L'opération Baliste France

L'opération Baliste France

BULLETIN D’ÉTUDES DE LA MARINE L’opération Baliste France – Royaume-Uni Sauvegarde maritime, enjeux et perspectives N° 36 – janvier 2007 Éditorial 2 Contre-amiral Roger Levesque, commandant le Centre d’enseignement supérieur de la Marine L’opération Baliste, 5 au large du Liban, du 18 juillet au 18 octobre 2006 FRANCE – ROYAUME-UNI. SAUVEGARDE MARITIME, ENJEUX ET PERSPECTIVES Introduction 23 Commissaire en chef Jean-Loup Velut La France et la mer 25 Vice-amiral Laurent Merer The Royal Navy’s responsibilities in home waters and the role of other government departments 29 Commodore Robert Fraser Sauvegarde maritime : la gestation d’un concept 35 Commissaire général Arnaud Réglat-Boireau Le concept français de sauvegarde maritime : genèse et actualité 39 Capitaine de vaisseau Olivier Bodhuin Maritime security as seen from the UK and the role of the Royal Navy 43 Commander Ruppert Hollins La coopération franco-britannique en Manche 47 Vice-amiral Édouard Guillaud Nouvelles réflexions sur la sauvegarde maritime 51 Monsieur Hervé Coutau-Begarie La mise en demeure 55 Madame Françoise Odier “Mise en demeure” in UK law 57 Commander Ruppert Hollins La face cachée des mises en demeure des préfets maritimes français, l’arbitrage à Londres 59 Monsieur Christian Quillivic La révision de la convention de Rome du 10 mars 1988 61 Commissaire en chef de 2 e classe François Martineau La mise à jour de la convention de Rome 69 Commander Ruppert Hollins L’État et l’épave : droit français et projet de convention internationale 67 Madame Cécile de Cet Bertin La sécurité maritime dans le contexte européen et mondial 75 Monsieur Francis Vallat Sauvegarde et action de l’État en mer 76 Commissaire en chef Alain Verdeaux L’Arctique comme zone stratégique : les évolutions géopolitiques et les enjeux 77 Capitaine de frégate Guillaume Martin de Clausonne La surveillance maritime des côtes espagnoles : un service civil centralisé 99 Enseigne de vaisseau de 2 e classe Rémi Kaufmann Puissance maritime et économie 103 Capitaine de frégate Audouin de Chanterac Les armes de destruction massive : état des lieux 109 Capitaine de frégate Laurent Prost La réforme de l’État : une affaire de militaire 115 Commissaire en chef de 2 e classe Jérôme Trémintin L est important que la réflexion stratégique prenne du recul afin de ne pas se laisser aller au gré des aléas I politiques, budgétaires, sociaux… Que sais-je ? À cet égard, le recours à la géographie peut aider à une mise en perspective. Les planisphères centrés sur la France, généralement présentés aux écoliers ou au grand public, donnent une image faussée du monde : souvent limités à l’Amérique à l’ouest, à la Chine à l’est, aux rivages de l’Alaska et de la Sibérie au nord, ils occultent en grande partie le Pacifique – qui représente pourtant, à lui seul, la moitié de la superficie du globe terrestre – et l’Arctique – qui attise de plus en plus de convoitises du fait des nouvelles routes maritimes qui s’y ouvriront sous l’effet du réchauffement de la planète et, surtout, des nombreuses richesses énergétiques qu’il renferme. C’est donc bien à l’échelle planétaire qu’il faut se placer lorsque l’on réfléchit à l’avenir de notre pays, à son rôle dans un monde globalisé, à sa sécurité face à des menaces qui peuvent prendre naissance de l’autre côté de la planète. Après la géographie, un peu de mathématiques ! La notion de « nécessaire et suffisant » doit rester à l’esprit dans le domaine de la planification. L’homme sera toujours nécessaire pour mettre en œuvre les armes, il faut donc qu’il soit en nombre suffisant, mais pas plus. Le niveau de cette suffisance n’est pas une constante et la marine l’a bien compris en réduisant le temps passé en formation et le nombre de ses implantations géographiques très coûteuses en effectifs. Des gains sont encore possibles et les études sur les bâtiments à équipage réduit semblent prometteuses, même s’il faudra toujours garder à l’esprit que sur un bâtiment de guerre une certaine redondance est nécessaire. Le même raisonnement doit être tenu sur le plan des équipements : quelle place pour notre pays sur la scène internationale, quel rôle pour nos armées ? C’est la réponse à ces questions qui doit déterminer les moyens minimums dont il faut les doter, sans duplication inutile. Mais il faut rester cohérent : pour être crédible, une posture stratégique doit pouvoir être tenue en permanence. Marine de guerre contre service public, faut-il les opposer ? Question vieille comme la marine ou presque. C’est à la mer que le marin apprend son métier, c’est en étant déployé qu’il tient la posture nécessaire à une réaction rapide. Un pays riche peut se permettre de garder des forces strictement affectées à une mission de défense et disposer par ailleurs de garde-côtes pour assurer le service public. C’était le cas des