N’allez pas croire la date de naissance indiquée sur ses papiers d’identité. Balle en main comme dans une conversation, la meneuse belge Julie Allemand possède une maturité bien supérieure à ses 22 ans. Meilleure passeuse à la dernière Coupe du monde, elle a fait partie des Belgian Cats qui ont bousculé les Bleues en quart- de-finale et sa valeur ne fait qu’augmenter à chaque sortie avec l’équipe de Lyon ASVEL Féminin actuellement en tête de la Ligue Féminine. Une crème à l’interview la Liégeoise. Lorsque l’équipe de Belgique a été éliminée par la France à la Coupe du Monde de football, vous vous êtes fait chambrer par SMS par vos équipières françaises de Lyon ? Tout à fait. Depuis la première saison où je suis arrivée à Lyon, j’étais considérée comme la Belge et on se charrie toujours un petit peu et évidemment quand la France a gagné à la Coupe du monde, j’ai reçu des messages. J’avais dit que je prendrai ma revanche au championnat du monde. Et l’occasion est arrivée puisqu’on a pu jouer contre la France en quart-de-finale. Vous les avez chambré à votre tour ? Oui. On donnait le match chez vous sur Canal+ Sport et on m’avait demandé de faire une interview après match. J’avais dit que j’avais pris ma revanche par rapport à Paoline Salagnac qui était dans mon équipe. J’avais dit que comme ça c’était 1-1 ! Vous avez été surprises par la passivité des Françaises lors de ce match ? On formait vraiment un groupe avec l’équipe belge, on était sur un nuage depuis le début du tournoi et peu importe l’équipe que l’on affrontait, on se donnait à fond. Dès le début de match, on était dedans et on a vu que les Françaises passaient à côté de leur match. On l’avait vraiment bien préparé et on les a mis en difficulté. Je reste persuadée qu’elles avaient un peu trop de confiance. J’avais entendu dire qu’elles étaient contentes de jouer contre nous, que c’était mieux que d’affronter une autre équipe. Elles n’étaient peut-être pas focus à 100% comme elles auraient dû l’être. On a créé la surprise et dès que l’on a pris l’avantage, on a voulu creuser l’écart. C’est toujours particulier pour nous de jouer contre la France. C’est un match encore un peu plus intéressant que l’on a envie de gagner. On a eu pas mal de réussite alors qu’elles étaient vraiment en difficulté. Etes-vous d’accord pour dire que les Français ont toujours en général un complexe de supériorité vis-à-vis des Belges ? Oui, je suis d’accord (rires). Et que vous, à l’inverse, vous avez un petit complexe d’infériorité en disant toujours que vous êtes un petit pays ? Je pense aussi, ça a toujours été comme ça. Mais si on se retrouve confronté en juin à la France (NDLR : à l’EuroBasket), on ne va jamais se sentir comme ça et la France ne va pas avoir ce sentiment de supériorité. Ça sera égal. Mais, oui, de manière générale, je suis d’accord. Quand on joue en jeune, on se dit « c’est la France ! Nous, on est un petit pays ». En France, il y a plus de chances d’avoir des talents car il y a plus de joueuses. Ann Wauters a-t-elle joué un rôle fondamental dans la prise de conscience de vos capacités ? Tout à fait. Ce n’est pas facile car on ne savait pas si elle allait pouvoir jouer ou rester sur le côté. Son genou n’était pas dans un état extraordinaire et on a n’a pas pu l’avoir comme on voulait durant ce championnat du monde (NDLR : 12’ de temps de jeu par match pour 3,7 points et 2,2 rebonds). On avait besoin d’elle et elle a joué un rôle sur le côté. On n’aurait pas fait le même championnat du monde si elle n’avait pas été là. Elle était toujours là pour nous rappeler certaines choses, avant, pendant et après le match. Avoir une joueuse comme ça, même si elle ne joue pas, c’est super important. Où en est-elle actuellement ? Sera-t-elle présente cet été au championnat d’Europe ? Elle n’a toujours pas joué cette saison ci et je pense qu’elle ne jouera pas. Son objectif est d’être prête pour le championnat d’Europe. Elle travaille avec les kinés pour sa rééducation mais ce n’est pas facile du tout surtout qu’elle est âgée maintenant (NDLR : 38 ans) et elle a du mal pour revenir. On sait aussi que son objectif, c’est de participer aux Jeux Olympiques. Je