Philippe Gain, « Joseph Wamps », Amis De Douai [Revue De L'office De Tourisme De Douai], Janvier-Mars 1989, P. 131-133. ___

Philippe Gain, « Joseph Wamps », Amis De Douai [Revue De L'office De Tourisme De Douai], Janvier-Mars 1989, P. 131-133. ___

Philippe Gain, « Joseph Wamps », Amis de Douai [revue de l'Office de Tourisme de Douai], janvier-mars 1989, p. 131-133. _________________________________________________________________________________ Joseph Wamps Quand il nous arrive de parler peinture flamande, que nous nous rendons pour notre plaisir ou celui d'amis venus à la découverte de notre région, dans les innombrables musées du Nord-Pas-de- Calais ou de Belgique, il est encore fréquent que nous ignorions qu'après la Conquête des Flandres par Louis XIV, elle perdura. Cette école révèle vite d'intéressants talents ainsi que des sensibilités d'expression ou de richesse de programmes qui, très vite, vont imprimer une marque de qualité aux productions de la Châtellenie de Lille-Douai et Orchies. Et souvent, nous pouvons côtoyer tel ou tel sans avoir conscience de ce qu’il a produit pour cette région du septentrion déjà si tournée vers les arts. Tricentenaire d'un peintre flamand Dans ce cas précis, l'exemple du peintre lillois Bernard-Joseph Wamps est, hélas, représentatif de la timidité que nous éprouvons encore à reconnaître la spécificité de l'ensemble de notre patrimoine qui, dans la production du XVIII e siècle, s'inscrit en assez honorable place. En introduction au bicentenaire de la Révolution Française qui ne manquera d'être célébré sur l'ensemble du territoire, avec un peu d'avance sur l'inauguration du lien Transmanche qui fera de notre région "Le Carrefour de l'Europe" , nous pourrions – plus modestement – envisager le tricentenaire de la naissance d'un peintre, connu et prisé de son temps, que les villes de Douai et Lille se partagent dans plusieurs de leurs églises où à l'ombre des collections de leurs musées. Bernard-Joseph Wamps va naître au foyer d'un faïencier du Carrefour de la Croix Sainte- Catherine de Lille, Bernard Adrien, inscrit au Registre aux Bourgeois de cette même ville, déjà père de deux enfants, le 30 novembre 1689. Il est baptisé dès après sa naissance et inscrit sur les registres paroissiaux de l'église Sainte-Catherine. Jeunesse lilloise La jeunesse de Bernard-Joseph se déroule sans heurts, au contact des industriels de la faïence qui fréquentent assidûment son père, et va s'initier à la technique chez l'ami intime de celui-ci, le Nivernais Febvrier chez qui son frère aîné est apprenti. Vers 1706, il entrerait à l'atelier du peintre échevin de Lille Arnould de Vuez ; ce qui ne laisse pas de poser une importante question : comment a-t-il pu se mettre au service de Vuez alors qu'il exécute, seul, la magistrale oeuvre Saint Jean prêchant au désert conservée dans le bras sud de notre église Saint-Jacques ? Cette œuvre de jeunesse, la première que nous connaissions, lui avait été commandée par une famille noble – probablement les Lancry dont le nom serait inscrit au registre inférieur droit de la toile qui par ailleurs porte des armes proches de celles adoptées par cette famille de robins de la Châtellenie – pour la chapelle des bénédictins anglais. A l'issue de cet apprentissage présumé – que les auteurs du XIX e donnent comme certain sans pour autant le justifier – Bernard Joseph postule au Concours de l'Académie Royale de Peinture et de Sculpture de Paris. Le 6 avril 1715, il est admis à concourir avec les dénommés Grandon, Colin et Boutillier. Le 23 août 1715, il présente au jury des académiciens sa version du thème imposé : "La Reconnaissance du peuple envers Judith par le don des richesses trouvées dans la tente d'Holopherne". Le 31 août, suivant, il est reçu Premier prix de l'Académie et reçoit le titre de Pensionnaire du Roi pour l'Académie de France à Rome. Nous ne savons toujours pas, à l'heure actuelle, s'il se rend ou non dans la ville pontificale. Il va peindre en 1719 pour l'église de Deulémont deux toiles ayant pour thème : "Un paysage" qui brûlèrent lors de la guerre de 1914-1918. Installation à Lille En 1720 on le retrouve à Lille, et dorénavant il ne la quittera plus. Le 26 août 1720, il épouse à Lille une jeune fille originaire de Tourcoing, Catherine de Surmont et s'installe à l'Abbiette chez son père. A cette même époque, il est inscrit au Registre aux Bourgeois de la Ville de Lille et relève les exemptions accordées à Arnold Vuez (sur la bière en particulier). Un an plus tard, le premier enfant du couple Wamps/Desurmont, Bernard Joseph, naît rue de l'Abbiette. Le 19 octobre 1722, l'amélioration de la situation financière de Wamps est telle qu'il acquiert la maison d'Arnould de Vuez, mise en vente par la veuve de ce dernier, et sise en la rue de Metz où il installe sa famille et son atelier. C'est dans cette maison qu'il mourra et que sera dressé un très important inventaire après décès de ses oeuvres encore sur place. En 1723, l'hôpital Notre-Dame, dit Comtesse, de Lille lui commande une Sainte Catherine , disparue depuis. Cette année voit naître sa fille Bernardine-Joseph baptisée en l'église Saint-André. 