L'odyssee Du Kharg 5 Et La Gestion Du Littoral Entre Oualidia Et Safi

L'odyssee Du Kharg 5 Et La Gestion Du Littoral Entre Oualidia Et Safi

L'ODYSSEE DU KHARG 5 ET LA GESTION DU LITTORAL ENTRE OUALIDIA ET SAFI Mohamed DARMANE, Université de Nanterre Résumé - Le Maroc a dO faire face aux risques de pollution marine, suite à l'accident du pétrolier Le Kharg 5. Les péripéties de celle affaire se sont d'abord passées dans le secret. Quinze jours après l'incident, alors que la situation sur le terrain présente des signes d'amélioration, la presse se mêle de l'affaire . De l'incident ponctuel, l'information-spectacle parle de catastrophe el de dégâts irréversibles ! Cette focalisation maintiendra dans l'ombre les divers cas de pollution, durables, issus des industries et de l'urbanisation côtière . La gestion du littoral présente, pour sa part, des incohérences, que ce soit dans le domaine des aménagements ou des choix de développements . Mots-clé : Maroc - Safi Oulidia - pollution marine - presse - gestion du littoral Abstract - Morocco had to place up to risks of sea pollution after an accident lhat happened to a tanker "Le Kharg 5". The episodes of the event were kept secret first. Two weeks later the situation had improved, newspapers and T.V . mixed in. The initial incident was made into a desaster of irreversible destruction by the press. This focalisation had several cases of durable pollution caused by industries and shore town developmenl. The coastal management shows incoherences as well in the plenning ranges as in the development choices. Key-words : Morocco - Safi Oulidia - Sea pollution - press - Coastal management - Development choices Le fait de disposer de deux bandes côtières, étalées sur plus de 200 kilomètres est un privilège pour un pays en voie de développement comme le Maroc. Sa situation géographique lui confère un atout majeur : celui de disposer de ports sur la Méditerranée et sur l'Atlantique ainsi que de contrôler la partie sud du détroit de Gibraltar. Au large des côtes marocaines, transite ainsi une grande partie du pétrole destiné à la consommation de l'Europe Occidentale. Dans ces conditions, les risques d'une pollution par les hydrocarbures sont potentiellement non négligeables . C'est donc, sans surprise, que le Maroc a dO affronter cette menace, à la fin de 1989 . Sans expérience initiale, sans matériel, ni équipement adéquat, le pays a frôlé la catastrophe ! Cet incident montre l'importance de mettre sur pied une véritable politique de protection du littoral. Dans cette note, nous aborderons, l'accident du pétrolier le Kharg 5. Ensuite nous traiterons quelques exemples des problèmes que pose la gestion du milieu littoral entre Safi et la lagune de Oualidia. I - L'ODYSSEE DU KHARG 5 AU LARGE DU MAROC Le 18 décembre 1989, quelque part au large du Maroc, le Kharg 5, un tanker Iranien transportant 284 000 tonnes de pétrole prend feu. L'équipage quitte précipitamment le navire . Ce dernier dérive vers le sud-ouest (fig. 1). La Smith-Tak ,société Hollandaise, est chargée de sauver le bateau . La rémunération des hollandais est proportionnelle à la quantité de brut sauvé. La cargaison du Kharg 5 a une valeur de 30 millions de dollars. 51 Fig 1 - LA DERIVE DU KHARG 5 AU LARGE DU MAROC .......J.-...,:;:;{'·1 PETROLE 1 Rabat D Casablanca MADERE ~.. Oualidiya Océan Atlantique • Marakech MAROC ILES CANARIES ~---­ 0 ---- ✓ ( --- 0 000 0 1 - - ------- -- 7 .......J.- ", ALGERIE ______, 1 ' ' I ' , 1 ' SAHARA/ :--- ,, OCC. ,_J 1 / 1 1 1 1 1 - - ---~ 1 MAURITANIE 1 1 MALI 1 1 1 O ILES DU CAP VERT 1 a o 1 Saint-Louis 600km . _ _.,_, Position et itinéraire du Kharg ~ Zone où l'on trouve des nappes de pétrole Safi Base de lutte anti-marée noire Rabat • Mohammedia MAROC 0 50 km Safi DAO N. 0-M . C.stan URA 915 52 Dans cette perspective, la Smith-Tak demande à l'Espagne et au Maroc d'ouvrir leurs ports au tanker. Mais les deux pays refusent. Le Kharg 5 perdant son pétrole est remorqué vers les îles du Cap Vert, à une vitesse de 4 noeuds par heure. Cette situation d'attente comporte des risques d'une grande gravité. Les diverses données concernant l'hydrologie de l'océan Atlantique au large du Maroc ne laissent aucun doute. Les fortes houles enregistrées en hiver, à Safi ou à Casablanca, sont la conséquence des dépressions qui traversent l'Atlantique entre les Açores et l'Islande. Des houles exceptionnellement fortes dont l'amplitude peut atteindre 9 mètres, peuvent se produire tous les deux ou trois ans. Ce sont des houles de secteur W.N.W et ont des périodes de 18 à 21 secondes (capitainerie du port de Safi, 1987). En hiver, les vents enregistrés à Safi soufflent essentiellement de l'océan vers le continent (62 % des vents). Ainsi, on ne comprend pas l'attitude des autorités des pays riverains du lieu de l'accident. On s'est contenté d'observer la progression du tanker vers le sud-ouest. Le 25 décembre, des dépressions très creusées traversent l'Atlantique nord. Des vents de force 9 à 10 soulèvent des lames de 7 à 8 mètres. Le pétrolier avec la nappe de 70 000 tonnes de pétrole qui l'entoure sont poussés vers la côte. Le 27 décembre, ils