles en el cuerpo y en sus raptos de locura llegaban hasta arrancar a los pequeñuelos de los brazos de la madre, y cogiéndoles de un pie estrellarlos con- tra las rocas. Dios los castigará, en la otra vida, y aquí abajo no ha de tardar el remedio, porque fray Bartolomé ha ins-

– 281 – truído ya de todo a nuestro rey don Fernando146, y tan buen cristiano y tan poderoso, sabrá poner coto a tanta atrocidad. — ¿No abulta las cosas el padrecito, llevado de su celo y de su amor a los naturales? – preguntó con cierta intención Rodrigo – A muchos castellanos conozco de los que pasaron a la Española y otras ínsulas, y mía fe que era buena gente, incapaz de hacer daño a una pulga como no fuera en su pro- pia defensa.

— No abulto, no: el sol les derretirá los sesos o el diablo se los trastornará, pero la verdad es que se deleitan bañán- dose en sangre y parece que no se les diera un ardite del cie- lo ni del infierno…! Oh!! Y cómo saben variar sus abomina-

146 Las leyes de Burgos del 27 de diciembre de 1512, a instan- cias de Montesinos. (N.d.T.a.F.)

– 282 – bles diversiones! Hacen, por ejemplo, unas horcas no muy al- tas pero sí muy largas, y de ellas cuelgan a los indios de tre- ce en trece diciendo –! los muy blasfemos! – que le hacen así en honor y reverencia de nuestro Redentor y de sus doce apóstoles… Después les ponen fuego debajo y los achicha- rran vivos lentamente… Otros los envuelven de pies a cabe- za, como longaniza, en paja bien ceñida y liada, y les dan fuego como a Judas de Cuaresma… Otros les cortan las ma- nos y se las cuelgan, por escarnio, al cuello… A los que es- capan a los montes, que son muchos y tienen sobrada razón de huir de tales amos, les dan caza como a ciervos o jabalíes, con perros adiestrados y feroces que los hacen cuartos a dentelladas… — Pero ¿sabe todo eso nuestro Rey y señor? – preguntó el gaviero con acento de extrañeza, quizá de admiración.

— Todo cuanto os he dicho y muchas otras cosas más ha puesto fray Bartolomé en conocimiento de S.A., como ya os dije. Va en un memorial147 que estos ojos pecadores han visto y leído. En él cuenta cómo, cuando quieren destruir al-

147 1542. (N.d.T.a.F.)

– 283 – gún pueblo por cualquier motivo que sea, hacen lejos de él un simulacro de requerimiento, y acto seguido, diciendo que los indios no la acataron, lo encendían, y así abrasan a cuan- tos están dentro de las chozas; y esto se hace siempre de no- che para que nadie escape. ¡Y lo que se ve en las expedicio- nes! Los indios llevan cada uno una carga de tres arrobas y van encadenados para que no puedan arrojarla y huir, y por la fatiga quedan tantos muertos en el camino, que a veces de cuatro mil no han vuelto diez… ¡No hablemos del servicio ni de las minas! Un oficial conozco que de trescientos indios recibidos, al cabo de pocos meses sólo tenía treinta; diéronle otros trescientos, y en un abrir y cerrar de ojos también aca- bó con ellos148. Un tal Alonso Sánchez149 – fray Bartolomé escribe su nombre para que sea público su oprobio – topó cierto día con una cuadrilla de mujeres cargadas de condu- mio; se lo ofrecieron, Sánchez lo tomó como si fuera tributo debido, y ¿qué diréis que hizo luego?… Pues quitarles senci- llamente la vida… — ¿Sin otro motivo que el de haberle dado de comer? – inquirió Montes. — Ese y otros que tal no necesitan motivo ni pretexto, y más miran para matar ganado o piezas de caza que no hom- bres, si éstos son indios… En las marchas forzadas – y las marchas son siempre forzadas, como si faltara el tiempo para enriquecerse y condenarse –, cuando algún indio cae rendi- do, para que se alce y siga marchando suelen quebrarle los dientes con el pomo de la espada. Por esto, y por lo ya dicho,

148 Capitán Pánfilo de Narváez. (N.d.T.a.F.)

149 De Carvajal; Historia de las Indias, capítulo CLII. (N.d.T.a.F.)

– 284 – los destinados a las minas – que allí mueren como moscas – prefieren muy a menudo darse muerte antes de ir, y las ma- dres ahogan a sus pequeñuelos para que más tarde no ten- gan que servir a tales amos y sufrir tales tormentos150… Di- cen que Dios ciega a los que quiere perder, pero éste es un concepto pagano, porque nuestro Dios quiere, por el contra- rio, salvarnos a todos… El diablo es quien ciega a los cristia- nos de esos hechos, porque quiere perderlos, no sólo en la otra vida, sino también en ésta… Porque ¿qué bienes espe- ran de la despoblación, ni quién va a trabajar sus campos y sus minas cuando hayan acabado con los indios?

150 Historia de las Indias, op. cit., libro III, capítulo VI. (N.d.T.a.F.)

– 285 – Más de una vez, en estas pláticas destinadas a sembrar en el cerebro de los descubridores la semilla de la manse- dumbre para con los indios, a fray Buenaventura se le fué la lengua hablando de los franciscanos de la Española, aunque tratara de retenerla para no dar motivo de escándalo a aque- llas almas de creyentes sencillos, respetuosos del hábito o la sotana. Pero siempre se le escapaba alguna palabra de crítica o reprobación, aunque muy luego, en cuanto la curiosidad despierta de los marinos le interrogaba al respecto, se apre- suraba a escapar por la tangente, dejando las cosas en el ai- re, como si no hubiese dicho nada. Desquitábase del necesa- rio mutismo con Solís, revelándole los motivos de su ojeriza, personalmente desinteresada a la verdad, contra los misio- neros franciscanos. Estos habían llegado a la Española más o menos en la misma época que los dominicos, pero ni ellos ni su prelado, fray Antonio de Espinal151, tenían una palabra de condena- ción para la conducta de los más crueles conquistadores y colonizadores. Parecían decir que como los indios, idólatras, eran esclavos del demonio, bien podían serlo en vida de los españoles, que, aun matándolos, no cambiaban su destino, pues para ellos no cabía salvación. Parecían también aprobar el concepto de que eran cosas, quizá seres irracionales o, lo que sería peor, siervos de Satanás. — Sin advertir – decía el fraile – que el ser siervos de Sa- tán supone que tienen como nosotros un alma libre… Mientras los franciscanos miraban con indiferencia la suerte de los indios – continuaba fray Buenaventura –, los de

151 Fray Alonso de Espinar. (N.d.T.a.F.)

– 286 – su hábito152 asumían la defensa de la raza perseguida y ani- quilada, declaraban que los “repartimientos” eran contrarios al espíritu y aun a la letra del cristianismo y pronosticaban a los españoles su propia pérdida, pues destruían precisamen- te los instrumentos de su bienestar y su riqueza. — Nuestro admirable provincial, el padre Montesinos153, llegó a negar la absolución154 en el santo tribunal de la peni- tencia a los cristianos que tuvieron esclavos. Pero ¿sabéis, capitán, lo que pasó? ¡No le podréis creer! Era la excomunión, en aquellas épocas, el mayor de los castigos para el verdadero creyente, pero en este caso no sirvió de nada. Los excomulgados por los dominicos fueron sencillamente a confesarse con los franciscanos, que los ab- solvían y les daban la comunión. Sólo el recuerdo de éste te- nía la virtud de irritar hasta el paroxismo a fray Buenaventu- ra, que multiplicaba sus exclamaciones, haciendo sonreir a Solís, que lo escuchaba con cierta extrañeza. — Cualquiera al oíros – díjole una noche – pensaría que el diablo es franciscano. — ¡Oh! – exclamó el fraile – Si el enemigo malo se dis- fraza alguna vez de sacerdote, seguro estoy de que se encon- trará muy a sus anchas en los hábitos de esa orden.

152 Los dominicanos. (N.d.T.a.F.)

153 Fray Antonio o Moisés Montesinos. (N.d.T.a.F.)

154 Bulletin Hispanique; 1958, Volume 60, Numéro 1, pp. 5-29 (negación de absolución y medidas de prevención: pp. 16,19,22,24). (BNR.)

– 287 – — Sin embargo, el gran San Francisco de Asís… — Desgraciadamente – interrumpió fray Buenaventura, – no todos los hijos se parecen a sus padres! Otra vez que el dominico hablaba de los indios a la tri- pulación, interrumpióle Rodrigo – que desde noches atrás ardía por tirarle de la lengua – con el siguiente ex abrupto:

— Tengo una duda y quisiera que vuestra merced me la resolviese, padre, si es posible. El buen capellán embolsó la homilía155 que pensaba desarrollar y dijo: — Habla, habla, que si es posible ya te la resolveré. — Pues, hablando de los indios, Su Paternidad lo hace siempre como si se tratara de hombres – comenzó Rodrigo – y yo quisiera me dijese lo que hay en ello, porque, según el parecer de muchos, y no de los menores y más ignorantes, son en realidad poco menos que bestias irracionales. Si éstos

155 Eclesiástico 34,18. (N.d.T.a.F.)

– 288 – tuvieran razón, padrecito, el perseguirlos y matarlos sólo po- dría ser uno de tantos pecados veniales como se borran sen- cillamente tomando agua bendita… — ¡Pecado mortal! – exclamó el fraile – ¡Pecado mor- tal156 y de los más graves es el de matar a los indios, que son hombres, criaturas de Dios, según lo ha declarado a mayor abundamiento nuestro Santísimo Padre el Papa!… Y pecado sería, aunque fueran bestias, porque lo es el atormentar a cualquiera ser viviente por simple crueldad y dureza de co- razón. No está eso en el Decálogo, pero no empece; el Señor mandó que se dé descanso al buey y al asno, es decir, que se sea blando y bondadoso con ellos, y mucho más con los in- dios… – Y fray Buenaventura, considerando que el interés es uno de los móviles más poderosos del hombre, insistió en la razón material ya otras veces expuesta –: Además, los des- almados carniceros que los destruyen ¿no comprenden – aun mirando sólo a los intereses terrenales, sin cuidarse del cielo ni del infierno – que más trabaja y produce un indio vivo y sano que un indio mutilado o muerto?… Aunque la vida humana contara bien poco o nada para aquellos hombres, que se la jugaban sin pestañear a cada momento, la palabra ardorosa de fray Buenaventura, en me- dio de la noche, acompañada por el inacabable rezongo del mar, los crujidos de la nao, la luz mortecina del farol y las sombras que el balance hacía danzar en torno, causábales profunda impresión. A bordo, y bajo tan saludable influencia, jurábanse en aquel instante, horrorizados, no imitar a sus an-

156 Historia de las Indias, op. cit., libro III, capítulo IV, fray An- tón Montesino, Ego vox clamantis in deserto. (N.d.T.a.F.)

– 289 – tecesores y compañeros; una vez en tierra firme, a la luz del día y con los indios a su merced, puede que fuera otra cosa… — ¡Cuánta barbarie! – agregaba fray Buenaventura –. Todavía no os he contado, me parece, lo de aquel castellano que arrancó de los brazos de la madre a un chiquillo para darlo como ración a su jauría hambrienta157… — Ni lo de otro que, habiendo cierta noche perdido el puñal en un pantano que atravesaba con sus esclavos, cogió otro niño a su madre y lo sumergió de cabeza en el cieno, para que señalara el sitio donde habría de buscarse a la luz del día… Tales verdugos acaban por hacer odiosa nuestra santa religión, y Dios no puede perdonar tan gran pecado… Y de que la hacen odiosa tengo la prueba en un sucedido que atestigua el mismo fray Bartolomé. Todos, oliendo narración, se incorporaron o avanzaron la cabeza para oír mejor, y fray Buenaventura contó, en me- dio del mayor silencio:

157 Brevísima relación de la destrucción de las Indias, “De la isla Española” (N.d.T.a.F.)

– 290 – — Pues habéis de saber que el cacique Hatuey158 pasó de la Española a Cuba huyendo de los cristianos, y, apenas tuvo noticia de que algunos de éstos iban a llegar tras él, reunió a los indios y les dijo: “Ya sabéis que los cristianos pasan del lado de acá, y tenéis ejemplo de lo que con ellos ha ocurrido a muchos de los nuestros… Esa gente de Haití (que es la Española) viene a hacer lo mismo en Cuba. ¿Sabéis por qué? Pues no es sólo porque de natura sean crueles y malos, sino porque tienen un dios que adoran y quieren mu- cho, y nos sojuzgan y nos matan para que nosotros se lo busquemos”. Hatuey tenía al lado una cesta llena de joyas de oro, y agregó mostrándolas: “Aquí tenéis al dios de los cris- tianos. Hagámosle areitos (que son danzas y ceremonias) pa- ra propiciarlo, y quizá mande a los suyos que no nos hagan mal”. Bailaron delante de las joyas hasta caer rendidos, y el cacique Hatuey les dijo entonces: “Bien mirado, si guarda- mos este dios, al fin nos matarán para quitárnoslo. Más se- guro será que lo sepultemos en el río”. Arrojáronlo al agua, y Hatuey anduvo errante hasta que los españoles le cogieron por sorpresa con los suyos159 y resolvieron quemarlo vivo. Atado a un palo estaba Hatuey y un fraile franciscano hablá- bale de Dios y de nuestra fe, que el indio no conocía, exhor- tándolo a que creyese en ella si quería ir al cielo, donde ha- bía gloria y eterno contento, pues de otro modo iría a pade- cer perpetuamente en los infiernos. Hatuey, que le escucha- ba muy en silencio, le preguntó por fin: “¿Van los cristianos al cielo?” “¡Sin duda alguna!” – contestó el fraile. – ¡“Pues prefiero ir a los infiernos! – exclamó el cacique – por no estar

158 Jefe Taíno. (N.d.T.a.F.)

159 En 1512. (N.d.T.a.F.)

– 291 – donde ellos estén y no volver a ver hombres tan crueles. El infierno no puede ser peor que el cielo, en estando ellos”160.

— ¡Así, esos falsos cristianos hacen ciegamente creer que somos idólatras, adoradores del becerro de oro, y apar- tan de Dios muchas almas que se condenan y de las que se- rán responsables en el día del juicio!… Cuando fray Buenaventura remató su peroración ya mu- chos se habían retirado a dormir. Sólo quedaban escuchando al capellán, Rodrigo que había provocado su labia, Núñez que, bostezando, se hacía cruces sobre la inmensa boca abierta, y Paquillo, a quien desvelaba todo cuanto tuviese eco, sabor, color u olor de aventura.

160 Brevísima relación de la destrucción de las Indias, op. cit., “De la isla de Cuba”. (N.d.T.a.F.)

– 292 – — Tú, por lo menos, rapaz – díjole el fraile –, seguirás la buena doctrina y tratarás a esos infelices como si fueran hermanos… Así lo espero de tí. — Y así lo prometo a Su Reverencia, si es que así puede ser – contestó Paquillo –. No les querré mal, mientras no me hagan daño… Y si me hicieren daño, tampoco les haré mal… mientras pueda… Rióse fray Buenaventura del candor y la franqueza del chico, aunque sus propósitos no estuvieran de acuerdo con lo que Cristo nos enseña, y poniéndole la mano en la cabeza con expresión paternal, agregó gravemente: — No basta, no basta, muchacho. Dios manda que per- donemos a nuestros enemigos. — ¡Pues, por ahora van perdonados! – concluyó Paquillo corriendo hacia su coy.

– 293 – XVII LA VISIÓN DEL MAR DULCE

Las carabelas siguieron su vía con buen tiempo, sin dejar la costa, que era baja, con algunas alturas en segundo tér- mino, y que corría de Nordeste a Sudoeste. La tripulación mostrábase mucho más animada que de ordinario, presin- tiendo el fin del viaje, y Paquillo saltaba de contento pen- sando que iba a empezar verdaderamente su vida de aventu- ras y acercarse al logro de sus ingenuas aspiraciones. Con- tribuyó a la general alegría la celebración de la Nochebuena, con los elementos de que se podía disponer, es decir, bailan- do entre hombres solos, recordando el lejano hogar los que lo tenían, los que no las fiestas de su pueblo, y cantando en coro villancicos, que fray Buenaventura remató recitando, con marcadas cadencias, la vieja cántiga de Villasandino:

Generosa, muy fermosa sin mancilla Virgen santa, virtuosa, poderosa, de quien Lucifer se espanta; tanta fué la tu gran humildad que toda la Trinidad en tí se encierra, se canta. Placentero fué el primero gozo, señora, que hoviste cuando el vero mensajero

– 294 – te saluó y tú respondiste. Trujiste en tu seno virginal al Padre Celestial, al cual sin dolor pariste.

