A LA CONFLUENCE DE TROIS RIVIERES, la Borne, l’Altier et le Chassezac

Directeur de mémoire : Claire DAUVIAU 2007 Thomas CLAUDEL 1 COMPOSITION DU JURY

Président de session : Jean GRELIER - enseignant de projet de paysage à l’Ecole Nationale Supérieure de la Nature et du Paysage (ENSNP)

Directeur de Travail de Fin d’Etude (TFE) : Claire DAUVIAU - enseignante de projet de paysage à l’ENSNP

Enseignant de l’ENSNP : Sabine BOUCHE-PILLON - enseignante de botanique à l’ENSNP

Personnalité représentant la maîtrise d’ouvrage : Gilles BONNAUD - technicien du SIDET du pays des Vans (Syndicat Intercommunal de Développement Economique et Touristique)

Personnalité reconnue pour ses compétences professionnelles : Jérome DAMOUR - chargé de mission ‘architecture et paysage’ au PNR des Monts d’Ardèche (Parc Naturel Régional)

2 PRÉAMBULE

Mes racines ont choisi pour territoire, et c’est en arpentant moi : ce diplôme sera cévenol. durant l’été 2006 les routes Oui, mais les Cévennes sont sinueuses à la recherche d’un grandes, pleines de recoins; on périmètre d’étude, de Langogne découvre, au détour de chaque aux Vans, que j’ai découvert montagne, une nouvelle vallée un site fortement marqué par qu’on ne soupçonnait pas. l’empreinte de l’homme: Pied- Les Cévennes de mes origines de-Borne/Sainte-Marguerite, sont assez méconnues. On nomme ou bien la confluence de trois cette région le Vivarais cévenol, rivières: la Borne, l’Altier et le ou la Cévenne vivaroise. A mes Chassezac. yeux d’enfant, vacancier depuis Guidé par une demande mes premiers jours, cet espace locale de réflexion sur un espace est le lieu de l’imaginaire, des en quête de reconnaissance, j’ai bêtes sauvages et des cachettes donc décidé d’étudier cette vallée secrètes. atypique. Mais l’enseignement de l’école du paysage me permet depuis quelques années de porter un regard moins naïf sur ce

3 SOMMAIRE PAGE COMPOSITION DU JURY 2 SOMMAIRE 3 PRÉAMBULE INTRODUCTION 7 SITUATIONSITUATION GÉOGRAPHIQUE PRÉSENTATIONPRÉSENTATION DU MILIEU PHYSIQUE 14

GÉOLOGIE ET HYDROGRAPHIE 15 ENTITÉS PAYSAGÈRES 19 UNE MAQUETTE 22 CLIMAT 26

L’HOMMEL’HOMME ET LE TERRITOIRE du premier au XXème siècle 28

PREMIERS OCCUPANTS ET INSTALLATION 30 LE CHÂTAIGNIER COMME RESSOURCE 32 IMPLANTATION DU BÂTI ET VOIES DE COMMUNICATION 32 SYSTEME AGRICOLE ET GESTION DE L’EAU 35 APOGÉE D’UNE CIVILISATION 41 LE TEMPS DES MINES 42 DEUX GUERRES MONDIALES, LE CHEMIN DE FER, LES MALADIES... 44 PHÉNOMÈNE D’ENFRICHEMENT 46

4 PAGE

LES TEMPS MODERNES 52

1965 : L’ARRIVÉEL’ARRIVÉE D’EDF 54 INTEGRATION PAYSAGERE 57 BARRAGES 58 USINES 60 EDF ET LE DEVELOPPEMENT DU TERRITOIRE 62 GESTION ADMINISTRATIVE DU TERRITOIRE 64 DEUX PARCS 66 UN SITE DU RESEAU NATURA 2000 67 INVENTAIRE PAYSAGER DE LA VALLÉE 68 L’AGRICULTURE ET LES CANAUX AUJOURD’HUI 86 LE RENOUVELLEMENT SOCIAL DE LA VALLEE 90

VERS UN PROJET DE PAYSAGE...PAYSAGE... 92

CONSTATS 93 INTENTIONS ACTUELLES DE DEVELOPPEMENT DE LA VALLEE 94 ORIENTATIONS PROPOSÉES DE DÉVELOPPEMENT DE LA VALLÉE 96 SCHEMA DIRECTEUR 98

5 VERS UN PROJET RÉALISTE, PAGE À LA RENCONTRE DES ACTEURS LOCAUX 102 LA FILIÈRE BOIS-ÉNERGIE 103

REFLEXION SUR LA CONSTRUCTION D’UN LOTISSEMENT 108

HABITER DANS LA PENTE 109

LA CONSTRUCTION EN BOIS 111

CANAUX ET JARDINS 112

REQUALIFICATION DU CENTRE ‘URBAIN’ DE PIED-DE-BORNE 114

PAYSAGE ET INTERPRETATION 116

UN PROJET DE GRAND PAYSAGE 118

EN GUISE DE CONCLUSION 124 BIBLIOGRAPHIE 126 REMERCIEMENTS 129

6 INTRODUCTIONINTRODUCTION Un paysage grandiose, dont les profondes gorges n’ont rien à envier au Grand Cañon du Colorado, dont les terrasses ne sont pas ridicules comparées à la Cordillère des Andes. Cette région entaillée par les vallées de la Borne, de l’Altier et du Chassezac, située dans une zone montagneuse du sud-est du Massif Central, est aujourd’hui victime de la déprise agricole. La question de l’espace rural est une problématique contemporaine. Depuis plus d’un siècle, les campagnes se sont progressivement vidées. Aujourd’hui, à une époque où notre société vit de fortes mutations démographiques, on tend vers un repeuplement de ces espaces ruraux, motivé par les qualités paysagères et le cadre de vie de ces territoires.

La vallée de la Borne fait partie de ces espaces en pleine reconversion, et l’on est en mesure de se poser la question de l’évolution du paysage face à ces mutations sociales.

7 La bande dessinée qui suit constitue le ‘squelette’ de la partie d’analyse de ce mémoire. Les sous-parties sont marquées par des vignettes surlignées de gris, qui apparaîtront de nouveau au fil des pages.

8 la petite histoire de la vallée de la Borne...

il était une fois...

... une vallée où coulait une rivière.

9 Il fallut attendre la fin du Moyen-Age pour que les hommes s’installent ...pour finalement sculpter le dans la vallée et commencent à défricher... paysage en quelques siècles.

Ils construisirent des En 1850, la vallée comptait Des canaux d’irrigation terrasses pour dompter la plus de 800 habitants répartis gravitaire permettaient pente et y vivre. de part et d’autre de la Borne, d’améliorer les rendements. en Ardèche et en Lozère. La vallée était alors nommée ‘les jardins de la Lozère’

10 ...tandis que d’autres furent Puis deux guerres mondiales... Puis l’essor industriel appela employés par les compagnies de de nombreux hommes aux mines... chemin de fer.

...et l’attrait du confort de Rapidement, la végétation reprit Dans le contexte de la reconstruc- la ville contribuèrent à vider le dessus, effaçant peu à peu tion d’après-guerre, EDF choisit le la vallée en moins d’un siècle. les traces du labeur des hommes. bassin-versant du Chassezac pour im- planter un complexe hydro-électrique qui allait bouleverser le paysage local.

11 Ces aménagements induirent un Depuis les années 70, quelques Grâce à eux subsistent des nouvel usage de l’eau, mais néo-ruraux contribuent, avec ‘poches’ entretenues et aussi une disparité entre les les anciens, au maintien de la cultivées au niveau des deux communes. vie dans la vallée. villages.

Le tourisme saisonnier, bien De même, les canaux toujours Il s’agit maintenant d’assurer que faible, contribue à faire en fonctionnement mais menacés, un développement cohérent de cet vivre certains locaux. permettent de maintenir un espace riche mais fragile... paysage jardiné.

12 13 SITUATION GÉOGRAPHIQUE PRÉSENTATIONPRÉSENTATION DU MILIEU PHYSIQUE

SITUATION GÉOGRAPHIQUE PRÉSENTATION DU MILIEU PHYSIQUE

14 LE BASSIN VERSANT DE L’ARDÈCHE source: thèse de Nicolas Jacob- UNIVERSITE PARIS IV– SORBONNE-2003

Localisation hydro-géogra- phique du site étudié, en- cadré en rouge (sur chacun des documents cartogra- phiques suivants, l’emprise du périmètre d’étude est soulignée par la présence d’un cadre en défi nissant les limites).

GÉOLOGIE ET HYDROGRAPHIE

Ce chapitre a pour but de rivières Allier et Lot, irriguant Causse Méjean et au sud-est par permettre au lecteur de situer respectivement la Loire et la le départ de la plaine calcaire le lieu d’étude choisi dans son Garonne. La Lozère, département de Provence et de la vallée du contexte géographique. Les des sources est aussi le dépar- Rhône. La géologie dessine contextes hydrographiques et tement français dont l’altitude donc les frontières des appella- géologiques sont tout d’abord moyenne est la plus élevée. tions des régions environnantes, rapidement abordés afi n d’in- avec trois composantes princi- terpréter la topographie locale On est ensuite amené à se poser pales: les granites lozèriens, les assez complexe. la question de la limite de cette calcaires caussenards et proven- région nommée Cévennes. çaux, et les schistes cévenols. Les Les rivières Borne, Altier et ‘Cebenna Mons’ désignait déjà basaltes, d’origine volcanique, Chassezac alimentent le bassin sous César la bordure sud-est ne sont pas mentionnés, mais on versant de l’Ardèche, qui irrigue du Massif Central, qui s’étire des les rencontre plus au nord, dans à son tour le Rhône avant de se Pyrénées jusqu’aux monts du le Velay. jeter dans la mer méditerranée. Lyonnais. Cependant, la ‘Cévenne Ces cours d’eau prennent leur des Cévennes’, pour employer Le périmètre d’étude se situe au source sur les hauts plateaux l’expression de Stevenson, cor- niveau d’un massif granitique lozériens, au niveau de la ligne respond à une zone très res- dit ‘granites du massif de Borne’. de partage des eaux atlantique/ treinte délimitée au nord par Il s’agit en fait de granites méditerranée, et côtoient les le Mont Lozère, à l’ouest par le provenant du Mont Lozère, et qui

15 Confl uence de la Borne, de l’Altier et du Chassezac

LE BASSIN VERSANT DU CHASSEZAC Cours supérieur des rivières du Bassin versant de l’Ardèche 0 5 10 15 km source: thèse de Nicolas Jacob-UNIVERSITE PARIS IV–SORBONNE-2003 N

COUPE LONGITUDINALE DES PRINCIPALES RIVIÈRES DU BASSIN VERSANT DE L’ARDÈCHE Les cours d’eau Altier, Borne et Chassezac (en rouge) ont un profi le de rivière de plateau avant de s’engouffrer dans les vallées en gorges, où elles parcourent un fort dénivelé avant de se rencontrer à la confl uence (Pied-de-Borne/Sainte-Marguerite).

source: thèse de Nicolas Jacob-UNIVERSITE PARIS IV–SORBONNE-2003

0 10 20 30 km

16 0 5 10 15 km

COUPE PRÉSENTANT LES DIFFÉRENTES ENTITÉS GÉOLOGIQUES TRAVERSÉES PAR LES COURS D’EAU source: thèse de Nicolas Jacob-UNIVERSITE PARIS IV–SORBONNE-2003

s’en seraient séparés en gravitant Cet ensemble, séparé de la les hauteurs, à 300 m d’altitude de 12 km vers le nord le long de ‘Cévenne des Cévennes’ par le pour les plaines provençales. Le la faille de Villefort. Ce massif Mont Lozère est nommé Cévenne réseau hydrographique prend sa est donc aujourd’hui immergé Vivaraise, (on parle aussi de source sur les plateaux lozériens dans une ‘mer’ de schistes. Il Cévenne méridionale, ou de avant de basculer sur le versant est coiffé, sur ses parties som- Vivarais cévenol). Il constitue cévenol. L’incision des gorges et mitales, de nappes de grès un talus abrupt. Les pentes des des vallées est récente et rapide datant du trias, formation géo- versants, dans ces secteurs, sont à l’échelle de l’histoire géologi- logique sédimentaire. La surface toujours fortes, avec des valeurs que: elle s’effectue à partir de d’érosion post-hercynienne ainsi de 40 à 50% dans les vallées du la fi n du Tertiaire et essentiel- dessinée correspond à l’appel- Chassezac et de ses affl uents, lement au Quaternaire. Ce fort lation de ‘cham’, et forme un mais atteignant localement 80% dénivelé notamment parcouru plateau d’altitude moyenne de dans les gorges de l’Altier et du par les trois rivières Borne, 1000 m entaillé par les vallées Chassezac notamment. Altier et Chassezac, avant leur de la Borne, de l’Altier et du La géologie complexe explique confl uence explique en partie le Chassezac. Cet ensemble géo- directement les reliefs accidentés choix de ce bassin versant par logique ne subit plus d’épisode du secteur, et notamment l’escar- EDF, développé plus loin. d’érosion depuis la fi n du se- pement des vallées, caractérisées condaire, et constitue un massif par de forts dénivelés. On passe stable et quasi-immuable. ainsi de 1300 m d’altitude sur

17 PRINCIPE DE SÉPARATION DES BLOCS GRANITIQUES DU MONT LOZÈRE ET DU MASSIF DE BORNE

CARTE GÉOLOGIQUE SIMPLIFIÉE DES CÉVENNES D’après les cartes géologiques de Largentière et d’Alès-1/50 000-BRGM

Velay

Contreforts de la Margeride

Massif du Tanargue

Site d’étude (encadré): Massif de Borne

Mont Lozère

‘Cévenne des Cévennes’

N

0 5 10 15 km

18 CARTE DES ENTITÉS PAYSAGÈRES À L’ÉCHELLE RÉGIONALE 0 10 20 30 km N ENTITÉS PAYSAGÈRES métamorphiques et granitiques), plateau ponctué de volcans et de dont résulte un relief de vallées leurs coulées basaltiques. Les La carte ci-dessus localise le site étroites et profondes, séparées plateaux lozériens constituent le dans son contexte géographique par des serres et des plateaux. contrefort sud de la Margeride, régional. Les Cévennes vivaroi- Ces entités se distinguent de qui s’étire jusqu’en Auvergne. ses se présentent comme une leurs voisines par la nature des Le Mont Lozère forme pour sa extension des Cévennes gardoises reliefs et des paysages. Ainsi, le part une barrière est-ouest qui (ou ‘Cévenne des Cévennes) vers Piémont cévenol, ensemble de culmine au pic de Finiels à 1799 le Nord. La similitude entre ces petites collines et monts calcaires, mètres d’altitude. deux entités paysagères est direc- s’ouvre sur la vallée du Rhône. tement liée à la géologie (roches Au Nord, le Velay forme un vaste

19 CARTE DES ENTITÉS PAYSAGÈRES A L’ÉCHELLE LOCALE

N 0 1 2 3 km

20 LE VIVARAIS CÉVENOL

Ce bloc-diagramme présente la topographie des serres, plateaux et vallées des Cévennes vivaroises. Le site (encadré en rouge) apparaît, grâce à la vision aérienne, comme une véritable entaille nord-sud, justifi ée géologiquement par la présence d’une faille.

