Document generated on 09/27/2021 9:20 p.m. Ciné-Bulles Le cinéma d’auteur avant tout Critiques Bulworth Fear and Loathing in Las Vegas Feux d’artifices The Last Days of Disco le Septième Ciel Wild Man Blues Paul Beaucage, Charles-Stéphane Roy and Jean Beaulieu Volume 17, Number 2, Summer 1998 URI: https://id.erudit.org/iderudit/34365ac See table of contents Publisher(s) Association des cinémas parallèles du Québec ISSN 0820-8921 (print) 1923-3221 (digital) Explore this journal Cite this review Beaucage, P., Roy, C.-S. & Beaulieu, J. (1998). Review of [Critiques / Bulworth / Fear and Loathing in Las Vegas / Feux d’artifices / The Last Days of Disco / le Septième Ciel / Wild Man Blues]. Ciné-Bulles, 17(2), 48–56. Tous droits réservés © Association des cinémas parallèles du Québec, 1998 This document is protected by copyright law. Use of the services of Érudit (including reproduction) is subject to its terms and conditions, which can be viewed online. https://apropos.erudit.org/en/users/policy-on-use/ This article is disseminated and preserved by Érudit. Érudit is a non-profit inter-university consortium of the Université de Montréal, Université Laval, and the Université du Québec à Montréal. Its mission is to promote and disseminate research. https://www.erudit.org/en/ Critiques BULWORTH de Jay Bulworth (Warren Beatty), un sénateur dé­ de Warren Beatty mocrate qui, las des mensonges et de la corruption politiques, décide d'avouer la vérité (si âpre soit- elle) à ses électeurs. À quoi doit-on attribuer sa sou­ par Paul Beaucage daine volte-face? Mystère. Toutefois, il est clair qu'il en a ras le bol de la situation qui existe actuellement aux États-Unis. Il aurait été intéressant que le réali­ écidément, les combats que se livrent les gla­ sateur sonde la psychologie de son protagoniste afin diateurs de l'arène politique américaine n'en de déterminer les causes profondes de cette désillu­ Dfinissent plus d'attirer l'attention des cinéas­ sion. À défaut de quoi, il dilue l'importance de Jay Bulworth tes contemporains. Après Tim Robbins (Bob Ro­ Bulworth. Il en fait de même pour ses personnages berts, 1992), Oliver Stone (JFK, 1991 et Nixon, secondaires (lajeune tueuse à gages et les conseillers 35 mm / coul. /120 min / 1996), Ivan Reitman (Dave, 1993), Barry Levinson politiques en particulier). Or, dans une allégorie po­ 1998/fict./États-Unis (Wag the Dog, 1997) et Mike Nichols (Primary litique, les personnages doivent avoir plus d'étoffe, Colors, 1998), c'est au tour de Warren Beatty de se de consistance afin de compenser pour les inévita­ Real: Warren Beatty Scén.: Warren Beatty et pencher sur la question dans Bulworth. A priori, bles raccourcis de l'intrigue. Du reste, le film de Jeremy Pikser l'entreprise s'annonçait prometteuse puisque Beatty Warren Beatty souffre beaucoup d'une comparaison Image: Vittorio Storaro a longtemps été associé à l'aile gauche (aujourd'hui avec ceux d'Élio Petri (Enquête sur un citoyen au- Mus.: Ennio Morricone moribonde) du Parti Démocrate américain. De plus, dessus de tout soupçon, 1970, la Classe ouvrière Mont. : Robert C. Jones et va au paradis, 1971... ). Ce dernier parvenait à éla­ Billy Weber il s'agit d'un cinéaste qui choisit consciencieusement Prod. : Warren Beatty et ses sujets et qui a déjà manifesté de l'habileté dans borer des pamphlets saisissants en s'appuyant sur Pieter Jan Brugge le domaine de la fiction à résonance politique (Reds, des figures nettement plus complexes. Dist.: Twenty Century Fox 1981). Int.: Warren Beatty, Halle Berry, Don Cheadle, Oliver Dans Bulworth, l'humour est véritablement au ren­ Piatt, Paul Sorvino, Jack Le film de Beatty se veut beaucoup plus une allégo­ dez-vous. Bien entendu, les dialogues du film s'avè­ Warden, Isaiah Washington rie politique qu'un récit réaliste. Il raconte l'histoire rent très savoureux. On se délecte en écoutant les Halle Berry et Warren Beatty dans Bulworth (Photo: Sidney Baldwin) Vol. 17 n" 2 C\HE3ULLES 48 Critiques one-liners de Beatty et son coscénariste Jeremy FEAR AND LOATHING Pikser. Ceux-ci renvoient dos à dos les sympathi­ IN LAS VEGAS sants d'O.J. Simpson et ceux de Bill Clinton, l'esta­ blishment hollywoodien et le lobby des compagnies de Terry Gilliam d'assurances, les criminels et les journalistes, etc. Car, chacun doit assumer sa part de responsabilité face au gâchis sociopolitique qui sévit présentement par Charles-Stéphane Roy aux États-Unis. Mais, au-delà de cette critique un peu succincte, il aurait fallu démystifier les méca­ ear and Loathing in Las Vegas... ou com­ nismes du système politique américain. Comment ment rater ce qui devait être une rencontre de les riches financiers s'y prennent-ils pour détourner F choc entre Terry Gilliam, le cinéaste débridé la démocratie? Par quelles magouilles inavouables de Life of Brian et The Fisher King, Johnny Depp, les politiciens réussissent-ils à se faire élire? Par l'acteur téméraire de Ed Wood et Dead Man, quels moyens démagogiques