Pero de pronto tuvo que interrumpirse. Gritos y denues- tos vinieron a llamar la atención de todos. Era que acababa de producirse una de las acostumbradas reyertas entre Pedro Núñez y Santiago Corzuelo que, siempre a la greña, no acer- taban nunca a separarse, como matrimonio de cascarrabias que no deja pasar día sin trifulca para darse luego el gusto de hacer las paces. Esta vez disputaban, entre amenazas y de- nuestos, a propósito de cierta navaja de cachas que Núñez había hurtado a Corzuelo, y que no aparecía ni volvía a po- der de su legítimo propietario. Acostumbrados a estas bo- rrascas, que tronaban mucho sin que lloviera un cachete, los marineros rodearon a los contrincantes, azuzándolos y rien- do a carcajadas del sainete que se les ofrecía como fin de fiesta. Pero la disputa pareció más grave que de costumbre como que estaba en juego prenda de tan alto interés como la navaja. Pusiéronse ambos de ladrón y desvergonzado, de truhán, mal amigo y traidor, como no digan dueñas, y hubie- ran llegado seguramente a las manos a no gritar un alma ca- ritativa y bien inspirada que se acercaba corriendo el capi- tán. Desaparecieron los campeones, todavía jadeantes de las voces dadas, y la velada de Nochebuena dió fin con esto, pe- ro no así el pleito navajil… Al otro día, 25 de diciembre, las carabelas pasaron frente a un cabo que Solís llamó de Navidad, y cuya situación no se sabe a ciencia cierta, pues tanto puede ser la punta de la Isla Grande, actualmente llamada Acaya, como el pico de Paraty, a unas treinta leguas de Río de Janeiro.

– 295 –

El terral, calmoso, tendía a alejarlos de la costa, pero en tres singladuras avistaron un puerto, formado par la desem- bocadura de un pequeño río, puerto que el capitán general bautizó como de los Santos Inocentes, en celebración de la fiesta de la fecha – 28 de diciembre –. Surgieron y permane- cieron algún tiempo allí, porque el viento escaso no les favo- recía. Pero en cuanto empezó a soplar un tanto favorable reanudaron la navegación a lo largo de la costa; unas treinta y cinco leguas más lejos avistaron el cabo de la Cananéia, que llamaron así en honor de la Epifanía, y avanzando con rumbo sudoeste descubrieron la isla de la Plata, conocida hoy como de San Francisco, a veintisiete leguas más o me- nos de la Cananéia. De allí fueron a surgir frente a una tierra a la que más tarde se dió el nombre de Bahía de los Perdidos (o de Paranaguá), y de ésta, costeando siempre, pasaron a la vista de una isla vastísima y hermosa, la de Santa Catalina, cubierta de bosque alto, del que, aquí y allí sobresalían los airosos penachos de grandes grupos de palmeras. Doblaron luego el cabo de las Corrientes, llamado ahora de Santa Mar- ta Grande, a unas veinticinco leguas de Santa Catalina, y sin

– 296 – apartarse demasiado de la costa siguieron hasta avistar San Domingo de las Torres, y después de largos días, tan tranqui- los como los anteriores, el arroyo Chuy y los Castillos. — ¡Aquel viaje estaba visiblemente bendecido por Dios! – decía fray Buenaventura.

Poco después doblaban el cabo de Santa María y, dando vista a la isla de San Sebastián de Cádiz – hoy de Lobos (… de mar) –, entraban en un puerto que se llamó de Nuestra Señora de la Candelaria – Maldonado – el 20 de febrero de 1516, a los ciento treinta y cinco días de haber zarpado de Lepe. Llegaban así, con toda felicidad, sin el más leve con- tratiempo casi, después de un viaje, para aquella época y aquellas alturas, rapidísimo, y como llevados de la mano por la misma Fortuna, a las tierras y las aguas que buscaba el gran Juan Diaz de Solís, zahorí descubridor de tesoros. Echadas las anclas, el capitán general ordenó que la tri- pulación de las tres carabelas se armase de punta en blanco, como en las grandes solemnidades o como si fuese a entrar en batalla, y tomó otras disposiciones preparatorias de lo

– 297 – que pensaba hacer. Una de sus órdenes fué arrancar a los desventurados Alarcón y Marquina del lecho de dolor, a que habían caído de nuevo, hechos una piltrafa, desde que se zarpó de Río de Janeiro. Pero al saber que se les sacudía pa- ra que saltasen a tierra desde su potro de tormento, cobraron ánimo en la medida de lo posible – que no podía ser muy grande, dada su debilidad – y como si les invitasen a pasar del infierno al cielo. Las tres naos, inmóviles, acariciadas por las mansas aguas, parecieron solitarias y abandonadas mientras los ma- rineros se aprestaban en el entrepuente. Momentos después comenzaron a aparecer, apuestos y marciales de desgarrados que andaban, merced a los sesenta coseletes que, con sus armaduras de cabeza, había “prestado” a Solís el Rey católi- co. Cuando todo el mundo estuvo listo, echáronse al agua los bateles y Solís embarcó en el suyo con Marquina, Alarcón, fray Buenaventura y algunos remeros escogidos. Francisco de Torres hizo lo mismo con el maestro Diego García y de- más oficiales y Juan de Lisboa le siguió con los de la otra ca- rabela latina, salvo el despensero Martín García, que acaba- ba de sentirse tan enfermo que debió quedar a bordo. En las naos montaban la guardia los hombres imprescindibles para su seguridad, y en la Portuguesa los sirvientes de las dos lombardas. De los que bajaban a tierra, amén de sus armas habituales, éstos llevaban hachas de abordaje, estotros picos y azadones, y uno de ellos una gran cruz hecha con dos mas- telerillos de repuesto. Apenas las proas tocaban la arena de la orilla, saltaban los hombres a tierra e iban a formar fila cerca del capitán ge- neral, que ya tenía a su lado a fray Buenaventura, de sobre- pelliz, a Alarcón y Marquina, de espadín al cinto pero amari- llos y trémulos de piernas, y detrás a Francisco de Torres,

– 298 – Juan de Lisboa y Diego García de Moguer. El alférez Melchor Ramírez se había puesto a la cabeza de la “gente de desem- barco”, que era, en suma, casi la totalidad de la tripulación. La marinería daba frente al mar, los jefes a tierra, y to- dos guardaban religioso silencio cuando Juan Díaz de Solís avanzó un paso, desenvainó, hizo relampaguear la espada en el aire y cortó una rama del árbol que a su derecha tenía. Dió una breve orden, repetida por el alférez, y los del hacha de abordaje secundaron inmediatamente la acción del capitán general, abatiendo ramas y gajos de otros árboles, mientras los de pico y azadón comenzaban a abrir ancha y larga zanja, y con la tierra extraída levantaban un simulacro de muralla. Otros, entretanto, abrieron dos hoyos en aquella tierra que las herramientas labraban por primera vez, y en uno de ellos plantaron el árbol de la horca; el otro era para el árbol de la cruz.

— ¡A vos, si os place, padre! – dijo Solís a fray Buena- ventura, haciendo con la espada una señal. Sonaron trompetas, tronaron las lombardas desde a bor- do, puso Juan Díaz de Solís la rodilla en tierra, imitáronle los demás y el dominico, ayudado por dos marineros, plantó la

– 299 – cruz en el segundo hoyo, y bendijo con el mismo amplio ademán a la nueva tierra y a sus conquistadores que humi- llaban la cabeza ante el símbolo cristiano: — ¡In nomine Patris, et Filii et Spiritus Sanctus! — ¡Amén! – contestaron todos a una voz. Solís se levantó con el estandarte de Castilla en la sinies- tra mano, y blandiendo en torno suyo con la diestra la espa- da desnuda, gritó por tres veces: — ¡Esta tierra por el Rey de España! Una aclamación vibró en los aires e irradió en la inmen- sa soledad. Puestos en pie de un salto, enarbolando las armas y blandiéndolas sobre su casco de acero, los rudos marinos, llenos de entusiasmo, repitieron sus vítores hasta que, a una voz del capitán general, guardaron silencio, palpitantes to- davía. Sentóse Solís en un tronco de árbol abatido, rodeólo el estado mayor, la tropa rectificó su formación, y los marine- ros Pedro Núñez y Santiago Corzuelo salieron de las filas a una señal del alférez y avanzaron tres o cuatro pasos hacia el capitán general, que iba, por primera vez en aquellas tierras, a ejercer la más importante de sus funciones, administrando justicia161. Invitado a exponer sus quejas, Santiago Corzuelo acusó a Pedro Núñez de haberle hurtado una navaja que le era muy

161 Capitanía del Rey, ver mapa. (N.d.T.a.F.)

– 300 – útil y tenía en grande estima, exigiendo la restitución de la prenda y el castigo del culpable. Pedro Núñez, a su vez, de- fendióse de la acusación, alegando que si había tomado la navaja era por la amistad que hasta entonces lo ligaba a Cor- zuelo, sin el menor propósito criminal, y con la firme inten- ción de devolverla en cuanto cortase la punta de un cabo suelto que chicoteaba. Por desgracia suya, la navaja, esca- pándosele de la mano, cayó al mar, de donde era imposible sacarla. Corzuelo insistió en que la pérdida del objeto le cau- saba gran perjuicio y en que Núñez, responsable de ella por haberlo tomado ocultamente y sin consentimiento de su dueño, que era él, debía devolvérselo, y en caso de imposibi- lidad pagárselo con creces, visto lo que costaría reemplazar- lo y salvo el mejor parecer de la justicia. Oído lo cual, y sin llamar testigos por creerlo innecesario, Juan Díaz de Solís fa- lló en nombre de S.A. el Rey de España, don Fernando el Ca- tólico, este pleito de menor cuantía, diciendo: — Devuelva Pedro Núñez a Santiago Corzuelo la navaja que le ha tomado sin su voluntad, y si no la hubiere, per cua- lesquiera razones, de fuerza mayor u otras, páguele la canti- dad que sea necesaria para que se avíe con otra de las mejo- res que vienen para los rescates, en buena moneda contante y sonante, sin estimación de daños y perjuicios, por no haber lugar. ¡Y esta es la justicia del Rey! Diéronse por contentos los litigantes, debidamente alec- cionados de antemano a lo que sospechó la tripulación, y desenrollando un gran pliego que en la mano llevaba avanzó al medio el escribano Alarcón, quien, con voz flaca y sin in- flexiones, leyó el acta en que se había puntualizado la situa- ción exacta de aquella tierra, y la tan solemne toma de pose- sión en nombre del Rey, de ella “e todo su partido e provin- cia”, de acuerdo con las instrucciones de Su Alteza.

– 301 – El tronco en que se había sentado Solís para administrar justicia sirvió de bufete al extenuado Alarcón, que tendiendo el acta en lo más llano, y poniendo junto a ella el tintero de cuerno, ofreció la barbada pluma primero al capitán general, como es de rigor, y sucesivamente a los demás para que to- dos la signaran como testigos. La mayoría, sin excluir al maestre Diego García, limitóse a poner una cruz, a cuyo lado extendió el escribano el nombre de cada cual. La ceremonia había terminado, la marinería rompió filas, dió Solís orden de que se les distribuyese doble ración de vino en honor del acontecimiento, y rodeado por Francisco de Torres, Juan de Lisboa, fray Buenaventura y Diego Gar- cía, echó a andar lentamente, como de paseo, por entre los matorrales y los árboles bajos de aquella costa que, desde ese día y con las tierras que la prolongaban, pertenecía ya legítimamente al Rey Fernando y a la corona de España. Abríanles paso Rodrigo Rodríguez y Paco del Puerto que con sendas hachas de abordaje abatían las ramas y la maleza cuando estorbaban el paso, trazando una especie de tortuoso sendero, nueva aunque no imborrable señal de la toma de posesión. El calor era ardiente, pero una vez en la cumbre de una colina no muy alta que tenían a su izquierda, viéronse recompensados por la brisa marera que les enjugó el rostro. Sentáronse a respirar junto a un bosquecillo que los abrigaba del sol y cuya melena verde levemente agitada entonces por el aire, debían alborotar y desgreñar muy a menudo los pamperos y las sudestadas, a juzgar por lo retorcido de sus ramas y lo inclinado de sus troncos. Desde la colina veían a sus pies el puerto de Nuestra Se- ñora de la Candelaria entre las dos puntas, del Este y de la Ballena, y las islas que la abrigan y defienden de los vientos de mar afuera. Y allí, según cuentan al unísono los cronistas

– 302 – de la época y muchos historiadores venidos después, con- templaron aquella memorable tarde lo que luego, y desde aquel mismo punto, no han vuelto a ver ojos humanos. Espe- jismo, visión profética, sugestión de Solís que conocía el pa- raje ¡quién sabe! ni ¡qué importa!… El hecho es que, más allá, a su izquierda, vieron tendido y en calma el mar inmen- so y verde que acababan de surcar, y a su derecha, como llamándoles, otro inmenso mar, pardo, majestuoso y tranqui- lo.

— ¡Mi mar! – pensó el gran marino.

Y a sus espaldas, como otro mar, el tercero, dormitaba la campiña cubierta de bosquecillos y de hierba que los soles habían dorado y enrojecido, con la silueta del Pan de Azúcar en la lejanía, y cruzada por largas cuchillas sinuosas, corta- das por riachos y arroyuelos cuyo paso revelaba el verdor más fresco e intenso de la vegetación. Ni una sola figura hu- mana restaba en aquel momento solemnidad al paisaje gran- dioso que animaban únicamente la brisa meciendo las altas hierbas, las aves rapaces trazando círculos en la atmósfera o rayándola como una flecha, algún pajarillo cantando en las ramas, alguna pieza mayor que prestaba vida a los matorra- les. Caía el sol y las nubes iniciaban una maravillosa fantas- magoría de formas fugaces y de cambiantes colores.

— ¡Hermoso cielo, hermoso suelo! – exclamó fray Bue- naventura – Si el uno hace que me crea en Andalucía, el otro sólo aguarda al hombre para convertirse en un vergel.

— Y el hombre llegará, ya ha llegado, padre, con la ayu- da de Dios – dijo Solís –. Pero todavía habéis de admirar co- sas mejores y de más provecho.

– 303 – — Lástima que no haya aquí algunos indios para ver qué catadura tienen – suspiró el dominico. — Sí que los hay, pero no los vemos, porque andan se- guramente disimulados en la espesura y sin perdernos de ojo desde que atisbaron las carabelas. — ¿Son de temer? — Por lo pronto recelan de nosotros y hurtan el cuerpo – dijo Torres –. Además, no tendríais tiempo de doctrinarlos, padre, porque no sabéis su lengua, comienza a refrescar el sudoeste y, por lo que pueda acontecer, bueno es apresurar- se a ganar las naos, lo que no os dejará tiempo de aprender- la. — Eso pienso – apoyó Solís. Mientras bajaban, desandando el improvisado sendero, el capitán general oyó que Rodríguez, al señalar el pardo mar que creían ver o que en realidad veían desde lo alto, infor- maba a Paquillo con tono magistral: — Esa mar oscura que estás viendo a tu derecha, es el paso que vamos buscando hacia la otra mar que vió Vasco Núñez de Balboa. Sonrió Solís y, no queriendo replicar directamente a su criado, se encaró con fray Buenaventura y le dijo en voz bien alta: — Admire vuesamerced, padrecito, una de las mayores maravillas de Dios en estas tierras. Las aguas que está vien- do, de color menos azul y mucho más turbio que el de las aguas hondas, no es brazo de mar, como se diría dado que no se le ve término ni en el confín del horizonte. Mire allí, donde los colores se mezclan y se confunden en un estrecho – 304 – espacio que parece una tinta sinuosa. Pues allí mismo aca- ban las ondas salobres del Océano y empiezan las dulces de otro mar desconocido…

— ¡Un mar dulce! ¡oh portento! – exclamó el fraile admi- rado, mientras Rodrigo y el grumete abrían tamaña boca.

— Sí – continuó Solís – Un mar dulce, como acabáis de decir. Mar por su incomparable grandeza, lo otro por la dul- cedumbre de sus aguas. Pero no es mar, sino río, un río que por su anchura que nada interrumpe, es el más portentoso que hasta aquí hayan visto ojos humanos.

Alzó el fraile los brazos al cielo y permaneció un instante como pasmado.

— ¡Eso un río! – exclamó por fin – ¿Qué hacemos enton- ces con el Guadalquivir, el Tajo y el Ebro de que estábamos tan ufanos!…

— Esos y otros de Europa, los mayores, son simples arroyos al lado de ése, que no tardaremos en remontar, pa- drecito… En sus riberas encontraremos nosotros las cosas materiales en cuya busca venimos, y vos muchos infieles idólatras que arrancar al demonio… Y puede que, hala hala, aguas arriba y con la ayuda de Dios, lleguemos adonde yo me sé…

— ¡A ello y lo más pronto posible! – exclamó el fraile echando a andar con mucha prisa, como si los indios lo aguardaban a los pocos pasos. – ¡Bendito sea Dios que me ha permitido ver tanta grandeza!

Y siguió sendero abajo sin apartar la vista del estupendo río que, sin orillas, iba, en lontananza, a reunirse con el cielo.

– 305 – — ¡Con que no es sino un río! – dijo desabridamente Ro- dríguez que se había ido quedando atrás.

— ¿Le querías más talludito? – preguntó burlonamente el grumete.

