Studiocanal et Tamasa présentent [THE CONSTANT HUSBAND] VERSION RESTAURÉE un film de SIDNEY GILLIAT UK - 1955 - 1H44 SORTIE LE 14 DÉCEMBRE 2016 DISTRIBUTION Tamasa PRESSE 5 rue de Charonne 75011 Paris Frédérique Giezendanner Tel : 01 43 59 01 01 Tel : 06 10 37 16 00 [email protected] [email protected] Dans une chambre, un homme reprend conscience. Frappé d’amnésie, il entreprend, avec l’aide d’un spécialiste, d’exhumer son passé. Mais ce qu’il découvre n’est pas vraiment agréable. Marié à une ravissante et tendre femme, il comprend avec effroi que ce passé est bien trouble et que marié maintes fois, on le recherche activement... pour polygamie ! LE REGARD DE CHARLOTTE GARSON Le miroir brisé de la masculinité Alors que l’Amérique a tricoté pendant les années 1930 et 40 les comédies « de remariage », resserrant les liens d’une institution discréditée à coup de brillantes scènes de ménage où époux et épouses s’éduquent mutuellement, le cinéma britannique d’après-guerre conclut film après film qu’il y aura toujours quelque chose de pourri au royaume matrimonial. Plaçant un amnésique face à ses mariages successifs, Un mari presque fidèle met en scène un Candide qui découvre différents ménages – l’un bourgeois et moderne, le suivant populaire et sentimental – sans y trouver la moindre promesse de bonheur. Le contraste entre les deux côtés de l’Atlantique est frappant : dans La Huitième Femme de Barbe Bleue d’Ernst Lubitsch (1938), Claudette Colbert donne du fil à retordre à Gary Cooper dont la fortune lui a permis d’enchaîner sept mariages avant de lui demander sa main, mais les Anglaises de cette comédie de Sidney Gilliat sortie en 1955 sont toutes prêtes à rempiler avec l’homme qui leur cachait sa sextuple vie. Le nombre des candidates au remariage atteste ici par accumulation d’une puissance sexuelle aux proportions comiques : au Royaume-Uni, la séduction du mâle continue d’opérer, la guerre des sexes à l’américaine n’aura pas lieu. Sérialité et débordement Le programme de mise en scène du célèbre tandem britannique scénariste-réalisateur que composent alors Frank Launder et Sidney Gilliat1 est simple mais efficace : le comique du scénario et du découpage se fonde sur la répétition et l’excès. L’écriture ménage par exemple d’assez longues retrouvailles avec l’épouse de celui que le professeur Llewellyn (Cecil Parker, le major Courtney de Tueur de dames tourné juste après) a identifié comme Charles Hathaway. Mais à peine cette vie bourgeoise est-elle retrouvée (un poste au Ministère, une belle voiture, une jolie femme) que le surgissement de la seconde épouse relance la confusion. Le comique requiert un violent contraste : autant les vêtements et le mobilier de Monica, photographe de mode de son état, étaient contemporains (col et manches relevés, jupe à damiers, bar à cocktails dernier cri, intérieur bleu et jaune), autant l’italianité de la seconde épouse paraît 1 Ici Launder est crédité seulement comme coproducteur mais leur duo est notamment connu comme scénaristes d’Une femme disparaît d’Alfred Hitchcock, 1938. caricaturalement pittoresque. Peu importe qu’elle soit interprétée par une actrice française (Nicole Maurey) et qu’elle porte un nom espagnol (Lola), c’est le sang chaud méditerranéen qui prévaut ici – frères violents, père restaurateur et incorrigiblement sentimental... L’expression « boule de feu » (ball of fire), parfois employée en anglais pour une femme, devient littérale dans un gag visuel : pour son numéro de cirque, l’explosive Lola se transforme chaque soir en boulet de canon. Aussi dépendante de sa famille et de Peter (c’est-à-dire Charles… qu’elle appelle Pietro) que Monica était indépendante de son mari, Lola l’attire sur son lit pour un baiser torride, dans une chambre verrouillée par une poignée défaillante. Monica imposait jusqu’à la fin de l’amnésie de faire chambre à part. A partir de la troisième femme, la répétition se double d’une accélération : pas question de multiplier de manière monotone les épisodes pour composer une série de portraits féminins comme dans Femmes de Cukor (1939). Les visages se succèdent sans souci de caractérisation, et la richesse chromatique du Technicolor insiste sur leur variété. Le moment du procès à l’Old Bailey (la haute cour criminelle de Londres) est le lieu d’une véritable love parade, les « victimes » se succédant à la barre pour confirmer leur amour – un défilé clos dans la surenchère : monsieur X est si irrésistible que l’avocate emperruquée fait office de septième épouse, tout émoustillée qu’elle est par les charmes de son client. Dans cette perspective, la guerre des sexes n’a en effet pas lieu, et Un mari presque fidèle se contente de réitérer l’attirance irrépressible de Rex