pense qu’elle sera toujours à nos côtés pour nous pousser pour se qualifier aux Jeux Olympiques et là, je pense qu’elle donnera tout pour pouvoir jouer. Vous avez terminé meilleure passeuse de cette coupe du monde (8,2 pds/moy). C’est un résultat individuel de rêve pour une meneuse surtout aussi jeune ? Ce n’était pas attendu. Quand je participe à un championnat du monde, je ne pense pas à des prestations individuelles et plutôt au groupe. Surtout pour une meneuse qui pense à gérer l’équipe et aller le plus loin possible. Ça s’est tellement bien passé que c’est plutôt une récompense. C’était chouette. J’étais à la fois contente et surprise car ce n’était pas un objectif que je m’étais fixée. A part les matches pour les qualifications du championnat d’Europe, je n’avais pas encore fait de compétition avec l’équipe nationale. Il ne faut pas non plus rester là-dessus. C’était plus facile car je n’étais pas non plus connue. Faire ça une deuxième fois, ça ne sera pas facile car à partir du moment où les personnes te connaissent, elles peuvent plus facilement te contrer. J’étais peut-être un peu la surprise au niveau du championnat, c’était un bon moment, mais c’est l’équipe qui m’intéresse. ! « Sans me vanter, quand j’étais petite, j’étais déjà forte et j’étais grande. Je ne sentais pas vraiment de différence contre les garçons » Avec Emma Meesseman et Julie Vanloo, la Belgique a été championne d’Europe U18 et quatrième au Mondial cadettes. C’est cette génération qui a initié le succès. C’est le fruit de structures fédérales ou de clubs, d’un grand pas vers plus de professionnalisme ? On avait vraiment un groupe et tout le staff, la fédération belge, a essayé de grandir et de mettre tous les moyens de notre côté pour obtenir des résultats. C’est tout le monde qui grandi en même temps. On a une génération de folie et on sait qu’une fois où elle sera passée, la Belgique ne sera plus au même niveau. C’est pour ça qu’il faut que l’on en profite en ce moment, tout donner et créer des exploits. Le basket féminin a évolué ces dernières années mais quand on voit le championnat belge, c’est très faible. La force de notre équipe c’est d’avoir beaucoup de joueuses à l’étranger et qui progressent là- bas. A quel âge avez-vous joué la première fois en Première Division belge ? A 15 ans, j’étais en double affiliation avec un club de première division (Point Chaud Sprimont) et mon premier club de jeune (BC Alleur). Vous avez été précoce, donc toujours habituée à vivre avec des filles plus vieilles que vous ? Souvent. Toute petite, je jouais avec des garçons qui avaient toujours un ou deux ans de plus que moi. Quand je suis passée en filles, j’étais aussi avec des plus âgées. C’est pour ça que j’ai pu grandir assez vite. Contrairement à d’autres joueuses, je ne suis pas allée dans un centre de formation. A partir de 15 ans, j’ai joué dans une équipe semi-pro pendant trois ans avec pas mal de jeunes mais aussi des filles plus expérimentées. Je suis ensuite partie trois ans à Braine. J’avais 17 ans et j’étais avec des professionnelles plus âgées. J’ai du apprendre. C’était une force pour moi de pouvoir côtoyer des joueuses qui avaient une méthode de travail, une expérience. La première année à Braine, c’était un coach letton et il était difficile avec moi. La première année, je n’étais pas professionnelle, je faisais des études et il me les a fait arrêter. C’était invivable avec lui car dès que l’on n’allait pas à un entraînement, même le shooting le jour du match, on ne jouait pas le match. Il avait du mal à comprendre les études. Je n’étais pas bien, j’avais raté mes examens, je n’arrivais pas à m’épanouir. Et quand j’ai fait le choix d’arrêter les études, c’est sûr que ma saison s’est bien passée. Du coup, il a eu confiance en moi et en Eurocup, j’avais 20’ de temps de jeu. C’est là que l’on a joué la finale contre Villeneuve. Est-ce un conseil que vous donneriez à des jeunes filles de jouer contre des garçons ? C’est profitable ou trop dur ? Quand on est jeune, on ne s’en rend pas compte… Sans me vanter, quand j’étais petite, j’étais déjà forte et j’étais grande.
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