1: Cham du Roure 2: Vallée de la Borne et confl uence 1 3 4 3: Cham de Montselgues 2 4: Vallée de la Thines 5: Villefort 6: 5 6

N

La carte des entités paysagè- L’entité ‘vallée de la Borne et res à l’échelle locale (ci-contre) confl uence’ présente des limites résulte d’une observation du nettement défi nies par les enro- paysage et, notamment de la chements situés au niveau des géomorphologie, se traduisant corniches, en limite de plateau par un découpage du territoire (en rouge sur le document ci- en plateaux (chams), vallées et contre à droite). Ces limites gorges, montagnes. correspondent aussi aux limites visuelles depuis le fond de vallée. On distingue cette entité de l’entité ‘Borne moyenne’ par un goulet d’étranglement et des enrochements spectaculaires qui marquent la ‘porte d’entrée’ de la vallée.

Ci-contre, l’entité ‘vallée de la Borne et confl uence’ délimitée par les enrochements en rouge.

21 N

UNE MAQUETTE La nature des reliefs du secteur La toponymie locale, héritée de est relativement accidentée. Le l’occitan et des patois locaux, La modélisation du territoire en point bas se situe à 300 m d’alti- est souvent révélatrice des maquette (58 x 105 cm, carton) tude environ, contre 1100 m sur reliefs. Ainsi, le ‘Ron’ désigne à échelle 1/10 000 m’a permis de les hauteurs du plateau. les enrochements, les ‘Chams’ bien cerner les grands traits du Les Chams (surface d’érosion correspondent aux plateaux relief de la vallée, afi n de mieux post-herynienne) forment des surplombant la vallée, où les en comprendre la structure plateaux entaillés le long des paysans menaient paître leurs paysagère. failles par des rivières. La Borne, bêtes l’été. De même, les termes l’Altier et le Chassezac s’écoulent ‘Narses’ et ‘Narcettes’ indiquent Sur la photo ci-dessus fi gure au fond de profondes gorges, le présence d’eau, généralement en jaune l’emprise de l’entité le dénivelé entre le plateau et sous forme de tourbières ou de paysagère ‘vallée de la Borne et le fond des talwegs atteignant zones humides. Ce vocabulaire confl uence’. souvent 600 mètres. topographique témoigne de l’an- Les versants sont entaillés par thropisation du territoire par le une multitude de valats et de peuple qui l’occupait, chacun de combes, dévalés par des cours ces mots ayant une explication d’eau alimentant les rivières paysagère. principales.

22 Coupe de la vallée de la Borne au niveau de St Jean et Féreyrolles

Coupe au niveau de la confl uence (Pied-de-Borne et Ste Marguerite)

Interprétation d’une photographie par la toponymie

23 Photographie depuis la Cham de Montselgues et interprétation paysagère

Mont Lozère Montagne du Goulet La Cham du Roure

Confl uence Borne+Altier+Chassezac Vallée de la Borne

La Cham de Montselgues

sud ouest nord

24 La Cham de Montselgues

nord est

La vallée de la Borne depuis la Cham du Roure (ci-dessus) et depuis la Cham de Montselgues (ci-dessous)

La Cham du Roure Confl uence Borne+Altier+Chassezac

nord sud ouest

25 0 10 20 30 km PLUVIOMETRIE ET TEMPERATURES MOYENNES ANNUELLES A VILLEFORT N (ci-dessous), et CARTE DES PRECIPITATIONS MOYENNES EN CEVENNES (ci-contre). source: thèse de Nicolas Jacob-UNIVERSITE PARIS IV–SORBONNE-2003

Ces documents révèlent la forte pluviométrie annuelle qui atteint sur le site plus de 1500 mm. De plus, les massifs du Tanargue et du Lozère forment de véritables ‘châteaux d’eau’ avec plus de 2000 mm/an, et arrosent les rivières du bassin versant du Chassezac.

Massif du Tanargue

CLIMAT Mont Lozère La topographie cévenole infl uence fortement le climat Mont Aigoual local. En effet, ce haut talus constitue à la fois une barrière retenant les précipitations qui gonfl ent les rivières torrentielles au printemps et à l’automne, mais d’étude est étagée et diversifi ée aussi un obstacle à la douceur du selon l’altitude et l’exposition. climat méditerranéen provenant On rencontre ainsi un cortège de la mer située à moins de 100 végétal de type méditerranéen km, qui s’engouffre dans les telle que la Chênaie verte au sud vallées jusqu’à être arrêté par les de la vallée, alors que le Chêne versants abrupts. pubescent domine à l’amont.

A la fois sous l’infl uence du L’étagement de la végétation et climat montagnard du Massif les dynamiques végétales seront Central et du climat méditerra- développées plus loin. néen, la végétation sur le site

26 DOUBLE INFLUENCE CLIMATIQUE La confrontation entre climats méditerranéen et montagnard a lieu dans les profondes 0 5 10 15 km vallées cévenoles. Le site d’étude est sous l’infl uence directe des deux climats. N

infl uence montagnarde Massif du Tanargue

infl uence méditerranéenne

27 L’HOMMEL’HOMME ET LE TERRITOIRE

L’HOMME ET LE TERRITOIRE du premier au XXème siècle

28 29 0 1 2 3 km CARTE DE CASSINI - XVIIIème siècle (ci-contre) N

Noter le déboisement massif des plateaux et sommets, transformés en landes pâturées. Les vergers de châtaigniers occupent les adrets des vallées, et on remarque la présence de nombreux moulins le long des cours d’eau. La voie Régordane qui passe à proximité du site, est surlignée en pointillés gris.

PREMIERS OCCUPANTS ET INSTALLATION

C’est au deuxième siècle avant JC l’essor d’abbayes cistercien- à peu possession du territoire. que la région du Vivarais cévenol nes, dont Mazan et Chambons. La viticulture et les céréales, connut les premières installa- L’église de la Madeleine située cultures importées de médi- tions humaines durables, avec au niveau de la confl uence et terranée, prédominèrent tout l’expansion de la Narbonnaise datant du XIIème siècle confi rme d’abord jusqu’à 600 m d’alti- gallo-romaine. Peu de traces la descente vers les talwegs dès tude. De même, la technique de résultent de cette faible occupa- cette époque. La Garde-Guérin, cultures en terrasses, (localement tion du territoire, cantonnée à village fortifi é dominant les appelées ‘accols’) d’origine mé- quelques secteurs défrichés sur gorges du Chassezac du haut de diterranéenne également, permit les plateaux. son donjon de 18 mètres, était le un essor de la polyculture sur les Mais c’est au haut Moyen-Age fi ef de seigneurs sous la tutelle versants. que la reprise du défrichement de l’évêque de Mende. Cette place Dès le XVème siècle, on note fut importante. Les versants forte avait pour rôle la protection un constant accroissement de la progressivement mis en culture, des voyageurs qui passaient à châtaigneraie en monoculture. les landes d’altitude virent alors proximité sur la voie Régordane, On assiste alors à une reconver- leurs surfaces s’accroître consi- route antique qui conduisait, dès sion des terroirs agricoles: en dérablement par le pâturage. l’époque romaine, de Nîmes à 150 ans, le châtaignier devient Au XIIème siècle, la popula- Gergovie (Clermont-Ferrand). la culture principale des vallées tion connut une augmentation Sous la protection des seigneurs cévenoles. signifi cative, correspondant à locaux, la population pris peu

30 La Régordane

3131 Châtaignier Castanea sativa

LE CHÂTAIGNIER COMME ses rameaux s’utilisaient en IMPLANTATION DU BÂTI ET VOIES DE RESSOURCE vannerie, son tronc permettait COMMUNICATION de fabriquer des ruches, son Peut-être l’identité des Cévennes écorce contenait du tanin... Dans le cas du site étudié, les peut-elle s’expliquer par l’ex- vallées de l’Altier et du Chassezac ploitation d’une ressource La nécessité de proximité directe ne présentent aucune habita- commune à tout un territoire: le des habitants avec leurs cultures tion et ne sont pas cultivées au châtaignier ou ‘arbre à pain’, qui dessine alors une ponctua- niveau de leurs gorges encais- comme son appellation locale tion du territoire par de petits sées aux versants abrupts et ro- l’indique, nourrissait toute une centres villageois, dont résulte cailleux. La vallée de la Borne a civilisation. un rythme assez régulier d’oc- pour sa part vu ses versants se cupation de l’espace. Selon les peupler progressivement, ainsi Le châtaignier assurait la plupart caractéristiques géographiques que la confl uence. des besoins alimentaires pour les de chaque vallée, on constate L’implantation des hameaux hommes et les bêtes, fournissait un espacement de plus ou moins dans la vallée de la Borne est re- aussi le bois pour les charpen- 500 mètres entre les habitations lativement régulière : ils sont ap- tes, le mobilier, le matériel do- (fermes, hameaux, villages), proximativement tous situés au mestique et agricole, le bois de constituant un maillage du ter- tiers inférieur du versant, entre chauffage. Ses feuilles servaient ritoire dessiné par les voies de le fond de vallée et le plateau, de litière pour le animaux, communication. et s’installent sur des éperons

32 Assemblage des CADCADASTRESASTRES NAPOLEONIENS des communes de Saint-Jean-Chazorne, Planchamp et Balmelles (Lozère), aujourd’hui fusionnées sous le nom de Pied-de-Borne, et Sainte-Marguerite-Lafi gère (Ardèche).

Saint-Jean-Chazorne

Sainte-Marguerite-Lafi

Planchamp

gère

0 1 2 3 km N Balmelles rocheux. La vallée étant orientée reliant chaque hameau au plateau Nord-Sud, on ne rencontre pas pour mener les bêtes en estive la dissymétrie classique d’amé- sur les Chams, sentiers souvent nagement adret/ubac, qui carac- calladés, zigzagant à travers les térise généralement les vallées falaises. Il faut remarquer sur cévenoles. Ainsi, les hameaux se la carte d’Etat-Major datée de font face, se regardent... Chaque 1889 que deux ponts permet- matinée éclaire la rive droite taient de franchir la Borne, et de la Borne, à savoir l’actuelle un troisième le Chassezac. Le commune de Pied-de-Borne, et premier pont en amont de la chaque après-midi la rive gauche vallée se situe à l’actuel empla- de Sainte-Marguerite-Lafi gère. cement du pont Charlemagne, et le second, détruit en 1890, Les voies de communication appelé Sainte Philomène a été dans la vallée s’organisent selon reconstruit un peu plus bas et se une logique simple, avec un ou nomme maintenant pont de la plusieurs axes longitudinaux Madeleine. Entre ces deux ponts, reliant les hameaux entre eux, sur aucun autre ouvrage ne permet chacune des deux rives, puis des de franchir la rivière, ce qui axes transversaux, dit «drailles», prouve la fausse proximité des deux rives.

33 34 CARTE D’ÉTAT MAJOR 1889 (ci-contre) Les cercles rouges situent les franchissements de la Borne et du Chassezac : pont Charlemagne, pont Sainte-Philomène et pont sur le Chassezac (de haut en bas).

0 1 2 3 km N LES TERRASSES EN SCHISTE

Elles peuvent atteindre 2 à 3 mètres de haut, et se rencontrent à l’amont et à l’aval du site, selon la géologie.

TERRASSES EN GRANITE

Plus massives et trapues, elles sont omni- présentes au coeur de la vallée, où la roche granitique domine.

SYSTEME AGRICOLE ET GESTION DE daises, c’est-à-dire à une artifi - l’appelait ‘les jardins de la Lozère’. L’EAU cialisation totale du paysage. En effet, même les années de sé- cheresse, des tonnes de châtai- Un paysage de terrasses. La montagne cévenole fi t aussi gnes, notamment la variété dite La géographie contraignante a l’objet d’innombrables aména- sardonne, sortaient de la vallée, incité les hommes à façonner gements en pierre sèche per- et étaient, dit-on, exportées vers le territoire de manière specta- mettant le captage et l’adduction l’Europe entière. Cette variété de culaire. Au XIXème siècle, 80% de l’eau. Les deux principaux fruits à gros calibre, utilisée pour de la superfi cie des versants de rôles de ces aménagements la production de marrons glacés la vallée est en terrasses. Aussi étaient d’une part l’irrigation et adaptée à basse altitude, était nommées ‘Accols’ ou ‘Faysses’, et le moulinage, d’autre part la secondée par l’embournière, elles sont le fruit de la maîtrise gestion de l’érosion. caractéristique des zones plus de trois éléments : TERRE + L’adduction d’eau gravitaire, par élevées (jusqu’à 900 mètres), PIERRE + EAU. Cette technique le biais de petits canaux nommés et originaire de la vallée de la ingénieuse permit à la civilisa- ‘béals’ ou ‘béalières’ permit à Borne qui lui a donné son nom. tion cévenole de bouleverser le l’agriculture de connaître un Les sécheresses favorisaient paysage local et de le sculpter ho- essor considérable, notamment même la qualité des châtaignes, rizontalement. On peut comparer la castanéiculture. La vallée de la qui, grillées par le soleil, acqué- ce ‘domptage’ du territoire à la Borne connut grâce à ses canaux raient une saveur caractéristi- polderisation des plaines hollan- une réputation exemplaire. On que, tandis que les racines des

35 canal principal dit béal

barrage de l’eau sur le cours d’une rivière

canaux secondaires dits béaliéres SCHÉMA ILLUSTRANT LE FONCTIONNEMENT DES CANAUX D’IRRIGATION GRAVITAIRE

arbres puisaient l’eau dans les siècle. Certains de ces ouvrages canaux miraculeux. peuvent être qualifi és d’oeuvres La vallée de la Borne est exem- d’art, tant les conditions d’accès plaire en matière d’irrigation sont diffi ciles, en particulier dans avec un linéaire de plusieurs les vallées du Chassezac et de dizaines de kilomètres, construit l’Altier. Soutenus par des murets pour la plupart au XIXème en pierres sèches de plusieurs siècle. Une anecdote raconte que dizaines de mètres de haut, ils le premier à construire un canal longent les falaises, franchissent de la sorte, Monsieur Coulomb, les ravines et torrents transver- fut tout d’abord pris pour un saux sur de petits ponts de bois, fou et traité de tous les noms, et forment une ligne horizon- dont le sien (à peu de choses tale dans un univers chaotique près!), avant d’être suivi comme où rien n’est droit. Fruits d’une un modèle (cf. poème page 37). grande ingéniosité et d’une Ainsi, la majorité des canaux volonté d’exploiter les ressour- qui sillonnaient les versants de ces au maximum, ils témoignent la vallée furent construits en de l’acharnement de ces paysans un temps record, au début de courageux. Le partage de l’eau la seconde moitié de XIXème entre les différents barrages qui Béal en pleine terre, Sainte-Marguerite

36 Barrage maçonné, vallée de la Borne Prise d’eau en tronc de châtaignier source: clichés EDF en (noir et blanc) 1963

faisaient obstacle à la rivière les périodes de sécheresse. était strictement contrôlé. Une semaine était divisée en périodes La société cévenole du XIXème correspondant chacune à un ex- siècle dut faire face à un épisode ploitant situé sur le tracé du nommé ‘le petit âge glaciaire’, canal. On irriguait jour et nuit, correspondant aux pluies torren- aucune goutte n’était gaspillée. tielles qui inondèrent la région à Chaque irriguant venait chercher cette époque. Afi n de prévenir la l’eau à son heure à la dernière formation de ravines après les vanne de la parcelle voisine averses automnales, on cons- et il l’orientait ensuite vers sa truisit de petits chenaux afi n de propriété. L’heure était tenue canaliser l’eau. par une seule personne dans la vallée, détentrice de “l’heure Les processus d’érosion, vraie” calquée sur les horaires conjugués au déboisement solaires et rythmée par les massif, s’aggravèrent particuliè- églises des villages. Des procès- rement à partir de 1880, et ont verbaux témoignent d’actes de été de réels sujets de préoccupa- non-respect de ces horaires et de tion des autorités. détournement des eaux durant Levade en motte, haute vallée de la Borne

37 COULOMB DE PLANCHAMP

Ne quittons pas Planchamp sans parler de Coulomb Aïeul des Saint-Jaunens qui portent même nom. Vieux Coulomb de Planchamp le bienfaiteur insigne De tout le val de Borne et l’enfant le plus digne

Eut cette grande idée inconnue avant lui D’arroser châtaigniers, les siens et ceux d’autrui. Et de jour et de nuit dans les grands clairs de lune Il creusait son canal à travers la commune

Pour aller prendre l’eau du torrent Chassezac Voulant baigner sa terre, en faire comme un lac. Essuyant quolibets, dédaignant moqueries, Il creusa, défonça par landes et prairies

Et la terre par l’eau recevant réconfort Du rusé paysan récompensa l’effort. Ses prés, ses châtaigniers, ses champs et ses clairières S’avéraient les plus beaux de la contrée entière.

