Supplément à La Libre Belgique - N°326 - Semaine du 16 au 22 septembre 2016 DE LEYE Salon Malgré les “affaires”, la Foire des Antiquaires fut une belle réussite. pp. 10-11 Salle de vente Quelques surprises émergent chez Rops, à Namur pp. 14-15 Expo en vue Georges Bru demeure singulier, captivant, féroce même. pp. 4-5 L’ÂME DE LA PEINTURE pp.2-3 ©PHOTO PHILIPPE D. COURTESY JABLONKA MARUANI MERCIER GALLERY © S.A. IPM 2016. Toute représentation ou reproduction, même partielle, de la présente publication, sous quelque forme que ce soit, est interdite sans autorisation préalable et écrite de l'éditeur ou de ses ayants droit. 2 L'actu SEMAINE DU 16 AU 22 SEPTEMBRE 2016 ARTS LIBRE Commentaire l Expo en vue Exploit sportif ou artistique ? Francesco Clemente célèbre la vie en peinture Par Claude Lorent Fin de ce mois se tiendra au Mac de Lyon une nouvelle version de l’exposi­ tion des “actions et performances” de Jan Fabre, expo qui fut montrée initia­ lement à Rome puis au Muhka (lire LLB du 27.04.15) à Anvers. Jan Fabre, on le sait, est un artiste pluri­ disciplinaire qui aime donner de sa personne sous diverses formes et dont l’œuvre se développe pour part dans l’action théâtrale. Les actions, les per­ formances, les chorégraphies et autres spectacles qu’il a réalisés personnelle­ ment ou mis en scène ont franchi à très bon escient bien des limites, bien des tabous et ont porté leurs fruits bénéfi­ ques. Très fréquemment, l’artiste s’est physi­ quement mis en danger dans des épreuves performatives qui l’ont con­ duit aux limites extrêmes de ses capaci­ tés. Il faut pour accomplir cela une force mentale pour le moins aussi impor­ tante que la résistance physique, et une volonté sans borne. Incontestable. A l’occasion de son exposition “Stig­ ©PHOTO PHILIPPE D. COURTESY JABLONKA MARUANI MERCIER GALLERY mata” à Lyon, l’artiste anversois dont la réputation internationale le place à juste titre parmi les artistes les plus en vue de son temps, annonce la réalisa­ h Pour l’inauguration de la nouvelle et splendide galerie bruxelloise, tion d’une nouvelle performance du­ rant laquelle il va à nouveau pouvoir se Jablonka Maruani Mercier ont invité l’artiste italien, dépasser, comme on dit en langage pour un premier solo remarquable en Belgique. sportif. Sous le regard de trois cham­ pions cyclistes, Eddy Merckx, Raymond Poulidor et Bernard Thévenet, au vélo­ FIGURE CLÉ DE LA TRANS­AVANT­GARDE ITA­ sociée à la mort alors que la peinture est vivante. drome du Parc de la Tête d’Or, il va LIENNE dont il fut l’un des fondateurs en 1980, S’il y a une âme dans la personne, alors, il y en aura “tenter de ne pas battre le record du Francesco Clemente a très rapidement acquis une dans la peinture !”. monde de l’heure établi par Eddy Merckx une reconnaissance artistique internationale et Ces peintures ne célèbrent pas les personnes à Mexico en 197 (ou comment rester un reste aujourd’hui l’un de ces artistes influents comme le ferait une photo. L’artiste a privilégié nain au pays des géants)”. dont chaque exposition est attendue et considé­ le visage et particulièrement le regard dans une Prudence, le clin d’œil est de la partie ! rée avec la plus grande attention. pose un peu hiératique qui donne une impres­ En sortie de secours. Celle qu’il présente en ce moment à Bruxelles, sion d’être dans une intemporalité et dans une Le spectacle sera grandiose avec une comporte trois volets et se consacre exclusive­ beauté décantée des canons de la mode. Une foule de supporters, des commentaires ment à l’humain ce qui ne surprendra point car beauté qui traverse le temps sans s’altérer. Une style sportif, 2000 drapeaux, retrans­ c’est chez lui une priorité. Dès ses premières beauté reflet d’une intériorité. mission sur écran géant… Et nul doute œuvres, des dessins, au début des années sep­ que l’artiste qui, nous dit­on s’entraîne, tante, tournant le dos à l’abstraction, au mini­ Submergé par la vague s’y donnera à fond. Thierry Raspail, malisme et aux expressions conceptuelles, il re­ “Dans cette série intitulée “Making Love in a l’excellent directeur du musée de Lyon noue d’emblée avec les grands thèmes, avec les Fleeting World” (NdlR : faire l’amour dans un parle “d’incarnation poétique, artistique traditions, avec la figuration. Une ligne dont il monde flottant/aquatique), je souhaitais expri­ (où l’humour et la tragique s’unissent), de ne s’est jamais détourné y joignant très rapide­ mer mon attachement au travail de Katsushika quête des limites”. ment les accents d’autres cultures, en particu­ Hokusai et introduire sa célèbre vague dans mon Alors, performance artistique, faux lier de l’Inde où il se rend déjà en 1973. Ses thé­ propre travail. Quant