Université Paris 1 – Panthéon-Sorbonne UFR 09 Master Histoire des sociétés occidentales contemporaines Centre d’Histoire Sociale du XXe siècle Faire l’histoire de la banlieue parisienne : politiques de la mémoire et du patrimoine à Athis-Mons, 1959-2001 Mémoire de Master 2 Recherche 2019-2020 Présenté par Romane Carballo Sous la direction de Charlotte Vorms et Emmanuel Bellanger En couverture : l’affiche de l’exposition « J’ai la mémoire qui planche, le Noyer Renard 1958-1991 », 1991, collection Maison de Banlieue et de l’Architecture. 2 Remerciements Je souhaiterais remercier plusieurs personnes qui m’ont aidée dans la rédaction de ce mémoire : Charlotte Vorms et Emmanuel Bellanger pour leur encadrement de qualité et leurs conseils durant ces deux ans d’études, Les personnes en charge des archives des Portes de l’Essonne et de la Maison de Banlieue, qui ont eu la patience de répondre à mes (nombreuses) demandes, Marie-Claire Roux et François Petit, respectivement présidente et directeur-fondateur de la Maison de Banlieue et de l’Architecture, qui ont bien voulu répondre à mes questions, Les personnes qui ont lu ou relu ce mémoire et m’ont épaulée durant cette période particulière : Gilles Lefèvre, Axelle, Lucie et Florence Carballo. 3 TABLE DES MATIERES REMERCIEMENTS 3 TABLE DES MATIERES 4 INTRODUCTION 6 PARTIE 1 : L’EMERGENCE D’UN INTERET POUR L’HISTOIRE LOCALE A L’EPREUVE DES ALTERNANCES POLITIQUES : 1959 - 1989 22 CHAPITRE 1 : D’une municipalité à l’autre : ruptures et continuités (1959-1977) 23 1.1 Les élections de 1977 : inventaire des forces en présence. 23 1.2 Cadre de vie et démocratie locale : le programme de l'union de la gauche 28 1.3 La politique culturelle de la ville : de la municipalisation à l'autogestion ? 37 CHAPITRE 2 : Le projet « Naissance d’une vie de Banlieue » : ententes et mésententes avec la municipalité (1977-1983) 46 2.1 L’exposition de 1979 : une initiative associative rendue possible par la municipalité. 46 2.3 Quelle emprise du politique sur les productions ? 63 2.3 Après l’exposition : une association très ambitieuse face à une municipalité troublée 79 CHAPITRE 3 : Le retour de la droite à la mairie, fin de l'intérêt pour l’histoire de la commune ? (1983-89) 100 3.1 Une transition difficile entre deux camps opposés 100 3.2 La fin du sursis d'Athis-Animation et les nouvelles priorités de la municipalité 109 3.3 Redéfinir l'identité communale : valorisation de nouveaux thèmes et marketing territorial 117 PARTIE 2 : L’EXPOSITION « J’AI LA MEMOIRE QUI PLANCHE » : FAIRE L’HISTOIRE D’UN GRAND ENSEMBLE DANS LES ANNEES 1990 128 CHAPITRE 4 : Faire participer les habitants à la vie culturelle : l’exposition dans le contexte des alternances politiques 130 4.1 : Les municipales de 1989 : une campagne symbolique autour de l'héritage de la municipalité d'union de la gauche. 130 4.2 D’Athis-Animation au Centre Culturel : un retour à la situation des années 1970 ? 136 CHAPITRE 5 : Revaloriser le quartier du Noyer Renard : l'exposition dans le contexte de la politique de la ville 143 5.1 Genèse de l'implantation de la procédure du Développement Social des Quartiers 143 5.2 « Le quartier n'est pas un ghetto » : portrait du Noyer Renard selon la procédure DSQ 148 5.3 Des acteurs multiples aux motivations plurielles : les buts de l'exposition 157 CHAPITRE 6 : Une question d’image, une question sociale, une question historique : analyse du processus de mise en forme et du contenu de l'exposition 167 6.1 : Les recherches pour l’exposition : un processus favorisé par divers réseaux 167 6.2 : Entre histoire et vie sociale : une image consensuelle du quartier 178 6.3 : Au-delà de l'exposition : conséquences et objectifs connexes 189 4 PARTIE 3 : VERS LA MAISON DE BANLIEUE ET DE L’ARCHITECTURE : MEMOIRES ET PROJETS 1992-2001 200 CHAPITRE 7 : Dépasser l’exposition : diversification des projets historiques (1992-1997) 201 7.1 « Du cabanon au pavillon » : consécration ou stagnation d’une méthode de recherche ? 201 7.2 Les errements de l'attitude municipale : soutien distant et concurrences internes (1992-1996) 229 7.3 L’histoire comme remède à la crise ? Mutations et permanence des usages du passé à l’aune de la crise de banlieues 245 CHAPITRE 8 : La « Maison de Banlieue » entre histoire, architecture et pédagogie (1997- 2001) 270 8.1 La création d'un département Maison de Banlieue au sein du Centre Culturel 270 8.2 “mémoires et projets” la Maison de Banlieue à la recherche d’une identité 1999-2001 289 8.3 2001, la prise d’indépendance de l’association : épilogue 304 CONCLUSION 322 ÉTAT DES SOURCES 328 BIBLIOGRAPHIE 334 ANNEXES 342 5 INTRODUCTION « Le cadre actuel n'a à première vue rien d'extraordinaire (sur les plans naturels ou historiques), son originalité provient plutôt de la variété des traces et des couches encore lisibles de l'occupation des hommes sur un coin d'espace donné. Diversité, handicap ou chance ? Prenons le parti de la chance offerte par cette diversité comme un capital local, un