1724, naissance du dernier enfant du couple, Henriette-Joseph, née rue de l'Abbiette et baptisée à Saint-Maurice, sans que l'on sache exactement pourquoi. En 1727, l'Hôpital Notre-Dame de Lille lui passe à nouveau commande pour un Triomphe de l'Eglise traité en grisaille. L'année 1731, après qu'il a peint pour l'église Saint-Géry-Saint-Aubert de Cambrai (1730) un Baptême de saint Augustin , va voir s'esquisser sa grande participation au vaste programme de l'Abbaye d'Anchin puisqu'il est pressenti pour peindre l'œuvre destinée à surmonter le maître-autel et remplacer celle jugée passée de mode exécutée par Bellegambe. Cette toile qui depuis le Concordat surmonte l'autel majeur de la petite église communale de Roost-Warendin, est considérée comme l'une de ses œuvres majeures et présente La Transfiguration de Notre-Seigneur . L'Hôpital Notre-Dame de Lille lui commande conjointement une petite œuvre, encore visible à l'emplacement pour lequel elle fut conçue, L'Ange avertissant Joseph de sa mission . Le Prince-Evêque d'Arras, Monseigneur Baglion de la Salle lui commande son portrait qui, détruit, ne subsiste plus qu'à travers la gravure qu'en a faite Jean Daullé, conservée aux Archives du Pas-de-Calais à Arras. Wamps est alors au mieux de sa production. L'année 1734 est pour les Douaisiens la plus intéressante. Wamps est une fois de plus pressenti par les moines d'Anchin pour la production de sujets religieux, dont plusieurs sont encore en nos murs. Au service de l'abbaye d'Anchin Il peindra successivement pour eux : La Dernière Cène (actuellement conservée dans la Collégiale Saint-Pierre), Mané Thécel Pharés, Les Cailles du Désert (conservée en esquisse au Musée de la Chartreuse, mais non accrochée), Sainte-Thérèse en extase (conservée de même), puis, Aman surpris par Assuérus . Le premier catalogue du Musée de Douai paru au XIX e siècle répertorie d'autres esquisses d'œuvres disparues qui, elles, brûlèrent durant la Seconde Guerre mondiale. Parallèlement, l'église Saint-Christophe de Tourcoing lui commande son tableau d'autel qu'il nous est toujours possible d'admirer, La Sainte Trinité, déposé aujourd'hui au Musée des Beaux-Arts de Tourcoing. En 1735, travaillant à Douai, il exécute pour les moines d'Anchin le Rafraîchissement de Gédéon , actuellement disparu. De grandes commandes Les deux grandes commandes qui vont le mobiliser jusqu'à sa mort, neuf ans plus tard, vont être celle de la Gouvernance de Lille, pour laquelle il exécute deux dessus de porte – retirés de la vente des effets mortuaires du Maréchal Duc de Boufflers, commandant les place et forteresse de Lille, comme étant propriétés de la Ville – aux thèmes profanes : l'Amour Buveur et Bacchus amoureux ; puis celle que lui passe le Révérend Père Cordier, Recteur de la Bibliothèque des Jésuites de Valenciennes. Ce dernier consacrant sa vie à l'étude lui commande une série de 36 portraits d'écrivains et hagiographes de la Compagnie de Jésus destinés à orner les impostes des fenêtres de la bibliothèque. Wamps va nous y livrer le meilleur de son art, la pleine maîtrise de sa technique et donner aux sujets secondaires – portraits d'enfants – une force et un réalisme semblables à ceux apportés aux sévères jésuites. Il peint seul en dépit de ses forces qui commencent à décliner en cette année 1741 et réalise l'ensemble en douze mois. Après quoi, le Père Cordier le charge des deux compositions finales : La Sagesse des Anciens et La Foi révélée à la raison . Ces toiles, d'une grandeur inusitée de l'artiste, sont toujours visibles et dans leur totalité, à Valenciennes, dans le magnifique ensemble de l'ancienne bibliothèque jésuite. Cette même année, il peint son œuvre maîtresse – conservée roulée dans les collections du Musée des Beaux-Arts de Lille – destinée à la Salle du Conclave du Palais Rihour : Le Jugement de Salomon. Puis, sans que nous sachions pourquoi, ses forces déclinent. En 1743, il ne va produire qu'une œuvre : Moïse et les Hébreux , probablement conservée au Musée de Laon. Et, dans le courant 1744, il nous laisse une sorte de testament spirituel en réalisant presque des copies de deux de ses œuvres de maturité. Il peint une nouvelle version de son Denier de César pour Saint-Maurice de Lille. Et exécute à la demande de la fabrique de Saint-Géry-Saint-Aubert de Cambrai une version du Laissez venir à moi les petits enfants assez différente de celle, non datée, que nous possédons à Saint- Jacques de Douai, probablement peinte pour les bénédictins anglais.

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