séduisent-ils leur élec­ Benicio Del Toro, magnifique dans The Usual toral? Voilà autant de questions que Beatty élude un Suspects, et Hunter S. Thompson, l'auteur et peu trop rapidement. Dans ces circonstances, il peut héros sous-entendu du roman-culte du même souligner à gros traits la «touchante» rédemption de nom. Mais mettez tout ce beau monde sur Jay Bulworth, le franc-tireur. On assistera donc au l'acide... voyage initiatique de ce truculent personnage, qui découvrira les «vrais» problèmes des États-Unis Le roman était la synthèse des notes qu'a rédi­ d'aujourd'hui. Cela est très sympathique mais hau­ gées Thompson en 1971 alors qu'il devait se ren­ tement improbable. dre à Las Vegas couvrir une course de véhicules tout-terrains dans le désert, puis de son retour Il y a un idéaliste post-rooseveltien en la personne avec son copain Oscar Zêta Acosta, un avocat de de Warren Beatty: celui-ci croit fermement que si Chicago, venu dans la capitale du jeu afin d'as­ certains politiciens «mettaient leur culotte», le pays sister à une conférence sur... les drogues! Dans de l'oncle Sam s'en porterait beaucoup mieux. Sa le film, Thompson devient Raoul Duke (Johnny prémisse (proche de celle des films de Frank Capra) Depp), et Acosta le docteur Gonzo (Benicio Del comporte une indéniable part de vérité. Toutefois, Toro), deux paranoïaques ne vivant que des fris­ elle minimise naïvement l'extraordinaire attrait sons que leur procure la came. En effet, en plus qu'exerce le pouvoir politique sur n'importe quel de leur Chevrolet décapotable, leur seule posses­ individu. Combien de personnes bien attentionnées sion durant ce périple se résume à une serviette avons-nous vu faire le saut en politique et se laisser comprenant le nécessaire pour un tout autre type corrompre peu à peu par le milieu? De plus, le ci­ de voyage: amphétamines, marijuana, acide, co­ néaste sous-estime grandement le rôle joué par la caïne, mescaline, etc. Ces toxicomanes vivent Fear and Loathing majorité silencieuse de la population. Ces gens or­ donc chaque instant dans une réalité seconde, peu­ in Las Vegas dinaires, ces «honnêtes travailleurs» ont tendance à plée d'alligators et de personnages défigurés, et préférer le politicien à l'apparence soignée au poli­ trouvent dans la Mecque du Nevada le décor rêvé 35 mm /coul. /118 min / ticien honnête. Ce qui compte, pour eux, c'est qu'il pour leurs hallucinations permanentes. 1998/fict./États-Unis s'intègre à une certaine mythologie américaine, d'où Réal: Terry Gilliam la préséance de l'image sur la réalité, de la forme Le titre original du livre de Thompson était A Scén. : Terry Gilliam, Tony sur le contenu. Et advienne que pourra! Dans cette Savage Journey to the Heart of the American Grisoni, Tod Davies et Alex optique, peut-on prendre un seul instant au sérieux Cox (d'après le roman de Dream, où l'auteur révélait ses impressions sur Hunter S. Thompson) la scène où Bulworth, «déguisé» en rapper noir, réus­ les États-Unis, une société subissant le trauma­ Image: Nicola Pecorini sit à séduire l'électorat américain, Noirs et Blancs tisme post-hippie et les contrecoups de l'abus des Son: Paul P. Soucek confondus? drogues. Son métier de journaliste se prêtait bien Mont.: Andrew Hafitz et Jay à l'exercice, et sa dépendance aux stupéfiants ne Pires Prod. : Laila Nabulsi, Patrick Malgré l'appui d'une solide équipe de techniciens servit qu'à amplifier la décadence régnant à Las Cassavetti et Stephen Nemeth (Vittorio Storaro, à la photographie, et Ennio Morricone, Vegas. De son côté, Gilliam ne récupère que quel­ Dist.: Universal à la musique), le film de Beatty s'avère fort décevant ques réflexions bien simplistes sur le mode de Int.: Johnny Depp, Benicio sur le plan de la mise en scène. Il ne comporte aucune vie de ces «Laurel et Hardy de la défonce», aussi Del Toro, Tobey Maguire, originalité formelle. Cela atténue encore davantage éclaté que celui adopté par les âmes gravitant Michael Lee Gogin, Larry Cedar, Brian LeBaron, la portée d'une allégorie qui aurait pu se révéler cor­ autour des tables de jeu, des bars ou des restau­ Katherine Helmon, Mark rosive si elle avait visé juste. • rants de Las Vegas. L'Amérique entière est ainsi Harmon C\HE3ULLES Vol. 17n°2 49 Critiques réduite aux affirmations de Raoul en voix off, formulées entre deux doses de LSD. Le cinéaste préféra manifestement miser sur l'aspect tape-à- l'œil de l'espace américain vu à travers les yeux (rouges...) de Duke et Gonzo. En fait, le contenu et la forme de Fear and Loathing in Las Vegas se fondent en une symbiose de l'excès: excès des hallucinations (rarement lucides demeurent les personnages), excès des effets de style (suren­ chère d'images distortionnées, de gros plans et de panoramiques accélérés) et excès des clins d'œil (on pense trop souvent aux Doors et à Natural Born Killers d'Oliver Stone; quant aux apparitions éclair de Mark Harmon, Christina Ricci et..
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