Gluck

Iphigénie en Tauride

Opéra de Bordeaux

Iphigénie en Tauride

Tragédie opéra en quatre actes

Livret de Nicolas-François Guillard

Musique de Christoph Willibald von Gluck

Créé à Paris, sur la scène de l'Académie royale de musique, le 18 mai 1779

Grand-Théâtre de Bordeaux Avril-mai 2000 Assistante à la direction musicale et clavecin : Béatrice Berstel

Assistants à la mise en scène : Sophie Petit, Johannes Haider

Chef de chant : Martine Trégan

Dramaturgie : Witold Bayer-Quest

Régie générale : Clovis Bonnaud

Maquillages réalisés par : Annie Lay-Senrens

Décors, costumes, accessoires et perruques réalisés par : les Ateliers de l'Opéra de Bordeaux

Première partie (Acte I - Acte II) : 60 mn Entracte : 20 mn Deuxième partie (Acte III - Acte IV) : 50 mn Durée totale du spectacle : 2 h 10 mn environ. Nouvelle production Opéra de Bordeaux

Iphigénie en Tauride

Musique de Christoph Willibald von Gluck

Direction musicale : Jane Glover Mise en scène : Edouard Reichenbach Décors : Philippe Miesch Costumes : Dominique Louis Lumières : Nicolas Simonin Direction des études chorales : Jacques Blanc

Iphigénie : Isabelle Vernet Thoas : Vincent Le Texier Oreste : Marc Barrard Pylade : William Burden Quatre prêtresses : Catherine Biar-Melle, Dania Di Nova Malichev Isabelle Lachèze Wha-Jin Lee Diane : Bernadette Lamothe Un Scythe / Un ministre : David Grousset Une femme grecque : Marilena Goia

Orchestre National Bordeaux Aquitaine Directeur musical : Hans Graf

Chœur de l'Opéra de Bordeaux

Première le 30 avril 2000 Grand-Théâtre Bordeaux Le sacrifice d'.Iphigénie. Argument

La douloureuse Légende mythologique est dans toutes les mémoires : Agamemnon sacrifiant sa fille Iphigénie, Diane sauvant la pure vic­ time de l'ambition paternelle et enfin la sombre fatalité qui s'abat sur la famille d'Agamemnon tué par sa femme, elle même frappée à son tour par la vengeance d'Oreste.

Sauvée par Diane au moment où elle allait être immolée, Iphigénie a été conduite par la déesse en Tauride où elle est devenue la prêtresse du temple consacré à la Divinité. Une loi rigoureuse du tyran Thoas impose que les étrangers qui abor­ dent en Tauride soient impitoyablement sacrifiés devant la statue de Diane. Iphigénie a pour mission de les conduire à l'autel. Toutes ses pensées la portent vers la Grèce et vers son frère Oreste.

Une violente tempête s'abat sur les rivages de Tauride et l'orage gronde. Iphigénie fait à ses compagnes le récit d'un songe effrayant qui l'a glacée en lui montrant le palais de son père renversé par la foudre, l'infortuné Agamemnon percé de coups et, obéissant à un ascendant impérieux, elle s'est vue meurtrière d'Oreste. Accablée par la fatalité, elle craint les plus grands malheurs. Tremblant de terreur, Thoas vient au pied de l'autel supplier la prê­ tresse d'intercéder pour lui. Ses jours lui semblent menacés si la vie d'un seul étranger était épargnée, et c'est avec des cantiques de joie que le peuple accueille la nouvelle de l'arrivée de deux jeunes étran­ gers qui sont conduits au temple où ils devront trouver la mort. 7 Les horribles pressentiments d'Iphigénie n'avaient pas menti, car les deux jeunes Grecs qu'un sort cruel a amenés en ce pays inhospitalier ne sont autres qu'Oreste et son ami Pylade : Oreste fuyant le souve­ nir maudit du meurtre de sa mère et Pylade enchaîné par les liens de la plus sincère amitié. C'est lui qui console l'infortuné Oreste, s'accusant d'avoir entraîné son ami dans l'abîme de ses malheurs. Des gardes ont séparé les deux compagnons fidèles et Oreste demeure seul, livré aux tourments des Furies qui viennent l'assaillir, l'accabler de mille remords. A la vue d'Iphigénie, Oreste tressaille, saisi d'une ressemblance. Il croit revoir sa mère, Clytemnestre, et recule d'horreur, mais les paroles de la prêtresse ont dissipé son trouble. Une tendre pitié envahit l'âme d'Iphigénie. Cet inconnu lui rappelle son frère et elle veut l'arracher au trépas. Mais l'heure funèbre a sonné, et, malgré ses alarmes, Iphigénie est condamnée à plonger le fer sacré dans le sein du noble étranger qui l'a si doucement émue ; pour­ tant elle ne saurait s'y résoudre sans implorer encore la Déesse. Cependant, les prêtresses conduisent Oreste au sacrifice. Se traînant avec peine, Iphigénie saisit le glaive et, tremblante, va frapper... Oreste s'écrie alors :

« Ainsi tu péris en Aulide, Iphigénie, 6 ma sœur ! »

A ces mots, Iphigénie reconnaît le frère bien-aimé et le presse dans ses bras, tandis que les prêtresses grecques se prosternent devant leur roi. Thoas, prévenu, se précipite afin de hâter le supplice et ordonne de frapper le fils d'Agamemnon. Dans sa fureur, il veut le tuer lui-même, menaçant Iphigénie. Mais Pylade, suivi d'une troupe de Grecs, a pénétré dans le temple et abat le tyran. Les gardes scythes, pour venger leur maître, se jettent sur les Grecs. Diane apparaît et apaise les combattants. Elle fait alors entendre ses décrets éternels : Oreste retournera à Mycène pour y régner ; Iphigénie quant à elle sera rendue aux Grecs. Iphigénie : Orages, beaux désespoirs Danielle PORTE

Orage. Est-il orage en pays grec, en pays d'Harmonie ? Orage épique, oui. Orage, au début de l'Odyssée, où Poséidon-Neptune joue un rôle essentiel. Orage, plus tard, pour commencer l'Enéide et jeter Enée sur les côtes de Carthage. Orage faut-il pour amener Oreste aux rivages de Tauride. Orage n'y a-t-il pas, en revanche, chez Euripide, où l'on ne voit d'abord en scène qu'Iphigénie obsédée par son rêve tra­ gique et la vision de son frère mort. Cet orage a, d'abord, fourni l'une des originalités de l'ouvrage : un début ex abrupto, où l'on entend s'élever, en plein milieu des tour­ billons de musique déchaînés par les coups de timbales qui cassent eux-mêmes la longue et sereine ligne élégiaque de l'ouverture, la prière d'Iphigénie et des prêtresses : "Grands Dieux, soyez-nous secou- rables". l'affirmation, d'emblée, "l'innocence habite en nos cœurs", donne le ton : de blanches vierges terrorisées, d'innocentes victimes... El pourtant : ce sont elles, les exécutrices d'autres malheureux que les tempêtes jettent sur les côtes de Scythie. Bien contre leur gré : elles ne font qu'exécuter les ordres d'Artémis la Sauvage. Et voici la Fatalité grecque, YAnankè, gravée, selon Hugo, dans l'escalier de Notre-Dame. Euripide avait pris soin d'enchâsser le sujet de sa pièce dans la ligne des Destins, et il l'expliquait, cette interminable suite d'horreurs qui amenait à lui, en plusieurs temps : au Prologue, il mettait dans la bouche d'Iphigénie la généalogie de son héroïne : Tantale, Pélops, Atrée, Agamemnon ; et puis le sacrifice d'Aulis, la biche, et la pitié d'Artémis, qu'elle sert à présent. Dans un premier Chœur (v. 123 sqq.), il présentait ses suivantes, Grecques exilées dans le pays de la Mer Hostile et des rocs Symplégades, loin du foyer lumineux ; et elles chan­ taient les meurtres des Atrides, depuis l'Agneau d'or qui "déchaîna peine sur peine, meurtre sur meurtre et deuil sur deuil". Dans un autre chœur, il dénonçait (v. 432 sqq.) Hélène et sa faute. Les chants d'Iphigénie évoquaient, eux, chaque fois, sous diverses formes, le sacrifice à Aulis, qui l'avait, nous dirions aujourd'hui, traumatisée. De la même façon, Oreste racontait tout ce qui avait précédé son arrivée : le meurtre de Clytemnestre, son jugement sur l'Aréopage, son séjour à Delphes, l'ordre d'Apollon qui l'envoyait chez les Scythes. Sombre lignée, certes, que celle des infortunés jeunes Atrides ! Tantale, l'ancêtre, roi de Lydie, sert au banquet des dieux, histoire de tester leur intelligence, le corps de Pélops, son fils, mis en ragoût. Ils devinent, punissent, ressuscitent l'enfant, qui aura, plus tard, deux fils, jumeaux, Atrée et Thyeste. Et l'histoire se renouvelle : un agneau d'or naît chez Atrée, dont l'épouse, Aéropé, est la maîtresse de son beau-frère, et lui donne l'agneau. Atrée noie d'abord sa femme, et fait manger ensuite à Thyeste un autre épouvantable ragoût : le corps de ses deux fils aînés, Tantale et Plisthène. Il ne reste à Thyeste que le plus jeune... Egisthe ! Ce nom seul nous amène aux choses plus connues. Les fils d'Atrée, Agamemnon et Ménélas, ont épousé les filles de Tyndare, Clytemnestre et Hélène, celle même que Pâris, pour obéir, encore, à Aphrodite, a enlevée et conduite à Troie. Mobilisation générale. Sacrifice d'Iphigénie, pour obtenir les vents voulus. Guerre de Troie. Et puis, les Retours, ceux qui ne sont pas racontés dans l'épopée homérique mais fourniront les thèmes des nostoi aux Chants Cycliques, aux Chants Cypriens, plus tard aux Tragiques grecs. Le retour, notam­ ment, d'Agamemnon, tué, en même temps que Cassandre, sa captive, par Clytemnestre et son amant Egisthe ; vengé plus tard par Oreste aidé de sa sœur Electre. Eschyle, Sophocle et Euripide en donnèrent une éclatante illustration1. La suite ? Nous l'avons, justement, avec l'Iphigénie en Tauride. Iphigénie, qu'Artémis avait sauvée in-extremis, va être ramenée dans son pays par Oreste, après quelques péripéties. Rien de tout cela dans le texte que Gluck a mis en musique. Rien. Au lieu de la sanglante vendetta qui s'exerce entre les fils d'Atrée et ceux de Thyeste, au lieu des haines inexpiables conçues contre eux par les divinités, parfois depuis longtemps, tout est centré sur le dilemme sublime qui va déchirer les cœurs d'Oreste et de Pylade, la vie pour soi-même ou pour son ami, et sur le dilemme crucial qui torture celui d'Iphigénie : lequel tuer des deux beaux jeunes gens captifs devant elle ? Simplicité, donc, et pureté... grecques. Celle de ces colonnes idéale­ ment blanches parmi les oliviers de paix. Peu conforme à la réalité archéologique, on le sait. Mais l'art lyrique a peu à voir avec l'archéologie. Le drame se déroulera donc simplement, sans trop d'ornements super­ flus, seulement un ou deux petits chœurs colorés de Scythes sanguinaires, pour mieux faire ressortir le blanc, ou les pittoresques Euménides chargées d'extérioriser les remords du meurtrier de sa mère. Le librettiste aggrave, aussi, les tourments de la prêtresse qui, chez Euripide, n'avait qu'à purifier les prisonniers, non à les tuer : "c'est moi, du moins, qui les consacre ; d'autres ont charge de les égorger déclare-t-elle (v. 40)" face à l'injonction des prêtresses dans l'opéra français : "Approchez, souveraine prêtresse / Remplissez votre auguste emploi / ... frappez !". Linéaire, aussi, l'action de l'Iphigénie en Tauride, là où le Tragique grec multipliait les complications d'un stratagème ourdi par Iphigénie, qui feint de devoir aller purifier ses victimes dans la mer, enjoint au roi de se voiler pour éviter tout sacrilège, lui chante un conte pour justifier qu'elle tienne dans ses bras la statue d'Artémis — qu'elle veut, aussi, purifier —, et s'évertue à détourner ses soupçons sur l'identité des cap­ tifs. Complications dernières avec le roi enfermé dans le temple par les prêtresses complices, interminable récit sur le combat près des nefs... La tragédie tourne à l'épopée, l'action y devient reine. Dégraissé, aussi, le texte ancien, d'une quantité de sous-entendus, quiproquos et autres joyeusetés d'expression, qui devaient faire le régal des spectateurs, en même temps qu'ils mettaient en œuvre la fameuse "ironie tragique" de mise dans un spectacle : double est la jouissance du spectateur lorsqu'il entend, sur la scène, les personnages proférer des paroles dont ils sont bien loin de deviner la portée, ou marcher à pas ralentis vers une solution que la salle connaît déjà. L'intérêt qu'on porte à l'action s'augmente d'un intérêt de curiosité : devinera ? Devinera pas ? "Puisse être tel que toi le frère qui me reste !" s'exclame Iphigénie parlant à Oreste, qu'elle ne connaît pas. "Hélas !" répond ce dernier, "si les mains de ma sœur pouvaient m'ensevelir !" Et celle dont il ignore qu'elle est sa sœur de rétorquer : "Qui que tu sois, ta sœur habite loin de ce pays barbare". Le meilleur — ou le pire — est atteint avec la lettre qu'lphigénie destine à Oreste, qui est à côté d'elle et qu'elle s'apprête à égorger, accompagnée de cette formule, terrifiante quand on y songe, qu'elle adresse à Pylade : "tu lui apporteras un bon­ heur dont il ne pourra pas douter". Le sel de pareilles répliques est un sel plus qu'amer. Peut-être est-ce là un trait des pièces "mineures", celles qui, sans que ce soit la faute de l'auteur, né trop tard ! exploitent les pièces plus anciennes. Un peu comme ces romans qu'on tire d'un premier chef- d'œuvre, afin de prolonger la vie de héros "réussis" et d'inventer leur mort. Paul Féval écrivit un chef-d'œuvre, son fils se borna à l'exploiter en des sous-romans inutiles et laborieux. Au terme des Euménides d'Eschyle, Apollon délivrait Oreste des terribles Furies. Un prolonge­ ment fut alors donné à la pièce conclusive de sa trilogie, par la supposition que certaines Furies n'avaient pas désarmé, amenant Apollon à conseiller à son protégé d'aller en Tauride enlever la statue d'Artémis, pour se délivrer définitivement. C'est ce qu'Euripide a sinon inventé, du moins pris comme thème initial. En tout cas, si le librettiste de Gluck avait suivi Eschyle, Oreste ne pourrait pas chanter — et ce serait dommage ! — "Dieux qui me poursuivez..." Les ciseaux du librettiste de Gluck se sont exercés ailleurs, et tant mieux pour l'économie entière de l'œuvre chantée, où le chant suppose des répétitions, soit de couplets soit de vers, destinées à rendre intelli­ gible un texte chanté, autant qu'à répondre à des exigences formelles pré-établies : l'allongement qu'elles entraînent nécessite des coupures dans le texte qu'on suit. La révélation tarde, tarde par trop, chez l'auteur grec. Lorsque Iphigénie donne sa lettre à Pylade "pour ses parents", on attend le nom des parents. Il ne vient pas avant maintes précautions et serments des­ tinés à assurer la sûreté des précieuses tablettes au cas où Pylade serait tué, ferait naufrage, etc. Il jure de les apprendre par cœur, et enfin, enfin ! Iphigénie prononce le nom d'Oreste. L'intéressé va-t-il s'exclamer ? Reconnaître enfin sa sœur ? Non. C'est Pylade qui, en un jeu de scène émouvant, exécute la commission don­ née : "J'apporte les tablettes et les mets dans tes mains, Oreste, de la part de ta sœur !". Là, oui, nous avons du beau et du bon — et du vrai.