— Como grande es grande, no lo niego – replicó Rodri- go. – Pero es dulce, y preferiría un brazo de mar, aunque fue- se de dos dedos de ancho…

— Pero, ¿por qué? – preguntó el chico, sorprendido.

— ¿No comprendes, bobo, que un río no nos llevará a ninguna parte, pero que un estrecho, aunque lo fuera más que el de Gibraltar, podría darnos paso hacia el otro mar, al que tiene en sus riberas tanto oro y perlas y riquezas de to- das clases?

— ¿Acaso un río no puede llevarnos también? Y ¿quién nos dice que en estas tierras no hay otro tanto y más de eso de que hablas? – objetó sesudamente el chico.

Una vez a bordo Solís se convenció de que las naos no corrían peligro alguno en el puerto de Nuestra Señora de la Candelaria, y aplazó la partida hasta el amanecer del día si- guiente. Con la doble ración de vino y alguna añadidura a la comida habitual, la tripulación hizo festín y pasó regocija- damente la velada. Pero a la madrugada leváronse anclas y las carabelas, una detrás de otra, echaron a andar lentamen- te, con poco trapo, a la vista de los médanos de la costa y de un cerro aislado y cónico de poca altura, y de varios pliegues del terrera, más elevados que el resto y a los que se daría luego el nombre de Cuchillas de las Animas o Cuchilla Gran- de. Entre los riscos y matorrales de la ribera solían ver gente

– 306 – que se deslizaba como observando los navíos. Aquí y allí, al- zábanse misérrimos grupos de chozas, que no merecían lla- marse aldeas, y de ellos salían hombres y mujeres que con grandes ademanes parecían ofrecerles diversas cosas, invi- tándolos a desembarcar. Llegaron con esto a la desemboca- dura del río que hoy se llama de Santa Lucía162, y Solís, pen- sando que podía ofrecer buen abrigo, envió el batel para que echara la sondaleza, y supo, así, que efectivamente dentro de la barra tenía hondo y ancho cauce, muy propio para fon- deadero.

Favorecidas por la marea las carabelas transpusieron la barra, abriendo la marcha la Latina de Rodrigo Alvarez de Cartaya163, que era la menor, y siguiendo la de Torres y por último la Portuguesa. Echaron anclas y Solís desembarcó junto con sus obligatoriamente inseparables Alarcón y Mar- quina, para quienes cada escala venía a ser como una resu- rrección.

Ameno era el sitio, tan abundante en salvajina que ella sola aseguraba el abastecimiento de la tripulación, y Solís re- solvió detenerse allí para recorrer y carenar sus naves, bien necesitadas de ello después de tan larga navegación. Milla- res de patos y otras aves acuáticas poblaban el río, y al caer la tarde era su número tan prodigioso que de la una a la otra orilla tendían una viviente alfombra de pluma.

162 ? El río Santa Lucía constituye el límite natural entre los De- partamentos de Florida y Canelones, entre Canelones y San José, y más al sur, entre San José y Montevideo.

163 Juan de Lisboa. (N.d.T.a.F.)

– 307 – — Este río no arrastra agua sino patos – observó una tarde Rodrigo Rodríguez, que fué con ello su padrino de bau- tismo, pues Río de los Patos le llamaron todos.

No los espantaba ni ahuyentaba la presencia del hom- bre, sin duda porque los indios, dedicados preferentemente a la caza mayor, pasaban poco o nada por aquellos parajes donde era escasa. Mataron los de Solís cuanto quisieron, ora con ballesta, ora a palos y a pedradas, rara vez con arcabuz para economizar la pólvora. Pero cierto día, pese a sentirse tan malo, el despensero Martín García anduvo visitando los pañoles de las carabelas para hacer el recuento de las vituallas existentes, y por la tarde Solís que le vió acercarse pálido y trémulo, le dijo: — Métete en cama, Martín, que tienes muy mal sem- blante. — ¡No se trata de eso, señor! – balbuceó el despensero – Cuéstame decirlo, pero ¡me lo manda el deber!… Hoy, al abrir una barrica de salazón me encontré con que estaba en- teramente podrida…

– 308 – — Ya extrañaba yo – exclamó Solís – que aún no hubiera queja de lo que han hecho embarcar esos señores de Sevilla. Pero ¡bah! el daño no es tan grande… Arroja al agua la barri- ca, y abre otra. — Es lo que hice al momento, señor. Mas es el caso que la segunda y la tercera barricas resultaron tan malas como la primera, si no peores… Estamos amenazados de quedarnos sin víveres… Ya se ve: las nieblas, los grandes calores, el re- zume habrán humedecido las carnes… — Pero, acaso ¿se ha podrido todo? — Todo, sí, señor – contestó compungido el despensero –. La carne nada dentro de las barricas en un líquido espeso, negro y hediondo, y los mismos perros no la querrían. — ¡Mal rayo! — ¡No soy culpado, señor!… — Bien lo sé. Pero ¿eso pasa en las tres naos? — En las tres naos, sí señor. El capitán general había ido enardeciéndose y, enajena- do de cólera, pateando el suelo, prorrumpía en denuestos e imprecaciones contra los nunca bastante maldecidos oficia- les de la Casa de Contratación, culpables de aquel grave tro- piezo que en alta mar pudiera haber sido catástrofe. ¿Cómo perdonarles que salazones preparadas para durar dos años por lo menos se corrompieran sin causa conocida a los pocos meses de salir de España? ¿No la habrían querido así por criminal malevolencia? Tan violento fué el desahogo de Solís que ninguno de los testigos de la escena se atrevió a aproximarse; todos com-

– 309 – prendieron, sin embargo, la gravedad de lo que tanto le enfu- recía, y no fué poca su sorpresa al ver que el fogoso capitán se calmaba tan repentinamente como se había irritado. Lejos estaban aquellos en quienes hubiera hecho su cólera efecti- va… — Vamos a ver el daño – dijo a Martín García. No quedaba, efectivamente, una sola barrica de carne que se pudiera aprovechar. — Al agua con toda esa podre, pero guarda las barricas – ordenó Solís –. Han de servirnos, porque no faltarán por es- tos matorrales venados y otras piezas mayores que salare- mos y secaremos tan ricamente. ¡Una higa para esos señores de la Casa! Tranquilizada como él, la tripulación que se había pues- to instantáneamente al tanto de lo ocurrido, entretúvose aquella tarde y la mañana siguiente en pescar, y aun en sacar del agua a mano limpia los peces que en cardúmenes acudie- ron al opíparo banquete que se les ofrecía. Los jefes y los ofi- ciales a quienes Solís llamó por fórmula a consejo, mostrá- ronse igualmente tranquilos: Dios y aquellas tierras provee- rían… — Apenas vuelva de la entrada que pienso hacer en es- tos días, nos ocuparemos de reparar el daño y tendremos más y mejores vituallas que antes – dijo el capitán general, dando por terminada la reunión, y la desagradabilísima aventura pasó a segundo término, como cosa de poca mon- ta… Durante todo un mes resonaron en aquella magnífica so- ledad los martillazos de carpinteros y calafates, los gritos y los cantos de los marineros, que se solazaban en la ribera,

– 310 – las voces de llamada o de triunfo de los cazadores cuando, muy excepcionalmente, descubrían o cobraban alguna pieza mayor. Un venado o un gamo era conquista celebrada como acto glorioso, y luego daba a la humilde comida de a bordo relieves de mesa señorial. Sólo de vez en cuando observábanse en la maleza, entre dos luces, a inmediaciones del improvisado desembarcadero o algo lejos, bajo los árboles, movimientos insólitos, desli- zamientos de animales intimidados, disponiéndose a la fuga, pero cuando los cazadores acudían a todo correr nada en- contraban, nada descubrían, ni una huella, ni un simple ras- tro, nada sino algunos tallos quebrados y, en torno, las hojas de las plantas bajas limpias del polvo que siempre las cu- bría…

– 311 – XVIII

LA PRIMERA TUMBA

— ¿Cómo pensáis llamar a éste, que bien podría apelli- darse mar dulce, según ya comienza a decírsele? – preguntó fray Buenaventura a Solís mientras la Latina de Rodrigo Ál- varez de Cartaya, en la que iban embarcados, costeaba len- tamente las barrancas de San Gregorio, aguas arriba del gran río. Navegaban a poco más de una legua del puerto de los Patos, donde habían quedado las dos naos mayores. Deseando ser el primero, si no el único, que reconociera aquellos parajes, el capitán general había dejado a Torres como su reemplazante en la Portuguesa, y a Diego García de Moguer al mando de la otra carabela, para embarcarse en la Latina de menor calado y excelente velera. Cuadró la casua- lidad de que la dolencia del despensero Martín García, ini- ciada en la Candelaria, había exigido, agravándose, la pre- sencia en la nao de fray Buenaventura que llevó al enfermo los pocos auxilios corporales que su experiencia le permitía ofrecer, y los espirituales que su carácter de sacerdote le im- ponían. El buen fraile, siguiendo lo que aconsejaba la medi- cina usual entre los descubridores de Indias, comenzó por sangrarle y propinarle una poción compuesta de ajos maja-

– 312 – dos y cocidos en vino, mandando luego que se arropara bien para sudar cuanto fuera posible. Pero los dolores no cejaron, aumentó el frío y con él la calentura del paciente que ya co- menzaba a darse por muerto. Lamentándose de no tener a la mano algunos grillos – o siquiera cigarras, a falta de éstos – para tostarlos, molerlos y dárselos en vino – que es maravi- llosa medicina –, el dominico ensayó entonces otra pócima compuesta del caldo de las aceitunas conservadas mezclado con aceite, y bien caliente, pócima de la que Martín García bebió abundante cantidad, sin otro resultado que el de que se le revolvieran las entrañas y aumentaran su fiebre y su postración. Temeroso el fraile de que muriera de un momen- to a otro, al zarpar la Latina no quiso desampararle y encon- tróse, así, incorporado a la expedición del capitán general. Con éste iban, también, aunque sin mayor entusiasmo, sus obligados centinelas los oficiales que se encontraban tan agradablemente en el puerto de los Patos, Rodrigo Rodrí- guez, en su calidad de asistente y Paquillo en la suya de paje extraoficial de Rodríguez. — Pues, salvo algún hecho notable que me aconseje otra cosa – dijo Solís contestando a la pregunta del dominico –, he pensado en llamarle Río de Santa María, en honor de Nuestra Señora que tan visiblemente nos ha protegido apar- tándonos hasta aquí de peligros y dificultades. — “Oh María, puerta e vía de salud e de folganza” – dijo el fraile, recordando otra vez a Villasandino – El viaje ha sido en verdad milagroso, y aplaudo tan piadosa intención… Interrumpióle en esto un marinero acudiendo apresura- do a avisarle que Martín García estaba en las últimas y que clamaba confesión.

– 313 – Corrió el fraile al camaranchón en donde el despensero efectivamente agonizaba, y sentándose junto a él, como y en lo que pudo, ya no se apartó de su cabecera hasta que, des- pués de confesarse, divagando en el delirio de la agonía, rin- dió el último suspiro.

La noticia del fallecimiento del despensero cundió en la nao y la tripulación se condolió, pero también se aterró.

— Naufragio al partir, difunto apenas llegados… malos vientos nos soplan – comentó gravemente Rodrigo Rodrí- guez, olvidando todas las bienandanzas del viaje.

— ¡Oye! – exclamó el grumete, agregándole al oído –: ¿Te acuerdas de la gitana de Lepe? Pues señaló a ese que ha muerto entre los que no habrían de volver…

— Toma, es verdad. ¡Mala peste!…

— Y ¿no sonó la campana de Velilla?164 – agregó el gru- mete.

— Quita allá, bobo, que eso va con los reyes y no con un pobre despensero como Martín García… Si tañó la campana de Velilla, por don Fernando habrá sido, que bien malejo le dejamos, y aunque yo le desee mil años de vida… Pero, aho-

164 ? Se refiere a una campana real que existió en la ermita de San Nicolás de Bari de Velilla de Ebro y que tenía la propiedad de sonar por sí sola anunciando desgracias, sin ninguna mano humana que la tocase. Era pues una campana agorera. (Wikipedia/BNR.) Ver “Notas.”

– 314 – ra que lo pienso, no abras esa boca… esos malos agüeros quitarían el ánimo a la gente… — Bien has recordado tú lo de la carabela zozobrada, que para mí fué suerte, pues sin eso no estaría aquí… – dijo el chiquillo – Pero descuida, que no despegaré los labios. — Lo de la carabela lo sabían todos, y no había de faltar quien lo mentara, mientras que lo de la gitana que Dios con- funda, sólo nosotros lo sabemos. Con tiempo bonancible que “la muerte del despensero no había perturbado, como no lo perturban jamás las cosas huma- nas”, según observó el filosófico Rodrigo, la Latina continua- ba navegando muy mansamente, dobló la punta de Santa Bárbara, donde hoy prospera la Colonia del Sacramento, de- jó atrás la pequeña isla, aún no bautizada, pero más tarde tan mentada, de San Gabriel, los islotes inmediatos, y siguió cuan cerca pudo de la costa, aquí y allí dominada por colinas y riscos y cubierta de vegetación que reverdecía, pasados ya los rigores del verano. Al caer la noche, después de largas oraciones por el des- canso del alma del difunto, fray Buenaventura salió a respi- rar sobre cubierta, al tiempo que Solís previendo una noche obscura, mandaba fondear en mitad del río, lejos de todo ataque posible desde tierra – había creído observar aunque sin temerlo, mayor movimiento de gentes en la costa – y como precaución necesaria para no varar en alguno de los numerosos bancos de arena que dificultaban la navegación. Mientras los marineros recogían velas y echaban el an- cla, vigilábalos Solís desde la toldilla y fray Buenaventura y los oficiales reales se reunieron con él.

– 315 – — El desventurado ha muerto como un justo – dijo el fraile aludiendo a Martín García –. Me parece que irá dere- cho al cielo. — Todo despensero ¿no ha de pasar antes por el Purga- torio, padre? – preguntó el factor Marquina. — Conocéis el paño… – replicó donosamente fray Bue- naventura –. Pero hay sastres de sastres. Entre despenseros, como entre factores y escribanos, ha de haber de todo, como en la viña del Señor, y mejorando lo presente. De Martín García nada hay malo que decir, sino mucho bueno, y Dios lo premiará. — Era leal vasallo y servidor de Su Alteza – terció Solís – . Y, para honrar su memoria, en la primera tierra que toque- mos ha de dársele cristiana sepultura, y esa tierra llevará de hoy en más su nombre. — Me parece muy acertado – dijo Alarcón. — Los humildes serán ensalzados – agregó el dominico – , y este hombre que lo era tanto, tiene ganado ese recuerdo. Me honraré depositándolo yo mismo un rincón de tierra bendita. — La tumba del marino debe ser el fondo del mar, don- de sirva de pasto a los peces y se incorpore dentro de su elemento a la vida universal – dijo Solís –. Pero ni Martín García era mareante ni por aquí falta espacio para que des- canse en tierra… Fray Buenaventura carraspeó y mostró su disgusto al oír hablar del vientre de los peces como tumba del marinero, y sobre todo de esa incorporación a la vida universal, que es- taba oliendo a herejía.

– 316 – — Para hablar de otra cosa – dijo el ex gordo Marquina, a quien no agradaban las conversaciones fúnebres –, yo qui- siera saber cómo ha de llamarse el gran río en que estamos fondeados y que somos los primeros en surcar… Sé que algo se ha hablado al respecto, pero nada se ha decidido, aunque ya me parece hora… Yo votaría, si se me pidiese mi opinión, considerando el acierto y la seguridad con que nuestro gran capitán nos ha conducido hasta aquí, como guiado por la mano de Dios, yo votaría, digo, porque se le diera su nom- bre, que tan bien suena: Río de Solís… — Otra cosa he dispuesto para agradecer evidentes y al- tísimas mercedes – contestó Solís – y ya lo sabe y lo aprueba fray Buenaventura: pienso llamarle Río de Santa María. — Ante ese nombre desaparecen y se humillan todos los demás – dijo Alarcón. — Verdad es – asintió Marquina –. Pero no habéis de negarme que, pese a la modestia de nuestro capitán, no hu- biera estado mal llamarle Río de Solís, y aun mejor Mar Dul- ce de Solís, como ya empieza a decirle nuestra gente en sus conversaciones. — Si no le doy mi sobrenombre – dijo Solís – no es por modestia, virtud de que carezco, sino por orgullo, mi gran pecado, ¿no es así, padre? Tengo en primer lugar el de bauti- zarle como de Nuestra Señora, y en segundo, ¿cómo había de satisfacer mi orgullo si yo mismo diera mi nombre a estas aguas y estas tierras? Sería necia vanidad, no orgullo. Otro gallo me cantara si presentes y venideros la apellidaran así, pues eso sería gloria otorgada por los únicos que pueden darla… Si soy orgulloso, señores, no soy vano, y nuestro ca- pellán absolverá el pecado en premio de la franqueza.

