Les inscriptions de Veleia-Iruña (version entièrement revue et augmentée d’un index alphabétique) Hector Iglesias To cite this version: Hector Iglesias. Les inscriptions de Veleia-Iruña (version entièrement revue et augmentée d’un index alphabétique). in press / sous presse, 2009, pp.1-230. artxibo-00423946v3 HAL Id: artxibo-00423946 https://artxiker.ccsd.cnrs.fr/artxibo-00423946v3 Submitted on 21 Oct 2009 HAL is a multi-disciplinary open access L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est archive for the deposit and dissemination of sci- destinée au dépôt et à la diffusion de documents entific research documents, whether they are pub- scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, lished or not. The documents may come from émanant des établissements d’enseignement et de teaching and research institutions in France or recherche français ou étrangers, des laboratoires abroad, or from public or private research centers. publics ou privés. LES INSCRIPTIONS DE VELEIA-IRUÑA LES INSCRIPTIONS DE VELEIA-IRUÑA Hector IGLESIAS* [email protected] [email protected] La découverte au cours des années 2005 et 2006 sur le site archéologique de Veleia-Iruña, dans la région de Vitoria, province basque d’Alava, d’inscriptions rédigées, les unes manifestement en latin populaire et tardif 1, et les autres assurément en basque, ou plus exactement en « proto-basque », des inscriptions datant selon toute vraisemblance du III e siècle de notre ère, voire d’une période allant du II e au IV e siècle, a déclenché en Espagne une polémique des plus curieuses. Cette polémique, qui vue de France, ou de quelque autre pays européen, pourra surprendre, tant sur la forme que sur le fond, le spécialiste mais également le simple curieux intéressé par ces questions savantes, a pris une ampleur inhabituelle dans le monde de la recherche scientifique, du moins telle qu’on la conçoit en Europe occidentale. En effet, le déroulement de cette affaire, dont la presse, principalement basque et espagnole, s’est largement emparée, est à bien des égards, comme nous allons le constater à présent, tout à fait extraordinaire. Dans un premier temps, les archéologues à l’origine de ces découvertes ont saisi, le plus naturellement du monde semble-t-il, un certain nombre d’universitaires en sciences humaines, spécialisés notamment en linguistique et en histoire, des auteurs originaires principalement de la région basque, auxquels ils ont présenté leurs découvertes afin que ceux-ci donnent leur avis sur le sujet. Jusqu’à présent rien de véritablement surprenant, ni en Europe ni dans quelque autre endroit. L’examen des inscriptions a en effet été confié, à la demande expresse de ces mêmes archéologues ― ce point aura toute son importance ―, à plusieurs enseignants dépendant pour la plupart de l’Université du Pays Basque méridional, c’est-à-dire la partie du territoire basque * Docteur en Etudes Basques. Membre associé d’IKER, Centre de recherche sur la langue et les textes basques, Baiona / Bayonne. IKER est une unité mixte de recherche (UMR), membre de la fédération Typologie et Universaux linguistiques du CNRS, spécialisée dans l’étude de la langue et des textes basques. 1 La nuance a son importance comme nous le verrons tout au long des présents commentaires. 1 LES INSCRIPTIONS DE VELEIA-IRUÑA jouissant de nos jours d’un statut d’autonomie, ainsi qu’à quelques autres universitaires, presque tous espagnols 2. Ces auteurs ont alors établi, chacun de leur côté, un rapport, ensemble de rapports qui ont par la suite été remis, à la demande de celles-ci, aux autorités politiques de la province. Or il se trouve que dans quelques-uns de ces rapports, une minorité cependant, il est clairement affirmé ― la plupart du temps il s’agit même d’affirmations catégoriques, tout à fait inhabituelles dans le monde de la recherche européenne, et tout particulièrement dans le domaine des sciences humaines où les certitudes ont toujours été peu nombreuses ― que toutes ces inscriptions, plusieurs centaines, résulteraient en réalité d’une grossière falsification. Il a donc été publiquement affirmé par certains de ces auteurs, notamment, pour ne pas les citer, Joaquín Gorrochategui, Joseba Lakarra et Isabel Velázquez, les trois principaux auteurs qui feront par la suite l’objet de la plupart de nos commentaires, que ces découvertes « sont » (à l’indicatif, selon eux) le résultat certain d’une « falsification » (non pas d’une « prétendue falsification », mais d’une « falsification » tout court), conclusion définitive qui à ce niveau de la recherche ne manquera pas également de surprendre, et cela d’autant plus que toutes les analyses effectuées en laboratoire 3 non seulement contredisent les dires de ces auteurs, mais sembleraient même démontrer au contraire l’authenticité de ces inscriptions 4. Le ton définitif, absolument catégorique, voire sans appel, de nombre des conclusions de ces auteurs pourra également surprendre et éveiller aussitôt chez le lecteur, fût-il non spécialiste de ces questions, sinon de prime abord le soupçon, du moins une certaine curiosité. Mais le plus