Cent Ans De Chanson Française

Cent Ans De Chanson Française

Cent ans de chanson française Chantal Brunschwig Louis-Jean Calvet Jean-Claude Klein . Cent ans de chanson française Éditions du Seuil En couverture : Photo Jean-Pierre Leloir. ISBN 2-02-006000-0 ISBN 2-02-00-2915-4 (lre ÉD., RELIÉ) 9) ÉDITIONS DU SEUIL, 1981 La loi du Il mars 1957 interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction inté- grale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consen- tement de l'auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du Code pénal. Préface à la nouvelle édition de Cent ans de chanson française Lorsque nous avons publié la première édition de Cent ans de chanson française, en 1972, nous étions fortement marqués par une opposition esthétique à ce qu'il était convenu d'appeler la «chanson rive gauche», dont les caractéristiques essentielles étaient la part belle faite au texte («poétique», comme il se devait) et la pauvreté mélodique, harmonique et rythmique. Plus précisément, nous nous inscrivions en faux contre ceux, nombreux alors, qui tenaient ce type de chanson pour le nec plus ultra. De ce jugement découlait, en effet, une attitude que nous estimions réductrice sur le plan du discours critique (tout était jugé en fonction de la valeur poétique du texte) et dangereuse du point de vue esthétique pour la chanson elle- même. Or, au moment où nous préfaçons cette nouvelle édition, il faut bien admettre que cette «chanson rive gauche» est quasiment morte, ou du moins que son importance dans la chanson française s'est énormément réduite. A cette mutation première, il faut en ajouter une autre, que ce livre permet de chiffrer presque mathématiquement : si l'on en juge par le nombre (88) de nouveaux articles que nous avons introduits dans cette édition, la chanson française a produit, en huit ans, beaucoup de jeunes chanteurs et chanteuses. En outre, à travers les fêtes politiques, les festivals (dont le « Printemps de Bourges» n'est qu'un représentant), une nouvelle attitude face à la chanson est apparue ces dernières années, en même temps qu'un intérêt manifeste dans le public, que traduisent certaines émissions de télévision ou de radio. Pour résumer en quelques mots : la chanson n'était pas prise très au sérieux au début des années 70, mais les années 80 semblent devoir lui être fastes. Pas seulement grâce aux nouveaux courants qui sont venus enrichir la chanson française (folk, chanson pour enfants, rock français, émergence des femmes, etc.), mais aussi grâce à un changement d'attitude des médias. Outre notre opposition à la «chanson rive gauche», nous étions aussi, voici huit ans, mus par la volonté de participer à la création d'un discours critique qui prenne en charge la chanson, toute la chanson, avec ses composantes textuelles bien sûr, mais aussi musicales, gestuelles, vocales, orches- trales, etc. Peut-on dire que sur ce point les choses aient évolué et que se soit manifestée une exigence plus grande face à la manière de parler de la chanson ? Notre position est ici mitigée. Certes, un certain nombre de livres ont été publiés qui manifestent un progrès, livres qui d'ailleurs prennent le plus souvent en compte la dimension sociologique de la chanson mais ignorent ses rouages internes. Quant à la critique journalistique, elle n'a pratiquement pas évolué, tant il est vrai que les progrès de l'analyse scientifique mettent longtemps à passer dans le sens commun. Nous nous sommes heurtés nous-mêmes à la diffi- culté d'apporter un vocabulaire adéquat, en particulier pour ce qui concerne la musique, le vocabulaire musical n'étant nul- lement populaire, d'où impossible à faire passer dans un ouvrage destiné au grand public. Cela étant, cette nouvelle édition de Cent ans de chanson française, considérablement remaniée, témoigne à notre sens de la dynamique de la chanson française. On a beaucoup débattu ces dernières années de la santé de cette chanson, qu'elle soit ou non qualifiée de « nouvelle». Qu'en est-il ? Notre sentiment, loin des positions nationalistes ou des partis pris esthétiques, est que, à condition de ne pas valoriser outre mesure l'adjectif française, la chanson française se porte bien. A.B.C. Music-hall, boulevard Poissonnière, Paris (1934-1964). Au moment où le music-hall connaissait une crise due aux progrès du cinéma, Mitty Goldin ouvrit l'A.B.C., ex-théâtre Plaza, et en fit, en très peu de temps, « le » music-hall de Paris, celui qui fait l'événement en matière de chanson. A la base de ce succès, il y a la variété et l'abondance de spectacles très rythmés, avec des tours de chant assez courts, ce qui permettait de remettre à l'affiche, plusieurs