Sonances, octobre 1984 Konigskin d er, l’autre chef -d’œuvre de Hump er dinck Marc-André Roberge L’histoire de l’opéra allemand conte de fées). Dans la première, la fin de 1894, au moment où après Wagner est un sujet sur on peut retenir Die Abreise (1898) Heinrich Porges (1837-1900), un lequel la musicologie moderne du pianiste compositeur Eugen ami de Humperdinck, demande à s’est encore très peu arrêtée, pré- d’Albert (1864-1932), dont Tie- celui-ci d’écrire une musique de férant expliquer son évolution en fland (1903) allait devenir l’opéra scène pour une pièce de sa fille, se basant à peu près uniquement du XXe siècle le plus joué sur les Elsa Bernstein-Porges (1866- sur les œuvres les plus connues scènes allemandes pendant une 1949), plus connue sous le pseu- et en se limitant pour les autres trentaine d’années’, et, dans la donyme d’Ernst Rosmer. L’auteur aux opinions exprimées par des seconde, Der Evangelimann lui ayant refusé la permission contemporains des compositeurs (1898) de Wilhelm Kienzl d’utiliser son texte comme libretto visés ou encore à un bref examen (1857-1941). L’exemple le plus pour un opéra, Humperdinck des partitions, ce au-delà de quoi célèbre de la troisième catégorie choisit de le traiter sous forme de il est malheureusement difficile est sans aucun doute Hansel und mélodrame. I1 compose donc les d’aller étant donné que la plupart Gretel (1893) d’Engelbert Hum- introductions aux trois actes, met des œuvres ont complètement perdinck (1854-1921), œuvre en musique les passages qui, dans disparu du répertoire. On s’en- pour laquelle on a accueilli le le texte, sont réellement destinés à tend toutefois pour dire que la compositeur comme une sorte de être chantés, mais utilise pour réforme effectuée par Wagner à messie. Parmi les autres opéras de d’autres un nouveau style inter- partir de 1850 a incité maints Humperdinck, seul Konigskinder médiaire entre le chant et la compositeurs - et ce, surtout vers (1910) a tenu la scène d’une façon parole qu’on appellera Sprechs- la fin du siècle - à l’imiter plus régulière pendant longtemps pour tirnrne à partir de Schonberg3 ; le ou moins servilement. I1 importe être ensuite oublié. I1 s’agit là de simple dialogue parlé, enfin, est cependant de dire, à la décharge l’une des nombreuses injustices retenu pour la majeure partie de la de ces compositeurs, que les inno- de l’histoire de la musique, car cet pièce4. Ce n’est qu’en 1907 que vations de Wagner ne pouvaient opéra est d’une qualité égale Humperdinck put, l’auteur ayant faire autrement que de créer un sinon supérieure au précédent. I1 levé son objection, remanier le nouveau style de composition ; semble donc à propos de mieux le mélodrame en opéra5. c’est l’application plus ou moins faire connaître afin qu’il puisse un originale des techniques wagné- jour prendre dans le répertoire la L’œuvre, dans sa version ini- riennes qui permet de placer un place qui lui revient’. tiale, a été créée à Munich le 23 compositeur avant un autIe. janvier 1897. Bien qu’elle ait été Parmi les nombreuses œuvres O accueillie avec enthousiasme, elle modelées sur les drames musi- n’a pas réussi à se maintenir au caux de Wagner, on ne mention- Tout comme Hansel und Gretel, répertoire6. Elle a cependant nera ici que la tétralogie Die qui a d’abord existé sous la forme donné lieu à une controverse dans homerische Welt (1896-1903) d’une mise en musique de cer- certains périodiques musicaux d’August Bungert (1845-1915), tains extraits d’une pièce écrite sur les mérites du mélodrame et a probablement l’exemple le plus par la sœur de Humperdinck, en outre mené à la publication audacieux. Adelheid Wette, et destinée à être d’études sur le sujet7. La version jouée par les enfants de celle-ci remaniée, par contre, a obtenu I1 était nécessaire, pour que pour ensuite devenir un véritable lors de sa création au Metropoli- puisse être rétabli l’équilibre opéra, Konigskinder (Les Enfants tan Opera de New York le 28 rompu par les nombreux opéras royaux) a été initialement conçu décembre 1910 un accueil triom- d’inspiration wagnérienne accu- comme un mélodrame, c’est-à- phal. La piemière allemande, sée, qu’apparaissent des œuvres dire une présentation scénique donnée à Berlin le 14 janvier capables de former un contraste. située à mi-chemin entre le théâ- 1911, a été reçue avec plus de Elles peuvent être groupées en tre et l’opéra et qui consiste en un réserve par la critique. Malgré trois catégories : opéra comique, texte parlé soutenu par un accom- tout, et contrairement au Metro- Volksoper (opéra populaire) et pagnement. L’histoire de la coln- politan où elle n’a été jouée que Mürchenoper (opéra basé sur un position de l’œuvre commence à trente fois en quatre saisons con- 2 Sonances, octobre 1984 sécutives, l’œuvre figurait La voix du Vielleux (Spiel- chasse les deux enfants à coups de encore, plus de quinze ans après mann) se fait alors entendre de la bâton et de pierre. sa création, au treizième rang forêt. I1 est accompagné du Bûche- dans la liste des œuvres du XX“ ron (Holzhacker) et du Marchand Le troisième et dernier acte se siècle les plus jouées sur les scè- de balais (Besenbinder). Tous déroule, comme le premier, près nes allemandesa. Les nombreuses trois ont été délégués en ambas- de la hutte de la Sorcière. L’été a transcriptions - pour piano à sade auprès de la Sorcière (Hexe) fait place à l’hiver, et la hutte a été quatre mains, pour violon (ou par les citoyens de Hellabrun qui, gravement endommagée. Le Viel- flûte, ou encore harmonium) et voulant mettre fin à la trop grande leux, après avoir été libéré de pri- piano, pour orchestre de cavale- liberté qui règne depuis la mort de son, s’y est établi pour attendre la rie, d’infanterie ou de salon - qui leur roi, sont à la recherche d’un mort. Le Bûcheron, le Marchand ont été publiées de certains successeur. Elle leur répond que de balais et les enfants de Hella- extraits témoignent d’ailleurs de quiconque franchira les portes de brun viennent lui demander de sa popularité. la ville sur le coup de midi sera revenir égayer la ville avec sa l’élu. Le Vielleux, ayant aperçu la musique. Celui-ci refuse mais Konigskinder, comme plusieurs Gardeuse d’oies dans la hutte, accepte cependant de partir avec autres opéras de valeur, n’a mal- décide de rester et renvoie les les enfants à la recherche du cou- heureusement pas été repris d’une deux autres se partager la récom- ple royal. façon régulière après 1945. 11 ne pense promise. Elle lui fait part de semble d’ailleurs y avoir eu sa rencontre avec le Fils du roi et Pendant ce temps, le Fils du roi depuis ce temps que quatre pro: annonce au Vielleux qu’elle veut et la Gardeuse d’oies, qui ont erré ductions. Cependant, grâce à l’en- partir avec lui à sa recherche. I1 longtemps dans les bois, arrivent registrement complet - le pre- lui demande alors de rompre elle- dans la clairière. Ils frappent à la mier jamais réalisé - mis sur le même le charme qui la retient. porte de la hutte pour mendier de marché en 1977, il est maintenant Elevant vers le ciel la couronne la nourriture, ce que leur refuse le possible de comprendre pourquoi que lui avait laissée le Fils du roi, Bûcheron qui, avec son compa- l’œuvre a déjà été très appreciée elle implore l’esprit de ses gnon, s’était abrité à l’intérieur. et pourrait l’être encoreg. Etant parents. La condition exprimée Constatant la faiblesse croissante donné que le livret accompagnant plus tôt par celui-ci se réalise de la Gardeuse d’oies, le Fils du l’enregistrement ne contient alors et, libérée du sort, elle s’en- roi tente à nouveau sa chance en qu’un essai d’introduction et le fuit, suivie de ses oies, avec le offrant aux occupants sa couronne texte mais aucun résumé de l’in- Vielleux. en échange. Ceux-ci lui donnent trigue, il convient d’en présenter alors un pain qu’ils trouvent dans un au lecteur. Le deuxième acte a lieu sur la un coffre. Les enfants se le parta- place publique de Hellabrun, où gent donc, ignorant qu’il s’agit O tous se préparent à accueillir le d’un pain empoisonné qu’avait nouveau souverain. Le Fils du roi préparé la Gardeuse d’oies au pre- arrive à l’auberge, où la Vachère mier acte SOUS les ordres de la Sor- (Stallmagd) et la Fille de l’hôte cière. Le vœu qu’elle avait pro- Le premier acte se déroule dans (Wirtstochter) se querellent. noncé avant de le lui remettre une clairière du Hellawald, près Après le départ de la première, la (eQui s’en nourrit verra s’accom- de la hutte d’une sorcière qui seconde tente, mais en vain, de plir les merveilles dont il rêve. ))) garde sous l’emprise d’un sort la s’attirer les faveurs du Fils du roi, se réalise cependant et le couple Gardeuse d’oies (Gansemagd)’O. dont les pensées sont plutôt tour- royal s’éteint tranquillement en Alors que celle-ci se mire dans nées vers la Gardeuse d’oies. rêvant de bonheur. une fontaine, arrive le Fils du roi Resté seul sur la scène, celui-ci (Konigssohn) qui, fatigué de la vie songe un instant à retourner À son retour, le Vielleux décou- de château, s’est enfui du palais.
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