Chacun de l’imiter, à partir de ce jour Et se voient aujourd’hui faisant de grands contours De très larges canaux, longs de dix kilomètres Apportant de la vie et beaucoup de bien-être.

La Borne et Chassezac, Altier le Lozérien Trois ruisseaux importants qui ne servaient à rien Font de Planchamp, Balmelle et Sainte-Marguerite Oasis de verdure et région bénite.

A fermière normande ayant montré du fl air Pour avoir inventé le fameux camembert, Dans son pays natal, on éleva statue.

Afi n que de Coulomb, le nom se perpétue Devraient en faire autant nos riches bourniquels En faveur du rayol aussi providentiel.

Dr. Roure

38 ETAT DES LIEUX DES CANAUX D’IRRIGATION ET DES SURFACES IRRIGUÉES EN 1852 ET 1872 source: thèse de Nicolas Jacob-UNIVERSITE PARIS IV–SORBONNE-2003 Ces documents présentent l’accroissement soudain des surfaces irriguées (représentées par les carrés bleus) entre 1852 et 1872. La soudaine spécialisation de la vallée dans la castanéiculture irriguée fut possible grâce à la construction d’une quinzaine de canaux, dont seuls une demi-douzaine sont encore en état de fonctionnement aujourd’hui. 1852 1872 0 250 500 750 m N

39 40 APOGÉE D’UNE CIVILISATION

La principale ressource de cette De plus, la sériciculture et l’ac- (écoles), trois clochers et deux société, nous l’avons vu, était la tivité minière permettaient chapelles. Mais cette stabilité in- castanéiculture. La polyculture d’assurer un revenu complé- certaine ne pouvait durer éter- qui lui était associée permettait mentaire aux modestes paysans. nellement. A peine au sommet à une population nombreuse En effet, la culture du vers à de son essor démographique, de vivre de manière autonome soie était très répandue dans la la société cévenole montrait les de ses productions. Les rares vallée de la Borne, et chaque premiers signes de décroissance terrains plats, souvent situés en ‘mas’ comptait un ou plusieurs de population, frappée par une bord de rivière, étaient cultivés mûriers (Morus alba, Morus série de fl éaux qui mirent fi n à en céréales, particulièrement en nigra). Les cocons étaient vendus cette civilisation paysanne. seigle. Les jardins et maraîcha- aux fi latures voisines. ges étaient situés à proximité directe des hameaux, ainsi que Cette vallée connut une véritable les quelques accols de vigne. Vers apogée démographique vers la le haut des versants, les bêtes moitié du XIXème siècle, avec pâturaient et permettaient ainsi une population excédant 800 de maintenir la forêt à distance. habitants. Certains parlent même d’une surexploitation du terri- toire, ayant appauvri les sols. La vallée comptait huit classes

41 GISEMENTS DU BASSIN MINIER D’ALÈS source: Cévennes PNC-éditions Gallimard

mine de plomb-argentifère de la Rouvière à Sainte Marguerite

COUPE DE LA VALLÉE DU CHASSEZAC : tranchées minières au niveau du secteur de la Rouvière source: mairie de Sainte-Marguerite-Lafi gère

LE TEMPS DES MINES

La révolution industrielle qui a lieu en Europe à cette époque n’épargne pas les Cévennes. Le bassin minier d’Alès qui englobe toutes les Cévennes fut exploité par des sociétés minières. Fer, plomb, charbon, étaient extrait de gisements souvent faibles. Le fi lon de plomb-argentifère qui maximum de son activité. L’acti- s’étale des environs de Génolhac vité minière à la Rouvière cessa à Largentière, en passant par la à la veille de la première guerre Rouvière à Sainte-Marguerite, mondiale, suite au départ des puis Sablière, est exploité bien hommes pour le front et, d’autre que très peu rentable. Il constitue part, à l’épuisement du maigre cependant un revenu complé- fi lon. Largentière, qui tient son mentaire non-négligeable pour nom du précieux métal, poursui- les agriculteurs en hiver. La mine vit son activité minière jusque compta jusqu’à 224 employés au dans les années 1980.

42 entrées des galeries minières

détritus miniers, gravats (en bleu)

Ces clichés montrent l’impact de l’activité minière passée dans le paysage d’aujourd’hui. Ruines, accumulation de matériaux rocheux dans les pentes, entrées de galeries rappellent qu’ici on exploita la montagne.

43 DEUX GUERRES MONDIALES, LE CHEMIN DE FER, LES MALADIES...

Travaux de construction du chemin de fer sur la ligne Clermont-Ferrand-Nîmes source: Cévennes PNC-éditions Gallimard

Il suffi t d’observer les listes de Clermont-Ferrand-Nîmes. Ces tructeur de l’économie locale fut noms fi gurant sur les monuments nouveaux axes de communica- la maladie de l’encre, en 1875. aux morts de la région pour com- tion eurent non seulement pour Ce champignon s’attaquant aux prendre comment la première conséquence le désenclavement racines des châtaigniers (Phy- guerre mondiale a décimé les des vallées cévenoles, mais tophtora cambivora et Phytoph- Cévennes de ses jeunes hommes. encore contribuèrent à vider ces tora cinnamomi) provoque très Le territoire cultivé ainsi privé montagnes de leurs paysans, rapidement un dessèchement de sa main-d’oeuvre fut considé- attirés par l’illusion du confort des parties aériennes, fi ssurant rablement réduit durant l’entre- de la ville, par la forte demande l’écorce, d’où coule un liquide deux-guerre. de main-d’oeuvre ouvrière dans noirâtre tachant comme de les usines. l’encre. Favorisé dans la vallée De plus, dès le XIXème siècle, de la Borne par les canaux d’irri- les importants travaux de cons- Ce déclin démographique fut gation, vecteurs de la maladie, il truction des voies de chemin accompagné par une série de laisse aujourd’hui son empreinte de fer cévenoles avaient appelé fl éaux atteignant l’agriculture dans le paysage, par la silhouet- de nombreux hommes sur ces cévenole. La pébrine atteint le te dénudée de vieux châtaigniers chantiers, pour creuser une mûrier en 1849, puis l’oïdium qui semblent calcinés. multitude de tunnels, et réaliser et le phylloxéra arrivèrent en les chef-d’oeuvres que sont les 1850 et 1870, atteignant la lignes telles que le ‘Cévenol’ vigne. Mais le fl éau le plus des-

44 La maladie de l’encre du châtaignier fut favorisée par les canaux d’irrigation.

Pour achever ce triste chapitre, n’oublions pas le chancre de l’écorce, champignon introduit en Europe en 1917, mais dont les dégâts dans les Cévennes sont apparus à la suite de la seconde guerre mondiale.

Evolution de la population des communes de la vallée du Chassezac entre 1825 et 1911 source: thèse de Nicolas Jacob-UNIVERSITE PARIS IV–SORBONNE-2003

45 0 100 200 300 m N

PHÉNOMÈNE D’ENFRICHEMENT Suite à cet abandon des cultures, ranée, elle est remplacée plus en la végétation spontanée a amont par la chênaie pubescen- aujourd’hui massivement repris te à Quercus pubescens, essence ses droits. Les genêts ont com- plus adaptée au climat mon- plètement envahi les landes tagnard. En remontant vers le autrefois pâturées, les châtai- haut des versants, on rencontre gneraies autrefois monumen- les fayards (ou hêtraie à Fagus tales sont devenues un taillis sylvatica). dense et impénétrable. Les essences végétales spontanées Le long des canaux d’irrigation telles le chêne (Quercus sp.), le toujours en état de fonctionne- hêtre (Fagus sylvatica), et autres ment s’est installée une fl ore bouleaux (Betula sp.), alisiers de milieu humide, bénéfi ciant (Sorbus sp.), frênes (Fraxinus d’eaux d’infi ltration au niveau sp.), ont ré-investi les lieux où les béalières sont en pleine selon leurs niches écologiques. Si terre. Ainsi n’est-on pas étonné la yeuzeraie (ou chênaie verte à de croiser aulnes (Alnus sp.) et Quercus ilex) constitue le climax bouleaux (Betula sp.) à mi-pente, de l’aval de la vallée de la Borne dans ce pays réputé sec. où s’engouffre le climat méditer- Toutes ces formations végétales

46 EVOLUTIONEVOLUTION DE L’OCCUPATIONL’OCCUPATION DU SOL SUR UNE PORTION CADASTRALECADASTRALE DE SAINTE-MARGUERITESAINTE-MARGUERITE

La châtaigneraie disparaît au profi t de source: thèse de Nicolas Jacob-UNIVERSITE PARIS IV–SORBONNE-2003 boisements spontanés. boisées abritent une faune servir. La chasse fonctionne ac- très riche et diversifi ée, parmi tuellement selon des quotas afi n laquelle on compte notamment de réguler certaines populations un nombre croissant de sangliers, animales. qui, semble-t-il, ont été peu à peu remplacés par les sanglo- Sur les chams dominant la chons (ou cochongliers), espèce vallée, les pâtures ont subi une hybride introduite tout d’abord très rapide reconversion suite à pour la chasse, mais qui, effec- la déprise agricole. En effet, ces tuant plusieurs portées par an, plateaux ont été massivement se multiplie très rapidement, plantés de boisements monospé- et s’avère très destructrice du cifi ques de résineux. Ainsi, sur travail de l’homme. Ce nouvel la cham du Roure (coté Pied-de- arrivant contribue, avec les Borne), on ne trouve plus aucune racines des arbres, à la destruc- trace des anciennes narses (tour- tion des accols, mais détériore bières), drainées et asséchées à aussi les canaux d’irrigation des fi ns sylvicoles. La forêt est encore en état. De plus, il pille ainsi aujourd’hui majoritaire- les cultures non-cloturées et ment composée de pins laricio Localisation de la portion vient jusque dans les villages se de Corse (Pinus Laricio, var. cadastrale étudiée ci-dessus

47 COUPE SCHEMATIQUE DE LA RÉPARTITION DES FORMATIONS VEGETALES DE LA VALLEE

corsicana), de pins sylvestre Le paysage hérité de ces dizaines il y a encore 50 ans, puis boire (Pinus sylvestris) et d’épicéas d’années d’abandon est drama- l’eau qui suinte sur un rocher, (Picea sp.). Elle compte moins tique aux yeux des anciens, qui grimper dans un grand châtai- de 1% de feuillus, et l’on peut voient dans les genêts l’âme gnier mort, écouter le silence de se poser la question de la dété- du diable, mais se révèle d’une la nuit... rioration des sols déjà très acides grande beauté pour les nouveaux (sols bruns) et des conséquences arrivants, qui découvrent dans Ce paysage livré à lui-même, sur les eaux de ruissellement et ces grandes étendues sauvages s’il en fait rêver certains, éveille d’infi ltration, dont résultent des un paradis terrestre. L’été, les surtout ‘la peur de la nature’, sources chargées en arsenic dans amoureux de la nature, les na- évoquée par François Terrasson la vallée de la Borne. La cham de turalistes, ou encore les touristes dans son ouvrage ainsi intitulé. Montselgues, de l’autre coté de prennent plaisir à se perdre le Ce dernier tente d’expliquer le la vallée, est elle aussi exploitée long de sentiers qui ne mènent vaste sujet que représente la en résineux. Cependant, une plus nulle part. Ce paysage destruction de la nature par la proposition de site Natura 2000 se prête à l’imaginaire et à la peur qu’elle suscite en nous, aura pour objectif d’y rétablir les rêverie. Pénétrer dans l’univers mais particulièrement le non- zones tourbeuses. fantomatique d’un village en respect de certaines règles an- ruines, où la forêt a percé le toit cestrales vis-à-vis d’un terri- des maisons, y glaner quelques toire, de ses ressources et de indices sur ceux qui y habitaient ses capacités. Certains récents

48 aménagements qui ont vu le jour dans les Cévennes depuis la déprise agricole sont en effet en total désaccord avec la nature du terrain, mais aussi avec l’esprit du lieu.

COUPE SCHÉMATIQUE illustrant la manière dont les arbres fi xent les sols en glissant leurs racines entre les blocs issus de la désintégration du granite.

49 TENDANCE EVOLUTIVE ACTUELLE DES DIFFERENTS MILIEUX

50 ÉVOLUTION DES DIFFÉRENTS MILIEUX (plateaux et pentes)

51 LES TEMPS MODERNES LES TEMPS MODERNES

52 53 1965: L’ARRIVEE d’EDF

Des années 1920 à la seconde la construction de 10 barrages de diamètre acheminent directe- guerre mondiale, de nombreux disposés en escalier, et de 9 usines. ment l’eau des retenues à travers projets furent proposés sur Seuls 6 barrages et 5 usines des conduites souterraines, les différents bassins versants ont été réalisés, produisant une creusées à même la roche gra- du Vivarais cévenol. Certains puissance totale de 110 MW, soit nitique imperméable. Ce tunnel d’entre-eux très ambitieux ne une production annuelle de 430 presque horizontal conduit l’eau furent pas réalisés pour des millions de kWh, (consommation sur plusieurs kilomètres, jusqu’à raisons de coût ou de faisa- annuelle d’une ville de 50 000 un lieu stratégique exploitant la bilité, tel que celui prévoyant habitants). L’énergie produite topographie, où une chute ver- l’inondation totale des gorges par le complexe hydroélectrique tigineuse de près de 300 mètres de l’Ardèche. Ainsi, le Massif permet de répondre très rapide- précipite le liquide sous pression Central dans son intégralité fut ment à de fortes demandes en dans une centrale électrique, considéré comme un ‘château électricité, en période hivernale où elle actionne une ou deux d’eau’, et dès les années 1930, par exemple. Les lacs de barrage turbines. Ce procédé astucieux, de grands travaux de construc- constituent de véritables réser- qui s’inspire de l’industrie du tion de barrages hydroélectriques voirs d’eau, approvisionnés par moulinage développée le long furent entrepris, notamment les eaux de ruissellement et des des béalières au XIXème siècle, dans les gorges de la Truyère. précipitations, mais aussi par permet d’ajuster la production à Le projet concernant le bassin des ruisseaux détournés. Des la demande en électricité. versant du Chassezac prévoyait conduites forcées de 2 à 3 mètres

54 PROJETS ET REALISATIONS DE BARRAGES SUR LE BASSIN VERSANT DU CHASSEZAC

Les lacs en jaune et les ouvrages en gris clair n’ont pas été réalisés source: thèse de Nicolas Jacob- UNIVERSITE PARIS IV–SORBONNE-2003

55 0 1 2 3 km N

56 INTEGRATION PAYSAGERE

L’arrivée d’EDF dans la vallée, dans les années 1960, a ponc- tuellement apporté une nouvelle vie avec la présence de centaines d’ouvriers pour la construction des ouvrages. Mais elle a surtout apporté un petit bassin d’emploi durable; l’usine de Pied-de- Borne compte actuellement une quinzaine d’employés, qui dy- namisent la vie économique de hameau de Pied-de-Borne, c’est de la ‘fée électricité’ se fait la vallée. Ainsi se maintiennent à dire ‘au pied’ de la Borne, mais toujours sentir. Les conduites quelques commerces, quelques aussi au pied de la chapelle de la forcées, relativement mal familles dont les enfants vont Madeleine. Le nouveau village de perçues par les habitants de la à la petite école de Pied-de- Pied-de-Borne s’est quant à lui vallée et les touristes, scindent Borne. installé ‘au pied’ du Chassezac, verticalement la montagne de Depuis l’implantation du près du hameau du Chambon, leur couleur gris-rouille, et complexe hydro-électrique, sur les terrains plats bordant le guident directement le regard le paysage de la confl uence a lac de barrage de la confl uence. Il vers les bâtiments des centrales connu un changement majeur, constitue aujourd’hui le nouveau qui illuminent les gorges de leur notamment par la présence noyau de la vallée, avec quelques vert cru et de leur beige fade, de la centrale et notamment commerces, l’école, la mairie, et tranchant avec l’harmonie colo- des conduites forcées, pylônes, les habitations destinées à ac- rimétrique du paysage alentour. câbles. Tous ces éléments ont cueillir les employés de l’usine et Et quel sentiment lorsqu’on malheureusement été implantés leurs familles. Nous verrons plus croise en forêt un cylindre d’une sans véritable préoccupation loin comment ce nouveau village trentaine de mètres de diamètre paysagère et architecturale. Par est en contradiction avec le ter- en béton, cheminée d’aération exemple, l’usine qui centralise ritoire qu’il occupe. de la conduite forcée, ou puits tous ces éléments s’est implantée Au-delà, lorsqu’on quitte les menant directement aux en- à l’emplacement de l’ancien villages et hameaux, la présence trailles de la terre...