à la sexualité, elle est cons­ exploit sportif (pour rire), spectacle de matiques privilégiées portent sur la spiritualité, tamment dans mon œuvre car le sexe, partout, est parodie, divertissement, caricature ? le corps humain, la femme et la sexualité. la grande métaphore de la spiritualité. Pour moi, la Voire pipolisation ? La question est part sexuelle et la part spirituelle sont intimement posée. Le label muséal et la réputation Surprenante commande soudées. Dans cette optique, je porte un grand inté­ de l’artiste assurent l’inscription dans L’exposition s’ouvre sur une série de portraits, rêt à l’hindouisme et à la tradition tantrique qui les annales de l’art. Est­ce suffisant ? présentés en public pour la première fois, exé­ inclut la transformation de l’être par le pouvoir du Marcel Duchamp n’a­t­il pas dit : “C’est cution d’une commande passée par le célèbre plaisir”. le regardeur qui fait l’œuvre”. Donc nous. magazine “Harper’s Bazaar” qui a proposé à Cle­ En choisissant de travailler à l’aquarelle dans Et donc la réponse est… mente de réaliser le portrait de six tops modèles ces figures de relations sexuelles, Clemente a in­ de six générations différentes. Habituées aux timement associé la fluidité à la thématique, la séances photographiques, ces femmes ont dû douceur aussi de la vague enveloppante. Et, par poser, seules, sans apparat, dans l’atelier. les couleurs lumineuses, une sorte de tendresse “Je ne crois pas en l’objectivité, soit­elle photogra­ heureuse se répand et se transforme en pures phique, déclare l’artiste, la photo est pour moi as­ émotions. © S.A. IPM 2016. Toute représentation ou reproduction, même partielle, de la présente publication, sous quelque forme que ce soit, est interdite sans autorisation préalable et écrite de l'éditeur ou de ses ayants droit. SEMAINE DU 16 AU 22 SEPTEMBRE 2016 ARTS LIBRE L'actu 3 l Expo en vue Francesco Clemente célèbre la vie en peinture Dans les espaces blancs et lumineux de la nouvelle galerie JMM, trois portraits de “Models”, de gauche à droite : Iman, Lauren Hutton et Anna Ewers, huiles sur toile, 152 x 72 cm, 2015, Francesco Clemente. Francesco Clemente “Making Love in a Flee- ting World #5”, 2015, aquarelle sur papier, 45.72 x 60.96 cm. Francesco Clemente, “Talismans #7”, 2016, aquarelle sur papier, 113,5 x 61 cm. Bio express Né à Naples en Italie, Francesco Clemente entreprend des études d’archi- tecture avant de bifurquer vers le dessin. Première expo personnelle en 1971. Se rend avec Alighiero Boetti en Afgha- nistan en 1972. Premier séjour en Inde en 1973. Co-initiateur de la trans-avant-garde en 1980. S’installe à New York en 1981 et tra- vaille notamment avec Allen Ginsberg et Jean-Michel Basquiat. Œuvres dans les collections des principaux musées européens et américains. Il expose actuellement à New York, à Beijing, à Alba (Italie) et à Sydney. Il vit et travaille à New York, New Mexico et à Varanasi (Inde). ©PHOTO PHILIPPE D. COURTESY JABLONKA MARUANI MERCIER GALLERY “J’ai toujours recherché à créer mon propre univers narratif. On estime souvent que mon art n’est pas politique parce que je ne me situe pas dans le ©PHOTO PHILIPPE D. COURTESY JABLONKA MARUANI MERCIER GALLERY Infos pratiques combat, mais il l’est parce qu’au contraire, je suis Célébrer la fertilité Traités également à l’aquarelle mais avec da­ “Models, Making Love dans la non-violence !” vantage de densité, les corps féminins anony­ in a Fleeting World, mes de la troisième série d’œuvres tiennent à la Talismans”. Francesco fois d’une forme de primitivisme artistique, de Clemente à la Jablonka “Mon Amérique est lieu très spirituel, c’est celle de déité iconique et d’une présence charnelle. Là Maruani Mercier Gallery, e non plus, le temps n’a pas de prise. C’est la vie 430 av Louise, 1000 Ginsberg, des poètes et philosophes du 19 siècle, les qui triomphe dans une sorte d’éternité dont Bruxelles. Jusqu’au l’expression artistique a le secret. Et la partici­ 20 octobre. Du lundi au Ralph Waldo Emerson et Henry David Thoreau. Ce pation des artisans indiens qui ont placé un ta­ samedi de 11h à 18h. lisman pour fleurir le sexe ajoute, tout en ame­ Publication. Catalogue, n’est pas celle de Trump.” nant le mystère du sens, la part spirituelle à ce ill. coul., textes (ang.) de qui est un hymne à la femme et à la fertilité uni­ Dieter Buchhart et de G. Francesco Clemente verselle. Des œuvres d’une beauté envahissante. Roger Denson. Éd JMM Claude Lorent Gallery. BRUXELLES, 2016 © S.A. IPM 2016. Toute représentation ou reproduction, même partielle, de la présente publication, sous quelque forme que ce soit, est interdite sans autorisation préalable et écrite de l'éditeur ou de ses ayants droit.