– 317 – Riéronse todos, tan campechana y discretamente había dicho aquello el capitán general, y la plática tomó otros rumbos dejando, al fin, pendiente el bautizo del río. Vueltos al uso de sus pocas o muchas facultades físicas y mentales, suspendidas hasta entonces por el mareo, Alarcón y Marquina estaban ganosos de iniciar cuanto antes sus fun- ciones, pues hasta ese momento permanecían con las manos vacías y sin partida alguna que asentar en los libros como tercio del rey. Nada se había alcanzado, nada se había resca- tado, salvo el condumio para la tripulación en tierras del Brasil, y eso era pérdida, no ganancia. Las tierras que acaba- ban de descubrir y que tenían a la vista estaban evidente- mente pobladas, pues ya muchos naturales asomaban a la costa, y los navegantes habían señalado algunas cabañas, que a todo se parecían menos a viviendas humanas. Los primeros rescates no podían tardar. ¿Qué les reservaban aquellas tierras? ¿Oro? ¿Plata? ¿Piedras preciosas? ¿Cosas de poco bulto y mucho precio, o al revés? De todo había en In- dias, según las regiones, y la imaginación del factor y del es- cribano se complacía en hacerles creer que ésta rebosaba de todo eso y mucho más… Porque sino ¿a qué habrían venido? El viaje propiamente dicho quedaba terminado, hallábanse donde podían y debían comenzar a aprovechar de sus resul- tados en bien de Su Alteza y en el propio… Con palabra más discreta, Solís abundó en el mismo sen- tido: si no encontraban lo que él creía y esperaba y que val- dría más que el oro, porque sería la puerta abierta para ir luego a donde las riquezas desbordaban, de allí no habían de volverse con las manos vacías, y al tocar de nuevo en Espa- ña no tendrían por qué envidiar a los demás mareantes, es- pañoles o portugueses. Fray Buenaventura, que bostezaba hacía buen rato, levantóse de pronto y se retiró diciendo que

– 318 – iba a rezar junto a los restos de Martín García antes de ganar el lecho. Esta fué la señal que puso fin a la reunión. Y todos durmieron tranquilamente y llenos de esperanzas, mecidos por el gran río, arrullados por el murmullo de la corriente que lamía los flancos de la nave. A la madrugada siguiente la Latina levó anclas y siguió navegando aguas arriba. Poco había andado cuando llegó cerca de una isla, o más bien islote, de roca granítica, cubier- ta de tierra fértil, ligeramente accidentada, y como de una legua de perímetro. Hallábase plantada en pleno río, a corta distancia de la ribera de levante, por la que algunos naturales habían seguido, entre arboledas y malezas, la lenta marcha de la nao. Solís, no viendo en la costa firme sitio adecuado para desembarcar, o deseoso de que su despensero descansase en tierra hasta la eternidad, al abrigo de profanaciones, señaló el islote para abrir en él su tumba; fondeó la carabela otra vez en la fuerza del río, botóse una embarcación después de haber depositado en ella una caja mal desbastada que era el ataúd de Martín García, y embarcados los marineros, y con los remos en alto, fueron a su vez a sentarse a popa, Solís empuñando el gobernalle, fray Buenaventura y los oficiales del rey. En pocas bogadas llegaron a una estrecha playa de are- na. Algo más lejos, en lo alto de un terreno, abrióse un hoyo, bendíjolo el capellán, bajóse al fondo el ataúd, y después de los responsos, rezados con verdadera unción si no con dolor verdadero, la tierra suelta volvió a caer a grandes paletadas, hasta igualar el suelo que la hierba no tardaría en cubrir. Una cruz hecha con dos espeques señaló luego, la primera tumba

– 319 – de cristianos y españoles abierta en tierras del Plata, en la is- la que desde entonces se llama de Martín García.

– 320 – XIX TRAGEDIA

Vueltos a bordo, la Latina, aunque con poco paño, siguió venciendo la corriente y acabó por acercarse a la costa oriental en un punto rodeado de islotes que pareció a Solís el más cómodo desembarcadero. Ordenó, pues, que se surgiera junto a una isla pequeña que parecía partida en dos, e hizo botar la barca grande. En la certeza de que por allí había in- dios, deseaba apoderarse de algunos o ponerse al habla con ellos para ver de conseguir los bastimentos que en breve iba a necesitar la armada, y quería, a la vez, averiguar si allí o cerca de allí había metales o cosa que los valiera. Marquina, Alarcón y fray Buenaventura estaban muy dispuestos a des- embarcar con él, pero se opuso, como en el Brasil, a que el capellán lo acompañara. — No haré sino ir y volver para preparar el terreno – le dijo Solís –. Prefiero que os quedéis a bordo. Rodrigo Alvarez es poco enérgico con su gente, que, en honor a vuestros há- bitos no se atreverá a desmandarse… Ya desembarcaréis en cuanto veamos qué recibimiento nos preparan los naturales. Como si quisieran contestar con los hechos a Solís, por entre los árboles de la orilla, en tierra firme, comenzaron a aparecer en ese punto algunos salvajes, hombres, mujeres y hasta niños, que alzaban los brazos mostrándolos sin armas, hacían insistentes demostraciones de amistad y ofrecían,

– 321 – como los del Brasil, diversos comestibles – granos, raíces y legumbres – poniéndolos en el suelo y alejándose para signi- ficar que eran presentes. Pero con gran desencanto de la mayoría de los marineros no mostraban objeto alguno de metal ni parecían poseerlo siquiera. Eran erguidos y bien proporcionados, de tez aceitunada, más obscura en algunos, los hombres con el cabello atado en la nuca y plumas visto- sas en lo alto del cráneo, barboto en el labio y una pampani- lla atenuando apenas su completa desnudez; las mujeres de cabello suelto, tatuadas las sienes, la frente y la nariz, algu- nas con sus críos a la espalda. Esto vieron los españoles des- de a bordo, y observando las obsequiosas demostraciones de indios e indias, fray Buenaventura insistió entusiasmado: — ¡Mansa y generosa gente! ¡Da lo que tiene, ofrece su amistad!… Permitid que desembarque con vosotros para evangelizarla! — Ahora no, padrecito – contestó Solís –. Más tarde se- rá, Dios mediante. Cinco marineros, entre ellos el grumete Francisco del Puerto, aguardaban ya en las bancadas de la embarcación. Solís había ordenado a Rodrigo Rodríguez que se pusiera a las órdenes de fray Buenaventura; de modo que a bordo quedaban éstos, el piloto y ocho hombres, once en todo. Con el capitán general iban Marquina, Alarcón, cuatro remeros y el grumete, que bogaban vigorosamente hacia la costa. Para demostrar a los españoles que los dejaban amisto- samente en plena libertad, los naturales manteníanse apar- tados de los obsequios puestos en el suelo, señalándolos con insistencia. El piloto, fray Buenaventura, Rodrigo y los mari- neros de la Latina, seguían con interés el desarrollo de la es- cena, los unos asomados a la borda, los otros encaramados

– 322 – en los obenques. Tanto los de la barca como los de la nao aguardaban, en la más completa confianza y tranquilidad, el primer encuentro con los habitantes de la tierra que acaba- ban de descubrir. — Tiene razón fray Buenaventura – dijo Solís al ponerse en pie para desembarcar de un salto – Es gente mansa y na- da tonta al parecer. — Un poco de tontería no estaría de más – exclamó Alarcón pensando en los rescates. Echóse un rezón, amarróse para mayor seguridad la bar- ca a una piedra que sirvió de proíz, y Paquillo, muy malhu- morado, recibió la orden de quedarse guardándola. A la cabeza de su gente y alzando también los brazos en señal de amistad, Solís avanzó hacia los indios subiendo la cuestecilla cubierta de hierba que de ellos le separaba. El paisaje era hermoso y apacible, con leves ondulaciones, ar- boleda baja, más allá oteros de arena dorada, pajonales, chaparrales, todo envuelto en una atmósfera diáfana, bajo el sol radiante y un cielo de seda azul… La naturaleza estaba de fiesta para acoger a los españoles. Ya iban Solís y sus hombres a reunirse con el pequeño grupo de los naturales, que brillaban al sol como estatuas de bronce, cuando éstos, con inesperada e incomprensible ma- niobra, dieron, como temerosos, algunos pasos atrás, volvie- ron la espalda y huyeron desbandados… Al propio tiempo estallaba un alarido salvaje, comenzaban a llover dardos y flechas, y de matorrales y bosquecillos surgía vociferante y gesticuladora una muchedumbre de indios que, blandiendo chuzas y lanzones y enarbolando mazas, se precipitó sobre los descuidados mareantes, los derribó sin darles tiempo de

– 323 – empuñar sus armas, los acribilló a lanzadas, los aplastó bajo el número… No hubo defensa posible. Aquello fué un tumul- to, un hacinamiento, una masa informe y convulsa de la que brotaban baladros infernales… Un instante después todo ha- bía concluído…

El estupor paralizaba a los de la carabela. Reaccionando en seguida, corrieron a los mosquetes, a los pasavolantes, prontos a abrir el fuego… Pero, ¿cómo tirar sobre aquel montón, en que indios y cristianos entrelazados se conver- tían en un solo ser de miembros innumerables? ¿Cómo no herir a hermanos y enemigos al propio tiempo?… Dispararon repetidas salvas para amedrentar a los salvajes, pero éstos no hicieron caso del estruendo, en la embriaguez de la ma- tanza… Después… tampoco se atrevieron a tirar sobre ellos mientras desnudaban a los caídos y se arrebataban mutua- mente sus despojos… Fray Buenaventura, despavorido, gritaba a los de la ca- rabela que tiraran, que no tiraran, que embistieran la costa embicando la nave, que se echaran a nado para salvar al ca-

– 324 – pitán por lo menos, que botaran un batel para ir él en perso- na a socorrerle, y entre todos estos desesperados e incohe- rentes consejos y órdenes, gemía, lloraba, alzaba los brazos, bendecía, clamaba: — ¡Hijos! ¡Hijos! ¡Os absuelvo en nombre de Dios! ¡Os bendigo en nombre de Dios! Los demás, igualmente trastornados, corrían de aquí pa- ra allá, sin ideas, sin tino. Estos trataban de botar el batel, aquéllos cargaban y apuntaban los pasavolantes, los otros se disponían a aparejar las velas, y los once hombres parecían ciento por el desorden y el tumulto… Desnudos los cadáveres de Solís y sus compañeros, al- gunos indios cargaron con ellos y se internaron en la espesu- ra. Los pasavolantes y los arcabuces habían comenzado a tomarlos por blanco apenas los de a bordo se convencieron de que ya sólo podían herir a los salvajes, castigando su ho- rrenda traición. Pero ninguno cayó, aunque les indios no de- bieron de ir muy lejos, porque, ya fuera del alcance de los proyectiles, de entre el matorral alzáronse columnitas de humo que fueron engrosando poco a poco… Algo antes, cuando había pasado lo más recio de la lu- cha y el triunfo de los indios era ya evidente, un grupo de salvajes – que los de la Latina creyeron mujeres – apoderóse de Paquillo, destrozó la barca y le puso fuego. Como los otros con los cadáveres, este nuevo grupo cargó con el gru- mete, sin hacer caso de su rabiosa defensa a puntapiés, a puñetazos, a dentelladas, le internó en la espesura y, mo- mentos después, el teatro del combate y la matanza quedaba desierto, silencioso, apacible, sin rastro alguno de tragedia…

– 325 – XX DESPUÉS

A la primera impresión de horror, de cólera y de impo- tente desesperación sucedió a bordo de la Latina el profundo desaliento. El piloto no sabía qué resolver, fray Buenaventu- ra lloraba como un niño, Rodrigo Rodríguez, que poco antes parecía un loco, blasfemaba mesándose los cabellos, des- plomado sobre un rollo de maromas, los demás cambiaban entrecortadas frases reveladoras del deseo de huir hacia el Puerto de los Patos, de reunirse con los compañeros, de li- brarse de la horrible pesadilla… Muerto Solís quedaban sin jefe capaz de mandarlos, de infundirles confianza, porque Alvarez se había mostrado sin autoridad ni energía durante todo el viaje, y no reaccionaba tampoco en tan difícil situa- ción. Cavilando sobre los pésimos agüeros de la partida y la llegada, confirmados con la horrenda carnicería que acaba- ban de presenciar, temerosos de caer de desastre en desas- tre, algunos tomaban ya por cuenta propia la iniciativa de aparejar, cuando al ver esto y comprender que no le quedaba otro camino el piloto dió la orden de partida. — No hay que dejar la pelleja por llorar a los muertos – dijo un marinero que arriaba un cabo cerca de Rodrigo Ro- dríguez. El asistente salió de su desesperado ensimismamiento, y con acento trágico, en el que vibraban la cólera y el horror:

– 326 – — ¿Muertos, nada más? – exclamó –. Ojalá no digan verdad esas hogueras cuyo humo estamos viendo… — ¿Qué crees? Acaso supones… — Mucho caníbal hay por estas tierras, y bien podría ser que… — ¡Caníbales, dices! – tartamudeó el otro. — Sí – exclamó Rodrigo –. ¡Han de ser caníbales…! ¡Mu- chos indios son caníbales! ¡Devoran a sus enemigos, voto al Diablo que los engendró! Y luego, sordamente, con el ceño fruncido y los puños apretados, continuó, recapitulando: — En todas estas malditas Indias, que Dios confunda, del golfo de Paria abajo, en los isleos, en tierra firme, los hombres se comen a los hombres, ¡y no los parte un rayo de Dios!… Se los comen, te digo, y éstos… ¡éstos no han de de- jar de hacerlo por tratarse de nosotros! Fray Buenaventura había estado oyéndolos, silencioso y espantado. — ¡Ah, Señor! – exclamó – ¿Será posible que permitas semejantes monstruos sobre la tierra?… ¡Dios mío! ¡Dios mío! ¡Tu santa ira es terrible, Señor! Herejía y blasfemia fué lo que dijo anoche el desgraciado capitán… El vientre de los peces… la vida universal… Y ahora… ¡No, no lo creo, no puedo creerlo!… Un hombre tan cumplido, tan buen cris- tiano. ¡Rodrigo delira! Y los infelices compañeros del capi- tán… Alarcón, Marquina… — ¡Paquillo! – agregó sombríamente Rodríguez.

– 327 – — ¡Almas de Dios! Pero el capitán lo dijo sin pensar… sin intención pecaminosa… ¡Sí! ¡Es un mártir! Un mártir de la fe… ¡Ah, Señor! ¿Por qué permitiste que tu humilde siervo no compartiese su martirio? Y humillándose, golpeándose el pecho, fray Buenaventu- ra murmuró repetidas veces con los ojos llenos de lágrimas: — “Dómine, non sum dignus”… La Latina, después de virar lentamente, navegaba ya aguas abajo, alejándose con rapidez del teatro de la matan- za, sin que nadie hubiera pensado siquiera en señalarlo con una cruz para eterna memoria de la catástrofe. Y cuando pa- saron frente al islote en que descansaba Martín García, nadie tuvo una mirada ni un recuerdo para él. Rodrigo seguía maldiciendo de su suerte, de la orden que le impidió desembarcar con su amo – como si su presen- cia hubiera podido salvarle – y de pronto, obedeciendo a una reacción explosiva de rabia, comenzó a gritar a sus compa- ñeros que eran unos cobardes, que no habían de huir, que era preciso desembarcar y acabar a cuchilladas con la infame chusma traidora. Fray Buenaventura trató de calmarle, aconsejándole la resignación ante los misteriosos designios de la Providencia, y el criado de Solís pareció escucharle más tranquilo, acatar sin rebeldía la voluntad de Dios, cuando de repente y con sarcasmo: — ¡Padre! – exclamó – ¿No decíais que los indios son mansos y bondadosos y que sólo hacen daño a sus verdu- gos? ¿No nos invitabais a tratarlos como a hermanos meno- res? Reniego yo, ¡voto al diablo!, de tales humildades y man-

– 328 – sedumbres, y de los mandrias que defienden a esas bestias feroces!

— ¡Sosiega, hijo, sosiega, por los clavos del Señor! – bal- buceó el fraile atolondrado –. ¡No jures más, no blasfemes! Dios permite a veces cosas que sobrepasan nuestro enten- dimiento, y él mismo murió clavado en un madero… Ade- más, estos indios no son como los de allá… y…

— ¡Y se comen a los cristianos, padre!… ¡Como llegue a tenerlos a mi alcance, malhaya, amén, si perdono a uno so- lo!… Pero oiga vuesamerced algo que quiero decirle y que importa mucho… El capitán y sus compañeros han sido ase- sinados, de ello no cabe duda… Pero hay uno, padre, hay uno, que está vivo y en manos de esos bárbaros… Yo mis- mo, con estos mismos ojos, ví que al infeliz Paquillo no lo tomaban hombres armados, sino simples mujeres, quienes lo arrancaron de la barca y se lo llevaran tierra adentro, sin ha- cerle daño, aunque el desdichado rapaz se defendiese como un poseído y les clavara los dientes en las carnes…

— Sí; bien me pareció ver que se lo llevaban – dijo el Capellán –. Se lo llevaban vivo, lo que significa que no pen- saban en lo que tú dices.

