Comment Communique La Protest Song Américaine Contemporaine?

Comment Communique La Protest Song Américaine Contemporaine?

Comment communique la protest song américaine contemporaine ? Khaled Chouana To cite this version: Khaled Chouana. Comment communique la protest song américaine contemporaine ? : Les cas de Bruce Springsteen, Ani DiFranco et Public Enemy entre transmission, transgression et contradic- tion. Colloque internationale sur la communication de la chanson populaire, Université de Rouen Normandie, Mont-Saint-Aignan, 15-16 novembre 2018, 2018, Mont-Saint-Aignan, France. hal- 02107782v1 HAL Id: hal-02107782 https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-02107782v1 Submitted on 23 Apr 2019 (v1), last revised 12 Jul 2019 (v2) HAL is a multi-disciplinary open access L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est archive for the deposit and dissemination of sci- destinée au dépôt et à la diffusion de documents entific research documents, whether they are pub- scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, lished or not. 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Complexité et ambivalence de la communication dans « Born in the U.S.A. » (1984) de Bruce Springsteen 3. Ani DiFranco et le 11 Septembre : de la transmission poétique dans « Self Evident » (2002) 4. De la colère et de la transgression dans « Hell No We Ain’t All Right » (2006) des Public Enemy Conclusion 1 Introduction Tout au long de l’histoire des États-Unis, des gens se sont mobilisés, ont affiché leur mécontentement face à des injustices sociales et politiques et sont descendus dans la rue pour exprimer leur colère et revendiquer des droits essentiels. Des mouvements sociaux se sont formés pour défendre le droit de vote des femmes, améliorer les conditions de travail des ouvriers de l’industrie américaine ou encore garantir les droits civiques pour la population africaine-américaine. Des chansons contestataires, appelées aussi des protest songs ont accompagné les combats de ces hommes et de ces femmes. Le leader syndicaliste John L. Lewis disait aux ouvriers manifestants de l’ United Mine Workers : « A singing army is a winning army » pour les encourager dans leurs actions syndicales (Shelly Romalis 1999 : 160). La chanson engagée a cimenté les rangs des troupes de ces mouvements en les accompagnants dans leurs protestations. L’objet de cette présentation est d’examiner les modalités par lesquels la chanson engagée étatsunienne contemporaine communique. L’ Oxford Concise Dictionary of Music précise que les protest songs « voice feelings of protest about some social or political injustice » (Michael Kennedy 2003:1728). Ce sentiment de protestation se transmet à travers des mots qui produisent du sens (Simon Frith 2009:1). Joël July précise que la chanson est une forme orale saisie dans l’instant et qu’elle « obéit à des codes qui lui permettent d’exister en tant que production et répondent à sa nécessité communicationnelle : oralité, simplicité, fluidité, intelligibilité » (2015 :3). Dès lors, je vais examiner le sens transmis par ces formes orales en examinant les chansons engagées de: Bruce Springsteen, Ani DiFranco et le groupe de hip-hop Public Enemy. J’explorerai le système communicationnel des chansons de ces artistes en me focalisant sur leurs auditeurs qui sont leurs récepteurs. En effet, Philip Tagg souligne que pour comprendre le processus de communication d’une chanson, il faut accorder une importance à sa réception, c’est-à-dire son point de vue réceptif ( esthésis ) au lieu d’examiner le mécanisme de sa création et d’analyser son point de vue créatif ( poïésis ) (2012:195). Tout observateur des protest songs américaines peut noter ce trait ambivalent dans ces formes artistiques. D’une part, leurs auteurs véhiculent de la protestation et du mécontentement face à des injustices. D’autre part, ces mêmes auteurs les utilisent comme format musical afin de remporter des succès commerciaux. Dans cette perspective est-il possible de répondre à ces questions suivantes : • Comment communiquent les protest songs de Bruce Springsteen, d’Ani DiFranco et de Public Enemy ? 