SAMEDI 5 DÉCEMBRE – 20H Salle des concerts Woodstock 40 ans Richie Havens, voix et guitare Walter Parks, guitare entracte Ciné-concert d’après Woodstock, ilm de Michael Wadleigh, États-Unis, 1970 The Young Gods Franz Treichler, voix, guitare, électronique Al Comet, samplers, guitares Bernard Trontin, batterie, percussions Vincent Hänni, basse, guitare et électronique Erika Stucky, voix, stuckysone Cicco, percussions Dans le cadre du cycle Guerre et paix, du samedi 5 au jeudi 17 décembre à la Cité de la musique. Fin du concert vers 23h10. Dans Le Survivant, ilm de science-iction américain réalisé en 1971 par Boris Sagal, un médecin interprété par Charlton Heston est le dernier homme sur terre, le seul qui ait échappé à une guerre bactériologique à l’aide d’un vaccin de sa fabrication. S’eforçant de tuer le temps dans la grande ville désormais déserte, quoique hantée la nuit par une horde de mutants aussi repoussants qu’hostiles, il se projette le ilm Woodstock dans un cinéma dont il est bien sûr l’unique spectateur. Relétées dans ses yeux, ces images de liesse et de communion se chargent aussitôt d’une valeur symbolique qui fait mesurer au héros, comme à nous-mêmes, la distance le séparant à jamais d’un âge d’or et d’un monde enseveli sous ses propres décombres. C’est un fait : Woodstock continue d’agir sur notre imaginaire. Ce lieu est devenu aussi célèbre que certains grands noms de batailles, bien qu’il ait une signiication opposée. Comme pour Verdun ou Wounded Knee, on peut d’ailleurs l’aborder sous l’angle chifré : 3 jours « de paix et de musique », 2 hectares et demi de champ, entre 300 et 500 000 spectateurs, dont 150 000 resquilleurs, 126 overdoses, la plupart au LSD, une naissance, 1 500 000 dollars de dettes le lendemain de l’événement, plus de 50 millions de bénéice après la sortie du ilm et la commercialisation de la bande originale, un an plus tard. C’est aussi une aiche de rêve où les absents avaient torts (Beatles, Stones, Doors, Led Zeppelin) ; un Olympe du rock dont certains revinrent grandis, tels Joe Cocker, Sly Stone, Richie Havens ou Santana, et d’autres mythiiés comme Janis Joplin et Jimi Hendrix. Hendrix se produit devant une mer de sacs de couchage à l’aube du quatrième jour, alors que pour lui c’est déjà le crépuscule. Car Woodstock, c’est aussi un début et une in, le concentré de toute la contre-culture des années soixante, le moment de grâce d’une génération qui, comme le soulignait John Clellon Holmes dans le New York Times, « montrait davantage d’aptitudes à produire des idées qu’à y croire ». En somme, l’expression d’une utopie, celle du mouvement hippie, qui se serait réalisée le temps d’un week-end festif entrecoupé d’averses. Aujourd’hui, à l’heure du quarantième anniversaire, alors que nous nous trouvons dans une situation assez semblable à celle du Survivant, en train de contempler un rêve caressé tandis que des menaces bien réelles pèsent sur le devenir de l’humanité, Woodstock est une entité paradoxale, lointaine mais ne cessant de prendre des parts de marché dans l’imaginaire collectif. Il suit de considérer la multiplication des grands festivals édiiés un peu partout dans le monde sur le même modèle, chacun répétant à la manière d’un rituel eucharistique cette scène (cène) primordiale. Et même distancié, c’est à ce rituel que le groupe suisse The Young Gods nous invite à prendre part aujourd’hui. Richie Havens demeure l’un des témoins privilégiés de Woodstock pour avoir fait l’ouverture du festival avec sa célèbre chanson « Freedom », restée depuis dans toutes les mémoires. La veille encore, il honorait d’occasionnels engagements dans les clubs new-yorkais de Greenwich Village, comme le Café Wha où s’était produit Jimi Hendrix à ses débuts. Aujourd’hui, il reste confondu par l’impact du phénomène et la persistance de sa symbolique : « C’était une période extraordinaire. Tout allait si vite. J’avais l’habitude de me produire devant deux ou trois cents personnes et soudain je devais en afronter un demi-million. C’était incroyablement exaltant. Mais le festival marqua aussi le déclin d’un certain état d’esprit, d’une utopie, car alors vinrent la célébrité et l’argent. Woodstock fut l’alpha et l’oméga d’un vaste mouvement culturel, le pic d’une époque. » Dont il voit cependant dans l’élection de Barack Obama l’une des conséquences : « Les grands changements dont nous avons besoin, les rêves que nous avons ébauchés dans les années 60, se réaliseront peut-être, il faut l’espérer, maintenant. » Francis Dordor 3 3 Richie Havens Richie Havens possède l’une des voix les plus reconnaissables de l’histoire de