57 Barrage-voûte de Puylaurent, dernier barrage construit en France. Le barrage -voûte est particulièrement adapté aux vallées étroites où les appuis rocheux sont solides. Il résiste élastiquement à la pression de l’eau. Constitué d’un béton innovant auquel des cendres ont été incorporées, ce barrage est plus compact, donc plus résistant et plus étanche. BARRAGES

Barrage «voûte» de Villefort source: archives EDF Les retenues stockent les forts apports de printemps et d’automne et les restituent en été pour le soutien d’étiage et en hiver pour la production d’énergie. En plus des prises d’eau pour les conduites forcées, les barrages sont équipés d’une conduite de restitution et d’un évacuateur de crue. Etant souvent situées en pied de barrage, les conduites de restitution dispersent les sédiments accumulés au fond du lac dans la rivière. Normalement, un curage des retenues doit avoir lieu tous les 10 ans, mais les sédiments étant évacués, EDF n’a pas jugé nécessaire de l’ef- fectuer depuis un certain temps.

58 Barrage «poids» de Malarce Le poids et le volume de l’ouvrage permettent de faire obstacle à l’eau.

Par conséquent, les sédiments dispersés dans les cours d’eau tendent à eutrophiser les milieux aquatiques. La biodiversité décroît, et les algues s’instal- lent. De plus, le lit rocailleux des rivières noircit peu à peu.

Il existe un PPI (Plan Particulier d’Intervention), censé déterminer les zones constructibles selon la hauteur d’eau atteinte en cas de rupture du barrage. Cependant, il ne semble pas être respecté par la commune de Pied-de-Borne, dont les nouvelles constructions seraient immergées en cas de rupture du barrage de Villefort.

59 Chapelle de la Madeleine

Usine de Pied-de-Borne et sa conduite forcée

Usine de Beyssac et sa conduite forcée

60 USINES

La conduite et la surveillance du complexe hydroélectrique sont assurés depuis l’usine de Pied-de- Borne. Un réseau informatique permet de consulter les données de chaque barrage: débits, volumes, ainsi que les données climatiques. La commande cen- tralisée des vannes permet de régler les paramètres en fonction des besoins.

Si les barrages trouvent leur place dans le paysage, les usines, quant à elles, sont relativement mal acceptées par la population locale et les touristes, qui jugent qu’aucun effort d’intégration paysagère n’a été fait.

Conduite forcée de Malarce

Cheminée d’aération de la conduite forcée de Pied-de-Borne, perdue au coeur de la forêt

diamètre 30m

diamètre 3m

61 vers Clermont- Ferrand

vers Valence

vers Localisation des lignes à très haute Avignon tension sur le territoire.

0 1 2 3 km N

EDF ET LE DEVELOPPEMENT DU blement l’important revenu de la de Malarce. L’Ardèche bénéfi cie TERRITOIRE taxe entre les deux communes, donc directement de ces apports, n’a pas été réalisé. Par consé- permettant un écoulement L’entreprise constitue indénia- quent, seule la commune lozé- permanent dans le tronçon blement un apport fi nancier pour rienne bénéfi cie de ce confortable karstique, totalement asséché les communes concernées, par le avantage fi nancier, augmentant naturellement à cette période. Le biais de la taxe professionnelle. les disparités avec Sainte-Mar- maintien d’un niveau constant Les communes de Sainte-Mar- guerite, sa voisine ardéchoise. en période estivale dans les guerite et Pied-de-Borne en gorges de l’Ardèche, ainsi que bénéfi cient donc au titre des Outre la production d’électricité, sur les plans d’eau du Raschas et aménagements situés sur leur EDF gère et participe au déve- de Villefort, favorise la pratique territoire, notamment les pylônes loppement du territoire dans le des sports nautiques. Cependant, des lignes à très haute tension domaine de l’hydraulique. l’accès au bord des rivières au (THT, 225 000 V), ainsi que le Le soutien d’étiage est assuré coeur du complexe hydroélectri- barrage de Sainte-Marguerite. pendant la période estivale du que n’est pas conseillé, à cause Cependant, le projet initial qui 15 juin au 15 septembre grâce d’éventuels lâchers de barrage, prévoyait de placer les deux au stockage des apports d’eau de ce qui ne favorise pas l’éco- turbines de l’usine de Pied-de- printemps. Un débit constant est nomie touristique locale, les Borne de part et d’autre de la garanti pendant cette période, touristes étant dissuadés par la rivière, afi n de partager équita- de 2300 l/s à l’aval du barrage multitude de panneaux présen-

62 Canaux réhabilités par EDF durant les années 1960. Le busage béton assure un minimum de pertes, bien que l’acidité de l’eau tende à le fi ssurer.

tant les dangers de ces torrents. tion. Cependant, avec le temps et Cette technique fait actuelle- En revanche, la pratique du l’acidité de l’eau, le béton tend à ment preuve de son effi cacité canyoning dans les gorges du se détériorer et à se fi ssurer. sur le hameau de Pantostier qui Chassezac est possible grâce De même, la proposition de bénéfi cie d’eau en abondance au maintien du niveau d’eau mise en place d’un réseau d’ir- pour les cultures et jardins. régulier durant la saison. rigation par aspersion ne fut acceptée que par un hameau de EDF, durant son installation la commune de Pied-de-Borne: dans les années 1960, a active- Pantostier. En effet, les ‘anciens’ ment participé à l’amélioration avaient refusé l’apport d’une de l’irrigation sur le secteur du nouvelle technique qui consiste complexe hydroélectrique. La à pomper directement l’eau dans consolidation de portions des les conduites forcées d’EDF, au canaux et notamment du canal bénéfi ce de la res- de Balemo, dont la prise d’eau sur tauration des canaux le Chassezac irrigue les terrains traditionnels. de la commune de Pied-de- Borne. Le busage béton permet un consolidation des béals, et subit peu de pertes par infi ltra-

63 N

0 1 2 3 km

GESTION ADMINISTRATIVE DU de-Borne, résultat de la fusion de Intercommunal à Vocation TERRITOIRE trois communes dans les années Unique regroupant Pied-de- 1960, lors de la construction des Borne et Prévenchères, le SIVU La vallée de la Borne subit les barrages (Balmelles, Planchamp des gorges du Chassezac, qui conséquences d’un découpage et Saint-Jean-Chazorne). Elle se a pour compétences l’aména- qui la divise en deux rives indé- situe dans le département de la gement des gorges à but tou- pendantes l’une de l’autre admi- Lozère, en région Languedoc- ristique (randonnée, escalade, nistrativement. La rive gauche, Roussillon. Cette scission canyoning...). La communauté comme nous l’avons vu précé- entraîne des incohérences de de communes de Villefort, à demment, constitue le territoire gestion du territoire, amplifi ées laquelle Pied-de-Borne vient de de la commune de Sainte-Mar- par le découpage des syndicats s’intégrer ce 1er janvier 2007, a guerite-Lafi gère, dans le dé- et communautés de communes. pour compétences le développe- partement de l’Ardèche, région Premier constat: aucune inter- ment économique et touristique. Rhône-Alpes. La rive droite cor- communalité entre Sainte-Mar- En outre, le Pays des Sources respond à la commune de Pied- guerite et Pied-de-Borne. en voie de création, vise à ras- Il existe tout d’abord un Syndicat sembler 73 communes de lozère

64 N

0 1 2 3 km

(dont Pied-de-Borne), sous les choise, afi n de connecter celle-ci tercommunalité français est bien concepts d’identité, de durabilité au réseau pédestre existant. En complexe, différentes strates se et de solidarité. effet, sa situation enclavée, à superposent sans se compléter, Coté Ardèche, Le SIDET (Syndicat mi-chemin entre les bassins tou- les compétences de ces structu- Intercommunal de Développe- ristiques des Vans et de Villefort, res sont bien limitées, et aucune ment Economique et Touristi- ne favorise pas la reconnaissan- d’entre-elles n’a de réel pouvoir que) du pays des Vans a, comme ce touristique de la vallée de la d’action sur le territoire. son nom l’indique, pour compé- Borne, qui constitue une barrière tence la valorisation économique entre les deux pôles d’attraction. et touristique du territoire. La La commune de Sainte-Mar- commune de Sainte-Marguerite guerite est aussi intégrée à la y est incluse et se situe à l’ex- communauté de communes des trémité ouest du territoire de Cévennes vivaroises (incluant ce syndicat. Le SIDET travaille Montselgues, Malarce-sur-la- actuellement sur les sentiers de Thines, et Sablière). randonnée de la commune ardé- En somme, le paysage de l’in-

65 N 0 1 2 3 km

DEUX PARCS par les interventions du PNR, de création d’un sentier d’in- (et donc pas Pied-de-Borne), terprétation du paysage . Il est La zone périphérique du Parc qui travaille actuellement en cependant regrettable que la National des Cévennes (PNC), partenariat avec le SIDET sur commune de Pied-de-Borne ne qui englobe les communes de la réhabilitation des béalières soit pas impliquée dans cette Pied-de-Borne et Sainte-Mar- de Sainte-Marguerite encore en démarche de sauvegarde du pa- guerite, n’a que très peu d’impact état. L’étude en cours devrait trimoine. sur le développement local, et permettre de débloquer des nombreux sont les habitants fonds afi n de remettre en état qui ignorent leur apparte- les portions fragiles (effondrées nance au PNC. Le Parc Naturel ou abîmées par les sangliers). Régional des Monts d’Ardèche Cette opération s’accompagne de (PNRMA) s’arrête, comme son la réalisation d’un ‘topoguide’ nom l’indique, à la limite dépar- touristique autour des canaux tementale. Seule la commune de de la vallée de la Borne. Cette Sainte-Marguerite est concernée démarche s’appuie sur la volonté

66 N 0 1 2 3 km

UN SITE DU RÉSEAU NATURA 2000 dessus de la rivière Thines. dans lesquelles niche une espèce Le principal objectif est la recon- très rare de chauve-souris. Or, La proposition de Site d’Impor- nection des tourbières du plateau initialement, les mines devaient tance Communautaire (SIC) du de Montselgues entre-elles, par être comblées pour des raisons plateau de Montselgues couvre la réduction de la surface et de sécurité. Les gestionnai- une superfi cie de plus de 4000 de l’impact des plantations de res ont fi nalement trouvé une hectares. Il est essentiellement résineux et la protection des solution, et projettent d’installer composé de deux entités : le milieux riches en espèces. Ainsi, des grilles à l’entrée des galeries plateau de Montselgues, péné- le programme de gestion vise afi n de préserver l’accès aux plaine antétriasique constituée à favoriser l’entretien des prés, chauve-souris, tout en condam- de granites et de grès, située prairies, vergers sur la cham nant l’accès aux hommes. entre 950 et 1150 m d’altitude, et de Montselgues, mais concerne les pentes abruptes à l’ouest au- aussi les versants de la vallée de dessus de la Borne et du ruisseau la Borne, et particulièrement les du Chamier, au sud au-dessus du anciennes mines de Plomb-ar- ruisseau de Paravis, à l’est au- gentifère de Sainte-Marguerite,

67 INVENTAIRE PAYSAGER DE LA VALLÉE

Lors de mes recherches hi- vernales, une soudaine envie d’aller visiter chaque recoin du La vallée est desservie par les site m’est venue, afin de mieux routes départementales 151 et le comprendre, ou d’y déceler 113, qui longent la rivière sur quelque trésor caché au fond chaque rive. Des dessertes se- d’un cul-de-sac... Point de trésor, condaires permettent d’accéder mais une myriade de richesses aux différents hameaux, géné- de hameaux, cachés derrière un ralement en cul-de-sac. Seuls 2 éperon rocheux ou dissimulés au ponts franchissent la Borne, l’un bord de l’eau, et de nombreu- à l’amont, l’autre à la confluen- ses rencontres au hasard de ces ce. Un troisième pont permet détours. Une recherche que ce de franchir le Chassezac. Le chapitre tente de présenter briè- temps de trajet en voiture pour vement, par une promenade de parcourir la vallée en longueur l’amont vers l’aval de la vallée. est de 20 minutes environ.

68 PORTE D’ENTREE AMONT ‘amphithéâtre’ des Beaumes

MEANDRES DE LA BORNE coeur de vallée

LE ‘CENTRE-VALLEE’ confluence des trois rivières

PORTE D’ENTREE AVAL friche industrielle de la Rouvière

0 500 m 1500 m N 69 Les encadrés présentent une carte mentale des principaux hameaux de la vallée, révélant pour la plupart une clairière entourée par les boisements spontanés. Quelques annotations précisent la toponymie des noms de lieux; source : Dictionnaire des noms de lieux des Cévennes-Paul Fabre-Editions Bonneton- 2000

70 LES BEAUMES: de l’occitan balma, bauma, qui se- lon les lieux a le sens de ‘sol pierreux, affl eurement de rochers, banc de roches, caverne, grotte’.