— Ahora no, pero sí en engordarle, como hacen a me- nudo…

— ¿Engordarle? ¡Jesús mil veces!

— !Pero aún es tiempo, padre, aún es tiempo! Diga vue- samerced al piloto que desprenda un batel, y por quien soy que, con los que quieran acompañarme, o solo si es preciso, iré a salvar al muchacho… ¡No lo podemos desamparar!

– 329 – Alzando y volviendo hacia Rodrigo las palmas de las manos e inclinando la cabeza sobre el pecho, fray Buenaven- tura le hizo callar y meditó un instante. — En conciencia, Rodrigo, hijo – exclamó por fin –, no puedo ni aconsejarlo ni pedirlo… La vida de los más tiene en la balanza mayor peso que la salud de uno solo… Yo, como tú, daría sin vacilar la mía por salvar la del chico… Pero se- ría sacrificio de los que quedan… Y ¡quién sabe si Dios no quiere hacer de Paquillo su instrumento para convertir a esos salvajes!… — Calle vuesamerced, padre, que no son estos momen- tos de reir… Por mucho que haga no puedo figurarme a Pa- quillo evangelizador… Poco entendía de religión, tan poco que aun por ese lado habría que salvarle el cuerpo para que pudiera salvar el alma… Suspiró el fraile, aplastó con el índice una lágrima que le asomaba a los ojos y murmuró: — ¡Es tarde!… Vamos ya lejos… Aunque no fuera así, sería la perdición de todos… Y mira el terror de los demás… Tampoco te seguirían, hijo, tampoco te seguirían… Renegando entre dientes, convencido pero furioso, Ro- drigo se alejó, y fray Buenaventura, apoyando la frente sobre la borda, lloró y rezó. El viento, la corriente, la tranquilidad de las aguas, la diafanidad del día, todo era favorable para el trágico regreso, y la carabela bajaba gallarda y rápida hacia el Río de los Pa- tos… Cuando salvó la barra y se acercó a las otras naos, des- armadas todavía, fué recibida con vítores regocijados que

– 330 – pronto se trocaron en exclamaciones de estupor y conster- nación.

Francisco de Torres, sobreponiéndose desde el primer momento a su aflicción, asumió definitivamente el mando de la escuadrilla y ordenó que Rodrigo Alvarez quedara arresta- do a bordo de La Portuguesa hasta la averiguación de los su- cesos, mediante sumario y hasta el consejo de guerra, si ha- bía lugar a juicio. Como él pasara a la capitana, dió al gavie- ro Montes el mando provisional de la Latina.

Reunidos en consejo los oficiales, el desdichado piloto de esta última expuso entrecortadamente la espantosa catás- trofe, imposible de imaginar ni impedir…

Nadie acertó a decir palabra hasta que Francisco de To- rres exclamó:

— Lloremos y pidamos a Dios el descanso de sus almas, que es el mejor discurso… Ninguno de nosotros ignora quién era y cuánto valía Juan Díaz de Solís, ni que es suya toda la gloria de lo que acabamos de realizar… No he de hacer su elogio yo, su hermano y su amigo de corazón… Diré, sí, que sin él ya nada nos queda que hacer en estas tierras. Preciso es volver a España… Llegaremos pocos, al parecer vencidos, con las manos vacías, pese a la hazaña realizada… No im- porta… Una vez allí, nuestro único pensamiento será volver a vengar a nuestro capitán escarmentando sin piedad a estos infieles.

— ¡Vive Diego! – exclamó el de Moguer, quien más feliz que Torres en ese sentido, había de desempeñar, años des-

– 331 – pués, un gran papel en la conquista del río165 – ¿Por qué no escarmentarlos ahora mismo? Con un poco de maña, menos confiados que nuestro capitán general, que, fuerza es decirlo, no tomó precauciones, somos suficientes para hacer entrada y no dejar indio vivo. ¡Sus y a ellos! tal es mi parecer. El alférez Ramírez, entretanto, joven y fogoso, apoyó ca- lurosamente a Diego García. Los demás guardaban encaran- do la situación con mayor sangre fría. — Es muy aventurado… – murmuró por fin Juan de Lis- boa. — En la capitulación, Su Alteza no ha previsto la muerte de Solís… – agregó Torres – Traía instrucciones secretas, a las que él sólo podía obedecer, que él sólo podía cumplir. Ahora somos responsables únicamente de lo que ha quedado en nuestras manos, pero de ello tenemos que responder ante Su Alteza. Deseo más que cualquier otro vengar a mi her- mano castigando sin piedad a sus asesinos. Pero creo que debemos volver, hoy por hoy, a España… — Tanto más cuanto que nos faltan bastimentos y el hambre nos amenazará en cuanto salgamos de aquí – dijo Juan de Lisboa –. No podemos llevar patos como única vi- tualla… — Es lo más acertado – observó el dominico –. Y, por otra parte, los naturales habrán escapado ya, como acos- tumbran después de un golpe de mano… No se les encontra- ría y los nuestros podrían caer en sus negras emboscadas.

165 Participó en la expedición de Magallanes y Elcano que dio la vuelta al mundo. (BNR.)

– 332 – Todos debemos cuentas de nuestras vidas, primero a Dios, que condena el suicidio, luego al Rey, que necesita de sus vasallos y de sus naves… Dejemos la venganza en manos del Señor… Nada quitará a nuestro gran capitán la gloria de ha- ber descubierto este Mar Dulce, que, si hay justicia en la tie- rra, ha de llamarse Río de Solís. Todos callaron y ni Diego García ni el mismo alférez Ramírez insistieron en su anterior proposición. — ¿Qué manda nuestro capitán? – preguntó por fin el de Moguer – Lo que él diga eso se hará. Torres se puso de pie, disimulando mal su profunda emoción, pero dijo con firmeza: — Mando que en cuanto sea materialmente posible, aparejemos para regresar a España. Nadie dijo palabra, algunos asintieron con la cabeza, el de Moguer se revolvió en su asiento como si le costara aca- tar una disposición que, evidentemente, era de fuerza mayor. — Yo tomaré el mando de la escuadrilla, embarcando en la “Portuguesa”, y Diego García me reemplazará como capi- tán de mi carabela. Juan de Lisboa será mi segundo, como lo fué de Solís 166, y Montes mandará por el momento la “Lati- na”. Si hubiéramos de quedar aquí, el invierno estaría relati- vamente lejos aún; para regresar a España está harto cerca y habremos de apresurarnos… El otoño golpea ya a nuestras puertas, y según lo que ha dicho Juan de Lisboa, no tenemos bastimento… Hay, pues, que hacerlo; hay, también, que cru-

166 Lo era Rodrigo Álvarez de Cartaya (N.d.T.a.F.)

– 333 – zar la línea antes del invierno, que nos sería fatal. Refresca- remos víveres donde y como se pueda, en estas aguas o en la costa del Brasil, si no hay otro remedio… Y a zarpar cuanto antes…

* * *

Alegre y fácil había sido la venida; triste y arduo fué el regreso. Zarpóse en los primeros días de marzo. Las tres ca- rabelas, de conserva, bajaron el río y surgieron en la Isla de Lobos. Iban a refrescar provisiones con lo único que la suer- te les deparaba. La tripulación desembarcó sin ruido, armada de espeques, y mientras unos avanzaban por la playa para cortar la salida del río, los otros se internaron, formando se- micírculo, y comenzaron la batida de los lobos marinos que, no conociendo aún a su terrible enemigo, el hombre, dor- mían descuidados o se desperezaban al sol en lo alto de las peñas, y a lo largo de la costa. Los anfibios, tomados por sorpresa, trataron de precipitarse al agua, saltando como elásticos y con grotescas contorsiones, pero los que les cor- taban la retirada les recibieron a golpes de espeque en el ho- cico, sin que les valieran para su defensa sus mugidos horro- rosos y sus dentelladas al aire. Sesenta y seis cayeron, los demás escaparon dando tumbos, y una vez en el río desapa- recieron para no volver. Aquella carne aceitosa y hediendo a pescado, que nadie come sino urgido por el hambre, fué cortada en lonjas, y tendida al sol para hacer con ella algo entre cecina, y moja- ma, pero que tenía todo la malo de cada una de estas dos conservas. Las pieles fueron cuidadosamente estaqueadas para llevarlas a España, en calidad de botín…

– 334 – Terminadas estas faenas, que exigieron varios días, los navíos zarparon con rumbo a la isla de Santa Catalina, en cuyo Puerto de los Patos se detuvieron con la esperanza de aumentar y mejorar tan menguadas provisiones de boca. Al- go, aunque poco, lograron, y Francisco de Torres embarcó allí una indiecilla, pobre trofeo viviente, para ostentarlo en España. Dióse a la vela seguido por la nave de Diego García, dejando a la que antes mandó Rodrigo Alvarez, que debía reunírsele en seguida, y en la que iban el lengua-gaviero y ahora capitán Enrique Montes, el alférez Melchor Ramírez y el afligido Rodrigo Rodríguez. Pero quiso la malaventura que, al zarpar, esta carabela diese en un bajío y zozobrara con cuanto contenía, excepto los once hombres que estaban a bordo y que se salvaron a duras penas. — ¡Estaba de Dios que yo también quedara como Paqui- llo! – exclamó Rodríguez – Ahora creo que he de volver a verle…? No dicen los de Santa Catalina que los naturales no matan a las mujeres ni a los chiquillos?… Francisco de Torres y Diego García, ignorando la suerte de la tercera carabela, fueron a recalar en el cabo de San Agustín. No querían volver con las manos vacías y habían convenido en burlarse de los portugueses cargando palo de tinte. La tripulación no tardó en cortar cincuenta quintales de brasil, que arrumó en las bodegas. La Latina no llegaba, algún navío del rey don Manuel podía sorprenderlos, provo- car una cuestión, malquistarlos con don Fernando que les recomendó tanta prudencia… Y se pusieron en franquía, lle- vando por toda fortuna aquel poco de palo de tinte, las se- senta y seis pieles de lobo y la indiecilla de Francisco de To- rres… Así volvían a España gobernada ya por el futuro em-

– 335 – perador don Carlos167 – más pobres que salieron, los audaces navegantes cuya esperanza de llegar cargados de tesoros, decuplicando por lo menos lo arriesgado en la expedición y dejando abierta la puerta hacia el Mar del Sur, se había des- vanecido como las ligeras nieblas matutinas del Mar Dulce de Solís. Seis meses duró el regreso. Catorce después de su parti- da168, el 3 de septiembre de 1516, echaron el ancla en aguas españolas. Allá en tierra americana, dormían el eterno sueño Juan Díaz de Solís, Francisco Marquina, Pedro Alarcón y seis ma- rineros169 asesinados por los indios. En un islote del gran río descansaban los restos de Martín García. Rodrigo Rodríguez, Enrique Montes y Melchor Ramírez – de quienes vuelve a ocuparse la historia al narrar las expediciones de Sebastián Caboto y de Diego García – y los ocho marineros escapados con ellos del naufragio ensayaban, a pesar suyo, la vida sal- vaje en Santa Catalina… Pero, símbolo o vaticinio, el adolescente, el tierno vás- tago del árbol secular, Francisco del Puerto, cautivo de los indios, quedaba a orillas del Mar Dulce, donde reverdecería y crecería, como tronco apenas recordado de la primera anó- nima rama de criollos del Río de la Plata. Realización de un sueño en forma no soñada, sus descendientes habían de ver

167 Don Fernando ha fallecido el 23 de enero de 1516. (N.d.T.a.F.)

168 Once; tuvo lugar el 8 de octubre de 1515. (N.d.T.a.F.)

169 Se habla en el capítulo 19 de “cuatro remeros”. (N.d.T.a.F.)

– 336 – que las pobres tierras de desengaño, escondían en realidad tesoros inagotables, más perennes que el oro y que la plata. Vinieron años de olvido y abandono. Después, en el noble río penetraron otros navegantes en otras carabelas, y Paqui- llo les vió llegar; les vió llegar y les vió marcharse, burlados también, pese a su intrepidez y su esperanza. Y las tentati- vas, trágicas a veces, repitiéronse y fracasaron de nuevo en estas regiones hostiles, mientras no se encontró su llave, he- cha de trabajo, de tenacidad y de fe. La primera hazaña no bastó para que el río perpetuara el nombre del héroe, porque el éxito y la muerte fueron simultáneos, y la duración faltó… Pero los grandes pueblos que en sus riberas han sabido in- fundir perdurable realidad a los tesoros quiméricos del des- cubridor, no pueden olvidar, no olvidarán a Juan Díaz de So- lís, cuyo espíritu vaga todavía entre nosotros.

Roberto J. Payró Lomas de Zamora, 9 diciembre 1927

– 337 – NOTAS DEL TRADUCTOR AL FRANCÉS

Más informaciones i citaciones originales en la edición de “Ides et Autres”: https://www.idesetautres.be/upload/PAYRO%20MAR%20DU LCE%20INDICE%20CON%20ENLACES%20INTERNET%2020% 20CAPITULOS.pdf.

Capítulo 11 Cuello a la valona: https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Frans_Hals_037.jpg

(Retrato de Pieter van den Broecke, Franck Halls 1633, Ken- wood House) : https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Frans_Hals_037.jpg

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Capítulo 12 Toribio Medina, José ; Juan Díaz de Solís. Estudio histórico ; op. cit., CCCLII, 252 p. (segundo libro : documentos y bibliografía) Ver biografía de Vasco Nuñez de BALBOA per Fred FUNCKEN (Bélgica, “TINTIN” 38, 17 de septiembre 1958). https://www.idesetautres.be/upload/BALBOA%20FUNCKEN. pdf Aclaraciones, detalles et ilustraciones de armas mencionadas en este capitula, ver el mismo capitulo en la edición de « Ides et Autres ». https://www.idesetautres.be/upload/PAYRO%20MAR%20DU LCE%20INDICE%20CON%20ENLACES%20INTERNET%2020% 20CAPITULOS.pdf (index).

Capítulo 13 Golfo de las Yeguas: http://www.banrepcultural.org/blaavirtual/historia/india/indi a1a.htm «En esa ruta hacia las Américas, las Islas Canarias jugaban un papel decisivo toda vez que el primer tramo de la nave- gación era costoso. Al espacio que separa la Península y Canarias se le conocía como el “Golfo de las Yeguas”» (Ca- pote, J. Y OTROS: “Introducción de caprinos en las Islas Canarias y América…”, XXVII Jornada

– 339 – Ver Alexander von Humboldt ; Examen critique de l’histoire de la géographie du Nouveau Continent et des progrès de l’astronomie nautique aux XVe et XVIe siècles ; Paris, Librai- rie de Gide ; 1837, tome troisième, page 85 s científicas de la S.E.O.C., 2002). Cartografía Abraham Ortelius s. XVI (Juan Tous Meliá; ver abajo) Vista de la Degollada de Las Yeguas (Esteban Cabrera Méndez) Morro y degollada de Las Yeguas (Patrinet) http://toponimograncanaria.blogspot.be/2013/05/yeguas-las- de-aldea-de-san-nicolas.html «La ruta de la flota de Indias»: http://rutaslegendarias.blogspot.be/2009/05/la-ruta-de-flota- de-las-indias.html Juan Tous Meliá; Las Islas Canarias a través de la Carto- grafía: Una selección de los mapas más emblemáticos levan- tados entre 1507 y 1898; Islas Canarias [Gaviño de Franchy]; 2014, 264 páginas. (172 ilustraciones, e. a., el primer mapa impreso en las Islas Canarias.) Gonzalo Menéndez Pidal; Hacia una nueva imagen del mundo; Real Academia de la Historia; 2003, 436 páginas. (p. 257) CANCIONERO DE BAENA Es monumental el Cancionero de Baena (¿1426-1430?), recopilado por el converso Juan Alfonso de Baena (¿1375-1434?) para Juan II. Incluye obras de 56 poetas – brevemente presentados –, desde

– 340 – 1370, y se conserva en una copia descuidada, de hacia 1465, en 192 folios – se añadirán trece. Su prólogo elogia el valor de la palabra y presenta el arte de la poetria como “gracia infusa del Señor” para “home que haya (…) leído”, aunando inspiración y estudio. (…) Una segunda generación presenta poetas “logicales” y eruditos, como Francisco Imperial (¿1350-1409?) (…) Cultivan una poesía teológica y moral los hermanos Die- go y Gonzalo Martínez de Medina. Siguen a Pero Gonzá- lez de Uceda, Pero Vélez de Guevara y Gómez Pérez Pa- tiño. Juan Alfonso de Baena, compilador del Cancionero, compone preguntas sobre inspiración y técnica poéticas. Poemas de Gómez Pérez Patiño en el Cancionero de Baena http://www.spanisharts.com/books/literature/cancionero.htm

Capítulo 14 « Jean de Béthencourt roi des Canaries »: http://www.patrimoine-normand.com/index-fiche-44378.html « La Conquista de Canarias ». Ver, e. o.: http://canariastoni.blogspot.com/2010/06/la-conquista-de- canarias.html Antonio Pérez García; « SÍNTESIS DE HISTORIA CANARIA ». Ver:

– 341 – http://www.gobiernodecanarias.org/educacion/culturacanaria /historia/historia.htm Ver también Jean de Béthencourt in Jules VERNE ; Dé- couverte de la Terre ; Paris ; Hetzel ; première partie, chapitre VI : http://passerellesdutemps.free.fr/edition_numerique/IGCD/9 _GEOGRAPHIE_%20HISTOIRE_SCIENCES_AUXILIAIRES_DE _L_HISTOIRE/91_Geographie_explorations_voyages/910.9_D ecouverte_de_la_terre.pdf Fernán Pérez de Guzmán (1376-1460), « señor de Batres, (…) reclama la atención de la crítica bajo el triple carácter de historiador, moralista y pœta. » (Obras completas de Me- néndez Pelayo, ANTOLOGÍA DE LOS POETAS LÍRICOS CASTELLANOS. II : PARTE PRIMERA : LA POESÍA EN LA EDAD MEDIA. II. CAPÍTULO X. – FERNÁN PÉREZ DE GUZMÁN) : http://www.larramendi.es/menendezpelayo/i18n/corpus/uni dad.cmd?idUnidad=100275&idCorpus=1000&posicion=1 Ver también: Obras digitalizadas de Fernán Pérez de Guzmán en la Biblioteca Digital Hispánica de la Biblio- teca Nacional de España Las setecientas del docto y noble cavallero Fernan Perez de Guzman, las quales son bien scientificadas y de gran- des y diversas materias y muy provechosas : [coplas] por las quales qualquier hombre puede tomar regra y doctri- na y exemplo de bien bivir (coplas 7-8) « 5. Del home malo e malvado que alcanza grande poder si es sabio e esforzado ¿quién se podrá defender? 6. Poder, saber, fortaleza, si cayeren en mal vaso, non vale humana sabieza á resistir un tal caso.

