Document generated on 09/30/2021 11:13 a.m. Séquences La revue de cinéma Crooklyn Johanne Larue Number 172, May–June 1994 URI: https://id.erudit.org/iderudit/59453ac See table of contents Publisher(s) La revue Séquences Inc. ISSN 0037-2412 (print) 1923-5100 (digital) Explore this journal Cite this article Larue, J. (1994). Crooklyn . Séquences, (172), 37–38. Tous droits réservés © La revue Séquences Inc., 1994 This document is protected by copyright law. Use of the services of Érudit (including reproduction) is subject to its terms and conditions, which can be viewed online. https://apropos.erudit.org/en/users/policy-on-use/ This article is disseminated and preserved by Érudit. Érudit is a non-profit inter-university consortium of the Université de Montréal, Université Laval, and the Université du Québec à Montréal. Its mission is to promote and disseminate research. https://www.erudit.org/en/ la Fontaine (Julie), Dominique MicheKAline veut une fresque sociale. Notons jeune Troy au contact de ce nouvel Jobin), Yves Jacques (Jean-François Gobeil), cependant, qu'ici comme ailleurs dans le environnement familial (sa tante vit dans Patricia Tulasne (Charlotte Dubreuil), Benoit film, la réalisation vient à la rescousse de une maison proprette de banlieue au Brière (Caméraman Gourmand), Gilbert Lachance (Rémi), Jean L'Italien (Roger) — Prod.: cette scénarisation déficiente. Parmi les charme horriblement kitsch). Richard Sadler et Jacques Dorfmann — plans d'ouverture en mouvements, par À l'origine, Joie et Cinqué Lee devait Canada/France — 1994 — 93 minutes — Dist.: ailleurs très beaux, un seul demeure fixe et développer une série pour la télévision. Malofilm Distribution nous renvoie l'image d'un personnage Pas surprenant alors que Crooklyn revête défiant l'oeil de la caméra. La petite Troy, l'apparence d'une chronique partiellement Crooklyn le dos appuyé à un mur, se fait interpeller étoffée. Outre le filon mère-fille, on n'y par quelqu'un hors champ. Elle ne dit mot trouve que des ébauches de personnages À mon avis, Crooklyn est sûrement le mais affiche un sourire narquois. C'est par et de drames interpersonnels; des croquis film le plus décevant de Spike Lee. On ne cette seule variation subtile dans la mise qu'une émission télévisée étalée sur une se réjouit jamais de voir un bon cinéaste en scène que le cinéaste nous indique qui, ou plusieurs saisons aurait eu le temps de s'investir pendant deux ans sur un projet du lot, deviendra l'héroïne. L'idée n'est développer. Il faut ajouter à cet handicap qui, au bout du compte, finit dans la pas bête, au contraire, mais il demeure celui, plus stylistique, d'une utilisation médiocrité. Le ratage s'avère ici d'autant frustrant de constater que le scénario envahissante de la musique, plus plus dommage que, pour la première fois n'emboîte pas le pas à la réalisation. précisément de chansons populaires. Au fil depuis longtemps, Spike Lee fait de son Durant près d'une heure, l'écriture de sa carrière, Spike Lee a développé un personnage principal une héroïne. Le demeure démocratique à l'excès, l'histoire penchant marqué pour le tapissage scénario de Crooklyn provient en partie n'étant pas encore celle de Troy mais de musical. Parfois l'effet s'avère brechtien — des réminiscences de la soeur du cinéaste, toute sa famille et, par extension, du comme dans les films de Scorsese—. Le Joie Susannah Lee. Cette dernière a puisé à quartier au complet, sans que le tableau ne réalisateur nous distancie de l'émotion même ses souvenirs d'enfance pour nous devienne jamais particulièrement démesurée qu'affichent ses protagonistes livrer une chronique consacrée à sa intéressant, drôle ou touchant. en nous forçant à écouter la bande sonore jeunesse passée à Brooklyn, au début des En fait, il faut attendre le voyage qui commente l'action. Parfois encore, années 70. Je ne sais si la faute revient à qu'effectue la petite pour relever une l'effet est expressionniste. Le volume l'auteure ou aux scénaristes subséquents, certaine originalité dans l'écriture et assourdissant des chansons ajoute alors à dont font partie le cinéaste et un troisième comprendre que le film veut adopter le la violence des sentiments exprimés membre de la famille, Cinqué Lee, mais il point de vue de la fillette. Lorsque cette verbalement et physiquement à l'écran. apparaît très tôt que la structure même du dernière va demeurer chez sa tante en L'hystérie se fait ainsi sculpture scénario fait défaut. Et c'est là le problème Alabama, les auteurs se désintéressent de audiovisuelle. Dans Crooklyn cependant, majeur du film. la vie à Brooklyn et fouille la psychologie la même stratégie ne fait qu'exaspérer le Par exemple, ce n'est qu'après avoir de leur héroïne. De plus, Spike Lee a spectateur car elle ne vient pas chapeauter visionné tout le film que le spectateur tourné