Gluck par Duplessis. Mais Iphigénie larde à se réjouir. Ce n'est pas encore l'époque du cri sublime, "Orest !" qu'arrachera aux entrailles de sa sœur Elektra, chez un Richard Strauss, la vision du frère enfin revu. Il faut qu'Oreste prouve, à coup de souvenirs, de petits détails, qu'il est bien lui. Et quand Iphigénie cède enfin, point ne leur est permis de s'embrasser : elle est prêtresse ! Au lieu de ces retards et tergiversations, l'émotion pure, dans la plainte résignée d'Oreste sous le couteau : "Iphigénie ! aimable sœur / c'est ainsi que jadis tu péris en Aulide !" suivie des exclamations de rigueur. Auparavant, le spectateur a suivi avec délectation la succes­ sion d'entretiens au terme desquels Iphigénie s'approche de plus en plus près de la vérité, qu'un aveuglement de dernière seconde vient chaque fois lui dérober. Oreste lui apprend la mort d'Agamemnon et de Clytemnestre. Le frère et la soeur vont-ils se reconnaître ? Non. Pourtant, ils en sont bien près : "Quelle est donc cette femme ?" se demande Oreste. "Je sens, dit Iphigénie, la pitié la plus tendre / Mon coeur s'unit à lui par des rapports secrets / Oreste serait de son âge ! / Ce captif malheureux m'en rappelle l'image / et sa noble fierté m'en retrace les traits..." Mais elle ne pousse pas plus loin le raisonnement. Pylade lui demande-t-il son nom quand il prend la lettre destinée à Electre ? Elle refuse sans appel. Peu de discernement, aussi, dans son dialogue avec Oreste. "Que veniez-vous chercher dans ces climats affreux ?" lui demande Iphigénie. Pas de réponse autre que le récit des meurtres que commit Oreste. Qui, s'il n'est pas Oreste, pourrait être ce jeune homme de son âge, qui répond par l'histoire d'Oreste quand on lui demande qui il est ? La simplicité a, elle, le défaut d'être... courte ; donc, d'exiger qu'on délaye. Mais le glissement est si adroitement réa­ lisé qu'on se laisse aller à sa fluidité sans regretter qu'il louvoie quelque peu. Le centre d'intérêt principal est, chez Gluck, le dévouement célèbre qui pousse chacun des deux amis à se sacrifier pour l'autre et les a transformés en symbole, au même titre qu'Achille et Patrocle ou Thésée et Pirithoiis. Là encore, l'opéra dégraisse la tragédie : à aucun moment ne sait-on que Pylade a épousé Electre, et se trouve donc être à la fois le cousin, le beau-frère et l'ami intime d'Oreste. Cela épure encore leur amitié légendaire, au lieu que Pylade, chez Euripide, se faisait scrupule de ce que l'opinion l'accuserait, s'il abandonnait Oreste, d'avoir voulu ravir l'héritage des Atrides pour lui et sa femme. L'assaut de générosité entre les deux amis nous élève donc aux hau­ teurs du sublime : face au choix cornélien qui lui est imposé, Iphigénie veut épargner d'abord Oreste, pour qui elle se sent tendrement émue, et l'envoyer en Grèce. L'élu proteste : il veut mourir, et recourt au chan­ tage, avec tant de sombre énergie qu'on lui cède, ce qui va obliger Iphigénie à se muer, elle qui fut sacrifiée jadis, en sacrificatrice2. Impute

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"La luna immobile / inonda l'etere / d'un raggio pallido Canta Sirena / la luna è bianca3..."

Ainsi chantera-t-on — bien plus tard — Hélène, elle aussi de la famille, elle aussi héroïne de Gluck. Ce dernier n'avait pas, s'en faut, à sa disposition, la plume d'un Boïto. Son librettiste se contenta donc d'écrire : "Un jour plus pur luit sur nous / Une paix douce et profonde / règne sur le sein de l'onde / La mer, la terre et les cieux / tout favorise nos vœux". Ce n'est pas égal. Mais l'atmosphère y est. Paix, donc, des âmes et de la mer. Selon l'alternance immanquable qui faisait se succéder, chez les Grecs, le désordre de Dionysos et l'har­ monie d'Apollon. Pour qu'il y ait ordre, il faut qu'il y ait eu désordre ; et l'ordre, kosmos, nait du désordre, chaos. Avec les épreuves qu'ils ont vécues, Oreste, Pylade et Iphigénie vont accéder à l'ordre. Leur kathar- sis est alors achevée4. Le sang de Clytemnestre a trouvé le repos, celui, aussi, des hommes que la prêtresse, innocente peut-être mais respon­ sable, a souvent répandu. Les Erinyes ont lâché prise. Apollon, qui envoyait Oreste en Tauride, peut briller sans souillures, lui qu'appel­ lent à rayonner serein les prêtresses exilées d'Euripide. "Il n'est pas de plus beau sacrifice que de donner sa vie pour son ami". Outre sa katharsis, Oreste aura gagné à l'aventure une sagesse... platonicienne.

Danielle Porte est Maître de Conférences à l'Université de Paris IV-Sorbonne et Présidente du Cercle Loisirs Lyriques de Grenoble.

1 - Eschyle avec /'Orestie (Agamemnon, les Choéphores, les Euménides) ; Sophocle avec Electre ; Euripide avec les deux Iphigénie, Oreste, Electre. 2 - Le choix d'Agamemnon entre sa fille et les intérêts des Grecs se reflétait en miroir dans le choix de sa fille, entre son frère et son sacerdoce. Dans les deux cas, c'est un conflit individu contre collectivité. Pour l'Iphigénie de Gluck, elle n'a pas de choix autre que de sauver un des deux hommes et de sacrifier l'autre. Elle n'en est que plus touchante. 3 - "La lune immobile inonde Véther d'un pâle rayon. Chante, Sirène, la lune est blanche"... Mefistofele, de Boïto, duo Hélène / Pantalis, sur une barque de nacre et d'argent glissant sur le fleuve Pénée. Une vision des "Enfers classiques" bien dans la manière de Gluck. 4 - Pylade retrouve Electre et ses enfants. Oreste épouse Hermione, fille d'Hélène. Iphigénie assure le culte d'Artémis avant de rejoindre son fiancé, Achille, aux lies Blanches des Bienheureux. On voit com­ ment la Tragédie s'accommode des mythes ! Gravure de Diane d'après Émile Lévy (Salon de 1865). L'Antiquité rêvée, l'Antiquité recréée... François de POLIGNAC

