
GAVRAY 1940 à 1944 Robert Pouchin, à l’aide des notes personnelles d’Antoinette Cardinal nous fait revivre l’occupation et la libération de Gavray. Manche Libre d’octobre à décembre 1984. De Juin 1940 à 1944 Occupation allemande La coexistence se fit au mieux avec les Allemands installés dans la « Kommemdantur » au Clos Michel , les écoles furent réquisitionnées pour loger les troupes, la classe se faisant ensuite dans différentes maisons chez les particuliers. Peu d’événements majeurs nous ont été relatés pour la période des quatre années de l’occupation, sinon un fait important, mais ne concernant pas la population, c’est l’odyssée malheureuse d’ un jeune soldat polonais de 17 ans, incorporé de force dans l’armée allemande qui voulait revoir sa mère. Il déserta, fut retrouvé, jugé et condamné à mort après avoir été dégradé, et c’est en cortège dans le bourg, musique en tête, le pauvre condamné alla au lieu de son supplice portant sur son épaule le poteau devant lequel attaché il fut fusillé à la « Parquerie ». Le corps fut mis dans un sac et, sur une charrette, amené au cimetière où il fut enterré. Émile Jamet racontait, avec son accent roulant les R, avoir assisté à la Baleine à une scène identique. Le jeune soldat était parti rejoindre sa fiancée sans permission. A son retour il fut déclaré déserteur et condamné à mort. Toute la troupe en garnison à Saint-Lo et Granville, rangée comme sur une Place d’Armes, était rassemblée dans un champ de la « Blanquerie » ou à proximité. Çà ne rigolait pas avec la discipline dans l’armée allemande. Peut-être s’agit-il du même événement ? Émile venait avec son fils scier le bois de chauffage de la maison au Trouet, c’était un réel plaisir de l’entendre causer. Ce jour de corvée, la veille, il était allé ramasser son foin, à l’entrée de son champ, il était tombé sur une grosse Mercedes stationnée, une famille allemande pique-niquait.Il descendit de son tracteur, ils bavardèrent, un jeune parlant français lui présenta un vieux monsieur: «Mon père ! » « Il nous fait découvrir votre belle région, il connaît les chemins , les bois , le champ où nous sommes, il était là pendant la guerre en garnison à Granville ». Les Allemands venaient fréquemment faire des manœuvres, les bois,les chemins creux étaient propices à de tels entraînements. « Je me souvenais de cette période là...en particulier l’exécution du jeune soldat déserteur ». Le vieux Allemand s’exclame : « J’y étais ! » et dit sa compassion pour son camarade perdu… Émile se trouvait là à observer une de ses manœuvres. Les jeunes soldats avaient transformé un chartil en « char d‘assaut » ils simulaient une attaque, les fantassins abrités derrière l’engin avançaient prudemment, lorsque le chartil chargé de foin et de fagots pris de la vitesse dans la descente. Les jeunes maîtrisèrent mal le poids du chartil, ils laissèrent filer le «char d’assaut » dans le fossé et tout bascula dans le pré en contre-bas. Une grande rigolade s’ensuivit avec un coup de gueule des gradés. Émile se bidonnait derrière sa haie. L’Allemand se souvenait parfaitement de cette « manœuvre » incontrôlée, ils étaient jeunes ! Ils burent ensemble un vin de Moselle sorti de la glacière. Comme événement important l’auteur de ce récit aurait pu évoquer la « rafle » d’une Juive par les Gendarmes de Gavray, Binda Mordoh. Faut-il croire qu’à cette époque là, les Juifs, c’était sans importance ? 1944 de Juin à septembre LA LIBÉRATION Lundi 5 juin : Une certaine animation règne parmi les troupes cantonnées à Gavray. Mardi 6 juin : Dans la nuit du lundi au mardi de nombreux avions passent, vers quatre heures, 4 bombes tombent, deux prés du lavoir deux dans les champs face à la maison Cianca, route de Coutances, la route est coupée, nous nous cachons derrière les balles de chiffons dans le garage, transis de peur. Les parents de Mlle Le Cardinal étaient chiffonniers. Dés 6 heures de nombreux avions sillonnent le ciel, volent parfois très bas, nous entendons des bombardements dans le lointain. C’est un va-et-vient intensif des soldats allemands . Des véhicules circulent en nombre, des sentinelles sont à tous les carrefours, la circulation est interdite et enfin les premiers renseignements nous parviennent..C’est le débarquement ! La journée se passe nous sommes très anxieux...puis nous avons la confirmation que les Alliés sont débarqués sur nos côtes...Cette information nous est apportée par ceux qui avaient conservé leur poste radio. Ils nous apprennent la déclaration du Général de Gaulle, c’est la joie ! Mercredi 7 juin : Nous avons passé la nuit dans la remise , prêt à partir avec un « petit bagage »...dans l’après-midi, des séminaristes arrivent de Coutances, ils nous apprennent que Coutances est détruite