L'art Et La Démocratie : Les Écoles, Les Théâtres, Les Manufactures, Les Musées, Les Monuments / Ch.-M

L'art Et La Démocratie : Les Écoles, Les Théâtres, Les Manufactures, Les Musées, Les Monuments / Ch.-M

L'art et la démocratie : les écoles, les théâtres, les manufactures, les musées, les monuments / Ch.-M. Couyba Source gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France Couÿba, Charles-Maurice (1866-1931). Auteur du texte. L'art et la démocratie : les écoles, les théâtres, les manufactures, les musées, les monuments / Ch.-M. Couyba. 1902. 1/ Les contenus accessibles sur le site Gallica sont pour la plupart des reproductions numériques d'oeuvres tombées dans le domaine public provenant des collections de la BnF. 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COUYBA L'ART ¡.- HTfr .a 1 1 11 .1;, J.(ri~iyiÉlES^ECOLES – LES THÉATRES LES MANUFACTURES LES MUSÉES LES MONUMENTS PARIS E H N Ë S T F L A. M M A. Il I 0 N M D l T E U K ^0, RUE RACINE, l'RKS l'ODÉON Droits de traduction et de reproduction réservés pour tous les pays, y compris la Suodo cl la Norvège. A x^/y$0ri bourgeois ANCIE N MINISTRE DES BEAUX-ARTS respectueux hommage. C.-M. C. L'A RT ET LA DÉMOCRATIE AVANT-PROPOS L'Art et l'État. S'il est une vérité constante, proclamée dans tous les temps et dans tous les pays, c'est que l'homme ne se nourrit pas seulement de pain mais qu'il porte en lui un invincible besoin d'idéal et de beauté. Aussi dès les premiers âges de l'humanité les pasteurs de peuples furent-ils en même temps des pasteurs d'âmes, et c'est une loi de l'histoire que les nations ne furentinfluentes qu'à proportion de leur civilisation et de leur e'iort artistique. Les philosophies et les religions les plus nobles n'ont point séparé le culte du bien du culte du beau, et nulle barbarie n'effacera ja- mais la vérité lumineuse de la prière de Renan sur l'Acropole, non plus que la beauté marmo- réenne des vers de Théophile G-autier: Tout passe. L'art robuste Suffit à la cité. Le buste Seul a l'éternité. La France, parmi les nations modernes, comme la Grèce dans l'antiquité, doit, sinon la plus grande, du moins la meilleure part de sa gloire au rayonnement de son génie artistique; et l'Expo- sition universelle a prouvé au monde que la dé- mocratie française, comme jadis la démocratie athénienne, demeure le foyer de beauté auquel doivent venir se réchauffer et s'éclairer les mo- narchies et les empires qui avaient désappris le chemin de Paris. Et pourtant, si l'on considère les encouragementsfinanciers que l'Etat, sous le nom de budget, dispense chaque année à l'art et aux artistes, on est obligé de reconnaître que propor- tionnellement au nombre et à la valeur des efforts individuels, ce service est l'un des moins bien rétribués de l'Europe. Quinze millions pour l'art sur un budget de trois milliards et demi, on conviendra que c'est s'offrir à bon compte la gloire et l'immor- talité. Mais la loi de fer imposée au monde mo- derne et à la France par le militarisme universel veut que les armes passent ivant les arts et la poignée des sabres n'a même plus la gloire des ciselures. Les dagues de Lalique ne servent qu'aux vitrines, et l'Etat, s'il les achète, ne les paye plus au poids de l'cr, parce que la munifi- cence officielle destine l'or à d'autres usages. C'est la loi. Dura lex. 11 faut que l'art se résigne à vivre avec elle, et à prospérer un peu par elle, beaucoup en dehors d'elle, en attendant l'aurore de jours meilleurs. Examinons donc comment se pose et doit se ré- soudre, à notre estime, cette question toujours actuelle des rapports de l'art et de l'Etat. Sous l'ondoyante diversité des écoles artis- tiques et des systèmes politiques, dans notre dé- mocratie, il semble' bien qu'on peut distinguer trois façons générales de comprendre les rapports de l'art et de l'Etat. Il y a, d'une part, les artistes purs et intransigeants, ceux qui ne veulent à aucun prix de l'ingérence de l'Etat dans le do- maine de l'art, ceux qui proclament l'art libre dans l'Etat libre, et qui disent avec les Goncourt et le Chassagnol de Manette Salomon « Nous ne voulons plus être renfermés dans un pensionnat, sous la discipline et la férule d'un pion du Beau patenté par l'Institut. Nous ne voulons plus de cette vie d'employé peintre, de cette existence qui tient de la communauté, du collège et du bu- reau, de cette claustration et de cette régularité monacale, de cette cuisine bourgeoise, nous ne voulons plus de pension 1» Ceux-là sont les libertaires de l'art. Ils n'ad- mettent ni ne comprennent qu'il y ait un contrôle et un budget de l'Etat. On rencontre parmi ces esprits originaux, ardents et fiers, les aristocrates, ceux qui se passent des commandes officielles, parce que leur fortune leur permet de distribuer ou d'accepter des commandes particulières, et les prolétaires, ceux qui croient, envers et contre tous, à la force expansive de leur génie ou de leur talent. Ce serait là évidemment l'idéal si tous les riches étaient ^intelligents Mécènes et s'il n'y avait, au bout de cette superbe indépendance des artistes, la pauvreté, l'abandon, la misère et la mort. C'est l'école des individualistes. L'arl libre dans l'Etat libre. A l'opposite se dresse l'école communiste. L'art collectif dans l'Etat souverain. L'Etat dé- tenteur de toute la fortune publique aura le mo- nopole de la production, de l'instruction et de la protection artistiques. « Chaque artiste, disent les théoriciens de cette école, recevra le degré d'instruction que comporte son intelligence. L'Etat ne laissera perdre aucun de ces grands esprits inconnus qui actuellement s'atrophient dans l'ignorance et laissent la société privée des services qu'ils pourraient lui rendre. On opérera un véritable drainage des capacités et des apti- tudes et toutes seront utilisées selon leur degré de valeur. L'enfant artiste, quittant^vers quinze ans l'école communale, entrera à l'école profes- sionnelle d'où il sortira avec une profession ar- tistique assurée. Tous les musées, palais et tré- sors d'art appartiennent à la nation. » Celle école, séduisante à coup sûr, suppose toute une révolution sociale. Elle implique en outre, comme le remarque Taine dans son ad- mirable étude sur l'association, ce postulat né- cessaire « l'Etat est un être d'une espèce supé- rieure, siège unique de l'intelligence d'une na- tion. En lui seul résident la raison, la connais- sance des principes, le calcul et la prévision des conséquences.

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