Lorsqu’on arrive par le nord, on entre par la porte amont de la reyrolles. Ce lieu sauvage hors familles. Chacun d’entre-eux est vallée: les Beaumes. Marquée saison estivale m’inspire crainte aujourd’hui encerclé par la forêt par les rochers de Conchet- et respect par son exiguïté ro- qui fait pression sur les quelques tes, le valat de Fustugères et cailleuse. Direction le sud. accols encore cultivés. Ces mas, les ‘sentinelles’ de Chamier, ce hameaux et villages peuvent site forme un vaste amphithéâ- Le coeur de vallée s’articule être comparés à des ‘poches de tre surplombé par des enroche- autour de Saint-Jean-Chazorne survie’ de l’être humain au coeur ments spectaculaires, au centre (rive droite) et de Féreyrolles d’un environnement hostile, duquel se dresse la chapelle des (rive gauche). Ces deux villages qui n’épargne aucun terrain à Beaumes sur son promontoire. qui se font face abritent quelques l’abandon. Les hameaux aux volets fermés résidents permanents, et à mesure Puis, en se rapprochant de la con- sont presque uniquement cons- que l’on progresse vers l’aval, fl uence, les hameaux deviennent titués de résidences secondaires les jardins entretenus se font de moins en moins authentiques, et encerclés de boisements, qui plus nombreux. A Féreyrolles, le le mitage est plus important et menacent les dernières terrasses canal de Malarive vient irriguer les maisons à crépit et haies de fauchées. Le canal d’irrigation les terrasses de légumes et de pyracantha s’éparpillent dans de Malarive est prélevé dans la fruitiers et fi nit sa course sous le paysage. Le village du Pont, Borne au niveau du pont Char- une pergola au coeur du village. placé sous les câbles des lignes lemagne et s’engouffre dans les Nombreux sont les petits mas à haute-tension, rappelle que la sous-bois en direction de Fé- qui autrefois abritaient plusieurs centrale EDF n’est plus très loin.

71 CHAMIER

72 L’ORATOIRE: traduction de l’occitan orador, ‘petite chapelle’, lieu destiné à la prière

LA PANDERIE ET CHARAIX

73 SAINT-JEAN-CHAZORNE: Chazorne: nom com- mun désignant à une époque récente un cer- tain type d’abris en pierres sèches destiné aux bergers et aux chasseurs

FÉREYROLLES: dérivé de ferrièra, forge catalane, mine de fer

74 LE JOU: de l’occitan jo, employé au sens topographi- que de ‘sommet’

ROUVEYROL: de l’occitan ròviera, ‘rouvraie, bois de chênes

LE PONT: de l’occitan ‘pont’, hameau situé au niveau de l’ancien pont Sainte-Philomène détruit en 1880.

LE SOULIÉ : de l’occitan soleiròl, terrain exposé au soleil

75 76 CORDES : du nom de famille, nom de métier; s’explique par l’ancienne présence de fabriques de cordages

SAINTE-MARGUERITE-LAFIGÈRE: Lafi gère, de l’occi- tan la fi lgeria, qui renvoie à ‘fougère’, ou de fi gièra, ‘lieu planté de fi guiers’, ou encore de felgièra désignant un ‘lieu couvert de bruyères’

Puis voici la confl uence. Ici se ‘années 60’, en décalage avec peu conviviale, et sert unique- rencontrent les trois rivières, au l’architecture traditionnelle. Les ment de parking temporaire. centre géographique et adminis- crépits beiges, rosés, ou gris Si Pied-de-Borne ne peut pas se tratif de la vallée. Le paysage confèrent à ce petit centre éclaté vanter d’offrir un lieu de convi- est fortement marqué par la un caractère triste, accentué par vialité à ses habitants, ‘Sainte- centrale EDF. L’usine hydroélec- une exposition très limitée au Marguerite-Centre’, éclaté trique reçoit l’eau de la conduite soleil. De plus, si l’implanta- en plusieurs petits hameaux forcée au pied de la chapelle tion du bâti diffère de l’orien- dominant le lac, ne présente de la Madeleine, et redistribue tation traditionnelle, l’étalement aucune place centrale. Le l’électricité dans une multitude du village sur les terrains plats hameau de Sainte-Marguerite à de câbles et de pylônes, accen- bordant le lac révèle la non- proprement parler est constitué tuant le contraste entre passé et prise en compte de la richesse de l’église, du cimetière, de modernité. De même, les petits de ce ‘chambon’. Camping, aire la mairie et du presbytère, et hameaux de Sainte Marguerite de jeux pour enfants, terrains de devrait prochainement accueillir font face au ‘village nouveau’ sport et habitat occupent cette un gîte communal. Un constat de Pied-de-Borne. Installé au- terre plate, si rare dans la vallée, très clair sur le coeur de la vallée: dessous du hameau du Chambon, et propice à la culture maraîchè- il manque un centre fédérateur ce noyau urbain de la vallée est re. La placette autour de laquelle et convivial aux habitants de la composé de maisons d’archi- on trouve les commerces et la vallée de la Borne. tecture composite, dans le style mairie présente une atmosphère

77 LE CHAMBON: du gaulois cambo, ‘terrain dans une courbe de rivière’, ou de l’occitan camp bon, ‘terrain fertile’

PIED-DE-BORNE: de l’occitan pè ‘pied’, signifi ant ‘en PLANCHAMP, PLANCHAMP SUPÉRIEUR: bas de’. de plan champ, ou champ plan, mais le site paraît réticent à cette invitation, les BORNE : du latin borna, ‘creux, excavation’ villages étant implanté dans la pente

Nouvelles constructions au village du Chambon (Pied-de-Borne)

78 LA CONFLUENCE DEPUIS PLANCHAMP 31 octobre 2006, 19:00

On peut constater sur la photo ci-contre la différence de politique d’éclairage urbain entre les deux communes. La couleur de la lumière, d’une part, donne un aspect chaleureux à Sainte-Marguerite. L’étale- ment des candélabres coté Pied-de-Borne provoque un sentiment étrange. Plus nombreux que les habitants, ils diffusent une lumière blafarde sur le petit village. Cordes Le Chambon Ce cliché révèle une nouvelle disparité entre les deux communes. Autrement dit: Sainte Marguerite Pied-de-Borne même la nuit, les villages se distinguent l’un de l’autre.

Troisième village dominant cette terminée, et un détour par raie-cathédrale’ en bonne santé. confl uence du haut de ses remparts l’entrée des gorges du Chassezac Bien sur, il s’agit d’une espèce rocheux, Planchamp accueille un révèle un curieux vallon dominé hybride qui résiste aux fl éaux étrange petit château moderne, par une seconde conduite mé- que sont l’encre et le chancre. Ici, hérité d’Odillon Barrot, homme tallique, dominant le charmant les agriculteurs sont présents, politique sous la Deuxième Ré- petit village de Beyssac. Etrange ils jardinent l’espace, moins publique et le Second Empire. paysage de contrastes, dissimulé qu’autrefois, certes, mais l’impact Les accols s’étalent dans une dans un recoin de montagne, sur le paysage est sensible. belle horizontalité de Planchamp austère et grandiose à la fois. jusqu’au fond de vallée, mais On reprend ensuite le sens de sont menacés par une végétation l’eau en fi lant vers la grande spontanée vigoureuse. vallée du Chassezac. Le climat A mi-parcours de la promenade, s’adoucit, d’ailleurs la végéta- le centre névralgique de la vallée tion change, et rapidement le révèle ses nombreux contrastes chêne vert s’impose en maître. et retient particulièrement mon Dispersés autour des villages attention, dans l’optique d’une des Salces et des Aydons, des intervention de la part du pay- vergers de fruitiers ou de châ- sagiste. taigniers ponctuent l’espace. Le Mais la visite du site n’est pas Boul se vante de sa ‘châtaigne-

79 BEYSSAC : du gaulois betu, ‘bouleau’, désigne un lieu planté de bouleaux

80 LES SALCES : de l’occitan sause, désignant ‘les saules’

SCAFOULIN

LE CLOS : de l’occitan clòt, ‘dépression, trou, fos- se, tombeau, cavité, petite voûte, cave’

PIED-BARRET : composé de l’occitan pèg, ‘hau- teur, colline’, et du nom de famille Barret

LES PLANS : du latin planum, ‘plaine, plateau’

8181 82 LA ROUVIÈRE : de l’occitan rovièra, ‘rouvraie, bois planté de chênes’

Enfi n nous atteignons la depuis longtemps. Rouvière, porte d’entrée aval Les entrées des galeries minières de la vallée. Plus loin, le schiste ponctuent la montagne, et des remplace le granite, le Chassezac coulures de gravats restent s’enfi le dans des méandres étalées sur les versants. Au tortueux en direction des Vans. bord de l’eau, dans l’ombre, un Mais c’est cette friche indus- ancien pont métallique détruit, trielle minière qui s’impose dans les traces d’une tyrolienne, des le paysage comme un témoi- ruines, encore, et... une vingtaine gnage du passé. Des bâtiments de ruches de toutes les couleurs de briques à l’air fantomatique, alignées sur un terril. Une dont les fenêtres et les toits ont touche de gaieté dans cet univers disparu avec le temps, bordent grisâtre d’une grande beauté. la route, surplombés par une haute cheminée qui ne fume plus

83 LE BOUL : de l’occitan bolada, probable- ment au sens de ‘éboulements rocheux’

LE CHAMBONNET: nom diminutif de Chambon

84 LES AYDONS

85 L’AGRICULTURE ET LES CANAUX AUJOURD’HUI

On compte sept exploitants encore en activité dans la vallée. Borne), qui transforme les châ- La plupart d’entre-eux ont de taignes en farine. Cette petite petites exploitations qui subsis- entreprise est en progression, car tent grâce à des vergers de châ- elle connaît une offre croissante taigniers ou de pommiers, et à de la part de ses fournisseurs de l’élevage. Il s’agit généralement châtaignes. Malheureusement, de personnes à la retraite, ou sur cette fi lière en plein renouveau le point d’y être. Certains voient profi te peu à la vallée, et les la génération suivante reprendre châtaigneraies de la Borne ne l’affaire familiale, mais ce n’est semblent pas bénéfi cier de cet pas le cas de tous. La fi lière ‘châ- essor économique local, freiné taignier’ est maintenue grâce à par les maladies de l’encre et du l’usine FARIBORNE (hameau du chancre de l’écorce. Chambon, commune de Pied-de-

86 Boisements

Emplacement des exploitations agricoles

surfaces irriguées par les canaux

surfaces jardinées ou cultivées

0 500 m 1500 m N 87 L’exemple de l’exploitation de effet, ses 80 chèvres sont encloses séduit pour ses valeurs d’authen- Féreyrolles est un cas particulier dans un terrain de 7 ha, et tout ticité et la beauté de son paysage, car il s’agit de l’unique installa- ce qu’elles consomment est produit maintenant un fromage tion d’un marginal (ou ‘bourru’, importé (majoritairement de la malheureusement en désaccord appellation locale des ‘hippies’) luzerne provenant de la Drôme). avec le territoire et le terroir dans la vallée. Peu encouragé La production de 115 à 130000 local. De plus, n’ayant pas été par la population locale à son fromages par an, vendus sur les encouragé pour son implanta- arrivée dans la région en 1969, marchés de Villefort et des Vans, tion, son exploitation se situe sur cet homme a fi nalement réussi ainsi qu’aux magasins et restau- une butte exposée aux vents et avec beaucoup de courage à rants de la région lui permet de l’impact visuel de l’élevage dans implanter un élevage de chèvres, rentabiliser son exploitation. le paysage est fort. La clairière avec production de fromages Cet homme qui, dans l’élan de créée par l’élevage est souillée de selon un mode d’exploitation ‘retour à la terre’ des années fumier, la terre s’érode. bien particulier et totalement 70, est venu s’installer loin de nouveau sur ce territoire. En la ville, dans un pays qui l’avait

88 Les canaux en fonctionnement reconstruction des murs de sou- De plus, ces ‘berges’ consolidées servent toujours aux agricul- tènement...) sont effectués par forment localement un sentier teurs de la vallée, bien que le les employés communaux, et praticable longeant le canal. partage équitable proportion- par les bénévoles de l’associa- nel à la surface à irriguer n’ait tion ‘Bésaou et patrimoine’ de Ces béalières doivent être con- plus cours. Chacun puise dans Sainte-Marguerite (Bésaou étant sidérées comme un véritable le canal en y installant une l’appellation des béalières en vecteur de développement, et pompe durant la période de patois local). Des techniques as- pas seulement comme le support mise en eau des canaux, d’avril tucieuses de consolidation des d’un sentier, mais comme le à octobre. Les particuliers béné- canaux en gabion artisanal ont moteur d’un projet de dynami- fi cient ainsi de l’eau pour l’ir- récemment fait leurs preuves. Du sation du territoire. rigation des potagers familiaux grillage à poule et des traverses et des jardins. Cependant, les en bois prélevé sur place con- travaux d’entretiens (nettoyage tribuent à renforcer les murs de des feuilles mortes au printemps, soutènement contre les sangliers.

89 LE RENOUVELLEMENT SOCIAL DE LA VALLEE

L’exode rural provoqué par la déprise agricole ayant frappé la région depuis le milieu du XIXème siècle a touché à sa fi n dans les années 1960, avec l’im- plantation du complexe hydroé- lectrique, qui permet aujourd’hui le maintien de 16 employés et de leurs familles. Bien que la vague de ‘retour à la terre’ insuffl ée par les terrains sont coûteux, et le chauffage au fuel installé dans l’esprit de mai 68 n’ait quasiment prix de l’immobilier prohibitif, ces logements néglige totale- pas atteint la vallée de la Borne, les maisons traditionnelles étant ment le potentiel du territoire en une population néo-rurale a tout achetées au titre de résidence bois-énergie. de même permis de maintenir la secondaire par des familles plus démographie de Pied-de-Borne aisées. D’ailleurs, cette politique Les témoignages oraux de dif- aux alentours de 200 habitants. s’inscrit dans une dynamique férents néo-ruraux rencontrés La commune de Sainte-Margue- nationale de construction de sur place révèlent une volonté rite qui comptait en 1968 plus logements sociaux. d’agir sur le territoire, mais de 170 habitants n’en recense une situation fi gée. Les terrains plus aujourd’hui que 85. Cette année, trois nouveaux sont coûteux et aucun emploi logements sociaux viennent de n’est disponible de Villefort aux La commune de Pied-de-Borne voir le jour sur les terrains plats Vans, même dans le bénévolat. oriente sa politique vers l’accueil du Chambon, évoqués précé- Cette démarche d’accueil d’une de nouveaux habitants. demment. Ne revenons pas sur nouvelle population n’est mal- En construisant de nouveaux la qualité architecturale et ur- heureusement pas accompagnée logements, elle offre l’opportuni- banistique de ces constructions, d’une aide à la création d’une té à des familles dont les revenus mais une autre notion de dura- fi lière qui permettrait de créer sont peu élevés de venir s’ins- billité est complètement absente des emplois. taller dans la vallée. En effet, du projet : l’énergie. En effet, le

90 CARTE DES USAGES DU TERRITOIRE

escalader

se reposer passer les vacances

se promener pêcher

élever des chèvres produire des fromages

se baigner Comme pour l’agriculture, le re- nouvellement social de la vallée dépayser ne sera pas assuré, tant qu’une randonner dynamique locale cohérente im- pliquant territoire et société ne visiter sera pas insuffl ée. Le paysagiste ne peut-il pas proposer, par le chasser produire de l’électricité biais du projet de paysage, une piste de développement terri- jardiner torial cohérent et durable? C’est habiter l’ambition de ce diplôme, orienté faire du canyoning camper vers un projet socio-territorial, jouer générateur de paysage. farine produire de la

irriguer cultiver

circuler

9191 VERS UN PROJET DE PAYSAGE... VERS UN PROJETPROJET DE PAPAYSAGE...YSAGE...

92 CONSTATS

C’est en partant des constats d’analyse suivants que s’est structurée l’idée d’un projet mêlant paysage et société:

-Les incohérences de gestion du territoire, traduites par le développe- ment à deux vitesses des communes, la mauvaise exploitation des res- sources locales (notamment le bois présent en abondance), et une agri- culture en quête de renouveau mais ne bénéficiant d’aucun soutien.

