Virus et viroses des poissons Pierre de Kinkelin, Michel Dorson, Abednour Benmansour, Jeannette Castric, Richard Thiéry, Thierry Morin, Ronald P. Hedrick To cite this version: Pierre de Kinkelin, Michel Dorson, Abednour Benmansour, Jeannette Castric, Richard Thiéry, et al.. Virus et viroses des poissons. Santé des poissons, 2018, 10.15454/1.5332127475160718E12. hal- 02790139 HAL Id: hal-02790139 https://hal.inrae.fr/hal-02790139 Submitted on 5 Jun 2020 HAL is a multi-disciplinary open access L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est archive for the deposit and dissemination of sci- destinée au dépôt et à la diffusion de documents entific research documents, whether they are pub- scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, lished or not. The documents may come from émanant des établissements d’enseignement et de teaching and research institutions in France or recherche français ou étrangers, des laboratoires abroad, or from public or private research centers. publics ou privés. Distributed under a Creative Commons Attribution - NonCommercial - NoDerivatives| 4.0 International License 6 Virus et viroses des poissons ______________________________________________________________________ 1. Définition des virus et contexte épidémiologique de l'infection virale Les virus sont des organismes schématiquement constitués d'un seul type d'acide nucléique (ADN ou ARN) enfermé dans des structures particulières dont la plus simple est une coque protéique, la capside (du grec kapsa : petite boîte). L'ensemble comprenant l’acide nucléique et la capside est appelé nucléocapside et constitue la particule virale ou virion chez certaines familles de virus comme celle des birnaviridés à laquelle appartient le virus de la nécrose pancréatique infectieuse (NPI). Chez d’autres familles comme les rhabdoviridés (virus de la septicémie hémorragique virale [SHV] ou de la nécrose hématopoïétique infectieuse [NHI] par exemple), la nucléocapside est entourée d’une enveloppe lipidique dérivée de la cellule ayant donné naissance au virion. Cette enveloppe renferme des protéines virales glycosylées par la cellule au cours de l’édification du virion. En résumé, le virion est donc une nucléocapside nue ou enveloppée représentant le virus en tant qu’individu. Les virus n'ont ni métabolisme intermédiaire, ni ARN de transfert ou ARN ribosomal et pour se multiplier, ils mettent la cellule infectée dans un état de « subversion métabolique » en lui imposant les instructions de leur propre génome. Ils la font ainsi synthétiser à leur profit les éléments nécessaires à leur réplication, se comportant par là en parasites intracellulaires absolus. Le devenir d'un virus est donc lié à l'existence d'un hôte vivant. Face à leur hôte, les virus exercent leurs effets avec une relativité qui est caractéristique de tous les événements biologiques. La maladie ou plutôt le devenir de l’infection virale, repose sur le concept d'une triple assise virus – poisson – milieu, qui sera sous- jacente au présent chapitre. Les connaissances actuelles permettent d’exploiter ce « tripode de la pathologie » pour réduire le risque d'expression de cette dernière. Appartenant au domaine du vivant, les virus présentent une variabilité qui favorise l'émergence d'individualités nouvelles face aux pressions de sélection du moment, assurant ainsi la survie de l'espèce virale. Il peut néanmoins s’écouler de nombreuses années entre la survenue d’une variation et l’observation de ses conséquences pathologiques. 2. Méthodes d'étude Succédant aux études biophysiques et biochimiques des acides nucléiques et des protéines, les méthodes de génie génétique ont ouvert la porte à la biologie moléculaire des virus, soutenue par l'accès à leur génome. Toute caractérisation de virus comporte désormais une composante génotypique en complément des analyses phénotypiques qui ont longtemps été les seules disponibles. Les méthodes utilisées ne sauraient être développées ici mais seulement passées en revue dans le but d’expliquer qu’avant d’exposer les propriétés d’un virus et de les utiliser pour le combattre, beaucoup d'étapes associant des compétences diverses sont nécessaires. 