« Restez en vous-mêmes, et ne vous aveuglez point sur votre position. Les anciens peuples ne sont plus un modèle pour les modernes ; ils leur sont trop étrangers à tous égards. » L'avertissement que Jean-Jacques Rousseau adressa en 1764 à ses compatriotes gene­ vois dans la neuvième des Lettres écrites sur la montagne paraît bien isolé, et peu efficace, en un siècle qui poussa l'identification à l'Antiquité plus loin qu'aucun autre auparavant. La Renaissance avait connu la redécouverte de l'Antiquité ; le XVIIIème siècle inventa le projet de revivre l'Antiquité. Une double mutation se produisit. L'époque bai­ gnait encore, à ses débuts, dans la tradition humaniste où la familiarité avec les auteurs classiques, sources de modèles éternels, n'empêchait pas de représenter l'Antiquité à la mode baroque ou rocaille : le temps était au triomphe des Modernes contre les Anciens. De plus, cette Antiquité était dominée par l'image et le souvenir de Rome. Dans les dernières décennies du siècle, une vision du passé renouvelée par les découvertes récentes mais largement idéalisée, où la Grèce rayonnait désormais d'un éclat nouveau, devait au contraire fournir les modèles d'une régénération de la société et de la politique, des arts et des lettres. La prépondérance originelle de Rome, et plus particulièrement de la Rome impériale, est l'héritage de la Renaissance. Les ruines de la ville et les découvertes incessantes qui nourrissent les collections aristocra­ tiques ou les travaux des érudits font de l'histoire romaine une réalité tangible ; c'est elle aussi qui fournit aux princes la plupart des grands exemples historiques, tels Auguste, Trajan ou Marc-Aurèle ; elle enfin qui permet d'opérer la jonction entre histoire sacrée et histoire profane, grâce à la coïncidence entre la naissance du Christ et la fondation de l'empire par Auguste. Les fouilles de grande ampleur du premier tiers L'Odéon d'Hérode Alticus à Athènes. du XVIII>me siècle, en particulier celle des palais impériaux sur le Palatin, portent au plus haut le prestige de cette « Rome des Césars » et suscitent des émules : en 1738, don Carlos de Bourbon, roi de Naples, fait commencer à Herculanum une fouille de grande envergure dont les résultats restent longtemps jalousement gardés comme s'il s'agissait d'un secret d'Etat, tandis que la découverte accidentelle d'un sanctuaire de l'époque d'Auguste à Nîmes suscite en France le premier débat sur la façon d'intégrer des vestiges antiques dans un projet de modernisation urbaine. Cette effervescence n'est pas sans effet dans le domaine de l'art. Dès les années 1730, à Paris, un amateur éclairé, le comte de Caylus, sou­ tient les essais de retour à l'antique du sculpteur Edme Bouchardon tandis qu'à Rome la création du musée du Capitole facilite l'accès des chefs d'oeuvre antiques aux artistes. A Rome encore, le graveur Piranèse entame en 1740 son œuvre tout entière tournée vers l'exalta­ tion de la majesté romaine. Mais les exigences nouvelles nées de la crise latente de l'Ancien Régime portent ce mouvement vers de nou­ veaux horizons. En 1748, Montesquieu publie L'Esprit, des lois où il exalte la vertu des anciennes républiques contre l'arbitraire et la cor­ ruption des pouvoirs absolus ; au même moment, une vive réaction contre les excès du style rocaille pousse l'Académie royale de peinture à rejeter la mythologie galante pour réhabiliter la peinture d'histoire où la beauté formelle traduit la grandeur morale des idéaux mis en image. Cette réaction louche peu après le domaine du théâtre et de la musique à l'occasion de la « querelle des bouffons », où l'esthétique surchargée du goût français est violemment condamnée par les philosophes. Réforme de la société par la vertu et le dévouement à la chose publique, retour à une noble simplicité d'expression : cette double aspiration politique et esthétique trouve en Diderot ou Rousseau ses plus brillants défenseurs et suscite à partir de 1750 un nouvel imagi­ naire de l'Antiquité où la Grèce, voire la Rome primitive, prennent le pas sur la Rome impériale, sa majesté et sa profusion ornementale. Cette Grèce-là est une vision idéalisée, peuplée de cités austères pré­ servées de la corruption et de la décadence par de sages législateurs, comme Sparte — Athènes, cité du commerce et du luxe, est considérée avec suspicion —, et de héros qui se sont sacrifiés pour le bien public. Elle envahit tous les arts : en peinture, où les Salons mettent à l'hon­ neur les thèmes édifiants de l'histoire et de la mythologie, comme au théâtre, où les tragédies mettant en scène Œdipe, Iphigénie ou Philoctèle se multiplient, ou dans les arts décoratifs, le succès des thèmes « à l'antique » s'accompagne de la recherche d'un style épuré, le « goût grec » qui fait fureur à Paris dans les années 1760 ; c'est dans ce mouvement que Gluck inscrit sa propre réforme de l'opéra. Mais que sait-on de la Grèce qui permette d'y trouver les formes concrètes d'un art dépouillé d'artifices ? Les artistes qui portent ce mouvement sont en réalité tous formés à Rome, et l'art romain reste encore largement le filtre à travers lequel on restitue la noblesse grecque. Lorsque le peintre Joseph-Marie Vien expose, au Salon de 1763, sa célèbre série de figures « à la grecque », c'est en fait dans les peintures d'Herculanum, dont l'impact est d'autant plus fort qu'elles viennent d'être publiées, qu'il est allé chercher ses modèles. Et c'est à Rome que le créateur de l'histoire de l'art, Johan Joachim Winckelmann, s'est donné l'ample vision de l'art antique lui permettant de formuler le double postulat qui fonde toute une philosophie esthétique : l'idéal du beau a été créé dans la Grèce classique, et cette perfection est consub- stantielle à l'état de liberté. C'est en architecture qu'une création authentiquement grecque, l'ordre dorique dont la mode se répand avec la connaissance des temples de Paestum, en Italie du sud, dans la seconde moitié du siècle, finit cependant par incarner toutes les fictions qui se nourrissent de ces Antiquités idéalisées : en exprimant, au gré des interprétations, le dépouillement de la société primitive, voire la nostalgie du retour à la nature, mais aussi la rigueur d'un monde d'idéaux héroïques ou la solennité d'un ordre immuable, le plus sévère des styles grecs vient clore le parcours au long duquel, en imaginant recréer l'Antiquité, le XVIIème siècle a exploré toutes les facettes d'une Antiquité rêvée.

François de Polignac est chercheur au CNRS et spécialiste de l'Antiquité. Les Iphigénies et l'art du Chevalier Gluck Jean d'UDINE

D'un caractère moins solennel, et moins âpre qu'Alceste, les deux Iphigénies, pendant toute la fin de l'Ancien Régime, conservèrent la prédilection de la ville et de la cour. Ce fut pour monter la pre­ mière, Iphigénie en Aulide, composée sur une excellente adaptation de la tragédie de Racine par le bailli du Roullet, que Gluck vint pour la première fois s'établir en France à l'automne de 1773. Son délicieux ouvrage fut joué à l'Académie de musique, le 19 avril 1774. Iphigénie en Tauride, écrite dix ans plus tard, sur un livret de Guillard, passa au même théâtre, le 18 mai 1779. Ce devait être le dernier triomphe de Gluck. Les Iphigénies, composées sur des poèmes plus mouvementés qu'Alceste, excitent la terreur et la pitié au même degré que leur devancière. Mais elles font songer moins que celle-ci aux premiers tra­ giques grecs ; plus délicates de forme, plus virginales de sentiment, plus intimes en quelque sorte, elles rappellent surtout Euripide et séduisent par une grâce toute racinienne. La fille d'Agamemnon remplit les deux pièces de sa personnalité tou­ chante ; moins altière et moins héroïquement surhumaine que l'épouse d'Admète, elle conserve, même dans sa douloureuse abnégation sur les rivages de l'Aulide, même dans sa robe rouge de sacrificatrice, en Tauride, quand elle implore de Diane le courage de la férocité, quelque chose de délicat et de frêle, qui séduit infiniment et nous la rend plus chère. Sa présence répand sur les deux drames un rayon de jeunesse et de douceur, dont la musique de Gluck accentue sans cesse le charme candide, par une élégance sans mièvrerie, une délicatesse sans recherches, une incroyable fraîcheur de tons. Le musée du Louvre possède un admirable tableau, exécuté par Fragonard pour son entrée à l'Académie : "Le grand prêtre Corésus se sacrifiant pour sauver Callirhoé". Le maître de Grasse peignait cette grande toile en 1765, l'année même où Gluck écrivit Alceste. Or, il semble que, dans le domaine plastique, ce soit l'image la plus voisine, on dirait presque la transcription de l'art musical de Gluck. Noblesse de la ligne, sentiment tragique des attitudes, émotion à la fois discrète et profonde, tout rap­ pelle ici la sensibilité du compositeur, et cette couleur si douce et si lumineuse caressant les infortunés protagonistes du drame ! et ces com­ parses actifs intimement unis à l'action dans l'enveloppe d'une demi-teinte chantante ! Avec un autre sujet, c'est l'art d'Iphigénie transporté dans un domaine dont les qualités plus concrètes et plus tan­ gibles rendent l'analyse plus sûre et l'étude plus facile. Dès la scène où Clytemnestre et sa fille arrivent en Aulide, le chant si pur et si simple des chœurs, célébrant les attraits et la majesté de la jeune princesse, que nous voyons pour la première fois, tissent autour d'elle une atmo­ sphère de séduction, comme les touches blondes et transparentes de Fragonard autour du prêtre de Dionysos, et nous enferme tout de suite dans un réseau de sympathies fraternelles. Un siècle plus tard, Gounod essayant de célébrer à son tour les seize ans fleuris de Juliette, se sou­ vint de cette page exquise, dans la première scène de son opéra. Mais sa muse, moins haute et moins chaste que celle du vieux maître, n'en trouva qu'un écho peu fidèle, et des deux chœurs, le plus jeune est celui qui résonna cent années avant l'autre. Si les Iphigénies ont cette grâce féminine, il ne faut pas croire que la force en est exclue. Les chants d'Achille et d'Agamemnon, dans le pre­ mier des deux drames, resplendissent d'une merveilleuse énergie. Dans la page où, poursuivi par les furies vengeresses, le père exhale ses remords, on devine déjà les hurlements terribles d'Alberich au premier tableau de L'Or du Rhin. Les deux admirables quatuors : celui de l'épithalame d'une majesté si rayonnante et celui de débordante allégresse, à la fin du dernier acte, la prodigieuse scène d'Oreste et des Euménides, dans la seconde Iphigénie, avec les cris de détresse du misérable et les sombres menaces des spectres, les chœurs barbares des Scythes et même les prières des prêtresses, sublimes dans leur simplicité, sont autant de morceaux où retentissent les plus vigoureux accents...

(Extrait de : Udine [d], Jean, Gluck, Paris, Henri Laurens, sd) Hector Berlioz

« Nous n'avons pas dit un mot » Hector BERLIOZ

On joue l'Iphigénie en Tauride de Gluck. Tout l'orchestre, pénétré d'un respect religieux pour cette œuvre immortelle, semble craindre de n'être pas à la hauteur de sa tâche. Je remarque l'attention profonde et continue des musiciens à suivre de l'œil les mouvements de leur chef, la précision de leurs attaques, leur vif sentiment des accents expressifs, la discrétion de leurs accompa­ gnements, la variété qu'ils savent établir dans les nuances. Le chœur, lui aussi, se montre irréprochable. La scène des Scytes, au premier acte, excite l'enthousiasme du public spécial qui se presse dans la salle. L'acteur chargé du rôle d'Oreste est insuffisant et presque ridicule ; Pylade chante comme un agneau. L'Iphigénie seule est digne de son rôle. Quand vient son air « 0 malheureuse Iphigénie ! » dont le coloris antique, l'accent solennel, la mélodie et l'accompagnement si dignement désolés, rappellent les sublimités d'Homère, la simple grandeur des âges héroïques, et remplissent le cœur de cette inson­ dable tristesse que fait toujours naître l'évocation d'un illustre passé, Corsino, pâlissant, cesse de jouer. Il appuie ses coudes sur ses genoux et cache sa figure entre ses mains, comme abîmé dans un sentiment inexprimable. Peu à peu, je vois sa respiration devenir plus pressée, le sang affluer à ses tempes qui rougissent, et à l'entrée du chœur des femmes avec ses mots : « Mêlons nos cris plaintifs à ses gémissements ! » au moment où cette longue clameur des prêtresses s'unit à la voix de la royale orpheline et retentit au milieu du conflit des sons déchirants de l'orchestre, deux ruisseaux de larmes jaillissent vio­ lemment de ses yeux, il éclate en sanglots tels que je me vois forcé de l'emmener hors de la salle. Nous sortons... je le reconduis chez lui... Assis tous les deux dans sa modeste chambre qu'éclaire la lune seulement, nous restons longtemps immobiles... Corsino lève un instant les yeux sur le buste de Gluck placé sur son piano... Nous nous regardons... la lune disparaît... il sou­ pire avec effort... se jette sur son lit... je pars... nous n'avons pas dit un mot...