– 342 – 7. La verdat estraña e nueva auida por mentirosa nunca la digas sin prueba, pues sin culpa es vergonzosa. 8. Si la verdat que paresce mentira, es de callar, ¡quánto non daña e empesce pura mentira fablar! 9. Non puede mucho alcanzar ninguno, es mi creencia, sin el cuerpo trabajar ó cargar la consçiencia. 14. Es virtut e muy loable la justicia executar; más de natura ami- gable non menos el perdonar. 15. La justicia fasta el cabo todo el mundo asolaría; luengo perdón non alabo que da del mal osadía. 16. Entre aquestos dos extremos si la discreción alcança, ¿quién du- bda que fallaremos, si la buscamos, templança? 31. El que nunca fue regido nunca bien sabrá regir; el que supo bien servir él se sabrá ser servido. 32. Como de flores e rosas es ventaja conoscida, en las obras virtuo- sas, la justicia es escogida. Isla de Saint Brendan (de Clonfert). Ver, e. a. : D’Avezac ; A. Thomas ; Gaffarel ; « Les îles fantastiques : Les îles de saint-Brandan ». Voir : http://www.cosmovisions.com/$Saint-Brandan.htm Mapa de 1891 presentando regiones con concentraciones en sargazos en el Atlántico Norte y Antillas (Fuente de la imagen: https://teacheratsea.wordpress.com/tag/north-atlantic/ « El fuego de San Telmo o Santelmo es un meteoro ígneo consis- tente en una descarga de efecto corona electroluminiscente provocada por la ionización del aire dentro del fuerte cam- po eléctrico que originan las tormentas eléctricas. ». + Ilus- tración del Fuego de San Telmo en la arboladura de un barco en el mar (G. Hartwig) en The Aerial World (1886): https://fr.wikipedia.org/wiki/Feu_de_Saint-Elme

– 343 – Cabo de San Antonio, arrecifes « Ouvre l’œil », actuablemen- te Abrolhos, cabo Frío (mapa 21060), cabo de Santo Tomé. Ver: D.A. Albert ; Derrotero de las costas de la América Meridional (comprehendidas entre la isla de Santa Catalina y el Maranhao y entre la misma y el río de la Pla- ta) ; 1844,265 p. (p. 91). Toribio Medina, José ; Juan Díaz de Solís. Estudio histórico ; op. cit. (segundo libro : documentos y bibliografía) Dibujo guanche: http://grancanariatradicionycultura.blogspot.be/p/manolito- guedes-depositario-de.html Mundo guanche N° 12, junio 2006: http://www.mundoguanche.com/portada/portada.php « Las harimaguadas » in Mundo guanche N° 18, enero 2007: http://www.mundoguanche.com/portada/articulo.php? id_articulo=165 https://cubabuestra7eu.wordpress.com/2014/08/03/canarias- ritos-de-passage-de-las-maguas-o-maguadas-ex-harimaguadas/ Juan Carlos Mora es autor de las ilustraciones y del guión de una estupenda novela gráfica. Ver: Fernán Pérez de Guzmán (1376-1460), « señor de Batres, (…) reclama la atención de la crítica bajo el triple carácter de historiador, moralista y poeta. » (Obras completas de Me- néndez Pelayo, ANTOLOGÍA DE LOS POETAS LÍRICOS CASTELLANOS. II: PARTE PRIMERA: LA POESÍA EN LA EDAD MEDIA. II. CAPÍTULO X. – FERNÁN PÉREZ DE GUZMÁN):

– 344 – http://www.larramendi.es/menendezpelayo/i18n/corpus/uni dad.cmd?idUnidad=100275&idCorpus=1000&posicion=1 Obras digitalizadas de Fernán Pérez de Guzmán en la Biblioteca Digital Hispánica de la Biblioteca Nacional de España: http://bdh.bne.es/bnesearch/Search.do?numfields=1&field1= au- tor&field1val=%22P%C3 %A9rez+de+Guzm%C3 %A1n%2c+Fe rn%C3 %A1n%22&field1Op=AND&exact=on&advanced=true& language=esEn Las setecientas del docto y noble cavallero Fernán Pérez de Guzmán, las quales son bien scientificadas y de gran- des y diversas materias y muy provechosas: [coplas] por las quales qualquier hombre puede tomar regra y doctri- na y exemplo de bien bivir (coplas 7-8) Bruno PERERA; « LA LEYENDA DE LA ISLA DE SAN BORONDÓN ES UN MITO NACIDO DE LA IGNORANCIA, ESPEJISMOS Y ALUCINACIONES (Foto Google Earth del Archipiélago Canario con el Archipié- lago Salvaje). Ver: http://elcanario.net/Articulos/sanborondonmitobp.htm Luis Regueira Benítez; Manuel Poggio Capote; « Rincones de San Borondón »: http://www.rinconesdelatlantico.com/num3/17_san_borondo n.html Cabo de San Agustín: Cabo de Santo Agostinho, cabo de Consolación, o cabo de Santa María de la Consolación Cabo de San Antonio, arrecifes de Abre el Ojo, actualmente Abrolhos, cabo Frío (mapa 21060), cabo de Santo Tomé. Ver:

– 345 – D.A. Albert; Derrotero de las costas de la América Meridional (comprehendidas entre la isla de Santa Catalina y el Ma- ranhao y entre la misma y el río de la Plata); 1844, 265 pá- ginas (p. 91).

Capítulo 15 “Pájaro herrero”, (Araponga barbu, Al Campanero Herrero en inglés se le conoce por Bearded Bellbird. En portu- gués se le llama Araponga-do-nordeste. https://campanero1967.wordpress.com/2008/05/29/el- pajaro-campanero-de-san-esteban/ “Procnias averano”: ilustración de Nicolas Huet le Jeune et Prêtre, in Nouveau recueil de planches coloriées d’oiseaux (1838) http://archive.org/stream/Nouveaurecueild3Temm#page/n85 /mode/2up Oiseaux-mouches : Peinture de Ernst Haeckel parue dans Kunstformen der Natur den 1904 (planche 99). Cabo de San Agustín (8º de latitude Sud) : Cabo de Santo Agostinho, cabo de Consolación, o cabo de Santa María de la Consolación Toribio Medina, José ; Juan Díaz de Solís. Estudio histórico ; op. cit. (segundo libro : documentos y bibliografía) Rappelons que Bob De Moor (1925-1992) était un dessina- teur de la mer et, notamment, de caravelles dans « Cori, le moussaillon », série de 5 BD se déroulant au 16ème siècle. Afin de lui rendre hommage, nous ne pouvions omettre son talent, extrayant du tome 2 de « L’invincible – 346 – Armada » (« Le dragon des mers », page 6) les vignettes extraites (copyright BD Must, 2013), illustrent, entre autres, la manœuvre du cabestan . Intégrale « Cori, le moussaillon » : www.bdmust.be Desembarco de Pedro Álvares Cabral en Vera Cruz (22 de abril 1500). Ver también mapa incluyendo, e. o., Cabral y Vespucce : Lobato, Mirta Zaida; Juan Suriano; Nueva Historia Argentina. Atlas histórico; Buenos Aires, Sudame- ricana ; 2010. https://historiasocialyeconomicaargentina.wordpress.com/201 4/03/29/america-siglo-xvi-descubrimiento-y-conquista-de- espanoles-y-portugueses/ Mapa de los viajes de Alonso de Ojeda: https://commons.wikimedia.org/wiki/File%3AViajes_de_Alon so_de_Ojeda.PNG Gonzalo Fernández de Oviedo y Valdés (1478 – 1557), escri- tor de General y Natural Historia de las Indias, ver: https://www.wdl.org/fr/item/7331/ Vasco Nuñez de BALBOA per Fred FUNCKEN : https://www.idesetautres.be/upload/BALBOA%20FUNCKEN. pdf Christophe COLOMB per Fred FUNCKEN : https://www.idesetautres.be/upload/CHRISTOPHE%20COLO MB%20FUNCKEN.pdf Ilustración per Fred FUNCKEN in « L’Histoire du monde : la course aux épices » (in TINTIN N° 29,16071958)

– 347 – https://www.idesetautres.be/upload/19580716%20COURSE% 20AUX%20EPICES%20HISTOIRE%20MONDE%20144%20TIN TIN%2029.pdf

Capítulo 16 Anacronismos. Ver: Roberto J. Payró ; « La Pastoral de Monseñor Mercier » ; in La Nación ; 11/03/1915 : https://www.idesetautres.be/upload/19141225%20PAYRO%2 0PASTORAL%20MONSENOR%20MERCIER%20FR.pdf Roberto J. Payró ; Les massacres de Dinant en août 1914. Extrait de « Deux représentants argentins tués dans la guerre. » : https://www.idesetautres.be/upload/19141020%20PAYRO%2 0MASSACRES%20DINANT%20DEUX%20REPRESENTANTS%2 0ARGENTINS%20TUES%20DANS%20LA%20GUERRE%20ILL USTRE.pdf Traducción de « Dos representantes argentinos muertos en la guerra », in La Nación ; 17/11/1914. http://www.idesetautres.be/upload/19141020%20PAYRO%20 DOS%20REPRESENTANTES%20ARGENTINOS%20MUERTOS %20EN%20LA%20GUERRA.pdf https://www.idesetautres.be/?p=ides&mod=iea&smod=ieaFic tions&part=belgique100 Artículos de prensa de Roberto J. Payró (1867-1928): guerra de 1914-1918 y la Bélgica:

– 348 – https://www.idesetautres.be/upload/PAYRO%20ARTICLES% 20BELGIQUE%20GUERRE%201914- 1918%20AVEC%20LIENS%20INTERNET.pdf Fray Bartolomé de las Casas et Johannes Gysius ; Brevísima relación de la destrucción de las Indias (colegida por el obispo don fray Bartolomé de las Casas o Casaus, de la orden de Santo Domingo. Sebastian Trugillo) ; écrite à partir de 1539 et publiée à Séville en 1552 : http://aix1.uottawa.ca/~jmruano/relacion.pdf https://www.youtube.com/watch?v=q0jZjtx7e-0 http://www.cervantesvirtual.com/servlet/SirveObras/128172 91026719384321435/index.htm Bartolomé de Las Casas, La vraye Enarration De la des- truction des Indes Occidentales Fray Bartolomé de las Casas ; Historia de las Indias (1527-; Selección, edición y notas de José Miguel Martínez To- rrejón), Libro III, Capítulo III : « Del mal tratamiento que hacían los españoles a los indios » : http://www.cervantesvirtual.com/obra-visor/historia-de-las- indias--0/html/d31cc52d-acd9-4776-a069- ee37b963f399_14.html Libro III, Capítulo VI De los frailes que vinieron a dar cuenta al rey de lo que pa- saba en Santo Domingo : « (…) de cómo las mujeres que se sentían preñadas tomaban hierbas para echar muertas las criaturas, por no vellas o de- jallas en aquellos infernales trabajos » Libro III, Capítulo IV

– 349 – De las predicaciones de los frailes sobre el buen tratamiento de los indios : fray Antón Montesino, Ego vox clamantis in deserto. « Para os los dar a conocer me he sobido aquí, yo que soy voz de Cristo en el desierto desta isla (…) Esta voz, dijo él (fray Antón Montesino), dice que todos estáis en pecado mortal y en él vivís y morís, por la crueldad y ti- ranía que usáis con estas inocentes gentes. Decid, ¿con qué derecho y con qué justicia tenéis en tan cruel y ho- rrible servidumbre aquestos indios ? ¿Con qué autoridad habéis hecho tan detestables guerras a estas gentes que estaban en sus tierras mansas y pacíficas ; donde tan in- finitas dellas, con muertes y estragos nunca oídos, ha- béis consumido ? ¿Cómo los tenéis tan opresos y fatiga- dos, sin dalles de comer ni curallos en sus enfermeda- des, que de los excesivos trabajos que les dais incurren y se os mueren, y por mejor decir, los matáis, por sacar y adquirir oro cada día ? ¿Y qué cuidado tenéis de quien los doctrine, y conozcan a su Dios y criador, sean bati- zados, oigan misa, guarden las fiestas y domingos ? ¿Es- tos, no son hombres ? ¿No tienen ánimas racionales ? ¿No sois obligados a amallos como a vosotros mismos ? ¿Esto no entendéis ? ¿Esto no sentís ? ¿Cómo estáis en tanta profundidad de sueño tan letárgico dormidos ? Te- ned por cierto que en el estado que estáis no os podéis más salvar que los moros o turcos que carecen y no quieren la fe de Jesucristo ». Alfonso Maestre Sánchez ; “Todas las gentes del mundo son hombres” (“All the people in the world are human beings”). El gran debate entre Fray Bartolomé de las Casas (1474- 1566) y Juan Ginés de Sepúlveda (1490-1573), in Anales

– 350 – del Seminario de Historia de la Filosofía ; Universidad Complutense de Madrid ; Vol 21 (2004) , pp. 91-134. ISSN 0211-2337 ISSN-e 1988-2564 http://revistas.ucm.es/index.php/ASHF/article/view/ASHF0 404110091A/4728 Extracto del resumen : « (…) Bartolomé de Las Casas y Juan Ginés de Sepúlve- da, se reunieron en Valladolid en 1550 para discutir un gran problema nacional que concernía tanto a los indios americanos como a Aristóteles. Entonces, por primera vez y quizá por última, un imperio organizó oficialmente una encuesta sobre la justicia de los métodos empleados para extender su dominio. La disputa de Valladolid ha de interpretarse claramente como el testimonio apasio- nado de un hecho decisivo en la historia de la humani- dad : por no haber triunfado las ideas de Juan Ginés de Sepúlveda se dio un paso más, penoso e inseguro toda- vía, en el camino de la justicia para “todas las razas en un mundo de múltiples razas” ; por hablar con tanta vehemencia Fray Bartolomé de las Casas en Valladolid en favor de los indios americanos, su larga y complicada argumentación tuvo también otra utilidad : fortaleció a todos aquellos que en su tiempo, y en los siglos que si- guieron, trabajaron con la creencia de que “todas las gentes del mundo son hombres”. No bestias, ni esclavos por naturaleza, no como niños con un entendimiento li- mitado o estático, sino hombres que son capaces de lle- gar a ser cristianos, que tienen pleno derecho a gozar de sus bienes, su libertad política y su dignidad humana, y que en su creencia deberían ser incorporados a la civili-

– 351 – zación española y cristiana en vez de ser esclavizados o destruidos. » http://revistas.ucm.es/index.php/ASHF/article/view/5571 Fray Alonso de Espinar. Ver : Espinar o Espinal, Alonso de (¿-1513). Religioso franciscano español, nacido en fecha desconocida en España y muerto en 1513 en un naufra- gio en el océano Atlántico. Dirigió el primer grupo de misioneros de su orden que fueron a América. Se esta- blecieron en Concepción, en la isla Española, donde se fundo el primer convento de esta orden. Espinar fue en- viado a España a raíz del sermón de Montesinos y murió en el océano al naufragar la embarcación en la que re- gresaba a Indias con nuevos frailes. Fray Alonso del Espinar, a quien Las Casas llama Espi- nal, llegó a Santo Domingo en 1502 con la flota de frey Nicolás de Ovando con objeto de establecer la orden franciscana en América, descubierta diez años antes. El padre Espinar fue como prelado del primer grupo de ta- les franciscanos, compuesto de doce de ellos. El gober- nador ordenó que se les construyera un convento en la población de Concepción de la Vega, que no se constru- yó en firme hasta 1545 ; allí se colocó la cruz que levan- tó Colón a su llegada en 1492. En 1511 Espinar era el superior del convento erigido en la ciudad de Santo Domingo, a donde fueron a quejarse los encomenderos cuando el dominico Montesinos pro- nunció su famosa homilía en la que les acusó de explo- tadores y de estar condenados al infierno y a la corona de haber tergiversando la donación papal de las Indias. Los encomenderos suplicaron a Espinar que viajara a España y se entrevistara con el rey para explicarle la