2.1. Isolement et production des virus La culture cellulaire est la méthode de référence (« gold standard ») pour l'isolement et la production des virus, du fait de leur strict parasitisme intracellulaire. Elle comporte trois catégories : les cultures primaires ou de première explantation, les cellules diploïdes et les lignées continues dont le nombre dépasse actuellement 150 (voir : GSP, chapitre 21, p. 159-165 ; OIE, 2016). La possibilité de les cultiver hors de l'animal facilite la plupart des études effectuées sur les virus. Toutefois, on peut rencontrer des virus dits non cultivables, ce qui signifie que le système cellulaire sensible n'a pas encore été identifié. Dans ce cas, c'est l'organisme hôte qui fournit le virus après son infection naturelle ou expérimentale. La culture cellulaire donne un moyen pratique et d'utilisation permanente en virologie pour quantifier le virus sous forme d'unité infectante: l'unité formant plage (ufp). L'ufp correspond à l’effet produit par une particule virale sur une monocouche de cellules en culture, c'est-à-dire à un foyer d’infection, révélé par la lyse des cellules (formation d’un « trou » appelé plage dans la couche cellulaire) ou par une technique appropriée (immunofluorescence, immunoenzymologie). Le dénombrement des foyers donne le titre du virus en fonction du volume et de la dilution de l’inoculum utilisés. On peut ainsi suivre la croissance virale dans les cultures ou les tissus infectés et apprécier les variations survenant dans la viabilité de quantités de virus connues soumises à diverses épreuves susceptibles de l'affecter (réactions immunologiques, agents d'inactivation). 2.2. Purification des virus La première phase est l’extraction du virus à partir du système qui l’a produit, c'est-à- dire le milieu de culture des cellules infectées ou les tissus infectés qu'il faut broyer. La suspension virale qui en résulte doit être d'abord clarifiée par centrifugation à faible accélération (4000 x g). Ensuite, le virus est concentré par précipitation, par les sels ou le polyéthylène glycol, par filtration sur gel ou par chromatographie. Après remise en suspension et clarification éventuelle, la purification proprement dite est réalisée par ultracentrifugation en gradient de vélocité ou de densité. Plusieurs étapes successives d'ultracentrifugation peuvent être requises pour parfaire la purification. 1 de Kinkelin P., Michel C., Morand M., Bernardet J-F., Castric J., Morin T. 1999. Le diagnostic de laboratoire. In : Gestion de la santé des poissons (C. Michel coord.), collection Savoir faire, éditions Quae, Versailles, p. 143-205. 2 2.3. Morphologie des particules virales et cytopathologie Les études morphologiques sont effectuées en microscopie électronique. Les virions purifiés sont examinés après coloration négative ou positive par des sels de métaux lourds qui révèlent leur forme générale et des éléments de leur structure. Les cultures cellulaires et les tissus infectés font l'objet d'une préparation respectant la séquence : fixation, déshydratation, inclusion, coupes ultrafines et techniques d'ombrage avant l'observation. La microscopie électronique des cellules infectées est une méthode de choix pour suivre le cycle de l'infection en visualisant la nature des cellules infectées, l'édification des virions, et le type de lésions induites, fournissant ainsi des informations pathogéniques. 2.4. Étude des constituants viraux Les constituants viraux doivent d'abord être extraits des virions. L'extraction de l'acide nucléique se fait en général par le phénol, après désagrégation du virion par des enzymes protéolytiques ou des détergents comme le laurylsulfate de sodium. Les protéines dénaturées se retrouvent dans le phénol tandis que l'acide nucléique passe dans la phase aqueuse. Les protéines sont extraites grâce à l'action d'agents dissociants comme le laurylsulfate de sodium, combinée à celle de la chaleur. L'étude des protéines L'étude des protéines virales débute généralement par l'électrophorèse sous diverses conditions, et notamment en gel de polyacrylamide, qui apporte des données qualitatives et quantitatives sur la composition protéique du virus. Combinée à un transfert du gel sur une membrane de nitrocellulose, la technique permet la révélation immunologique des protéines (technique du "Western blot") et partant, l'étude de leur antigénicité. Cette dernière implique la possibilité, d'une part de révéler une réponse immunitaire chez un hôte infecté (sérologie) et de l'autre, d'immuniser des animaux (souris, lapin, chèvre) pour préparer des anticorps destinés à la détection du virus ou de ses composants à des fins de diagnostic ou de recherche. Ces réactifs sont précieux, par exemple pour révéler les colonies bactériennes porteuses d’un gène viral cloné qui s’exprime par la synthèse d'une protéine. La biologie moléculaire des virus permet de faire le lien entre l'acide nucléique et les protéines, dont la séquence permet de déduire des propriétés que l'électrophorèse ne pouvait que suggérer. L'obtention de cristaux de protéines purifiées permet l’élucidation de leurs structures par la méthode de diffraction des rayons X. On peut ainsi reconstituer l'organisation spatiale des molécules pour comprendre leurs interactions dans l'assemblage des virions ou avec la surface de la cellule hôte, faisant ainsi progresser la connaissance de la pathogénie de l'infection. Les grandes
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