(Extrait de : Berlioz, Hector; Les Soirées de l'Orchestre, "Vingt-deuxième soirée", Paris, Lévy, 1854) Rose Caron dans le rôle d'Iphigénie à VOpéra-Comiqiie en 1900.

Iphigénie en Tauride ou le retour à la vie

Witold BAYER-QUEST

Briser la chaîne...

Oreste a tué sa inère, Clytemnestre, pour venger le meurtre d'Agamemnon son père ; poursuivi par les Erinyes —- ces antiques déesses de la vengeance, chiennes aux cheveux entremêlés de ser- pents, incarnation de sa culpabilité —, il fuit, il fuit sans but, il fuit 27 sans espoir, car on ne peut se fuir soi-même. Clytemnestre a tué Agamemnon, son mari, pour venger le meurtre d'Iphigénie sa fille ; poursuivie par ses cauchemars, elle sacrifie aux dieux dans l'espoir d'une rédemption qui ne viendra pas. Agamemnon a tué Iphigénie, sa fille, sur les indications du devin Calchas : il fallait ce sacrifice de son sang, afin de dissiper la colère de la déesse Artémis et s'assurer les vents favorables qui permettront à la flotte grecque, encalminée dans le port d'Aulis, en Béotie, de voguer vers Troie pour y porter la destruction et la mort. Iphigénie sacrifiée par Agamemnon sacrifié par Clytemnestre sacri­ fiée par Oreste sacrifié par... qui sacrifiera Oreste ? Où trouvera-t-il la mort ? " Va en Tauride lui dit l'oracle : mais pour y trouver quoi : la mort, ou la rédemption ? Iphigénie en Tauride : le terme d'un voyage. Le terme d'un cycle, aussi : la tragédie des Atrides — l'enchaînement implacable de la vio­ lence, du meurtre, de la vengeance — s'achève ici. Iphigénie en Tauride : comment mettre fin au cycle tragique qui entraîne la Maison des Atrides dans la ruine ? Comment ? En annulant le meurtre originel. Comment échapper à la culpabilité et à la vengeance ? En ramenant Iphigénie du royaume des morts. Car il ne faut pas prendre pour argent comptant ce que nous raconte Euripide : en vérité, elle est bien morte, Iphigénie, sous le couteau sacrificiel d'Agamemnon. Toutes ces histoires de substitution magique — où l'on veut nous faire croire qu'à l'instant du meurtre la Déesse, prise de pitié, aurait, à l'insu de tous, échangé Iphigénie avec une biche et caché la jeune fille en Tauride — sont, précisément, des his­ toires : des dissimulations symboliques, des manières de cacher une vérité tellement honteuse qu'elle est inavouable, indicible. Clytemnestre ne le subodore-t-elle pas dans ITphigénie à Aulis d'Euripide : " Comment ne pas m'imaginer que ce discours m'abuse par un vain réconfort, pour obtenir que je renonce à te pleurer amèrement ? "

Le Royaume des morts

Quel est donc ce pays, en effet, la Tauride, que les étrangers n'abor­ dent que pour y mourir ? « La presqu'île de Crimée actuelle », nous disent les dictionnaires de mythologie. Qu'est-ce qu'une presqu'île ? Presque une île, comme son nom l'indique : un lieu entouré d'eau — peut-être une eau noire et stagnante qui serait celle du Styx —, que l'on aborde au moyen d'une barque pilotée par un mystérieux passeur, peut- être nommé Charon... Mais pas tout à fait une île, aussi : il existe un passage étroit, précaire, incertain, vers la terre ferme — vers la vie ? Surtout, ne pas regarder derrière soi... ORestE, nouvel ORphéE, va en Tauride pour en ramener Iphigénie et annuler le meurtre originel. Est- ce vraiment un hasard si Gluck fut, quelques années avant son Iphigénie en Tauride, le compositeur non seulement d'un célèbre Orphée et Eurydice, mais également d'un Alceste, qui parle aussi d'un voyage au pays des morts ? Est-ce un hasard, aussi, si c'est au culte de Diane (l'Artémis du pan­ théon grec, pour laquelle Gluck a préféré la dénomination romaine) que l'on sacrifie les étrangers qui abordent les rives de la Tauride ? Qui est- elle en effet, cette déesse qui exige tant de sang ? Pas seulement la « chasseresse » si connue et représentée, mais également la déesse des vierges, et encore des femmes mortes en couches, des vierges violées et tuées, sacrifiées à la violence des mâles : Artémis/Diane, la déesse de l'impossibilité de donner la vie. Ces femmes — les « prêtresses » — qui peuplent la Tauride, ne seraient-elles pas, alors, à l'instar d'Iphigénie (« n'avons-nous pas toujours partagé votre sort ? » lui demandent-elles), toutes les femmes, toutes les vierges sacrifiées à la violence des hommes, à leur goût pour le pouvoir, à leur soif de des­ truction, avant d'avoir pu enfanter, avant d'avoir pu donner et transmettre la vie ? Et lorsque la Déesse intime aux « Scythes » : « aux mains des Grecs remettez mes images », n'est-ce pas, précisément, de ces femmes qu'elle parle ? Grecques victimes des guerres entre Cités rivales, mais aussi Troyennes violées et assassinées par les guerriers Grecs ivres de sang et de vengeance — et quant aux possibles réso­ nances actuelles de cette thématique, elles sont suffisamment évidentes pour qu'il ne soit pas utile d'en dire plus. Il y a, dans les replis de l'œuvre de Gluck (comme déjà chez les tra­ gédiens Grecs, Eschyle, Sophocle, Euripide, et pas seulement dans leurs élaborations sur le mythe des Atrides), comme une opposition entre un principe féminin, qui relèverait du don de vie, de l'enfante­ ment, de la fécondité, de la récolte, et un principe masculin qui serait celui de la violence, du viol, de la destruction, de la stérilité, de l'ari­ dité. La Tauride est le lieu de la négation du féminin, un pays où les femmes n'enfantent pas, où l'herbe ne pousse pas, où le sol ne donne pas de fruits, une terre brûlée, un pays dont peut-être les habitants se nourrissent de la chair et du sang de leurs victimes (« il nous fallait du sang pour expier nos crimes... ») : un pays où l'on ne vit que de la mort.

Noces de sang

Et déjà, dans le sacrifice d'Iphigénie, n'était-ce pas cela qui, au fond, de manière symbolique et dissimulée, s'affirmait ? La mythologie nous raconte qu'Artémis se serait offusquée qu'Agamemnon, ayant tué une biche d'un splendide coup de flèche, se serait exclamé : « même Artémis n'aurait pu faire mieux ». Les Dieux grecs sont d'un suscep­ tible... Cette explication donnée à l'exigence du sacrifice d'Iphigénie et à l'enchaînement subséquent des meurtres paraît si ténue, si dérisoire, qu'on ne peut que rester dubitatif. N'est-ce pas quelque chose de plus profond et de plus essentiel qui se joua à Aulis ? Aux questions : « Quel est le prix à payer pour pouvoir satisfaire le goût du pouvoir, le désir de vengeance et de guerre ? Que doit-on sacrifier à l'ambition des hommes, à la soif de domination et de destruction ? », l'oracle ne répond-il pas, en effet : « son propre sang, avant même que ce sang ait pu donner la vie » ?... Et ce n'est certainement pas un simple détail anecdotique si la jeune Iphigénie fût attirée à Aulis par Agamemnon et le rusé Ulysse sous le fallacieux prétexte de l'offrir en mariage à ;mr it.'rJ.sS.:

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Dessins de décors de Philippe Miesch pour Iphigénie en Tauride (Opéra de Bordeaux, avril 2000) Achille ; en fait d'autel nuptial, la vierge se voit brutalement renversée sur l'autel du sacrifice, et le sang qui coule n'est pas celui de son sexe défloré, mais de sa gorge lacérée : la cérémonie de vie devient tragique cérémonie de mort. N'y a-t-il pas alors, dans le sacrifice d'Iphigénie juste avant que ses noces aient pu s'accomplir, une manière métaphorique et presque tau- tologique de dire que pour que la guerre puisse avoir lieu, il faut sacrifier la vie à la mort, la (re)production à la destruction, l'ensemen­ cement et la récolte au sac et à la rapine ? Iphigénie en Tauride, ce serait donc le sacrifice du féminin. Mais la Tauride est plus encore que cela : non seulement un pays où les étrangers n'abordent que pour mourir et où vivent des femmes qui ne peuvent donner la vie, mais encore un pays où, implorant les Dieux d'étouffer en elles « le cri de la nature », ce sont les femmes qui tuent : intuition géniale de Gluck et de Guillard, son librettiste, que d'avoir fait d'Iphigénie la sacrificatrice (ce qu'elle n'est pas chez Euripide) ; elle à qui l'on avail retiré dans la violence le droit de donner la vie, elle est désormais celle qui manie le couteau, celle qui enlève la vie, tandis que les hommes qui habitent ce pays craignent la mort qui pourtant les fait vivre (Thoas), et que les hommes qui y abordent désirent non la gloire des exploits guerriers, mais cette mort même (Oreste, Pylade). Royaume des morts métaphorique, la Tauride est donc le lieu d'un ren­ versement radical de cette conception de la nature qui s'affirme dans l'opposition entre la vie et la mort, la (re)production et la destruction, le féminin et le masculin. Ramener Iphigénie du pays des morts, annuler le meurtre originel, mettre fin au cycle infernal de la vengeance — mais aussi remettre la « nature » à l'endroit, rétablir dans ses droits un ordre où les vierges se marient et où femmes enlantent au lieu de tuer ou d'être tuées : tel sont donc les enjeux du voyage d'Oreste. Dès lors, tout comme le meurtre originel, fondateur, avait brutalement interrompu la noce deve­ nue cérémonie de mort, « annuler le meurtre originel », c'est revenir à l'instant qui le précédait immédiatement — le moment de la noce, de la célébration de la vie et de l'enfantement à venir. Si le sacrifice d'Iphigénie au moment de la noce était une manière métaphorique de dire que pour que la mort advienne, il faut que meure la vie et la possi­ bilité de la vie, alors, inversement, pour revenir à la vie, il faut aussi revenir à la noce, célébration de la vie. Au terme du voyage d'Oreste en Tauride, Iphigénie ne sera pas seulement ramenée de la mort : elle reviendra à « l'instant d'avant », elle reprendra ses noces et en achè­ vera la cérémonie. La noce et la vie signifient la même chose, chacune est la métaphore de l'autre. Le paradoxe est que ce retour à la vie repose sur des héros qui ne veu­ lent plus vivre... Le meurtre dans le sang