2 • Quelle est la réception de ces chansons par le public ? Les auditeurs vont-ils se révolter et renverser le pouvoir en place après avoir écouté ces protest songs ? • Ne serait-il pas préférable pour ces artistes de musique populaire de se contenter de divertir leurs fans au lieu de chanter la révolution et la contestation ? Après avoir donné un aperçu théorique de la protest song américaine, je m’attacherai à examiner les modalités par lesquels les chansons engagées de Bruce Springsteen, Ani DiFranco et Public Enemy communiquent. En résumé, j’aborderai les façons de transmission de ces compositions musicales qui sont sorties à des moments-clés de l’histoire contemporaine des États-Unis. 1. Cadre théorique de la chanson engagée américaine On l’appelle chanson engagée, militante, contestataire, protestataire, révolutionnaire ou politique. Certains emploient l’anglicisme protest song qui est d’ailleurs un vocable difficilement traduisible en français. Une protest song s’agit d’une chanson écrite par un artiste afin de protester. Le verbe protester provient du Latin protestari et se compose du préfixe pro qui signifie devant ou en avant et testari qui signifie témoigner. Protester, selon le Dictionnaire Larousse signifie : « s’élever avec force contre quelque chose » ou « exprimer sa violence par des paroles ou des écrits ». Le terme protest song , précise l’ Oxford Concise Dictionary of Music , a jailli du contexte américain des années soixante lorsque des chanteurs se sont opposés à la guerre du Viêt Nam et ont milité pour les droits civiques des africains- américains (1728). En 1968, Serge R. Denisoff définit une chanson militante comme « a socio-political statement designed to create an awareness of social problems and which offers or infers a solution which is viewed as deviant in nature » (26). Cette chanson dénonce, condamne, invite à prendre parti. Elle alerte les consciences qu’il y a un malaise dans la société, mais elle suggère une solution radicale difficile à réaliser. Denisoff fait une distinction entre la chanson engagée ayant une fonction mobilisatrice (« magnetic song of persuasion ») et celle qui a une fonction rhétorique (« rhetorical song of propaganda »). La « magnetic song » est un hymne des syndicats et des mouvements sociaux dont la finalité est de convaincre les auditeurs indécis de la justesse d’une cause et de les recruter comme militants (« We Shall Overcome »). Par contre, la « rhetorical song » alerte les auditeurs sur un événement important dans la société ou condamne une injustice sans pour autant essayer de les recruter comme membres du mouvement. La chanson de Bob Dylan « Hurricane » (1975) en soutien au boxer Rubin Carter et son emprisonnement après un procès bâclé illustre cette fonction rhétorique de la chanson engagée. Une autre définition, simple et claire, des protest songs est donnée par Woody Guthrie qu’il tire de sa propre vie artistique et de son militantisme : « […] songs that try to make things better for us, songs 3 that protest all the things that need protesting against » (Mark Allan Jackson : 2008, 3). Le terme protest song est problématique pour Dorian Lynskey, journaliste au Guardian , car il colle aux artistes l’étiquette de protest singers : « Many artists have seen it as a box in which they might find themselves trapped » (2011: 1 ). Ce refus de recevoir une étiquette de protest singer a motivé le désengagement de Bob Dylan de la communauté folk des années soixante. Des artistes comme Joan Baez et Judy Collins ne se sont jamais considérées comme des protest singers bien qu’elles continuent à militer et à chanter des chansons engagées. Judy Collins a même considéré à la fin des années soixante que protester en chanson revient à frapper sur la tête des gens (Jerry Rodnitsky : 2006 17). Hanif Willis Raqib, poète africain-américain, écrit quant à lui dans un dossier du magazine Harper de février 2018 consacré à la persuasion aux États-Unis que le but d’une protest song « n’est pas de renverser les puissants mais d’élever les gens humbles qui sont exténués et qui continuent de croire qu’il y a une façon d’améliorer leur vie alors que tout semble perdu » (30). La protest song américaine contemporaine est donc une chanson écrite par un auteur compositeur afin de persuader ses auditeurs de la justesse d’une cause ou pour afficher un mécontentement face à une injustice qu’elle soit sociale ou politique. Son but n’est pas de recruter des militants mais de rendre compte ( report ) de la vie des gens humbles tout en alertant les auditeurs sur un sujet d’actualité important. Il serait intéressant dans ce qui suit d’examiner trois chansons engagées qui sont sorties à des moments importants de l’histoire contemporaine des États-Unis et de voir comment elles communiquent. En premier lieu, j’analyserai quelques aspects communicationnels de « Born in the U.S.A. » de Bruce Springsteen, sortie en 1984 à un moment crucial lorsque le président Ronald Reagan avait tenté de récupérer politiquement la chanson pour sa réélection de 1984. Ensuite, j’examinerai « Self Evident » (2002) d’Ani DiFranco que la chanteuse a composé pour rendre hommage aux victimes des attentats du 11 Septembre 2001. Enfin, la dernière chanson que j’ai choisi d’explorer est « Hell No We Ain’t All Right » (2006) des Public Enemy.

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