-Un accroissement volontaire de la population d’une part, et de nom- breuses demandes d’installation reçues par les deux communes d’autre part.

-Un patrimoine fragile, menacé, et sur le point de disparaître, mais consolidé par une dynamique de développement touristique et patri- monial.

93 INTENTIONS ACTUELLES DE DEVELOPPEMENT DE LA VALLEE

94 D’une part, la commune de rite est soutenue par le PNR des travaux coûteux nécessaires à Pied-de-Borne pratique une Monts d’Ardèche et le SIDET la remise en état des béalières. politique de développement dé- dans un projet de réhabilitation La création d’un sentier justifi e- mographique en construisant des canaux d’irrigation, dans le t-elle les importants moyens à des logements sociaux afi n d’ac- but de réaliser un sentier d’in- mettre en oeuvre dans le cadre cueillir une nouvelle population. terprétation et de sensibilisa- d’un tel chantier? Cette initiati- Ces constructions qui n’obéis- tion autour du patrimoine et du ve doit être porteuse d’un projet sent à aucune règle d’implanta- paysage. de dynamisation territoriale, et tion cohérente avec le territoire, Cependant, ces intentions non-seulement d’une valorisa- sont de plus architecturalement louables ne sont pas soutenues tion touristique et patrimoniale en désaccord avec le paysage par un projet de développement de l’espace. environnant. D’autre part, la territorial, qui justifi erait mieux commune de Sainte-Margue- les fonds à débloquer pour les

95 ORIENTATIONS PROPOSÉES DE DÉVELOPPEMENT DE LA VALLÉE

96 Les constats issus de l’analyse les accols. On admet que certaines plaquette. Cet habitat écologique révèlent une situation fi gée par surfaces aujourd’hui privées et à devrait permettre d’accueillir une la bipolarité de la vallée et par l’abandon pourront être acquises nouvelle population, à des coûts l’absence de coopération entre par les communes, grâce au droit raisonnables. Les terrains ainsi les deux parties. L’ambition du de préemption dont elles bénéfi - déboisés autour des hameaux, projet proposé est une initia- cient. Le bois issu du nettoyage puis maintenus ouverts par tive concertée entre les deux de ces terrains est transformé en le pâturage de caprins, pour- communes, un PROJET POUR LA bois de chauffage (plaquette) et raient être mis à disposition des VALLEE DE LA BORNE. En effet, représente le début de l’exploi- nouveaux habitants ne disposant seule une telle démarche permet- tation de la fi lière bois-énergie pas de terres, selon le principe trait d’instaurer un dynamisme à dans la vallée, génératrice des jardins familiaux. Ainsi, la cet espace qui ne peut fonction- d’emplois et d’activités écono- réhabilitation des canaux serait- ner de manière unilatérale. La miques. En effet, la construction elle justifi ée par le besoin d’ir- vallée constitue une entité, non- de nouveaux lotissements en rigation de parcelles jardinées. seulement paysagère, mais aussi bois intégrant les données envi- De même, la création d’un en matière développement. ronnementales dans la qualité de sentier d’interprétation n’est construction, ainsi que respec- pas à exclure, mais peut-être Les terrains communaux situés tant une logique d’implantation, pourrait-il franchir la Borne afi n à proximité directe des hameaux sera secondée par la mise en de donner à voir la vallée depuis sont déboisés afi n de réhabiliter place d’une chaufferie au bois- les deux versants...

Un projet générateur de nouveaux paysages, par l’exploitation de la forêt: réouverture totale de l’espace à proximité directe des hameaux, et mise en place d’un cycle de régénération des boise- ments dans la vallée.

Un projet de paysage social, gé- nérateur d’emplois, invitant une population nouvelle à s’installer dans la vallée, instaurant une dynamique de développement territorial cohérent.

Un projet de restructuration de centre urbain, par l’implantation de nouveaux lotissements, et la création d’espaces conviviaux.

97 SCHEMA DIRECTEUR

LA CONFLUENCE le centre névralgique de la vallée

Restructuration des centres urbains de Sainte-Marguerite et de Pied-de-Borne

Traitement paysager de la centrale hydro- électrique

Reconversion de la friche industrielle de la Rouvière en lieu de stockage du bois de chauffage de la vallée

REHABILITATION DU LINEAIRE DE CANAUX D’IRRIGATION à des fi ns agricoles

EXPLOITATION ET GESTION FORESTIÈRE (cf. page de droite)

Le schéma directeur cible le lieu d’in- tervention du projet, à savoir le centre de la vallée, au niveau de la confl uen- ce. Cet espace est le point de départ d’un projet qui doit à long terme s’appliquer aux différents hameaux de la vallée de la Borne. Les zonages vert, jaune et bleu désignent le potentiel en bois de la vallée et des chams (voir ci-contre).

0 500 m 1500 m N 98 1 1 1

2 2 2

3 3 3

Ouverture des clairières à Mise en place d’un cycle de régé- Gestion de la forêt sur les chams: proximité des villages : nération de la forêt :

Des coupes rases sont effectuées sur les Des éclaircissements dans la vallée de la Les bois de conifères subissent un éclaircis- parcelles situées à proximité directe des Borne sont effectués à proximité des routes sement, qui permet à des feuillus de s’im- villages et hameaux. La mise en place de et autres voies d’accès où le débardage est miscer et d’augmenter la biodiversité. Le pâturages de caprins permet de défricher possible (boisements de chênes verts et bois coupé est facilement débardé par les ces terrains, afi n de réhabiliter les accols en pubescents, taillis de châtaigniers...), afi n nombreuses pistes forestières du plateau, cultures et jardins. De plus, cette ouverture de mettre en place un cycle de régénéra- et alimente le stock de bois-plaquette de la du paysage maintient les broussailles à tion naturel de la forêt. Rouvière. distance des habitations, minimisant les risques d’incendie.

99 100 Image conceptuelle (présentée lors du pré-jury de TFE, le 13 février 2007)

101 VERS UN PROJET RÉALISTE, À LA RENCONTRE DES ACTEURS LOCAUX

La rencontre de certains acteurs locaux impliqués dans divers domaines tels que le bois-énergie et construction, des agriculteurs ou encore des personnalités di- rectement concernées par la vallée de la Borne, m’a permis d’approfondir le projet. Les pages qui suivent présentent les diffé- rents sujets qui entrent en jeu dans le projet de paysage, ainsi qu’une approche de la faisabilité de celui-ci.

102 LA FILIÈRE BOIS-ÉNERGIE

Ces termes désignent l’exploi- tation locale de la ressource en bois, à des fi ns de production d’énergie, et particulièrement destiné à l’alimentation d’un réseau de chauffage. Le bois comme source d’énergie est une ressource d’avenir en al- ternative aux énergies fossiles. Il constitue une solution pour chauffer les bâtiments collectifs et les habitations, en appoint des énergies fossiles (fi oul, gaz), ou d’emplois, (l’exploitation du bois L’impact écologique de la fi lière pour produire de l’électricité (co- induit trois fois plus d’emplois bois-énergie porte sur l’émis- génération). que l’utilisation du fi oul ou du sion de gaz brûlés et le devenir gaz), ainsi que par une gestion des cendres. A la différence des La consommation de bois-énergie de la ressource. énergies fossiles, le bois-énergie en France est de 40 millions de ne fait que recycler dans l’at- m3/an, soit 9 millions de tep/an Le bois sous toutes ses formes, mosphère le CO2 absorbé par les (tonnes équivalent pétrole), ou peut être valorisé : bûches, restes forêts. De plus, il n’émet pas de encore 4% des besoins énergé- de travaux sylvicoles et agricoles soufre. (Sources: ADEME) tiques français, ce qui est peu, (sciures), emballages perdus lorsqu’on sait que seul 18% de (caissettes, palettes)... Si la fi lière l’accroissement annuel de la forêt bois-énergie joue un rôle dans la La proposition de création d’une française est exploité. Le bois est lutte contre l’effet de serre, elle fi lière bois-énergie à l’échelle de donc une ressource renouvela- permet également de valoriser la vallée de la Borne nécessite, ble qui n’est pas suffi samment les sous-produits de la fi lière pour être justifi able, une étude exploitée. La mise en place d’une bois et d’avoir un impact positif du potentiel en bois, de la fai- fi lière d’approvisionnement local sur les opérations de gestion de sabilité (débardage du bois, ac- se traduit par des retombées l’espace, jusqu’à présent souvent cessibilité...) et du réalisme de économiques sur le territoire qui dévalorisées telles que l’entre- la proposition de création de en bénéfi cie, à savoir la création tien des forêts. chaufferies collectives.

103 Carte du couvert forestier sur le site Source: IFN (Inventaire Forestier National) Futaies de conifères

Futaies de feuillus

Taillis et bois ouverts

Landes

0 1 2 3 km N

à 20% d’Epicéas. Elle se situe sur En plus d’un effet bénéfi que la Cham du Roure, et constitue pour les sols, la ré-introduction un potentiel en bois-énergie de feuillus permettrait d’ac- D’après les données de l’IFN (In- considérable, l’accessibilité étant croître la diversité, et donc la ventaire Forestier National), la permise par de nombreuses richesse de ce bois. La gestion de commune de Sainte-Marguerite- pistes forestières. Ces boisements cette forêt sectionnale, bien que Lafi gère possède sur son terri- monospécifi ques présentent une n’étant sous l’infl uence d’aucune toire un potentiel de 19 ha de faible biodiversité, et sont géné- démarche environnementale, garrigue boisée de feuillus indif- rateurs de paysages monotones. doit prendre exemple sur le férenciés, 420 ha de boisements De l’exploitation de cette forêt périmètre Natura 2000 de la morcelés de châtaigniers et 177 peut résulter une ré-ouverture Cham de Montselgues, qui vise ha de taillis de chêne vert. Pied- des narses (zones humides et à réhabiliter les tourbières en de-Borne compte pour sa part tourbières) aujourd’hui drainées créant des corridors faunistiques 615 ha de boisements morcelés à des fi ns sylvicoles. Les sols et fl oristiques, au détriment des de châtaigniers, 217 ha de boi- pauvres et acides sont victimes bois de conifères dont l’impact sements lâches de feuillus, et de la décomposition des aiguilles écologique est aussi négatif pour une forêt sectionnale de 102 ha des résineux. Avant un épui- les ressources en eau potable de de résineux. Gérée par l’ONF, la sement de ses capacités, il faut la vallée de la Borne. forêt de Saint-Jean-Chazorne est réagir en changeant de politique composée à 40% de Pin laricio de d’exploitation sylvicole. Corse, à 30% de Pin sylvestre et

104 Proposition de reconversion de la friche industrielle de la Rouvière Les anciens bâtiments industriels situés le long de la route des Vans sont transformés en lieu de déchiquetage et de stockage du bois de résultant de l’exploitation forestière de la vallée.

Une première rencontre m’a filière permet de poser les bases La CUMA (Coopérative d’Utilisa- guidé à Aubenas, discuter avec d’une gestion raisonnée du terri- tion du Matériel agricole) permet un interlocuteur de Pôle-Energie, toire et de la forêt notamment. de se fournir en engins provisoi- association financée par le dé- Cette filière nécessite, pour rement, avant l’acquisition défi- partement, la région et l’ADEME être mise en place, l’achat de nitive du matériel nécessaire à la (Agence de l’Environnement matériel agricole et une organi- mise en place de la filière. et de la Maîtrise de l’Energie) sation spatiale adaptée. Un petit dont elle constitue une antenne broyeur (5 à 10 m3/heure) re- D’autre part, l’intérêt de la mise locale. morquable grâce à un tracteur, en place d’un projet bois-énergie La création d’une filière locale permet d’assurer un déchique- réside dans le ratio entre la semble être bénéfique aux ter- tage du bois en plaquette fores- puissance calorifique émise par ritoires victimes de la déprise tière calibrée (30x20x10 mm), une chaufferie bois et le linéaire agricole, et donc très boisés. prête à l’emploi après 3 à 6 du réseau de chaleur. Ainsi, les D’une part, le production d’une mois de sèchage selon la saison. bâtiments à chauffer doivent énergie locale propre valorise D’où la nécessité d’aménager un être à proximité de la chauffe- grandement ces espaces en re- lieu de stockage, tel qu’un petit rie; cette donnée impose donc conversion agricole, d’autre part, hangar devant lequel on aura un modèle ‘urbain’ particulier, les retombées économiques ne prévu la place nécessaire aux privilégiant la proximité du bâti sont pas négligeables (création camions de transport, tracteurs afin d’éviter au maximum les d’emplois). Troisièmement, cette et autres engins de manoeuvrer. pertes d’énergie. La consom-

105 Le débardage du bois abattu Les fûts sont acheminés par ...jusqu’au lieu de séchage est effectué au câble si les un camion muni d’un grap- où, une fois déchiquetés, les conditions d’accès le per- pin de chargement... copeaux sont entreposés à mettent. l’abri.