Lorsque tombe le rideau du deuxième acte, Iphigénie, convaincue que son frère est mort, a perdu tout espoir (« 0 malheureuse Iphigénie... Nous n'avions d'espérance, hélas ! que dans Oreste ; Nous avons tout perdu, nul espoir ne nous reste. »), elle ne désire même plus vivre (« Ah ! ce n'est plus qu'aux sombres bords que je puis retrouver mon frère ! »), comme déjà, au premier acte, après le cauchemar de la mort d'Oreste (« 0 toi qui prolongeas mes jours, reprends un bien que je déteste ! Diane, je t'implore, arrêtes-en le cours ! »). Et pourtant, au début du troisième acte, sans qu'en apparence rien dans les données de l'histoire n'ait évolué, tout a changé : elle a repris suffisamment goût à la vie pour vouloir reprendre contact avec sa sœur Electre. « Je cède à vos désirs, dit-elle à ses compagnes, du sort qui nous opprime instrui­ sons Electre, ma sœur ! ». Et ce changement est essentiel : c'est grâce à lui que l'histoire se poursuit. Tout s'est passé pendant l'entracte — mais quoi, au juste ? Qu'est-ce qui l'a fait changer d'avis ? Gluck et Guillard n'en disent rien, et c'est à nous de l'imaginer. Ce qui s'est passé, alors, c'est peut-être l'évocation du frère aimé dans l'hommage funéraire — cet hommage qui clôt le deuxième acte. L'évocation du souvenir du passé réactualise ce passé, le re-présente, et fait renaître la nostalgie et le désir de renouer avec lui. Peut-être est-ce au moment où elle croit avoir perdu toute raison d'espérer qu'Iphigénie retrouve le souvenir du passé et le désir de (re)vivre. Peut-être que ce qui permet d'échapper à la mort, c'est le désir de vivre, tout simple­ ment, c'est-à-dire de « retourner à la vie », comme l'on rentre chez soi. Mais cette volonté de retourner au passé, à la vie, d'échapper à son sort présent ne serait-elle pas nourrie aussi par un soudain dégoût de ce qui, comme Iphigénie vient de l'apprendre, court dans toute sa famille : cette malédiction des Atrides, cet enchaînement fatal des meurtres dont le Grec inconnu vient de lui faire rapport ? Elle le sait, à présent : qu'elle soit, elle, la sacrificatrice, n'est sans doute pas un hasard. Tout comme il y a des générations de bourreaux, il y a peut-être des générations de sacrificateurs. Soudain, cette fonction acquiert une signification nouvelle, elle brûle comme un stigmate ; ce que l'on croyait faire comme machinalement, par obligation, par contrainte, on s'aperçoit qu'on l'a peut-être dans le sang — et cette pensée donne envie de fuir, de se fuir. Ce refus presque terrifié de ce qui est peut-être un atavisme familial est d'autant plus fort que, sans doute, le sang a reconnu son sang. Déjà, cette envie soudaine de faire parvenir un message à Electre n'était peut-être qu'un stratagème inconscient, un prétexte pour faire échap­ per à la mort celui que, à défaut de la connaissance consciente, un « subconscient » qui court dans les veines a d'ores et déjà reconnu comme le frère. Le simple fait que ce Grec inconnu et tourmenté ait l'âge qu'aurait eu Oreste, qu'il ressemble à l'image qu'on s'en fait, qu'il aurait pu et même qu'il pourrait être Oreste, suffit à vouloir le faire échapper à la mort, comme on cherche, désespérément, à échapper à une malédiction, celle du meurtre « incestueux ». Et pourtant : si ce dégoût était d'autant plus violent qu'il est aussi mélangé d'un secret désir, d'un obscur plaisir de ver­ ser le sang et de donner la mort ? On peut trouver en effet qu'Iphigénie se réfugie un peu trop facilement derrière ce « saint » devoir et résiste bien peu aux exigences de Thoas et de la Déesse... Ce « devoir »-là, parce qu'elle l'a « dans le sang », est comme une com­ pulsion — et son cauchemar lui révèle cette vérité que sa conscience voudrait désespérément refuser : « c'est Oreste... je lui tends la main, je veux le secourir, un ascendant funeste forçait mon bras à lui percer le sein ». Le corps parle par­ fois un langage que la volonté n'entend point, et il ne faut peut-être pas trop compter sur Iphigénie pour échapper au sacrifice...

L'amoureuse amitié

Faut-il compter sur Oreste et Pylade ? Eux aussi veulent mourir : Oreste, pour échapper à sa culpabilité ; Pylade, pour prendre la place d'Oreste. Oreste-Pylade : le même et l'autre, la gémellité et la différence. Oreste et Pylade vivent depuis l'enfance le même destin, ils s'identifient l'un à l'autre (« Unis dès la plus tendre enfance, Nous n'avions qu'un même désir... »), ils sont jumeaux. Il faudra pourtant que la différence intervienne, il faudra choisir, il faudra séparer les frères siamois : l'un doit vivre, l'autre doit mourir. Mais quel est ce lien qui unit si fortement Oreste et Pylade ? Si l'on ne savait pas qui chante, les paroles qu'ils prononcent auraient tout de celles que se disent les amants : « Cruels, faut-il vous implorer ? Hâtez la mort qu'on nous prépare, Mais laissez-nous la recevoir tous deux ! Vos glaives, vos bûchers sont cent fois moins affreux Que le moment qui nous sépare. » Ou encore : « Ah ! mon cœur applaudit d'avance Au coup qui va nous réunir ! Le sort nous fait périr ensemble, N'en accuse point la rigueur, La mort même est une faveur, Puisque le tombeau nous rassemble », n'est-ce pas ce que chantent, face à la mort,

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Lithographie de la première édition de L'EnlèvemenI au sérail de Mozart.

Constance et Belmonte de L'Enlèvement au sérail de Mozart ? Mais Gluck les a unis également dans un même destin musical : le plus souvent, quand ils chantent en duo, ils sont à la tierce, sur une rythmique identique ou légèrement décalée : gémellité, ici aussi. Il faut pourtant éviter d'enfoncer des portes ouvertes. Certes, dans l'ombre de l'œuvre de Gluck, comme déjà dans celle de ses modèles grecs, planent comme les fantasmes d'amours interdites, où l'on vit peut-être par la mort et par le meurtre ce qu'il n'est pas permis de vivre par le sexe, où le sacrifice est comme la métaphore de la défloration, et où le couteau qui déchire la chair et en fait couler le sang renvoie peut- être à d'autres pénétrations (« j'allais jouir de ses embrassements... » dit I Iphigénie de Gluck après avoir rêvé du moment où Agamemnon la sacrifiait). Mais précisément : ces métaphores sont d'autant plus puis­ santes qu'elles restent tapies et vous saisissent dans l'obscurité, sans qu'on y prenne garde... Entre Oreste et Pylade, ce serait une histoire d'amitié, alors, comme le XVUI^" siècle en effet les représentait si volontiers ? Attention pour­ tant à ne pas s'arrêter à des mots rassurants mais creux. Qu'y a-t-il derrière cette « amitié » si brûlante et passionnée ? Oreste, dès son plus jeune âge arraché à sa mère et à ses sœurs, Oreste exilé, sans foyer, Oreste assassin de sa mère, Oreste a en lui une béance : celle de l'amour maternel, de l'amour d'une femme. Depuis sa plus tendre enfance, il n'a qu'une seule personne, un seul modèle, une seule image à qui exprimer ce désir de recevoir et de donner de l'amour, et cette image, c'est Pylade, l'image de lui-même. Ce qui se cache dans cette « amoureuse amitié » qu'Oreste éprouve pour Pylade, c'est peut-être cela : un désir de donner et de recevoir de l'amour qui, à défaut d'une présence féminine, ne trouve que là son exutoire. C'est donc bien d'amour qu'il s'agit, mais d'un amour qui ne franchirait jamais le seuil. Il faut sentir cet élan impossible et sans cesse retenu.

Celui par qui vient le Salut

Mais Pylade ? Pourquoi Pylade aime-t-il Oreste ? Pourquoi Pylade veut-il mourir à la place d'Oreste ? Pourquoi Pylade veut-il être Oreste ? Et si Pylade était celui qui veut assumer un rôle qui n'a pas été écrit pour lui, celui qui voudrait être le Héros tragique à la place du Héros tragique (et il est du destin du Héros tragique de ne pouvoir s'affirmer comme tel que dans la mort) ? Mais ce rôle n'a pas été écrit pour lui, il ne coule pas dans son sang. Et c'est peut-être pour cela, précisément, que le Salut ne peut venir que de Pylade. Ce n'est pas le sang des Atrides qui peut sauver les Atrides : le sang des Atrides est condamné à faire couler le sang des Atrides, jusqu'à l'extinction complète de la lignée. Seul celui qui n'est pas de cette lamille-là, pas de ce sang-là, peut mettre fin à la malédiction, à l'en­ chaînement sans fin des meurtres : pas seulement en réapparaissant opportunément à la tête d'une troupe de guerriers bien armés ; mais plus encore en étant là, au terme de ce long voyage au pays des morts, près de ce même autel nuptial qui était à l'origine du voyage. Seul un sang étranger, en effet, peut remplir ce rôle-là : car, tout comme il n'est pas permis de tuer son propre sang, il n'est pas permis d'épouser son propre sang. Ramener Iphigénie de Tauride et de la mort, annuler le meurtre origi­ nel, revenir à l'instant d'avant, au moment de la noce : mais quelle noce ? Par un crime commis par un père sur sa propre fille, le sang avait versé son propre sang, rendant impossible la reproduction et la vie et affir­ mant la victoire de la destruction et de la mort : telle fût la transgression originelle. Dès lors, l'annulation de cette transgression originelle implique le rétablissement dans ses droits d'un ordre où les vierges, pour assurer la transmission de la vie, se marient « hors de leur sang ». Ce n'est qu'à cette condition que la guerre, la destruction et la mort peuvent être à leur tour sacrifiées au profit de la vie.

Wit,old Bayer-Quest est professeur honoraire à l'Université de Tallinn (Estonie) Biographies des artistes JANE GLOVER, direction musicale Directeur musical de la Glyndeboume Touring Company de 1981 à 1985, Jane Glover dirige avec celle-ci des opéras de Mozart, Beethoven, Rossini, Britten et Knussen. Directeur artistique des London Mozart Players de 1984 à 1991, elle élar­ git le répertoire de l'orchestre vers la musique contemporaine, effectuant des tournées en Europe et au Japon tout en enregistrant des œuvres de Mozart, Haydn et Britten... Elle fait ses débuts à Covent Garden avec Die ErUfuhrung aus dem Sérail et à FEnglish National (ENO) avec Don Giovanni en 1988-1989. Elle dirige ensuite à FENO Die Zaubeiflote, Il Barbiere di Swiglia, Otfeo ed, Euridice et LAllegro de Haendel (avec la compagnie Mark Morris). Elle assure la direction musicale de Zaide à la Fenice de Venise, Le Nozze di Figaro à Toronto, A Midsummer Night's Dream aux Festivals de Hong-Kong et de Covent Garden, IJItaliaiui inAlgeri au Festival de Buxton, Il Barbiere di Swiglia et Die Entfiihrung aus dem Sérail au Danish Royal Opera, Idomeneo à Lausanne, Die Zaubeiflote à Miami. Le Glimmerglass Opera Festival (New York) l'invite pour Llncororumone di Poppea, Tamerlarto de Haendel et La Calisto de Cavalli, Iphigénie en Tauride (repris au ), Il Ritorno d'Ulisse in pallia ; F Australian Opera pour Alcina et LTncoronazione di Poppea. Outre le Philharmonique de Chine et le Symphonique de Nouvelle-Zélande, elle conduit de nom­ breux orchestres européens dont ceux de la BBC, le Philharmonique de Londres, le Philharmonia, le Royal Philharmonie, le London Symphony Orchestra, l'English Chamber Orchestra... Elle se produit en concert avec J. Norman et le Saint Luke's Orchestra au Lincoln Center, ainsi qu'à la tête du Saint Paul Chamber Orchestra, de la Haendel and Haydn Society, au Mostly Mozart Festival et au New York City Opera dans Iphigénie en Tauride. Elle a également dirigé le War Requiem de Britten aux BBC Proms. Parmi ses autres engagements, citons L'AUegro de Haendel (ENO), Il Mondo délia luna de Haydn (Garsinglon), Ariodante (New York City Opera) puis Giulio Cesare et Le Nozze di Figaro à l'Australian Opera. Jane Glover a dirigé Orphée et Eurydice, un concert Haendel {Concerto grosso op. 3 n° 1, Apollo and Daphne) et Giulio Cesare à l'Opéra de Bordeaux.