la musique populaire. Son timbre unique, iévreux, poignant et chargé d’émotions traverse les âges depuis ses premiers pas sur la scène folk de Greenwich Village, au début des années 60. Cette voix a envoûté et électrisé les foules dès 1969 à Woodstock. Pendant plus de trois décennies, Richie Havens a fait passer à travers sa musique des messages de fraternité et de liberté individuelle. Après plus de 25 albums et des tournées qui laisseraient plus d’un jeunot sur le carreau, il continue à percevoir son œuvre comme quelque chose d’abstrait. Il déclarait récemment au Denver Post : « Je chante des chansons qui me touchent. Je ne suis pas dans le show business, je fais plus dans la communication. C’est cela qui compte pour moi. » Né à Brooklyn, Richard P. Havens est l’aîné d’une famille de neuf enfants. Dès son plus jeune âge, il s’est mis à rassembler ses amis du quartier en petits groupes de chanteurs doo-wop postés à chaque coin de rue et, dès l’âge de 16 ans, il intégrait la chorale des McCrea Gospel Singers. À 20 ans, Richie Havens a quitté Brooklyn pour parcourir le fourmillement artistique qui animait Greenwich Village. « J’ai vu en Greenwich Village l’échappatoire qui me permettrait de m’exprimer comme je le voulais », se souvient-il. « J’y avais passé mes premiers jours pendant le mouvement beatnik dans les années 50 pour écrire des poèmes, je me suis ensuite mis à dessiner des portraits et je passais mes nuits dans les clubs folks. J’ai pris mon temps avant de commencer à jouer de la guitare. » La principale inluence vocale de Richie Havens depuis ses débuts reste sans aucun doute Nina Simone, avec également quelques grands chanteurs folks comme Fred Neil et Dino Valenti. La réputation de Richie Havens en tant qu’artiste solo s’est rapidement propagée en dehors des cercles folks du Village. En 1965 et 1966, il enregistre deux albums de démos pour Douglas International, dont aucun titre ne sortira en single. C’est suite à sa rencontre avec le légendaire manager Albert Grossman que Richie Havens obtient son premier contrat sur le label Verve, sur lequel sort en 1967 l’album Mixed Bag. Ce premier album prometteur contient quelques perles comme « Handsome Johnny » (co-écrit par Richie et Louis Gosset Jr., futur lauréat d’un Oscar), « Follow », ainsi qu’une reprise bouleversante de « Just Like a Woman » de Bob Dylan. C’est en tant qu’artiste live que Richie Havens a reçu ses premières lettres de noblesse. À la in des années 60, il est sollicité à travers le pays tout en prenant de plus en plus d’ampleur sur le circuit folk mondial. Il se produit notamment au Newport Folk Festival de 1966, au Festival de Jazz de Monterey en 1969, au Festival Pop de Miami en 1968, à Woodstock en 1969, au festival de l’Île de Wight en 1969, ainsi qu’au premier Festival de Glastonbury en 1970. La performance de Richie Havens à Woodstock a été un tournant dans sa carrière. Programmé en ouverture, il a tenu le public en haleine pendant près de trois heures, 4 4 acclamé à chaque rappel. Après avoir épuisé tout son répertoire, il s’est lancé dans une improvisation du classique « Motherless Child » pour en faire « Freedom », qui allait devenir l’hymne de toute une génération. La sortie du ilm dédié au festival a permis à des millions de personnes de découvrir son talent. Pour Richie Havens, la musique est un voyage sans in, dont chaque album est une nouvelle étape. « Mes albums sont des témoignages chronologiques des périodes que nous avons traversées, de ce que nous avons pensé et de ce que nous avons accompli pour grandir et évoluer. Il y a un carrefour universel où chacun se retrouve et se sent concerné et touché par ces chansons. » La dernière étape du voyage de Richie Havens s’intitule Noboby Left to Crown. Un sentiment d’intemporalité frappe à l’écoute de l’album, comme si le passage des années, loin d’avoir égratigné le folk gorgé de soul de Richie Havens, lui avait conféré un supplément de sens. 5 5 The Young Gods En se remettant dans le contexte de l’époque (1985), il fallait être sacrément culotté pour monter un trio autour du sampler. The Young Gods n’a jamais eu peur de rien. En créant une grammaire musicale inédite qui doit autant au rock, à la musique industrielle, au classique, au baroque, à l’ambient ou à l’électronique, la formation suisse mise sur pied par Franz Treichler reste, vingt-deux ans après ses débuts, d’une rare pertinence et d’une impressionnante cohérence. Aventuriers, défricheurs ou savants fous, The Young Gods reste une référence incontournable dans la musique d’aujourd’hui.
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