et brûle, la cathédrale est encore debout. Nous apprenons également la destruction de la ville de Saint-Lô, il y a de nombreux morts , nous n’osons pas y croire. Les habitants du bourg se réfugient à la campagne. Nous partons au village de la Sayère avec tous les gens du quartier , les famille Martial Lebaillay, Jean van Mierlo, Martin, Guesnon, Curec, Villain, Mme Menard et ses pots de confitures, les habitants de la place de la Mairie partent au village de Saint-André et Amiot, ce sont les familles Léger, Sevestre, Boisyvon….D’autres, route de Coutances, chez M. Vibert, d’autres vers la route de Villedieu, les Mesnil. Mais les Allemands à 17 heures interdisent de circuler, M. Van Mierlo passera la nuit dans une tranchée chez M. Eudes au Manoir Saint-Jean. Ce sera une nuit mouvementée...dans le lointain des lueurs d’incendie...probablement Coutances qui brûle. Jeudi 8 juin : Bombardement de Cérences, la minoterie est détruite. Restriction sur le pain, 200 grammes par personne. Les avions tournent inlassablement la canonnade est incessante. Le Curé Allain au cours d’ une petite cérémonie à l’église, met ses paroissiens sous la protection de la sainte Vierge et forme le vœu avec eux d’aller, en pèlerinage, à pied à Pontmain. Il s’adresse en ses termes: "Je n'ai pas besoin de vous dire, mes frères, combien je partage en ce moment toutes vos craintes et vos appréhensions. Je demande à Dieu avec insistance, qu'elles ne deviennent pas de tristes réalités. Les avions avec leurs bombes et leur mitraille ne peuvent rien contre nous si Dieu a décidé d'être avec nous et de nous protéger. Demandons-lui de nous accorder cette protection et méritons la par un regret sincère de nos fautes passées et la promesse non moins sincère d'une vie meilleure. Plusieurs d'entre vous sont venus me suggérer l'idée de faire, au nom de la paroisse, un vœu en l'honneur de Notre Dame de Pontmain. Leur désir a été devancé. Dès mardi matin au cours de la messe que j'ai célébré à vos intentions, j'ai promis que si la Sainte Vierge nous assistait et nous protégeait, nous irions en grand nombre, après la guerre, la remercier en son sanctuaire de Pontmain et que nous élèverions au carrefour d'une de nos routes un calvaire en son honneur". Vendredi 9 juin : Le Curé Allain rend visite à ses paroissiens. La grange de Mr Dupard, route de Ver, est transformée en chapelle où nous assistons à la messe. Il n’est point prudent d’aller dans l’église ni dans le bourg. Samedi 10 juin : C’est le jour du marché il est désert. A 10 heures, des bombes tombent route de Villedieu, Mr Lechevallier, de la Planche est grièvement blessé. Dimanche 11 juin : Des bombardements se multiplient, nous ne pouvons sortir, il semble que le pont est visé Du lundi 12 au vendredi 16 juin : Nombreux mitraillages sur les routes de Coutances et de Villedieu. Des camions d’essence sont touchés et brûlent, les maisons de Léonie Legros, Lenoir et Taureau sont anéanties par le feu. Du village de la Soupière où nous sommes réfugiés , nous apercevons d’immenses brasiers. Ces jour-là sur la route de Saint-Denis le Gast à Hambye un camion d’un marchand de bestiaux imprudent a été pris en chasse par les avions alliés, mitraillé il prit feu à hauteur du village les Mares. Pour mettre fin à la ritournelle des avions ce camion fut tiré à l’abri et poussé dans le marais à l’entrée de la Chasse du manoir de la Colombière. Pendant des années nous avons pu observer sa carcasse dans le roncier… Le dimanche 18 juin : Une messe est dite à la « chapelle Dupard » et à la chapelle sain-André. Des requis de l’entreprise Todt de Cherbourg, beaucoup de Russes, passent avec des voitures à bras, ils restent toute la nuit à l’ancienne gare. Nous aurons quelques jours de répit , moins de bombardements et de mitraillages, beaucoup de passage de troupes, de camions, de tanks...surtout la nuit, toujours des avions...des détonations lointaines. Un calme relatif semble s’installer. La bataille est encore loin, les Alliés avancent lentement autour de Saint-Lo, la résistance allemande est sévère , les combats font rages de toute part. Les Allemands et les Américains s’affrontent dans de terribles combats. L’Hôpital allemand de Hambye est en effervescence les blessés arrivent en nombre, un ballet incessant d’ambulances descendent du front et remontent remplies de munitions. Au village de la Chevallerie chacun observe cette activité intense. Le mardi 20 juin : Albert Pipet « La Trouée de Normandie » note : « Von Choltiz prit le commandement du 84ème Corps succédant au général Ericho Marck, mortellement blessé le 12 juin à Hébécrevon.
Details
-
File Typepdf
-
Upload Time-
-
Content LanguagesEnglish
-
Upload UserAnonymous/Not logged-in
-
File Pages20 Page
-
File Size-