650 mentation humaine et la savonnerie. Il y avait là de quoi retenir l'attention de Lever. Une première mission présidée par Henry LEVER (Sir William Hesketh), Premier vi- de Keyser et Burgess fut envoyée au Congo comte Leverliulme (Bolton, Lancashire, 19.9. pour étudier l'étendue et la densité des palme- 1851 - Londres, 7.5.1925). raies naturelles ainsi que l'éventuelle rentabili- té de leur exploitation. Une seconde mission, William Hesketh Lever était le fils aîné celle de Lichfrind H. Moseley vint compléter d'une famille de 10 enfants. la première. Son père, James Lever, était à la tête d'un modeste commerce de denrées alimentaires et L'exploitation de l'Elaeis dans la Colonie de savon. du Congo belge fut reconnue favorable. Cinq centres, dont les environs sont particulièrement En 1874, William Hesketh Lever épouse Eli- riches en peuplement d'Elaeis spontanés, furent sabeth Ellen Hulme. retenus: Bumba et Barumbu sur le fleuve Il y a un siècle, le savon était encore consi- Congo, Basongo sur le ICasai, Lusanga sur le déré comme un produit de luxe. Il n'offrait Kwilu, et une localité située sur le Ruki. pas l'aspect attrayant que nous lui connaissons aujourd'hui, et n'était confectionné que dans Avec l'appui particulier du roi Albert, une de petits ateliers utilisant tomme matières pre- convention fut préparée. La grande firme an- mières des graisses animales. glaise prendrait l'engagement de constituer une Société au capital minimum de 25 millions de Lever considérait que la vulgarisation de francs or pour l'exploitation des palmiers Elaeis l'usage du savon pourrait être l'indice d'une dans les cinq cercles ayant pour centre les civilisation en progrès. Pour cela, il fallait in- points des régions indiquées ci-dessus, chaque dustrialiser sa fabrication, en perfectionner la cercle ayant un rayon minimum de 60 kilo- présentation, faire appel à des matières pre- mètres. Dans un délai de six mois, dans chaque mières végétales largement répandues dans le cercle serait construite une usine mécanique monde. d'huilerie capable de traiter annuellement au La baisse du prix de revient qui en résulte- moins 6 000 tonnes de fruit. rait serait l'élément essentiel de l'augmentation La Société avait l'obligation de créer des de la consommation et de la mise en usage écoles professionnelles, des hôpitaux, des routes, parmi les plus déshérités. des chemins de fer, une flotte fluviale, des Une première usine fut créée par William ports sur les voies d'eau, en bref de contribuer Lever à Warrington, mais sa capacité de pro- largement à l'équipement matériel et social duction devint rapidement insuffisante devant des vastes zones d'exploitation exclusive. le succès du Lever's Pure Honey Soap dû à Le projet de convention fut approuvé par le son aspect attrayant. Parlement belge. Le 14 avril .1911, le projet Le génie créateur du jeune industriel trouvait devint réalité à la suite de la signature de la sa première récompense grâce surtout à son convention par le ministre des Colonies Jules action dans le domaine de la vente et de la Renkin et la Société représen- réclame. tée par William Lever. Le 29 avril 1911 fut C'est alors que fut créé le centre industriel signé l'arrêté royal de ratification. savonnier de , sur les rives de la Mersey, près de Liverpool. Le nom de ce Trois mois plus tard, la S.A. des Huileries centre était celui du savon Sunlight, que Lever du Congo belge était constituée. William Lever, venait de créer et dont la réputation allait ou plutôt Sir William Lever — car en 1911 il être mondiale. avait reçu, de la Reine d'Angleterre, le titre de baron — devenait président de la nouvelle Le centre industriel de la Mersey était ac- Société. L'ingénieur Moseley fut nommé premier compagné d'installations portuaires en vue de directeur, avec quartier général à , l'importation des matières grasses végétales exo- future capitale du Congo. Des installations de tiques (huiles de coprah, graisses de coton, pompage d'huile furent édifiées à Matadi et huiles de palme), la grande préoccupation de Kinshasa, et le premier établissement de Lu- Lever étant l'approvisionnement massif et régu- sanga, qui prit le nom de Leverville, fut mis en lier de matières grasses exotiques. activité. Port Sunlight comportait une cité-jardin pour le personnel ouvrier, conçue suivant un plan En 1912-1913, Sir William Lever se rendit urbanistique inconnu à la fin du siècle dernier de nombreux mois en Afrique pour voir l'évo- et qui est, aujourd'hui encore, considérée com- lution de son œuvre. En esprit éclairé, il réalisa me un modèle du genre. rapidement qu'il faudrait 10 ans de travail opiniâtre et l'investissement d'un énorme capital La réussite fut complète et la réputation de pour atteindre un stade de prospérité. William Lever en Angleterre était bien établie. Après de nombreux voyages à travers le Déjà il envisageait la nécessité future de la monde, les installations de Lever se multi- culture scientifique du palmier dont la renta- pliaient à Hawaï, aux îles Sandwich, aux Etats- bilité serait supérieure à celle de l'exploita- Unis, en Australie, Afrique du Sud, au Canada, tion des palmeraies naturelles, même aména- en Hollande, Belgique, Allemagne. gées. Mais un nouveau continent, l'Afrique, venait Mais la Société se développait et, en 1924, de s'ouvrir à la civilisation, et Lever avait suivi date d'un second voyage de Lord William avec enthousiasme les récits de voyage de Leverhulme au Congo, il put marquer son en- Stanley. Quelles étaient les perspectives écono- tière satisfaction devant les réalisations accom- miques de ces immenses régions équatoriales? plies qui comptent aujourd'hui parmi les plus Le 19 octobre 1908, la Belgique avait repris belles de l'Afrique centrale. la gestion de l'Etat indépendant du Congo dont En 1917, Sir William Lever était devenu pair le roi Léopold II, à titre personnel, était le d'Angleterre et membre de la Chambre des Souverain. Lords. Comme titre, il choisit celui de vicom- Le Gouvernement belge se trouvait devant la te William Leverhulme, associant ainsi le nom lourde tâche de la mise en valeur d'un territoire de sa femme au grand honneur qui lui était dont la géographie était à peine connue. Max dévolu. Le roi Albert le nomma Grand Croix Horn fut envoyé en Angleterre prendre contact de l'Ordre de Léopold II. avec les milieux financiers et les Chambres de Lorsqu'il mourut à Londres, le 7 mai 1925, Commerce. quelques jours seulement après l'Assemblée C'est par l'intermédiaire de Sir Alfred Jones, générale annuelle des Huileries du Congo belge ancien consul général de l'Etat indépendant en qu'il avait présidée à Bruxelles, il laissait une Angleterre, et à ce moment président de la El- œuvre africaine considérable. Son initiative avait der Dempter & C°, que Max Horn ouvrit le dia- été couronnée de succès et constituait un élé- logue avec Lever. ment de prospérité dans une jeune colonie en plein épanouissement. Depuis l'Atlantique jusqu'à l'Equateur, s'éten- Son nom reste gravé dans l'histoire du Congo, dait, dans la région équatoriale, une vaste zone et ses mérites ne sont pas prêts d'être oubliés. densément occupée par YElaeis Guineensis. Ce Son successeur, William Hulme, second vi- Palm Belt ne constituait-il pas une réserve comte Leverhulme, reprenait le flambeau. immense de matière grasse végétale, le fruit du palmier Elaeis étant d'une grande richesse, 22 mai 1964. et l'huile susceptible d'être utilisée dans l'ali- M. Van den Abeele.