fois dans l'année, la même vedette, sans craindre la lassitude du public (Marie Dubas passa ainsi cinq fois à l'A.B.C., en 1935 et 1936); il y a aussi une programma- tion éclectique et d'une rare qualité. Fréhel, Georgius, Édith Piaf, Jean Sablon, Pills et Tabet, parmi d'autres, y connurent des triomphes; Charles Trenet, engagé en 1938 comme n° 2 de la première partie, termina son passage en vedette. Sous l'Occupation, l'A.B.C. accueillit la revue de Gilles Margaritis, Chesterfollies (1941), et tous les grands noms du tour de chant, de Tino Rossi à Léo Marjane. Après la guerre, c'est encore sur la scène du boulevard Poissonnière que s'imposèrent les Compagnons de la chanson, Georges Ulmer, Bourvil, Pata- chou... Associé depuis 1949 à Léon Ledoux (qui reprendra seul la direction en 1955), Mitty Goldin donna alors peu à peu la priorité à l'opérette : la P'tite Lili, avec Eddie Constantine et Edith Piaf, 1951 ; la Route fleurie, qui tiendra l'affiche durant quatre ans, de 1952 à 1956, grâce à la musique de Francis Lopez, à la présence de Georges Guétary et surtout à celle de Bourvil. Mais l'A.B.C., qui avait gagné son pari en 1934, voit revenir à la charge les victimes de la «crise» de 1929 : l'Olympia redevient music-hall en 1954, l'Alhambra prend en 1956 un nouveau départ sous le nom d'Alhambra-Maurice- Chevalier. Et, ironie du sort, la salle qui avait à l'origine su faire échec au cinéma se transforme en 1964 en salle du 7e art. GEORGES ABER Brest, 1932. Auteur. Sorti de l'École supérieure de commerce, il découvre Elvis Presley et, s'étant présenté aux « Numéros 1 de demain» sur Europe 1, est encouragé à faire des adaptations de chansons américaines. Ainsi Manhattan spiritual devient Mes frères, et Down by the riverside Qu'il fait bon vivre par la voix des Compagnons de la chanson. Puis il invente un style débile pour public réputé infantile et qui sera très admiré dans le show business : Ya-ya twist pour Petula Clark, Bang-bang pour Sheila, Da dou ron ron pour Johnny Hallyday. Il va parfois plus loin que l'onomatopée (Noir c'est noir, Je suis seul pour J. Hallyday), et l'on peut même dire que Petite fille de Français moyen est une chanson à message. PATRICK ABRIAL Paris, 1946. Auteur-compositeur-interprète. Débuts promet- teurs avec une chanson, Marie, dont le succès semble l'ef- frayer. Abrial quitte très vite le métier, fait du théâtre (Baal, la première pièce de Brecht, 1974) et ne revient à la chanson qu'en 1976 avec un répertoire un peu baroque (Requiem pour un roi fou, Ludwig van) et des musiques empruntant au rock le plus dur. Sur scène, il s'accompagne à la guitare ou à l'harmonium, jouant, d'une gestuelle évocatrice, de toute une atmosphère vampirique ou démoniaque. Après avoir travaillé avec un ensemble rock (Stratagème Group), il semble s'être orienté vers un travail solitaire, utilisant au maximum les pos- sibilités de la sonorisation moderne (boîte à rythme, chambre d'écho, etc.). Patrick Abrial devrait se retrouver dans les années à venir au cœur de la chanson en marche. ACTUALITÉS Chanson, par. Albert Vidalie, mus. Stéphane Golmann (1950). Sur un rythme à 4 temps, lent et calme (la chanson est construite sur l' «anatole», suite d'accords introduite par le jazz «new- orleans»), on y décrit un monde fait de contrastes criants et d'injustice : les mineurs en grève, l'enfant bleu mourant, tandis que Deux messieurs bien, dans un bar américain, . parlant de chasse et de chien prennent leur whisky du matin. Le premier vers, « le soleil brille, sur la terre et sur les champs », renvoyait aux éternelles apparences trompeuses, celles de Prévert et de son « le soleil brille pour tout le monde, il ne brille pas pour...» (suivait une longue énumération). C'est Yves Montand qui, interprétant la chanson, en fit dans les années 50 un succès important. SALVATORE ADAMO Cosimo (Italie), 1943. Auteur-compositeur-interprète. Son père quitte la Sicile pour travailler dans les mines de Jemmapes (Belgique) en 1947. Le jeune Salvatore sera bilingue franco- italien, et c'est en français qu'il compose ses premières chansons alors qu'il est encore au lycée. A 17 ans, premiers lauriers : il remporte un prix radiophonique. Il gagne la France où il ne tarde pas à avoir un grand succès que vient confirmer son passage à l'Olympia (1965). C'est le coup d'envoi donné à une carrière internationale au cours de laquelle il interprète ses œuvres dans la langue du pays traversé, apprenant ses textes en transcription phonétique sans en comprendre un mot. Il est régulièrement cité au hit-parade, reçoit 3 trophées MIDEM pour 15 disques d'or, etc.

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