EDOUARD REICHENBACH, mise en scène Natif de Houston (Texas), Edouard Reichenbach est parisien depuis toujours et stras- bourgeois depuis trois ans. Ses collaborations les plus significatives en tant qu'assistant ou régisseur l'ont conduit à travailler avec Patrice Chéreau (Wozzeck), Robert Wilson, Daniel Mesguich (La Vie * parisienne), Luc Bondy (Le Nozze di Figaro), Louis Erlo (), Stephen Lawless (Die Entfiihrung aus dem Serait), John Copley (Ariodante de Haendel), et à Salzbourg, Dallas, au Théâtre du Châtelet, à l'Opéra-Comique, à la Comédie-Française, ainsi que dans les opéras de Straslx)urg (où il a également été, pendant une saison, direc­ teur de scène), Lyon, Toulouse, Nancy, Caen, Montpellier. Il s'est aussi nourri de tous les spectacles de théâtre, d'opéra et de théâtre musical qui l'ont enthousiasmé, emballé et parfois bouleversé ces dernières années, du Richard 11 de Shakespeare mis en scène par Ariane Mnouchkine en 1982 et du Wozzeck de Berg dans la réalisation d'Hans Neugebauer vu la même année, jusqu'aux produc­ tions récentes d'Olivier Werner (PeUéas et Mélisande de Maeterlinck), Caroline Marcadé (La Nuit de l'Enfant-caillou, sur un texte de Michel Vitloz, au Théâtre National de la Colline), Matthew Jocelyn (Le Rossignol de Timberlake Weitenbaker à Colmar), Yves Beaunesne (La Fausse suivante), Francesca Lattuada (Three Church Parables de Britten à Strasbourg), Maria Cristina Madau (The Nr. 11 Bus de Peler Maxwell Davies à Colmar, avec une scénographie géniale de Licia Lucchese) et Stony). Parmi tous les metteurs en scène qu'il aimerait citer, il apprécie particulièrement et généralement le travail de Daniel Mesguich, Jean-Marie Villégier, Georges Aperghis, Heiner Goebbels. D a récemment mis en scène L'Histoire du soldat de Stravinski et La Comédie sur le pont de Maitinu à l'Opéra de Lausanne et au Théâtre de Caen (novembre-décembre 1999), dans une scénographie de Philippe Miesch. PI HUPPE MIESCIL Décors

Après une formation d'architecte D.P.LG. à l'École d'Architecture de Strasbourg et de scénographe à l'École du Théâtre National de Strasbourg où il travaille notamment avec Jacques LassaQe, Dominique Pitoiset et Peter Stein, Philippe Miescli suit, de 1987 à 1992, sa vocation d'architecte comme concepteur et chef de projet en France et à l'étranger. En 1993, il dirige les ateliers de construction de décors du Théâtre National de Strasbourg et collabore avec Jean-Marie Villégier. 11 travaille ensuite comme scéno­ graphe pour Peler Greenaway et crée son agence d'architecture spécialisée en scéno­ graphie. En 1996. il est pensionnaire à la Villa Médicis et conçoit des scénographies pour l'opéra.9 Depuis son retour d'Italie, il a réalisé les scénographies des spectacles suivants : Les Revenants d'Ibsen, mise en scène d'Olivier Werner aux « Gémeaux » à Sceaux, Frédérick d'Eric-Emmanuel Schmitt, création allemande mise en scène par Torsten Fischer au Théâtre de Cologne, Hôtel des deux Mondes d'Eric Emmanuel-Schmitt monté par Daniel Roussel au Théâtre Marigny à Paris, L'Histoire du soldat de Stravinski et La Comédie sur le pont, de Maitinu dans les mises en scènes d'Edouard Reichenbach à l'Opéra de Lausanne. 11 vient de créer le décor d'Un trait de l'esprit de Margaret Edson pour la mise en scène de Jeanne Moreau au Théâtre Vidy - Lausanne (création en mars 2000).

DOMINIQUE LOUIS, Costumes

Née à Liège, Dominique Louis obtient en 1985 une licence d'histoire de l'art et d'ar­ chéologie à l'U.L.B. à Bruxelles. Elle crée et réalise de nombreux costumes en Belgique pour des spectacles de danse, de poésie, de théâtre, des courts et longs-métrages... avant de collaborer à divers spectacles à l'étranger. Depuis 1991, elle travaille avec Daniel Mesguich au Théâtre de la Métaphore à Lille (Marie Tudor, La. Seconde surprise de l'amour et Boulevard du boulevard, Andromaque, Titus Andronicus, Bérénice, Ann Boleyri, L'Histoire qu'on ne connaîtra jamais, Dom Juan,..), à l'Opéra de Lille (Un Ballo in maschera), à la Comédie-Française (Milhridate, La Vie parisienne, La Tempête), à l'Opéra de Montpellier (GO-gol, Wozzeck) et crée les costumes du Fou de Marcel Landowski. Elle collabore également avec Xavier Maurel (La Dame aux camélias, Quelques hommages à: la voix de ma mère), Françoise Delerue (Korbès, Rose, La Nuit australienne), et signe les costumes pour plu­ sieurs spectacles itinérants (Héloïse et Abélard, Le Testament de François de Villon, La Chanson de Roland, Tristan et Iseult, Jeanne la Pucelle, Madame de Sévigné). Citons aussi son travail pour divers opéras baroques (Atys travesti, Persée, Le Mythe d'Orphée, Alceste, Don Quichotte...), le Bal de la Rose (anniversaire des 700 ans de la Principauté de Monaco en 1997), et, plus récemment, la création Rimbaud Verlaine, un amour fou de Marius Constant à Monaco puis Andromaque au Vieux-Colombier (1999). Parmi ses prochaines réalisations, citons les Cantates de Bach à l'atelier lyrique de Tourcoing dans une mise-en-scène d'Alain Carré.

NICOLAS SIMONIN. Lumières Nicolas Simonin se passionne très jeune pour la lumière. Après avoir débuté à douze ans avec des spectacles de marionnettes (pour- lesquels il fabrique un jeu d'orgue), il assurera pendant cinq années la scénographie, les costumes, le son et la lumière de la troupe du Théâtre de l'Échelle au Théâtre Jean-Vilar (Vitiy). Après une formation au CFPTS, il approfondit ses connaissances en lumière et en son au Théâtre National de Strasbourg, où il rencontre des éclairagistes comme Gérard Poli, Patrice Trottier... Il tourne les spectacles Jacques Kraemer (éclairages : Laurent Castaingt) et crée pour lui les lumières de Bérénice (1995). Il est ensuite régisseur de la salle C. Bérard de l'Athénée-Théâtre Louis-Jouvet (1995-1997) et tourne les spectacles de Michel Didym et de Philippe Berling éclairés par Joël Hourbeigt. En tant qu'éclairagiste, il travaille notamment pour Gérard Aslor, Dominique Boissel et Sylvain Maurice. Il met en lumière les créations d'Olivier Wemer (Pelléas et Mélisande, Les Revenants, Les Perses). D travaille avec la compagnie « La Ronde » et signe depuis cinq ans les lumières du chorégraphe réunionnais Pascal Montrouge (Pardon Mars !, Trans'Heroïka, La théorie d'Antoine, extérieur). Il collabore avec des musiciens : Serge de Labier et Rémi Dury (conceits « Puce Muse »), le trio des Iscles, Olivier Podesta, le pianiste Denis Levaillant et la chanteuse Tamia. À trente ans, Nicolas Simonin signe sa première mise en lumière pour l'opéra. ISABELLE VERNET, Iphigénie Élève de Régine Crespin au CNSM de Paris, Isabelle Vernet est lauréate du Concours International de Chant de Cardiff « Singer of the World » (1991). Depuis ses débuts aux États-Unis à l'Opéra de Chicago dans Le Cid de Massenet aux côtés de Plâcido Domingo (version concert) en 1993 et à l'Opéra National de Paris dans le rôle-titre d'Alceste de Gluck en 1994, elle mène une intense carrière interna­ tionale. Elle chante Der Rosenkavcdier (Marianne) sous la direction de L Maazel au Festival de Salzbourg, Pénélope (rôle-titre) de Fauré à l'Opéra de Nantes, Don Giovanni (Elvira) à l'Opéra de Lyon mais aussi Iphigénie en Tauride (Iphigénie) de Gluck à l'Opéra de Francfort, Alcesle au Scottish Opera et à l'Opéra de Nice et Ariadne auf Ncixos (Ariadne) avec la Canadian Opera Company de Toronto. Au cours de la saison 1996-1997, elle se produit notamment dans Hippolyte et Aricie (Phèdre) à l'Opéra de Paris puis en tournée à New York, Vienne, Nice et Montpellier et fait ses débuts en 1997-1998 au Welsh National Opera dans La Clemenza di Tito (Vitellia) sous la direction de C. Mackerras suivis d'Otello (Desdemona) au Deutsche Oper am Rliein de Diisseldorf et de Gotterdammerung (Gutrune et Troisème Nome) au Théâtre Colon de Buenos Aires. Se succèdent, en 1998-1999, Don Giovanni (Elvira) à Enschede, La Mascotte (Bettina) à l'Opéra de Montpellier (production : J. Savary) et La Grande Duchesse de Gerolstein (rôle-titre) au Capitole de Toulouse. Régulièrement invitée à se produire en concert, elle chante Shéhérazade au Festival de Radio-France et de Montpellier et plus récemment au Théâtre des Champs-Élysées et à Anvers ainsi que Les Nuits d'été de Berlioz (dir. S. Cambreling, M. Plasson, A. Jordan...), Les Troyens (Didon) de Berlioz (dir. M. Plasson), Mors et vita de Gounod (dir. M. Plasson), La Damnation de (Marguerite) de Berlioz (dir. J.-C. Casadesus) à Lille et au Théâtre des Champs-Élysées et le Poème de l'amour et de la mer de Chausson (dir. Louis Lan grée). Outre Le Roi de Lahore à Saint-Étienne, figurent parmi ses autres engagements en 1999-2000, La Mascotte à Toulouse, Iphigénie en Tauride à Marseille, R Trovatore (Leonora) à Montpellier, des concerts avec l'Orchestre Philharmonique de Radio-France (extraits de La Damnation de Faust de Berlioz), l'Orchestre de Paris (Poème de l'amour et de la mer, Shéhérazade), et des séries de réci­ tals. Isabelle Vernet a incarné Métella (La Vie parisienne), Madame Lidoine (Dialogues des Carmélites) et Sitâ (Le Roi de Lahore) à l'Opéra de Bordeaux.