Déversés dans une trappe, Celle-ci alimente un réseau Puis après plusieurs mois de puis dans le silo de stockage, de chaleur d’eau à 80° envi- séchage, le bois-plaquette les copeaux sont acheminés ron, dont les pertes sont li- est livré à la chaufferie. au fur et à mesure jusqu’à mitées par la proximité des une chaudière. bâtiments.

mation d’une chaufferie cor- Le SDE (Syndicat des énergies de La visite suivante me guide chez respond à 2m3 de bois par kW l’Ardèche) est un opérateur et in- Maurice Belval, à Sallefermouse, de puissance installée (1m3 de vestisseur dans l’énergie-bois; il sur la commune de . Cet bois-plaquette pèse environ 330 accompagne les communes dans ancien apiculteur est l’instiga- kg). Celle-ci se constitue d’un la mise en place de cette fi lière. teur d’un projet d’exploitation bâtiment de 25 m2 de surface forestière et de chaufferie col- et de 2m70 de haut, et d’un silo lective. Ainsi a-t-il mis en place d’une surface carrée de 25 m2 une association syndicale fo- environ, soit une surface totale restière, regroupant aujourd’hui de 50 à 60 m2. 17 propriétaires sur 150 ha, sillonnés par 8 km de chemins Un projet bois-énergie est d’exploitation. Les boisements, rentable dès 8 ans, comparati- majoritairement peuplés de vement à la mise en place d’un pins maritimes (présents en chauffage au fuel. abondance en Ardèche méridio- nale), sont soumis à des éclair- cies, respectant les cycles de ré- génération de la forêt. Une fois abattus, l’étape du débardage (sortie du bois de la forêt) est

106 Broyeur remorquable (5 m3/heure) Trappe d’alimentation du silo de la chauf- Bois-plaquette (30x20x10 mm) avec ferie, avec ‘vis sans fi n’ échelle

délicate. L’utilisation d’un treuil bustion. De nouveaux camions L’exploitation de la fi lière bois est la plus courante, mais ne transportent alors les plaquettes contribue à une ré-ouverture des peut s’effectuer qu’en présence vers les chaufferie individuel- paysages, mais doit faire l’objet de routes ou de pistes d’exploi- les et collectives des environs, d’une gestion raisonnée du tation. Certaines techniques al- où elles sont déversées dans les potentiel forestier. En effet, les ternatives sont envisagées dans silos par simple renversement de ressources en bois sont bien vite le cas de fortes pentes ou d’inac- la benne. limitées si l’on n’envisage que cessibilité. A la ferme de Miaille à des coupes rases sans se soucier Saint-Melany, un exploitant met L’implantation d’une chauffe- de la régénération de la forêt. actuellement en place une chauf- rie à bois doit respecter certains D’où la nécessité de délimiter des ferie dont le bois est débardé par critères. Il est ainsi judicieux périmètres d’exploitation totale des chevaux. Une fois sortis de d’exploiter la pente, les copeaux des boisements (à proximité la forêt, les fûts sont stockés en de bois étant déversés à l’amont des villages) et des zones où bord de route dans l’attente d’un dans une petite trappe, acheminés les éclaircies dans le couvert camion équipé d’un grappin de par une ‘vis sans fi n’ jusqu’au forestier libèrent une surface chargement, qui achemine les silo, où une nouvelle ‘vis sans suffi sante permettant aux arbres fûts jusqu’au lieu de déchique- fi n’ les conduit à la chaudière. de repousser, afi n d’instaurer un tage et de séchage des plaquet- cycle d’exploitation de la forêt à tes. Après 3 à 6 mois, le bois long terme. vert est sec et prêt pour la com-

107 ZONAGE DES VILLAGES DE SAINTE-MARGUERITE ET CORDES

Sainte-Marguerite, centre administratif

Cordes, hameau à fl anc de pente

jardins et vergers existant

espace d’implantation du lotissement

localisation des nouveaux jardins familiaux

création d’une nouvelle voie d’accès

REFLEXION SUR LA CONSTRUCTION N 0 10 20 30 m D’UN LOTISSEMENT

cimetière église

Canal du Travers Canal de la Rouvière mairie

Afi n d’accueillir une nouvelle population sur le territoire, il s’agit d’envisager la construc- tion de nouveaux logements. Pour éviter le mitage par l’étale- ment urbain, l’idée est d’insérer les nouvelles constructions entre les villages de Cordes et Sainte- Marguerite, permettant de tisser un nouveau lien entre-eux. De la réunion de ces hameaux résul- terait un nouvel ensemble bâti, dominé par le centre adminis- tratif composé de la mairie et de l’église, puis étendu vers le bas par ce nouveau lotissement qui viendrait jouxter les maisons de Cordes, mêlant des architectures plus composites.

108 HABITER DANS LA PENTE d’encourager les initiatives arti- la lumière en hiver. sanales ou artistiques, dans le La composition architecturale des but de dynamiser l’activité de ce La mise en place d’un système constructions s’articule autour de nouveau quartier. d’épuration autonome des eaux plusieurs modules agençables de usées (type lagunage) n’est différentes manières. L’habita- L’implantation de ces diffé- pas nécessaire, le lotissement tion, volume principal de 10x5m rents modules s’articule autour pouvant être raccordé au réseau respecte le gabarit des construc- d’une route existante élargie, d’évacuation des eaux jusqu’à tions traditionnelles, ainsi que le qui liera à terme les hameaux de la station d’épuration située au faîtage parallèle aux courbes de Sainte-Marguerite et Cordes. Les pied du barrage. niveau, et s’intègre dans la pente bâtiments se succèdent alterna- en s’appuyant sur les accols. Ce tivement de part et d’autre de dénivelé permet de composer cette route, afi n de respecter les avec des accès de plein-pied à vis-à-vis de chacune des habita- différents étages. tions. Ainsi se dessine une forme Puis un second module est accolé du bâti, où les constructions à l’habitation : il s’agit d’ateliers sont séparées par des surfaces d’artisans, mis à disposition des plantées de petits fruitiers, nouveaux habitants. La juxtapo- apportant ombre, fraîcheur et sition habitations/ateliers permet fruits l’été, et laissant traverser

109 Proposition de matériaux pour les nouvelles constructions: bois et granite constitueront les matériaux principaux des maisons, dont les toitures pourront être végétalisées.

La chaufferie située en amont du lotissement alimenterait un réseau de chaleur parcourant l’ensemble des nouvelles habita- tions ainsi que la mairie et les gîtes communaux à proximité. Celle-ci pourrait être intégrée à la pente par une toiture végé- talisée, abritant la chaudière et le silo de stockage livrable par bennage, depuis la trappe située en amont sur la chaussée.

110 de l’écorce. truction en bois. Ayant bâti lui- LA CONSTRUCTION EN BOIS En outre, la proximité de cette même sa maison avec les pins scierie située à la sortie de maritimes qui peuplaient son Villefort, sur la route de Pied- terrain (photographie ci-dessus), A la scierie du Mas Imbert, de-Borne, et les possibilités il a en projet la construction Richard Fantini et ses employés d’acheminement du bois jusqu’à d’un lotissement en bois, dont produisent du bois de construc- la confluence assurent pour le les maisons permettraient d’ac- tion, issu de boisements de châ- projet un approvisionnement en cueillir une population plus ou taigniers. Les commandes pro- bois de construction local. De moins permanente. Inspirées des viennent de toute la France, et même, les résidus et chutes issus constructions d’Europe du nord, même de Belgique. Cependant, de l’exploitation du bois de cons- les maisons en fûts encastrés et l’économie locale ne bénéficie truction pourraient alimenter à toiture végétalisée permettent que très peu de cette ressource. en combustible la filière bois- une isolation et une intégration En outre, la qualité des châtai- énergie. paysagère de qualité. gneraies de la vallée de la Borne n’est pas suffisante pour un ex- Une nouvelle escapade en ploitation en bois de construc- Ardèche méridionale me tion, car un grand nombre de mène à la ferme d’Abeau, chez spécimens sont atteint par la Emmanuel Ferrier, néo-rural maladie de l’encre ou le chancre faisant la promotion de la cons-

111 CANAUX ET JARDINS

Les canaux, comme nous l’avons un vecteur de développement Il semble nécessaire de donner vu précédemment, font l’objet territorial, s’ils sont exploités à quelques précisions sur les dif- d’une ‘protection rapprochée’ leur juste valeur. Cependant, le férents modèles de jardins par l’association ‘Bésaou et Pa- projet ne s’attardera pas à l’en- collectifs, afi n de distinguer trimoine’, dont les membres et semble du linéaire de canaux, notamment les jardins ouvriers autres bénévoles entretiennent long de plusieurs dizaines de des jardins communautaires. les berges. Le projet actuel- kilomètres, mais ciblera un lement mené par le PNR des espace précis d’intervention, à Les jardins ouvriers sont situés Monts d’Ardèche et le SIDET vise savoir les jardins familiaux mis sur des terrains appartenant le à obtenir des subventions dans en location suite à la réhabili- plus souvent à la commune ou l’objectif de pérenniser le fonc- tation des accols, à proximité à un industriel, en périphérie tionnement des canaux, et de directe des habitations. L’eau, des villes, divisés en plusieurs valoriser la vallée du point de acheminée par un réseau de parcelles individuelles de taille vue touristique, grâce à son pa- canaux secondaires jusqu’aux moyenne de 200m2. Cultivées en trimoine. différentes parcelles cultivées, potager familial, elles sont agré- L’idée du projet de paysage est constitue l’élément phare du mentées d’un abri individuel, la de réhabiliter les canaux non- projet. Ainsi, les aménagements tonnelle, réservée au rangement seulement dans une optique prendront en compte l’eau, qui des outils. Les mutations sociales de sauvegarde du patrimoine, restera apparente au fi l de ses d’après-guerre en fi rent des mais aussi car ils constituent écoulements entre les accols. jardins familiaux, n’étant plus

112 réservés exclusivement aux les jardins dont l’objectif est ouvriers. l’insertion sociale par l’activité Les jardins communautaires économique de personnes en ont une origine plus récente. situation d’exclusion (d’après Le terrain n’est pas divisé en Chioua J., 2006). parcelles individuelles, mais est cultivé de façon collective. Dans le cadre du projet de Il se distingue aussi des jardins création de jardins dans la familiaux par un caractère vallée de la Borne, on pourra urbain plus marqué, mais surtout envisager, en plus de la mise en par sa taille, souvent nettement place de parcelles individuelles, plus réduite, et beaucoup plus la création de jardins collectifs variable. Il permet de participer à l’image des jardins commu- à l’embellissement et à la sécu- nautaires, ayant pour objectif de risation de l’espace, ainsi que de renforcer les liens sociaux, ainsi créer de nouveaux espaces de que de créer un espace fédérateur sociabilité. pour les habitants de la vallée. On peut en outre citer les jardins pédagogiques, généralement destinés aux enfants, ainsi que

113 La placette du Chambon, espace à requalifi er

REQUALIFICATION DU CENTRE De plus, des préconisations de ‘URBAIN’ DE PIED-DE-BORNE développement urbain concer- neront l’ensemble du village Le village du Chambon, actuel du Chambon, afi n d’éviter de centre administratif et com- nouvelles extensions urbaines mercial de la vallée, manque irrespectueuses du site. de véritable espace convivial. Cependant, la placette autour de laquelle sont concentrés les commerces, la mairie et non- loin de là l’école de Pied-de- Borne semble être le lieu idéal de rencontre et d’échange des habitants de la vallée. Le projet s’attardera donc au dessin d’un espace fédérateur, convivial, lieu d’échange entre locaux et touristes.

114 ZONAGE DU VILLAGE DU CHAMBON

Le Chambon ‘plat’

Le Chambon de la pente Le Chambon à l’ombre

jardins et vergers

camping

école

espaces de loisir

placette à requalifi er

N 0 10 20 30 m

115 PAYSAGEPAYSAGE ET INTERPRETATIONINTERPRETATION

‘Le silence des Lauzes’ Sculpture de Christian Lapie- Saint Melany

L’interprétation du paysage et ‘Sur le Sentier des Lauzes’ est veloppement local, et l’on voit se du territoire désigne un mode une association basée dans la mettre en place dans la vallée de de communication pouvant vallée voisine de la Drobie, sur la Borne un sentier soutenu par le s’appuyer sur différents procédés la commune de Saint-Mélany. Il SIDET et l’association ‘Découvrir tels que l’illustration, le théâtre, s’agit d’un projet riche de sens, en Marchant’, qui s’oriente dans la poésie, la sculpture... Il s’agit qui s’appuie sur un circuit de cette direction. d’une excellente méthode pour randonnée, ponctué d’instal- Le projet du paysagiste est di- impliquer socialement la popu- lations artistiques sur 15 km. rectement concerné par cette lation locale dans le dévelop- Cette démarche pluridisciplinai- approche, dans la mesure où pement du territoire, et donne re propose de nouveaux usages, il induit une modifi cation du à voir le paysage sous un autre en ré-interprétant le patrimoine paysage visible. angle. lithique de la vallée de la Dorbie. Ce sentier doit être vécu Par exemple, la bande dessinée La participation des habitants, comme une lecture des diffé- introductrice du mémoire, brève d’artistes, de concepteurs et rentes strates qui constituent le présentation de l’histoire locale créateurs fait émerger des idées paysage d’aujourd’hui. Ainsi, illustrée, constitue un outil d’in- nouvelles de dynamisation du certains éléments ‘clés’ qui par- terprétation du territoire, et sera territoire, tout en éveillant la ticipent au décor de la vallée de exposée sur le site par le PNR curiosité de chacun. la Borne sont dignes d’être mis des Monts d’Ardèche, lors d’une Cette démarche d’interprétation en valeur, notamment les accols, prochaine rencontre en juin est un véritable moteur de dé- canaux, moulins, clèdes et autre 2007.

116 Proposition de couleurs pour la conduite forcée, révélant et affirmant la présence de ‘l’objet’ dans le paysage.

patrimoine lithique. Mais que de couleurs affirmées, qui penser de la centrale hydroélec- tranchent ou s’harmonisent avec trique, si difficilement acceptée le paysage environnant. par les usagers du site. Mettre en valeur ce qu’on tend aujourd’hui Le photomontage ci-contre à dissimuler, changer le regard présente une proposition d’af- des locaux et des touristes sur firmation du caractère indus- cet ‘objet’ omniprésent, situé triel de l’usine. Le rouge et le au coeur de la confluence, lieu blanc empruntent le vocabu- d’intervention du projet. Que laire graphique de la signaléti- donner à voir aux nouveaux que industrielle et ferroviaire. résidents qui viendront s’instal- L’opération étant renouvelable ler à Sainte-Marguerite et Pied- à souhait, d’autres couleurs, ou de-Borne? interventions artistiques sont L’idée est simple, mais change- envisageable. L’usine pourrait rait radicalement la perception alors être considérée comme un des usagers du site vis-à-vis de support d’expression artistique. l’ouvrage: il s’agit de peindre le bâtiment de la centrale et la conduite forcée qui le surplombe

117 UN PROJET DE GRAND PAYSAGE

L’esquisse de projet présentée s’agit pas d’avoir une démarche bilité, et une prise de conscience précédemment se décline donc passéiste sur le territoire, mais de leur rôle est nécessaire. en deux phases. Une première de prendre conscience de l’évolu- intervention, dont les effets sont tion du paysage, et de maintenir Les boisements de feuillus qui visibles à court terme, à savoir la le sauvage à distance du lieu de peuplent les versants de la vallée mise en place de nouvelles habi- vie des hommes. Cela d’une part (taillis de châtaigniers, bois de tations et de jardins, l’aménage- afin de minimiser les risques chênes...) seront exploités par des ment de la placette de Pied-de- d’incendie, d’autre part dans éclaircissements selon les condi- Borne... Un deuxième aspect du une optique de réhabilitation des tions d’accessibilité, permettant projet, l’exploitation de la filière accols à des fins agricoles. Troi- le débardage du bois. Les boise- bois-énergie, a une incidence sur sièmement parce que le sauvage ments de conifères des plateaux le paysage à long terme. suscite la peur. La forêt mysté- seront éclaircis afin de permettre rieuse (sylvus) est le lieu de l’ima- aux feuillus de s’immiscer dans La modification du paysage ginaire et des bêtes sauvages. les peuplements. De plus, les induite par l’exploitation de Les villages en sont séparés par anciennes narses seront complè- la forêt se traduit tout d’abord les jardins et cultures (hortus et tement déboisées de conifères, et par la volonté de réouverture de ager), qui ont reculé au profit les zones humides réhabilitées l’espace autour des villages. En du sauvage. Le maintien de ces dans une optique d’enrichisse- effet, ces lieux-témoins de l’acti- clairières ne peut se faire sans la ment des milieux écologiques. vité passée, sont maîtrisés, anth- participation des habitants. Le ropisés, et donc rassurant. Il ne paysage est sous leur responsa-

118 La photographie ci-contre présente l’am- biance d’une forêt de conifères plantée sur les chams. Les épicéas et autres résineux forment un rideau opaque et impénétra- ble, milieu sombre et à faible biodiversité. La strate herbacée est quasi-inexistante, et le sol jonché d’aiguilles et de bois mort ne permet pas aux espèces spontanées de coloniser le milieu.

On aperçoit sur ce cliché un boisement de pins ayant subi une éclaircie, sur un plateau lozérien non-loin de Rieutort- de-Randon. Ce type de gestion sylvicole permet de laisser pénétrer la lumière, et de favoriser la régénération de formations végétales diversifi ées.

Ce photo-montage réalisé à partir de la photographie précédente illustre la diver- sifi cation des espèces ligneuses permise par l’exploitation du bois et la réouverture du milieu à long terme.

