2,00 € Première édition. No 10979 JEUDI 8 SEPTEMBRE 2016 www.liberation.fr FESTIVAL AMERICA LAURENT TROUDE Megan Abbott, Marlon P.MATSAS.OPALE.LEEMAGE James, James Ellroy... P.MATSAS.OPALE.LEEMAGE 60 écrivains américains sont à Vincennes pour fêter le 240e anniversaire des Etats-Unis. 6PAGESSPÉCIALES IMPÔTS UN DERN ER GESTE AFP POUR LA ROUTE La baisse promise par François Hollande ne suffira pas pour effacer l’échec de sa politique fiscale menée en faveur des entreprises et aux dépens du pouvoir d’achat et de la croissance. PAGES 2-5 Terrorisme: les bonbonnes Bygmalion : France Télé de Notre-Dame sous pression Après la découverte de bouteilles de gaz par le parquet antiterroriste. La police La direction du groupe public, qui espère dé- numéro d’Envoyé spécial accablant pour l’an- dans une voiture à Paris, près de la cathé- soupçonne une volonté d’entretenir un cli- rouler le tapis rouge à Nicolas Sarkozy pour cien président renvoyé en correctionnelle. De drale, deux personnes ont été placées en mat de peur en France, aucun système de le premier numéro de sa nouvelle émission quoi alimenter la défiance de la rédaction en- garde à vue et une enquête a été ouverte mise à feu n’ayant été retrouvé. PAGE 7 politique, a reporté la retransmission d’un vers son patron, Michel Field. PAGE 8 IMPRIMÉ EN FRANCE / PRINTED IN FRANCE Allemagne 2,50 €, Andorre 2,50 €, Autriche 3,00 €, Belgique 2,00 €, Canada 5,00 $, Danemark 29 Kr, DOM 2,60 €, Espagne 2,50 €, Etats-Unis 5,00 $, Finlande 2,90 €, Grande-Bretagne 2,00 £, Grèce 2,90 €, Irlande 2,60 €, Israël 23 ILS, Italie 2,50 €, Luxembourg 2,00 €, Maroc 20 Dh, Norvège 30 Kr, Pays-Bas 2,50 €, Portugal (cont.) 2,70 €, Slovénie 2,90 €, Suède 27 Kr, Suisse 3,40 FS, TOM 450 CFP, Tunisie 3,00 DT, Zone CFA 2300CFA. 2 u Libération Jeudi 8 Septembre 2016 ÉDITORIAL Par LAURENT JOFFRIN Refonte Faire payer les riches : l’idée est excellente. Mais comme ils ne sont pas assez nombreux pour combler à eux seuls le déficit des budgets publics, il faut aller au-delà. Vers les revenus moyens, ou même, quand il s’agit de fiscalité Impôts indirecte (TVA par exem- ple), prendre dans la poche de tout le monde. Telle est l’infortune politique éprou- vée en 2013 et 2014 par le gouvernement Ayrault: multiplier les annonces de nouveaux impôts, ce qui n’a jamais fait monter une cote de popularité. Et comme les impôts sont ré- currents, la disgrâce s’est poursuivie, même si la deuxième partie du quin- quennat a été émaillée de remises diverses et variées. Le chômage poursuivant son ascension, on a aussi Pari perdu choisi d’aider les entrepri- La fiscalité, matière fétiche –et nages et entreprises, l’Observatoire ses dans l’espoir qu’elles Quelles sont les maudite– du président de la Répu- français des conjonctures économi- embauchent: le décor était blique? Rarement, en effet, un chef ques (l’OFCE) estime, qu’en défini- planté pour un procès en conséquences politiques de l’Etat n’aura autant usé, voire tive, les ponctions fiscales et socia- trahison que la gauche de abusé, de cet outil. Au point d’en les sur les entreprises auront baissé, la gauche s’est évertuée avoir fait la principale source de fi- en fin de quinquennat, de 20 mil- àamplifier.Aujourd’hui, et économiques des choix nancement de sa politique de l’of- liards d’euros par an par rapport les uns proposent d’aban- fre, dans l’espoir de sortir le pays de à2012.Résultat:leurtauxdepré- donner la contrainte de du Président en matière la crise. Sans grand succès, pour lèvements obligatoires atteindra, l’équilibre budgétaire (ou l’instant. Bilan d’un quinquennat en 2017,moins de 16% du PIB. Soit plutôt l’objectif des 3% du fiscale? «Libération» fait de vases communicants entre en- un plus bas depuis au moins dix- PIB de déficit). Est-ce pos- treprises et ménages, mais aussi en- sept ans! Avec cette conséquence, sible quand on supporte le bilan alors que, ce jeudi, tre ménages, pour un résultat qui a qui était l’objectif –réussi– du gou- déjà une dette égale à 100% fini par prendre l’eau. vernement: le taux de marge des du même PIB? Ce sera l’un entreprises françaises aura aug- des débats cruciaux à gau- François Hollande UN CHOIX QUI A DONNÉ menté de 2 points (en pourcentage che. La droite, elle, a trouvé DE L’AIR AUX ENTREPRISES de la valeur ajoutée). Même si un la solution: réduire les im- et Manuel Valls doivent Le grand arbitrage fiscal est arrêté point est aussi lié à la baisse des prix pôts sur la base d’une phi- dès le début du mandat, fin 2012. du pétrole. «Un redressement parti- losophie rigoureusement ficeler la dernière mesure Avec un