VINCENT LE TEXIER, Thoas C'est sur les conseils du baryton Udo Reinemann que Vincent Le Texier décide de se consacrer au chant. Pendant ses années d'études à l'École d'Art Lyrique de l'Opéra de Paris, il rencontre E. Schwarzkopf, C. Ludwig, H. Hotter et incame, dès 1988, Goland dans la création à Moscou de Pelléas et Mélisande (dir. M. Rosenthal). D travaille alors régulièrement avec des chefs comme K. Nagano, A. Lombard et aborde l'opéra baroque avec M. Minkowski. À l'Opéra de Lyon, il se produit notam­ ment dans L'Amour des trois oranges de Prokofiev (repris au Festival d'Aix-en- Provence, à Sâo Paolo, à San Francisco, au Festival de Ravennes), La Bohème (Schaunard), la création mondiale de Rodrigue et Chimène de Debussy (le Roi), Des Contes d'Hoffmann (les quatre diables). En 1993, sa carrière est marquée par son travail sur les Impressions de Pelléas de P. Brook et M. Constant présentées aux Bouffes du Nord et en tournée européenne. Au Théâtre des Arts de Rouen, se succèdent II Barbiere di Siviglia (Basilio), Der Freischûtz (Gaspard), Capriccio (le Comte), Die Zaubeiflote (Der Sprecher), Faust (Méphisto), Térésa de M. Constant (Sade), La Vieille maison de M. Landowski (Chantelaine), La Cenerentola (Alidoro) et Wozzeck de M. Gurlitt (rôle-titre) qui obtient le Grand Prix de la Critique en 1997 ; la même année, il remporte un très grand succès dans le rôle de l'Ethnologue dans la création mondiale de Tristes Tropiques de G. Aperghis au Festival Musica. À l'Opéra de Paris, on a pu l'entendre dans Madama Butteifly, Pelléas et Mélisande et Platée (repris ensuite à Salzbourg, Caen, Grenoble et Halle). Parmi ses récentes prestations, citons Carmen (Escamillo) à Miami, Tosca (Scarpia) à Nancy, Le Comte Ory (le Gouverneur) à Montpellier. Ces dernières années, il aborde le répertoire wagnérien et incame Telramund de Lohengrin à Berlin et Leipzig (janvier 1999) et le Hollandais à Tours (jan­ vier 2000). Il s'est produit dernièrement dans La Comédie sur le pont: de M arti nu et L'Histoire du soldat à Lausanne et à Caen ainsi que dans La Damnation de Faust (Méphistophélès) au Teatro San Carlo de Naples et s'apprête à incarner pour la première fois le rôle-titre de Don Giovanni au Grand-Théâtre de Tours. Vincent Le Texier ne limite pas sa carrière à l'opéra : il se produit régu­ lièrement en concert (récemment : L'Enfance du Christ à Leipzig et Berlin, La Missa di Gloria de Puccini au Théâtre des Champs-Elysées et La Création à Toulouse) ou en récital et enregistre de nombreux disques. En 1998, il a interprété aux côtés de la pianiste Susan Manoff et de la comé­ dienne Nelly Borgeaud une version scénique du cycle de Brahms La Belle Maguelonne. Il sera pro­ chainement Aliio (Cavalleria Rusticana), Eumée (Pénélope) et retrouvera en Golaud, la saison prochaine, un des rôles-phare de sa carrière. À l'Opéra de Bordeaux, il a incamé Leporello (Don Giovanni), le Fauteuil et l'Arbre (L'Enfant, et les sortilèges). Don Inigo (L'Heure espagnole). Frère Laurent (Roméo et Juliette de Berlioz), Escamillo (Carmen), Schaunard (La Bohème), le Comte (Le Nozze di Figaro).

MARC BARRARD, Oreste Marc Barrard étudie au Conservatoire de Nîmes puis travaille avec Gabriel Bacquier. Dès 1984, il remporte de nombreux prix dont le Prix Spécial de la Chambre Syndicale des directeurs de théâtre en France. Les Chorégies d'Orange l'engagent immédiatement pour Macbeth (le Héraut) et Hérodiade l'année suivante. Il fait ensuite ses débuts dans les principaux théâtres français notamment à Toulouse (Ourrias dans Mireille), Strasbourg (Figaro dans R Barbiere di Siviglia), Marseille (Chorèbe dans Les Troyens), Montpellier (Les Huguenots). Son répertoire actuel comprend essentiellement des œuvres de bel canto (Rossini, Donizetti, Bellini...), de Mozart ainsi que le répertoire français. Parmi ses nombreux engagements au cours de ces dernières saisons, citons Werther (Albert) à Lausanne, L'Elisir d'amore (Belcore) et La Straniera à Toulouse, Manon (Lescaut) et La Bohème à l'Opéra-Comique, Le Nozze di Figaro, Mireille et Don Pasquale en Avignon, Die Zaubeiflote (Papageno) à Metz, Les Danaïdes de Salieri à Nancy (m.e.s. P. L. Pizzi), Le Roi malgré lui, (Fritelli) de Chabrier, R Giuramento de Mercadante, Don Pasquale et Faust à Nantes, Faust, R Barbiere di Siviglia (Figaro) à Montpellier, Les Pêcheurs de perles (Zurga) à Rouen, L'Heure espagnole à la Fenice de Venise... Plus récemment, il chante Don Pasquale (Malatesta) au Teatro Colôn de Buenos Aires, Carmen (Escamillo) à la Fenice de Venise, Ije Nozze di Figaro (Figaro) à Tel-Aviv, Manon (Lescaut) à Trieste et à Berlin, (Enrico) aux Chorégies d'Orange et à Toulouse, Werther à Marseille, I Puritani (Riccardo) en Avignon. H a notamment incamé cette sai­ son Valentin (Faust) à Marseille. Il se produit également dans R Barbiere di Siviglia et II Viaggio a Reims à Liège. Turandot et Bérénice à Marseille, Falstaff et Pelléas et: Mélisande à Montpellier, Manon à l'Opéra de Houston et Carmina Burana à Toulouse figurent parmi ses prochains enga­ gements. Marc Barrard a chanté dans Cosi fan tutte, Le Nozze di Figaro, L'Incontro improwiso, Le Songe d'une nuit d'été et II Barbiere di Siviglia à l'Opéra de Bordeaux.

WILLIAM BURDEN, Pylade Originaire de Floride, William Burden a étudié le chant avec à l'Université d'Indiana, avant de participer à PApprentice Artist Program de l'Opéra de Santa Fe. Il fait ses débuts en Europe avec l'Opéra North, dans les rôles de Rodolfo (La Bohème) et de Tamino (Die Zaubeiflote). Il s'est produit à l'Opéra Northern Ireland dans Il Barbiere di Siviglia (le comte Almaviva), à Batignano dans Don Giovanni (Don Ottavio), au dans Vec Makropulos (Janek) de Janâcek, œuvre qu'il a ensuite chantée au de New York. Il a également interprété Tybalt dans Roméo et Jidiette au Met, Ali dans L'Incontro improwiso à Nice et à Lausanne, Fenton dans Falstaff et le Chanteur italien du Rosenkavcdier au New York City Opera, Tom Rakewell dans The Rake's Progress de Stravinski à Genova, Philadelphie et au Minnesota Opera, ainsi que Pylade dans Iphigénie en Tauride mis en scène par Francesca Zambello et dirigé par Jane Glover au Glimmerglass Opera. Pamii ses récents engagements citons Dialogues des Carmélites (dir. S. Ozawa) au Saito Kinen Festival, Roméo et Juliette (Tybalt, Roméo) au Chicago Lyric Opera, Die Zaubeiflote (Tamino) au Florida Grand Opera, Die Entfiihrung aus dem Serad (Belmonte) à Philadelphie et au Glimmerglass Opera. Son répertoire de concert comporte aussi bien des œuvres de Britten, Bernstein et Tippett que les grands oratorios de Bach, Mozart et Haendel, compositeur dont il a notamment chanté Le Messie sous la direction de William Christie au Théâtre des Champs- Élysées, à Barcelone et à Lyon. D s'est produit cette saison dans Dialogues des Carmélites à l'Opéra de Paris, Cosi fan tutte (Ferrando) au Florida Grand Opera, Lakmé (Gérald) à Seattle. Ses futurs engagements le conduiront au Théâtre du Châtelet (La Belle Hélène), à Philadelphie (Die Zaubeiflote), au New York City Opera (Acis and Galatea), à Seattle (Falstaff), à l'Opéra de Paris (Pelléas). William Burden s'est produit dans L'Incontro improwiso (Ali) à l'Opéra de Bordeaux.

R ^ BERNADETTE LAMOTHE. Diane Flûtiste de formation, Bernadette Lamothe se consacre au chant qu'elle étudie au I CNR de Bordeaux, sa ville natale. Elle y obtient trois Premiers prix (chant, art lyrique, formation musicale). Lauréate de plusieurs concours (Pau, Vichy, UFA M...), elle tra- I vaille avec de nombreux professeurs dont M. Honig, U. Reinemann, N. Baker, N. I Barker, K. Ciesinsky, M. Siougos, E. Brunner. I Elle paiticipe à divers festivals dans des productions telles que Mignon, Le Nozze di. I Figaro, Idomeneo, Iphigénie en Tauride, Manon Lescaut, se produit dans Peer Gynl à v_ 1l'Opéra-Bastille,le Requiem de Mozart à la salle Pleyel, Les Brigands à Bordeaux, Caen et Nancy, Carmen au Festival de Sarrebriick, Le Pâtre sur le.rocher de Schubert à Angoulême, et interprète des lieder de Mozart à l'Amphithéâtre de l'Opéra-Bastille. Plus récemment, outre deux conceits au Festival de Bazoche, elle chante L'Enfance du Christ à Bordeaux et le Nozze du Figaro (la Comtesse) en région lyonnaise. Elle incarnera prochainement Donna Anna (Don Giovanni) au Festival de Gattières et interprétera le Magnificat de J. S. Bach à Bordeaux. Bernadette Lamothe a chanté sous la direction des plus grands chefs et metteurs en scène : T. Guschlbauer, M. Benini, N. Santi, N. Jârvi, M. Stem, C. Millon, R. Miller, R. Carsen, J. Deschamps et M. Makeieff...

DAVID GROUSSET, un, Scythe, le ministre • Originaire de Bordeaux, David Grousset effectue ses études de chant au | I Conservatoire de Bordeaux auprès de G. Liccioni et de M. Mesplé puis au CNIPAL BBk de Marseille. Il reçoit parallèlement les conseils de J.-L. Soumagnas. Lauréat de nom- j A breux concoure nationaux, il remporte en juillet 1996 le Concours international Hjfl Aragall. En 1997, il accède à la finale du Concours du Belvédère de Vienne puis, à l'issue du Concours Toli-Dal-Monte, incame les quatre rôles diaboliques des Contes MP d'Hoffmann sous la direction de Peter Maag. Après ses débuts à l'Opéra Comique en ^ V *—J 1996 dans le rôle de Raimbaud du Comte Ory, il se produit dans Les Saltimbanques en Avignon et Faust à Tours. Par ailleurs, il chante La, Colombe de Gounod en Italie, La Danse des morts de Honegger à Bâle et Andrea Chénier à Monte-Carlo. En décembre 1997 à Venise, il participe à la Messe de Noël à la Basilique Saint Marc. David Grousset, qui est membre de la troupe de l'Opéra de Bordeaux, a chanté en 1998-1999 Apollo and Daphne de Haendel, Le Petit Poucet, Im Fille du tambour-major, le Barbier de Séville et le Requiem de Fauré. Il s'y pro­ duira cette saison dans La Fille du régiment et Carmen. Il a incamé Duparquet (La Chauve-souris) puis Brissac (Les Mousquetaires au couvent) et Mercutio (Roméo et Juliette) à l'Opéra de Bordeaux.