AUJOURD’HUI

Photomontages présentant l’évolution des boisements à long-terme sur les chams. Les boisements monospécifi ques de résineux laissent la place à une forêt riche en espèces, ouverte au niveau des narses et exploitée pour le bois de chauffage.

2050

119 L’intention paysagère de réou- d’offrir aux nouveaux arrivants D’un nouvel usage du territoire verture des clairières autour des sur ce territoire une opportunité résulte un nouveau paysage. hameaux s’appuie sur l’instaura- de développer des exploitations Loin de l’idée de vouloir réhabili- tion d’une nouvelle dynamique agricoles. ter 80% des versants en cultures, agricole dans la vallée. En plus L’instauration d’une dynamique loin d’une démarche passéiste, des terres mises à disposition d’exploitation du territoire nostalgique de l’apogée démo- des néo-ruraux pour le jardinage s’appuie sur une démarche graphique et agricole du XIXème familial, l’objectif est de donner concertée entre les communes, siècle, le projet propose d’envi- l’opportunité à de nouveaux génératrice d’emplois : la mise sager le devenir de la vallée de agriculteurs de cultiver châtai- en place de la fi lière bois- la Borne autrement que par la gniers, fruitiers, ou encore d’ex- énergie. Cependant, les initia- transformation en une ‘vallée/ périmenter d’autres cultures sur tives personnelles doivent être résidence secondaire’, mais par ce territoire, telles que les kiwis encouragées. Les terres en friche une reconversion agricole du (déjà localement cultivés dans la accaparées puis restituées à des territoire. vallée de la Borne). agriculteurs afi n de maintenir le paysage entretenu, du moins En combinant la construction à proximité des hameaux, où la de logements sociaux et la ré- remise en état des accols cultiva- habilitation des terrasses cul- bles est possible. tivables, le projet a l’ambition

120 Exemple du hameau de Féreyrolles, ci- contre, état actuel, cerné par les boise- ments. Ci-dessous, état projeté, réouvertu- re de la clairière, mise en place de vergers et cultures sur les accols réhabilités.

121 Etat actuel et photomontage du hameau de Féreyrolles après réhabilitation des accols en cultures et pâturages.

122 123 ENEN GUISE GUISE DE CONCLUSION... DE CONCLUSION

Après avoir sillonné la région, rencontré ceux qui y vivent, réfl échi à son devenir, mon regard sur ce territoire a bien changé... Cet espace n’est plus seulement le lieu de l‘imaginaire à mes yeux, mais un territoire qui se relève doucement des suites de la déprise agricole dont il a été victime.

L’implication dans un projet de développement local à titre d’étu- diant paysagiste m’aura permis d’apporter un regard différent, une autre vision du développe- ment, et de ‘semer les graines’ d’une nouvelle dynamique pour la vallée de la Borne, qui porteront peut-être un jour leurs fruits...

124 EN GUISE DE CONCLUSION

125 BIBLIOGRAPHIEBIBLIOGRAPHIE OUVRAGES Paul Fabre Dictionnaire des noms de lieux des Cévennes Jean-François Blanc Editions Bonneton Paysages et paysans des terrasses de l’Ardèche 2000 1984 Edouard-André Martel Anne-Marie Brisebarre Les Cévennes et la région des causses (Lozère, Bergers des Cévennes Aveyron, Hérault, Gard, Ardèche) Espace des hommes Librairie Delagrave Berger-Levrault 1978 Jean-Robert Pitte Histoire du paysage français Xavier Browaeys, Paul Chatelain Tallandier Etudier une commune 1983 Paysages, territoires, populations, sociétés Armand Colin, Paris Pierre Rabhi 2005 Du Sahara au Cévennes Itinéraire d’un homme au service de la terre- Jean-Pierre Chabrol mère Le Crève-Cévenne Espaces Libres, Albin Michel France Loisirs 1983 1972 Paysage Jean-Paul Chassany Joachim Ritter Le Renouveau de la châtaigneraie cévenole -Fonction de l’esthétique dans la société Parc National des Cévennes moderne 2006 Pétrarque -L’ascension du mont Ventoux Maurice Chaudière Schiller Forêts fruitières -La promenade Collection Terre et Soleil Editions de l’imprimeur Editions du Dragon vert Jardins et paysages 1998 1997 Marianne Cohen François Terrasson La brousse et le berger La peur de la nature Une approche interdisciplinaire de l’embrous- Au plus profond de notre inconscient, les saillement des parcours vraies causes de la destruction de la nature Espaces & milieux Sang de la terre CNRS éditions 1988 126 2003 REVUES, CAHIERS, PUBLICATIONS...

Atlas du Parc National des Cévennes James Carter Les Cévennes Parc National L’esprit des lieux 2000 Programmer l’interprétation d’un territoire L’ATELIER technique des espaces naturels Cévennes cahiers techniques n°76 Revue du Parc National des Cévennes: 2005 -n°40 Les gens d’ici... -n°41/4/43 Pierre sur pierre (1989) Conduite de projet d’interprétation -n°50/51/52 Cévennes de toutes eaux (1994) Le patrimoine par le rêve et l’émotion Centre Régional de Ressources du Développement Rural Cahier de recommandations architecturales Rhône-Alpes Habiter dans la Cévenne Méridionale 2001 PNR des Monts d’Ardèche-CAUE de l’Ardèche 2005 Autour des friches Les Cahiers de l’Ecole de Blois n°4 Les paysages de terrasses : des millénaires ENSNP d’innovation 2006 Programme LEADER II - Volet C PNR des Monts d’Ardèche Les 7 familles de paysages en Rhône-Alpes 2004 Des paysages pluriels pour un territoire singulier Direction Régionale de l’Environnement Charte constitutive du Parc Naturel Régional Rhône-Alpes des Monts d’Ardèche (2000-2010) 2005 PNR des Monts d’Ardèche 2001 Premier aménagement forestier (1998-2012) Forêt sectionnale de saint-Jean-Chazorne Guide du développement éolien dans ONF les Monts d’Ardèche 1998 PNR des Monts d’Ardèche 2005 Fiche du site Natura 2000 FR8201660 Site d’Importance Communautaire (SIC) Yves Michelin (sous la direction de) du plateau de Montselgues Des paysages pour le développement local Ministère de l’écologie et du développement durable Expériences et recherches innovantes dans le 2005 Massif central ENITA Clermont-Ferrand, Tome 118, n° 571 2004

127 THÈSES, MÉMOIRES... CARTES, PLANS...

Martin Chénot Cartes topographiques IGN 1/25 000 Un plan Paysage pour la vallée de la Drobie, Ardèche Travail de Fin d’Etude - Ecole Nationale des PontsPonts et Chaussées n° 2838 OT 2001 Largentière La Bastide-Puylaurent Pascaline Boiron Vivarais Cévenol Projet de société et réinterprétation du paysage rural Vallée de la Drobie, Ardèche n° 2738 E Travail de Fin d’Etude - ENSP de Versailles La Bastide-Puylaurent 2005 n° 2739 OT Juliette Chioua Mont Lozère La mise en place de jardins collectifs dans les quartiers de la Florac politique de la ville - Mémoire 1ère année ParcParc National des Cévennes Master ‘Urbanisme et territoires’ Institut d’Urbanisme de Paris n° 2839 OT 2006 Bessèges-Les VansVans ValléeVallée du Chassezac Nicolas Jacob Les vallées en gorge dans la Cévenne vivaraise Thèse de géographie et aménagement UNIVERSITE PARIS IV – SORBONNE Cartes géologiques BRGM 1/50 000 : 2003 -Largentière -Alès Lionel Moliné Etude des techniques traditionnelles d’irrigation en Cévennes Pied-de-Borne (48)/Sainte-Marguerite-Lafi gère (07) Licence aménagement du territoire Cadastres: UNIVERSITE MONTPELLIER III - PAUL VALERY Mairies de Sainte-Marguerite-Lafi gère (07)(07) 1998 et Pied-de-Borne (48)

GUIDES Cadastres napoléoniens: Archives départementales d’Ardèched’Ardèche (Privas) Parc National des Cévennes Guide de Lozère et de Lozère (Mende) Guides Gaillimard Editions de la Source 1996 1991

Topo guide des circuits de randonnée Espace-Aventure des Gorges du Chassezac SIVU des gorges du Chassezac 1999

128 REMERCIEMENTS Je tiens à remercier Claire Dauviau, ma directrice de mémoire, et Sabine Bouché-Pillon pour leurs précieux conseils, ainsi que les autres membres de jury qui ont accepté de suivre cette étude. Mes remerciements s’adressent particulièrement à Gilles Bonnaud qui a su orienter et accompagner mes recherches, et à Jérome Damour pour son attention et son écoute tout au long de cette étude.

Je dois aussi beaucoup à ceux dont la fréquentation a contribué à enrichir ce travail :

Les ‘stagiaires’ (du PNR et du SIDET), avec qui j’ai partagé des discussions intéressantes et amicales, notamment Lise Robichon, Emmanuel Dréan et Thibault Roure.

Au hasard des rencontres, au Mas de Beaulieu chez ‘Terre et Humanisme’ à Lablachère, à Philippe Liégeois, ‘sur le Sentier des Lauzes’ à Saint-Mélany, à Agnès Hocquet de l’association ‘Bésaou et patrimoine’ pour sa visite guidée au fi l des canaux de Sainte-Marguerite.

Ma reconnaissance va aux maires des deux communes, qui ont répondu patiemment à mes questions: André Fournier (Sainte-Marguerite-Lafi gère) et Pierre Veysset (Pied-de-Borne).

Aux agriculteurs et autres habitants de la vallée rencontrés durant mes périples : George Roux, Daniel et Jean-Loup Noël, Roger Vanden-Abeele, aux employés communaux de Sainte-Marguerite et Pied-de-Borne dont le noms me sont restés inconnus.

A David Arnaud, chargé de mission SAGE du Syndicat Ardèche Claire (Vogüé, 07), pour ses informations sur la gestion de l’eau.

A M. Rouget d’Electricité de France, qui a accepté de me faire visiter la centrale hydro-électrique malgré les restrictions concernant l’accès du public.

A Mercédes Guevara, chargée de mission ‘Ardèche méridionale’ de la Chambre d’Agriculture d’Aubenas (07), pour cette discussion sur le renouveau de l’agriculture dans la vallée de la Borne.

A l’ONF et au CRPF d’Ardèche et de Lozère pour les discussions téléphoniques et les documents qu’ils m’ont transmis. A Richard Fantini de la scierie du Mas Imbert (Villefort, 48), et à Stéphane Bourrez de Pôle-Energie (Aubenas, 07) pour les renseignements concernant le bois-énergie. A Maurice Belval qui m’a fait visiter sa chaufferie à bois. Mes remerciements s’adressent aussi à Denis et Hind Bigliardi du ‘Petit Âne Bleu’, ainsi qu’à Emmanuel Ferrier, pour leur accueil chaleureux et l’échange enrichissant que nous avons eu.

Remerciements et félicitations à Grégoire Edouard pour son exposition photographique intitulée ‘Minerais argentique’ sur la friche industrielle de la Rouvière.

Mais aussi merci à mes parents de m’avoir permis de faire ces études, à ma famille, à mes amis, et à tous ceux que je n’ai pas cité, et à qui s’adresse ma reconnaissance...

129 130 Thomas Claudel Costelonge +33 (0) 6 24 43 31 96 [email protected] 07 590 Saint-Laurent-les-Bains +33 (0) 4 66 46 03 77

131 À la confl uence de trois rivières: la Borne, l’Altier et le Chassezac...

Cette région que l’on nomme le Vivarais cévenol est incluse entre le Mont Lozère au sud-ouest et le massif du Tanargue au nord, et s’ouvre en de multiples vallons sur la plaine calcaire d’Ardèche à l’Est. Cette enclave mêlant roches graniti- ques et schisteuses est entaillée de profondes gorges creusées par les torrents qui s’échappent vers la Méditerranée.

Ces montagnes ont connu leur apogée au milieu du XIXème siècle, où elles furent sculptées de terrasses par le peuple paysan qui les occupait. Cependant, l’arrivée du chemin de fer, deux guerres, l’attrait de la ville et de la modernité, ainsi qu’un certain nombre de fl éaux ayant décimé l’économie locale, ont contribué à dépeupler progressivement la région. L’exode rural massif et l’abandon des cultures ont permis à une végétation vigoureuse de reprendre ses droits, et d’ensevelir sous une épaisse forêt le patrimoine bâti à la force des bras des ancêtres. Le paysage y a subi ces cinquante dernières années une mutation brutale, suite à la déprise agricole.

Cependant, les vallées cévenoles connaissent un nouvel essor depuis les années 70, et l’implantation progressive de néo- ruraux, revendiquant ce cadre de vie exceptionnel. Quelques hameaux et villages résistent donc encore à l’envahisseur végétal, et tentent d’implanter une nouvelle société dans ces montagnes. C’est le cas des vallées directement tournées vers la plaine ardéchoise et la vallée du Rhône, et qui bénéfi cient des douceurs du climat méditerranéen (vallées de la Drobie, de la Thines...). Mais lorsqu’on s’enfonce dans les montagnes, le paysage témoigne, la forêt est omniprésente, les hameaux abandonnés, bien que quelques attractions touristiques permettent de maintenir une économie locale.

A la confl uence de trois rivières, la Borne, le Chassezac et l’Altier, se trouve un site insolite. Deux communes se partagent un chapelet de hameaux, éparpillés sur les fortes pentes, Pied-de-Borne et Sainte-Marguerite-Lafi gère. Le climat mé- diterranéen s’arrête là. Le chêne vert côtoie les châtaigniers, les dernières vignes sont installées sur les terrasses à l’adret.

Mais ce qui rend cette confl uence insolite est la présence d’un barrage de retenue d’eau, qui alimente une centrale hy- droélectrique située quelques kilomètres en contrebas. Ce sont les barrages de Laval d’Aurelle et de Villefort (situés en amont respectivement sur la Borne et l’Altier) qui alimentent la centrale de Pied-de-Borne, par le biais d’une conduite forcée qui sort subitement de la montagne au-dessus de cette commune. De cette centrale s’échappent une multitude de lignes haute et moyenne tension dans toutes les directions. Pylônes, conduites d’eau et barrages constituent autant d’éléments du paysage de cette confl uence. De plus, la présence d’une friche industrielle minière à l’aval du barrage augmente le caractère insolite du lieu. Il s’agit donc d’un site en quête de reconnaissance, partagé entre deux communes (Sainte-Marguerite et Pied-de-Borne), mais aussi entre deux départements (Ardèche et Lozère), donc entre deux régions (Rhône-Alpes et Languedoc-Roussillon). Une frontière administrative qui infl uence beaucoup l’évolution de chacune des communes, et augmente les disparités: tandis que Pied-de-Borne prospère grâce à l’usine EDF, Sainte Marguerite est composée de 80% de maisons secondaires. La petite commune ardéchoise regarde sur la rive d’en face se construire logements sociaux, terrains de sports, etc... De plus, la question de la réhabilitation de béalières (canaux d’irrigation) est actuellement soulevée. Quelle orientation donner au développement de chacune de ces communes ? Quel avenir pour le paysage de cette confl uence ? Quelle identité pour ce site dans son intégralité ?

Ecole nationale supérieure 9 rue de la Chocolaterie tél. +33 (0) 2 54 78 37 00 [email protected] de la nature et du paysage 41000 Blois fax +33 (0) 2 54 78 40 70 www.ensnp.fr

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