
UNIVERSITÉ DE LAUSANNE FACULTÉ DES SCIENCES SOCIALES ET POLITIQUES Mémoire de Maîtrise universitaire ès Sciences du mouvement et du sport (Master Sciences sociales et sport) L’ontologie multiple du parkour Yann Daout Sous la direction de la Professeure Laurence Kaufmann Expert : Olivier Aubel Automne 2018 Table des matières Table des matières ...................................................................................................................... 1 Introduction ................................................................................................................................ 3 Méthodologie ............................................................................................................................. 4 Être traceur-chercheur ............................................................................................................ 4 Différentes versions de la discipline ...................................................................................... 8 Étudier une controverse ........................................................................................................ 10 Une petite histoire du parkour .................................................................................................. 12 Retour sur la généalogie du parkour .................................................................................... 13 Le freerunning ...................................................................................................................... 14 Des origines viriles et élitistes .............................................................................................. 15 Une spectacularisation précoce ............................................................................................ 15 Alternatif versus Maintream ................................................................................................. 17 Une diffusion mondiale ........................................................................................................ 18 Une ontologie multiple ............................................................................................................. 21 Des mondes de référence divers ........................................................................................... 21 De l’espace urbain aux « spots » .......................................................................................... 25 Le parkour comme processus ............................................................................................... 27 De l’isolation à l’enchaînement ............................................................................................ 28 L’épreuve ............................................................................................................................. 31 Une pratique en tour par tour ............................................................................................... 33 La mise en association comme institutionnalisation minimale ................................................ 36 Des cercles concentriques .................................................................................................... 36 Une (dé-)sportification locale ? ............................................................................................ 40 La domestication du parkour ................................................................................................ 47 La pratique en intérieur ........................................................................................................ 50 Parkour versus Acrobatie ..................................................................................................... 54 Prise / déprise ....................................................................................................................... 58 Une institutionnalisation internationale controversée .............................................................. 62 Contexte ............................................................................................................................... 62 Mise en Mouvement ............................................................................................................. 67 FIG-Gate ............................................................................................................................... 73 Degré de confinement .......................................................................................................... 76 Dispositifs d’information et d’action ................................................................................... 78 Une institutionnalisation inexorable ? .................................................................................. 82 Bottom-up, top-down ........................................................................................................... 83 Conclusion ................................................................................................................................ 89 1 Bibliographie ............................................................................................................................ 92 Annexes .................................................................................................................................... 98 Cartographie des acteurs ...................................................................................................... 98 Lexique ............................................................................................................................... 101 2 Introduction Le parkour est une activité physique récente, étant apparue à la fin des années ’80 dans la banlieue parisienne. La pratique s’est rapidement diffusée dans le monde entier par le biais de la télévision, du cinéma et d’internet. Le parkour est alternativement catégorisé par ses pratiquants1 comme un sport, un art (en analogie tantôt à la danse, tantôt aux arts martiaux), une méthode d’entraînement, une philosophie, une discipline, un mode de vie. Sa définition est donc particulièrement flottante. S’agissant d’une activité individuelle, ne requérant ni adversaire ni coéquipier, il n’y a pas de nécessité absolue de se mettre d’accord sur son contenu précis. La quasi-absence de compétition permet de se passer de règles universelles et explicites. Le parkour ne se définit pas non plus par l’équipement, qui se réduit (éventuellement) à des chaussures et vêtements confortables (contrairement, mettons, au skate qui pourrait se définir par l’usage d’un skateboard). Il ne se définit ni par le matériel utilisé plus généralement, ni par son lieu de pratique : les pratiquants se targuent souvent de s’entrainer dans des lieux et avec des objets qui ne sont « pas faits pour ça à la base ». Si les médias aiment bien représenter le parkour comme une discipline « urbaine », rien n’exclut la pratique en milieu « naturel ». À un public de profanes, le parkour est volontiers décrit comme « aller du point A au point B de manière rapide et efficiente » ; pourtant ce n’est pas nécessairement la manière dont on décrirait l’activité concrète des pratiquants in situ ou dans leurs vidéos. Reste qu’il y a des pratiquants de parkour qui se considèrent comme tels, qui se réunissent pour pratiquer, parfois en association, et maintenant également en fédérations. Qui « défendent » leur pratique. Qui affirment faire partie d’une « communauté » du parkour. Souvent, ils n’ont pas besoin de s’entendre sur ce que représente leur pratique. Même s’il y a des désaccords potentiels, se mettre d’accord sur les détails n’est pas toujours pertinent pour le déroulement de l’activité, et ces désaccords peuvent rester latents. D’autres fois, des débats, des controverses, des tentatives de définition surviennent. Ce que fait X, ce n’est « pas vraiment du parkour ». Il y a donc de multiples versions du parkour, une ontologie multiple (Mol, 2002) répartie sur une diversité de sites. Certaines versions s’opposent, d’autres sont en tension sans pour autant causer des conflits. D’autres encore sont complémentaires ou se juxtaposent volontiers. Ce travail propose de prendre à bras le corps la question de ce flou dans l’activité ainsi que du travail de (non-)définition opéré par les pratiquants. Nous nous basons sur des données ethnographiques ainsi qu’une analyse de controverse. Après l’exposition de notre méthodologie 1 La proportion de femmes parmi les pratiquant.e.s dans la région est inférieur à 15%. Le masculin sera donc utilisé avec escient. 3 et une introduction à la genèse du parkour, notre parcours se fera en trois étapes. Nous partirons de la pratique concrète et située du parkour, en nous posant la simple question : « que font les pratiquants ? » ou « en quoi consiste le parkour ? ». Puis nous monterons d’un niveau en considérant la mise en discours et l’institutionnalisation locale et limitée de l’activité. Dans la troisième et dernière étape, on considérera l’agitation causée par l’entrée d’un acteur international (la Fédération Internationale de Gymnastique) dans l’institutionnalisation de la pratique. Il s’agira de voir l’obstacle que la diversité première de l’activité constitue pour ses deux traductions institutionnelles, locale et internationale. En prenant également la question dans le sens inverse, on verra comment l’arrivée de ce nouvel acteur, en l’occurrence la Fédération Internationale de Gymnastique, force les pratiquants à se repositionner par rapport à leur pratique. On pourrait estimer qu’il ne s’agit ici que de la lutte entre
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