*** JACQUES BLANC, Directeur des études chorales et vocales Jacques Blanc étudie le piano, le solfège et l'harmonie au Conservatoire de Marseille et travaille la direction d'orchestre avec Jésus Etcheverry. Après ses débuts de chef de chant, il s'oriente vers la direction de chœur (à Nantes, à l'Opéra du Rhin), puis devient chef d'orchestre assistant à l'Opéra de Nice : il y travaille successivement avec J. Tate, G. Prêtre, B. Klobucar... et dirige Valses de Vienne, Faust, Rigoletto... Professeur de technique vocale de 1986 à 1989 au CNIPAL de Marseille, il assure la direction de nombreuses œuvres lyriques et assiste d'autres chefs d'orchestre pour la préparation de concerts ou d'opéras. H est ensuite Directeur des études musicales, chargé de la direction des chœurs et Chef d'orchestre à l'Opéra de Montpellier. Nommé Chef assistant pour le Lyrique à l'Opéra de Bordeaux en septembre 1993, Jacques Blanc a notamment dirigé Carmen, le concert Leona Mitchell, La Bohème, Giselle ainsi que La Veuve joyeuse, La Chaste Suzanne, Il Barbiere di Siviglia, le récital Bianca Castafïore. Il collabore en outre régulièrement avec l'Opéra d'Angers, où il a dirigé l'Orchestre National des Pays de Loire dans Thaïs (avril 1997), Werther (octobre 1997), Im Fille du régiment, (avril 1998) et Madame Butterfly (1999). Jacques Blanc est Directeur des études chorales et vocales de l'Opéra de Bordeaux depuis juin 1999.

Chœur de l'Opéra de Bordeaux

Jacques Blanc Catherine Biar Jean-Marc Bonicel Directeur des études chorales Brigitte Bonnet José Anibal Bresco et vocales Irène Constant Loïck Cassin Ariette Da Costa Alexis Defranchi Nicole Darées Jacques Dulin Marie-Hélène Darses Jean-Philippe Fourcade Geoffrey Styles Dania Di Nova Jordi Freixa Jean-Marc Fontana Josette Dunoyer Pierre Guillou Martine Marcuz-Trégan Marina Farbmann Christian Le Masson Assistants du. Directeur du chœur Colette Galtier Bernard Mansencal Christiane Gil Christian Maynard Marilena Goia Bruno Moga Maryelle Hostein David Ortega Jean-Marc Martinez-Droz- Isabelle Lachèze Nicolas Pasquet Bartholet Bernadette Lamothe Claude Roussarie Régisseur Marie-Claude Lanot Olivier Schock Wha-Jin Lee Luc Seignette Yasmina Sahraoui André Taris Isabelle Soulas José Luis Victoria Adhérer aux Amis de l'Orchestre National Bordeaux Aquitaine, c'est participer au rayonnement de l'Orchestre National Bordeaux Aquitaine au sein de l'Opéra de Bordeaux : Les rencontres que nous organisons s'adressent à tout public, du néophyte à l'auditeur chevronné. Elles sont claires et vivantes. Elles sont le reflet de la musique que nous aimons. Elles représentent une occasion unique de rencontrer les plus grands artistes. Renseignements : 05 56 27 00 06.

L'Opéra de Bordeaux tient à remercier les Châteaux de Pessac-Léognan Grands Vins de Graves Orchestre National Bordeaux Aquitaine

Hans Graf Violons Violoncelles Bassons Direct,ear musical Dorota Anderszewska Etienne Péclard Sergeï Krassavine Vladimir Nemtanu nn Jean-Marie Lamothe Zacharia Zorine François Perret Brunot Perret Yutaka S ado Lidia Grigore Claire Berlioz Claude Del Medico Premier chef invité Nathalie Mule-Donzac Mircea Palade Jacques Ruysschaert Masako Ono Anne-Marie Andreu (Jouant le contrebasson) Lilian Kogan Jean Bataillon Philippe Béran Catherine Fischer Marie-Claude Étienne Cors Chef d'orchestre associé Ewgeni Sawikowski Catherine Fages Doru Dogaru Jean-Étienne Haeuser Jean-Marc Dalmasso Marius Acaru Françoise Jeanneret Gilles Balestro Pierre Choffé Didier Cicero Ghislaine Tortosa Renaud Taupinard Jean-Michel Dailliat Délégué général Bruno Armignies Catherine Jaillet Bernard Doriac Laurence Escande Contrebasses Joseph Hirshovitz Jean-Michel Feuillon Roland Gaillard Alaiii Roche Laurent 011e Daniela Grecu Sergeï Akopov Jacques Romano Intendant de l'orchestre Marie-Christine Mattliieu Sternat Hirshovitz Hervé Lafon Jeanine Lacoste Patrice Lambour Trompettes Gilbert Turlan Renaud Largillier Marc Brunei Jean-François Dion Assistant de l'Intendant Michael Lavker Christian Diaz Vladimir Kafelnikov Jaroslaw Majchrzak Christophe Dubosclard Gilles Faubert François Marcel Rémi Halter Guillaume Jehl Philippe Lartigaut Carole Merino Valérie Petite Francis Pedemay Régisseur Florian Murtaza Jeanine Soubourou Adrian Nemtanu Judith Nemtanu Trombones Flûtes J ean-François Fabienne Perret Jean-Jacques Dion Vacellier Ghislaine Robert Stéphane Boudot Eric Coron Mireille Rouger Samuel Coles Frédéric Demarle Bibliothécaire Stéphane Rougier Jacques Libouban Jean-Michel Fourquet Danielle Rouveyrol Jean-Christophe Nahoum Trombone basse : Cécile Rouvière Claude Vacellier Bernard Poulet Gervai.se Patricia Royer Piccolo : Carboiuiier Yves Soulas Zorica Nahoum Bibliothécaire adjoint Agnès Viton Tuba nn Mel Culbertson Hautbois Eric Cassen Timbales / Altos Dominique Descamps Tasso Adamopoulos Jérôme Simonpoli Percussions Pascal Colin Frédérique Gastinel Francis Willaumez Bruno Riva Jean-Claude Oustry Cécile Berry Pierre Le Masne mi Didier Simon Françoise Cagniart Cor anglais : Jean-Daniel Lecoq Techniciens d'orchestre Patrick Calafato Jean-Yves Gicquel Patrice Guillon Jean-Marie Curto nn Mayorga Denis Bernard Gaudiller Clarinettes Harpe Emmanuel Gautier Richard Rimbert Geoffroy Gautier Franck Vaginay Catherine Denis Philippe Girard Arnaud Leroy Véronique Knoeller Petite clarinette : Jean Reynot Jean-Claude Rys nn Clarinette Basse : José Soler OPÉRA DE BORDEAUX

Direction

Thierry Fouquet Directeur

Giulio Achilli Philippe Pinon Charles Jude François Vienne Directeur technique Secrétaire général Directeur de la danse Directeur administratif et financier

Isabelle Masset Conseiller artistique "Depuis 10 ans, nous soutenons l'art vocal. Il y a tant de voix à vous faire entendre"

Musique sacrée, opéra, jazz vocal... Depuis 10 ans, notre fondation encourage la formation et les débuts de jeunes talents. Notre mécénat s'ex- % q prime aussi à travers le soutien d'ensembles vocaux, de productions lyriques, de saisons vocales et de festivals. Aux côtés de ceux qui font vivre l'art vocal, notre fondation s'engage. Pour que toujours plus de voix puissent partager leurs talents, leurs émotions. I

France Telecom Fondation Fondation d'entreprise http://www.francctelecom.fr La Donna, 1Association pour le Développement de 1 Opera en Aquitaine, a pour objet de promouvoir le développement et le rayonnement de l'Opéra de Bordeaux.

La Donna s'est fixé plusieurs objectifs :

• Participation an financement de la programmation artistique Je nouvelles productions d'opéras ou de ballets

Saison 1996-1997 : Ballet Eugène Onégume Saison 1998-1999 : Opéra Jules César de Haendel

• Organisation d'événements exceptionnels et de soirées de gala pour accroître la renommée de l'Opéra de Bordeaux en France et à l'étranger

Saison 1996-1997 : gala de La Traviata Saison 1997-1998 : gala de Lakmé — déjeuner débat d u Vaisseau fantôme Saison 1998-1999 : gala de Coppélia

• Financement de certains investissements destinés à accroître le confort de l'ensemble des spec­ tateurs ou des artistes

Saison 1997-1998 : système de sur-titrage de la salle du Grand-Tkéâtre de Bordeaux Saison 1998-1999 : aménagement du studio de danse pour le Ballet de l'Op éra de Bordeaux

Les personnes qui adhèrent à La Donna deviennent à la fois mécènes de l'Op éra de Bordeaux et spectateurs privilégiés, bénéficiant de nombreux avantages tels qu'un accès au service de billetterie per­ sonnalisé sur simple appel téléphonique pour les abonnements et les places réservées au dernier moment. Elles participent à la vie du Grand-Tbéâtre lors des cocktails d'entracte réservés aux membres et à leurs invités, mais aussi grâce aux rencontres avec les artistes, aux conférences ou débats, aux visites privées, aux voyages et aux rencontres musicales vers les plus grandes destinations lyriques d'Europe.

Les entreprises qui deviennent membres du Club des mécènes de la Donna expriment leur volonté de soutenir les activités du Grand-Tbéâtre et peuvent alors bénéficier des avantages ci-dessus. Elles ont aussi la possibilité de parrainer un ou plusieurs spectacles de la saison, d'organiser des réceptions, des cock­ tails d'entracte, des concerts et soirées privées « sur mesure » dans les salons et foyers du Grand-Tbéâtre.

La Donna — Grand-Théâtre de Bordeaux - B.P. 95 - 33025 Bordeaux CEDEX Contact : Karine Da Silva — Tel : 05 56 8.1 77 26 / Rax : 05 56 81 93 66 — e-mail : opé[email protected] TABLE DES MATIÈRES

Argument 7

Danielle Porte : Iphigénie : orages, beaux désespoirs 9

François de Polignac : L'Antiquité révée, l'Antiquité recréée 19

Jean d'Udine : Iphigénie et l'art du Chevalier Gluck 23

Hector Berlioz : "Nous n'avons pas dit un mot" 25

Witold Bayer-Quest : Iphigénie en Tauride ou le retour à la vie 27

Biographies des artistes 37 Éditeur responsable : Opéra de Bordeaux - 05 56 00 85 20

Rédaction, réalisation, iconographie et maquette : Secrétariat général, Service Édition-Dramaturgie : Claire Meekel, Olivier Poque, sous la direction de Laurent Croizier

Impression, compogravure : Imprimerie Lamarge.

Crédits photographiques : Collection Isabelle Masset : p. 33 et couverture. Collection L. Croizier : pp. : 6, 12, 18, 20, 23, 25, 27 et 34. Collection L. Bourrousse : p. 3, 8 et 14. Clichés Matthieu Langrand (Dominique Louis), André Nisak (Isabelle Vernet), Jérôme Ferron (Vincent Le Texier), Lisa Kohler (William Burden), Gérard Détaillé (David Grousset), Vincent Pereira (Jacques Blanc). X. (Edouard Reichenbach, jane Glover, Marc Barrard, Bernadette Lamothe).

Dépôt légal : avril 2000.

PRIX : 50 francs