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MÉMOIRE DU BURKINA FASO MEMORIAL OF BURKINA FASO 22 LISTE DES SIGLES ET ABRÉVIATIONS 1 AFDI Annuaire français de droit international AJIL American Journal of International Law Ann. CDI Annuaire de la Commission de droit international Ann. de DI Annuario de Derecho Internacional AOF Afrique occidentale française BRGM Bureau de recherches géologiques et minières Bull. off. des col. Bulletin officiel des colonies BYBIL British Year Book of International Law Cass. civ. Cour de cassation française (chambre civile) CE Conseil d’Etat français CIJ Cour internationale de Justice C.I.J. Mémoires CIJ Mémoires, plaidoiries et documents C.I.J. Recueil CIJ Recueil des arrêts, avis consultatifs et ordonnances CPA Cour permanente d’arbitrage CPJI Cour permanente de Justice internationale DP Dalloz périodique IBS U.S. Department of State, International Boundary Studies ICLQ International and Comparative Law Quarterly IGN(F) Institut géographique national (France) Indian Jl.I.L. Indian Journal of International Law JOAOF Journal officiel de l’Afrique occidentale française JORF Journal officiel de la République française Leb. Recueil des arrêts du Conseil d’Etat (Recueil Lebon) Mémoires voir C.I.J. Mémoires OUA Organisation de l’unité africaine RCADI Recueil des cours de l’Académie de droit international de La Haye Rec. voir C.I.J. Recueil RGDIP Revue générale de droit international public RSA Recueil des sentences arbitrales (Nations Unies) UDV-RDA Union démocratique voltaïque (rassemblement démocratique africain) UMOA Union monétaire de l’ouest africain 1 Dans le présent mémoire, le nom «Haute-Volta» a été utilisé lorsque étaient en cause des faits antérieurs au 4 août 1984. Il va de soi que les expressions «Haute-Volta» et «Burkina Faso» et les adjectifs «voltaïque» et «burkinabé» sont équivalents. [4-5] 23 INTRODUCTION 1. Le 16 septembre 1983, le Burkina Faso et la République du Mali décidaient de soumettre à une Chambre de la Cour internationale de Justice le différend fron- talier entre les deux états. Le compromis était notifié à la Cour le 20 octobre 1983. 2. Le Burkina Faso a l’honneur de soumettre à la Chambre de la Cour le présent mémoire. Il fait confiance à la justice internationale et au règlement paci- fique des différends internationaux fondé sur le droit international public. 3. Le compromis a défini ainsi la question posée à la Chambre : « Article I Objet du litige « 1. La question posée à la Chambre de la Cour internationale de Justice constituée conformément à l’article II ci-après est la suivante : Quel est le tracé de la frontière entre la République de Haute-Volta et la République du Mali dans la zone contestée telle qu’elle est définie ci- après ? 2. La zone contestée est constituée par une bande de territoire qui s’étend du secteur Koro (Mali), Djibo (Haute-Volta) jusques et y compris la région du Béli). » 4. Les Parties ont affirmé leur désir : « de parvenir dans les meilleurs délais à un règlement du différend frontalier qui les oppose, fondé notamment sur le respect du principe de l’intangibilité des frontières héritées de la colonisation, et de procéder à la délimitation et à la démarcation définitives de leur frontière ». 5. Le Burkina Faso constate à regret l’échec des tentatives de négociation et de médiation, menées notamment par la sous-commission juridique de la commission de médiation de l’Organisation de l’unité africaine en vue d’obtenir un accord équitable. Il en tire la conclusion que pour parvenir à un règlement définitif du différend territorial, la Cour internationale de Justice, dont la mission est de se prononcer sur la seule base du droit, doit décider de la délimitation entre les deux Etats dans la zone contestée par application des règles de droit international public et notamment du respect de l’intangibilité des frontières héritées de la colonisa- tion. Conformément à l’article IV du compromis, il accepte par avance comme définitif et obligatoire pour lui-même l’arrêt de la Chambre ainsi rendu en appli- cation du présent compromis avec l’autorité de chose jugée qui s’attache aux déci- sions rendues sur la base du droit. 6. Le Burkina Faso s’attachera d’abord à la présentation générale de la fron- tière burkinabé-malienne (chap. I). Puis il retracera le développement du différend entre les deux Etats (chap. II). Il exposera les principes fondamentaux de délimi- tation de la frontière (chap. III), les titres burkinabés (chap. IV) et les acquiesce- ments maliens (chap. V). Enfin, il analysera les points de divergence quant au tracé de la frontière dans la zone revendiquée par le Mali (chap. VI). 7. Le mémoire comprend en annexes une consultation du président Jiménez de Aréchaga (annexe I), les photocopies ou copies conformes des documents cités (annexe II) et un petit atlas préparé par l’ingénieur général cartographe Gateaud (annexe III). Il est complété par le jeu de cartes et atlas déposé en un exemplaire unique auprès du Greffe de la Cour. 24 [6-7] CHAPITRE I PRÉSENTATION GÉNÉRALE DE LA FRONTIÈRE BURKINABÉ-MALIENNE (Aspects historiques et géographiques) 1. Le Burkina Faso et la République du Mali ont une frontière commune de 1380 kilomètres, dont près de 900 ont pu être délimités d’un commun accord de 1964 à 1968. La revendication malienne concerne donc environ 489 kilomètres situés à l’est et concernant, du côté burkinabé, les provinces de l’Oudalan (dont le chef-lieu est Gorom-Gorom) et de Soum (dont le chef-lieu est Djibo), et, du côté malien, les cercles de Douentza et d’Ansongo. 