sont localisés à moins de 30 km de la lagune Oualidia (60 km au nord de Safi). Cette lagune est une zone très sensible . Elle abrite des parcs ostréicoles, et un site touristique très important dans cette région. Ce n'est que le 30 décembre que le Maroc peut disposer du matériel nécessaire pour s'attaquer à la nappe. En 48 heures, des avions légers ont déversé plus de 60 000 tonnes de solvants, pour une nappe de pétrole étendue sur 240 km de longueur. Ce type de traitement des hydrocarbures comporte des risques non négligeables pour la faune et la flore sur le plateau continental marocain. Il est d'autant plus nuisible que cette zone est célèbre, pour ses richesses halieutiques, grâce aux fortes remontées d'eaux froides (upwelling). Le début de 1990 marque un changement dans la direction des vents. Ces derniers deviennent nord-sud. La nappe s'est disloquée en plusieurs entités secondaires, et sa progression semble stoppée . C'est à ce moment là, que la presse s'empare de l'affaire, qu'elle amplifie le risque de pollution au Maroc et par la même de catastrophe éminente. Le 4 janvier, l'anticyclone des Açores se déplace vers le nord. Le vent au large de Safi devient nettement N.E - S.O. La nappe de pétrole, qui ne compte plus que 500 tonnes, est repoussée vers le large . Le risque de pollution est définitivement écarté . Mais cette affaire pose d'autres interrogations. L'assistance au Maroc pendant cette épreuve et la montée au créneau de personnalités, comme le Cdt Cousteau ou Mr Lalonde, ne peuvent que réjouir. Mais il est étonnant que l'on ne dénonce pas, par la même occasion, les dégâts causés par le transfert de technologies. Ces mêmes personnalités ont oublié de signaler que la même zone est menacée de façon durable par les rejets du complexe chimique qui se trouve au sud de Safi. Celui-ci rejette quotidiennement plus de 735 000 m3 d'eaux usées (20 fois le rejet de Safi : 200 000 h) et 23 000 tonnes de matériaux en suspension (8 millions de tonnes par an) . Les conséquences sont dramatiques pour la faune et la flore (disparition des poissons littoraux, des oursins, crabes et crevettes en aval des points de rejet). Il est indéniable que ce complexe est un élément fondamental dans le développement économique de la ville . Rappelons qu'il emploi plus de 5 000 personnes. Mais ceci ne permet pas de pratiquer la politique du tout-à-l'égout. 53 II - QUELQUES PROBLEMES DE LA GESTION DU LITTORAL ENTRE OUALIDIA ET SAFI 1 - Contexte géologique Le littoral entre Oualidia et Safi est composé de deux éléments fondamentaux (Fig. 2). Au nord du Cap Beddouza (ex Cap Cantin) nous avons une succession de falaises de grès dunaire entrecoupées, à certains endroits, par des plages. L'âge des falaises est sans doute récent. Ce sont les sables au grès qui sont fini ouljien, dernière phase du Tyrrhénien en Méditérranée (Biberson 1958) forment le bord d'une gouttière parallèle au littoral (appelée l'oulja). La lagune de Oualidia est l'exemple type de la gouttière surbaissée par rapport au niveau de la mer. Elle a évolué vers un système lagunaire qui s'est mis en place entre 5 OCX)à 6 OCX)ans B.P (Carruesco 1986) ceci correspond à la dernière transgression marine (localement on parle du Mellahien: niveau 2m qui est l'équivalent de la transgression flandrienne en Europe). OUA L /DI A JORF EL IHOUOI ~ - dunes quaternaire s cons oli dées / falaises vives EB calcaire s et gré s pl ïo-moghrébien i. princi pales plage s actuelles ~ cal caire s jurass ico-cr étacé Figure 2 - Le littoral marocain entre Oualidia et Safi. La côte du Cap Beddouza à Safi est formée de falaises imposantes (100 men moyenne) , taillées dans les argiles de l'Hauterivien et les calcaires et marnes du Valaginien (Jurassico­ Crétacé). La partie supérieure est formée en partie de calcaires pliocène ou de grès plio­ moghrébien (fin pliocène et début pleistocène). A l'échelle de !'Holocène , seules les falaises taillées dans le grès dunaire présentent un intérêt significatif. Les falaises du .secondaire pour des raisons de topographie et de faciés évoluent, de façon ponctuelle. Cette évolution est commandée en partie par les actions météo­ aériennes, généralement sous forme de glissements de terrain ou de loupes de solifluxion. 54 . ;· .• {·'I 0 12 .:,2 0 0 0 . ·;.:~;{~ 0 0 0 0 0 l-,-f- ·'::;--,;r-lf-'7'~,-,--~~ .

View Full Text

Details

  • File Type
    pdf
  • Upload Time
    -
  • Content Languages
    English
  • Upload User
    Anonymous/Not logged-in
  • File Pages
    9 Page
  • File Size
    -

Download

Channel Download Status
Express Download Enable

Copyright

We respect the copyrights and intellectual property rights of all users. All uploaded documents are either original works of the uploader or authorized works of the rightful owners.

  • Not to be reproduced or distributed without explicit permission.
  • Not used for commercial purposes outside of approved use cases.
  • Not used to infringe on the rights of the original creators.
  • If you believe any content infringes your copyright, please contact us immediately.

Support

For help with questions, suggestions, or problems, please contact us