Avertissement L’informatique nous permet désormais plus de liberté pour lire et diffuser les oeuvres. l’auteur et le lecteur peuvent ainsi entrer directement en contact. L’œuvre devient facilement diffusable pour l’un et accessible pour l’autre. Mais cet avantage comporte aussi le risque d’une reproduction anarchique. Il suppose donc confiance et esprit d’éthique : l’auteur part du principe que les lecteurs sont honnêtes et utiliseront ce livre en fichier numérique comme ils le feraient d’une œuvre acquise sur un autre support. L’auteure n’autorise en aucun cas de faire la moindre exploitation commerciale de ce livre sans son accord, ni de le reproduire sous quelle forme que ce soit. L’auteure n’autorise pas non plus de l’adapter. Ce texte, sous toutes ses formes de publication, reste la propriété intellectuelle de l’auteure (et de ses ayant droits, après lui, conformément à la loi française) qui n’autorise pas une autre reproduction. Les lecteurs ne peuvent en donner que des citations courtes (moins de dix lignes) en précisant le nom de l’auteur, le titre et le site où télécharger ce livre en fichier numérique. Les citations longues (plus de dix lignes du texte tel qu’il est imprimé) doivent se faire uniquement avec l’accord de l’auteure. En aucun cas elles ne peuvent être transformées. C’est la condition pour que les auteurs continuent à créer des œuvres originales et que nous profitions tous de la liberté que nous ouvre internet. Bonne lecture. (Annie Massy, Chaumont, le 9 février 2014) 4 Prologue de l’auteure Etrange destin du livre que que allez lire. Au départ, il s’agit d’une thèse de doctorat soutenue en 1984 à l’université de Lille… Mais dans une matière d’étude, la « cantologie » qui n’avait pas encore été définie (elle le sera seulement en 1992)… Mais sur un sujet, Jacques Brel et la chanson populaire, qui n’avait pas encore été risqué à la faculté, à ce niveau… mais d’une façon mal définie qui n’est pas totalement littéraire… mais qui l’est quand même un peu… qui se sert de documents qui ne sont pas vraiment universitaires, comme ceux de la presse et des médias, mais dont on ne peut nier l’intérêt, même s’il convient de les prendre avec recul et vérifier soigneusement les sources… mais qui ne répond pas à l’attente des lecteurs des années quatre-vingts encore sous le coup de l’affectif peu de temps après la mort de Jacques Brel et qui veulent seulement écouter ses chansons et entendre, avec elles, l’écho musical de l’image émotionnelle qu’il provoque en eux… Et la non-histoire de cet ouvrage ne s’arrête pas là puisque, lors de sa publication en mai 2004 par l’éditeur belge « La Renaissance du Livre », il ne s’est pas contenté de rencontrer un succès enviable pour un auteur (trois mille exemplaires vendus en trois mois). Hélàs, la maison d’édition s’étant mise en redressement judicaire (« concordat ») et elle a refusé de verser les droits d’auteur. Autrement dit, ce livre existe-t-il ? Bien sûr puisque vous l’avez désormais devant vous, même si c’est sous forme de fichier numérique. D’ailleurs avec l’histoire convulsée de la Belgique qui peut se permettre de rester un an sans 5 gouvernement quand ses communautés ne trouvent pas d’entente, il garde une étonnante actualité. Ce livre en fichier numérique est un compromis entre la thèse de 1984 et l’édition de 2004. Il est plus agréable à lire que la première mais quelques précisions ont été ajoutées à la deuxième. Jacques Brel ou la Difficulté d’être Belge a l’honneur d’avoir été écrit en toute liberté et d’être issu de la première thèse historiquement soutenue sur Jacques Brel. Si ses débuts ont été choatiques, c’est peut-être parce qu’il était trop novateur. D’ailleurs, avec le temps, il a fini par trouver sa place. Stéphane Hirschi (Professeur Directeur de l'Institut Culturel Université de Valenciennes) écrivait en 2012 (Préface de Bernard Dimey, Jeunesse champenoise, Succès montmartrois, Bordulot, 2012) : « Un chanteur, c’est un corps, une voix, une inspiration et une histoire. Annie Massy avait déjà su planter les enjeux de la création chez un autre aventurier de la chanson ancré dans un territoire : Jacques Brel, dont elle avait su avec talent croquer la « brelgitude ». Être de quelque part, en tirer sa sève, ancrer son imaginaire dans les fils de l’enfance, voilà une méthode. » Ce livre existe donc bien, comme la Belgique en proie aux querelles internes et linguistiques, comme la belgitude de Jacques Brel, Flamand francophone vivant loin de ses origines et de ses authentiques racines. Finalement, l’éditer de façon immatérielle, sous forme de fichier numérique, n’est-ce pas la façon la plus conforme à son sujet et son surprenant destin ? Bonne lecture, Annie Massy, Chaumont, 9 février 2014 6 Jacques Brel et la chanson populaire Le vingtième siècle par ses révolutions techniques a créé des arts nouveaux comme la photographie et le cinéma. Les découvertes en matière de reproduction et d’enregistrement ont aussi complètement transformé des arts aux origines très anciennes