patrimoine justement, qu'il semble nécessaire à la fois d'entretenir, cultiver, découvrir : Athis-Mons pourrait être à sa manière un conservatoire de vie de banlieue. » (François Petit, Projet « Maison de l’Environnement de Banlieue », septembre 19911) Cette déclaration de François Petit, fondateur de la Maison de Banlieue et d’Architecture d’Athis- Mons est en elle-même tout un programme. Elle résume l'attitude des producteurs de l'histoire locale à Athis-Mons depuis les années 1970, qui est de replacer l'histoire de leur ville dans celle du développement de la banlieue parisienne, et annonce la démarche de la Maison de Banlieue (fondée en 1999) : valoriser tous les aspects (urbanistiques, sociaux, naturels) de cette banlieue parfois tant décriée. « Banlieue » et « Patrimoine » (ou même « Histoire ») sont des termes qui ont parfois paru antinomiques mais dont le rapprochement est aujourd'hui bien entamé : en 2008 une quarantaine de grands ensembles d’Île-de-France avait reçu le label « Patrimoine du XXe siècle », et les historiens s'intéressent à la banlieue depuis les années 80. Cependant le processus de légitimation d'une histoire de la banlieue et d'un patrimoine de banlieue s'est effectué graduellement, au niveau national comme au niveau local qui est celui qui va nous intéresser au cours de cette étude. À Athis- Mons, divers acteurs vont participer à ce processus sur plusieurs années. Ils viennent d’horizons très différents : des études rurales et des bulletins des sociétés d’histoire locale, de l’ethnologie régionale, de la sociologie, de la politique de la ville... ils sont simples habitants, jeune agrégé d'histoire, enseignants, maire, chef d’équipe de quartier DSQ, animateur jeune public… Alors même que leurs entreprises historiques respectives sont parfois séparées par des décennies entières, on y retrouve le même modus operandi : allier recherche en archives et matériel fourni par les habitants (entretiens, photos de familles, cartes postales) pour faire l’histoire de leur ville. Au centre de cette production se trouve la relation entre les municipalités successives et l’association Athis-Animation, à laquelle les différents acteurs sont plus ou moins liés. De l'exposition à la publication à la création d'une structure servant à la fois de centre de ressources sur la banlieue, de centre de recherche et de structure de sensibilisation du public à son environnement, ce qui apparaît c'est bien l'idée d'une légitimation progressive de l’histoire de la banlieue. Cette légitimation ne se fait pas sans à-coups, périodes d'arrêt, retours en arrière, mais se fait surtout grâce à une certaine forme de participation des habitants, ce qui donne à l'entreprise un but identitaire et populaire. Le terme « banlieue » a fait couler beaucoup d'encre, tant il peut renvoyer à des réalités différentes. 1Archives Intercommunales - AM243WP1 : Projet « Maison de l’Environnement de Banlieue » décembre 1991 6 Ainsi selon Hervé Vieillard Baron le mot « recouvre cinq notions dont certaines peuvent se recouper : une notion juridique se rapportant au droit féodal [le terme « ban » signifie la juridiction d'un seigneur sur un territoire donné], une notion géographique, celle de ceinture urbanisée dépendante du centre, une notion sociologique permettant de rendre compte de l'exclusion qui touche les habitants des marges urbaines, une notion culturelle qui fait référence aux pratiques festives qui sont nées sur ce territoire [...], une notion symbolique enfin pour exprimer le discrédit qui pèserait sur une partie des populations périphériques. » Il ajoute également que la banlieue, malgré ses dimensions multiples est « considérée comme un sujet d'opinion avant d'être analysée comme un objet scientifique »2. La réalité administrative ou géographique de la banlieue n'est en effet pas celle qui a le plus d'impact sur la perception que la population en a ou sur l'usage du terme. Selon Alain Faure le terme est surtout utilisé jusqu’en 1850 pour désigner la campagne, les communes rurales devenues des lieux de tourisme et de villégiature pour les Parisiens3. Malgré le développement de l’industrie dans la boucle de la Seine, l’image champêtre perdure et cohabite avec l'image d’une banlieue plus industrielle jusque dans les années 1920 où les succès communistes aux législatives de 1924 et aux municipales de 1925 vont transformer la « banlieue » en lieu dangereux, en « ceinture rouge » menaçant Paris. Le terme « banlieue rouge » se répand alors et est même récupéré par les intéressés : plusieurs journaux communistes de banlieue portent ce nom dans les années 20. Après-guerre, le terme banlieue perd sa spécificité parisienne pour désigner les zones entourant les grandes villes où industries, lotissements défectueux, HBM, maisons bourgeoises et centres villageois cohabitent de façon disgracieuse, une fragmentation aggravée par la construction de grands ensembles à partir des années 504.
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