Directeur de la publication : Edwy Plenel www.mediapart.fr 1 Le donateur s’estime « victime d’une campagne Blast, Anticor, Montebourg et le dégueulasse » : « La base de l’argumentation de Renahy et d’autres, c’est de dire que mon argent Luxembourg: micmac autour d'un est douteux, c’est complètement faux, déclare-t-il à donateur Mediapart. J’ai eu un contrôle fiscal généralisé, il y PAR KARL LASKE ARTICLE PUBLIÉ LE VENDREDI 26 MARS 2021 a trois ans, tout était nickel ! Je ne vois pas en quoi c’est immoral d’avoir des sociétés à l’étranger. Ils Maxime Renahy, l’ancien informateur de la DGSE sont énervés contre Anticor, parce que l’association devenu lanceur d’alerte, a claqué la porte de la a mis une plainte contre Kohler, une plainte contre nouvelle web-télé Blast, en divulguant l’identité d’un le ministre de la justice et une plainte contre Richard important donateur d’Anticor. Ferrand. Je peux comprendre que ça les énerve. » « Quand Hervé Vinciguerra est venu nous expliquer ses desseins et l’origine (offshore) de ses fonds, j’ai en effet commencé à enquêter sur lui et ses réseaux », a expliqué Renahy dans un texte diffusé le 16 mars. Il a poursuivi, le 22 mars, par la diffusion Maxime Renahy à la remise d'un prix par l'association Anticor en 2020. © DR d’un montage d’extraits de ses enregistrements En apparence, c’est un conflit entre un lanceur clandestins : l’ancien espion a en effet enregistré d’alerte et un journaliste. Deux chevaliers blancs. plusieurs réunions de l’équipe de Blast, quelques Maxime Renahy, ancienne « taupe » de la DGSE à conversations téléphoniques avec Denis Robert, ainsi Jersey et Luxembourg, auteur de Là où est l’argent, qu’un entretien avec Vinciguerra, dont il n’a diffusé accuse le journaliste Denis Robert d’avoir trahi ses qu’une phrase – « Ce n’est pas un paradis fiscal le principes en ouvrant les portes de son futur média Luxembourg, c’est l’Europe. » En janvier 2020, Blast à un « quasi-milliardaire » proche d’Arnaud l’ancien espion avait reçu le prix éthique d’Anticor, Montebourg. Robert accuse Renahy d’avoir trahi sa pour son livre Là où est l’argent. Il risque de concourir confiance par des enregistrements clandestins alors l’année prochaine pour celui des casseroles – l’autre qu’il l’avait accueilli à bras ouverts à Blast. Le volet de la cérémonie annuelle d’Anticor. financier, lui, n’a finalement donné que 20 000 euros à Blast sur la plateforme de financement participatif KissKissBankBank. Cette querelle en resterait là si l’affaire ne venait pas nourrir une guerre autrement plus décisive. Celle de l’agrément de l’association anticorruption Anticor. Car en dénonçant le « milliardaire » qui voulait Maxime Renahy lors de la remise du prix éthique, une aider Blast, l’ancienne taupe de la DGSE a aussi Marianne, par l'association Anticor en janvier 2020. © DR livré le nom du « donateur anonyme » d’Anticor La polémique arrive à point nommé, car la décision du qui a focalisé l’attention du ministère de la justice renouvellement de l’agrément, après avoir été reportée chargé de l’instruction du dossier de renouvellement plusieurs fois, doit être prise par le premier ministre au de l’agrément de l’association. Ce dernier, Hervé plus tard le 2 avril – le garde des Sceaux Éric Dupond- Vinciguerra, 64 ans, est l’ancien patron d’une société Moretti, visé par une plainte d’Anticor, s’étant déporté de logiciels de gestion de portefeuilles, qui fait du dossier en vertu d’un décret du 23 octobre dernier. prospérer ses affaires dans un « family office » au Luxembourg, bien qu’il soit résident fiscal français. 1/5 Directeur de la publication : Edwy Plenel www.mediapart.fr 2 Afin de s’assurer du « caractère désintéressé Beneden à Mediapart. C’était énorme et impossible à et indépendant » de l’association, l’administration accepter pour nous. Nous n’avons pas l’intention de réclamait depuis le mois de novembre à Anticor modifier nos équilibres : toutes nos charges fixes – « l’identité » de ce donateur qui lui a versé un soutien salaires, loyers, assurances – sont assurées par les mensualisé de 5 à 7000 euros en 2020 – soit 64 000 cotisations. » En outre, l’association ne reçoit aucun euros en 2020, et un total de 89 000 euros depuis financement d’entreprises, ni de subventions. 