– 352 – verdadera situación de la Española, lo que hizo el fran- ciscano. Se entrevistó con Fernando el Católico y le dio su punto de vista sobre la crisis moral indiana. De sus in- formes y de los de Montesinos vinieron a resultar las famosas Leyes de Burgos de 1512. Se convocó entonces el Capítulo General de la Orden en Segovia al que asistió Espinar y donde se acordó enviar más misioneros fran- ciscanos a Indias. Se mandaron a Sevilla catorce, que debían viajar a Indias con el padre. Espinar. Sólo hubo pasaje para doce de ellos, que embarcaron de inmediato en 1513, los otros dos se quedaron con Espinar en espe- ra de otra nave. Al fin ésta estuvo lista y en ella viajó Espinar, emprendiendo una violenta travesía en la que naufragó la nave y se ahogaron los religiosos. Del padre Espinar dijo Las Casas que era “celoso y vir- tuoso religioso, pero no letrado, mas de saber lo que muchos religiosos saben, y todo su estudio era leer en la Suma angélica para confesar”. CASTRO SEOANE, J. “Aviamiento y catálogo de las misio- nes que en el siglo XVI pasaron de España a Indias, se- gún los libros de Contratación”, en Missionalis Hispánica, núm. 37, Madrid, 1956. LOPEZ, FR. A. Fr. “Alonso del Espinar, misionero en las In- dias”, en Archivo Ibero Americano, Madrid, 1916. http://www.mcnbiografias.com/app- bio/do/show?key=espinar-alonso-de El Decálogo: https://fr.wikipedia.org/wiki/D%C3%A9calogue

– 353 – El INDIO HATUEY En 1511, Diego Velásquez partió de La Española (ahora la República Dominicana) para conquis- tar y colonizar a Cuba. Entre sus soldados estaba Her- nán Cortéz, que posteriormente conquistaría a Méjico. Al llegar a Cuba, Velásquez fundó a Baracoa la primera población española. Hatuey, un jefe Taíno de isla de La Española, que había escapado en canoas con alrededor de cuatrocientos hombres, mujeres y niños, advirtió a los cubanos lo qué podían esperar de los españoles. Él les explicó la necesi- dad de unirse contra los hombres blancos el enemigo común, los que habían infligido mucho sufrimiento a su pueblo. Según lo reportado más tarde por el sacerdote Bartolo- mé de Las Casas, Hatuey mostró a los cubanos una ces- ta llena de oro y de joyas. Y dijo "este es el dios que los españoles adoran. Por esto ellos luchan y matan; por es- to nos persiguen y es por eso qué tenemos que lanzarlos al mar" Ellos nos dicen, "que adoran a un dios de la paz y de la igualdad, pero usurpan nuestras tierras y nos hacen sus esclavos. Nos hablan de un alma inmortal y de sus re- compensas y castigos eternos, pero roban nuestras per- tenencias, seducen a nuestras mujeres, violan a nuestras hijas. Y como no pueden igualarnos en valor, estos co- bardes se cubren con hierro que nuestras armas no pue- den romper." Los Taínos de Cuba oriental y central no podían creer el horrible mensaje de Hatuey, y solamente unos pocos se le unieron.

– 354 – La estrategia de Hatuey contra los españoles fue la de atacar, a manera de guerrilla, y después dispersarse a las lomas, donde los se reagrupaban para el siguiente ata- que. Por cerca de tres meses las tácticas de Hatuey man- tuvieron a los españoles a la defensiva, asustados de de- jar la fortaleza de Baracoa. Gracias a un traidor, Velásquez pudo rodear y capturar a Hatuey. En Febrero 2, 1512, Hatuey fue atado en una hoguera en el campo español, donde fue quemado vivo. Momentos antes de encender el fuego, un sacerdote le ofreció la salvación de su alma, mostrándole la cruz y pidiendo que él aceptara a Jesús para ir al cielo. “¿Hay gente como ustedes en cielo?” Preguntó Hatuey. "Hay muchos como nosotros en cielo” contestó el sacerdote. Hatuey contestó que él no deseaba saber nada de un dios que permitía que tal crueldad fuera hecha en su nombre. Juan F. Pérez Home Page / Historia de Cuba : http://www.juanperez.com/historia/hatuey.html Hatuey : “si al cielo van los españoles yo prefiero el in- fierno” https://desdeminsulacuba.com/2015/03/09/hatuey-si-al- cielo-van-los-espanoles-yo-prefiero-el-infierno/ Juan F. Pérez Home Page / Historia de Cuba : http://www.juanperez.com/historia/hatuey.html Hatuey: “si al cielo van los españoles yo prefiero el in- fierno” No debe confundirse con Alonso Sánchez (e. a. estatua a Huelva) :

– 355 – https://historiadelaprovinciadehuelva.blogspot.com/2012/02/ la-leyenda-de-alonso-sanchez-de-huelva.html André Saint-Lu ; « La légende du pilote précurseur de Chris- tophe Colomb dans l’historiographie du Guatemala » in Bul- letin Hispanique, Année 1959, Volume 61 (Numéro 1), pp. 74-81 : https://www.persee.fr/doc/hispa_0007- 4640_1959_num_61_1_3615 Responsables de crueldades: Gonzalo Hernández de Oviedo. “Y que Oviedo haya sido partícipe de las crueles tiranías que en aquel reino de Tierra Firme que llamaron Castilla del Oro, desde el año de 14 que fue, no a gobernallo, sino a destruillo (…)” Fray Bartolomé de las Casas ; Historia de las Indias, capí- tulo CXLII) Hablando de cómo se saca el oro, en el libro de su Histo- ria, capítulo 8.°, refiere Oviedo : « Yo he hecho sacar el oro para mí con mis indios y esclavos en la Tierra Firme, en la provincia y gobernación de Castilla del Oro, etc. ». Alonso Sánchez de Carvajal y Francisco Roldán in Juan de Velasco (1727-1792); Historia del reino de Quito en la América meridional; Caracas, Fundación Biblioteca Aya- cucho (N° 82) ; 1981, XLIX-669 p.. (p. 243) : “Falsas rebeliones” de indios. Ver, e. o. : https://fr.slideshare.net/Elenamohr/rebeliones-indgenas-en- amrica-colonial Kintto Lucas ; Rebeliones indigenas y negras en América latina :

– 356 – http://www.rebelion.org/docs/18966.pdf “No nacimos indios, nos hicieron indios”: http://www.rebelion.org/docs/18966.pdf Alexandre Coello de la Rosa ; “¿Indios buenos?”, “¿Indios ma- los?”, “¿Buenos cristianos ?” : La cara oscura de las Indias en Gonzalo Fernández de Oviedo y Valdés » (*) in Scripta Nova (Re- vista electrónica de geografía y ciencias sociales) ; Universidad de Barcelona ; Vol V, nº 101,15 de noviembre de 2001 (ISSN : 1138-9788. Depósito Legal : B. 21.741-98) : http://www.ub.edu/geocrit/sn-101.htm (*) Fernández de Oviedo y Valdés, Gonzalo ; Historia General y Natural de las Indias, Islas y Tierra Firme del Mar Océano ; Ma- drid, Real Academia de la Historia ; 1854,770 p. : https://ia801408.us.archive.org/6/items/historiageneraly01fer n/historiageneraly01fern.pdf Juan Friede ; « Los Franciscanos en el Nuevo Reino de Granada y el movimiento indigenista del siglo XVI » in Bulletin His- panique ; 1958, Volume 60, Numéro 1, pp. 5-29 (refus d’absolution et mesures de prévention : pp. 16,19,22,24) : https://www.persee.fr/doc/hispa_0007- 4640_1958_num_60_1_3561 José Fernando Ramírez ; Obras históricas (Volume 2) ; UNAM ; 2001,289 p. (p. 46) : Bartolomé de Las Casas, obispo de Chiapas, niega la ab- solución a los españoles que poseen esclavos (en 1545). http://moines.mayas.free.fr/frailes.mayas/index_pages/Las% 20Casas%20en%20contra%20de%20los%20conquistadores(17). htm

– 357 – (Fray Antonio de Remesal, Historia de la provincia de San Vicente de Chiapa y Guatemala, libro 6, capítulo 2 ; 1619, p. 287) https://ia902705.us.archive.org/4/items/historiadelaprov00re me/historiadelaprov00reme.pdf

Capítulo 17 ALFONSO ÁLVAREZ de VILLASANDINO(1340-1350 – c 1424) CANTIGA ver el capítulo 17. « TROVADORES CASTELLANOS / CANTIGAS DE AMOR Y RELIGIOSAS » (SELECCIÓN, INTRODUCCIÓN Y NOTAS DE ROBERTO F. GIUSTI) : http://www.dim.uchile.cl/~anmoreir/escritos/siglo_oro/trova .html

Generosa, muy hermosa, sin mancilla Virgen Santa, virtuosa, poderosa, de quien Lucifer se espanta tanta fué la tu grand omildat, que toda la Trenidat en ti se encierra, se canta.

Placentero fué el primero gozo, Señora, que hobiste; cuando el vero mensajero te saluó, tú respondiste. Trojiste en tu seno virginal al Padre celestial, al cual sin dolor pariste.

– 358 –

Quien sabría nin diría cuánta fué tu omildanza, o María, puerta e vía de salud e de holganza. Fianza tengo en ti, muy dulce flor, que por ser tu servidor habré de Dios perdonanza.

Noble rosa, hija e esposa de Dios, e su madre dina, amorosa es la tu prosa, Ave, estela matutina. Enclina tus orejas de dulzor oyendo a mí, pecador, ayudándome festina.

Quien te apela maristela, flor del ángel saludada, sin cabtela non recela la tenebrosa morada. Criada fuste limpia, sin error, porqu’el alto Emperador te nos dió por abogada.

Que parrías al Mexías dijeron gentes discretas, Jeremías e Isaías, Daniel e otros profetas. Poetas te loan e loarán, e los santos cantarán por ti en gloria chanzonetas.

– 359 – O beata inmaculata, sin error desde abenicio, bien barata quien te cata mansamente sin bollicio. Servicio hace a Dios, nuestro Señor, quien te sirve por amor non dando a sus carnes vicio.

« Armamento naval. La artillería en los siglos XV-XVI – XVII ». Ilustración de bombardea utilizada en las carabelas. Ver: http://www.armada15001900.net/artillerianaval.htm Vasco Nuñez de BALBOA per Fred FUNCKEN : https://www.idesetautres.be/upload/BALBOA%20FUNCKEN. pdf Río de Santa Lucía (Cuenca del Plata): https://www.youtube.com/watch?v=DiAvdXBHUw0 https://commons.wikimedia.org/wiki/Category:R%C3%ADo_S anta_Luc%C3%ADa

Capítulo 18 ALFONSO ÁLVAREZ de VILLASANDINO (1340-1350 – c 1424): ver el capítula 17 El Río de Solís = El Río de Quilmes. http://fr.slideshare.net/sirincho/el-ro-de-sols Mapa de la cuenca del Río de la Plata:

– 360 –

https://es.wikipedia.org/wiki/Categor%C3%ADa:Afluentes_de l_R%C3%ADo_de_la_Plata#/media/File:Plata_buenos_aires_m ontevideo_map.svg Ver también: Plata_buenos_aires_montevideo_map.PNG REITANO, Emir; “El Río de La Plata y la cartografía portugue- sa de los siglos XVI y XVII”, in Anuario del Instituto de His- toria Argentina N° 3; Universidad Nacional de La Plata; 2003, pp. 159-186 (“Memoria Académica”): http://www.memoria.fahce.unlp.edu.ar/art_revistas/pr.3101/ pr.3101.pdf Gobernación del Río de la Plata, mapa de 1600. (Jodocus Hondius: 1563-1612). https://es.wikipedia.org/wiki/Gobernaci%C3%B3n_del_R%C3 %ADo_de_la_Plata_y_del_Paraguay#/media/File:Paraguay_- _O_Prov_de_Rio_de_la_Plata_- _cum_regionibus_adiacentibus_Tvcvman_et_Sta._Cruz_de_la_S ierra_-_ca_1600.jpg

– 361 –

“Glas de Vellila” (“campana de Velilla”): http://www.enciclopedia- aragonesa.com/voz.asp?voz_id=2948 https://www.youtube.com/watch?v=-izxdosNvDQ “Isla de San Gabriel (…) más tarde tan mentada”: https://es.wikipedia.org/wiki/Isla_San_Gabriel Isla Martín García. Ver, e. o.: https://es.wikipedia.org/wiki/Isla_Mart%C3%ADn_Garc%C3 %ADa Trabajo propio basado en el trabajo de “pruxo” de Licencia de Documentación Libre GNU https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Isla_martin_garcia- timoteo_dominguez_1.png https://fr.wikipedia.org/wiki/Mart%C3%ADn_Garc%C3%ADa _(%C3%AEle)

– 362 –

Se encuentra a la derecha en el mapa que figura arriba en el texto (mapa publicada por profesora Luciana Aguiar ): http://histoestudiantes2000.blogspot.com/2010_08_01_archiv e.html

Capítulo 19 LUIS PRATS, “Los misterios que dejó Solís: ¿Hizo viajes secre- tos? ¿Había sido pirata? ¿Quiénes lo mataron? Una historia

– 363 – que cumple 500 años” in El País (domingo), Montevideo, 14/02/1916: http://www.elpais.com.uy/domingo/misterios-que-dejo- solis.html Expedición de Solís al Río de la Plata: https://es.wikipedia.org/wiki/Expedici%C3%B3n_de_Sol%C3 %ADs_al_R%C3%ADo_de_la_Plata Muerte de Solís: “Viendo indígenas en la costa oriental, Díaz de Solís in- tentó desembarcar en un bote con 7 de sus tripulantes (entre ellos Alarcón y Marquina, 4 marineros y el grume- te Francisco del Puerto), en un paraje entre Carmelo y Punta Gorda, o en alguna isla situada frente a esa costa. Solís y sus compañeros fueron sorpresivamente ataca- dos por un grupo de indígenas que los mataron y des- cuartizaron ante la mirada del resto de los marinos, que observaron impotentes desde el buque, fondeado a tiro de piedra de la costa. Los cadáveres fueron asados y de- vorados por los indígenas, que fueron identificados co- mo charrúas, sin embargo de que estos no eran caníba- les, pero sí sus vecinos guaraníes (los chandules) que vi- vían en las islas situadas en la cercana costa opuesta. Relación de Herrera sobre la muerte de Solís. (Nótese la S larga utilizada en la caligrafía de la época, representada con el símbolo “ſ”): “Siempre que fueron coſteando la Tierra, haſta ponerſe en el altura ſobredicha, deſcubrian algunas veces Mon- tañas, i otros grandes Riſcos, viendo Gente en las Ribe- ras : i en eſta del Rio de la Plata deſcubrian muchas Ca-

– 364 – ſas de Indios, i Gente, que con mucha atencion eſtaba mirando paſar el Navio, i con ſeñas ofrecían lo que te- nian, poniendolo en el ſuelo. Juan Díaz de Solis, quiſo en todo caſo vèr, què Gente era eſta, i tomar algun Hombre para traer à Caſtilla. Saliò à Tierra con los que podian caber en la Barca : los Indios, que tenian emboſcados muchos Flecheros, quando vieron à los Caſtellanos algo deviados de la Mar, dieron en ellos, i rodeando, los ma- taron, fin que aprovechaſe el ſocorro de la Artilleria de la Caravela : i tomando acueſtas los muertos, i apartando- los de la Ribera, haſta donde los del Navio los podian vèr, cortando las cabeças, braços, i pies, aſaban los cuerpos enteros, i ſe los comian. Con eſta eſpantoſa viſta, la Caravela fue à buſcar el otro Navio, i ambos ſe bolvie- ron al Cabo de S. Aguſtin, adonde cargaron de Braſil, i ſe tornaron à Caſtilla. Eſte fin tuvo Juan Diaz de Solis, mas famoſo Piloto, que Capitan.” (HERRERA) “El grumete Francisco del Puerto no fue asesinado, pero sus compañeros confundidos al haber perdido a su líder, no intentan rescatarlo y retornan junto a los otros dos barcos. Tomando el mando Francisco de Torres (cuñado de Díaz de Solís), regresaron inmediatamente al mar, reaprovisionándose de la carne de 66 lobos marinos en la isla de Lobos. Salaron la carne y llevaron los cueros que luego vendieron en Sevilla. Del Puerto permaneció en Martín García hasta el arribo de la expedición de Sebas- tián Caboto, cuando fue recogido.” HERRERA y Tordesillas, Antonio de; Barcía Carballido y Zúñiga, Andrés González; Historia general de los hechos de los castellanos en las islas i tierra firme del mar océano (Ilustrado por Matías Irala); Imprenta Real de Nicolas Rodriguez Franco; 1726,2 tomos, 292 (Decada primera) +