Harrison sur la gent féminine. Et pourtant… Un film presque moral Pour comprendre en quoi le film est plus complexe sinon franchement féministe, il faut revenir à l’amnésie qui l’inaugure : « Votre esprit a fermé la porte sur votre passé », résume le professeur Llewellyn à son patient interloqué. Pourquoi ? Seule la suite répond : la présence féminine, dans la vie de monsieur X, prend moins l’aspect d’une quête donjuanesque que d’une angoissante invasion. C’est de ce débordement du masculin par le féminin que le film tire son miel comique et sa subreptice subversion. L’amnésie serait un dernier recours devant l’afflux féminin (au procès comme à la sortie de prison, les épouses sont cadrées « en grappes »). La menace rappelle Buster Keaton poursuivi par ses Fiancées en folie (Seven Chances, 1925) et le déferlement de lycéennes et de professeures dans le pensionnat de garçons de The Happiest Days of Your Life, réalisé en 1950 par le coproducteur d’Un mari presque fidèle, Frank Launder2. Pour monsieur X, épouser servirait ainsi davantage à fuir une précédente épouse qu’à faire une nouvelle conquête. Même les murs de la prison ne sauraient bloquer cet assaut puisque le féminin a conquis la corporation des juristes. Scindé entre son passé amoureux et son présent moral, monsieur X, alias Charles, Peter et Bill, trouve en Rex Harrison l’interprète idéal. L’élégant Britannique a joué au théâtre le serial lover Henri VIII dans la pièce Anne des mille jours en 1948 puis dans le téléfilm de 1952The Trial of Anne Boleyn ; or comme le souligne le slogan d’origine d’Un mari presque fidèle, son protagoniste « bat Henri VIII d’une femme… constamment inconstant ! ». Si ses débuts américains en 1946 à la Fox ont confirmé son image de séducteur à l’écran (il joue le fantôme bourru mais amoureux de L’Aventure de Madame Muir de Joseph Mankiewicz en 1947 et le chef d’orchestre jaloux d’Infidèlement vôtrede Preston Sturges en 1948). A la ville, sa réputation de briseur de cœurs vient de mettre un terme à l’aventure américaine (la rumeur veut qu’il ait poussé une actrice au suicide). Surnommé Sexy Rexy par la presse people3, il revient en Angleterre où Sidney Gilliat lui avait déjà offert l’occasion, en 1945, de jouer sur sa réputation d’homme à femmes : dans L’Honorable Monsieur sans gêne (The Rake’s Progress), l’aristocrate Vivian Kenway bazardait ses études à Oxford pour courir le jupon et la dot, faisant fi de toute respectabilité. Dix ans plus tard, l’occasion est belle pour le noceur (rake) de se racheter une conscience, puisque monsieur X semble scandalisé par son propre passé. « Un bigame professionnel ! » s’exclame-t-il atterré. Seul ce dédoublement entre l’homme du passé et celui du présent permet d’expliquer son geste 2 DVD Tamasa. 3 Pour célébrer le centenaire de la naissance de Rex Harrison, le tabloïd anglais Daily Mail n’y va pas de main morte et titre : « He watched a lover die rather than call for help, he drove two women to suicide, meet Rex ‘the rotter’ Harrison » (il regarde mourir sa maîtresse sans appeler au secours, il pousse deux femmes au suicide : voici Rex « sale type » Harrison). (04/04/2008) final, une sorte de suicide par mariage : monter dans la voiture de maître Chesterman, c’est se remettre dans les mains de la Loi et de l’institution. L’homme présent, qui ne se pardonne pas son passé, augmente sa peine de prison d’un retour dans le giron féminin. Ce happy end en demi-teinte relève-t-il d’un retour à l’ordre moral ? En vérité le mal est fait : si le mariage est rétabli comme institution (les épouses gagnent leur procès), il est pulvérisé dans sa dimension romantique. Belote et rebelote : le plan des photographies de mariage abattues comme des cartes à jouer par Charles/Peter/Bill devant le professeur Llewellyn invalide toute possibilité d’amour avec un grand A. Le scénario fuit l’intrigue amoureuse comme la peste alors qu’il aurait pu s’y raccrocher, par exemple en guérissant son héros de son amnésie. CQFD : ce qu’a oublié monsieur X, c’est l’amour lui-même, l’attachement à un autre être – voilà son handicap, incurable et so British. Sexy Rexy et Rex the Rake Elargi à d’autres films, ce trait devient frappant : le fameux Noblesse oblige avec Alec Guinness (Robert Hamer, 1949) a pour protagoniste un jeune ambitieux qui liquide un par un et de sang-froid tous ses ancêtres afin d’accéder au titre de duc – une violence qui en dit long sur l’impossibilité de toute ascension sociale par d’autres moyens. Sorti la même année qu’Un mari presque fidèle, Tueurs de dames (The Ladykillers, Alexander Mackendrick) fait de même avec une adorable mamie-gâteau qui décime une chambrée de gangsters.
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