nouvel objectif, non évoqué culièrement spectaculaire dans le inverse de celle de François pendant la campagne électorale: re- secteur industriel»,relèvel’OFCE. Hollande, c’est-à-dire allé- donner de la compétitivité aux en- ger de manière radicale de réduction d’impôts treprises en abaissant massivement UN CHOIX QUI A PESÉ l’addition acquittée par les leurs prélèvements obligatoires. SUR LES MÉNAGES classes favorisées. Sans du quinquennat. Dans la foulée du rapport Gallois, le Cette politique de l’offre, que le gou- trop préciser comment ce gouvernement Ayrault met alors en vernement a voulu mener de front manque à gagner pour place le CICE (crédit d’impôt com- avec la réduction des déficits pu- l’Etat sera compensé… pétitivité emploi), qui conduit à ac- blics, a néanmoins un coût. Une Planche à billets d’un côté, corder aux entreprises une baisse facture massivement supportée par injustice fiscale manifeste d’impôt sur les sociétés, indexé sur les ménages, en plus des économies de l’autre. Charybde et leur masse salariale (l’équivalent réalisées sur les dépenses publi- Scylla? Pas tout à fait. La Par 1,3 Smic). La mesure, quoi qu’il en de 4% des salaires compris jusqu’à ques. Ces derniers payeront ainsi première solution est LUC PEILLON soit, ne devrait pas dépasser le mil- 2,5 Smic, puis 7% en 2017). Ce qui 35 milliards d’euros d’impôts de moins dure aux défavori- liard d’euros. Et sera loin de com- correspond, à terme et en rythme plus en 2017 qu’au début du quin- sés, la seconde aux nantis. nderniergestepourlesplus penser la hausse massive des prélè- annuel, à une baisse de 20 milliards quennat. Un taux de prélèvements Mais il y a aussi une troi- modestes. Réuni ce jeudi vements (plus de 30 milliards d’euros. S’ensuivra, un an plus tard, obligatoires supérieur à 28%, le plus sième voie: s’accorder en- U matin à l’Elysée, le couple d’euros) subie par les Français de- le pacte de responsabilité, qui mêle haut depuis 2000. Cette hausse, fin sur une véritable re- exécutif doit trancher sur une ul- puis le début du quinquennat. Trop réductions de cotisations patrona- cependant, n’a pas été totalement fonte du système fiscal time baisse de la fiscalité pour les peu, trop tard, cette troisième les (10 milliards) et diminutions aveugle, et a concerné, avant tout, français. Les projets exis- ménages. Selon les Echos,celle-ci baisse de l’impôt sur le revenu, sur- d’impôts (10 milliards). Soit, en fin les plus aisés. Dès son arrivée au tent, les plans sont dans les devrait prendre, comme en 2014, la tout, parviendra difficilement à ef- de mandat, quelque 40 milliards pouvoir, Hollande instaure en effet tiroirs. Encore faut-il pour forme d’une réduction forfaitaire de facer dans les esprits le sentiment d’euros par an de baisse des prélève- des impôts généralistes, comme le cela que la gauche –une l’impôt sur le revenu. Reste à déter- de «ras-le-bol fiscal», qui aura irri- ments pour les entreprises, dans le relèvement de la TVA, mais aussi gauche– gagne les élec- miner le public concerné: le bas du gué le mandat de Hollande. Et qui, cadre de cette politique de l’offre. une fiscalité qui va toucher les plus tions. Pour une fois, il est barème (jusqu’à 1,1 Smic pour une àl’heuredubilan,pourraitpeser Compte tenu des hausses interve- hauts revenus: restauration du ba- nécessaire d’espérer pour personne seule) ou le début de la fortement sur la réélection, ou non, nues en 2012 et 2013, et de certains rème de l’ISF, hausse des droits de entreprendre. • classe moyenne (entre 1,1 et du président sortant. impôts difficiles à classer entre mé- succession, créa- Suite page 4 Libération Jeudi 8 Septembre 2016 www.liberation.fr f facebook.com/liberation t @libe u 3 tre un petit «caillou de plus» sur sa route –tou- François jours plus accidentée– vers 2017. «Mais ce ne Hollande, sera pas une accélération», prévient une pro- àl’Elysée, che, douchant les espoirs de ceux de ses sou- en mars. PHOTO tiens qui aimeraient l’entendre clarifier ses LAURENT TROUDE intentions sans attendre le mois de décembre. L’idéedecediscours,quidevraitdurer «moins d’une heure» selon son entourage, a germé après les attentats du mois de juillet. Face à une droite, Sarkozy en tête, qui a rivalisé dans la surenchère sécuritaire quitte à qualifier la Constitution d’«arguties juridiques», le chef de l’Etat souhaitait affirmer sa vision de la Ré- publique et de l’Etat de droit. Se posant en gardien de l’essentiel. Ses soutiens devaient commencer le travail lors d’un meeting, dix jours plus tôt à Colomiers, mais la démission de Macron a brisé leur élan.