2017. L’association refusait de lever son anonymat, en s’appuyant sur la législation protégeant les données personnelles, puis sur un avis spécifique de la CNIL du 1er février. La révélation de son identité par Maxime Renahy a provoqué une nouvelle demande de l’administration qui veut désormais savoir si « l’équipe dirigeante » Hervé Vinciguerra lors d'un tournoi de bridge. Discipline d’Anticor était « informée » de ce que le don des dont il a été deux fois champion de France. © DR 64 000 euros en 2020 « pouvait provenir directement Hervé Vinciguerra réapparaît lors de la création de ou indirectement d’une personne morale immatriculée Blast. Élise Van Beneden met en contact l’homme à l’étranger ». Et si cette somme constituait « pour d'affaires avec Denis Robert. La présidente d'Anticor tout ou partie un don fléché sur une opération s’intéresse elle aussi au projet, et elle figurera dans particulière ». « L’association a reçu différentes l'équipe de fondateurs du média fin décembre. Le salves de questions en se polarisant notamment sur récit de Renahy conduit l’administration à demander e ce donateur, fait remarquer M Vincent Brengarth, à Anticor « toute précision sur les liens juridiques l’avocat d'Anticor. Mais il n’y a eu aucune espèce de financiers ou partenariaux entre l’association et le démonstration qu’il ait eu la moindre influence sur les média en ligne Blast». Pour l’avocat d’Anticor, « il n’y actions de l’association. » a aucun lien entre l’association et Blast: le seul lien Pour Hervé Vinciguerra, « on est dans le délire existant est celui, personnel, de Mme Van Beneden, le plus complet ». « Je suis dans une lutte contre mais qui n’engage pas l’association » et « il n’y a la corruption, point, déclare-t-il. Donc j’ai donné pas d’incompatibilité pour elle entre l’association et de l’argent à Anticor. Je n’ai eu aucune influence, le média ». d’aucune sorte, sur les choix des enquêtes. Je n’ai Un rendez-vous a lieu début décembre dans les eu aucune information. Lors d’une réunion avec Élise bureaux du donateur, près du jardin des Tuileries, à Van Beneden – la présidente d’Anticor – et un avocat Paris. Maxime Renahy est présent avec Denis Robert, de l’association, j’ai proposé plus de fonds, parce que Élise Van Beneden, qui part rapidement, et une autre je crois que les bénévoles ne suffisent pas dans ce collaboratrice de Blast. « On a une conversation plutôt type d’association. Je leur ai dit : “Il faut embaucher à bâtons rompus, où Vinciguerra nous dit que le seul et missionner des professionnels sérieux, et je peux qu’il voyait à la présidentielle, c’était Montebourg, vous aider à financer ça.” Ils ont refusé. Ils ont dit résume Denis Robert à Mediapart. Il nous dit qu’il que c’était compliqué que je prenne trop d’importance a une société au Luxembourg et qu’il aimerait bien dans le financement de l’association. J’ai dit : “Faites financer un pool de journalistes d’investigation, que comme vous voulez. Si vous ne voulez pas de mes dons, son argent il préférerait le consacrer à ça. Il nous ne les prenez pas !” ». parle de Kohler, de Drahi… Après le rendez-vous, L’homme d’affaires a ainsi proposé la somme de j’ai dit à Maxime, comme il est dans ces histoire de 700 000 euros à l’association. « Cela représentait fiscalité, de le rencontrer à nouveau pour voir ce qu’il deux fois nos recettes annuelles, explique Élise Van avait dans le ventre.» 2/5 Directeur de la publication : Edwy Plenel www.mediapart.fr 3 Le lanceur d’alerte se souvient que leur hôte leur ou en acquisition de parts sociales entre 150 et 200000 dit qu’il « finance Montebourg, son entreprise Bleu au départ. Puis entre 20 et 40 000 par mois… À charge Blanc Ruche », et qu’il suggère de « taper sur pour nous, sur les sujets que nous avons évoqués, de Hidalgo ». Mais c’est l’accord financier qui se profile te tenir au courant via Maxime à intervalles réguliers qui le choque le plus. « Pour moi, Denis c’était une (une fois par semaine par exemple). Tu pourrais ainsi icône, l’emblème de la lutte contre les paradis fiscaux suivre l’évolution de nos enquêtes… » et l’opacité financière, alors voir qu’il acceptait d’organiser avec un milliardaire des flux financiers du Luxembourg vers la France en conseillant au financier de faire transiter les sommes vers un compte français, j’étais halluciné », raconte-t-il à Mediapart. « La réunion s’est déroulée entre Denis et Hervé Vinciguerra, se souvient une quatrième personne présente pour Blast. Hervé Vinciguerra semblait très ouvert, il voulait développer cette partie de soutien aux lanceurs d’alerte, et ils ont commencé à parler des enquêtes qu’on pourrait faire. Renahy poussait Denis Robert est l'auteur de nombreux livres sur la finance internationale. © DR Vinciguerra à développer, il abondait dans son sens. » Et c’est cette proposition que le journaliste présente Questionné sur ces rendez-vous avec la future équipe à la future équipe de Blast, lors d’une réunion de Blast, Vinciguerra conteste un quelconque objectif visio, quelques jours plus tard, vers le 15 décembre.
Details
-
File Typepdf
-
Upload Time-
-
Content LanguagesEnglish
-
Upload UserAnonymous/Not logged-in
-
File Pages5 Page
-
File Size-