tout ce passage, qui dure au moins une dramatique assez définie. Redondante, Zelda Harris, vingt minutes, avec une lentille facile et complaisante, la musique érige un comprend enfin que le récit avait comme Alfre Woodard, mur opaque entre regardés et regardants but principal de montrer les liens unissant anamorphique. L'image s'en trouve Tse-Mach la jeune héroïne, Troy, à sa mère, Carolyn. comme dilatée, les personnages et les Wasahington, qui court-circuite toute communication. Ironiquement, l'importance de cette décors allongés à la verticale. L'effet est Delroy Lindo, Faut-il préciser qu'il est alors impossible Carlton Williams, dernière nous est révélée par son absence. des plus comiques et souligne bien de ressentir la moindre compassion pour Chris Knowings, les personnages? Dans un film Le personnage meurt dans les dernières l'impression d'aliénation que ressent la et Sharif Rashid minutes du film, dialoguant ensuite avec moderniste, la distanciation est un son enfant par delà la mort. Ce sont là les phénomène attendu, recherché même, seuls véritables moments d'intimité entre mais Crooklyn se veut avant tout un drame la mère et la fille; les seules scènes où humain. Spike Lee a même avoué avoir Spike Lee délaisse le mode hystérique qui voulu tourner un film «familial», que tout caractérise son film pour nous offrir un chacun pourrait apprécier. Il s'y est pris quelques secondes d'introspection, voire d'une bien drôle de façon. même de contemplation. Ce n'est qu'alors Il est bien triste que le réalisateur n'ait qu'il nous émeut enfin. Avant cette pas voulu exploiter la mine d'or enfouie accalmie, le film tourbillonne et part en dans le scénario. Quelque chose de tous sens, sans que l'on puisse distinguer palpable et de profond se lit sur le visage une évolution véritable chez les d'Alfre Woodard dans les plans où elle personnages ou un sens concret à s'adresse à la jeune Zelda Harris. Les deux l'histoire. Durant les premières minutes du actrices communiquent et créent... mais film, il est même assez difficile de savoir Spike Lee semble occupé ailleurs. qui, du groupe d'acteurs présents à l'écran, deviendra le personnage principal. En fait, Johanne Larue l'attente s'avère si longue que l'on finit par croire qu'aucun des protagonistes n'agira comme point d'ancre et que Crooklyn se CROOKLYN - Réal.: Spike Lee - Scén.: Joie Susannah Lee, Cinqué Lee, Spike Lee — Phot.: No 172 —Mai-juin 1994 37 Arthur Jala — Mont.: Barry Alexander Brown — Mus.: Terence Blanchard — Son: Skip Lievsey — Dir. art.: Wynn Thomas — Cost.: Ruth E. Carter — Int.: Zelda Harris (Troy), Alfre Woodard (Carolyn), Delroy Lindo (Woody), David Patrick Kelly (Tony Eyes), Carlton Williams (Clinton), Sharif Rashed (Wendell), Tse-Mach Washington (Joseph), Christopher Knowings (Nate), Frances Foster (Tante Song), Patriece Nelson (Viola), Joie Susannah Lee (Tante Maxine), Snuffy (Spike Lee) — Prod.: S. Lee — Etats-Unis — 1994 — 132 minutes — Dist.: Universal Mina Tannenbaum Comment peut-on être juif et français? C'est une question que les Nord- Américains se posaient dans les années 50 et au début des années 60. Aujourd'hui, avec le dégel des frontières, les vagues d'immigration de partout vers partout, les mariages mixtes, les familles aux nombreux traits d'union et surtout une toute nouvelle (?) ouverture d'esprit, les gens sont devenus citoyens du monde. Quel bonheur de pouvoir enfin parler de ce que l'on veut. Et de filmer ce qu'on avait toujours eu envie de filmer. Il a fallu environ trois ans à Martine Dugowson pour mettre un point final au projet Mina Tannenbaum: six mois d'écriture, un an pour permettre au producteur Georges Benayoun de boucler qui se complètent, mais qui vivent plus ou avait destinés à cette dernière. De son Romane Bohringer le budget, trois mois de tournage, sept moins les mêmes situations: elles ne côté, bien que découverte dans mois de montage, le mixage, la promo. Le s'aiment pas telles qu'elles sont, leur l'admirable Van Gogh de Pialat, Eisa résultat final: un des plus beaux films physique les horripile, et lorsqu'elles se Zylberstein effectue une montée en flèche français qui aient jamais traversé rencontrent sur «leur» banc ou dans un de dans le firmament des nouvelles venues. l'Atlantique, l'histoire d'une amitié certes, ces cafés de jeunes «où on ne parle que de Son sourire à lui tout seul vaut le mais où l'imagination se manifeste dans trucs nuls», elles regardent «passer les déplacement. Il faut aussi la voir rire aux les images, le scénario, la musique et mecs» (la majorité d'entre eux pris au éclats lors d'une interview qu'Ethel, le l'interprétation. La nuance, Martine ralenti par la caméra-sentiment de Martine personnage qu'elle joue, essaie d'entamer Dugowson connaît ça: pas une virgule de Dugowson).
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