au point que l’on peut parler là aussi d’arts nouveaux : le graphisme, la bande dessinée et ce que j’appelle « la chanson populaire moderne ». Certes, la chanson naît à l’aube des temps humains. La préhistoire connaissait, à n’en pas douter, les chants accompagnés d'instruments à percussion : peut-être alors dans l'esprit des premiers hommes, un moyen de se faire entendre de leurs dieux. Sa forme profane est plus récente, mais elle est au moins contemporaine à Homère. Avec le temps, la chanson s'est imposée comme l'art le plus populaire au sens large du terme : c'est-à-dire que chaque classe sociale, chaque catégorie professionnelle, avait son répertoire. Lien avec Dieu, propagande, information ou même moyen de s'instruire, elle n'avait alors d'autre chaîne que le support du rythme et de la musique. Mais s’il est question d’art nouveau, c’est que l'époque moderne a bien changé cette forme artistique libre. L'avènement du disque, (puis de la bande magnétique et encore plus récemment, du cédérom) l'obligea à se plier à de nombreuses contraintes ; les mass-média orientèrent son 7 expansion. Tout un système commercial s’est mis à graviter autour d'elle et a souvent brouillé les cartes. Pourtant le vingtième siècle a aussi laissé ses créateurs et, avec le recul, il est même possible de distinguer des courants en lien direct avec ceux de la littérature récente. L’un, par exemple est issu d’un mélange du dix-neuvième siècle fait de naturalisme et de mélodrame : Edith Piaf y plongeait encore son public dans les années 1950. Charles Trénet dégage la chanson de cet esprit de pathétisme outrancier, grâce au surréalisme. Dans les années 1950/1970, deux courants semblent se séparer de façon antogoniste : l’un adopte les rythmes anglosaxons et privilégie la musique et le rythme, rock, vague « yé-yé » et plus tard disco. L’autre s’attache surtout au texte et, qu’il le reconnaisse ou non, il diffuse un message politique, humain ou simplement personnel. Mais cette vision presque caricaturale ne donne pas une représentation suffisante de la chanson au vingtième siècle. Il ne faut pas oublier l’importance de mouvements musicaux dont elle est indiscociable, comme le jazz. Il convient de ne pas laisser de coté aussi la différentes façons de la présenter en public : cabaret, salle de spectacle de grande dimension, plein air, stades ou lieux confidentiels, tournées organisées ou festivals spécialisés sont autant de moyens qui font de la chanson un art populaire complet et difficilement définissable (si ce n’est par une définition méthodique telle que l’a donnée Stéphane Hirschi et la cantologie en 1992 et dans des parutions universitaires depuis cette date. Mais rappelons que cette thèse, écrite avant, n’en tient pas compte) Mais cette confusion organisée est, finalement, secondaire dans une étude d’un auteur complet comme Jacques Brel. Il a compris empiriquement la spécificité de la chanson populaire. Il semble refuser, ou au moins semble tenir ses distances, même s’il en fait partie, un système commercial. Il garde ainsi ce qui fait aussi son authenticité. Il est tout à la fois auteur, compositeur, interprète donc à chaque étape de la création. Il a conçu un ensemble de chansons suffisamment important et riche de sens pour constituer une oeuvre personnelle et originale. Par contre, il faut, d’emblée s’entendre sur les termes : Jacques Brel est un auteur de chanson, pas un poète ou du moins, pas seulement. En 1964, d’ailleurs, lorsqu'un éditeur voulut 8 l’insérer dans la collection "Poètes d'aujourd'hui", il se sentit obligé de donner de longues explications en préface. Puis, pour ne pas choquer ses lecteurs, il créa exprès, pour Brel d'abord, puis pour les autres interprètes, la série "Poésie et chansons". Aujourd'hui, c'est un lieu commun de dire que Jacques Brel est un poète ; comment en effet ne pas le penser en écoutant les alexandrins du Plat pays : "Avec la mer du Nord pour dernier terrain vague Et des vagues de dunes pour arrêter les vagues Et de vagues rochers que les marées dépassent Et qui ont à jamais le coeur à marée basse ..." ou ces longs vers de dix huit syllabes, des Vieux, qui s'allongent comme leur ennui : "Est-ce d'avoir trop ri que leur voix se lézarde quand ils parlent d'hier Et d'avoir trop pleuré que des larmes encore leur perlent aux paupières Et s'ils tremblent un peu est-ce de voir vieillir la pendule d'argent Qui ronronne au salon, qui dit oui, qui dit non, qui dit je vous attends" Mais c'est moins évident pour d'autres textes, et parmi les plus célèbres, qui deviennent insipides lorsqu'ils sont seulement récités : "Je veux qu'on rie Je veux qu'on danse Je veux qu'on s'amuse comme des fous Je veux qu'on rie Je veux qu'on danse Quand c'est qu'on me mettra dans le trou" Le Moribond Le terme de « poète » est donc mal adapté à Jacques Brel : il est un ACI, « auteur- compositeur-interprète », nous dirons plus simplement, dans l’ouvrage qui suit et par facilité, un « chanteur ».
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