– 365 – 288 páginas (Decada segunda, page 12: “Muerte de Solís”; transcription ci-dessus): https://ia801409.us.archive.org/14/items/generaldehechosd0 1herr/generaldehechosd01herr.pdf

Capítulo 20 Guillaume CANDELA ; « De Cannibale à Général : Représenta- tions singulières des indiens du Rio de la Plata » : https://www.academia.edu/6244557/De_Cannibale_%C3%A0 _G%C3%A9n%C3%A9ral_Repr%C3%A9sentations_singuli%C3 %A8res_des_indiens_du_Rio_de_la_Plata Cabo de San Agustín: Cabo de Santo Agostinho, cabo de Consolación, o cabo de Santa María de la Consolación « (…) embarqua une petite Indienne (…) ». Ver. p. CCXCIV. “Enrique Montes y Melchor Ramírez – de quienes vuelve a ocuparse la historia al narrar las expediciones de Se- bastián Caboto y de Diego García (…)”. Ver, e. o.: pági- nas CCLV, CCXC-CCXCII, CCCXVII-CCCXXIII, CCCXXVIII-CCCXXXI. En el libro siguiente: José Toribio Medina ; Juan Díaz de Solís. Estudio históri- co ; Santiago de Chile, impreso en casa del autor ; 1897, CCCLII + 252 p. (segundo libro : documentos y biblio- grafía). https://ia800502.us.archive.org/10/items/juandazdesol00med i/juandazdesol00medi.pdf

– 366 – « Francisco del Puerto, captif des Indiens, restait sur les rives de la Mer d’eau douce, » Voir, e. a. : pages CCCXXXII- CCCXXXIII del libro anterior. José Toribio Medina ; Los viajes de Diego García de Moguer al Río de la Plata, estudio histórico ; Santiago de Chile, Im- prenta Elzeviriana ; 1908, 309 p. : https://ia601402.us.archive.org/28/items/losviajesde00mediri ch/losviajesde00medirich.pdf Expedición de Solís al Río de la Plata https://es.wikipedia.org/wiki/Expedici%C3%B3n_de_Sol%C3 %ADs_al_R%C3%ADo_de_la_Plata “El grumete Francisco del Puerto (…) permaneció en Martín García hasta el arribo de la expedición de Sebastián Cabo- to, cuando fue recogido.” José Toribio Medina; El veneciano Sebastián Caboto al servicio de España (…); Santiago de Chile, Imprenta y Encuader- nación Universitaria; 1908, IX-634 p. (tomo I; índice al- fabético del texto; documentos y bibliografía) https://ia801407.us.archive.org/35/items/elvenecianosebas01 medirich/elvenecianosebas01medirich.pdf

– 367 – FUENTES DE LAS ILUSTRACIONES

Capítulo 1 Vista de Sanlúcar en 1567, dibujada por Antonio de las Viñas https://commons.wikimedia.org/wiki/Category:Anthonis_van _den_Wijngaerde#/media/File:Sanlucar_barrameda_vista_pan oramica_1567_Wijngaerde.jpg Marins à la manœuvre du cabestan, Anonyme, Original Print, 19e siècle (Wikipédia). La Santa Maria en mouillage (détail), Andries Van Eertvelt, c. 1628 (The Society for Nautical Research)

Capitulo 12 Illustration de monstres provenant du Musée Vivant du Roman d'Aventures, Muséum d'Histoire Naturelle de Lausanne in Monstres marins, mythes et légendes, dossier thématique Médiathèque de La Cité de la Mer (Cherbourg), Sep- tembre 2013. https://www.pedagogie.ac- nantes.fr/medias/fichier/monstresmarins_1392553930390.pdf Mapa del Castilla de Oro per « Santos30 » (Creative Commons Attribution-ShareAlike3.0Unported li- cense) : https://commons.wikimedia.org/wiki/File :Tierra_Firme_Coq uivacoa.PNG

– 368 – Vasco Núñez de Balboa prend possession de l'océan Pacifique au nom des souverains de Castille, gravure, anonyme, 19e siècle (Wikipédia). https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Balboa_s%C3%BCd see.jpg

Capitulo 13 Islas Canaríes y Golfo de Yegas, Cartografía Abraham Ortelius, 16e siclo in Juan Tous Meliá; Las Islas Canarias a través de la Cartografía : Una selección de los mapas más emble- máticos levantados entre 1507 y 1898 ; Islas Canarias [Ga- viño de Franchy] ; 2014, 264 p. (172 ilustraciones). Mapa con Plano y Vistas de la Yslas de Canaria, Première car- te imprimée aux Îles Canaries, 1786, levée par Josef Tri- nidad de Herrera et gravée par Antonio Hemández Ber- mejo. Pico del Teide (Tenerife) et navires au premier plan, gravure an- cienne. Teide, Siruis Enobs, 26.02.2011 (Wikimédia). licence Creative Commons Attribution – Partage dans les Mêmes Conditions 3.0 (non transposée). https://web.archive.org/web/20161016220014/http://www.p anoramio.com/photo/49132016

Capitulo 14 Pueblo Chico hier: Guanchen, fotografia R. Liebau, 05.04.2006

– 369 – Licence : Attribution – Partage dans les Mêmes Conditions 3.0 (non transposée) https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Pueblo_Chico_Gua nchen2.jpg?uselang=fr Costumes des Guanches, écrasant des céréales et faisant cuire leur repas à l’abri d’une caverne. Carreaux de faïence au Parque García Sanabria in Santa Cruz de Tenerife photo retouchée par Koppchen, 31.07. 2012 Licence Creative Commons Attribution 3.0 Unported https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Parque_03.jpg Llegada de los Conquistadores: Representaciones de Guanches. Carreaux de faïence au Parque García Sa- nabria in Santa Cruz de Tenerife, Koppchen, 31.07. 2012 Licence Creative Commons Attribution 3.0 Unported https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Parque_08.jpg Gravures Guanches/Guanche engravings, Canary Islands : Luc Viatour: Licence : GNU Free Documentation License www.lucnix.be Momia Guanche en el Museo de la Naturaleza y el Hombre (Santa Cruz de Tenerife) : par Cardenasg – Travail per- sonnel, CC BY 2.5, https://commons.wikimedia.org/w/index.php ?curid=1089781 Détail d’une carte du nord-ouest de l’Afrique par Guillaume De- lisle (1707). L’île de Saint-Brendan (« St. Borondon ») est en le parage à gauche en dessous du mot « quelques ».

– 370 – https://etiennefd.com/lile-de-saint-brendan/ https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Guillaume_Delisle_ North_West_Africa_1707.jpg?uselang=fr Cabo de San Antonio, arrecifes de Abre el Ojo, actualmente Abrolhos, cabo Frío (mapa 21060), cabo de Santo Tomé. Ver: https://fr.wikipedia.org/wiki/Cabo_de_Santo_Agostinho La mer des Sargasses dans l'Atlantique nord, Cartographiée d'après Otto Krümmel (1854-1912).- Die nordatlantische Sargasso See (1891), Petermanns geographische Mitteilung- en (1891), Dr. A. Petermann's Mitteilungen aus Justus Perthes' geographischer Anstalt (1891), Justus Perthes Ed- iteur, Gotha, 1891. https://commons.wikimedia.org/wiki/File:1891_SargassoSee_ Krummel_Petermanns_lores.jpg?uselang=fr Ligne de sargasse dans la mer du même nom. Ces lignes peu- vent s'étirer sur plusieurs kilomètres. Les amas d'algues flottantes sont concentrés par les vents forts et l'action des vagues associées au Gulf Stream, anonyme, 09.08.2002, Ocean Explorer/NOAA. https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Lines_of_sargassum _Sargasso_Sea.jpg?uselang=fr Fuego de San Telmo en la arboladura de un barco en el mar in The Aerial World, by Dr. G. Hartwig, London, 1886 https://commons.wikimedia.org/wiki/St._Elmo%27s_Fire?u selang=fr

– 371 – Capitulo 15 Araponga barbu (Procnias averano) embalsamado en el Muséum d'Histoire naturelle de Genève, fotografiado per Totodu le 20.06.2009 https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Araponga_barbu.JP G?uselang=fr Trochilidae, cuadro de Ernst Haeckel in Kunstformen der Natur de 1904, planche 99. https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Haeckel_Trochilida e.jpg 1. Trochilus colubris (Linné) = Archilochus colubris (Linnaeus, 1758) 2. Heliactin cornutus (Bonaparte) = Heliactin bilophus (Tem- minck, 1820)

3. Topaza pella (Gray) = Topaza pella (Linnaeus, 1758) 4. Sparganura sappho (Cabanis) = Sappho sparganura (Shaw, 1812)

– 372 – 5. Lophornis ornata (Lesson) = Lophornis ornatus (Boddaert, 1783) 6. Docimastes ensifer (Gould) = Ensifera ensifera (Boissonneau, 1840) 7. Eutoxeres condamini (Reichenbach) = Eutoxeres condamini (Bourcier, 1851) 8. Lophornis gouldii (Gray) = Lophornis gouldii (Lesson, 1833) 9. Ornismya petasphora (Lesson) = Colibri serrirostris (Vieillot, 1816) 10. Augastes lumachellus (Gould) = Augastes lumachella (Les- son, 1838) 11. Hylocharis Stokesii (King) = Sephanoides fernandensis (King, 1831) 12. Steganura underwoodi (Gould) = Ocreatus underwoodii (Lesson, 1832) Voyages de Cabral au Brésil et à Calicut (Khozhikode, Kerala), retouchée par Odysseus1479 le 22.10.2010. (En rojo, ca- mino seguido por Cabral desde Portugal hacia India en 1500, y el camino de vuelta en azul). Licence: Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Un- ported https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Cabral_voyage_150 0.svg Desembarco de Pedro Álvares Cabral en Porto Seguro el 22 de abril de 1500 por Oscar Pereira da Silva (1865–1939): https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Desembarque_de_P edro_%C3 %81lvares_Cabral_em_Porto_Seguro_em_1500_by_ Oscar_Pereira_da_Silva_(1865 %E2 %80 %931939).jpg Mapa incluyendo, e. o., Cabral y Vespucce: Lobato, Mirta Zai- da; Juan Suriano; Nueva Historia Argentina. Atlas históri- co; Buenos Aires, Sudamericana; 2010.

– 373 – https://historiasocialyeconomicaargentina.wordpress.com/201 4/03/29/america-siglo-xvi-descubrimiento-y-conquista-de- espanoles-y-portugueses/ Illustration tirée de : L’Histoire du monde : la course aux épices », Fred Funken in Tintin, n° 29, 16071958 (courtoisie de M. et Mme Fred Funken, selon autorisation donnée à Bernard Goorden) https://www.idesetautres.be/upload/19580716%20COURSE% 20AUX%20EPICES%20HISTOIRE%20MONDE%20144%20TIN TIN%2029.pdf

Chapitre 16 Depiction (Théodore de Bry) of Spanish atrocities in the New World, as recounted by Bartolomé de las Casas in Narra- tio Regionum indicarum per Hispanos Quosdam devastata- rum verissima : https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Narratio_Regionum _indicarum_per_Hispanos_Quosdam_devastatarum_verissima_ Theodore_de_Bry.jpg Nous avons également reproduit 4 illustrations provenant respectivement des pages 225 (« Indiens brûlés vifs », page 17 de Las Casas), 168 (« Mines d’or de Cuba », en couleurs, Th. de Bry, Grands voyages, Americae, pars. V, planche I), 232 (« Indiens dévorés par des chiens », en cou- leurs, Th. de Bry, Grands voyages, Americae, pars. IV, planche XXII), 257 (« Les Espagnols attisaient le feu au- dessous du gril »), de VERNE, Jules ; Découverte de la Terre ; Paris ; Hetzel ; première partie (chapitre V) et deuxième partie, chapitre VI :

– 374 – http://passerellesdutemps.free.fr/edition_numerique/IGCD/9 _GEOGRAPHIE_%20HISTOIRE_SCIENCES_AUXILIAIRES_DE _L_HISTOIRE/91_Geographie_explorations_voyages/910.9_D ecouverte_de_la_terre.pdf Ilustración (« Treize pendus brûlés », ver también infra) de Théodore de Bry (1528 – 1598) inspirée d’un passage de la Brevísima, décrivant des massacres d’enfants amérin- diens par les Espagnols. Probablement extraite de la tra- duction latine de 1598 : https://commons.wikimedia.org/wiki/File:De_Bry_1c.JPG La Minerìa : Trabajada principalmente por indìgenas, donde luego es obrada por los negros, quienes fueron traidos a Amèrica para hacer trabajos forzosos. Los conquistado- res tenìan el pleno control de la producciòn y los terre- nos. https://nataechev.wixsite.com/unregaloparati/single- post/2016/10/28/Actividades-productivas-en-la-colonia Hatuey (Baracoa). http://laurent.quevilly.pagesperso-orange.fr/Hatuey.html

Chapitre 17 Mapas de la Provincia del Río de la Plata (…) sacados de DUVIOLS, Jean-Paul ; L’Amérique espagnole vue et rêvée. Les livres de Christophe Colomb à L. A. de Bougainville (1492-1768) ; (Paris), Éditions Promodis (Collection diri- gée par Jean Viardot) ; 1985, p. 260 (1602), p. 380 (e. a. Capitanía del Rey ; 17ème siècle).

– 375 – P. 12 de Travels in Buenos Ayres, and the adjacent provinces of the Rio de la Plata. With observations, for the use of persons who contemplate emigrating to that country; or, embarking capital in its affairs, BEAUMONT, J. A. B, London, 1828. https://commons.wikimedia.org/wiki/File:(1828)_PLATE_OF_ THE_PROVINCES_OF_BUENOS_AYRES,_BANDA_ORIENTAL _%26_ENTRE_RIOS.jpg Desembarco de Juan Díaz de Solís en las costas de la Banda Oriental (actual Uruguay), acechado por indios Charrúas que lo matarían poco después, Ulpiano Checa, in "Historia Argentina" de Abad de Santillán, 19e siècle. https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Descubrimiento_del _R%C3%ADo_de_la_Plata.jpg Cinnamon Teal Anas cyanoptera, Los Osos (Cuesta by the Sea Inlet), Morro Bay, CA, March 29, 2007, "Mike" Michael L. Baird. Licence Creative Commons Attribution 2.0 Generic https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Sarcelle_cannelle.jp g

Chapitre 19 LUIS PRATS ; “Los misterios que dejó Solís: ¿Hizo viajes secretos? ¿Había sido pirata? ¿Quiénes lo mataron? Una historia que cumple 500 años” in El País (domingo), Montevideo, 14/02/1916 : http://www.elpais.com.uy/domingo/misterios-que-dejo- solis.html

– 376 – Ce livre numérique

a été édité par la bibliothèque numérique romande

https://ebooks-bnr.com/ en mars 2020.

— Élaboration : Ont participé à l’élaboration de ce livre numérique : Bernard Goorden (Ides et Autres), Isabelle, Maria Laura, Françoise. — Sources : Ce livre numérique est réalisé principalement d’après : Roberto J. Payró, El mar dulce, roman historique (avec traduction française), Bruxelles, édition numérique « Ides et Autres », 2016. L’édition BNR est réalisée avec l’aimable autorisation de Bernard Goorden. L’illustration de première page, Desembarco de Juan Díaz de Solís en las costas de la Banda Oriental (actual Uruguay), acechado por indios Charrúas que lo matarían poco después, Ulpiano Checa, in Abad de Santillán, Historia Argentina, 19e siècle (Wikipédia). — Dispositions : Ce livre numérique – basé sur un texte libre de droit pour le texte espagnol – est à votre disposition. La traduction française de Bernard Goorden est sous copyright, 2016. Vous pouvez utiliser ce livre numérique, sans le modifier, mais vous ne pouvez en utiliser la partie d’édition spécifique (traduction française, notes, présentation éditeur, photos et maquettes, etc.) à des fins commerciales et pro- fessionnelles sans l’autorisation de la Bibliothèque numérique ro- mande et du traducteur (pour la traduction française et les notes). Merci d’en indiquer la source en cas de reproduction. Tout lien vers notre site est bienvenu… — Qualité : Nous sommes des bénévoles, passionnés de littérature. Nous faisons de notre mieux mais cette édition peut toutefois être enta- chée d’erreurs et l’intégrité parfaite du texte par rapport à l’original n’est pas garantie. Nos moyens sont limités et votre aide nous est indispensable ! Aidez-nous à réaliser ces livres et à les faire connaître… — Autres sites de livres numériques : Plusieurs sites partagent un catalogue commun qui répertorie un ensemble d’ebooks et en donne le lien d’accès. Vous pouvez consulter ce catalogue à l’adresse : www.noslivres.net.

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