États-Unis. Aujourd’hui, pourtant, ils rapprochent leurs Coast-Guards de la Navy pour améliorer les synergies tout en réduisant les coûts. Toujours le « nécessaire et suffisant » ! La frontière entre les missions de type humanitaire et la mission de guerre peut être étroite. L’opération Baliste au Liban en est un exemple frappant : de la simple évacuation de réfugiés, comme la marine en pratique régulièrement à la suite d’un conflit interne à un pays ou après une catastrophe naturelle, la mission est devenue « de haute intensité » après le tir, de la côte, d’un missile contre une corvette israélienne, faisant quatre morts. En un instant, la frégate de lutte anti-aérienne Jean Bart s’est vue en situation de jouer le rôle de bouclier pour les bâtiments qui transportaient les réfugiés, se plaçant ainsi sous menace missile immédiate. La parfaite réaction de l’équipage à cette occasion confirme la validité du concept français de polyvalence et de réversibilité. Le Bulletin d’études de la marine a, parmi ses objectifs, d’encourager les officiers de marine à s’exprimer. Je l’ai souvent rappelé. Cette vocation ne peut se réaliser que si on considère que les articles n’engagent que leurs auteurs. Et, par conséquent, qu’on accepte de publier des écrits pas toujours orthodoxes (mais peut-on parler d’orthodoxie en matière de réflexion stratégique ?). Au moment de quitter le service actif, je tiens à remercier les auteurs qui contribuent à faire de ce bulletin une revue appréciée. Merci aussi aux lecteurs qui nous encouragent par leur fidélité et, parfois, par leurs commentaires. Je suis certain que tous apporteront à mon successeur et ami, Olivier Lajous, le soutien dont j’ai moi-même bénéficié. Je suis heureux de lui céder la barre car je sais qu’il la tiendra de main ferme. « Madame se meurt ! ». Par ces mots, l’amiral Labouérie déplorait dans “Le Monde”, il y a vingt ans, l’abandon en France de l’idée de puissance maritime, tellement liée pourtant à notre histoire et à notre géographie. Un murmure feutré, hésitant mais persistant, semble aujourd’hui me susurrer : « Madame se relève ! ». Je lui souhaite de belles relevailles. Contre-amiral Roger Levesque La phase d’urgence tion amphibie sous menace, elle a été planifiée et conduite comme telle en engageant le Cassard et le Siroco, le commando Hubert, la flot- de l’opération Baliste tille amphibie, les détachement ALAT et 7e BCA, l’équipe chirurgicale embarquée et divers détachements d’experts. Capitaine de vaisseau Jérôme Bertrand Cette opération à permis, en parallèle du ravitaillement de la FINUL évo- Chef d’état-major du COMFRMARFOR qué plus loin, de mettre en sécurité 184 ressortissants en état de choc et bien en difficulté pour se déplacer vers les zone moins exposées du nord. A phase initiale d’urgence de l’opération Baliste se caractérise La situation de guerre, aggravée par le blocus aérien et maritime tout d’abord par la rapidité de réaction des forces, au reçu des imposé, a rapidement généré une situation humanitaire à risque. La L ordres donnés en pleines manifestations du 14 juillet. À Sète, force Baliste a donc été sollicitée sur ses trajets Chypre-Beyrouth, au pour les cérémonies, le Jean de Vienne reçoit l’ordre d’appareiller profit de divers organismes internationaux et organisations non gou- directement vers le Liban, tandis qu’à peine posés en retour du défilé vernementales. 1900 palettes ont ainsi été livrées par les moyens aérien de Paris, les hélicoptères Harfang tout neufs débutent les opé- Baliste, simultanément avec les transports de ressortissants, ce qui a rations techniques nécessaires à leur déploiement. représenté des enjeux difficiles de coordination et de sécurité. Les actions s’enchaînent rapidement : rassemblement des détache- Quelque peu délicate à organiser du fait des sollicitations multiples et ments ALAT, infanterie (7e BCA), de l’antenne chirurgicale, etc., qui per- non hiérarchisées, cet aspect de la mission a permis, aux bateaux et mettent l’appareillage du Siroco dès le 16 juillet, puis rapidement le équipages, de montrer une autre facette de savoir-faire et aux Transall déploiement de la force complète. de réaliser le premier poser d’avion occidental à Beyrouth, le 31 juillet. La première mission de Baliste est “l’aide au départ volontaire” des Enfin, cette phase d’urgence a requis un engagement fort de Baliste ressortissants. Cette opération massive permet de mettre en sécu- au profit de la FINUL. Brutalement réveillée d’une certaine léthargie rité, par une noria navale et aérienne ininterrompue, du 18 juillet au 16 par ce déchaînement de violence, cette force s’est, en effet, rapide- août, plus de 8 000 ressortissants de quelque 60 nationalités, par des ment trouvée en situation critique au milieu de ce déchaînement de moyens militaires auxquels s’ajoutent les quelque 6 000 évacués par violence.

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