étonnant est à venir. Dans certains de ces rapports, ceux qui feront principalement l’objet de nos commentaires, il est clairement sous-entendu, quoique jamais démontré véritablement, que les archéologues à l’origine de ces découvertes, archéologues professionnels reconnus par leurs pairs universitaires, et cela depuis des décennies, seraient les véritables faussaires… Il s’agit, répétons-le, et jusqu’à preuve du contraire, de sous-entendus dénués de tout fondement réel, car jusqu’à présent il n’existe pas de preuves, du moins à en croire la presse et… la justice, un juge même ayant été officiellement saisi de cette affaire. À la suite des rapports réalisés par ces spécialistes en sciences humaines (et non en sciences exactes), et malgré le fait que les conclusions de ces rapports n’ont été à aucun moment corroborées par l’ensemble des analyses effectuées par les divers laboratoires européens et américains sollicités, 2 A l’exception d’un auteur italien et d’un autre anglais dont on a également sollicité l’avis. 3 Laboratoires de Geochron, Cambridge du Massachussets-USA et du Centre for Isotope Research de l’Université de Gröningen, Pays-Bas ; laboratoires de l’Université de Cracovie, Pologne ; laboratoires de spectroscopie nucléaire du CEA-CNRS, France ; laboratoires Adirondack du Centre technologique de Zamudio, Pays Basque. Toutes les datations au C14 effectuées offrent des résultats concordants. Ces datations font toutes remonter les objets contenant les fameuses inscriptions et soumis à l’analyse à une époque antérieure au V e siècle de notre ère. 4 L’argumentation de certains de ces auteurs, cités ci-dessus, pourra cependant paraître des plus byzantines. Par exemple, à ce jour Lakarra, qui n’est pourtant pas, à notre connaissance, un spécialiste de ces questions, considère que les objets trouvés sur le site sont d'époque romaine, mais pas... les inscriptions qu'ils contiennent car toutes, absolument... toutes les analyses effectuées par plusieurs laboratoires internationaux n'auraient, prétend-il... , non sans se contredire quelque peu, aucune valeur... (mais pourquoi reconnaître alors comme il le fait pourtant que ces objets sont bien d’époque ?) ; voir ses déclarations publiées dans le quotidien en langue basque Berria du 26 novembre 2008 où il affirme : « Inork ez du dudan jarri harriak III. mendekoak direnik, baizik eta idazkunak. Karbonoaren frogek ez dute, beraz, eztabaidarako balio, partidu hori irabazia dauka. Ez dago hor gerrarik, inork ez du-eta sekula ukatu markoak benetakoak direnik », soit en langue française : « Personne n'a mis en doute que les pierres [litt., c'est-à-dire les objets trouvés] soient du III e siècle, ce sont les inscriptions qui ne le sont pas. Les preuves tirées du carbone [14] n'ont, en conséquence, aucune valeur dans ce débat [linguistique]. La polémique ne porte pas sur la date des objets, personne ne conteste qu'ils soient du début de notre ère ». En admettant que ce raisonnement, des plus insolites et étranges, fût fondé, ce qui est loin d’être assuré, on ne serait pas plus avancé car alors, comment et quand ces inscriptions sont-elles arrivées sur ces objets d'époque ? Il s'agit là d'un mystère que personne, pas même... Lakarra, ne sait expliquer de façon rationnelle et cohérente, comme nous le verrons par la suite. 2 LES INSCRIPTIONS DE VELEIA-IRUÑA les autorités politiques de la province ont procédé, sur la base de ces mêmes rapports, à la fermeture du site archéologique, ce qui a entraîné le licenciement immédiat de l’ensemble du personnel travaillant depuis des années sur le site 5, et ont porté l’affaire devant les tribunaux. Jusqu’à présent l’observateur européen, neutre et impartial, dont nous sommes, bref l’observateur parfaitement indifférent, dont nous sommes également, aux rebondissements et aux « dessous », si tant est qu’il y en ait, de cette situation « politico-judiciaire » qui, quoique surprenante, ne concerne finalement que les autorités espagnoles, administratives, universitaires, politiques ou autres, bref l’observateur extérieur, dont nous sommes encore une fois, serait peut-être, à la rigueur extrême, en droit de faire part de son étonnement devant la tournure pour le moins inattendue et le déroulement quelque peu étrange de tous ces événements, du moins tels que les rapportent régulièrement les médias écrits et audio-visuels et il n’y a, semble-t-il, aucune raison de douter des récits, comptes rendus et autres explications émanant de ces moyens de communication. Vu depuis le monde de la recherche, du moins telle qu’elle se conçoit en France, tout cela pourra paraître, il est vrai, relativement étrange. Mais cela ne regarde finalement que les personnes qui sont, de près ou de loin, mêlées à cette affaire. Le fait est, pour revenir sur un terrain purement scientifique, le seul qui puisse nous concerner réellement, que ces rapports universitaires, des rapports officiels précisons-le bien, et les conclusions qu’ils contiennent ont été rendus publics, à savoir versés officiellement dans le domaine public 6.
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