2. Le conflit de délimitation qui oppose les deux Etats dans cette zone a des racines historiques qui sont indissociables des caractères géographiques de la région. Section 1. Evolution historique 3. Comme tous les Etats africains issus de la décolonisation, et, singulièrement, comme son voisin du nord, le Burkina Faso a hérité de frontières entièrement arti- ficielles tracées arbitrairement par le colonisateur en fonction du seul souci d’un contrôle aussi poussé que possible des régions conquises et occupées et sans qu’il soit guère tenu compte de l’organisation politique et sociale préexistante. 4. Ainsi, après avoir constaté l’achèvement des conquêtes coloniales en Afrique de l’Ouest, le ministre français des colonies écrivait, dans un rapport au prési- dent de la République en date du 17 octobre 1899 : « Aucun obstacle de fait, aucun intérêt supérieur n’empêche dès lors de faire prévaloir dans les possessions françaises de l’Afrique occidentale le principe fondamentale de notre organisation politique. » (Annexe II-4.) 5. De ce fait, des régions entières, historiquement liées, géographiquement et ethniquement homogènes, et économiquement complémentaires, se sont trouvées dépecées et réparties soit entre des empires coloniaux rivaux, soit entre différentes entités administratives au sein d’un même empire colonial, la puissance adminis- trante n’hésitant pas à modifier les limites de celles-ci en fonction de nécessités purement conjoncturelles. 6. L’histoire coloniale de la Haute-Volta et du Soudan français illustre ce phénomène de manière presque caricaturale. Et cela est tout particulièrement vrai si l’on prend en considération l’évolution des cercles voltaïques de Ouahigouya et de Dori. PAR. 1. APERÇU DE L’HISTOIRE COLONIALE DU SOUDAN FRANÇAIS ET DE LA HAUTE-VOLTA 7. Intégrées l’une et l’autre dans l’Afrique occidentale française créée le 16 juin 1895 (annexe II-3), la Haute-Volta et le Soudan français constituent des [7-9] MÉMOIRE DU BURKINA FASO 25 exemples remarquables de l’arbitraire qui a présidé à l’organisation administrative de l’empire colonial français. 8. Les premiers contacts entre la France et la côte occidentale de l’Afrique furent de nature commerciale. Dès le début du XVIIe siècle, des marchands de Dieppe et de Rouen fondèrent le comptoir de Saint-Louis du Sénégal. Les établis- sements français connurent un important développement sous le Second Empire, par l’action du général Faidherbe, nommé en 1854 gouverneur du Sénégal, qui avait pour tâche d’entreprendre la conquête systématique du pays. Après la guerre de 1870, le général Brière de l’Isle poursuivit la colonisation en direction du Niger. En 1880, le général Galliéni fonda le poste de Bamako, et le colonel Borgnis-Desbordes entreprit de relier les vallées du Haut-Sénégal et du Haut- Niger (P. Dareste, Traité de droit colonial, Paris, t. I, p. 20). Les troupes françaises rencontrèrent alors une vive résistance des chefs locaux, mais réussirent à occuper Tombouctou en décembre 1893, et se rendirent maîtres de ce qui devint l’Afrique occidentale française. 9. L’organisation territoriale interne suivit le déroulement des conquêtes. Le Sénégal fut divisé par deux décrets des 18 août 1890 et 27 août 1892, donnant naissance au Soudan français, qui devenait ainsi une colonie indépendante. Un décret du 17 octobre 1899 (annexe II-4) la supprima, et répartit son territoire entre le Sénégal, la Guinée, la Côte d’Ivoire et le Dahomey. Le même décret créait deux territoires militaires. Un troisième territoire militaire était constitué par le décret du 20 décembre 1900. Le décret du 1er octobre 1902 (annexe II-6) réorganisant le gouvernement général de l’Afrique occidentale française groupe les pays de protectorat dépendant du Sénégal et les territoires du Haut-Sénégal et du Moyen- Niger en une unité administrative et financière nouvelle, portant le nom de terri- toires de la Sénégambie et du Niger. Par décret du 18 octobre 1904, naissait la colonie du Haut-Sénégal-Niger, formée des anciens territoires du Haut-Sénégal et du Moyen-Niger, ainsi que du troisième territoire militaire (annexe II-9). 10. Le Soudan français et la Haute-Volta en sont issus. A. Le Soudan français 11. L’histoire de cette colonie, ancêtre de l’actuel Mali, a été retracée, de manière concise, dans le rapport annuel du gouverneur du Soudan pour l’année 1949 : « Le Soudan français a acquis son autonomie par le décret du 18 août 1890 (création d’un budget spécial distinct de celui du Sénégal) et par le décret du 27 août 1892, qui confère au commandant supérieur chargé de l’adminis- tration de ce territoire, le droit de correspondre directement avec les sous- secrétaires d’Etat aux colonies.

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